Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Rechercher : Roland Vincent

La dynastie des Montégudet, inspirés de père en fils (1)

     On a tendance à croire, possédé que l'on est par le dogme de l'art brut, que les créateurs d'environnements populaires sont le plus souvent des individualistes forcenés. Cela n'est pas toujours vrai. Et même, lorsqu'il s'agit des inspirés du bord des routes spécialement, cela se révèle souvent faux. Mais peut-être aussi ne faut-il pas toujours associer l'art brut aux environnements spontanés.

     Il y a ainsi le cas des deux Montégudet, le père et le fils, dans la Creuse, département qui s'enorgueillit de posséder par ailleurs le plus ancien environnement spontané qui soit parvenu jusqu'à nous, à savoir le village sculpté de Masgot du tailleur de pierre François Michaud (commune de Fransèches).

Carte postale,L'étang fleuri, éd. Cap-Théojac, années 1970.jpg
Une des quatre cartes postales ayant été éditées pour assurer la publicité de l'Etang Fleuri, Le Renard et le Bouc (avec un panonceau indiquant "qu'il est interdit aux moins de treize ans de regarder" le membre du bouc qu'une ouverture dessous la margelle dévoile clairement, membre qui fut "censuré" radicalement dans la suite des temps par l'épouse de son fils...), la chèvre de M. Seguin, Adam et Eve... (Années 1970, éd. Cap-Théojac)

     J'ai évoqué en titre une "dynastie", et d'accord c'est un peu exagéré, sauf à penser que nos créateurs retraités, issus pour leur majorité des classes populaires, lorsqu'ils créent, se fabriquent une nouvelle souveraineté, comme s'ils étaient devenus ce que j'ai appelé ailleurs "les rois d'eux-mêmes".

Carte postale, L'Etang fleuri, éd. Cap-Théojac, années 1970.jpg
Autre carte postale de l'Etang Fleuri, Le Renard et la Cigogne, Le Lion et le Rat, le monstre du Loch Ness, Ludovic avec la chèvre de Picasso... (Années 1970, éd. Cap-Théojac)

     Il y eut d'abord le père, Ludovic, qui entre 1967 et 1981 créa autour d'un étang une sorte de parc de loisirs bricolé avec les moyens du bord. Ludovic Montégudet devant sa buvette, document famille Montégudet, années 1970.jpg Il sema sur ses rives une multitude de petites saynètes représentant, entre autres, les Fables de La Fontaine, la Chèvre de Picasso, Barbe-Bleue, Roland à Roncevaux (ce dernier sujet peu banal chez nos autodidactes, en même temps en accord avec les souvenirs d'école!)... Ancien maire du bourg de Lépinas, retraité, c'était l'idée qu'il avait eu pour maintenir du lien social à la fois dans sa commune et pour lui-même aussi, parce que la retraite l'avait retranché de ses concitoyens. Il sculptait le bois et avait installé ses sculptures en plein air, à côté d'une buvette, ne dédaignant pas les galéjades parfois à la limite de la gaudriole. Ludovic Montégudet,les cornes, ancien Etang Fleuri de Lépinas, document famille Montégudet,années 1970.jpg

Les couples d'amoureux venaient parfois se cacher au bord de "l'étang fleuri" et l'ancien maire en était fier. Le photographe François-Xavier Bouchart vint chez lui prendre des clichés, ainsi que Pierre Bonte, le spécialiste des gens-ordinaires-qui-ont-tous-un-grain-de-génie... Cela le fit connaître des amateurs de création populaire autodidacte (deux pages lui sont consacrées dans le catalogue de l'exposition Les Singuliers de l'Art au musée d'art moderne de la Ville de Paris, 1978 ; à quand la prochaine exposition sur le même thème pour faire le point et la mise à jour?).

Ludovic Montégudet avec Le Lion et le Rat,document famille Montégudet, années 1970.jpg
Ludovic Montégudet devant la saynète Le Lion et le Rat (document famille Montégudet, années 1970)

     Ludovic se faisait parfois aider dans ses sculptures par son fils René, qui outre quelques statues (de personnages), s'occupait surtout de mettre en couleur les statues de son père, ainsi que de les réparer l'hiver (car, comme René et son épouse le soulignent, les statues étant en bois souffraient terriblement d'être à l'air libre).

Saynète sculptée par Ludovic Montégudet,le Bouc et le Renard, photo document famille Montégudet, années 1970.jpg
Détail de la saynète Le Renard et le Bouc, avec le panonceau "Interdit..."

     Fin de partie en 1981. Ludovic décède. René et Yvette, sa femme, constatant la détérioration accrue et le vandalisme qui affectent les oeuvres, décident de les retirer des rives de l'étang et de les mettre à l'abri dans une grange.

Grange où furent rangées un temps les oeuvres de l'Etang Fleuri de Ludovic Montégudet, photo Bruno Montpied, 1991.jpg
La grange où étaient stockées les statues animalières de Ludovic Montégudet, telle qu'elle était en 1991 (photo Bruno Montpied)

     C'est une dizaine d'années après que, curieux de savoir s'il restait quelque chose des statues insolites de Ludovic Montégudet à Lépinas, je viens en Creuse où, avec l'aide du sculpteur Jean Estaque, grand amateur d'art et de culture populaires par ailleurs (nous nous étions rencontrés via Michelle Estaque et le projet de livre sur Michaud), nous partons visiter les héritiers de Ludovic, à savoir donc René et son épouse...

Lire la suite

02/08/2009 | Lien permanent

Surréalistes et situationnistes, surréalistes anglais, deux livres sur ces questions

    Je reproduis sans difficulté ci-dessous deux annonces récemment arrivées dans ma boîte aux mails (qui n'a jamais-z-aux-mails...), c'est en provenance des Editions Dilecta, basées à Paris dans le 12e arrondissement, et c'est répercuté par le site Infosurr (site internet en reconstruction actuellement):
"Surréalistes et situationnistes, vies parallèles
Par Jérôme Duwa

La rencontre d'André Breton et de Guy Debord n'a jamais eu lieu. Selon Debord, il allait de soi que l'un excluait l'autre : Breton et le surréalisme appartenaient au passé, celui-la même que la Seconde Guerre mondiale venait d'engloutir, en sorte que tout était à recommencer.
Ce jugement expéditif à  l'égard du surréalisme méritait d'être reconsidéré dans un esprit étranger à  tout réglement de compte. Divergence fondamentale ou intime parenté occultée par des rivalités de façade ? Une histoire détaillée des relations mouvementées entre surréalistes de Paris et de Bruxelles avec Guy Debord et ses amis restait à  écrire pour comprendre, notamment, un des ressorts de la construction de l'identité situationniste.
Cet essai, que complète une anthologie composée de tracts, d'une dizaine d'illustrations et des textes de Jean-Louis Bédouin, André Breton, Claude Courtot, Adrien Dax, Guy Debord, Tom Gutt, Simon Hantaï, Gérard Legrand, Marcel Marien, Benjamin Péret, José Pierre, Jean Schuster, Jan Strijbosch, Raoul Vaneigem et Joseph Wolman, permet de remonter le cours tumultueux de ces vies parallèles.
Professeur de philosophie, docteur en histoire de l'art, Jérôme Duwa se consacre aux avant-gardes du XXe siècle et a publié des études sur les surréalistes et les situationnistes dans différentes revues, dont Archives et documents situationnistes et Pleine marge. Il collabore régulièrement à Infosurr, CCP et à  La Revue des revues. Chercheur associé à  l'IMEC, il travaille sur les revues et les fonds d'archives surréalistes conservés par cette institution et prépare pour 2008 une exposition et une publication sur Mai 68.
240 pp., 14x20 cm., 26 euros, parution février 2008.
5107c6c3ded54abe07b1c8a65a4e0c2f.jpg                                    985e443874f38055c90119ac03006a88.jpg

 
Au treizième coup de minuit
"Anthologie du surréalisme en Angleterre"
Editée, traduite et préfacée par Michel Remy
Couverture de Desmond Morris
 
 
Méconnue car inédite et difficile d'accès, victime d'une époque hantée par la Seconde Guerre mondiale, le surréalisme anglais n'en est pas moins riche, fébrile et authentique. Dans son refus du définitif et du cohérent, dans son accueil de l'unique et de l'évanescent, il témoigne, à  partir de 1936, de la persistance de "l'esprit surréaliste" à la définition duquel il participe pleinement, avec une incontestable vigueur. Pour témoigner de cette grande richesse théorique et créatrice du surréalisme anglais, cette anthologie comprend les manifestes et déclarations collectives du groupe surréaliste en Angleterre, et quelques deux cents pages de poèmes et textes (1935-1980) de Roland Penrose, David Gascoyne, Emmy Bridgewater, Ithell Colquhoun, Simon Watson Taylor, Humphrey Jennings, Toni del Renzio et bien d'autres encore. Au treizième coup de minuit rassemble de surcroît, en plus d'un dictionnaire en fin d'ouvrage, un choix significatif d'une trentaine de dessins des artistes surréalistes anglais, notamment Desmond Morris - connu mondialement comme Ethologue et auteur du Singe nu, mais aussi membre du groupe surréaliste en Angleterre dès 1949 - dont une illustration est reproduite en couverture de l'ouvrage.
Michel Remy, spécialiste d'art et de littérature modernes et contemporains britanniques, est considéré comme un des meilleurs connaisseurs du surréalisme en Angleterre. Fondateur des Editions Marges et de la revue Flagrant Délit, il est l'auteur d'ouvrages sur David Gascoyne (David Gascoyne ou l'Urgence de l'inexprimé, Nancy, 1985), Desmond Morris (L'Univers surréaliste de Desmond Morris, Paris-Londres, 1991), de la première étude sur le surréalisme anglais en peinture, écriture, sculpture, cinéma et politique (Surrealism in Britain, 1999) et l'un des quatre auteurs de l'anthologie bilingue de la poésie anglaise (Paris, Gallimard, La Pléiade, 2005). Il enseigne actuellement à  l'université de Nice.
312 pp., 14x20 cm., 24 euros, parution février 2008."
    Pour voir les couvertures de ces deux livres à paraître aux éditions Dilecta, suivez ce lien...
  
   Une petite remarque à propos du livre de Michel Remy, cependant. Pourquoi, quand on veut traiter du surréalisme anglais, ne pas citer, dans l'annonce du livre qu'on lui consacre, deux personnalités aussi importantes pour le surréalisme en Angleterre que l'ont été Jacques-Bernard Brunius et E.L.T. (Edouard Léon Théodore) Mesens?
  

Lire la suite

06/12/2007 | Lien permanent

Gilbert Peyre, quand les objets s'amusent sans les hommes...

       La nouvelle grande exposition d'automne de la Halle Saint-Pierre à Paris s'est ouverte récemment sur le théâtre d'objets et les automates de Gilbert Peyre, un ancien artiste de Montmartre qui avait autrefois son atelier non loin de la Halle à Montmartre, rue Durantin. Les deux niveaux de la Halle lui sont consacrés, et pour une fois, il n'y a pas de différence de qualité d'un étage à l'autre (c'est parfois en effet meilleur en bas, ou supposé tel...).

Danseuse-du-ventre,-1985,-électromécanique.jpg

Gilbert Peyre, Danseuse du ventre, électromécanique, 1985, ph. Bruno Montpied, 2016

 

      Je suis resté un peu sur ma faim, je dois dire, en visitant en avant-première l'exposition. Serai-je devenu trop blasé? Bien sûr, il doit y avoir de cela, un béotien découvrant pour la première fois cet ensemble d'œuvres d'art automatisées (ou pas), fait de bouts de fils de fer et d'autres matériaux récupérés, serait bien entendu tout ébaubi. Ah, on peut faire ça, se dirait-il, émerveillé ? Ce serait oublier les coups d'essai préalables, le cirque de Calder  des années 1930-1950 (merveille de poésie précaire qu'ont restituée deux cinéastes dont Jean Painlevé, déjà cité sur ce blog)DVDCirque Calder.jpg, les œuvres des années 1970 de Roland Roure, ou bien le manège de Petit-Pierre sauvegardé à la Fabuloserie. Si on peut trouver une beauté étrange aux sculptures "électromécaniques ou électropneumatiques" de Gilbert Peyre, il reste qu'elles prennent avant tout plus de charme lorsqu'elles s'animent. Même si toutes ne relèvent pas d'une inspiration égale. Certaines ne s'élèvent pas au-delà d'une plaisanterie de type potache, comme celles qui s'intitule "Aquarium" (1990) et "Nounours pisseur" (2010-2016). D'autres font dans le style fantastique, du type "ange exterminateur" de Bunuel (où une main se déplaçait toute seule), voir "Le  bras" de 2010-2016.

image d'aquarium.JPG

Détail de "l'Aquarium" de Gilbert Peyre ; les boîtes de sardines se déplacent comme poissons rouges dans un aquarium... Oui, bon... ; ph. B.M.

 

Nounours pisseur.JPG

LE BRAS.JPG

Gilbert Peyre, Le Bras ;  un bras détaché se déplace seul... Avec une belle main comme en cire... ; ph. B.M.

 

      Le meilleur dans l'exposition est plutôt à rechercher du côté des théâtres d'objets, ou de ce que l'artiste appelle une "SculpturOpéra". Là, on va beaucoup plus loin et l'on atteint à quelque chose de profond et, disons-le, d'inquiétant. Car cette entreprise, où Peyre déchaîne les objets, les poupées décapitées, les armoires batttantes, les lapins naturalisés en folie (réminiscence du lapin en retard d'Alice au Pays des Merveilles sans doute?), paraît prophétiser un univers proche où les objets auront pris le pouvoir, une fois peut-être que l'homme aura achevé de leur greffer des cerveaux électroniques aux performances d'intelligence plus sophistiquées que celles qu'il peut se permettre lui-même. Les théories transhumanistes venues d'Amérique semblent le confirmer : des robots perfectionnés vont venir, remplaçant les hommes. N'ayant plus d'affects ni d'émotions, n'ayant plus besoin d'air, de nourriture, mais juste d'énergie, leur intelligence leur permettant de veiller à leur maintenance éternelle, ils pourront aller coloniser les étoiles, une fusée plantée dans le derrière... Et nous abandonner à notre pauvre boulet de chair pantelante...

Poupée-dans-un-lit.jpg

Gilbert Peyre, une poupée digne de Chucky? (Elle n'était pas animée lors de mon passage), ph. B.M.

 

      C'est ce à quoi je méditais en contemplant les extraits de films projetés dans une salle du rez-de-chaussée, comme "Le piano" (réalisation Eric Garreau, 2011 ; le film montrait "La petite forme", une première étape de la sculpturOpéra, "Avant le combat - version originale"), ou l'animation au premier étage de la sculpturOpéra intitulée "Cupidon propriétaire de l'immeuble situé sur l'Enfer et le Paradis", qui était une présentation réduite par rapport à la représentation intégrale (de 60 minutes) qui a tourné en divers lieux théâtraux, avec des acteurs incorporés à des déguisements animés, jouant des rôles paraissant ridiculiser l'homme justement (voir ci-dessous un bout de film visible à son propos sur YouTube).

     

 

"Cupidon", SculpturOpéra de Gilbert Peyre, Vidéo 3'43, Bâle, Septembre 2011

 

       L'intelligence artificielle triomphante, les anti-humanistes (je me demande parfois si la Halle St-Pierre ne leur fait pas trop souvent les yeux doux) pavoiseront, leur homme vu comme un super-prédateur qui fait tout mal sera sur le point d'être rangé aux poubelles de l'histoire (qui sera pour le coup bien achevée, puisque les robots auront-ils encore besoin d'une histoire, en dehors d'un simple archivage de faits bruts?). Le singe perfectionné sera enfin proclamé roi.


Gilbert Peyre, Singe...

 

Expo "Gilbert Peyre, l'électromécanomaniaque", du 16 septembre 2016 au 26 février 2017 (c'est long...), Halle Saint-Pierre, 2 rue Ronsard, 75018 Paris.

Lire la suite

03/10/2016 | Lien permanent

Réhabiliter l'art naïf de qualité, trier le mauvais grain de l'ivraie...

       Cela fait déjà un certain temps que je milite pour une revalorisation et un ré-éclairage de la peinture naïve, dont, à mon avis, il faudrait retrancher beaucoup d'artistes trop mièvres, trop systématiques (les petites foules multicolores à la brésilienne, les chats, les natures mortes sans relief, les "cucuteries" comme dit le collectionneur Yankel...), qui ont contribué à dévaluer l'art naïf de qualité.
 

L-A Déchelette, la restauration des Saints.jpg

Louis-Auguste Déchelette

 
      Il faudrait réorienter les projecteurs au contraire sur les insolites (Dechelette), les frustes (Louis Roy), les rugueux (Ghizzardi ; voir ci-contre son autoportrait), Ghizzardi-Autoportrait.jpgles oniriques (Skurjeni, Trouillard, Beranek, certains Haïtiens), les cas-limites que l'on confond avec l'art brut (Séraphine, Emerik Fejes, Ilija Bosilj, Hirshfield, Trillhaase, Bödeker...), sans parler des anonymes insolites et talentueux qui sont présents en maintes collections , etc.
 

Autoportrait assis sur une chaise, ph Musée de thurgovie.jpg

Erich Bödeker, Autoportrait assis sur une chaise, musée de Thurgovie, Suisse.

ErichBoedekerAmoureud'ang1.jpg

Erich Bödeker, groupe, photo transmise par les Amoureux d'Angélique.

ErichBoedekerAmoureud'ang4.jpg

Erich Bödeker, Famille royale (?), photot transmise par les Amoureux d'Angélique.

 

art naïf,

Bruno Bruno, Romantica, huile sur toile, 65 x 50 cm, Lyon, 1973, ph. et coll. Bruno Montpied ; ce tableau a été chiné à l'origine par Jean-Louis Cerisier qui a eu la gentillesse de me le céder.

art naïf,

L. Plé, sans titre (un homme en train de se noyer), huile sur toile, 22,5 x 33,5 cm, sd (milieu XIXe siècle ?), ph. et coll. B.M.

 
       Je parle ci-dessus de "cas-limites". Il y a en effet, de temps à autre, de la part des défenseurs de l'art brut, régulièrement des tentatives de récupération de nombreux artistes ou créateurs qui avaient été jusqu'à une époque classés dans l'art naïf (Séraphine, Scottie Wilson, Joseph Moindre (voir ci-contre les deux tableaux de paysage photographiés par moi à l'Atelier-Musée Fernand Michel de Montpellier), Boix-Vives, Wittlich...), avant que l'art brut développe sa notoriété. Auguste Moindre (2).jpg
     Il serait temps d'adopter la démarche contraire, et de rendre à César ce qui appartient à César.
       Chez les meilleurs Naïfs, à ne pas confondre donc avec l'art mièvre, il y a aussi de l'onirisme et de la distorsion qui assurent un charme incomparable à leurs œuvres où l'imaginaire vient fêter des noces inédites avec le spectacle du motif extérieur. Georges Schmits, en Belgique, s'inspirant de Georges-Henri Luquet, appelait cela du "réalisme intellectuel". Certes on est dans ce que l'on appelle "la peinture de genre" (portraits, paysages, nus, natures mortes), et alors? Ce qu'il y a de passionnant avec ces peintres, qui certes ne dédaignaient pas de se confronter à l'art académique (Rousseau rêvait de s'égaler aux peintres "pompiers", genre Bouguereau et Gérôme), c'est qu'ils sont débordés par des pulsions qui laissent s'exprimer l'inconscient de leur relation au monde extérieur. Le défaut de leur technique, auquel ils remédient par un bricolage personnel, est la première "trahison" de cet inconscient qui suinte... Dubuffet, en repoussant l'art naïf, essentiellement je trouve par décision stratégique – il voulait se distinguer à tout prix d'Anatole Jakovsky qui avait déjà constitué un corpus vaste et varié d'oeuvres d'autodidactes, à l'instar d'autres critiques d'art internationaux (je pense à Otto Bihalji-Merin, Albert Dasnoy, Thomas Grochowiak...) –, a commis une erreur de nature régressive, contrairement aux surréalistes, André Breton en tête, qui admiraient sans séparation auteurs d'art brut ou d'art naïf. Les tentatives de déshabillage de Paul pour donner à Jacques, auxquelles les successeurs de Dubuffet se sont livrés ces dernières années en expurgeant l'art naïf de certains de ses éléments talentueux (Séraphine en est emblématique) ont essayé de corriger et d'effacer l'erreur de Dubuffet. Mais en masquant, ce faisant, la valeur de l'art naïf lui-même.

Abram Topor, paysage, coll Guillaume Z..jpg

Abram Topor, un paysage, collection privée région parisienne (Abram était le père de Roland Topor), photo B. M.

E. Daider (dec par Cl Massé), le Grand Bal, bas-relief en plâtre peint, don famille Michel,1970 (2).jpg

E. Daider, Le Grand bal, bas-relief en plâtre peint, oeuvre découverte par Claude Massé, don famille Michel, Atelier-Musée Fernand Michel,1970 ; ph. B.M. ; cet auteur est inconnu, ce me semble dans le corpus connu de l'art naïf, du moins dans celui qui a été circonscrit par les livres de Jakovsky ou de Bihalji-Merin ; de celui-ci, on consultera toujours avec fruit, pour se faire une idée des plus qualitatives et variées, son monumental ouvrage, rédigé en compagnie de Nebojša-Bato Tomašević, L'Art naïf, Encyclopédie mondiale, paru chez Edita en 1984.

Lire la suite

Qui est aveugle?

     That is the question, en effet. Posée par le Centre d'Etude de l'Expression dans  les caves voûtées du musée Singer-Polignac, situé dans l'enceinte de l'Hôpital Sainte-Anne (on peut y entrer et en sortir, pas d'inquiétude...). Et ce du 17 septembre prochain jusqu'au 20 novembre (début de l'expo pour la journée du patrimoine le jeudi 15). C'est visiblement une expo de confrontations entre diverses appellations plus ou moins contrôlées.

 

Musée-Singer-Polignac,-déta.jpg

Fresque de Le Gouïc, escalier d'accès au musée Singer-Polignac, ph.Bruno Montpied, 2009

      Voici la liste des créateurs ou artistes (on répartira ces deux termes en fonction du degré de professionalisation de chacun) exposés à cette occasion:

Albino Braz, Noëlle Defages, Madeleine Dujardin, Even, Anna Hackel, André Le Hien, Alexandre Nelidoff, Neveu, Fernando Pau, Nicholas Sarley, Charles Schley, Joseph Barbiero, Aristide Cailliaud, Patrick Chapelière, Jill Gallieni, Vincent Germani, Charles Lanert, Frédéric Léglise, Michel Nedjar, Jean-Christophe Philippi, Abdelkader Rifi ; ainsi que les artistes du Créative Growth (USA) : Dwight Mackintosh, Donald Mitchell, William Tyler, Aurie Ramirez.

      Albino Braz, brésilien, j'admire ses femmes nues aux chevelures hirsutes, aux corps striés comme si c'était des femmes velues et sauvages.Albino-Braz,-Centre-d'etude.jpg Beaucoup d'autres noms de cette liste ne m'évoquent rien par contre. Charles Schley figure dans les créateurs mentionnés par Anne-Marie Dubois dans ses livres sur la collection du Centre d'Etude de l'Expression (Braz aussi). Joseph Barbiero, j'en ai causé il n'y a pas longtemps ici. Aristide Caillaud est connu depuis des lustres comme un artiste original parfois rangé dans les Naïfs (épithète non infâmante pour moi), ou parmi les singuliers naïfs...Couv catal Ar.Caillaud.gif Patrick Chapelière, je viens de le mentionner comme vu récemment au musée des Arts Buissonniers en Aveyron, son oeuvre hésite entre naïvisme et poésie brute, quoique je pencherai plutôt pour la première catégorie (ci-dessous une repro d'un œuvre alliant évocations d'éléphant et de poignard, coll. privée).Patrick-Chapelière,-ss-titr.jpg Charles Lanert (1902-1995) est un cas curieux d'artiste qui n'a jamais réussi à se faire connaître. Ancien radiologue au service de l'armée de terre (ça me rappelle Gabritschewsky qui avait été biologiste), il produisit beaucoup de peintures qui ressemblent à des réminiscences de vues microscopiques genre cellulaires.
     Son oeuvre qu'on peut découvrir sur le net surtout grâce  une vidéo sur Youtube paraît imprégnée de références à divers courants de l'art moderne, et a priori ne ressemblerait pas à quelque chose qu'on peut ranger dans l'art brut, pas plus qu'une œuvre de Michaux, de Wols ou de Gorki en tout cas. Mais elle peut par contre contribuer à propager la confusion des genres, comme c'est la mode actuellement...

 

Nedjar40502.jpg

© Michel Nedjar, 2001

J-C.jpg

Jean-Christophe Philippi, coll.privée, ph.BM 2008 (ces deux peintures ne renvoient pas à ce qui est montré à l'expo, elles sont nettement antérieures)

 

   Michel Nedjar se retrouve embarqué dans cette réunion, ainsi que Jean-Christophe Philippi, tous deux excellents artistes singuliers entretenant des rapports esthétiques certains. Abdelkader Rifi est plus rare ici. Car avant tout créateur d'un environnement en mosaïque à Gagny, il a aussi laissé (il est mort en 2005) des oeuvres transportables qu'on ne voit jamais, c'est peut-être ce qui m'intrigue personnellement le plus dans cette expo. Les créateurs du Creative Growth Center sont eux beaucoup moins inconnus, si l'on se souvient, par exemple, des expos montées à Paris dans l'ex-Galerie Impaire de la rue Lancry dans le Xe ardt.

 

Abdelkader Rifi, composition florale, 59x80, vente Tajan 2008.jpg

Abdelkader Rifi, composition florale, 59x80cm, œuvre présente à une vente chez Tajan en 2008

 

   

Lire la suite

Festival Hors-Champ des arts singuliers au cinéma (documentaire seulement, hélas...): le retour!

     L'année dernière, ce sympathique festival organisé par l'Association Hors-Champ sur un jour et demi avait été annulé pour cause de virus.

Programme 24e festival On n'est pas des gueux,final, 2021.JPG

A souligner dans ce programme qui sera diffusé les 4 et 5 juin dans la salle L'Artistique, 27 boulevard Dubouchage à Nice, les films consacrés à Lee Godie, à Italo Farinelli (nouvel environnement populaire spontané que je ne connaissais pas), ou les films de Lespinasse sur La Pommeraie et Pépé Vignes.. Pour le reste, je botte en touche, soit parce que je ne connais pas, soit parce que je trouve les films assez quelconques.

 

     Il ne s'en est pas complètement remis, puisque cette année, il revient quand même, mais en petite forme, avec un programme allégé (au point de vue variété et originalité), et dans un nouveau lieu d'hébergement, la salle de l'Artistique – l'auditorium du MAMAC à Nice n'étant pas disponible, cause Covid, et l'Hôtel Impérial, le délicieux Hôtel Impérial ayant, trois fois hélas!, fermé ses portes, apparemment définitivement... condamné par le Covid et ses répercussions économiques.Clé de la chambre 25 à Nice.jpg

     On se souviendra avec une nostalgie désormais poignante des rencontres que les invités à ce festival (dont j'ai été) eurent à maintes occasions le bonheur de vivre, dans la salle de séjour très cinématographique de ce vieil Hôtel Impérial, avec ses vases, ses bouquets de fleurs, ses tableaux, ses murs couverts de tapisseries, ses tentures, ses meubles baroques, ses poutres peintes, ses fauteuils en cuir – où parfois étaient projetés certains films, comme ceux de Guy Brunet, un peu longs, mais diffusés comme en avant-premières, dans une sorte de projection familiale – ou dans la salle de réception du petit déjeuner, avec son lustre de cristal, sa fresque de putti au plafond, ses baies donnant sur un jardin abrité à l'ombre de quelques palmiers, où dormait, marginalisée, une table ronde en rocaille attendant ses chevaliers, devenus  définitivement fantômes....hôtel impérial à nice,association hors-champ,cinéma documentaire et arts singuliers,lee godie,italo farinelli,philippe lespinasse,caroline bourbonnais,francis david,claude massé,guy brunet,pierre-jean wurst,on n'est pas des gueux

Hôtel Impérial façade (2).jpg

La façade de l'Hôtel Impérial (et la clé de la chambre 25, recto et verso ci-dessus, avec son message original en cas d'oubli), photos Bruno Montpied, juin 2018.

Salle à manger le plafond aux vénus et angelots (2).jpg

Les Vénus et les amours au plafond de la salle à manger, ph. B.M., 2018.

 

    Dans ma mémoire, j'aime à faire défiler les personnages d'un certain matin au petit déjeuner, Caroline Bourbonnais, avec qui je n'avais jamais eu l'occasion de me retrouver en tête à tête, Francis David, ce photographe mystérieux et réservé, comme venu d'un autre espace-temps, eût-on dit, Claude Massé que l'on m'avait dépeint bourru, difficile, mais qui me parut au contraire aimable et charmant (était-ce l'atmosphère de ce lieu magique qui métamorphosait tous ceux qui y passaient?), Vincent Monod le rire jamais loin des lèvres, Philippe Lespinasse, à la fois semblable à un passager tombé l'instant d'avant de la Lune et l'œil bientôt narquois, et Pierre-Jean, l'ineffable Pierre-Jean Wurst, l'hôte généreux et incapable de ne pas blaguer, venant faire la revue de ses invités, Guy Brunet... Marc Décimo... Alain Bouillet... Charles Soubeyran, un peu pontife en dépit de ses sandales sans chichis... Anic Zanzi, de la Collection de l'Art Brut de Lausanne, comme sur la défensive...

24e festival On'est pas des gueux, affiche, 2021.JPG

Affiche de ce 24e festival... Avec son titre choc habituel, tel qu'aime à en choisir, à chaque festival, l'équipe de l'association Hors-Champ...

Lire la suite

Retour de chine: un dessin de Lucie Valore, une peinture de ”Bl.Mouron”

lucie valore,maurice utrillo,peintres de montmartre,bl. mouron,art naïf,anonymes de l'art naïf,réderie d'amiens

Lucie Valore, sans titre, sans date (entre 1940 et 1965), crayons de couleur sur papier, 20x23cm, coll. et ph. Bruno Montpied.

 

        Dimanche dernier, au milieu de cet océan de drouille et autres rossignols qu'est la Réderie d'Amiens, il fallait pouvoir trouver quelques îlots où gisent les trouvailles qui rachèteront de tant d'errance au milieu des laids produits de notre contemporanéité.  J'ai fini par tomber sur l'étal d'un couple de braves gens de la région qui vendait le petit dessin ci-dessus. J'ai cru sur l'instant à un magnifique dessin d'enfant. Il me faisait signe avec insistance, il me fallait l'acquérir. Le couple en question m'apprit alors qu'il s'agissait d'une œuvre d'une femme qui avait été l'épouse du peintre de Montmartre, Maurice Utrillo, fils de Suzanne Valadon. Elle s'appelait Lucie Veau dans sa jeunesse. Née à Angoulême en 1878, elle disparut à Paris en 1965. Amie de Suzanne Valadon, ancienne épouse d'un banquier, dont elle prit le nom passagèrement (Lucie Pauwels), elle épousa en 1935 Utrillo et changea alors une troisième fois de nom, pour s'appeler Lucie Utrillo.lucie valore,maurice utrillo,peintres de montmartre,bl. mouron,art naïf,anonymes de l'art naïf,réderie d'amiens Au contact de ce peintre qu'elle protégea des ses penchants à l'alcoolisme, en l'abritant au Vésinet dans une charmante demeure, "La Bonne Lucie", elle put manifester à son tour sa vision incontestablement ingénue et naïve du monde, dans des paysages, des portraits et des natures mortes. On sait qu'Utrillo lui-même a parfois été qualifié de peintre naïf. Et c'est vrai que certains tableaux, par leurs coloris et les axes difformes de leurs perspectives, peuvent faire songer par association au "réalisme intellectuel" des  Naïfs. Sans doute Lucie fut-elle lasse de ses changements multiples d'identité, et profita de l'occasion pour se créer enfin un nom qu'elle se serait choisi en tout indépendance. Elle s'appela alors Lucie Valore, magnifique patronyme qui, en raison de "l'or" qu'il renferme – se le dit-elle? –, pourrait lui assurer un certain succès... Rappelons qu'Anatole Jakovsky a cru bon, dans un ancien numéro des Cahiers du Collège de 'Pataphysique des années 1950, de relever ce fait que nombre de patronymes contenant les lettres "O,R" sont souvent liés à des destinées fastes et prospères...

lucie valore, maurice utrillo, peintres de montmartre, bl. mouron, art naïf, anonymes de l'art naïf, réderie d'Amiens

Lucie et Maurice...

lucie valore, maurice utrillo, peintres de montmartre, bl. mouron, art naïf, anonymes de l'art naïf, réderie d'Amiens

Lucie Valore, Autoportrait à l'aigrette.

lucie valore, maurice utrillo, peintres de montmartre, bl. mouron, art naïf, anonymes de l'art naïf, réderie d'Amiens

Lucie Valore, Printemps.

lucie valore, maurice utrillo, peintres de montmartre, bl. mouron, art naïf, anonymes de l'art naïf, réderie d'Amiens

Lucie Valore, paravent peint, 1959.

lucie valore, maurice utrillo, peintres de montmartre, bl. mouron, art naïf, anonymes de l'art naïf, réderie d'Amiens

Tombe de Lucie et Maurice Utrillo au cimetière St-Vincent, à Montmartre, tout près de chez moi...

 

      Je n'ai pas retrouvé pour autant trace de son inscription dans une quelconque histoire de l'art naïf. Jakovsky, Dasnoy, ou Bihalji-Merin l'ignorent superbement. Mais cela ne nous étonnera pas, il manque beaucoup d'autres artistes du même genre au bataillon, surtout bien entendu du côté des naïfs récents, mais aussi du côté des anonymes, ou des artistes autodidactes dont la production est restée limitée ou a été dispersée (et parfois détruite?) comme j'en donne un autre exemple ci-dessous, chinée aux puces, en compagnie d'un autre tableau (un portrait de Charles Maurras...).

lucie valore,maurice utrillo,peintres de montmartre,bl. mouron,art naïf,anonymes de l'art naïf,réderie d'amiens

Bl.(Blanche? Blandine?) Mouron, Autoportrait, 22x29 cm (3 Figure), 1958 ; ph et coll. B.M ; Qui connaît cette Bl. Mouron, avis aux amateurs...?

Lire la suite

Causerie pour situer François Michaud parmi les autres environnements spontanés

    "François Michaud, première trace des environnements spontanés populaires. Sa proximité avec les autres créateurs autodidactes de son temps, et ses successeurs au XXe siècle. L'environnement spontané, un art de l'immédiat à part entière, illustré par de nombreux exemples choisis en France", tels sont le titre et les sous-titres de la causerie que je vais être amené à faire à la Maison de la Pierre, à Masgot même, dans la Creuse, berceau de l'oeuvre de ce tailleur de pierre, créateur du plus ancien des environnements spontanés qui nous aient été conservés en France, puisque commencé dans les années 1850-1860 et achevé sans doute avec la mort de son auteur en 1890 (il était né en 1810, ce qui en fait un phénomène de longévité en ce XIXe siècle impitoyable pour les gens de peu). Cela aura lieu le samedi 9 mai prochain à 20h30.

Carte-Masgot.jpg
Masgot, c'est sur la commune de Fransèches, entre Aubusson et Le Moutier-d'Ahun dans la Creuse...

       Je donne à la suite le plan que j'ai rédigé pour l'association des Maçons de la Creuse, animée notamment par Roland Nicoux, afin qu'on se fasse une petite idée de la tournure de cette conférence (que devraient accompagner pas moins de 190 photos... Mais j'ai sans doute compté trop large!):

François Michaud

Premier d'une tradition de créateurs autodidactes d'environnements en plein air 

         Il s'agit de resituer le décor du village de Masgot du tailleur de pierre François Michaud dans le contexte général des environnements populaires spontanés qui ont fleuri en France depuis deux siècles au moins. Ces créateurs d'environnements sont parfois aussi appelés « Inspirés du bord des routes », « bâtisseurs de l'imaginaire », ou encore « habitants-paysagistes ». L'environnement de Michaud, avec ses statues exposées sur les clôtures autour de ses maisons, est actuellement le plus ancien de ce type à avoir été conservé en France.

Cave-sculptée-de-Dénezé-sou.jpg
Cave sculptée de Dénezé-sous-Doué (Maine-et-Loire), XVIe ou XVIIe siècle

         La causerie, constamment illustrée d'images numérisées (190 au total) s'attachera d'abord à présenter les environnements ou les sculptures populaires qui ont été repérés avant la période où fut décoré Masgot, grottes sculptées, croix de chemin, chapelle naïve d'un sculpteur solitaire prés de Gap, linteaux rustiques, bas-relief, sculptures par d'autres tailleurs de pierre et hommes du peuple, etc...

          Nous glisserons ensuite vers la présentation de quelques œuvres de Michaud histoire de se les remettre dans l'œil avant de montrer un ensemble aussi vaste et varié que possible d'autres pièces créées dans des jardins d'inspirés et d'originaux en tous genres. Dans un premier temps, la causerie se focalisera sur des thématiques, les « Barbus Müller », ou le thème de la sirène par exemple, présente dans l'œuvre de Michaud et souvent traitée dans plusieurs autres environnements apparus au XXe siècle (chez Fernand Châtelain dans la Sarthe, Hippolyte Massé aux Sables d'Olonne, René Escaffre dans le Lauragais, Martial Besse dans le Tarn-et-Garonne, René Jenthon dans l'Allier, Alfonso Calleja sur le bassin d'Arcachon, ou Remy Callot dans le Nord).

Martial-Besse,-ph-1991.jpg
Sirène de Martial Besse à Bournel (Lot-et-Garonne), ph.Bruno Montpied, 1991 (le site a aujourd'hui disparu)

         Napoléon est un autre thème très présent à Masgot, il rejoint la légende napoléonienne telle que l'ont illustrée de nombreux sculpteurs populaires, anonymes ou non, au XIXe siècle (comme le sabotier Jean Molette dans le Rhône par exemple). Cette façon d'afficher ses admirations pour des personnalités célèbres en sculptant leurs effigies dans le décor de sa vie quotidienne se rencontre chez nombre de créateurs d'environnements, et ce de tous temps (voir les environnements de Gabriel Albert en Charente, Emile Taugourdeau dans la Sarthe, Raymond Guitet dans l'Entre-Deux-Mers). Il est à noter que de nombreux sculpteurs autodidactes ont aussi taillé des monuments aux morts, de façon naïve, comme Michaud lorsqu'on lui passa commande d'un buste de Marianne pour la mairie de Fransèches. Une sélection de quelques monuments aux morts naïfs sera ainsi présentée.

Morillon-monument-aux-m-2-à.jpg
Monument aux morts dû à Claude Morillon, tailleur de pierre, à Vallenay (Cher), ph.B.M., 1998

          Une petite parenthèse sera ouverte pour présenter également les sites naïfs ou bruts réalisés par des ecclésiastiques excentriques, contemporains de François Michaud, comme l'abbé Fouré dans l'Ille-et-Vilaine, ou l'abbé Paysant dans l'Orne. On les rapprochera de l'humble mystique que fut Raymond Isidore, dit Picassiette, au siècle suivant.

         Le Palais Idéal de Ferdinand Cheval dans la Drôme sera l'occasion de montrer que les autodidactes inspirés ont su aussi s'attaquer à des projets plus nettement architecturaux. S'inspirant parfois les uns des autres, comme dans le cas de Charles Billy dans le Rhône qui, inspiré par le facteur Cheval, dressa autour de sa villa un vaste collage de maquettes en pierre imitant des bâtiments célèbres du monde entier. L'architecture excentrique populaire peut parfois revêtir des aspects tour à tour muséaux (exemple du Castel Maraîchin à Croix-de-Vie en Vendée avec ses moulages à vocation pédagogique et encyclopédique, ou la maison de François Aubert dans le Cantal avec son musée minéralogique), ludiques (Camille Jamain en Touraine, ou Ludovic Montégudet dans la Creuse, créateurs de parcs de loisirs bricolés naïvement avec attractions faites main), parfois farceurs (Alphonse Gurlhie en Ardèche).

CP-L'étang-fleuri-1-(1969-1.jpg
L'Etang Fleuri réalisé par Ludovic Montégudet à Lépinas dans la Creuse, carte postale de 1969

         Parmi les créateurs d'environnements, la causerie a choisi de se concentrer sur les créateurs de statues puisque Michaud en a lui-même réalisé un certain nombre. Ces hommes simples rassemblent sur des terrains plantés d'arbres et de fleurs, dans une scénographie étudiée, pêle-mêle, hommes célèbres ou personnifications de métiers, comme chez André Hardy dans l'Orne, Charles Pecqueur ou Léon Evangélaire dans le Nord, Marcel Debord dans le Périgord.

Léon-Evangélaire-à-Pont-en-.jpg
Léon Evangélaire à Pont-à-Vendin, Pas-de-Calais, ph.B.M., 2008

         Puis la causerie se déplacera insensiblement vers des environnements aux styles plus caractérisables dans le sens de ce que l'on appelle l'art brut, permettant au public de se faire une idée des distinctions possibles entre ces catégories aux limites poreuses que sont l'art naïf, l'art populaire et l'art brut. On verra ainsi des pièces venues des sites d'André Morvan dans le Morbihan (souches d'arbres et branches assemblées de manière anthropomorphe dans un style arcimboldesque), Jean Grard et ses manèges, statues et maquettes colorées et enfantines en Bretagne, Arthur Vanabelle dans le Nord avec ses canons et ses chars construits avec des matériaux recyclés afin semble-t-il d'exorciser le souvenir de la guerre vécue lorsqu'il était enfant, les statues de silex collés de Marcel Landreau à Mantes dans les Yvelines, le jardin de déchets accumulés de Bohdan Litnianski dans l'Aisne, le jardin aux girouettes et vire-vents de Monsieur P. en Vendée, le jardin du forgeron Maurice Guillet faisant de l'art moderne en autodidacte, ambition originale, ou encore le jardin de bidules emberlificotés d'Yves Floch en Normandie. Pour finir, seront présentées quelques sculptures d'Auguste Forestier qui en dépit du fait qu'elles sont rangées usuellement dans le corpus de l'art brut présentent de forts rapports de cousinage avec l'art populaire.

Le-moulin-et-les-meuniers,-.jpg
Saynète sculptée par Jean Grard à Baguer-Pican, Ille-et-Vilaine, ph.B.Montpied, 2001

     

Lire la suite

28/04/2009 | Lien permanent

Hommage à Caroline Bourbonnais, une exposition et un catalogue

 

Caroline Bourbonnais lisant une monographie sur Dubuffet de Max Loreau, visuel Fabuloserie © Philippe Couette

 

Couverture du catalogue de l'exposition d'hommage à Caroline Bourbonnais (1924-2014), visuel Fabuloserie

 

      Du 18 avril au 2 novembre 2015, les héritières de Caroline Bourbonnais, Agnès et Sophie Bourbonnais, ont décidé de rendre un hommage appuyé à cette fondatrice, avec son mari Alain, disparu en 1988, de la collection de la Fabuloserie, un ensemble d'œuvres hors-normes conservé dans un bâtiment-labyrinthe, ainsi qu'autour d'une pièce d'eau, au sein du petit village de Dicy dans l'Yonne. Elles ont y été aidées par Déborah Couette, qui avait déjà réalisé, en compagnie d'Antoine Gentil et d'Anne-Marie Dubois en 2013-2014, juste avant la disparition de Caroline Bourbonnais donc, au musée Singer-Polignac, dans l'Hôpital Sainte-Anne à Paris une expo consacrée aux œuvres moins connues conservées dans les réserves de la Fabuloserie, "Un Autre Regard".

 

L'etang-de-la-Fabuloserie-a.jpg

Le parc de la Fabuloserie autour de l'étang, avec à l'arrière-plan le manège de Petit-Pierre et sur la rive à droite des statues de Camille Vidal rescapées du démantèlement du site de ce dernier situé originellement à Agde dans l'Hérault, ph. Bruno Montpied, 2011

 

     "Des Jardins imaginaires aux jardins habités, des créateurs au fil des saisons" est le titre d'une première exposition réalisée dans le cadre de cet hommage, et présentée dans le parc de la Fabuloserie ainsi que dans l'ancien atelier d'Alain Bourbonnais se situant à l'orée de ce parc (voir ci-dessous).

 © Jean-François Hamon

 

      Sa thématique est centrée sur les réalisations exécutées en plein air par un certain nombre de créateurs d'environnements spontanés, créateurs dont plusieurs fragments de leurs environnements se sont trouvés déplacés et sauvegardés dans le parc de la Fabuloserie, espace d'exposition caractéristique et original au sein de cette collection, la seule à posséder ainsi en Europe un musée de plein air consacré aux environnements d'art spontané (comme je l'avais déjà signalé dans mon ouvrage Eloge des Jardins Anarchiques en 2011). Voici la liste des créateurs exposés dans le cadre de cette première expo, avec pour ce qui concerne les autodidactes de culture populaire: Pierre Avezard, dit Petit Pierre, Giuseppe Barbiero (Joseph Barbiero), Jean Bertholle, Marcello Cammi, Jules Damloup,  Marie Espalieu, Marcel Landreau, Gaston Mouly, Charles Pecqueur, François Portrat, Abdel-Kader Rifi, Robert Vassalo, dit Vlo, le Finlandais Alpo Koivumäki et Camille Vidal. En ce qui concerne les créateurs en plein air plus "artistes", on trouvera aussi des œuvres d'Alain Bourbonnais, de l'Indien Nek Chand, de Roger Chomeaux, dit Chomo, de l'ineffable Danielle Jacqui, du baba new age Jean Linard, de Vincent Prieur, de Raymond Reynaud, du Belge Jean-Pierre Schetz et de Tô Bich Haï.

Joseph Barbiero, sans titre, sans date, pierre volcanique 45 x 33 x 21 cm, coll. La Fabuloserie, © Jean-François Hamon (visuel Fabuloserie) 

C.-Vidal-et-Portrat.jpg

Des sculptures de Camille Vidal et sur le mur rouge, structure portante conçue par Alain Bourbonnais, des médaillons en mosaïque et ciment de François Portrat, dans le parc d'environnements de la Fabuloserie, ph. BM, 2011

Robert Vassalo, Tu vas l'exposer à Marseille les 29-30 aout 94, Robert - Oui à la "Galerie Ola" 16.500.000 FRS Bld d'HAIFA - Tu es ignoble, v.1994, gouache et encre sur papier, 20,5 x 31 cm, coll. La Fabuloserie, © Jean-François Hamon ; Vassalo n'était  pas seulement l'auteur de sculptures installées à l'air libre mais il était aussi peintre (à noter que dans le catalogue on en apprendra plus sur lui grâce à une présentation de Roberta Trapani)

vue expo fabuloserie caroline bourbonnais 2015.png

Vue de l'exposition actuelle d'hommage à Caroline Bourbonnais ; on reconnaît des pierres sculptées de Barbiero sur la table blanche et (peut-être...) des personnages créés par Bich Haï dans le fond derrière une vitrine

 

     Les nouvelles animatrices de la Fabuloserie ne se sont pas arrêtées là. Elles proposent en effet  une seconde exposition, la première d'un cycle d'expos à venir (centrées sur des créateurs emblématiques de la Collection), consacrée à l'un des "piliers" parmi les artistes singuliers de la collection, à savoir Francis Marshall, connu pour ses grandes poupées boursouflées et bourrées dont l'une, Mauricette, occupe avec beaucoup de présence une salle entière à la Fabuloserie, avec en vedette la nommée Mauricette. A noter qu'à la faveur de cette exposition, première d'un cycle intitulé "Parcours turbulents", une nouvelle collection, dirigée par Déborah Couette, voit paraître son premier titre consacré à Francis Marshall, accompagné d'un DVD d'un film évoquant le parcours de cet artiste. D'autres devraient suivre, à chaque fois consacré à un des créateurs connus ou inconnus, dont l'œuvre est conservée à la Fabuloserie. C'est en quelque sorte une revitalisation de l'ancienne collection d'ouvrages que l'Atelier Jacob, première aventure d'Alain et Caroline Bourbonnais menée dans le quartier de St-Germain-des-Prés à Paris, éditait avant que leur collection migre en Bourgogne à Dicy.

Francis Marshall, la nommée Mauricette

 

caroline bourbonnais,des jardins imaginaires aux jardins habités,fabuloserie,habitants-paysagistes,inspirés du bord des routes,environnements spontanés,déborah couette,camille vidal,françois portrat,bich haï,gaston mouly,robert vassalo,francis marshall,jacques renaud-dampel

Plaquette sur François Monchâtre, de la collection Fabuloserie n°2, 1980 (on y annonçait l'existence de la Fabuloserie à Dicy)

 

     Enfin, une troisième exposition est également mise en place, intitulée "Le temps des collections, Hommage à Caroline Bourbonnais", qui se décline tout au long du parcours de la visite dans les collections, les œuvres sorties des réserves et constitutives de cet hommage faisant l'objet d'une signalétique particulière. Les créateurs exposés dans ce parcours sont : un Anonyme, dit Pierrot le fou (qui était déjà exposé à "Un Autre Regard"), Renaud d’Ampel (Sic, ce dernier que j'orthographierais personnellement plutôt "Renaud-Dampel" - car cela paraît être son nom et Jacques son prénom -  me semble être le même que celui dont on peut voir de magnifiques pierres peintes au Musée de l'Art en Marche de Luis Marcel à Lapalisse, voir ci-dessous), Guy Brunet, Gustave Cahoreau, Thérèse Contestin, Michel Dalmaso, Paul Duhem, Ted Gordon, Roger Hardy, Gérard Haas, Jeantimir Kchaoudoff, Aranka Liban, André Labelle, André Lécurie, Edmond Morel, Marilena Pelosi, André Robillard, Jean Tourlonias, Jacques Trovic et Jephan de Villiers.

 

J.Renaud-Dampel,3-.jpg

Jacques Renaud-Dampel, pierre peinte exposée au Musée de l'Art en Marche en 2014, ph. BM

passerelle-1170x580.jpg

Une vue de l'intérieur de la Fabuloserie, avec quelques pièces de la collection, des Guivarch (les animaux en bas à droite), une enseigne de coiffeur en provenance d'Afrique de l'Ouest, à côté d'un tableau d'assemblage, semble-t-il, de Fernand Michel, de sculptures exécutées à la tronçonneuse de Jean Rosset(dans le fond), d'un bateau d'Emile Ratier(à gauche) et peut-être des pierres peintes du même Renaud-Dampel que dans l'illustration précédente, ph. BM, vers 2012

 

      Et puis il y a aussi un catalogue à l'occasion de ces expos, avec réuni autour de l'évocation des multiples aspects du travail de prospection et d'enrichissement de la Fabuloserie un bel aréopage de personnes connues depuis longtemps ou bien depuis plus récemment pour leur engagement envers l'art  brut, l'art populaire, l'art naïf, les environnements, l'art singulier et tutti quanti. Personnellement je me retrouve installé, pour évoquer mon vieux camarade Gaston Mouly (arrivé à la Fabuloserie en 89 parmi les premières nouvelles acquisitions de l'ère Bourbonnais avec Caroline en solo), entre Martine Lusardy (qui traite de Raymond Reynaud) et Céline Delavaux (sur Barbiero). Mais foin de beaux discours, autant vous donner le sommaire qui apparaît assez copieux:

Avant-propos, Agnès et Sophie Bourbonnais

 Avant-propos, Roger Cardinal

 Des jardins imaginaires au jardin habité, présentation de l’exposition, Déborah Couette

 Territoires imaginaires dans la collection art hors-les-normes, Déborah Couette

 Bâtisseurs et autres inspirés à La Fabuloserie :

 Charles Pecqueur ou la féerie d’un mineur, Sophie Bourbonnais

 La cathédrale de Marcel Landreau, Claude et Clovis Prévost

 Le jardin extraordinaire de François Portrat, Anic Zanzi

 Avec Chomo dans la tranchée des rêves, Jean-Louis Lanoux

 L’Arche de Noé de Camille Vidal, Déborah Couette

 Le Paradis Barbare d’Abdel-Kader Rifi, Déborah Couette et Antoine Gentil

 P.Avezard, vacher à la Coinche, « un aire de musique avant la sortie », Pierre Della

 Giustina

 Raymond Reynaud ou le fantassin du mouvement perpétuel de la création, Martine

 Lusardy

 Gaston Mouly, un artiste rustique moderne, Bruno Montpied

 Barbiero au pays des volcans, Céline Delavaux

 Marie Espalieu à la croisée des chemins, Jean-Michel Chesné

 La Petite Afrique de Jules Damloup, Michel Ragon et Sophie Bourbonnais

 La Galleria dell’Arte de Marcello Cammi, Salade Niçoise ou Antipasti Bourguignon,

 Sophie Bourbonnais et Pierre-Jean Wurtz

 La maison de celle qui peint, Danielle Jacqui. A la démesure d’un rêve éblouissant,

Marielle Magliozzi

 Le harem fantastique de Robert Vassalo, Roberta Trapani

 Vincent Prieur le pinseyeur, Marie-Rose Lortet

 Les girouettes polychromes de Jean Bertholle, Agnès Bourbonnais

 Un élan venu de la forêt finlandaise d’Alpo Koivumäki, Raija Kallioinen

 D’un jardin extraordinaire à un autre. De Chandigarh à Dicy, Lucienne Peiry

 Le Coin au soleil de Jean-Pierre Schetz, Brigitte Van den Bossche

 Les âmes errantes de Tô Bich Haï. Peintures, poupées et pieux, Tô Bich Hai et Sophie

 Bourbonnais

 Fabuleuse Caroline Bourbonnais

 Fabuleuse Caroline, Laurent Danchin

 Tu vois, Michèle Burles

 La Fabuloserie, Musée des diables et des anges, Sepp Picard

 Nos musées, souvenirs, Jacqueline Humbert

 La grande Caroline de La Fabuloserie, Suzanne Lebeau

 Lettre de réclamation d’affection, Francis Marshall

 Merci Caroline, Pascale Massicot et Stéphane Jean-Baptiste

 Caroline, Philippe Lespinasse

Lire la suite

Gens ordinaires et univers imaginaires

     Le printemps est donc là avec son cortège de projections de docu sur l'art brut et consorts. Hors-Champ à Nice doit être en train de mettre la dernière main à son programme de fin mai début juin au MAMAC de Nice. Peut-être pour nous mettre l'eau à la bouche, voici que son animateur principal, Pierre-Jean Wurst, avec la complicité de Denis Lavaud son homologue parisien féru de cinéma autour des arts populaires, monte à Paris avec un programme de films certes déjà vus ici ou là, mais que les néophytes auront tout intérêt à aller découvrir si ils veulent s'initier de façon vivante et cinétique aux créateurs de l'art brut et apparentés. Demandez donc le dit programme...

    Une fois celui-ci placé sous les yeux de tout un chacun, je me permettrai de me fendre de conseils de visionnage pour ceux qui voudraient se faire une culture, ou une anti-culture vite faites en matière de cinéma documentaire sur les arts populaires modernes. Sans aller jusqu'à faire comme les surréalistes qui préconisaient "lisez ceci... et ne lisez pas cela...", ce qui serait d'actualité dans d'autres cas –car tout un chacun a bien le droit d'exprimer ses préférences et ses haines, en dépit de tous les crétins amateurs de nivellement– on peut en l'espèce indiquer quelques pistes qui d'après moi s'annoncent plus originales que d'autres. La programmation est prévue pour deux jours le samedi 26 et le dimanche 27 à la MAISON DES CULTURES DU MONDE (101, bd Raspail dans le VIe ardt, et NON à la Halle St-Pierre... auprès de qui par ailleurs il est prudent de réserver sa place), dans le cadre du toujours passionnant Festival de l'Imaginaire qui se tient depuis des années à Paris, proposant diverses manifestations autour des arts populaires du monde entier (ils ont une antenne, si je puis dire, à Vitré, au Centre Français du Patrimoine Immatériel, où sont montées à la belle saison généralement d'alléchantes expositions, comme par exemple cette année "ANIMAUX TOTÉMIQUES ET DRAGONS PROCESSIONNELS, Le bestiaire fantastique des fêtes méridionales" du 26 avril au 21 septembre).

afficheanimaux_web.jpg

loup_1660-web.jpg

Animaux (loups?) de procession dans le Midi de la France, image extrait du site du CFPCI

 

     Je ne pense personnellement pas venir le samedi 26, où seuls quelques titres m'intriguent (le samedi matin: Le jardin fantastique de Fiorenzo Pilla de Giuseppe Trudu, en présence du réalisateur ; Driven by vision (Jim Bishop) de Michael McNamara ; et surtout le samedi après-midi Emile Ratier d’Alain Bourbonnais en présence de Caroline Bourbonnais), car malheureusement placés avec d'autres déjà vus dans de précédentes programmations.DiamantsbrutsduJaponLespinasseDVD.jpg

  

Emile-Ratier,-granderouefor.jpg

Emile Ratier, un de ses assemblages de bois, une grande roue foraine, collection permanente du Musée de la Création Franche, Bègles

 

    En effet, certains autres films comme celui annoncé sur Yvonne Cazier "peintre-médium", s'annoncent, si je me base sur les images d’œuvres récemment reproduites dans le dernier numéro de Création Franche, comme de possibles fausses découvertes. Comme si on s'ingéniait à nous trouver des prolongements spirites à l'heure actuelle, ce qui jusqu'ici n'est pas prouvé, les créateurs (et en l'occurrence plutôt les créatrices) proposés  lors d'autres manifestations (Marie Jeanne Gil par exemple ou Henriette Zéphyr) étant assez peu originaux je trouve. Le lecteur cela dit, comme je l'ai déjà dit, se fera bien entendu, à propos d'Yvonne Cazier, son opinion seul à l'aide du programme dans le lien inséré plus haut.

     Non, personnellement, je passerai peut-être plutôt le dimanche après-midi, même si je vous conseille de vous débûcher le matin pour aller voir les trois films programmés, l'excellent film de Milka Assaf sur Gugging, et ses créateurs dont plusieurs désormais disparus comme August Walla ou Johan Hauser, et aussi le très poétique documentaire de Vincent Martorana sur Justin de Martigues. L'après-midi, les films sont intéressants aussi. Sont prévus des films de Decharme sur ses chouchous déjà insérés dans son film Rouge Ciel (avec entre autres un sujet sur l'abbé Fouré à propos duquel j'espère qu'il aura fait une mise à jour côté biographie? Parce que son inspiration n'a rien à voir avec une bande de flibustiers du nom de Rothéneuf...), un film de Del Curto et Genoux sur Pya Hug,PyaHug-DVD.jpg et un autre sur un créateur asiatique (japonais je crois me souvenir), Macoto Toya –déjà montré par exemple au Lieu Unique à Nantes il y a deux ans– plus le toujours génial film de Michel Ettter, Martial, l'homme-bus, sur une figure de la rue de Lausanne.

      Cet après-midi-là, il y a encore un autre film, à se fier à la consonance du patronyme sur un site coréen, Mok Sok Won (ce qui veut dire jardin de bois et de pierres) de Muriel Anssens et Jean-Louis Bartoli. De la poésie naturelle en bord de mer interprétée par un artiste qui hélas plaque un peu trop semble-t-il son idéologie New Age, ce qui plaira certainement à tous nos "artbrutistes" amateurs de contre-culture. Un peu de poudre mystico-dingo faisant toujours bien dans le décor.

 

Lire la suite

19/04/2014 | Lien permanent

Page : 1 2 3 4 5 6