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Les Nefs des Fous

   Que nos confrères de Belvert et d'Animula nous pardonnent (ça commence comme une prière), mais nous allons devoir leur repomper (pour le premier) et pomper (pour la seconde) certaines images d'esquifs qui traînent dans leurs colonnes (en y ajoutant cependant nos forts grains de sel).

    Notre excuse est d'avoir initié la confrontation bateaux pop/bateaux bruts (sur Belvert, s'entend, et en fournissant déjà les photos), du temps où nous hésitions encore à franchir le Rubicon de la création de blog.

    Nous voudrions maintenant réaliser un petit rassemblement des objets maritimes en question, des bateaux, sur une SEULE page, bien persuadé que le thème contient sûrement d'autres éléments à verser au dossier, mais en permettant aux amateurs de s'instruire des différences à relever, des parallèlismes, de la plus ou moins grande dose de fantaisie appliquée à ces diverses rêveries flottantes: 

Pour commencer, une maquette de bateau anonyme photographié dans le département "Marine populaire" du musée rural des arts populaires de Laduz:

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Puis un bateau sculpté par un créateur rangé dans l'art brut, Auguste Forestier, intitulé "Le Myra" (ancienne collection Docteur Ferdière, photo 1990: Bruno Montpied):
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Restons dans l'art brut en ajoutant ce bateau de Carlo M. (à ne pas confondre avec Carlo Zinelli). Sa maquette s'appelle "Le sozialist" et fait partie des collections du musée de la Waldau près de Berne (photo Paul F.Talman). Nous l'avons extraite du catalogue de l'exposition de 1996 au Centre Culturel Suisse à Paris, "Le Dernier Continent, ou la Waldau, asile de l'art": 
 
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 A présent de l'art fait en prison par un certain Agostini ("fait à la prison St-Paul en 1936", dixit  Animula Vagula qui l'a récemment remis en lumière en allant dénicher sa reproduction dans un vieux numéro de magazine):
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Cela n'est pas loin de Carlo M., non? Peut-être dans une variante plus rigolarde...
Ce qui nous amène à une veine plus enfantine, une poterie populaire trouvée sur la base Joconde (photo Philippe Motte, Zoom Studio) et qui appartient au musée du Berry à Bourges (le même musée qui héberge des Pierre Petit mais ne les montre jamais...). C'est une arche de Noé dûe aux potiers Jean Lerat et Armand Bedu (second quart du XXe siècle):
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Puis, pour ne pas quitter le cher André Bindler (voir note précédente), voici le bateau que le catalogue "Un Art autre, un autre art" (expo organisée par Traces+Signes Sundgau en 1982 à Altkirch en Alsace, présentait, en précisant que sa coque avait été taillée avec la technique du sabotier:
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Art naïf?
Et que penser alors de ce brave Claude Poulllaouec, natif de Plougonvelin dans le Finistère posant devant les escadres anglaises au cours d'un passage en rade de Brest  qu'il a si poétiquement représentées dans les années 1900 (une inscription parle de 1905), et dont, semble-t-il, il ne reste comme traces que d'anciennes et rares cartes postales, du type de celle que je présente ci-dessous?
J'avoue avoir une toute particulière prédilection pour ce type de peinture. Qu'est-elle devenue hélas...:
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Je dois marquer ma gratitude une fois de plus à la collection Humbert du musée de Laduz ainsi qu'à Marie-José Drogou à qui je dois la découverte de Poullaouec dont quelques cartes (il semble qu'il y ait quatre cartes différentes sur ce créateur) sont présentées dans leur département de sculpture populaire.
Agrandissons son coin inférieur droit, on y reconnait le fort Berthomme (avec à côté peut-être la propre maison de Poullaouec, à Trez-Hir, un lieu-dit de par là-bas?), le phare de la Pointe Saint-Mathieu...
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Pour finir, un dernier hommage à ce musée en concluant sur les bateaux en bouteille qu'il ne faudrait pas oublier de citer dans un rassemblement de corpus comme celui que nous tentons ici:
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Michel Valière nous a quittés

      Michel Valière est mort le 22 février dernier, d'une longue maladie, dit-on... Et, même si je n'avais plus de contact avec lui depuis longtemps, je dois dire que cette nouvelle m'a fait mal. Une sorte d'adage résonne en moi... Lorsqu'un vieillard meurt, c'est comme une bibliothèque qui brûle. Et ici, mieux qu'ailleurs, l'adage se vérifie.

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Michel Valière (et sa femme, Michèle Gardré-Valière) en compagnie de Franck Vriet et sa femme, à Brizambourg (Charente), ph. Bruno Montpied, 2006 ; nous visitions ce créateur de statues en plein air situé non loin de chez Gabriel Albert, qu'il connaissait bien, et avec qui il avait réalisé des statues (peut-être en commun?), apparemment plutôt animalières.

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Le Corbeau de la fable Le Corbeau et le Renard de La Fontaine, imaginé par Gabriel Albert à partir d'un dessin de costume pour une pièce de théâtre ; cette attribution m'avait été signalée par Michel Valière ; ph.B.M. 2006.

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   L'homme, que j'avais rencontré au LaM de  Villeneuve-d'Ascq, en marge d'une journée sur les environnements spontanés, en 2005, alors que venait de paraître un de ses ouvrages chez Armand Colin, Le Conte populaire, approche ethnographique, s'est engagé à fond durant toute une période dans la défense et la sauvegarde du jardin de 420 statues naïves de Gabriel Albert à Nantillé (Charente-Maritime), sauvegarde qui paraît en voie d'être acquise aujourd'hui (voir la note que j'ai consacrée au cahier de l'Inventaire du Patrimoine de la région Poitou-Charentes entièrement centré sur  l'environnement de Gabriel Albert, cahier que Valière a supervisé ; on lira avec fruit, en cliquant sur le lien ci-avant, le débat enrichissant qui s'instaura à la fin de la note, en commentaires, entre Michel Valière, Emmanuel Boussuge et mézigue). Mais, à côté de cela, c'était avant tout un puits de science en matière ethnographique, et de cultures, de langues populaires (notamment en occitan). Les lecteurs anciens de ce blog se rappelleront peut-être ses commentaires érudits et fort pointus (trop?), sous le pseudonyme de "Belvert", qui renvoyait à son propre blog, toujours ouvert à l'heure où j'écris ces lignes... C'était, en dehors de son savoir ethnologique (il s'est consacré beaucoup au collectage de témoignages oraux dans la région du Poitou), en effet, un grand linguiste spécialisé dans les parlers poitevins-saintongeais, ainsi qu'en occitan (né à Paris, il a grandi à Lespignan, dans le Biterrois et l'Hérault). Il nous avait gratifiés sur ce blog, on s'en souviendra, de commentaires pointus sur les tsapluzaïres, ces tailleurs de copeaux, sculpteurs amateurs à leurs heures de loisir, que l'on rencontrait encore jusqu'à ces dernières années dans le Massif Central.

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        Par ailleurs, Michel Valière était un grand connaisseur de l'art populaire et avait contribué à monter avec d'autres des musées. Mais je ne parviens plus à me rappeler de lequel d'entre eux il m'avait parlé. Son rapport avec des gens dans mon genre montre que sur ses "vieux jours", il s'était ouvert aux nouveaux surgeons de l'art populaire que sont l'art naïf, l'art brut (ce n'est absolument pas signalé dans la notice qui lui est consacrée sur Wikipédia). Même l'art singulier l'intéressait (à ce titre, je lui avais offert une  de mes peintures sur papier, Un rugby aux règles étranges, qui faisait une vague allusion à l'ancêtre du rugby, la soule, jeu violent pratiqué dans le Sud-Ouest). Sa curiosité était vaste et variée. Il faut espérer que quelque bonne âme aura eu l'heureuse idée de l'enregistrer, comme lui-même sut le faire pour beaucoup d'interlocuteurs dépositaires de culture populaire. 

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Bruno Montpied, Un rugby aux règles étranges, 30 x 40 cm, 2005, coll. Michel Valière, ph. B.M.

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Appel du 18 juin: ”Alcheringa” n°4 est paru et ses animateurs viennent en causer à la Halle Saint-Pierre

      Alcheringa, j'en ai déjà parlé lors de la parution de son n°3. Il continue de se manifester, puisque son n°4 sort à présent, toujours édité (et maquetté) par Venus d'Ailleurs du côté de Nîmes. Il sera présenté dimanche prochain à l'auditorium de la Halle, à 15h, en présence de Joël Gayraud, Guy Girard, Régis Gayraud et mézigue. Je dois y présenter en effet les articles que j'ai donnés à la revue, l'un sur l'art en commun (il y aura quelques images projetées) et l'autre, plus réduit, consacré à une remarque concernant le catalogue de la récente exposition "Chercher l'or du temps", consacrée au surréalisme, l'art magique et l'art brut, au LaM de Villeneuve-d'Ascq. Ce catalogue contient en effet une prodigieuse découverte due à l'une des conservatrices de ce musée, Jeanne Bathilde-Lacourt, découverte qui regarde les prémisses de la collection d'art brut de Jean Dubuffet. Il me paraissait important de la souligner un peu plus, notamment auprès de lecteurs intéressés par le surréalisme.

 

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         Voici le sommaire de la revue:

Numéro 4 - Été 2023
(128 pages ; 22 €)
 

Dans ce numéro:

Guy Girard, Devant le feu

Joël Gayraud, Métamorphoses de l’alkahest

Sylwia Chrostowska, Tout et son contraire

Jacques Brunius, Le jardin n’a pas de porte

Bruno Montpied, L’art en commun, si peu commun…

Laurens Vancrevel, Will Alexander et l’usage surréaliste du langage

Natan Schäfer, Vers le Phalanstère du Saï

Régis Gayraud, Souvenons-nous de Serge Romoff.

Autour d’une lettre inédite d’André Breton

 

      ainsi que d’autres articles, poèmes, récits de rêves, notes critiques et images par :

René Alleau, Aurélie Aura, Jean-Marc Baholet, Anny Bonnin, Massimo Borghese, Anithe de Carvalho, Eugenio Castro, Claude-Lucien Cauët, Juliette Cerisier, Sylwia Chrostowska, Darnish, W. A. Davison, Gabriel Derkevorkian, Kathy Fox, Antonella Gandini, Joël Gayraud, Régis Gayraud, Yoan Armand Gil, Guy Girard, Beatriz Hausner, Jindřich Heisler, Alexis Jallez, S. L. Higgins, Marianne van Hirtum, Richard Humphry, Andrew Lass, Michael Löwy, Albert Marenčin, Alice Massénat, Bruno Montpied, Peculiar Mormyrid, Leeza Pye, Pavel Rezniček, Alain Roussel, Bertrand Schmitt, Carlos Schwabe, Petra Simkova, Dan Stanciu, Wedgwood Steventon, Ludovic Tac, Virginia Tentindo, Marina Vicehelm, Sasha Vlad, Susana Wald, Gabriela Žiaková, Michel Zimbacca.

 

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Bruno Montpied et Petra Simkova, "Des êtres se rencontrent et une douce musique s'élève dans leurs cœurs", hommage à Jens-August Schade,  3 x 4 m, peinture industrielle sur toile PVC, 1999.

 

     Des exemplaires de la revue seront bien sûr ensuite disponibles à la vente dans la librairie de la Halle Saint-Pierre.

     Signalons aussi par la même occasion la parution d'un autre n°4, de la revue L'Or aux 13 îles (qui devient également un foyer éditorial), qui lui de même qu'Alcheringa est disponible à la vente à la librairie de la HSP (accompagnant, c'est à noter, les trois premiers numéros de la revue, qui contiennent trois articles copieux de moi-même: dans le n°1 (2010), un grand dossier sur les bois sculptés de l'abbé Fouré, où j'avais réédité le Guide du Musée de l'ermite, dans le n°2, une prose poétique sur ma collection illustrée de plusieurs reproductions, Le royaume parallèle, et dans le n°3, un article sur les bouteilles peintes de Louis et Céline Beynet, des autodidactes inconnus et inventifs qui vivaient en Limagne, près d'Issoire).

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Alfred Flóki (1938-1987), un symboliste surréaliste attardé en Islande

     Grâce à l'aide de Jean-Louis Cerisier qui l'avait gardé dans ses archives familiales, j'ai retrouvé un dessin d'un dessinateur islandais qui, des années 1960 aux années 1980, joua les Alfred Kubin à la sauce Reykjavik.

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Alfred Flóki devant deux de ses dessins (années 1960?)

 

      Sjón, l'écrivain islandais le plus notoire de ce petit pays, et commissaire d'une rétrospective qui a eu lieu au musée des Beaux-Arts de Reykjavik en 2009, connut probablement Flóki, avant que ce dernier disparaisse prématurément à 49 ans. Il  présente ce côté rétro de l'artiste dessinateur comme une manière de réemployer les styles du passé pour les faire servir à une autre époque dans un autre type de récit. Il écrit : "D’une manière semblable à la façon dont Karen Blixen et Jorge Luis Borges réactivaient les vieilles traditions du récit de contes, Flóki employait des techniques visionnaires venues du passé en les intégrant à son propre langage." (Texte de présentation traduit par Bruno Montpied d'après une version anglaise, voir le texte complet à la fin de cette note). C'est assez malin, cette façon de tourner les choses... A priori, je dirais plutôt que par sincère admiration pour les dessinateurs visionnaires de la fin XIXe siècle, début du XXe siècle (les Kubin, les Max Klinger, les Félicien Rops, etc.), Flóki les continuait, en s'assimilant le surréalisme – comme le note aussi Sjón d'ailleurs, dès la première phrase de son texte – mais un surréalisme d'autodidacte, ce qui le rapproche d'un surréaliste belge, appelé Armand Simon (1906-1981), que le musée royal de Mariemont et le Centre culturel wallon à Paris ont exposé en 2014 ,à côté de Kubin, Klinger et Rops. Ce genre de dessinateur illustre à merveille un surréalisme spontané où les rapprochements les plus délirants se mêlent à des provocations immorales, le tout exprimé avec des moyens graphiques adolescents (c'est-à-dire des moyens graphiques en herbe).

     Cela dit, un ami, membre du groupe de Paris du mouvement surréaliste, Guy Girard, m'a envoyé récemment la précision suivante: " Flóki a bien participé aux activités collectives surréalistes du groupe Medusa (le groupe de Sjón, Thor Eldon and co) et auparavant à "Surrealist i Norden" (avec des surrés danois dans les années 1960-1970), si je me souviens bien. J'aime bien ce genre d'art "lubrique-visionnaire"."

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Alfred Flóki, sans titre (à moins que le titre soit l'inscription, incompréhensible pour moi, qui se trouve au verso : "©otsy"...), 42x29,5 cm, encre sur papier, 1982, anc. collection Christine Bruces ; c'est le dessin retrouvé dont je parle au début de cette note.

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Dessin d'Armand Simon, publié dans L'ombilic du rêve, Rops, Klinger, Kubin, Simon, sous la dir. de Sofiane Laghouati, La lettre volée et le musée royal de Mariemont (Belgique), 2014 ; même goût pour la provoc' naïve...

 

      Flóki peut être aussi rapproché d'un autre symboliste tardif, Gustav-Adolf Mossa, grand inclassable de l'art à l'écart, vivant à Nice, loin de  la capitale donc, qui possédait cela dit un métier artistique plus poussé, mais qui était tout aussi friand de scènes provocantes, avec des goules fixant de leurs grands yeux fous les spectateurs, du haut de pyramides où s'empilent des cadavres d'hommes nus, massacrés par elles. Ces artistes ont ceci en commun de vouloir forcer le trait, de lâcher les chiens de leurs fantasmes, sans se laisser freiner par de quelconques tabous. Ne s'en effraieront que les grenouilles de bénitiers.

 

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Alfred Flóki, 36,8 x 26,8 cm, 1983.

 

        Alfred Flóki est parfaitement inconnu par nos contrées, du fait du manque de curiosité des professionnels de la critique d'art, et du fait aussi de la barrière de la langue. L'islandais paraît si exotique aux oreilles françaises. Et pourtant, plusieurs artistes islandais, plasticiens ou musiciens de rock et de pop, ont su se faire connaître (en parlant anglais): Erró, Björk, Emiliana Torrini, et plus récemment Olafür Arnalds... Je suis tombé dessus en ce qui me concerne grâce aux surréalistes islandais qui firent parler d'eux dans les années 1980 (Sjón était leur figure de proue, avant de devenir par la suite, l'écrivain national et, accessoirement, le parolier de Björk). Et puis ma grande amie Christine Bruces séjourna en Islande deux mois (1982 ou 83 ?), où elle rencontra Björk, alors peu connue,  Sjón et autres membres du groupe des débuts de Björk, les Sugarcubes... et Alfred Flöki ! Elle m'avait raconté qu'il l'avait même entraînée, voulant la draguer très probablement, dans un petit voyage à travers l'Islande, en louant un taxi. La longue chevelure de Christine lui rappelait certainement les femmes qu'il affectionnait de dessiner dans ses compositions. Le dessin de la femme faisant une fellation à un pendu, qui fut donné à Christine suite au petit voyage, ne fut peut-être pas dessiné en pensant à elle, mais sa réalisation paraît cependant contemporaine du séjour de mon amie en Islande. D'où l'hypothèse qui courut un temps lorsque Christine montra le dessin de retour à Paris qu'il représentait un fantasme de Flóki vis-à-vis d'elle... Elle faisait la grimace devant cette hypothèse, et je ne pense pas qu'elle aimait beaucoup l'œuvre... Après tout, il y a plus romantique comme fantasme.

     Flóki, cependant, ne peut être limité à ce genre de dessin provocateur. Il possède apparemment, si l'on en juge d'après internet, au gré de ventes aux enchères islandaises (l'œuvre ne paraît avoir quitté beaucoup son pays), d'autres sources d'inspiration comme les images ci-dessous tentent de le démontrer.

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Alfred Flóki

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Alfred Flóki, 60x90 cm, 1983.

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Alfred Flóki, Œuf noir, 25x34 cm, 1977.

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Alfred Flóki, Aning (mise en scène), 29 x 24 cm, vers 1986.

 

*

Texte de présentation de Sjón (2009):

     Alfreð Flóki tient une place à part dans l’histoire de l’art islandais. Il fut inspiré par le symbolisme et le surréalisme, les théories de mystiques et de poètes, et ne manqua pas d’offenser ses compatriotes avec les idées audacieuses que ces sources ténébreuses propageaient. A sa première exposition, en 1959, il parut évident que Flóki voguerait à rebours des courants de l’époque. Non seulement il dénonçait l’art de la peinture et l’abstraction, mais ses sujets figuratifs, traités au fusain et à l’encre, étaient, pour le dire diplomatiquement, étrangers au public islandais. Le spectateur était rejeté de la vie morne et grise de Reykjavík vers un monde où la nature humaine apparaissait sous ses formes les plus extrêmes : la procréation et la mort, des fanatiques religieux constipés luttant contre de souriantes et capricieuses séductrices, le durcissement ou le pourrissement de la chair, des singes libidineux fricotant avec de nobles dames au passé suspect. D’une manière semblable à la façon dont Karen Blixen et Jorge Luis Borges réactivaient les vieilles traditions du récit de contes, Flóki employait des techniques visionnaires venues du passé en les intégrant à son propre langage. Mais même si la façon dont Flóki a construit son monde d'images rappelle plus les méthodes de travail des écrivains que celle des artistes, personne, parmi ceux qui auront vu son œuvre, ne peut douter qu’il chercha toujours de nouvelle voies dans ses interprétations visuelles ; la ligne peut tantôt être propre et bien pensée, tantôt devenir indisciplinée et agressive.

      Dans cette rétrospective, nous cherchons à faire connaître aussi bien le Flóki, artiste travailleur acharné, que le Flóki facétieux qui répondait à la curiosité du public à propos de sa vie privée par des interviews chargées de remarques provocatrices. L’œuvre qui reste nous peint une personnalité qui a plongé son regard dans l’abîme et nous a rapporté – à nous qui ne pouvions faire autrement que de regarder de l’autre côté – des histoires de ce rendez-vous dessiné avec la matière même, pourpre et noire, des ténèbres.

Sjón.

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Alfred Flóki, Le génie Alfred Flóki à Kvoldgongu,  30,5 x 18,5 cm, fév. 1959.

 

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Info-Miettes (27)

      Ma dernière volée d'infos-miettes remonte au 19 avril de l'année dernière. Cela ne veut pas dire un "Info-miettes" par an tout de même... En voici donc quelques-unes.

Une expo "Pépé" Vignes au Musée des arts buissonniers

Expo_Pepe_Vignes-recto musée des arts buissonniers.jpg       Pol Lemétais et l'association Les Nouveaux Troubadours montent une exposition sur cet étonnant dessinateur qui au ras de sa table, handicapé par sa vue déficiente, traçaient, entre autres, une légion de véhicules de tous types, cars, voitures, steamers, à l'aide de crayons de couleur ou de feutres. Les crayons de couleur tiennent mieux dans le temps comme on sait. Je connais un collectionneur amateur qui a vu ainsi  ses Vignes se volatiliser progressivement puisqu'il les avait imprudemment laissés à la lumière du jour.  A côté d'une centaine de dessins des années 1970 et 1980, on verra aussi à Saint Sever du Moustier (pas loin d'Albi) des objets, livres, photos et films en rapport avec ce "créateur emblématique de l'art brut". Cela apparaît comme une manifestation apportant du nouveau sur le sujet Pépé Vignes. C'est du 9 avril au 5 juillet.Expo_Pepe_Vignes-verso MAB.jpg

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Joseph dit "Pépé" Vignes, photo JDLL (illibérien, c'est-à-dire, un habitant d'Elne), sans date

 

Et, pendant ce temps, Paul Amar à la galerie Nicaise à Paris...

photo Pa Au mus des arts buiss.jpg         Une autre vedette de l'art brut, cette fois plus contemporain, Paul Amar (voir portrait ci-contre, au musée des arts buissonniers où une salle lui est consacrée), est exposé quant à lui dans une galerie parisienne qui était plutôt connue autrefois comme une librairie vouée aux livres d'art, aux estampes, aux gravures. Il semble que Nicaise ait tourné sa veste en faveur des arts bruts. Elle a récemment exposé André Robillard, décidément devenu un incontournable de l'art brut (en dépit des coups de main qui cherchent à épauler ses bricolages de ci, de là ; je crois savoir que les fusils en assemblages de matériaux recyclés, il aimerait bien les abandonner pour se consacrer exclusivement au dessin et aux objets spatiaux, mais la commande l'en empêche et il est gentil, il veut faire plaisir et peut-être aussi que ça met du beurre dans les épinards). Voici que la galerie récidive avec Amar, connu pour ses assemblages de coquillages rutilants, et peut-être parfois un peu trop clinquants. Personnellement, dans ses travaux je préfère les petits monstres qui ressemblent parfois à des gremlins, proches parents des monstres que dessinait l'ancien gardien de la paix catalan, Josep Baqué, lui aussi présent dans les collections d'art brut. Cela durera jusqu'au 7 mai, c'est plus bref, donc.

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Créations naïves et singulières en Mayenne... et en Pays de Loire

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        L'association CSN 53 reste toujours fort active. Après des expositions loin de France (chroniquées sur ce blog) , la voici qui revient au pays natal. Avec une brochette d'artistes et de créateurs que ses différents membres ont pris l'habitude de défendre: Cahoreau (qu'adore Michel Leroux, "l'égaré" de l'art obscur – label récupéré de la corbeille de Dubuffet), Cerisier, Chapelière (dont une œuvre sert d'illustration à l'affiche de l'expo, voir ci-dessus), Marc Girard, Céneré Hubert (un créateur populaire d'environnement dont plusieurs œuvres ont été sauvées par Leroux), Alain Lacoste (un grand ancien de l'art singulier), Patrick Le Cour (je connais pas), Joël Lorand (lui, on connaît), Serge Paillard ("l'homme aux patates", comme on commence à le surnommer ici et là), Jacques Reumeau, Antoine Rigal, et Robert Tatin (que sa veuve ne voulait surtout pas qu'on range dans l'art singulier, label qu'elle trouvait sans doute réducteur, à tort bien sûr). Et puis nos Mayennais, souvent protectionnistes (je taquine) et jaloux de leur "mayennité" (je re-taquine), ont daigné ajouter à ce premier lot des artistes des Pays de la Loire: Noël Fillaudeau (dont une belle sélection est désormais accrochée au Musée d'art naïf et d'arts singuliers du Vieux-Château à Laval), Stani Nitkowski (dont j'apprécie les premières œuvres et beaucoup moins les suivantes, plus "expressionnistes-explosives", invitant le public à lorgner sur ses souffrances, et à se complaire dans ce spectacle), François Monchâtre et Yvonne Robert (naïve, brute ou singulière?).Jardin de la Perrine, entrée discrète (2).jpg L'exposition se passe à Laval mais pas au Vieux-Château, plutôt au "musée-école de la Perrine", charmant hôtel particulier installé dans le jardin de la Perrine, à deux pas de la tombe du "gentil Douanier Rousseau" (auquel le Musée d'Orsay consacre comme on sait une grande rétrospective en ce moment à Paris, avec, paraît-il, l'exhibition du fameux tableau "Le Rêve", venu des USA, d'où il voyage rarement).

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Musée-école de la Perrine, ph. Bruno Montpied, 2016

Tombe du Douanier Rousseau, 2016 (2).jpgLa tombe du Douanier Rousseau, avec, incisé à sa surface, le poème d'Apollinaire, Jardin de la Perrine, ph. B.M., 2016

 

Et la Fabuloserie continue d'exposer de manière décentralisée, Auxerre cette fois-ci

csn 53,art naïf,art singulier,paul amar,joseph pépé vignes,musée des arts buissonniers,musée-école de la perrine,douanier rousseau     "Itinéraires fabuleux" est le titre de l'expo montée à l'Abbaye St-Germain au Logis de l'Abbé du 26 mars au 13 juin à l'initiative de l'Espace d'Arts Visuels de la ville d'Auxerre. Cela se veut une rencontre entre les créateurs de la Fabuloserie (basée elle aussi en Bourgogne, à Dicy) et des œuvres de l'artothèque de la ville. Sur l'affiche on reconnaît une pierre peinte par Jacques Renaud-Dampel, dont j'ai déjà parlé ici, confrontée à une œuvre du célèbre membre du groupe Cobra, Karel Appel, cette dernière pièce (un poil infantile, un Appel à tarte, si j'ose m'exprimer ainsi) provenant sans doute de l'artothèque, car je ne sache pas qu'il y en ait à la Fabuloserie.

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 Sortie d'un nouveau livre sur Hauteville House de Victor Hugo

csn 53,art naïf,art singulier,paul amar,joseph pépé vignes,musée des arts buissonniers,musée-école de la perrine,douanier rousseau,fabuloserie,renaud-dampel      Paris-Musées édite un nouveau livre sur la maison étonnamment décorée que posséda Hugo à Guernesey. Je ne connaissais personnellement jusqu'ici qu'un livre ancien, dû au poète Pierre Dhainaut, et édité au début des années 1980 (il me semble) aux éditions Encre (les mêmes qui éditèrent des livres sur le Facteur Cheval et Picassiette). Ce nouvel ouvrage, intitulé exactement Hauteville House, Victor Hugo décorateur, 160 pages, comporte des photographies et des dessins dus à deux arrières-arrières-petits-enfants du poète, Jean-Baptiste et Marie Hugo.  Et Laura Hugo, fille de Marie, a sélectionné des écrits familiaux permettant de situer l'apport du Hugo décorateur, adepte d'un art total. Il a décidément tâté de tout, le grand homme,  poète, romancier, dramaturge, photographe, peintre et décorateur. La parution du livre prend place à l'occasion de l'exposition "Les Hugo, une famille d'artistes" (du 14 avril au 18 septembre).

 

Ursula à la galerie Les yeux fertiles

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    Sur cette artiste à part, compagne du peintre Bernard Schulze (aussi exposé à côté d'elle dans cette même galerie Les yeux fertiles), on a peu de renseignements (en français). Cela fait des années que je la vois mentionnée ici et là, notamment au moment de la donation Cordier au MNAM (Daniel Cordier l'exposa dans sa galerie), et je n'arrive pas à me décider à creuser la question. Je la prends pour une autre Unica Zürn au fond, une artiste visionnaire, para-surréaliste, marginale par rapport à ce mouvement (on dirait que comme dans le cas de Bellmer et Zürn, on aurait encore affaire ici à un autre couple d'artistes allemands où une femme se cache, à tort ou à raison, dans l'ombre de son compagnon). A lire la base patrimoniale des musées de Suisse romande, plusieurs œuvres d'elle (Ursula Bluhm) figurent dans la Collection de l'art brut, sans doute dans l'ancienne collection annexe dite de la "Neuve Invention" (les cas-limites entre art brut et art reconnu ; la base patrimoniale en question ne mentionne pas le distingo, et c'est un peu embêtant, accroissant la confusion entre créateurs de la Neuve Invention et la collection princeps de l'art brut). Dubuffet acquit de ses œuvres avant qu'Ursula se marie avec le peintre Bernard Schulze. L'automatisme très présent dans ses œuvres, accompagné d'une grande richesse chromatique, ses jungles de petites touches mosaïquées, rendent la fréquentation de ses œuvres fort agréable.

L'exposition d'Ursula et Bernard Schulze, aux Yeux fertiles,  dure du 17 mars au 7 mai.

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Un dessin aux crayons de couleur d'Ursula Bluhm, de 1959, tel qu'il figure sur la base patrimoniale de Suisse romande

 

Et que va-t-on montrer à la galerie Dettinger-Mayer en ce printemps? Christelle Lenci

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     Plus récente exposition de la galerie lyonnaise, c'est prévu pour durer du 9 avril au 4 mai. "Il était une fois", c'est son titre et, comme on le devine un peu en regardant le carton d'invitation, ce sont des dessins qui sont exposés de cette artiste, Christelle Lenci, dont je n'avais jamais entendu parler jusqu'ici. Histoire de nous emmener en promenade dans une forêt de contes à usage interne peut-être... L'intéressant pour moi dans ce genre de dessins c'est l'usage parallèle du noir et blanc et de la couleur. Le noir et blanc paraissant réservé aux évidements, à la réserve laissée par les espaces colorés... Enfin, je le suppose à partir de ce seul dessin...

 

Armand Schulthess à Lugano 

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Inscriptions accrochées sur le terrain (de 20 000 m²) que possédait Armand Schulthess au Tessin ; ph. Hans-Ulrich Schlumpf, années 1970

 

    J'avais déjà mentionné l'exposition qui avait été montée au Centre Dürrenmatt de Neuchâtel sur cet ancien fonctionnaire qui abandonna son travail à 50 ans pour se retirer en ermite du côté du Monte Verita dans le Tessin, lieu emblématique et historique où tant d'artistes, de poètes, de philosophes et de révolutionnaires, firent des séjours. On peut imaginer que l'exposition qui a commencé le 19 mars au MASI (musée d'art moderne) de Lugano, pour durer jusqu'au 19 juin, sous le commissariat de Lucienne Peiry, est le prolongement de celle de Neuchâtel. Pour en savoir plus sur ce créateur encyclopédiste  qui avait semé des médaillons couverts d'inscriptions chargées d'informations scientifiques de tous ordres sur les arbres de son jardin (assez proche par le projet d'un Gregory Blackstock aux USA, ou d'un Arthur Bispo de Rosario au Brésil, eux-mêmes passablement férus d'accumulation d'informations), on peut écouter Lucienne Peiry interviewée dans une émission de radio, "A vous de jouer", sur Espace 2 (elle intervient seulement à 41'30, attention). Ou se référer aussi à son site, Notes d'Art brut.

 

Du côté de la création franche, le musée de Bègles réaménage ses salles et son accrochage

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Etoiles noires de Robert Giraud

      Robert Giraud, on commence à le connaître davantage, grâce au blog d'Olivier Bailly, Le copain de Doisneau, qui a ranimé sa mémoire sur internet avant de publier une courte biographie sur lui chez Stock, intitulée Monsieur Bob. Plusieurs livres de lui sont aujourd'hui disponibles, notamment chez l'éditeur Le Dilettante. Son livre le plus connu, Le vin des rues a été réédité chez Stock, en même temps que sortait la biographie d'Olivier Bailly.Monsieur Bob d'Olivier Bailly.jpg

      C'était un connaisseur et un écrivain du Paris populaire des années 50 aux années 90 (il est disparu en 1997) que l'histoire littéraire a tendance à passablement occulter. Lisons ces lignes d'Olivier Bailly qui cerne en quelques mots les centres d'intérêt du personnage: "Il ne traitera que de sujets en marge: clochards, tatoués, gitans, petits métiers de la rue, prostitution, bistrots, sans oublier la cohorte des excentriques de tout poil. Son premier coup d'éclat, il le réalise avec Doisneau, dans Paris-Presse, avec la publication d'un reportage au long cours, "Les étoiles noires de Paris", onze articles consacrés à des personnages insolites qui peuplent le Paris de cette époque et que Bob croise pour certains dans ses périples journaliers et là où il boit son vin quotidien." (Monsieur Bob, p.84). Le vin était une autre de ses passions, sang de la vigne qui irriguait le corps de ses passions pour la vie immédiate. Olivier Bailly note qu'il fréquentait les bistrots qui avaient une certaine exigence en matière de crus, ceux tenus par des bistrotiers qui allaient sur place dans les régions chercher leurs récoltants, en évitant les "bersycottiers", c'est-à-dire les négociants de Bercy qui s'étaient enrichis pendant la guerre grâce au marché noir avec des mauvais vins (surnommés "côteaux de Bercy", synonymes de piquettes). Giraud, qui fut aussi un temps secrétaire de Michel Tapié au début de l'histoire de la collection de l'art brut, en 1948, alors que Dubuffet était parti voyager en Algérie, et qui garda mauvais souvenir de ce dernier qui le traitait en factotum (bien longtemps après, il parlait de lui en disant que Dubuffet n'était qu'un cave...), Giraud eut-il le temps de lire la "biographie au pas de course" (publiée dans Prospectus et tous écrits suivants, tome IV, 1995) où Dubuffet se vante lorsqu'il était marchand de vins justement à Bercy d'avoir renfloué son entreprise grâce au marché noir (il précise avoir alors vendu des "vins d'une qualité un peu supérieure" au vin de consommation courante, ce qui lui procura des bénéfices qui lui permirent d'éponger les dettes de son commerce d'avant-guerre, car il n'y avait sans doute plus de taxes sur ce négoce réalisé sans factures, sur parole)...? Nul doute que cela lui aurait confirmé ses impressions de la fin des années 40.Robert Giraud au comptoir chez Albert Fraysse, par Maximilien Vox, blog Le Copain de Doisneau.jpg

      Giraud vécut de divers petits métiers (il vola même un temps des chats, il fut avec sa femme Paulette bouquiniste à la hauteur de la Samaritaine). Ses sujets de prédilection étaient les clochards, les tatoués, les bistrots, et l'argot sur lequel il publia de nombreux livres. Il s'intéressa aussi aux créateurs insolites, plusieurs de ses articles publiés dans différentes revues et journaux (outre Paris-Presse, il y eut aussi Franc-Tireur et la revue Bizarre) s'y rapportent: par exemple Frédéric Séron dans Les étoiles noires de Paris (1950 ; avec Robert Doisneau, son complice photographe qui fit de nombreux reportages avec lui, il paraît l'un des tout premiers à avoir rendu visite à Séron, avant Gilles Ehrmann en particulier), Picassiette (dans Bizarre n°V en juillet 1956), ou encore Gaston Chaissac dans Franc-Tireur en août 1956 (Chaissac de qui il reçut une correspondance dont certains éléments ont été publiés par Dubuffet et Paulhan dans Hippobosque au bocage en 1951). Charles Soubeyran (auteur des Révoltés du Merveilleux, livre consacré à Doisneau et Ehrmann où l'on voit plusieurs des créateurs évoqués dans les "étoiles noires de Paris" comme Jean Savary, Maurice Duval, Frédéric Séron, Pierre Dessau) a un jour signalé que certain "dandy de muraille" peint par Chaissac renvoyait au frère de Robert Giraud, Pierre Giraud qui était un dessinateur et un peintre spontané, associé un temps à l'aventure de la débutante collection de l'art brut.Pierre Giraud enchanteur limousin, plaquette art brut éditée par la Galerie René Drouin en 1948.jpg

      Les chroniques de Robert Giraud sur les figures de la rue parisienne, vivant sous d'autres coordonnées mentales que le commun des mortels, au fond, on pourrait les voir comme issues d'une tradition de chroniqueurs du Paris populaire excentrique, qui rassemblent par exemple ces auteurs du XIXe siècle connus sous le nom de Lorédan Larchey (Gens singuliers), Champfleury (Les Excentriques), Charles Yriarte, Charles Monselet, etc, tous auteurs que l'on retrouve aujourd'hui au catalogue des précieuses éditions Plein Chant.

      En attendant que quelque éditeur veuille enfin réunir les différentes contributions de Robert Giraud à la cause de l'art brut, on se contentera d'initiatives isolées comme cette réédition à Noël 2009  des onze articles parus dans Paris-Presse, "Les étoiles noires de Paris", sous l'aspect d'un livre-objet conçu par Bernard Dattas qui s'est amusé pour le compte des "Editions des Halles" à publier cet ensemble sous la forme d'un livre massicoté en étoile, qui une fois ouvert révèle des dizaines d'autres étoiles de toutes couleurs (c'est joli mais ne va pas sans faire des difficultés pour la lecture...).

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Réédition des Etoiles noires de Paris de Robert Giraud par Bernard Dattas, 2009

      Bonne idée qu'a eu là Bernard Dattas (qui ne paraît pas à son coup d'essai, d'autres ouvrages ont semble-t-il été réalisés auparavant sur lesquels je n'ai que des ouï-dire, le monsieur cultivant, semble-t-il, un certain secret). On découvre ainsi l'ensemble des personnages qu'avait évoqués Giraud en 1950, ceux que j'ai déjà cités, plus Armand Févre, André Gellynck, Salkazanov, M. Dassonville et sa cane Grisette, Gustave Rochard, M. Nollan dit l'Amiral, le peintre Héraut, Pierre Dessau qui se baladait en costume Directoire et juché sur un grand Bi à travers Paris... Malheureusement je ne puis renvoyer mes lecteurs à une quelconque adresse qui leur permettrait d'avoir accès à leur tour à cette charmante publication. A moins que M. Dattas, s'il nous lit, veuille bien éclairer nos lanternes.

 Les étoiles noires de Paris par Robert Giraud et Robert Doisneau, édité par Bernard Dattas.jpg
L'ouvrage étoilé une fois ouvert... Une photo de Frédéric Séron par Robert Doisneau apparaît à droite 

 

 

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Exposition George Schmits à la bibliothèque Ulysse Capitaine (de Liège)

     J'aimerais bien m'appeler Ulysse Capitaine, moi, quel beau nom de héros qu'on imagine ayant conquis ses lettres de gloire au cours d'explorations aux confins de la terre et des mers. Heureux qui comme Ulysse Capitaine a fait de beaux voyages...

       Mais je ne chercherai pas à savoir qui était en réalité cet illustre Capitaine, je l'ai abandonné à ma rêverie et me suis plutôt contenté de focaliser sur l'exposition que consacre la bibliothèque ainsi nommé à Georges Schmits, romaniste, historien d'art, critique et éditeur liégeois à Verviers (commune de Wallonie célèbre à mes yeux pour avoir hébergé longtemps André Blavier, l'anthologiste des fous littéraires et écrivain fort estimable), et qui, à côté de diverses marottes littéraires – c'est là où je veux en venir – s'est aussi occupé d'art naïf belge. Oui, "naïf belge"... L'adjonction de ces deux épithètes doit nous incliner à dresser davantage l'oreille et aiguiser nos yeux. Le Naïf belge, c'est souvent du super-naïf, du bon naïf, rien à voir avec l'art naïf "cu-cul" que stigmatise le peintre, collectionneur et très bon connaisseur de l'art naïf, Yankel.

 

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Armand Funcken, Le départ du soldat, huile sur toile, 1915, anc.coll. André Blavier, ph. J. Keil
 ; Funcken avec son père était peintre populaire d'enseignes et de baraques foraines, lui-même peignant des charrettes de marchands de glaces italiens ; ce "départ du soldat", sujet patriotard colporté par l'imagerie populaire est à comparer avec le retour du soldat, intitulé "Victoire-Défaite" que j'avais mis en ligne le 10 juin 2011, à propos d'un peintre appelé Galeani...

 

         Georges Schmits paraît s'être surtout occupé des Naïfs wallons et d'un groupe de peintres nommés "les intimistes verviétois" (ça m'a amusé de tomber sur cet "isme"-là, étant donné que j'emploie le même terme en ce moment dans un projet d'expo), se caractérisant, écrit Monique Smal, par les mêmes "thèmes de prédilection : neige, paysages campagnards, objets du quotidien". C'est de l'intimisme très figuratif et très rétinien comme on voit.

 

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Couverture de L'art naïf en Wallonie et à Bruxelles, Ed.Labor, 1981 ; le tableau reproduit sur la couverture est de Karl William (Souvenir de la guerre 14-18, huile sur papier, 100 x 100 cm, coll. G.Schmits-Daube).

 

          Mais si l'on veut en apprendre plus sur le personnage, il faut acquérir ses ouvrages. Je ne sais pas ce qu'il en est de leur disponibilité aujourd'hui. Je conserve de lui seulement un ouvrage de 1981 paru chez Labor à Bruxelles intitulé L'art naïf en Wallonie et à Bruxelles. Très clair, précis, il recense environ une cinquantaine de peintres naïfs (il n'y est pas question des "intimistes verviétois"), choisis pour leur sincérité autodidacte, éloignée de tout maniérisme (maniérisme naïf qui est le fait de peintres plus savants, imitant la manière naïve par admiration ou par souci de petit commerce, maniérisme qui est une des raisons pour lesquelles l'art naïf masqua, et finit par disqualifier, le vrai naïf de qualité).art naïf,bibliothèque ulysse capitain,george schmits,art naïf belge,yankel Il rend hommage dans cet ouvrage à d'autres exégètes de la peinture naïve dans son pays comme Marcel G. Lefrancq ou Albert Dasnoy. Il témoigne surtout de son admiration pour Georges-Henri Luquet qui avait créé au début du XXe siècle le terme et la notion de "réalisme intellectuel" (à propos des dessins d'enfant et aussi je crois de l'art populaire en prison, des graffiti). Ce réalisme intellectuel, Schmits le voit à l'oeuvre dans l'art naïf qui l'interpelle tant.

     Voici un extrait de ce livre qui explique ce qu'il entendait à la suite de Luquet par ce terme un peu oublié aujourd'hui (à tort selon moi):

    "...dans le réalisme visuel, la surface à peindre apparaît en quelque sorte comme une fenêtre à ouvrir sur la trompeuse profondeur du réel, avec tout ce que cela suppose d'obéissance aux illusions de la perspective, [tandis que] le réalisme intellectuel considère le tableau comme une surface abstraite sur laquelle les objets se poseront comme autant de signes régis dans leur nombre, dans leur tracé, dans leur taille, par une volonté de lisibilité suffisante aux yeux du créateur ; celle-ci sera par conséquent variable au gré de son exigence comme au fil des progrès de sa main et de sa faculté d'observation.

       Ce type de conception entraîne un certain nombre de changements dans nos habitudes de vision, de traitement de l'espace et du temps, dont le moindre n'est pas le non-emploi (par ignorance ou par rejet) de la perspective et des procédés qui visent à simuler la profondeur. Maladresse, dira-t-on, recul par rapport à la Renaissance! Pourtant, c'est là aussi la grande découverte du cubisme comme du fauvisme: rejeter la profondeur et la perspective pour restituer le tableau, dans un espace à deux dimensions qui est son caractère premier, à l'intégralité de son essence. C'est là aussi ce qui contribue à l'unité et à la tension des images populaires et des œuvres des primitifs où tout se passe sur le plan du tableau, sans que ne s'établisse par la fuite vers des lointains fallacieux, une perte de la tension plastique." Un peu plus loin, Schmits écrit ces autres phrases éclairant la découverte cardinale présente dans la peinture naïve: "Telle table ronde, qui deviendrait ellipse si la perspective entreprenait de la situer dans l'espace, sera maintenue dans sa forme réelle ; telle forme carrée refusera de devenir trapèze. Les choses ont aux yeux du naïf les formes dans lesquelles il vit sa relation avec elles [C'est moi qui souligne].  Le tabouret, expérimenté dans sa rondeur, sera maintenu tel ; le buffet, par contre, se dressera comme un rectangle. Mais vient-on à les reproduire ainsi, côte à côte, sur la toile : le tabouret suppose une vue plongeante et le buffet, une vue frontale. C'est ce que Luquet a nommé les perspectives multiples. Elles se contredisent mutuellement et font s'effondrer la profondeur". Art naïf et réalisme intellectuel sont ainsi synonymes.

      Bonne idée donc pour cette bibliothèque de Liège de permettre à cette figure importante de la critique d'art belge de refaire surface. 

Hommage à Georges Schmits, exposition du 11 mai au 10 juillet 2012, Bibliothèque Ulysse Capitaine, En Féronstrée 118 4000 Liège.

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20/06/2012 | Lien permanent

”Le Cœur au ventre”, une collection d'art singulier et brut

      "Le Cœur au ventre" – ce titre de l'expo qui va bientôt ouvrir, dans deux jours, chez Art et Marges à Bruxelles (314 rue Haute, dans le quartier populaire des Marolles) – provient du nom de la défunte galerie de Marion Oster, qui était ouverte dans le Vieux Lyon et qui a été fermée voici deux ou trois ans¹, l'art singulier ne perdurant pas, faut croire, sous la cathédrale de Fourvière... (En effet, il y a désormais pas mal d'années, il y eut un autre lieu favorable aux Singuliers dans cette même partie de Lugdunum, à savoir l'Espace Poisson d'Or qui lui-même était un avatar de la galerie du même nom qui était dans les Halles à Paris...). L'exposition commence  le 13 février et se terminera le 7 juin.

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Ludovic et Marion Oster dans leur ancien appartement de Lyon, tenant un couple de poupées de Monique Vigneaux (derrière, je crois reconnaître Louis Pons ?, Philippe Dereux?, Le Carré Galimard?, Mister Imagination et ses pinceaux anthropomorphes, entre autres...) ; la poupée est un thème et un support du reste récurrents dans leur collection ; © ph. Annabel Sougné, Art et Marges, 2018.

 

         Marion Oster est artiste, et collectionneuse, cette dernière casquette étant partagée avec son mari Ludovic, un féru de galeries, foires et autres Puces et brocantes. Leurs goûts se portent, pour une petite partie de leur collection, vers un art expressionniste contemporain, mâtiné d'art brut et d'art singulier. Ce qui correspond à une tendance actuelle – dont je ne suis que modérément friand, je m'empresse de le dire – qui identifie exclusivement dans l'art brut et singulier les mêmes composantes que dans l'art souffrant, l'art du pathos. Les corps se squelettisent, les tripes s'exhibent en toute impudeur, les êtres sont proches des cadavres, la personne se tord de douleur métaphysique ou pathologique... Parfois, comme dans le cas des œuvres de Stani Nitkowski, ce dernier étant très présent dans la collection des deux Oster, les corps sont en voie d'explosion (voir ci-contre expo à la coopérative Cérés Franco à Montolieu)...St Nitkowski-peau-mots-michel-macreau.jpeg Et c'est vrai que la maladie, la mort, la détresse sont des sujets qui travaillent souvent par-dessous beaucoup d'artistes, au risque de sombrer dans une certaine forme de misérabilisme new look, analogue à l'attitude du blessé léchant ses plaies. Citons dans cette collection les œuvres de Michel Nedjar, Jean-Christophe Philippi, Ghislaine et Sylvain Staelens, Philippe Aini, Lubos Plny, Jean Rosset, Denis Pouppeville...

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Lubos Plny, Galerie ABCD, Montreuil-sous-Bois.

 

     Cependant, la collection Oster est loin de se limiter à ce néo-expressionnisme. Beaucoup d'anonymes en font partie aussi, sur lesquels je n'ai recueilli que peu de renseignements, mais qui prouvent l'enthousiasme sincère de nos deux amateurs d'art pour des œuvres sans se préoccuper d'un quelconque pedigree placé en amont. Ils sont ainsi capables d'acquérir un objet d'art forain qui les aura interpellés au détour d'un marché aux Puces, en raison de son apparente "barbarie". La force de l'objet prime avant tout. Marion et Ludovic ne s'encombrent pas de théorie de toute façon, l'oeuvre leur parle ou pas, et les choisit ou non, pour devenir une compagne de vie dont ils ne se séparent plus après acquisition.

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Jeu d'art forain, coll. Marion et Ludovic Oster (acquis place du Jeu de Balle, non loin de chez Art et Marges à Bruxelles), ph. Bruno Montpied, 2017.

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Une vue de la collection Oster, comme elle se présentait à l'époque de l'installation lyonnaise ; © ph. Annabel Sougné, Art et Marges, 2018.

 

      Dans leur fourmillante collection, dont l'installation lorsqu'ils vivaient à Lyon côté Rhône a frappé tous ceux qui l'ont visité (et notamment les animateurs d'Art et Marges qui ont choisi du coup d'essayer d'en reconstituer l'aspect dans leur locaux de la rue Haute à Bruxelles), avec son apparence de grotte ou de crèche géante grouillant de formes, couleurs, aspérités, sinuosités dans lesquelles l'œil ne savait où se poser, comme errant dans un labyrinthe, on trouve aussi de plus énigmatiques créations. Comme celles d'Yves Jules, Angkasapura, Armand Avril, Babahoum, Ben Ali, Asmah, Bonaria Manca, Caroline Dahyot, Burland, Monchâtre, Giovanni Bosco, Guy Brunet, Jean Branciard, Jean Tourlonias, Juliette Zanon, Karl Beaudelère, Las Pinturitas, Martha Grünenwaldt, Monique Vigneaux, Ni Tanjung, Noël Fillaudeau, Paul Amar, Philippe Dereux, Pierre Albasser, Sylvain Corentin, Le Carré Galimard, Ted Gordon, etc. J'ai également l'honneur de figurer parmi toutes ces vedettes (l'œuvre ci-dessous provenant d'une expo à la galerie Dettinger-Mayer).

Mise à jour du 17 février :   

      On déplorera au passage que les animateurs d'Art et Marges, d'après ce que m'en ont dit des visiteurs présents au vernissage, n'aient pas jugé utile de placer des cartels à côté de chaque oeuvre afin de renseigner le public. Ce procédé peu respectueux des artistes et des créateurs se poursuit apparemment dans le catalogue où aucune information sur l'identité des artistes (certes nombreux) n'est apportée...

 

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Un aspect limité de l'intérieur de la Villa Verveine décorée par son habitante, Caroline Dahyot (ph.B.M., 2018) ; cette dernière a monté une installation de ses diverses œuvres dans le cadre de l'exposition "Le Cœur au ventre", installation qui tente à chaque fois de restituer un peu l'ambiance unique du décor intérieur de son habitat à Ault (Somme).

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Caroline Dahyot, Jamais tu ne te soumettras, tableau exposé au Petit Casino d'Ailleurs en 2018 ; personnellement, je trouve que l'art de Caroline n'est jamais mieux mis en valeur qu'en œuvres séparément exposées, et non accumulées comme dans ses installations ; ph. B.M.

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Bruno Montpied, L'avenir menaçant², 31,5 x 24 cm, 2013, coll. Marion et Ludovic Oster, ph. B.M.

 

       La naïveté pourrait tout aussi bien s'y faire une place dans cette collection, avec les poupées transformées, mais aussi les objets de piété éclairés par l'ingénuité de leurs auteurs, les ex-voto, les paperoles, les reliquaires (qui hésitent entre naïveté et morbidité, avec leurs bouts d'os considérés comme reliques adorées...), les petits tableaux sans prétention...

 

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Œuvre anonyme acquise récemment par les Oster, une bergère, son mouton, son fuseau, son chien, broderie en fil chenillé et collage, sans date (XIXe sans doute) ; ph.B.M.

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¹ Marion Oster a animé également auparavant, cette fois à Paris, durant près de quinze ans, l'Espace Lucrèce dans le 17e ardt.

² A noter que ce titre pourrait faire figure de signe avant-coureur du titre du récent livre de Joël Gayraud, L'Homme sans horizon...

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