Galipettes de corbeaux à Mauriac: MASSIF EXCENTRAL (3) (02/08/2007)
Ne venez pas me dire, on connaît déjà ça, on en a déjà vu... (car il y a des lecteurs blasés, ils se sont manifestés pas plus loin que sur ce blog).
Or donc, voici des corbeaux qualifiés sur les cartes postales vendues du côté du Cantal, non pas de "chers corbeaux délicieux", comme disait Rimbaud, mais de "diableries". Ce qui devait être le terme autochtone pour parler à mots couverts, en pouffant ou tout au contraire d'un ton scandalisé, de ces postures affriolantes, voire "pornographiques" (une pornographie* moyen-âgeuse et ingénue) qui s'affichent depuis quelques siècles sur les corbeaux de l'église de Mauriac. Quid des "corbeaux"? Ce sont, dit le dico d'architecture, des "supports en surplomb accusant une faible saillie par rapport au nu d'un mur"... Saillie, nu du mur, on ne saurait mieux dire entre les lignes... Je parlerai personnellement davantage d'acrobaties aussi vieilles que l'homo sapiens (Pierre Molinier et ses contorsions n'avaient rein inventé). Quoi...? Ah, oui, on me souffle... Ce sont des modillons, pas des corbeaux... Bon, d'accord, M.Boussuge, mais je préfère les corbeaux... C'est plus petit que les modillons, ça saillit moins, mais c'est plus rigolo, corbeaux, pour les acrobaties.
Rincez-vous donc l'oeil par ces beaux soirs d'été, pas seulement le gosier.
17:10 | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : Mauriac, Erotisme roman, Sculpture populaire, Pierre Molinier, corbeaux romans | Imprimer
Commentaires
Je suis ravie de voir que les acrobates romans sortent de leurs cachettes de pierre...Quand j'ai commencé à m'intéresser au sujet j'ai dû faire le constat, que malgré leur prolifération ici et là (j'ai fait un petit tour de France trop rapide), le thème restait très mineur, d'abord pour les observateurs, mais aussi dans les livres d'histoire de l'art et d'architecture qui négligent trop le détail exubérant et vivant (souvent "mineur")au profit de l'ensemble hiératique et monumental. Naïvement je cherchais une sorte de liste sur laquelle seraient répertoriés la plupart des acrobates romans. Eh bien, ma surprise fut de constater que cette friche n'existait que de façon trop parsemée et succincte, ou alors totalement isolée. Répertorier les acrobates, pourquoi pas? Pouvoir en restaurer certains? Les étudier de bien plus près.Tout reste à faire, signaler, photographier, diffuser... et si possible regrouper les "données"? Car à bien aller à leur rencontre, il y a une faune luxuriante d'acrobates, tombereaux, sautriaux, de miséricordieux, de bizarroïdes faiseurs de culbute, toute une jungle de volupté et de luxure, une fourmilière pullulante de diables aux corps pétillants. Avec Deonna, Witkowski, Baltrusaitis, Focillon, le site de Jalladeau et vous qui remuez le couteau dans la plaie, il y a en effet de quoi redonner son corps de noblesse à l'homo acrobaticus: un prodige de l'homo sapiens, un "tour de force de l'esprit" qui a été trop masqué ("enfants de la lune") par le "monde à l'endroit", mais qui n'a pas fini de faire monstration de sa galerie de "curiosités" et de nous régaler de sa beauté difforme, de ses caprices drôlatiques et folâtres.
Myriam Peignist
Écrit par : peignist | 29/01/2008
There is a german/spanish website about pornographic Romanesque sculpture and its anti-muslim message at www.islam-in-kathedralen.de.vu and also a documentary by Claudio Lange about the anti-Islamic message of Romanesque sculpture in Europe (Spain and France, 11th and 12th century) at youtube: http://www.youtube.com/watch?v=e1M3_Tlr7vQ
Daniel Zimmermann
Écrit par : Daniel | 24/07/2008
Le film sur Claudio Lange, dû à Claus Josten (ayant pour titre "L'ennemi à nu") a été signalé sur mon blog dans la note du 11 septembre 2007 (http://lepoignardsubtil.hautetfort.com/tag/Claudio+Lange), note qui posait un lien vers un texte d'Emmanuel Boussuge sur le thème des "obscénités" romanes dans le Cantal.
Je ne lis pas l'allemand hélas, et ne peux donc juger du contenu du site que vous indiquez dans votre commentaire, et notamment pas s'il traite véritablement du "message anti musulman" (comme vous dites) qui serait présent dans l'iconographie romane . Dans le film de Claus Josten cependant, l'auteur traitait de la question comme d'une hypothèse proposée par Claudio Lange, sans affirmer que cette interprétation avait eu depuis force de loi dans la communauté des historiens de l'art roman.
Personnellement, et bien que je ne connaisse que fort mal l'art roman (les "galipettes" de l'église de Mauriac, je les signalais en passant), je subodorais dans ce genre de théorie un léger délire d'interprétation, comme une préfiguration de théorie de fou littéraire pour plus tard... (Sans compter l'effet malheureux que pourrait avoir ce genre de remarques sur quelques fanatiques de passage...)
Écrit par : Le sciapode | 24/07/2008
Puis-je avoir des coordonnées (adresse postale ou Email, ou numéro de téléphone) qui me permettraient de contacter personnellement (tout au moins de lui écrire une lettre non publique) Bruno Montpied, dit le Sciapode, autrement que sur son blog (car je souhaiterais lui soumettre une petite question sur le sujet).
Myriam Peignist
Écrit par : peignist | 01/08/2008
Les couples de sculptures "musicien" et "danseuse échevelée" (Civray, Villeneuve d'Aveyron entre autres) ou "acrobate" est un écho des "attractions" qui égayaient la vie de cour. C'est un thème fréquent aussi dans l'art musulman de cette époque (miniatures et autres). Voir livres sur les convergences des arts musulmans et chrétiens au moyen-âge. Références à retrouver. Alors, convergence ou emprunt d'un thème: celui du banquet courtois, lui-même emprunt ou convergence ?
Moi, j'ai une autre idée, dénuée de tout fondement, un dada, c'est les guérisons des déprimées -possédées par la musique et la danse. Cela se faisait encore il y a peu (années 1950- De Martino) dans la région de Tarente en Italie du sud (la tarentelle). Cela existait-il dans d'autre pays ? Les croisés ne l'auraient- ils pas importé ? On peut rêver.
Écrit par : martinaf | 09/01/2010