Tourisme brut, populaire en été, poésie de l'immédiat (2): Louttre B. exposé à la galerie Le Troisième Œil à Bordeaux (15/06/2017)
Après une balade à Strasbourg, filez donc à Bordeaux en ce mois de juin... (Le travail salarié, et les contraintes qui vont avec, ont bien sûr été abolis!). On peut y découvrir, rue des Remparts, à la galerie Le Troisième Œil (pour probablement peu de temps encore (je crois que cela se finit fin juin) une petite exposition de Louttre B., le peintre de Boissiérette dans le Lot (1926-2012), que personnellement j'apprécie bien, surtout dans ses compositions des années 70, dont certains tableaux au Troisième Œil font partie (sur son mur de gauche sans la salle du rez-de-chaussée ; il y a d'autres peintures plus récentes au 1er étage). Ces compositions-là offrent une audacieuse rencontre de matières dites abstraites avec des figurations quelque peu ingénues, pour ne pas dire assumées naïves.
Louttre B., Le Café de Syta, huile sur contreplaqué, 78x107 cm, 1974, exposé à la Galerie Le Troisième Œil, Bordeaux, juin 2017, ph. Bruno Montpied (avec un mobile pas terrible; ne pas trop s'attarder sur la lumière orangée aussi, présente au sommet de la composition, reflet de l'éclairage de la galerie...).
Le bonheur a été capté et capturé dans ces peintures, c'est lui qui passe tout entier, imprégnant de sa lumière toutes choses, posées sur la surface de la toile comme papillons mentaux, touches légères et désinvoltes, musique de nuit...
Louttre B., Les naufragés de l'Astrolabe, huile et sable sur contreplaqué, 78x107 cm, 1975, ph. B.M. (ici aussi, on ne se fiera que fort modérément aux couleurs faussées de cette reproduction assez minable...).
Peut-être que certains internautes, après avoir parcouru cette note et vu ces reproductions si infidèles (elles ne peuvent que l'être), me rétorqueront que Louttre B., ils ne voient pas pourquoi je m'y intéresse. C'est qu'il ne faut pas faire confiance à ces images. Il ne faut pratiquement jamais se fier aux seules images, qui ne fonctionnent que comme faibles indices. Il faut absolument, au contraire, aller voir sur place, se confronter aux œuvres dans leur présence matérielle, expérience qu'aucune contemplation d'images ne peut remplacer. Ceci paraîtra peut-être un truisme pour certains, mais sur internet cela a besoin d'être asséné, et répété. Nous sommes tellement baignés d'images que nous en perdons – surtout les plus jeunes peut-être – le sens du contact avec l'œuvre réelle, en trois dimensions. La rencontre physique avec celle-ci est incontournable. C'est peut-être pour cela que les galeries que j'aime, Le Troisième Œil à Bordeaux (d'Anne-Marie Marquette) ou la galerie Dettinger-Mayer (d'Alain Dettinger) à Lyon ne possèdent pas de sites internet (ou si elles en ont un tout de même, comme chez Dettinger, il n'est pas à jour et végète lamentablement...!).
00:22 | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : louttre b., galerie le troisième œil, naïveté et abstraction, galerie dettinger-mayer, rapport physique aux œuvres d'art | Imprimer
Commentaires
Vous avez évidemment raison, cher Sciapode, rien ne vaut la découverte d'une oeuvre "in situ", (il faut dire que pour illustrer cette notice vos photos sont particulièrement de mauvaise qualité, ce qui n'est heureusement pas toujours le cas sur ce blog) mais comment être au four et au moulin, je veux dire à Lyon et à Bordeaux lorsqu'on est pas encore le jeune retraité heureux que vous êtes ?
Écrit par : RR | 15/06/2017
Bien sûr, les plus belles photos ne remplacent pas les oeuvres, et pas seulement dans le cas des artistes singuliers. Vous croyez aimer la "Naissance de Venus" de Botticelli, et puis vous allez visiter la Galerie des Offices. Soudain vous entrez dans une salle et vous vous retrouvez face à elle. L’émotion esthétique vous tombe alors dessus comme l'aigle sur le mouton.
Écrit par : Isabelle Molitor | 16/06/2017
Très bien dit Mame Molitor, et j'ajoute que l'émotion "esthétique" n'est pas seulement spéculaire en l'occurrence, elle vous atteint physiquement. Je me souviens personnellement du choc que j'éprouvai en pénétrant dans une salle d'expo au musée d'Orsay où l'on avait rassemblé quatre toiles de la même année de création, une de Munch, une d'Ensor, une de Cézanne (je crois...) et surtout une du Douanier Rousseau (il me semble que c'était "La Guerre"). Cette dernière me parut écraser instantanément les trois autres, les repoussant dans l'ombre et les limbes, dardant une espèce de magnétisme vers moi, envoûtant... Il en émanait une force que le terme d'"esthétique" est loin d'évoquer à mes yeux..
Écrit par : Le sciapode | 16/06/2017
Inutile de tirer sur mon ambulance, RR, je l'ai assez dit dans ma note que mes photos étaient du genre pourri. Je n'avais que cela à ma disposition, la visite de cette galerie s'étant faite inopinément.
Ce blog est aussi un carnet de notes rédigées et illustrées au gré de la poésie immédiate... D'où parfois des moyens déficitaires côté qualité de reproduction. L'essentiel étant de pouvoir restituer une émotion attrapée au vol
Quant à Lyon et Bordeaux, je ne vous demande pas de vous rendre ubique... L'une peut très bien se visiter après l'autre. Il y a toujours quelque chose d'intéressant à tout moment dans les deux lieux. Et par exemple, bientôt chez Dettinger, il semble qu'il va y avoir une intéressante expo de Catherine Garrigues.
Et puis, j'ai des lecteurs dans les deux villes, je pense. Il n'y en a pas que pour les Parigots.
Écrit par : Le sciapode | 16/06/2017
Ce tableau de Louttre B. me donne l’impression d’une sorte de Gilbert Pastor, mais heureux. Ce qui rime avec oxymore.
Écrit par : Nestor Zeugma | 16/06/2017