Le Poignard Subtil

Cette plaisante remarque de Tomi Ungerer me remet en mémoire la réflexion plus poétique sur le même thème proposée par Joël Gayraud dans « La Paupière auriculaire » (§ 54, Éditions José Corti, 2018) : « Si jamais je deviens aveugle, ce qui, étant donné ma vue très défectueuse, n’est pas du tout exclu un jour ou l’autre, je ne supporterai absolument pas d’être classé parmi les malvoyants ou les non voyants. Je revendiquerai hautement mon titre d’aveugle, à la belle consonance pathétique et poétique à la fois. « Aveugle », ce mot épicène, s’appliquant aussi bien à la jeune fille privée de lumière depuis la naissance qu’au vieillard atteint tardivement de cécité, porte indissolublement en lui la dimension mythique de la divination. Dans l’imaginaire humain, et pas seulement occidental, l’aveugle est toujours celui qui, privé de la vue du monde sensible, est doué de vue intérieure, qui permet de voir le fond des choses et de pénétrer l’avenir. L’aveugle est le voyant suprême, et en retour tout visionnaire est aveugle à la trivialité du monde, à ses petitesses, à sa prose. Appeler l’aveugle non voyant, c’est le condamner à une double cécité en le privant de la vision divinatoire en surcroît de la vision sensible ; l’euphémisme, analogue en cela à toute manifestation de pitié, trahit ici la part de mesquine cruauté qui le fonde. »

Écrit par : L'aigre de mots | 28/08/2019

Outre d'être unijambiste, le Sciapode est quasi-borgne, m'a-t-on dit. Je pense que cette phrase de Toni Ungerer, vous pourriez la prendre pour vous aussi, n'est-ce pas, cher animateur de ce si subtil blog?

Écrit par : Atarte | 30/08/2019

N'a qu'un œil, mais c'est le bon.

Écrit par : Le sciapode | 30/08/2019

Et c'est pas Toni, mais Tomi.

Écrit par : Le sciapode | 30/08/2019