Info-Miettes (8) (06/06/2010)

Un peu de poésie dans un monde de bruts

     Pierre Gallissaires publie un recueil de ses poèmes écrits entre 1979 et 2009 sous le titre Le dit du poème parmi d'autres aux éditions Aviva (la vie va?), basées à Bègles (tiens?). Plus connu jusqu'à présent comme traducteur d'allemand (on lui doit entre autres une traduction d'après L'Unique et sa propriété de Max Stirner), Pierre Gallissaires écrit aussi des poèmes et depuis fort longtemps (il publia des recueils autrefois chez Pierre-Jean Oswald, Guy Chambelland, ou Nautilus Hambourg). Leur couleur tire plutôt du côté d'un certain goût pour les jeux de mots, les instants de rien, les constructions mentales qui déroulent leurs magnifiques paysages abstraits dans l'âme des lecteurs. Voici deux d'entre eux, le premier tel un haïku:

le calme plane une route

se perd

dans le lointain surnage un cil

 

tel un beau ténébreux

Couverture Le Dit du Poème parmi d'autres de Pierre Gallissaires, 2009.jpg

le pas le pain

perdus

 

cailloux froissés

 supplient

 

et déjà le fagot sent la braise des bois

 

Livre relié 88 p, 14x21,5, couverture vergé. Bon de commande: éditions Aviva, 84, rue Amédée-Berque, 33130 Bègles, tél/fax: 05 56 85 58 63. Prix 13€, envoi franco de port dès réception de la commande accompagnée du réglement aux éditions Aviva.

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Vous avez dit Biz'art?

     Encore un calembour sur l'art, têtes de l'art, bab'art, tôt ou t'art, caf'art, etc, y a encore de la m'artge et de la pl'artce pour d'autres. Mais trêve de tartquineries (sinon, je vais encore me faire traiter de poignartdeur pas subtil, cette raillerie venant facilement sur le clavier chez les petites âmes pas finaudes du web), ce lieu (cette association), basée au Vaudioux, entre Dôle, Pontarlier et Lons-le-Saunier, dans le Jura, à ce que l'on m'a assuré de diverses directions, montre de temps à autre des expositions d'art singulier choisies avec le minimum d'exigence requis pour que l'art dit singulier ne se retrouve pas une fois de plus décrédibilisé par des nuées de têtes à Toto toutes interchangeables. 

 
Jean Branciard,Catamaran noir.jpg
Jean Branciard, Catamaran noir, photo Bruno Montpied, 2008

     Cette fois, on retrouvera au Vaudioux les constructions en assemblage de matériaux naturels, "tracteurs de mer" et autres esquifs branlicotant de partout de Jean Branciard, dont j'ai déjà parlé ici, ainsi que l'incontournable Joël Lorand, Alain Lacoste, Serge Vollin, les Staelens (c'est un couple aux travaux rougeâtres particuliers), plus d'autres créateurs encore que je ne connais pas bien. On ira se renseigner davantage en se connectant sur le site de Biz'art-Biz'art.

L'expo est du 1er juin au 30 septembre, tous les jours de 14h à 19h (vernissage dimanche 13 juin de 14 à 19h aussi). Biz'art-Biz'art, 2 chemin Prayat, 39300 Le Vaudioux, tél: 03 84 51 63 36.

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Quand l'art naïf se cache dans les algues?

      De passage récemment dans la région de Cherbourg, je suis passé en coup de vent, ce qui dans la région est plutôt banal, à quelques centaines de mètres de l'île de Tatihou en compagnie de Romuald Reutimann, l'émérite animateur du foyer d'arts plastiques de La Passerelle. Les heures de cabotage de la navette qui mène à l'île ne collant pas avec notre emploi du temps de ce jour-là, je me suis rabattu en désespoir de cause, au guichet d'embarquement, sur des cartes postales éditées apparemment par le musée maritime de Tatihou qui organise de temps à autre de stimulantes expositions en rapport avec l'univers maritime. Une a particulièrement attiré mon attention, c'est une reproduction de planche d'alguier (herbier, c'est pour les "herbes") où l'on voit un serpent plutôt naïf s'enrouler autour d'une algue. Comme le début d'une oeuvre faite à partir d'un collage de matière naturelle, ce qui n'est pas usuel, il me semble.

Alguier de M.Doublet,coll. Musée maritime de Tatihou, ph Jacques Blondel.jpg
Alguier de M. Doublet, coll. musée maritime de Tatihou ("algues marines récoltées dans le Nord-Cotentin au début du XXe siècle", dit la légende de la carte ; photo Jacques Blondel)
 
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Fernand Michel le retour, avec ses imaginaires zincifères
 
 
 
      Fernand Michel, on ne sait pas grand-chose sur lui. Il fut exposé à la galerie des Mages d'Alphonse Chave à Vence dans les années 60 et 70. Il faisait partie du Petit Musée du Bizarre à Lavilledieu en Ardèche (que devient la collection de ce musée, depuis la disparition de son maître d'oeuvre Candide, alias Serge Tekielski, on aimerait le savoir ?). Il fut montré aussi aux expos Les Indomptables de l'art à Besançon en 1986, et Art Brut et Cie à la Halle Saint-Pierre en 1995-1996. Une notice du catalogue de cette expo donna du reste quelques éléments biographiques à son sujet. Né en 1913 dans les Vosges, en marge de son métier de relieur (qui lui fit croiser la route du typographe-poète Jean Vodaine), il se mit à sculpter et à assembler le zinc vers 1962. Retraité, il s'était installé à Montpellier. Son oeuvre, au début consacrée à la représentation de paysages, évolua bien vite vers des personnages féminins à connotation érotique le plus souvent (c'est d'ailleurs toujours ces statues-là qu'on trouve en reproduction).
 
Fernand Michel, couverture du livre de Frédéric Allamel, bulletin de souscription.jpg
Maquette du livre (susceptible d'être modifiée)
 
 
      On devrait très vite en apprendre davantage à son sujet grâce au livre que Frédéric Allamel lui a consacré, Imaginaires zincifères, Variations autour de Fernand Michel, artiste-zingueur, sorte de "catalogue irraisonné", qui devrait incessamment paraître à l'égide d'une Association pour le Développement de l'Art Brut et Singulier basée à Montpellier. Le bulletin de souscription que j'ai reçu indique notamment : "de ses poupées plantureuses et vertigineusement fétichistes jusqu'aux gravures illustrant des poèmes de Raymond Queneau, en passant par l'architecture et ses "peintures d'une nuit", ce livre est conçu à la manière d'un catalogue irraisonné, au diapason du personnage, flamboyant et qui fit de l'esprit surréaliste un art de vivre de tous les instants."
La parution semble annoncée pour l'automne. 180 pages, 21x29,7 cm. Un exemplaire: 28€ + 5€ de frais de port. Chèque à l'ordre de ADABS, 68 rue de Lunaret, 34000 Montpellier, tél: 04 67 66 32 40 et fax: 04 67 60 60 27.
 
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Tout finit sur le carreau
 
 
       Je me balade dans un déballage de brocanteurs et autres antiquaires au Mans il y a peu. Je m'arrête un instant devant des maquettes de bâtiments de village, ou de véhicules, un tank, un camion de pompiers...
Vestiges d'un musée de maquettes, Le Mans, ph.Bruno Montpied, 2009.jpg
Le Mans, ph BM, déc 2009
 
       Interrogé, le marchand indique une vague provenance (comme toujours, l'origine est imprécise, se perdant dans les limbes des acquisitions pas toujours retraçables), cela viendrait d'Ille-et-Vilaine, l'auteur aurait confectionné chez lui ce petit musée de miniaturisations, il y a une église (de "Ladeu"?), les pompiers seraient d'un lieu orthographié de façon peu claire, "Thourie" (?), on voit des avions, des batteries de canon, une diligence, un relais. Les maquettes étaient éclairées... L'ensemble n'est pas très inventif, juste un peu curieux d'un point de vue sociologique, digne de ces infos-miettes... J'en parle ici à tout hasard...
 
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Exposition de Raymond Humbert, "Paysages et autres objets", dessins 1980-1990
 
      Du 12 juin au 19 septembre 2010, la Galerie du Musée des Arts Populaires à Laduz (nouveau nom de ce qui est toujours la collection Humbert) organise une nouvelle exposition consacrée au peintre fondateur du musée rural de Laduz, pour les vingt ans de sa disparition. Vernissage le samedi 12 juin 2010. Voir le site du musée.
 
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Exposition Loïc Lucas à la Galerie Christian Berst
 
Loïc Lucas, Galerie Christian Berst.jpg
 
      Nouvelle trouvaille, Loïc Lucas, dont la galerie Christian Berst dit qu'il a déjà intégré de grandes collections d'art brut, les choses vont donc vite. Dans ce domaine, les personnes averties de ces formes d'art autodidacte sont bien souvent en effet les premiers sur la terra incognita, découvrant et mettant l'expression découverte à l'abri d'une collection. Le public n'arrive qu'après...
Loïc Lucas, Galerie Christian Berst.jpg
 
      Ce sont des dessins fort colorés dans des bleus, des roses, des pistaches, des caramels comme comestibles, trés ornementaux a priori, mais dont les sujets ne sont pas purement décoratifs en réalité, plutôt en rapport qu'ils sont avec des références corporelles, comme une fantomatique coupe à l'intérieur d'organes, de tissus cellulaires, coupe qui prendrait des allures de voyage fantastique rose bonbon.
 
L'expo se tient du 11 juin au 17 juillet prochain. Voir le site de la galerie.
 
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Vincent Prieur, et Paul d'Haese
 
       Le second est photographe, mais c'est plutôt le premier qui nous intéresse (même si le bloc de pierre posé sur l'eau dans l'affiche de l'expo est bien belle...), ainsi que le lieu où ils sont exposés tous les deux, un "Petit Casino d'Ailleurs" situé à Ault, entre Le Tréport et Amiens, ce même Ault où vit Caroline Dahyot dont je vous ai trés récemment parlé (voir quelques notes plus bas). Le petit casino en question paraît animé par Mme Hélène Busnel, danseuse, chanteuse, sculpteur, et amie de Frank Horvat, grand photographe vivant. Il semble s'y montrer de jolies choses à Ault, village perdu de Picardie, grâce à elle, entre autres.
EXPO Casino 2010.jpg
 
       Vincent Prieur m'avait frappé par quelques figures bizarroïdes faites de bois trouvés sur les plages qui avaient été exposées dans la biennale "Brut de Pinsé" à la Galerie du Quartz de Brest en 2000, voici exactement dix ans (j'en avais parlé dans une note brève de mes "Billets du Sciapode" dans Création Franche).
 
Vincent-Prieur-Brut-de-Pins.jpg
Les oeuvres en bois flotté, reproduites d'après le catalogue de l'expo Brut de Pinsé, 2000
 
      Il se présente toujours comme "un penseyeur", c'est-à-dire comme un créateur qui travaille à partir de matériaux trouvés sur l'estran à marée basse. Ses oeuvres ont évolué vers plus de joliesse naïve et enfantine, moins âpres que celles aperçues à Brest (où, à l'époque, il était présenté comme faisant partie aussi de la collection de la Fabuloserie).
 
Vincent Prieur petitcasinodailleurs127347774146_art.jpg
Vincent Prieur, 2010
 
L'expo dure tout le mois de juillet et tout le mois d'août. Voir le blog du Petit Casino
 
 
       

16:44 | Lien permanent | Commentaires (11) | Tags : pierre gallissaires, biz'art, loïc lucas, jean branciard, art brut, art singulier, raymond humbert, laduz |  Imprimer