Expo Iliazd à Moscou (19/12/2015)
Quand les commentateurs, et parfois aussi collaborateurs de ce blog, montent sur les tréteaux télévisuels russes... ; Régis Gayraud, ci-dessus, est invité à la télévision pour donner quelque témoignage à propos de l'exposition Iliazd qui se tient actuellement au Musée Pouckkine à Moscou et dont il est le responsable scientifique
Iliazd, je ne sais pas si on le connaît parmi les lecteurs de ce blog, c'était un poète, un éditeur de livres d'art à la typographie audacieuse, un futuriste russe d'origine géorgienne (Ilya Zdanévitch est né à Tiflis en 1894 et mort à Paris en 1975 ; il y était venu dès 1921 ; et, pour l'anecdote, il y mourut le jour de Noël, debout contre une porte, une tasse de thé encore à la main). Pour lui trouver un titre de gloire qui justifie que j'en parle sur ce blog, on ne manquera pas de signaler qu'il fut le découvreur de l'immense peintre populaire et naïf géorgien Niko Pirosmani, qu'il défendit en compagnie de son ami peintre Mikhaïl Le Dentu. Pirosmani, pauvre peintre d'enseignes de Tiflis, lui tira le portrait. Il joua un peu le même rôle auprès des futuristes russes qu'avait joué le Douanier Rousseau auprès de l'avant-garde française tournant autour d'Apollinaire et de Picasso, comme une caution populaire exprimant une approche plus directe du monde.
Niko Pirosmani, portrait d'Iliazd, 1913
Et Iliazd lui acheta plusieurs œuvres qui sont à présent conservées en Géorgie et en Russie. Poète, il inventa un langage d'outre-mots, le zaoum, bien avant les tentatives de poésie sonore des années d'après seconde guerre mondiale. Cela lui permit d'étayer sa polémique avec la novation prétendue des lettristes, type Isidore Isou. Iliazd publia en 1949 une anthologie sur la poésie sonore, intitulée Poésie de mots inconnus. Véritable touche à tout, esprit de grande culture, il fut aussi historien d'art, dénicheur de talents oubliés, comme cet écrivain français nommé Adrien de Monluc dont Iliazd édita en 1952 une curieuse satire, la Maigre, rédigée par Monluc pour se moquer d'une femme. Iliazd, fort logiquement, choisit pour ce faire une police de caractère typographique excessivement maigre. Il demanda à Picasso quelques gravures et ce dernier les traça d'une ligne elle aussi adéquatement fort ténue...
Pages de l'édition Iliazd de La Maigre, extraites du catalogue de l'expo Iliazd de 1978 au Centre Georges Pompidou
Infos factuelles : le Musée National des Beaux-arts Pouchkine de Moscou accueille donc du 14 décembre prochain au 14 février 2015 l’exposition « Iliazd. Le XXe siècle d’Ilia Zdanevitch » que Régis Gayraud a contribué à organiser en tant que conseiller et responsable scientifiques du catalogue. Cette exposition est la première consacrée à Iliazd en Russie. Ce sera la plus complète exposition Iliazd organisée à ce jour depuis l’exposition du MNAM Centre Pompidou en 1978. Elle comportera un grand nombre de documents inédits, récemment découverts dans les archives françaises et russes, et la collection complète des livres du poète-éditeur.
Le jour du vernissage, tous à l'écoute du responsable scientifique...
10:57 | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : iliazd, futurisme russe, degré 41, régis gayraud, pirosmani, la maigre, adrien de monluc, novateurs typographiques, poésie sonore, lettristes, exposition iliazd à moscou | Imprimer
Commentaires
Non seulement il est beau, mais en plus il parle bien ! Il a tout pour plaire aux filles ce garçon, si ce n'est peut-être un petit problème dans son port de cravate. (Cherchez l'erreur).
Écrit par : Zébulon | 19/12/2015
Dans une psychanalyse à la Groddeck, on en tirerait des conclusions vulgaires.
Écrit par : L'impertinent | 20/12/2015
Tiflis est le nom local de la capitale de la Géorgie, Tbilissi (en français...)
Écrit par : geodaszner | 30/12/2015
Non, c’est le nom officiel de la ville jusqu’en 1935, dans toutes les langues du monde sauf en géorgien. Aujourd’hui, on parle de Tbilissi (et c’est exactement comme si vous décidiez de dire en français Moskva pour Moscou, London pour Londres, Roma pour Rome, etc. sauf que cette étrangeté linguistique a été légitimée par les textes diplomatiques officiels et aussi par l'habitude), mais il est normal de dire qu’il est né en 1894 à Tiflis, comme quelqu’un né à Saint-Pétersbourg entre 1914 et 1924 est né à Pétrograd, et entre 1924 et 1991 à Léningrad. Car tout ce qui s’est passé avant 1935 à Tbilissi s’est passé à Tiflis. Et même sous Staline, on ne parlait pas de Léningrad quand on parlait du Pétersbourg d’avant 1914. Alors ne soyons pas plus stalinien que Staline...
Écrit par : Régis Gayraud | 31/12/2015
Et en plus il rectifie de manière argumentée (et avec doigté et délicatesse) les erreurs des donneurs de leçons supposées nous éclairer ! Il a décidément tout pour plaire, ce garçon...
Écrit par : Zébulon | 31/12/2015
Il a aussi collaboré avec Max Ernst pour créer le livre "Maximiliana".
Écrit par : Sasha Vlad | 03/01/2016