Dictionnaire du Poignard Subtil (02/02/2022)
Professionnel (de l'art):
"Il n'y a rien de pire que de vivre comme un professionnel. Imaginez un poète qui écrit des poèmes en se demandant s'il peut faire appel à un éditeur pour obtenir des droits d'auteur et combien. C'est une destinée terrible qu'en tant que peintre, j'ai toujours essayé d'éviter. Il n'y a rien de pire que de tenir mon pinceau et de penser à celui qui achètera ma peinture. Qu'est-ce que j'éprouve alors? De l'inquiétude et non de la joie. C'est là que la peinture s'arrête et que commence le commerce. En peignant, en m'amusant, en étant heureux, je donne une fête pour moi-même. Tout le reste est une affaire de corruption, de liquidation, de prostitution. Il n'y a pas de différences lorsqu'une femme se maquille pour sortir dans la rue ou en boîte de nuit et trouver un client. C'est la même chose que fait le "professionnel" qui pense à vendre et être séduisant."
( Slavko Kopac, extrait d'un entretien avec Mirko Galić, publié dans Fabrice Flahutez, Pauline Goutain, Roberta Trapani, Slavko Kopac, éd. Gallimard, janvier 2022).
10:13 | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : dictionnaire de citations du poignard subtil, slavko kopac, fabrice flahutez, pauline goutain, roberta trapani, professionnel et amateur, vénalité | Imprimer
Commentaires
La comparaison avec la prostituée manque quelque peu de finesse (et de subtilité) il me semble...et puis je pense aux cinéastes de série B durant l'âge d'or d'Hollywood, ceux qui pouvaient faire un film en trois semaines pour alimenter les "premières parties" des cinémas. Ces réalisateurs là étaient quasi salariés par des studios mais ça n'empêche pas qu'ils aient réalisé des petits bijoux! Bien sûr c'est différent pour un peintre, mais je trouve que le propos de Slavko Kopac est un peu trop caricatural..."professionnel" pourrait être remplacé par "artisan" et le propos changerait de tonalité. Et puis l'histoire de la peinture grouille de contre-exemples. J'ai le souvenir de lettres de Dürer à un commanditaire. Ce dernier s'énerve d'avoir déjà verser un acompte et de ne rien recevoir. Dürer ne perd pas son calme et lui explique avec aplomb qu'il se mettra au travail quand l'inspiration lui viendra, que cela peut durer...longtemps...très longtemps, qu'il n'a d'ordre à recevoir de personne et que ce serait bien d'envoyer tout de même le deuxième acompte...N'est pas Dürer qui veut certes.
Écrit par : Darnish | 02/02/2022
J'ai lu jadis une belle évocation de Slavko Kopac dans "A distance" d'Annie Le Brun, paru chez Pauvert dans les années 80. Elle lui consacre un chapitre.
Écrit par : Régis Gayraud | 03/02/2022
Annie Le Brun a pas mal écrit sur Kopac. Je n'ai pas vérifié, mais il me semble que son premier texte était dans un catalogue d'exposition Kopac chez Alphonse Chave. Ils étaient amis. De plus Kopac était croate et ami avec Radovan Ivsic, ancien compagnon (ou mari) d'Annie Le Brun, comme on sait.
Écrit par : Le sciapode | 03/02/2022
Annie Le Brun, (tu as raison), compagne de Radovan Ivsic, a écrit un beau catalogue "Radovan Ivsic et la forêt insoumise" (Gallimard) à propos d'une expo qui a eu lieu au musée d'art contemporain de Zagreb en 2015 avec des œuvres d'art brut, surréalistes, etc., sur le thème de la forêt. Un très beau catalogue...
Écrit par : gilles | 03/02/2022
A ce que je vois, il y a un concours de celui qui citera le plus de textes d'Annie Le Brun?
On n'a pas fini, alors.
Écrit par : Le sciapode | 03/02/2022