31/01/2025
Olga la bifurqueuse (attention, article de pur copinage)
Olga, on la connaît à la Halle Saint-Pierre où elle s'est longtemps occupée de la com'. Maintenant, il paraît, les pages se tournant (nos amis les premiers libraires, Laurence puis Pascal, se sont carapatés en tête, laissant la place à des nouveaux, tout aussi sympathiques, Stéphane et Elizabeth), qu'Olga a préféré laisser la place, pouvant ainsi s'adonner à sa passion centrale, la photographie. Elle s'en vient, jusqu'au 16 mars, présenter dans la partie "Galerie" de la Halle (rez-de-chaussée) quelques-uns de ses travaux actuels (voir photo ci-dessus de Bruno Montpied).
Olga Caldas, expo "Le Jardin aux sentiers qui bifurquent", dossier de presse à la Halle Saint-Pierre.
Et ce que je préfère chez elle, quand elle ne se lance pas dans des expos-concepts pour jouer à la grande photographe – du genre ficelage en faux shibari des uns et des autres (je me suis laissé dire que l'ami Régis Gayraud s'était laissé ligoter, pas très serré: qu'est-ce qu'il ne faut pas faire pour que ce joli cœur professionnel gagne les grâces de ces dames...) – , c'est sa grande sensibilité vis-à-vis de la chose botanique. Dans l'expo de la Halle, on peut ainsi voir, agrandies comme par hasard (elle sait ce qu'elle fait de mieux, la bougresse!), deux corolles aux mystères veloutés comme la chair noire et blanche de crémeux cygnes. Rien que ces deux clichés méritent le détour par la Halle.
Olga Caldas, volute florale, 2024.
D'autant que bientôt devrait débuter une nouvelle expo dans la salle du bas consacrée à l'intriguant art brut iranien. Que de raisons de débarquer à la Halle Saint-Pierre, donc...
Olga Caldas (2024), quelle est cette lumière cachée au fond de ce calice, de quel délice est-il la promesse?
18:51 Publié dans Photographie, Poésie naturelle ou de hasard, paréidolies | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : olga caladas, photographie contemporaine, halle saint-pierre, botanique parallèle, calice et délice, corolles, blancheur, lumière cachée, shibari imaginaire, expos-concepts | Imprimer
08/01/2025
La cabane sauvage de Nicolae (un petit Richard Greaves en plein Paris)
Décidément depuis quelque temps, peut-être du fait de la grande tolérance, de la municipalité et des pouvoirs publics, il paraît normal de voir se multiplier des initiatives architecturées sauvages en plein espace public. J'ai déjà parlé sur ce blog ou sur Instagram d'autres créations dues à des SDF et autres marginaux (je pense notamment à Papillon qui était Gare de l'Est, évoqué sur mon profil Instagram ("Zoufi54") à la date du 4 mai 2022 (voir ci-contre), ou bien encore à Michel Godin des Mers, qui réclamait par le truchement d'une voile hissée entre deux vélos un logement gratuit pour tous). Dès que je peux, je photographie leurs invraisemblables constructions réalisées à même la rue, en l'occurrence ici par-dessus, semble-t-il, un équipement du mobilier urbain qui a servi de fondation en quelque sorte. Boulevard Raspail, entre l'immeuble de verre de Jean Nouvel conçu pour la Fondation Cartier (qui va bientôt déménager), et de l'autre côté du boulevard, deux écoles d'architectures (l'école Camondo et l'Ecole Spéciale d'Architecture), extraordinaire et ironique pied de nez à l'architecture et à la culture savantes en somme, se dresse actuellement la première cabane de bidonville à étage que je connaisse à Paris... Cela représente un saut qualitatif certain dans l'architecture précaire et sauvage en milieu urbain.
La cabane de Nicolae, photos Bruno Montpied, 26 décembre 2024 ; comme il est demandé sur un panonceau rédigé à la demande du constructeur, j'ai laissé un peu de sous dans une corbeille pour remercier d'avoir pris ces photos, sans être bien assuré que cette menue monnaie, exposée au vu et au su de tous les passants, ne soit pas dérobée, car je n'ai vu personne le jour de mon passage...
L'auteur paraît se prénommer Nicolae, diminutif Nico. Prénom qui sonne roumain ou moldave. Il y a des inscriptions à plusieurs endroits de la cabane, assez hétéroclites et désordonnées, un peu comme l'architecture de l'ensemble, fait de bric et de broc, à l'aide de clous et de planchettes, d'accessoires récupérés, tout en paraissant solide. On pense inévitablement aux cabanes, certes infiniment plus développées, de guingois, qu'avaient édifiées au Canada l'artiste Richard Greaves, avant de les abandonner à un sort "aléatoire" (voir ci-contre une photo de Mario Del Curto montrant la "Maison des Trois petits cochons").
La cabane de Nicolae de profil, avec des inscriptions au ras du sol, où le prénom d'Elvis, Presley sans doute, revient une première fois (il est répété ailleurs aussi) ; des boîtiers de DVD sont collés ici et là sur le mur, avec d'autres formes comme placées au petit bonheur ; on voit que la base, peinte en mauve, est une construction déjà présente sur le trottoir, dont l'auteur s'est servi comme base par détournement de fonction ; comme on le voit aussi, il y a un escalier desservant un étage qui éloigne probablement l'occupant de la rue et de ses possibles importuns ; ph. B.M., 2024.
L'aspect hasardeux des montants de l'escalier, qui me font penser plus particulièrement à Richard Greaves ; ph. B.M., 2024.
La cabane proprement dite est précédée d'une installation qui ressemble à une sorte de préambule à trois dimensions, à mi chemin d'un parasol de plage et d'un arbre de Noël. Une inscription, dans un français maladroit, annonce deux fois sous deux orthographes différentes et toutes deux approximatives, "LAGE DE NOIE", et "LARRE.B NOOE", qui, à mon avis, désignent peut-être un "Arbre de Noël" (nous étions le lendemain de Noël). Arbre de Noël qui peut avoir été figuré par le panneau peint en vert qui supporte la deuxième inscription.
ph. B.M., 2024.
Au milieu de cette installation au sein de laquelle trône une grosse peluche rouge, l'auteur a posé un panonceau, signé Nico, s'adressant aux visiteurs, probablement rédigé avec l'aide d'une bonne âme et réclamant un peu d'aide. Un peu plus loin, avant la cabane, on découvre également une table surmontée d'une caisse sur laquelle repose un plateau hérissé de flûtes peintes en blanc : instrument de musique? Œuvre d'art? Difficile de se prononcer...
Ph. B.M., 2024
Merci à Juliette et Jean-Louis Cerisier qui ont attiré mon attention sur ce lieu.
14:32 Publié dans Anonymes et inconnus de l'art, Architecture insolite, Art Brut, Art immédiat, Environnements populaires spontanés, Fantastique social, Paris populaire ou insolite | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : nicolae, cabane de nicolae, habitats précaires de sdf, habitats sauvages urbains, fondation cartier, école spéciale d'architecture, école camondo, richard greaves, de guingois, détournements architecturaux, noël | Imprimer
06/01/2025
Qui a occulté les jolis taureaux naïfs de l'ancienne boucherie de la rue Mouffetard?
AVANT...
La devanture de l'ancienne boucherie du 6 rue Mouffetard, Paris Ve ardt ; photos Bruno Montpied, 2001.
APRÈS (aujourd'hui)...
La même devanture vingt-trois ans plus tard... ; ph. B.M., 2024.
Je n'étais pas repassé depuis belle lurette rue Mouffetard, à la hauteur de la place de la Contrescarpe, mais je devine que la modification (un gommage?) intervenue sur la façade du n°6 de la rue n'a pu intervenir que depuis peu... Le rouge de la façade étant encore présent, comme monté au front de l'immeuble sous l'affront subi.
Qui a osé ce crime de lèse-majesté ayant consisté à nous effacer un signe de poésie primesautière de plus, pourtant en place depuis des décennies au cœur même du vieux Paris? Quel obscur vandale a-t-il occulté ces magnifiques taureaux et moutons, vestiges d'un ancien commerce de boucherie ? Le cercle des amateurs du vieux Paris populaire a-t-il eu une éclipse dans sa vigilance? On aimerait le savoir et surtout se consoler en pensant que les bovidés et ovins ont été mis en lieu sûr dans un quelconque musée Carnavalet...
Paris s'en va, Paris s'efface, mais jusqu'à où et quand ? Et ne pense-t-on pas à nos braves touristes étrangers qui aiment davantage Paris que les Parisiens eux-mêmes et qui ne verront plus ce détail, pourtant un de ceux qui font de la capitale une curiosité pittoresque, un de ces témoins d'une autre vie quotidienne où la poésie pouvait être vécue aussi bien par le populo que par les bourgeois?
00:13 Publié dans Art immédiat, Art naïf, Art populaire contemporain, Art populaire insolite, Paris populaire ou insolite, Questionnements | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : poésie populaire quotidienne, ancienne boucherie, enseignes naïves, rue mouffetard, occultation des décors poétiques | Imprimer