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19/09/2022

Une idée pour un autre Salon...

       Je ne suis qu'un écrivain et un artiste, et j'en ai marre de cette Outsider Art Fair qui nous revient depuis dix ans, avec son prix d'entrée pour élite friquée, et sa conception étriquée, parce que strictement mercantile, de la communication autour des arts spontanés et alternatifs.

    En fait, cette Foire disparaîtrait corps et biens, que je n'en souffrirai pas le moins du monde.

  Un Forum basé sur des principes différents, organisé et monté par des Français qui plus est, à un coût moins élevé, pas seulement axé sur le marché de l'art, mais où on inviterait, dans une conception infiniment plus large, des musées, des associations, des ateliers collectifs pour handicapés, des photographes, des architectes alternatifs, des libraires, etc. serait beaucoup plus intéressant à monter.

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Halle Saint-Pierre, 2e étage, exposition "Sous le Vent de l'Art Brut 2", 2014 ; à gauche des oeuvres à moi... ; photo Bruno Montpied.

 

   Quel local faudrait-il proposer pour un tel Forum? Eh bien, la Halle Saint-Pierre serait toute indiquée. Qu'elle soit installée au pied de Montmartre, aux lisières de quartiers populaires (la Goutte d'Or notamment), et de quartiers plus chics (la Butte Montmartre), me paraît tout à fait adapté aux substrats culturels des différentes formes d'expression que ce Forum réunirait et présenterait. Disposant d'un auditorium et d'un cafétaria permettant les échanges informels, elle autoriserait dans une seule unité de lieu toutes sortes d'animations, conférences, débats, présentations de films. Le forum pourrait durer une grosse semaine (dix jours), plutôt que les quatre malheureux jours de la Foire d'Art Ousider actuelle. Les prix de location pour les galeries et autres musées et associations concernés (qui tourneraient au fil des éditions) ne seraient pas trop élevés, ce qui éviterait que les prix des oeuvres en vente soient trop élevés, les participants craignant de ne pas rentrer dans leurs frais à la fin du Forum (ce qui est le cas actuellement pour les galeristes qui participent à l'OAF). Les musées, librairies, associations de défense des arts indigènes (entre autres), ateliers pour handicapés, collectionneurs, organisation pour l'auto-construction, etc., qui participeraient pour faire connaître  leurs passions et leurs activités, vendant au passage des catalogues d'expositions, procédant à des échanges divers et variés.

    On aurait davantage affaire en l'occurrence à une réunion ayant pour but la communication et l'échange autour de passions communes ou à découvrir qu'à une vulgaire foire de mercantis, qualification dans laquelle l'OAF est en train de se couler (à tous les sens du terme "couler")...

13/08/2021

Aube Breton-Elléouët expose ses collages avec les tableaux de coquillages de Youen Durand

     L'association des Amis de Youen Durand,  ce Breton qui dirigeait la Criée de Lesconil, auteur d'une trentaine de petits chefs-d'oeuvre en mosaïque de coquillages, continue son travail méritant de passeuse de mémoire au service de l'art d'un autodidacte de grand talent. Pour cet été, du 17 août au 5 septembre 2021, elle a eu l'idée de lancer une invitation à Aube Breton-Elléouët, qui a des attaches en Bretagne (son mari était le poète et peintre breton Yves Elléouët, disparu trop tôt), afin qu'elle prête des collages. Le goût du merveilleux est le point commun qui rassemble les deux créateurs, pourtant de cultures différentes. Aube, fille d'André Breton comme on sait, si elle est aussi la fondatrice de la collection de DVD, Phares, consacrée à 24 figures du surréalisme, "éditée à fonds perdus", montre régulièrement sa sensibilité à l'égard des autodidactes qui vont dans le sens du merveilleux (elle était présente ainsi à la première, à la SCAM, du film "Bricoleurs de paradis" que j'ai co-écrit avec son réalisateur Remy Ricordeau en 2011).

Invitation vernissage YD invite AEB recto.jpg

Flyer verso YD invite ABE.jpg

      Parmi les collagistes actuels, Aube Elléouët représente une figure éprise de la quête d'une image la plus unitaire possible, allant dans le sens du poème visuel merveilleux. Le n° 150 de la petite revue Regard, de l'artiste Marie Morel, vient de lui avoir été justement consacré, en avril dernier, avec une minuscule interview illustrée de plusieurs belles reproductions de ces collages. Je ne suis peut-être pas très bien informé à ce sujet, mais il me semble que les interviews d'Aube Elléouët ne sont pas fréquents.

*

      Ici, cependant, je dois faire une parenthèse au sujet de ce numéro de Regard. Il contient une petite brochure encartée, qui reproduit des petits textes d'un M. Francis Pellerin qui à un moment se met à parler d'Eric Le Blanche... Dont les lecteurs de ce blog – ou de la revue Création Franche, ou encore de la revue Artension, auxquels j'ai donné des articles pour faire connaître ce peintre et dessinateur introverti et secret, qui avait peint l'intérieur de sa maison en Vendée dans le plus grand secret – se souviendront que j'ai déjà abondamment parlé (en lui consacrant de plus, en mars 2019, un film en auto production, L'Homme qui s'enferma dans sa peinture qui fut programmé à la Halle Saint-Pierre au mois de juin suivant).

Flyer film sur ELB par BM à la Halle SP.JPG

Le flyer que j'auto-éditai en juin 2019 pour présenter mon film sur Le Blanche à l'auditorium de la Halle Saint-Pierre et en débattre avec le public ; la réalisation du film est signée dans le générique de mon nom et de celui de Burtin, mais ce dernier est surtout participant de ce film en tant que conseiller technique, car bien qu'autodidacte, il maîtrise fort bien cet aspect dans la création d'un film ; c'était entre autres raisons (il fut un ami aussi autrefois, avant, hélas, de devenir une grenouille de bénitier) pour cela que j'avais recouru à lui, pressé que j'étais par le risque d'effacement de l'intérieur de la maison de Le Blanche, dont m'avaient alerté les cousins d'Eric.

 

      Ce M. Pellerin, hélas, est fort mal informé. S'il l'avait été, je veux croire qu'il n'aurait pas écrit ces mots dans ce petit livret de Regard: "...Le peintre et cinéaste Jacques Burtin s'investit totalement depuis quelques années afin de faire connaître cette œuvre hors normes, exceptionnelle. il a réalisé des films (que j'ai vus), a créé une association, organisé des expositions (une, d'importance, devrait avoir lieu cet automne à la Vendéthèque de la Châtaigneraie) et construit un site internet que je vous conseille vivement de visiter..." Quelle prétention, et quel tour de passe-passe...

    Il faut rétablir quelque peu la vérité et mettre certains points sur les i. D'abord il est tout à fait exagéré de présenter "l'œuvre" d'Eric Le Blanche comme "hors-normes" (au départ Le Blanche s'inspirait de la peinture gréco-latine...) et "exceptionnelle" (ce n'est pas par la qualité de ses peintures et dessins que Le Blanche est intéressant – comme je le dis dans mon film de mars 2019, film qui a précédé ceux de Burtin qui s'est empressé de faire les siens pour supplanter la communication que j'avais initiée autour de Le Blanche (à la suite de la demande de sa famille) – c'est par son comportement de peintre introverti projetant son imaginaire et ses admirations artistiques tout seul à l'intérieur de sa maison entre deux séjours à l'hôpital.

      M. Burtin ne s'investit pas depuis "quelques années" (cette façon de s'exprimer donne l'impression que Burtin s'occupe de Le Blanche depuis toujours et surtout seul, ce qui est faux (en réalité c'est moi qui lui ai fait découvrir l'existence de la maison de Le Blanche en août 2018, en l'engageant à tourner des images pour le film que je désirais faire ; j'étais venu un mois auparavant, en juillet 2018, faire tout un reportage photo à la demande de la famille, Soizic et Jean-Louis Sapey-Triomphe, que j'avais rencontrée à la Halle Saint-Pierre en juin 18). Quand M. Pellerin parle ainsi de Burtin, il valide, peut-être sans le savoir, une imposture qui me paraît en train de se mettre en place à l'instigation de ce même Burtin (ce dernier cherche en effet à monopoliser la communication autour de Le Blanche afin de propager sa vision idéaliste et réactionnaire du personnage).

     Ce serait oublier, non seulement ma propre action, mais aussi celle de l'Association Arts Métiss', en Vendée, à La Chemillardière, qui fut la première, avec ses animateurs, Laurent Pacheteau et Jean-Pierre Rouillon (ce dernier ayant acheté beaucoup de dessins qui traînaient par terre dans la maison lors d'une vente aux enchères, où ni moi, ni les parents de Le Blanche, et encore moins le sieur Burtin, n'étaient présents), à monter la plus complète des expositions¹ sur Le Blanche, les 4 et 5 juillet 2019, à partir des éléments du décor de la maison Le Blanche qu'ils avaient contribué à faire sauver (j'ai gardé moi-même quelques dessins), entre autres par les affaires culturelles du département de la Vendée (via M. Julien Bourreau) qui acheta au nouveau propriétaire de la maison les volets et les portes intérieures de la maison Le Blanche (située dans le village vendéen de Vouvant). "L'association" de M. Burtin, le site internet qu'il a créé, représente surtout avant tout lui-même, et sa femme. Son action tend à imposer, par une sorte de confiscation de l'interprétation du phénomène de cette maison peinte intérieurement, une seule façon d'envisager le phénomène, à base d'idéalisme et de religiosité des plus ringards. Le bouffon "Institut Eric Le Blanche" qu'il a inventé, au titre ridiculement trop grand pour son sujet et trop pompeux pour être honnête, est de l'ordre de l'auto proclamation, servant avant tout à faire la promotion dudit Burtin, se prenant pour un génie (chose que personne n'a vraiment envie de vérifier) et projetant cette illusion sur le pauvre Le Blanche, qui, effectivement, était un peu mégalomane lui aussi... C'est là sans doute la seule justification de l'hystérique activité de l'ineffable M. Burtin...

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¹ Ils en ont monté une autre, plus récemment, cet été même, aux Sables d'Olonne, les 2 et 3 juin à l'Abbaye d'Orbestier.

29/05/2019

Cinq dignitaires ubuesques...?

Cinq statuettes comiques en terre (2).jpg

Anonyme, sans titre, dimensions non communiquées, terre, collection privée, photo Denis Kariger.

 

     Certes, je ne sais rien de la provenance de ces cinq personnages grotesques aux allures quelque peu bouffonnes, modelés en une terre qui ressemble à du pain sculpté. Cela a l'air très contemporain. Une culture imprégnée de bandes dessinées et/ou de fantasy me paraît transpirer en creux... Je parierai pour un sculpteur plutôt jeune. Peut-on les rapprocher de quelques personnages historiquement situés? Je ne le crois pas. L'artiste qui leur a donné forme, à mon avis, en a usé selon sa fantaisie. Automatiquement. Et ce sont ces cinq plénipotentiaires à l'allure comique qui ont surgi de ses doigts, sans le moindre plan préconçu.

     Mais si les lecteurs étaient mieux renseignés que moi et le collectionneur qui possède ces statuettes, qu'ils ne se gênent pas nous instruire...

22/07/2018

Dans les hautes herbes, deux bons amis...

[Kierdle ptêt], ss titre, 33x39cm, 1965 (2),.jpg

Signée "Kierdle" (?), cette peinture sur un morceau de toile marouflé sur un panneau d'Isorel de 33 sur 39 cm, marquée au dos du mot allemand "Unverkauflich" (Invendable...) est datée de 1965 ; la signature est très difficile à lire... ; ph. et coll. Bruno Montpied.

 

     Que dire devant cette peinture plutôt énigmatique? Une petite fille aux cheveux rouges bouclés  (à moins que ses boucles ne soient que trois antennes d'extra-terrestre?) paraît plongée, au terme d'une balade qui vient de se figer parmi les hautes herbes fleuries d'un champ en jachère, sous le ciel bleu, dans une méditation qui lui compose un teint plutôt verdâtre...

     Et que dire de son compagnon, hyper-étrange? Drôle d'animal de compagnie, tenant le milieu entre le homard redressé, et le fétiche africain au crâne curieusement pourvu de quatre fils rouges, à moins qu'une fois encore ce ne soit, là aussi, quatre antennes, adaptées au homard-masque-africain. Si, elle, a les yeux fermés, lui, se tient les yeux bien ouverts, mais noirs, tels des trous au bout desquels on ne trouvera jamais la moindre lumière...

     L'artiste qui a réalisé cette image insolite, devant laquelle on se perd en conjectures, a dû se persuader – peut-être pas tout de suite –  que jamais il ne trouverait de public pour s'y intéresser. En 1965, cela a dû en rendre plus d'un perplexe... Mais aujourd'hui? Est-ce que le regard a tant changé que cela? Peut-on s'intéresser à un tel double portrait? On est au delà de l'insolite. Comme face à un petit cauchemar solidifié, une camaraderie impossible et pourtant établie, contre tous les usages et toutes les habitudes.

 

19/06/2018

Orphée et les animaux, une peinture d'un artiste inconnu, Serge Karine

     En vente sur eBay récemment, le tableau sans titre que je reproduis ci-dessous m'a attiré l'œil tout de suite. Il fait partie de ces œuvres dont l'auteur n'a guère laissé de traces, semble-t-il. En bas à droite  on lit une signature, "Serge Karine", suivie d'une date, 47 (?)... Cela ne nous mène pas loin. Internet ne renseigne pas sur cet artiste (pour une fois!).

 

Serge Karine

Serge Karine, sans titre (Orphée charmant les animaux), huile sur toile, 33x46 cm, 1947 (?), ph. et coll. Bruno Montpied.

 

    La marchande qui me l'a vendu une poignée d'euros m'a précisé qu'il s'agissait d'un thème mythologique antique fameux : Orphée charmant les animaux. C'est l'épisode du mythe après que le poète à la lyre a définitivement perdu son aimée Eurydice au retour des Enfers (s'étant retourné vers elle malgré les injonctions d'Hadès avant qu'ils soient parvenus au jour). Désespéré, il fuit et chante sa douleur au fond d'une forêt, attirant à lui par le charme de sa musique tous les animaux aux alentours. A détailler les bêtes présentes dans le tableau, on se dit que cette forêt était habitée par une sacrée arche de Noé, autre thème, cette fois biblique, que la même marchande avait cru dans un premier temps être le sujet du tableau. Ours à l'air éploré, boa, rapace, singe (se tenant la tête comme accablé par la souffrance d'Orphée), girafes, fauve, rhinocéros, bêtes cornues, un loup peut-être, et plusieurs éléphants accourent en effet, captivés par la mélopée. En lisière d'un éperon rocheux, à l'arrière-plan, on aperçoit les silhouettes d'autres animaux rendus minuscules par la distance, donnant, ainsi qu'un horizon semé d'arbres, en dessous des rochers, la sensation de la profondeur et de la perspective aux spectateurs.

 

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François Boucher, Orphée charmant les animaux, XVIIIe siècle, musée Bargoin, Clermont-Ferrand ; on notera l'éléphant regardant de face le spectateur, comme louchant quelque peu...

 

      Orphée lui-même, dans le tableau de Karine, a un teint violacé, quand toute la composition elle-même baigne dans une lumière hésitant entre le rougeâtre et le bleuâtre. Ses lèvres sont peintes, comme maquillées par du rouge à lèvres. Il joue de sa lyre à l'aide de gros doigts, aussi épais que des saucisses.

 

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Jean Hazéra, Orphée charmant les animaux, 46x55cm, huile sur toile, 1999 ; cette toile découverte sur internet, alors que je recherchais une iconographie adaptée à la présente note, m'a révélé un peintre contemporain, vivant dans le Tarn-et-Garonne, dont je trouve l'œuvre variée attachante et très souvent séduisante (voir son site web).

 

      Ce genre d'œuvres, quelque peu orphelines, que l'on hésite à qualifier de naïves, que l'on ne peut ranger dans aucune catégorie autre que les peintures inclassables et étranges, m'intéresse de plus en plus depuis quelques années. Il me semble que je ne suis pas seul à m'y intéresser du reste, lorsque je constate que l'on en rencontre de plus en plus sur les foires et marchés à la brocante par les temps qui courent.

08/07/2017

Une parabole sur les rapports France-Afrique

     Cela fait plusieurs fois qu'avec divers interlocuteurs je vante les bénéfices (intellectuels...) qu'il y aurait à monter une exposition exclusivement consacrée à de brillants anonymes de l'art, naïfs, populaires, bruts, voire rien de tout cela, tout simplement autres, pourvus que les œuvres soient véritablement singulières et originales. Beaucoup de collectionneurs et chineurs invétérés possèdent de ces tableaux ou sculptures qui ont su capter leur attention, tout en étant bon marché très souvent, du fait qu'il est difficile de faire entrer ce genre de marchandise dans une quelconque démarche d'investissement... Pas de cote possible, on ne connaît rien de l'auteur, c'est déjà bien beau si on a une signature. Dans ce dernier cas, il est cependant passionnant d'essayer de retrouver l'auteur, dans le passé ou le présent. Je connais des amis du côté des Pyrénées qui n'hésitaient pas à une époque à rechercher dans le bottin toutes les personnes du même nom qu'ils avaient relevé sur une toile chinée dans un vide-greniers, et puis ensuite à appeler toutes les personnes... dans l'espoir de retrouver "l'artiste" inconnu. Sur ce blog, le lecteur a dû se convaincre que c'est le genre de recherche que nous sommes quelques-uns à aimer poursuivre (voir récemment le nom d'un sculpteur sur sable du début XXe siècle qui nous a interpellés : Winter Querée... Ou encore le cas du nommé Pierre Dange dans l'Yonne, sur lequel j'apporterai une information nouvelle dans mon livre, Le Gazouillis des éléphants, à paraître en novembre en librairie).

Anonyme d'origine africaine (2), Je te donne la friperie et le médicament, tu me donnes la forêt et le pétrole, ça colle....jpg

Anonyme, Je te donne la friperie et le médicament. Tu me donnes la forêt et le pétrole ; Ça colle ?, 52 x 67 cm, sans date, crayons graphite et couleur sur papier, coll. et photo Bruno Montpied.

 

     Ces anonymes œuvrent sans se soucier de se faire connaître. Ils sont de styles très divers, et ne se rangent pas nécessairement du côté de l'art dit brut. J'en donne un exemple ci-dessus. C'est le galeriste lyonnais Alain Dettinger qui est tombé sur ce dessin, parmi d'autres (une petite dizaine d'œuvres retrouvées). Aucun renseignement de la part du vendeur sur l'auteur. Est-il d'origine africaine? On ne sait. Il vivrait cependant en France... Tous les dessins comportent des textes qui commentent les scènes, représentées avec un bon coup de patte graphique, je trouve. Je n'ai pas photographié l'ensemble malheureusement, je me souviens de l'un d'entre eux qui comportait le texte suivant (je cite de mémoire): "Ma femme a accouché comme une chèvre"... Celui dont je mets la reproduction ci-dessus, dénonçant visiblement l'arrogance et la condescendance occidentale vis-à-vis de l'Afrique, est d'une causticité pince-sans-rire magnifique. Si quelque lecteur du blog en connaissait par hasard davantage sur cet auteur, qu'il n'hésite pas à intervenir en commentaire ou en privé.

Anonyme, Je te donne la friperie et le médicament. Tu me donnes la forêt et le pétrole ; ça colle (détail).jpg

     Quel responsable de lieu d'exposition aura l'audace d'organiser une manifestation uniquement consacrée aux anonymes de l'art, les véritables purs de l'art, créant avant tout pour eux-mêmes par amour de l'art et de l'expression? Ce serait la démonstration de l'existence de cette pulsion créatrice errante qui naît au sein de la vie quotidienne sans recours à une recherche de gloriole, au rebours des artistes cabotins avant tout préoccupés d'exhiber leurs nombrils...

 

27/12/2014

L'étrange homme aux yeux exorbités et au slip kangourou un peu lâche

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Anonyme, sans titre, sans date, environ 60 cm de haut, exposé en décembre à la galerie Dettinger-Mayer, Lyon ; ph. Bruno Montpied, 2014

     Avec cet ensemble sculpté en bois naturel, vous devrez chers lecteurs vous déterminer sans la moindre référence préalable. Exercice salubre, n'est-ce pas? Personne ne viendra vous dire ce qu'il faut en penser. Car on a affaire ici à une sorte d'aérolithe, un objet non identifié, une énigme visuelle. En tombant dessus à la galerie Dettinger-Mayer très récemment, où j'étais venu voir l'exposition Solange Knopf, je ne me rendis pas compte tout de suite de son côté atypique. Mon œil la voyait à la périphérie de l'expo et de ma conversation avec les personnes présentes. Et tout d'un coup elle fut là, et m'occupa exclusivement.sculpture anonyme,art brut anonyme,galerie dettinger-mayer

      D'où sortait ce personnage aux yeux exorbités, la bouche largement ouverte aux lèvres épaisses, les oreilles décollées, pourvu d'une paire de jumelles, coiffé d'un calot comme de certains pensionnaires d'hôpitaux psychiatriques d'autrefois ou de certains soldats, portant on aurait dit un slip kangourou en laine fort lâche, jambes  nues, au bout desquelles on voyait cependant des chaussettes (roulées de façon différente l'une de l'autre) et des chaussures?

 

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Anonyme, Galerie Dettinger-Mayer, ph. BM, 2014 

 

      Etait-ce une sorte de touriste que l'on voulait ainsi tourner en dérision (les jumelles et les yeux hors de la tête étant deux détails qui paraissaient marquer une intention de la part du sculpteur), touriste qui en outre avait été dépouillé de son pantalon, et peut-être aussi de sa voiture, vu qu'il traînait à côté d'une valise à terre une portière de voiture (assez semblable à celle d'une 2CV)? Mais alors, d'autres éléments, une petite hache à ses pieds, et surtout un très insolite vélo fort étiré, hésitant entre la bicyclette et la barrière, l'entouraient aussi, parfaitement indéchiffrables... Les roues de cette bicyclette garde-fou étant incomplètes, apparemment volontairement, par intention délibérée d'artiste, conféraient à l'engin un côté évanescent, soulignant sa fonction de simple décor d'arrière-plan. Ces roues étaient percées de trous circulaires ce qui paraissait peu usuel pour des roues de vélo...

 

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Anonyme, détail du bas de la statuette, vélo-barrière, portière, valise, hachette... Galerie Dettinger-Mayer, ph. BM, 2014

 

     L'objet, nous confia Alain Dettinger, son découvreur, avait été chiné quelque temps auparavant aux Puces de Lyon. Et comme d'habitude, avec les objets de curiosité ramassés en brocante, il n'y avait aucun élément d'information concernant ses origines.

18/11/2013

Fanzines... d'art brut? Rendez-vous samedi 23 novembre au Musée de la Création Franche

    C'est dans six jours. Une journée entièrement consacrée à la recherche autour des fanzines (petite presse en auto-édition) spécialisés dans l'art brut. L'initiative en revient à Déborah Couette du CrAB (Collectif de Recherche autour de l'Art Brut) et au Musée de la Création Franche à Bègles où se tiendra la journée d'études. Plusieurs intervenants, dont mézigue, sont attendus là-bas. Voici du reste le programme et les intentions des concepteurs de cette journée:

 

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    Des fanzines et des revues autour de l'art brut, il y en a eu, il y en a encore. Mais entièrement consacrés à l'art brut au sens strict du mot, à part les premières plaquettes éditées par la Galerie René Drouin en 1947-48, les publications en jargon de Dubuffet, puis les fascicules édités depuis le début des années 1960 sous l'égide de la Compagnie et de la Collection d'Art Brut, on ne peut pas dire qu'il y en ait eu véritablement. Toutes celles qui parurent, jusqu'à aujourd'hui, du Bulletin des Amis d'Ozenda, en passant par la Chambre Rouge, l'Art immédiat, Les Friches de l'Art, Gazogène, jusqu'à Zon'art et Création Franche, toutes ne parlèrent pas exclusivement d'art brut, mais aussi et surtout des alentours aussi bien, des formes d'art apparentées (art naïfs, habitants-paysagistes, graffiti, art modeste, inclassables etc.) en se référant également à des artistes singuliers rangés ailleurs dans la Neuve Invention (à Lausanne) ou dans la création franche (à Bègles). Comme si le concept d'art brut leur paraissait trop restrictif, trop ghettoïsant...

 

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Bulletin de l'Association Les Amis de François Ozenda

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La Chambre Rouge fut mon premier fanzine un peu sérieux, qui s'intéressait à la fois au surréalisme dans ses aspects les plus vivants, aux fous lttéraiires, aux divertissements littéraires, à la sculpture populaire, à l'art rustique moderne (Gaston Mouly et ses "dessins" ci-dessus évoqués sur la couverture du n°4/5 de 1985, bien avant que Gérard Sendrey ne rencontre, sur mon instigation, le même Mouly et ne s'attribue par la suite la responsabilité d'avoir poussé Mouly vers le dessin...)

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Le n°2 et le n°1 de L'Art Immédiat, ma deuxième revue, de 94 et 95, cette fois plux axée sur les arts populaires spontanés

Création-Franche-n°30.jpgCréation Franche

Gazogène, le numéro plus récent, n°35fanzines,art brut,art singulier,surréalisme spontané,la chambre rouge,l'art immédiat,collection de l'art brut,création franche,crab,déborah couette,zon'art,ozenda,recoins,gazogène

         De plus, les publications de la Collection de l'Art Brut, si elles sont bien de l'auto-édition du fait de la Collection elle-même (dans la majeure partie des fascicules, car les derniers en effet sont édités conjointement avec In Folio éditions), ne sont pas à proprement parler analogues aux "fanzines", éditions qui se caractérisent généralement par une certaine pauvreté de moyens, étant le fait de chercheurs et de passionnés le plus souvent désargentés, indépendants des cercles professionnels du journalisme et de l'édition. 

     Il était cependant tentant d'aller porter un peu l'éclairage de ce côté, pour voir pourquoi il fut important pour quelques passionnés en France –dont le signataire de ces lignes, et animateur de ce blog,  fait partie– de faire de l'information sur les phénomènes non seulement de l'art brut mais aussi de l'art naïf, de l'art populaire rural, de l'art forain, de l'art populaire contemporain aussi appelé art modeste, d'un certain surréalisme spontané, de la littérature ouvrière, des fous littéraires, des environnements spontanés, des cultures urbaines, de l'art de la rue, des graffiti, etc. Il est tentant d'essayer de comprendre aussi pourquoi il n'a pas été possible en France, et ce jusqu'à présent, de monter une grande publication périodique qui se consacrerait à l'étude et à l'information sur tous ces aspects de la créativité autodidacte spontanée, publication qui aurait fait appel à toutes sortes de plumes. Ne seront pas non plus évoquées, très probablement, et ce sera dommage, toutes les publications encore moins spécialisées sur les arts populaires, pas nécessairement des fanzines aux pauvres atours, mais qui ont cependant régulièrement publié des informations sur tel ou tel sujet qui appartenait au corpus, comme les revues Plein Chant, SURR, Jardins, voire les magazines L'ŒilArtension, L'Oeuf Sauvage (par exemple). Des fanzines d'aujourd'hui comme Recoins et Venus d'Ailleurs (très soigneusement édité ce dernier), sans se braquer sur l'art populaire ou brut, savent de temps à autre accueillir des articles sur le sujet. Il faudrait donc ouvrir plus largement le compas et s'interroger sur l'ensemble des articles ou études publiés ici et là sur le thème des arts d'autodidactes inventifs.

 

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Annonce de la publication de la revue Recoins n°5 (avec plusieurs articles concernant les arts populaires et les environnements spontanés), parution 2013

 

     Sans compter que d'ici très peu de temps, il faudra aussi que nos amis universitaires et archivistes se penchent avec suffisamment de documentation numérisée sur les blogs qui ont pris le relais avec vigueur des publications sur papier (comme l'auteur de ce blog qui put grâce à ce médium donner toute l'ampleur qu'il souhaitait à la masse d'informations dont il disposait, une fois passée l'époque "héroïque" des premiers fanzines des années 80 et 90).

Pour suivre cette journée, il semble prudent de réserver auprès du Musée de la Création Franche.

12/07/2013

Hommage au Tour de France, pour Armand Goupil le spectacle était surtout sur le bord de la route...

     Cela fait longtemps que je n'avais pas parlé d'Armand Goupil, l'instituteur peintre et dessinateur à ses heures perdues du côté du Mans dans les années 50/60 (voir ici l'ensemble de mes notes du Poignard Subtil).

          L'actualité avec le Tour de France me donne l'occasion de mettre en ligne une autre reproduction de ses peintures, participant de sa veine gentiment érotique voyeuriste. Armand ne regardait pas les coureurs (lui-même en étant peut-être un, de coureur, quoique seulement dans ses rêves?)... C'est aussi ça être un inspiré des bords de routes.

 

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Armand Goupil, Tour de France, 27-IV-59


22/12/2012

Louis-Auguste Déchelette et les saints...

     Ce petit tableau de Louis-Auguste Déchelette aperçu récemment sur la couverture d'une ancienne plaquette préfacée par Anatole Jakovsky, avec un texte de Franco Cagnetta, le tout ayant servi de catalogue pour une expo à la galerie Le Cadran Solaire vers 1966 (deux ans après la mort de Déchelette), fait partie d'un dossier que j'ai ouvert en privé ce jour sur les tableaux-calembours (du nom du reste que cette expo du Cadran Solaire avait pris) et d'une nouvelle rubrique que j'insère à partir d'aujourd'hui dans ma colonne de catégories, "L'œil du sciapode", qui sera consacrée aux tableaux que je trouve remarquables en dépit de leur méconnaissance par le public.

     Je mets le tableau de Déchelette en parallèle avec une autre peinture relevant de la même catégorie des calembours visuels, d'Armand Goupil cette fois, frère par l'esprit (sinon par le style) de Déchelette.

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Louis-Auguste Déchelette (notez les ouvriers derrière la fenêtre que l'on voit sur un échafaudage en train de restaurer des statues...)

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Armand Goupil, Corps nue, cornue, 8-V-62

 

   

25/10/2012

Villefranche-sur-Saône déroule le tapis rouge pour Guy Brunet

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Guy Brunet devant l'entrée de sa maison, où sa fresque sur l'âge d'or d'Hollywood a tendance à se détériorer, juillet 2012, ph. Bruno Montpied

    Guy Brunet, c'est cet éternel adolescent, né en 1945 et resté pour la vie ensorcelé par l'âge d'or d'Hollywood (des années 30 aux années 60, les seules décades du cinéma américain qui trouvent grâces à ses yeux d'envoûté des salles obscures). Ayant grandi entre des parents gérants d'un cinéma nommé le Plaza à Cagnac-les-Mines dans le Tarn (entre 1949 et 1963, précise Alain Moreau dans le dépliant qui accompagne l'exposition montée à Villefranche-sur-Saône du 31 octobre au 11 novembre), il n'a en effet jamais pu quitter l'univers irréel et scintillant des écrans.

 

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Exposition Guy Brunet à Villefranche-sur-Saône

     Comme un drogué en manque, il lui faut reprendre éternellement sa dose de pellicule, se reprojeter dans ce monde à deux dimensions de belles dames aux chevelures indécoiffables, de séducteurs élégants et irrésistibles, où le savoir-vivre et le langage châtié paraissent innés, où la musique fait vibrer les passions à tout coup, ce monde de dieux et de déesses modernes en somme... Dehors, règnent la poussière, l'aridité, l'abandon et la misère. Le bassin des mines de Decazeville, en décadence depuis longtemps, est morose, et pue la mort. Brunet lui-même, seul de façon infinie, habite dans une bâtisse plus qu'austère, mais qu'importe puisqu'il a rempli l'espace de cet habitat de ses 750 silhouettes en carton peint représentant des comédiens, des producteurs, des metteurs en scène, des musiciens qui lui font escorte et lui tiennent compagnie. Une bien étrange armée en vérité, comme chargée de le défendre, faisant bouclier de leur corps...

 

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Acteurs ? Réalisateurs? Producteurs américains? Les figurines en carton peint de Guy Brunet à son domicile, juillet 2001, ph BM


      Au coeur de son royaume obscur, brille perpétuellement l'écran de ses rêves cinématographiques. Il a réalisé avec un amateurisme poignant, depuis le début des années 2000, dans son studio-bureau, minuscule unité de création enserrée de toutes parts par des monceaux de documents divers, une douzaine de documentaires et de films historiques (dont le dernier, qui veut évoquer "Le monde magique des frères Lumière", sera projeté à Villefranche dans le cadre de l'exposition, "en avant-première" – à signaler tout de même qu'un long extrait avait été projeté en juin dernier au dernier festival autour des Art Singuliers par l'association Hors-Champ à Nice, en présence du reste de Guy Brunet, qui s'y est déjà rendu plusieurs fois).

 

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Dans le studio de cinéma où Guy Brunet crée ses films... 2012, ph.BM

     Ses figurines en carton, ses décors aussi, ses affiches (il en a réalisé des dizaines et des dizaines, déjà plusieurs fois exposées, notamment au Musée International des Arts Modestes de Sète) sont réalisés avant tout dans l'orbite de création de ses films. Il écrit des scénarii depuis l'âge de 16 ans, au même âge où il a commencé à faire des affiches (il confie même avoir commencé à dessiner des affiches dès l'âge de 7 ans). Primitives affiches dont le style fort sommaire et très enfantin est fort éloigné de la maîtrise qu'il atteignit par la suite dans ses réinterprétations des modèles d'affiches originales, comme on s'en convaincra avec ces deux exemples d'affiches de jeunesse que je donne ci-dessous, et qui me paraissent bien inédits (probablement réalisées aux alentours de ses 7 ans?). A comparer avec une troisème affiche plus récente.

 

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Guy Brunet, "Attilus chef des Carthaginois", affiche de jeunesse (d'un film imaginaire inventé pour les besoins de l'affiche par Brunet), vers 1952? ; Coll. BM

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Guy Brunet, "Laurel et Hardy, fameux soldats" (là aussi, titre d'un film imaginaire selon moi), vers 1952? ; Coll. BM

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Guy Brunet, affiche exposée au Musée International d'Art Naïf de Nice dans le cadre des rencontres autour de l'Art singulier de l'Association Hors-Champ en 2005

 

      Toutes ces créations doivent donc converger vers le but principal de Guy, dresser une sorte de couronne de fleurs de pellicule cinématographique, une véritable guirlande de documentaires célébrant le septième art où il s'est définitivement réfugié, et particulièrement le cinéma américain. Comme il le dit dans l'interview que j'ai réalisée en sa compagnie à son domicile l'été dernier, tout cela est fait pour "les générations futures, les adultes et les jeunes". On reconnaîtra aisément qu'il s'agit là d'une oeuvre des plus atypiques. Qu'on la range dans l'art modeste ou dans l'art brut est une (gentille) querelle qui paraît un peu dérisoire à côté de cette originalité à nulle autre pareille.

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Guy Brunet et son ami Burt Lancaster, 2012, ph. BM

Exposition Guy Brunet, Affiches, films, silhouettes de vedettes de films, fresques et éléments de décors, logos de firmes cinématographiques (300 œuvres exposées ; commissaire d'exposition Alain Moreau), dans la salle des Échevins de Villefranche-sur-Saône (69), du 31 octobre au 11 novembre 2012.Entrée libre. Lu-Sa, 14h-19h. Di, 11h-17h.

Une rencontre avec Guy Brunet, animée par Clovis Prévost (photographe, cinéaste, auteur qui prépare actuellement un film sur Guy Brunet), aura lieu samedi 3 novembre à 11h, dans la salle des Échevins. Elle sera suivie d'une visite de l'exposition et d'un verre de l'amitié.



29/02/2012

Est-ce de l'Art Brut?

   Voici quelques dessins pour les amateurs de taxinomie (c'est une maladie que je trimballe). Son auteur, ou sa créatrice, est quasi inconnu(e), je l'ai découvert(e) récemment. Où classeriez-vous ce genre de dessin, qu'est-ce que cela vous inspire? Le (ou la) rangeriez-vous dans l'art brut? (Les proches de cette personne sont bien évidemment priés de ne pas interférer...).

 

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30/10/2011

Une collection d'art immédiat dans "L'Or aux 13 îles" n°2, et un vernissage le 6 novembre prochain

     L'Or aux 13 îles, je vous en ai déjà parlé lorsqu'était sorti en janvier 2010 son n°1 qui concernait grandement les passionnés d'art populaire brut et des environnements spontanés parce qu'y était inséré un dossier volumineux sur le musée disparu de l'abbé Fouré consacré à ses bois sculptés à Rothéneuf (ce fut l'occasion surtout de republier un document rare, le Guide de ce petit Musée étonnant, guide paru en 1919 ; par la même occasion, nous commémorâmes ainsi -les premiers!- le centième anniversaire de la disparition de l'abbé, mort en 1910).

l'or aux 13 îles n°2,jean-christophe belotti,art immédiat,bruno montpied,armand goupil,marilena pelosi,joël lorand,gérald stehr,hérold jeune,la passerelle,maugri,jean-lous cerisier,charles lacombe,sefolosha,émilie henry,louis roy,art naïf,lobanov,donadello,sirènes,manero,ruzena,bernard javoy,serge paillard,monique le chapelain,pépé vignes,paul duhem,javier mayoral,guy girard       Voici que paraît son n°2 (cliquez sur ce lien et vous obtiendrez le formulaire de commande du numéro, voire des deux numéros), cette fois dominé par un thème "L'homme hanté par l'animal". Jean-Christophe Belotti est toujours aux commandes du navire, Vincent Lefèvre est toujours le maquettiste, élément important qui assure à la revue sa belle et élégante livrée. Le sommaire est varié, après une introduction de Belotti sur le pourquoi du comment du thème choisi, qu'il a illustrée de fort charmantes cibles foraines tchécoslovaques, on découvre les magnifiques photographies d'oiseaux naturalisés de Pierre Bérenger qu'il fit à la fin des années 1960 dans les locaux alors désaffectés du Museum d'Histoire Naturelle, avant que ce dernier lieu ne soit restauré et transformé en Grande Galerie de l'Evolution (comme le rappelle François-René Simon dans son texte de présentation). Suivent divers textes de Vincent Bounoure, Anne Fourreau et Jean-Yves Bériou. Je m'arrête plus particulièrement sur les dessins d'une certaine Mélanie Delattre-Vogt.l'or aux 13 îles n°2,jean-christophe belotti,art immédiat,bruno montpied,armand goupil,marilena pelosi,joël lorand,gérald stehr,hérold jeune,la passerelle,maugri,jean-lous cerisier,charles lacombe,sefolosha,émilie henry,louis roy,art naïf,lobanov,donadello,sirènes,manero,ruzena,bernard javoy,serge paillard,monique le chapelain,pépé vignes,paul duhem,javier mayoral,guy girard

     Puis suit un grand dossier sur Pierre Peuchmaurd, poète estimable disparu tout récemment (comme dans le n°1 était inséré un dossier sur Jean Terrossian). Les poèmes nombreux sélectionnés par Belotti dans l'œuvre de Peuchmaurd ont tous un lien avec l'animal. 

l'or aux 13 îles n°2,jean-christophe belotti,art immédiat,bruno montpied,armand goupil,marilena pelosi,joël lorand,gérald stehr,hérold jeune,la passerelle,maugri,jean-lous cerisier,charles lacombe,sefolosha,émilie henry,louis roy,art naïf,lobanov,donadello,sirènes,manero,ruzena,bernard javoy,serge paillard,monique le chapelain,pépé vignes,paul duhem,javier mayoral,guy girard      Des poèmes inédits de Guy Cabanel sont flanqués d'aquarelles d'Aloys Zötl, extraites du livre de Victor Francés récemment paru aux éditions Langlaude (Contrées d'Aloys Zötl, à un prix défiant toute concurrence grâce à des Chinois sous-payés), cet obscur teinturier autrichien qui se passionna de 1831 à 1887 pour des animaux qu'il dessinait plus réels qu'en vérité, les plaçant dans des décors naturels peu réalistes mais somptueusement veloutés et d'une puissance de suggestion sur l'imagination à nulle autre pareille.

      Ce numéro 2 est aussi pour moi l'occasion d'entrouvrir une porte sur une collection "d'art immédiat" dans le texte de 40 pages que j'ai intitulé Le Royaume parallèle.l'or aux 13 îles n°2,jean-christophe belotti,art immédiat,bruno montpied,armand goupil,marilena pelosi,joël lorand,gérald stehr,hérold jeune,la passerelle,maugri,jean-lous cerisier,charles lacombe,sefolosha,émilie henry,louis roy,art naïf,lobanov,donadello,sirènes,manero,ruzena,bernard javoy,serge paillard,monique le chapelain,pépé vignes,paul duhem,javier mayoral,guy girard Dérivant derrière cette porte, j'invite le lecteur à découvrir des créateurs aussi variés  que Guy Girard, Marilena Pelosi, Gérald Stehr, Armand Goupil, le sergent Louis Mathieu, le peintre naïf Louis Roy, le "patenteux" québécois Charles Lacombe, Christine Séfolosha, divers pratiquants de l'atelier pour handicapés mentaux de la Passerelle (l'atelier animé par Romuald Reutimann à Cherbourg), des objets d'art populaire anonyme, des collages d'un "anonyme américain" (que j'ai identifié depuis peu grâce à l'amabilité de Frédéric Lux comme étant de l'autodidacte américain Javier Mayoral, voir le blog de Laurent Jacquy Les Beaux Dimanches qui y parle d'un blog tenu par ce créateur, appelé Locus Solus 1 où Mayoral parle de ses créations très diverses, ex-voto décalés, catcheurs, phénomènes à la Barnum ; le monsieur en question paraît beaucoup jouer de la distanciation tout en restant friand d'ingénuité: curieux!), un jeu de massacre forain, une poupée rescapée de tribulations dans des greniers oubliés, Jean Estaque, Serge Paillard, l'inévitable et mirifique Joël Lorand, Jean-Louis Cerisier, soit autant de figures ou de sujets que les lecteurs fidèles et attentifs du Poignard reconnaîtront sans coup férir  comme rôdeurs dans ces parages...

l'or aux 13 îles n°2,jean-christophe belotti,art immédiat,bruno montpied,armand goupil,marilena pelosi,joël lorand,gérald stehr,hérold jeune,la passerelle,maugri,jean-lous cerisier,charles lacombe,sefolosha,émilie henry,louis roy,art naïf,lobanov,donadello,sirènes,manero,ruzena,bernard javoy,serge paillard,monique le chapelain,pépé vignes,paul duhem,javier mayoral,guy girardA noter que je viendrai à l'auditorium de la Halle Saint-Pierre à 15h le dimanche 6 novembre (dans une semaine donc) en compagnie de Jean-Christophe Belotti qui dédicacera ce numéro tandis que je proposerai aux personnes présentes une dérive en une centaine d'images sur cette collection d'art immédiat (cela ne se limitera pas, étant donné le nombre, aux images présentes dans la revue). A bientôt donc.

Les illustrations qui accompagnent cette note sont, pour ce qui concerne les dernières des pages extraites de la revue.

        

03/04/2011

De qui, d'où, cette "madone"?

     Monsieur Laurent Le Meur m'a adressé récemment la photo d'une statue de 35 cm de hauteur retrouvée par lui dans un dépôt d'Emmaüs du côté du Mans, elle était alors recouverte de noir de fumée, personne ne sachant d'où elle provenait. Partageons-là, au moins en image, et interrogeons-nous sur son origine et son identité, si vous le voulez. Qu'en penser?

 

Statuette anonyme sans indication d'origine, une Madone? Photo Laurent Le Meur.jpg

Photo Laurent Le Meur

 

     J'y vois personnellement une madone, qui me fait vaguement songer à des statuettes éthiopiennes chrétiennes. Et puis dans un second temps, j'en viens parfois à douter, une imitation, un faux? Une statuette d'art singulier, le visage étant par trop simple...? Mmonsieur Le Meur y voit pour sa part une statue qui "dégage de la sérénité et du bonheur, ressemblant à une idole de croisement de civilisations". Bonheur, je ne sais pas, mais croisement de civilisations, pourquoi pas en effet...

 

Statuette anonyme, ph. Laurent Le Meur.jpg

Photo Laurent Le Meur

10/02/2011

Les idioties d'Anne Marbrun, un nouveau blog

    Pour nous changer des blogs d'art brut et consorts, avec leurs petites jalousies et autres vieilles haines recuites, claironnons l'apparition d'un blog de plus, qui apporte fraîcheur, et "idiotie" ambiguë (qui vaut mieux que l'idiotie de l'art en friche),  celui d'Anne Marbrun. Je le joins dès aujourd'hui à mes doux liens.

    Créé en début d'année, ce blog (dont l'apparente idiotie renvoie bien sûr au départ aux mots de Rimbaud, dans Une Saison en enfer, voir ci-dessous la citation exacte) s'efforcera, dixit l'auteur, "de ne dire que des idioties, de ne peindre que des idioties, de n'écrire que des idioties". Vaste programme.

Anne Marbrun, L'insomnie des moutons, extrait du blog Les idioties d'Anne Marbrun.jpg

Anne Marbrun, L'insomnie des moutons

 

     Ajoutons que l'auteur s'est illustré en publiant un certain nombre de plaquettes et livres (Casus belli et La nuit, ça va, aux éditions Myrddin ; La traversée et la tache aux éditions L'Escampette ; La petite, à L'Oie de Cravan -réédition de la plaquette parue chez La Fée verte ; et Le sang des cerises, aux éditions Lucien Souny).

La citation de Rimbaud: "J'aimais les peintures idiotes, dessus de portes, décors, toiles de saltimbanques, enseignes, enluminures populaires ; la littérature démodée, latin d'église, livres érotiques sans orthographe, romans de nos aïeules, contes de fées, petits livres de l'enfance, opéras vieux, refrains niais, rythmes naïfs". Extrait d'Alchimie du verbe, dans Une Saison en enfer, (1873). 

  

17/10/2010

Art sans étiquette à Rives, sortie A 48 entre Lyon et Grenoble, parcours fléché...

    Art singulier? Trop galvaudé ces temps-ci. Art brut? Inadéquat, et déjà pris. Art contemporain? Trop vague. Art Hors-les-Normes? Pas tant que ça... Alors on opte pour un terme descriptif qui ne dérangera personne, "Art partagé", pour cette 3ème biennale organisée par l'association Oeil'Art, à Rives en Isère. 

Art partagé, 3ème biennale.jpg

     Une bonne partie des créateurs présentés ici viennent des ateliers qui hébergent les expressions des déficients et autres handicapés mentaux, Jean-Louis Faravel, animateur d'Oeil'Art ayant une prédilection marquée de ce côté-là (mais gare aux redites! Il commence à y avoir beaucoup de "bonshommes" peints dépouillés sur des fonds très colorés au sein de cet art des handicapés, et cela finit par nuire à l'écho que ses partisans voudraient voir bien établi).

     On reconnaît aussi parmi les propositions d'oeuvres quelques noms connusJoël Lorand portrait en train de dessiner, ph Association Oeil'art.jpg des lieux voués à la défense et à l'illustration de ce que l'on appella en 1978 "les singuliers de l'art", et depuis les festivals qui se sont montés dans les années suivantes, "l'art singulier".Adam Nidzgorski,ph. Site web Art tout simplement 2010.jpg On notera l'inversion des termes qui signala que l'on accordait dans ces festivals le mot "singulier" davantage avec l'art, plutôt qu'avec les personnalités, et leur comportement singulièrement créatif. L'art singulier au fond devenait l'art contemporain du dimanche... Dès lors, on risquait d'y trouver à boire et à manger. Il est difficile aujourd'hui, dans les festivals d'art plutôt pluriel de ne pas se retrouver au milieu d'un bric à brac confus envahi de suiveurs et d'arrivistes aux dents longues quoiqu'un peu voyantes.

 

POSTIC Les larmes de la pluie encre sur toile80x40cm 2009.jpgEvelyne Postic, Les larmes de la pluie, encre sur toile, 80x40cm, 2009

 

Marie-Jeanne Faravel, Mes petites histoires,43x39, encre, matériaux divers et points de couture, 2010.JPG

Marie-Jeanne Faravel, extrait de la série "Mes petites histoires", 43x39cm, encre, matériaux divers et points de couture, 2010

        Ce ne paraît pas être le cas avec la biennale de "L'art partagé" où un effort sincère est fait en faveur de la découverte de nouvelles formes d'expression autodidactes.  C'est pourquoi je suis allé proposer mes propres productions auprès d'Oeil'art qui m'a accueilli avec hospitalité. Une douzaine de mes petits formats sont présents dans les cartons de l'association. Voici quelques unités:

Bruno Montpied, Ils sont plusieurs à hésiter en lui, 2008.jpg

Bruno Montpied, Ils sont plusieurs à hésiter en lui..., 24x18, 2008 

Bruno Montpied, Où l'on perd la tête, 2005.jpg 

B.M., Où l'on perd la tête, 25x30cm, 2005 

Bruno Montpied, Le Pouvoir,2009.jpg

 B.M., Le Pouvoir, 29,7x21cm, 2009

Bruno Montpied, La bouliste bizarre, 2010.jpgB.M., La bouliste bizarre, 24x17cm, 2010 

     

      On sent qu'une des lignes de force des expositions montées par Oeil'art est un certain goût des figures épurées, voire dépouillées (c'est pourquoi l'association est aimantée par les figures de l'art des handicapés). Et c'est aussi vrai qu'il est très émouvant, et parfois même vertigineux, de constater la force que peut recéler une figure très nue, très simplement rendue. Chaissac y arrive avec une virtuosité quasiment sans égale (comme on pourra s'en rendre compte en ce moment  en allant visiter l'exposition très réussie qui se tient à Paris sur la rive gauche dans la galerie Nicolas Deman).

Jean Dehombreux 1, 73x55.jpgJean Dehombreux (nom prédestinant?), ph. site web Art Tout Simplement 



10/09/2010

Armand Goupil: Portrait et autoportraits inédits

     Armand Goupil, deuxième du nom, continue de m'adresser des informations intéressantes relatives à son père. Et tout d'abord ces deux portraits photographiques, dont j'aime surtout le premier, pétillant et empreint d'une malicieuse tendresse.

portrait d'Armand Goupil, Lamnay, 1949, archives famille Goupil.JPG

Portrait d'Armand Goupil, Lamnay, 1949, archives famille Goupil

Armand Goupil, Pépé,1950, archives famille Goupil.JPG

Portrait un peu plus tranquille, 1950, Archives famille Goupil

      Dans ma note précédente, je répétais ce qu'il m'avait confié. Les peintures qu'a gardées la famille seraient selon lui plus académiques, plus banales. Quelle n'a pas été ma surprise en recevant alors trois nouvelles images de peintures que je trouve personnellement remarquables, plutôt abouties, très proches de l'art naïf pour le coup (exemple l'instituteur dans sa classe ; c'est un autoportrait).

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Armand Goupil, (dans sa classe), archives famille Goupil 

 

    Cet instituteur dans sa classe, l'allure quelque peu bohème, avec des élèves à la queue leu leu croqués dans ce qu'ils peuvent avoir de petits êtres pas encore finis, n'est-ce pas un tableau que l'on qualifierait de très bon Naïf, pas très éloigné de Bauchant par exemple? Cet autoportrait ci-dessous avec le violoncelle laisse voir accrochés au mur derrière le peintre-musicien quelques nus qui trahissent bien ses marottes préférées...

armand Goupil, Autoportrait au violoncelle, 1955.jpg

Armand Goupil, la clope au bec, peut-être une Gitane (voir aussi le premier portrait photo ci-dessus) qui corroborera certaines hypothèses tabacologiques de l'ami Philippe Lalane, l'homme qui me mit sur la route d'Armand Goupil

 

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Une autre oeuvre d'Armand Goupil, celle-ci glanée par le brocanteur Philippe Lalane ; sans titre, sans date, très stylisée, relevant d'une veine où le peintre s'exerçait à chercher des figurations aux limites du signe

     Et que dire de cette dernière peinture tout bonnement étonnante, je trouve, qui paraît réunir en une seule image les illustrations des voyages de Gulliver au pays de Lilliput avec les tentations de Saint-Antoine? Il aurait dû l'intituler les tentations de Saint-Armand...

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Armand Goupil, sans titre, 1954 (à noter la femme verte, teinture que l'on retrouve sur d'autres femmes dans d'autres compositions), archives famille Goupil

06/09/2010

Maïtre Goupil, peintre cachottier, sa biographie

Armand Goupil, monogramme, extrait de la peinture du 14-IV-61.jpg         Voici que la lumière s'est faite pour moi au sujet du peintre autodidacte Armand Goupil, car l'un de ses trois enfants, prénommé et nommé comme lui Armand Goupil (pour la commodité de la relation, je l'appellerai Armand junior), a pris contact pour me donner des informations complémentaires très précieuses au sujet de son père (grand merci monsieur). Je n'avais pas grand chose à dire en effet, jusque là, sur ce dernier, tout au plus des hypothèses à émettre d'après les quelques peintures que j'avais pu voir et photographier au gré des brocantes où elles avaient surgi depuis trois ou quatre ans (voir mon article: Bruno Montpied, "Armand Goupil, peintre inconnu, peintre domestique" dans Création Franche n°29, avril 2008, et les diverses notes publiées sur ce blog).

         Cependant ces hypothèses et rumeurs n'étaient pas très éloignées de la vérité comme on va le voir.

Armand Goupil,Samba sans but sans bas, 1960.jpg

Armand Goupil, Samba Sans but Sans bas, 16-VII-60

 

        Armand Goupil sénior est né le 8 juin 1896 à La Suze-sur-Sarthe, dans un pays où il passa la plus grande partie de son existence. Il est décédé en 1964, soit à soixante-huit ans, au Mans, où il avait pris sa retraite, d'un accident vasculaire cérébral. Ses parents étaient gens fort modestes. Le père, ouvrier tanneur au départ, finit par acheter un bal-restaurant où se tenaient des noces, des banquets. Goupil, remarqué par un instituteur, se dirigea vers l'Ecole Normale pour devenir instituteur lui aussi, intégrant la promotion 1912-1915. Au sortir de ces études, il rentra immédiatement sous les drapeaux pour devenir soldat en pleine guerre, à laquelle il participa sous le fort de Vaux à la bataille de Verdun en 1916. La chance voulut qu'il y soit fait prisonnier (oui, la "chance" car "mort qu'on n'a pas tué", comme il disait à son fils, cette situation lui permit d'éviter les combats), le jour de ses vingt ans. Il fut envoyé en Allemagne, où, refusant de travailler, il fut interné en camp de représailles. Il faillit y mourir de faim, en gardant par la suite une fragilité intestinale qui devait l'affecter le restant de sa vie. 

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          Il est libéré en 1918, et est tout de suite nommé instituteur à Lamnay dans sa Sarthe natale. C'est le seul poste qu'il exercera jusqu'à sa retraite en 1951. Il épousera l'institutrice du village et fera avec elle trois enfants (dont deux sont encore en vie aujourd'hui). La vie de ce village l'accaparera grandement, puisqu'il y aidait beaucoup de monde, servant à l'occasion d'écrivain public et de secrétaire de la caisse d'Epargne le dimanche matin (le dimanche après-midi étant consacré aux comptes, se souvient son fils Armand junior qui en garde un souvenir accablé...). Comment fit-il pour assurer son rôle de pater familias avec un tel emploi du temps voué à aider à tout moment ses concitoyens? Mystère... Toujours est-il qu'il peignait déjà, même à cette époque, dans les rares temps libres qui lui restaient (Armand junior se souvient d'une de ses premières peintures, à l'adolescence, qui représentait un pont de la Suze), les peintures qu'il estimait (et laissait voir) étant trop travaillées selon son fils, trop banales et convenues.
 

Armand Goupil,sans titre,20-I-62.jpg

 

         C'est surtout à partir de 1951, date à laquelle il prend sa retraite et qu'il déménage au Mans, et où il va s'empresser d'oublier son village envahissant, qu'il se lance dans la peinture du "matin au soir" (se souvient Armand junior). En treize années - puisqu'il disparaît brutalement en 1964 - il va produire semble-t-il plusieurs centaines de peintures, la plupart à l'huile, sur des supports modestes, la plupart du temps sur des cartons d'emballage. Ce ne sera qu'une fois cette oeuvre dispersée, et publiée sur Internet, notamment sur ce blog, que le fils, Armand Goupil, découvrira que nombre d'oeuvres lui avaient été cachées par son père, ainsi du reste qu'aux autres membres de la famille. Les oeuvres à thématique anticléricale ne sont pas faites pour le surprendre puisque l'on connaît bien les opinions des instituteurs laïcs de l'entre-deux-guerres (cela n’empêchait pas Armand Goupil d’apprécier les rencontres avec le Don Camillo de son village, seule personne avec qui il pouvait avoir des conversations d’une certaine tenue intellectuelle, mais curé qui cependant se cachait lorsqu’il rendait visite à l'athée…). Les oeuvres érotiques paraissent inspirées peut-être de l'iconographie présente dans les revues naturistes plus ou moins dissimulées à l'écart par son père, qu'Armand junior se rappelle avoir découvertes après le décès. Ce qui surprendra plus le fils sera la révélation de la contradiction qui habitait son père, aux moeurs austères, féru de discipline et de morale, soucieux du qu'en dira-t-on campagnard, et très chatouilleux quant aux comportements de ses enfants susceptibles de manquements aux lois morales. Les peintures aux sujets coquins fonctionnaient certainement comme une soupape de sûreté, un défoulement mené sur un mode au moins symbolique pour ce père corseté, dans un temps où la vie sexuelle faisait l'objet d'un persistant tabou.

Armand Goupil,Hosanna!Ose,25-XI-60.jpg

         Armand se souvient aussi de sculptures que faisait son père. La famille conserva les peintures les plus convenues. L'ensemble des peintures plus « libres », faites sur les supports de rebut, a été dispersé par un descendant de la famille qui était pressé de faire place nette. Ces oeuvres n'intéressaient pas trop la famille qui n'y décelait pas de valeur particulière, encouragée en cela par la modestie d'Armand Goupil qui avait intériorisé son oeuvre, la réalisant avant tout pour lui-même, dans une démarche assez commune avec celle des créateurs de l'art brut auxquels on ne peut cependant assimiler Goupil (à cause de l'aspect figuratif de son oeuvre, non détachée de la perception rétinienne). Peut-être aussi pour la maintenir à l'abri des regards familiaux. Sa fin brutale ne lui permit pas de la garder du reste éternellement cachée. Son épouse la conserva dans un meuble fort longtemps, d'une façon fétichiste, et lorsqu'elle disparut, ce fut alors qu'elle fut vendue en bloc à un brocanteur qui passait par là. Ce dernier la dispersa méthodiquement, vendant chaque peinture un euro pièce... D'intermédiaire en intermédiaire, les peintures continuèrent alors à circuler, prenant un peu plus de valeur monétaire à chaque nouvelle main. Le mouvement s'est-il aujourd'hui arrêté... ou bien?

Armand Goupil,sans titre, 16-XI-58.jpg

      Ce graphisme domestique, au voyeurisme naïf, basé parfois sur des calembours, mériterait cependant qu'on aille y voir de plus prés en lui consacrant par exemple un petit ouvrage, pourquoi pas?

 

 

26/05/2010

Art populaire et archéologie

     (Cette note est la refonte complète d'une précédente version mise en ligne originellement en mars 2010 ; les commentaires qui la suivaient ont du coup été supprimés, ne se rapportant plus à la même note)

Glozel,tablette d'argile, publiée dans le dictionnaire des Trucs, éd. Pauvert, 1964.jpg 

A Glozel, ce genre de tablettes avec un alphabet inconnu laisserait supposer que les traces les plus anciennes d'écriture sont en Auvergne... ; reproduction extraite du  Dictionnaire des Trucs de Jean-Louis Chardans (Pauvert, 1964)

      Les trouvailles archéologiques du musée de Glozel, en Limagne (voir sur le web les informations nombreuses sur la question avec le débat qui dure depuis 70 ans entre pro-glozéliens et glozélo-sceptiques) - dont je ne suis pas en mesure de juger si elles sont à prendre au sérieux ou non - me sont toujours apparues intuitivement cousines de celles d'un Robert Garcet, ce visionnaire naïf qui en Belgique (voir le film de Clovis Prévost sur lui) était persuadé qu'il y avait sous sa maison des traces d'une civilisation ancienne sculptées dans des silex qu'il amassa muséologiquement sous une tour maçonnée de grosses pierres, que couronnaient des bêtes fantastiques venues tout droit de bestiaires alchimiques. Ou de cet autodidacte savant qui dans le bourg de Croix-de-Vie en Vendée pensait que l'Atlantide se trouvait au large des côtes vendéennes. Pour le prouver il présentait d'innombrables tablettes, fossiles, moulages, empreintes, croquis divers, serrés comme des harengs sur le mur de sa propriété appelée "le Castel Maraîchin".

Castel Maraîchin,Croix-de-Vie, années 1920, carte postale ancienne, coll. BM.jpg
L'entrée du "Musée de plein air" du Castel Maraîchin à Croix-de-Vie dans les premières décennies du XXe siècle... Coll. BM
Vénus-de-Quinipily,-2001.jpg
Vénus de Quinipily, ph. Bruno Montpied, 2001

            L'énigmatique Vénus de Quinipily elle-même, près de Baud dans le Morbihan, massive et de style incontestablement naïf, dont on ne connaît pas l'auteur et que l'on interprète comme une représentation d'Isis (voir le Guide de la Bretagne Mystérieuse chez Tchou), pourrait bien être, au lieu d'une trouvaille archéologique, une extrapolation en trois dimensions, inspirée de quelque iconographie ancienne, dont l'auteur serait un autodidacte resté anonyme. Les collections conservées au musée de Glozel, avec ses tablettes d'argile aux signes passablement sommaires, comme enfantins, ses idoles bisexuées rigolotes, d'un niveau artistique assez proche d'un certain art brut louchant du côté d'une stylisation archaïque pourraient sans difficulté entrer dans la catégorie de l'archéologie populaire visionnaire si ne s'y attachaient pas par ailleurs les convictions de divers auteurs qu'il s'agit là d'une découverte scientifique (le débat là-dessus paraît curieusement loin d'être clos).

Glozel,idole bisexuée, publiée dans le dictionnaire des Trucs, éd. Pauvert, 1964.jpg

Idole bisexuée, cf Le Dictionnaire des Trucs de Jean-Louis Chardans (Pauvert, 1964)

18/10/2009

Un musée de l'art médiocre à Dedham, Massachusetts

     Dans la problématique de la valeur des oeuvres d'art, on versera au dossier l'existence d'un Musée de l'art médiocre (ou moche, voir dans les commentaires ci-dessous) aux Etats-Unis, le MOBA (museum of bad art).Dog, collection du MOBA(auteurInconnu peut-être d'origine danoise).jpg Il m'a été signalé par l'animateur de l'émission de radio Song of praise, Cosmo Helectra. Cela faisait suite à des discussions que nous avions eues au sujet de la vogue qui sévit aux USA autour des collections d'oeuvres trouvées dans les dépôts-ventes et autres brocantes, dans les décharges, dans la rue, etc., oeuvres qui possèdent un aspect bizarre, difficile à classer dans l'une ou l'autre des catégories en usage telles que l'art brut, l'art naïf, l'art populaire. Des oeuvres étranges que le regard hésite à taxer d'idiotie, leurs apparentes maladresses pouvant recéler quelque langage nouveau, pas encore perceptible à notre époque. Des oeuvres inclassables, véritablement inclassables. Cosmo m'a ainsi montré un bouquin édité aux USA, intitulé Thrift store paintings (peintures de dépôts-ventes),Couverture du catalogue Thrift Store paintings.jpg qui présentent un certain nombre de ces tableaux effectivement fort insolites, d'un surréalisme involontaire semble-t-il dans certains cas (quoique... Un certain nombre d'entre elles paraissent en même temps mal digérées de ce dernier mouvement, l'inspiration, et la technique, étant le plus souvent défaillantes...).

peinture d'auteur inconnu,extraite d'un blog américain pour femmes au foyer.jpg
Image trouvée sur un blog à l'intention des femmes au foyer américaines...

    Je donne ici quelques exemples pris sur internet, venus d'horizons hétéroclites, comme l'image ci-dessous piquée sur un site dédié au ping-pong:

peinture d'un certain Wolters, peinture trouvée dans un dépôt-vente aux USA.jpg

        Certains artistes, bien documentés, se sont mis, toujours aux USA, dans l'esprit d'Asger Jorn, à repeindre ou à faire des collages sur les peintures de dépôts-ventes. Que l'on se reporte par exemple à cette artiste contemporaine américaine (née en 1934), Margot Bergman, dont cela paraît être le procédé permanent (de fort beaux résultats). On se souvient que cela n'est pas nouveau, Jorn, dont j'ai déjà parlé sur ce blog, a eu une période où il exécutait des modifications sur des croûtes achetées aux Puces, affirmant par ailleurs admirer la banalité pure de ces tableaux anonymes, y ajoutant sa patte (et sa pâte). La rencontre des deux styles nous a laissé des oeuvres très attachantes. Il apparaît à la lumière du déferlement actuel des modificateurs sur croûtes comme un véritable précurseur.

margot bergman,joy gaye,2008,acrilique sur toile, peinture d'amateur modifiée.jpg
Margot Bergman, Joy Gaye, acrylique sur toile, peinture de dépôt-vente modifiée, 2008
Asger Jorn,Dolce vita,modification,1962.jpg
Asger Jorn, La Dolce Vita, Huile sur toile, 1962

      Cependant, le projet du MOBA paraît quelque peu différent. Sur leur site, ils affirment vouloir donner toute sa place au mauvais art, une place aussi grande que celle accordée à l'art établi comme bon art (leur slogan est "Un art trop mauvais pour être ignoré"). Il entre bien entendu là-dedans une part de provocation et d'humour qui sonne très pataphysique. Leur démarche est quelque peu ambiguë, ne sont-ils pas moqueurs, dépréciatifs sous couvert de reconnaissance du mauvais art? Veulent-ils simplement donner à voir des pièces médiocres pour réenraciner par contraste la valeur des oeuvres traditionnellement établies qu'une certaine relativisation généralisée des valeurs, très contemporaine, menace actuellement, dans notre époque post-avant-gardiste? Des questions sont posées à ce sujet sur le blog des éditions Cynthia 3000 qui sont par ailleurs à l'origine de la CAPUT dont j'ai déjà parlé ici (Collection d'Art Populaire et de l'Underground Tacite, qui se constitue à partir d'oeuvres d'inconnus retrouvées dans  les brocantes là aussi), dans une réponse des animateurs du blog à un autre commentaire que votre serviteur leur avait laissé il y a quelque temps.

Peinture d'un anonyme, collection du MOBA.jpg

Oeuvre d'un inconnu, MOBA

     Autre remarque, ce projet de constituer une collection d'art médiocre me fait aussi beaucoup penser au fond à la reprise  du projet primitif de l'écrivain Georges Courteline qui au début du XXe siècle collectionnait les peintures d'amateurs en les recouvrant du terme générique de "musée des horreurs" (ce qu'il modifia à la fin de sa vie, lorsqu'il voulut les revendre, en "musée du labeur ingénu"...). Il se livra dans différents articles à une recension de ses trouvailles - de fort belles peintures à la poétique naïveté du reste - qu'il accompagna cependant de commentaires narquois, se gaussant par en dessous des tableaux qu'il avait acquis par esprit de dérision (au début en tout cas). André Breton se moqua à son tour de lui en traitant son état d'esprit de "bon sens éculé", "la croissante misère psychologique "(de Courteline) "cherchant dans les sarcasmes à se libérer de l'éternelle peur d'être dupe" (voir le texte de Breton, Autodidactes dits "Naïfs", dans Le Surréalisme et la peinture).

01/10/2009

Le Plein Pays, documentaire d'Antoine Boutet sur Jean-Marie M., archéologue sauvage

         Je n'avais plus de nouvelles de ce monsieur Jean-Marie M. depuis bien longtemps. Depuis que j'étais allé le voir en 1987 avec Gaston Mouly qui s'était gentiment chargé de faire le médiateur entre nous (j'ai tourné un petit film en Super 8 à cette occasion que j'ai intégré par la suite à  l'ensemble de petits films d'amateur sur les environnements que j'ai intitulés Les Jardins de l'art immédiat).     L'ami Joël Gayraud m'avait signalé un article de Walter Lewino paru en 1984 dans Le Nouvel Observateur qui évoquait cette présence peu commune dans une forêt du Lot (article Le Malthusien des Bruyères).

J-M-portrait, photogramme Les Jardins de l'art immédiat, par Bruno Montpied, 1987.jpg
Jean-Marie M. à l'entrée d'un de ses puits, photogramme extrait des Jardins de l'art immédiat, Bruno Montpied, 1987

    Jean-Marie creusait le sol, effectuant un travail colossal à mains nues au début, puis, après s'être perfectionné côté outillage et engins, avec plus de moyens, élargissant ses tunnels, ses puits,Entrée de puits de J-M.M.,Les jardins de l'art immédiat,Bruno Montpied, 1987.jpg ses crevasses dans l'espoir de découvrir une civilisation préhistorique sous son terrain. On était dans une région de grottes célèbres, Pech-Merle, Cabrerets... Le Périgord aussi n'était pas très loin.

    Il fouillait la terre comme une taupe humaine, acharné de façon hyperbolique, creusant sans cesse comme à la poursuite du secret des origines. Qui n'étaient à chercher nulle part ailleurs, bien sûr, qu'au sein de la terre-mère. Il vivait seul avec sa mère sur ce territoire qu'il perçait de galeries. Il interdisait qu'on aille vers sa maison qu'on devinait par delà deux pyramides de pierres, où vivait la génitrice protégée comme une idole. Il interdisait aussi qu'on emmène de la terre de son fief sous les semelles de nos chaussures. Il nous épousseta bien soigneusement, Gaston et moi, avant que nous ayons eu le temps de franchir la limite de la propriété.

     Je ne suis pas descendu dans les galeries et les salles creusées dans la terre rouge quand je vins chez lui, tellement cela me paraissait périlleux en l'absence de lumière et sans plus d'information. Le sculpteur Ipoustéguy qui a visité en 84 le site avec Walter Lewino avait été plus téméraire, il descendit au fond, se frottant aux parois de terre rouge, rapportant que l'on voyait quelques gravures de Jean-Marie à certains angles. Sur le terrain lui-même, il y avait peu d'interventions "artistiques". Sur les pyramides évoquées ci-dessus (des cairns améliorés), on pouvait apercevoir quelques grossières incisions, tentant d'imiter les gravures rupestres du Val Camonica en Italie ou de la Vallée des Merveilles dans les Alpes françaises. Interrogé par nous sur ce qu'il avait réussi à mettre au jour jusqu'alors (1987, je le répète), il s'était embrouillé, avait seulement soulevé une bâche pour nous montrer une belle améthyste, qui consistait à ce que nous crûmes comprendre en son unique trouvaille de quelque valeur... Peut-être était-ce avant tout sa quête qui le faisait vivre, et peu importait la fin.

J-M.,photogramme Les Jardins de l'art immédiat, Bruno Montpied, 1987.jpg
J-M. fouillant dans ses trouvailles, quelques pierres... Photogramme Les Jardins de l'art immédiat, B.M., 1987

     A suivre l'article de Walter Lewino, J-M en 1984 avait un message écologique et démographique à faire passer au monde (ce qui le range aussi du côté des "fous littéraires"). Selon lui, la Terre étant bien trop peuplée, il fallait réduire d'urgence la population en cessant de procréer (sa théorie était peu claire, il militait pour une "extinction de l'espèce humaine", ce qui est nettement plus radical qu'une simple diminution démographique ; de plus il en voulait à son père de lui avoir donné le jour, il prédisait l'arrivée des extra-terrestres qui retrouveraient ses vestiges et en feraient un palais merveilleux ; au fond, il proclamait son désir de n'avoir jamais existé). Il avait confié à Lewino un message à publier dans les média, ce que ce dernier fit (voir ci-dessous).

Avis à tous les média, J-M. Article Walter Lewino, Le nouvel Observateur, 1984.jpg

J-M.,article Lewino, Le nouvel Observateur, 1984.jpg

Texte dicté à sa mère par J-M, photos de l'article de Walter Lewino, Le nouvel Observateur, 8-6-1984

     Je commençai d'écrire quelque texte à son sujet, que je finis par délaisser, n'ayant que peu de tribunes à ma disposition, puis  je me mis à en parler autour de moi, le cas était tout à fait intriguant, j'attendais une occasion, et je me demandais comment en parler adéquatement... J'étais impressionné aussi par l'impact que pourrait avoir la révélation de cette existence sur un public plus large. Des articles parurent cependant ici et là, par exemple dans le magazine Dire Lot qui ne cacha pas le nom de Jean-Marie, si je me souviens bien, ou dans Gazogène également à qui je l'avais signalé (revue éditée à Cahors). Dans ce dernier bulletin, vers 2000, il fut fait état d'une nouvelle fantastique, la mère de Jean-Marie étant décédée, et ayant été enterrée au cimetière, loin de leur terrain sacro-saint, celui-ci n'avait pu le supporter et était parti la déterrer (toujours cette quête du souterrain), pour l'exhumer et la ramener chez lui. Cela ressemble au comportement de l'auteur du fameux plancher de Jeannot dont j'ai déjà parlé ici. Jean-Marie, avais-je alors appris, avait pu regagner son domicile après quelques démêlés avec les autorités. Depuis je n'avais plus de nouvelles.

J-M M.,affiche Le Plein Pays, film d'Antoine Boutet, 2009.jpg

     Et voilà que j'apprends qu'on a fait un film avec lui, où son nom  - à juste titre peut-être - n'est pas prononcé. Seul son prénom apparaît dans les dossiers de presse qu'on m'a communiqués (grand merci à Remy Ricordeau pour cette information précieuse).J-M. dans une de ses galeries avec une lanterne, photogramme Antoine Boutet.jpg L'auteur du documentaire est Antoine Boutet. Le film, daté de 2009, est un moyen-métrage de 56 minutes. Son titre: Le plein pays. Il sera projeté dans la région parisienne incessamment (c'est l'avant-première). Rendez-vous le mercredi 7 octobre à 21h au cinéma Le Méliès à Montreuil. Je ne sais pas vous, mais moi, j'y serai. Voici le résumé tel que je l'ai trouvé sur le site des "Rencontres cinématographiques autour du documentaire" qui se tiennent du 6 au  octobre à Montreuil:

    "Robinson au milieu d'une forêt française, avec pour seuls compagnons une radio et un magnétophone : l'homme que filme Antoine Boutet est un solitaire, un homme qu'on pourrait dire « des bois » ou « des grottes », tant il fait corps avec ces lieux secrets. Il les sculpte et les manipule, les chamboule et les creuse. Dans un même mouvement, du plus profond de lui, éclôt sa voix, ses mythes et bientôt, par bribes, son histoire."

    C'est le genre de film à rapprocher de celui qu'ont fait les animateurs du blog "Playboy communiste" sur le "griffonneur de Rouen", Alain R. Voir dans ma note ancienne ce que j'en avais dit. Ainsi que le lien vers leur blog dans ma colonne consacrée aux liens.

J-M, photogramme Antoine Boutet, 2009.jpg
J-M., photogramme Le Plein Pays, film d'Antoine Boutet

26/06/2009

La Mami Wata de Cyprien Tokoudagba

     Ces histoires de sirènes africaines, les Mami Wata, m'ont fait oublier je ne sais pourquoi de parler d'un bel ouvrage édité par la Fondation Zinsou au Bénin (l'ancien Dahomey) au sujet de cet extraordinaire artiste nommé Cyprien Tokoudagba, que j'apprécie énormément, surtout depuis une exposition qui s'était tenue à l'Institut du Monde Arabe en 1994, Rencontres Africaines, où ses tableaux gigantesques montrant des figures isolées sur fond blanc, manifestement inspirées des cultes vodoun, figures d'une grande audace picturale, m'avaient littéralement sidéré. Certes, en France, le travail de Tokoudagba avait  déjà surtout été révélé par la remarquable exposition des Magiciens de la Terre (organisée en même temps à la Villette et au Centre Beaubourg en 1989). A l'époque dans la foule de créateurs venus des quatre coins du monde pour les besoins de cette exposition fondatrice, j'avais surtout remarqué d'autres créateurs africains, en particulier Bruly Bouabré ou Bodys Isek Kinghelez, mieux mis en scène sans doute.

Couverture du livre sur Cyprien Tokoudagba édité par la Fondation Zinsou, 2006.jpg

      Dahomey, Rois et dieux, Cyprien Tokoudagba, tel est le titre de cet ouvrage (bilingue anglais-français) que j'ai trouvé sur un stand dédié à la culture béninoise tel qu'on pouvait en voir un peu en marge de l'immense espace du Salon du Livre en mars dernier. Il parut à l'occasion d'une expo du même titre consacrée à l'artiste à Cotonou à la même Fondation Zinsou en 2006. Or, ce livre en plus du fait qu'il permet d'en apprendre davantage sur Tokoudagba (à lire l'éclairant texte de Joëlle Busca en particulier), nous met en contact avec une autre version de la Mami Wata, cette fois concocté par notre artiste béninois.

Cyprien Tokoudagba,Mami Wata, Extrait du catalogue de la Fondation Zinsou, 2006.jpg
Mamiwata, Acrylique sur toile, 154x98cm

      A côté de sa reproduction, une notice donne de précieux renseignements sur la "sirène" en question, en réalité une déesse, un "génie de la mer": "Elle habite les profondeurs de la mer et commande à des myriades d'ondines. Souvent elle se présente sous les traits d'une très belle femme lorsqu'on l'invoque surtout au bord de la mer. Elle est détentrice de beaucoup de richesses (argent, bijou, or...) convoitées par les humains à qui elle les dispense (...). Elle s'entoure de serpents qu'elle enroule autour d'elle. Son culte est assez répandu. En tant qu'esprit, elle peut prendre la forme qu'elle veut, tel ici un personnage visiblement masculin à trois têtes..." Elle peut "prendre la forme qu'elle veut"... On ne saurait mieux dire... Au vu de toutes les reproductions de Mami Wata en circulation (voir ma note du 9 novembre 2008 ), on s'en convainc aisément. Dans le même livre, on trouve aussi, entre autres images magnifiques, une toile représentant le dieu Gou, du fer et de la guerre (c'est le même qu'Ogun, une sorte "d'homologue du dieu Mars de la mythologie latine", dit le catalogue), c'est une image géniale, hallucinée...

Cyprien Tokoudagba, Dieu Gou, extrait du catalogue de la Fondation Zinsou, 2006.jpg
Gou, acrylique sur toile, 195x102cm

 

 

24/03/2009

Armand Goupil au gré des blogs

    Je ne me souviens plus comment je suis tombé sur le site du mouvement ambiphoque.... Oui, vous avez bien lu, ambiphoque. Cela renvoie à une librairie, située à Paris, 10, rue des Ecoles dans le 5e ardt, à ma surprise (je viens tout juste de m'en aviser ; au fait, tout prés de la Sorbonne, comme ça, le mouvement aurait peut-être mieux fait de s'intituler amphi-bock...). Je ne l'ai jamais vue, cette librairie-là, pourtant j'y passe souvent. C'est sans doute de création récente? Va falloir s'en assurer en y allant physiquement. Ce mouvement ambiphoque, correspondant à un désir de faire voler des êtres pourvus de nageoires, dixit un des deux libraires, Claire Ambi (l'autre se prénomme Julien, comme il est dit sur le site web de la librairie), s'intéresse en tout cas à Armand Goupil, comme mézigue. Je renvoie à la note que leur blog a mise en ligne à la date du 18 mars dernier.

Baigneuse d'Armand Goupil, photo Claire Ambi, blog Ambiphoque, 2009.jpg
Armand Goupil, oeuvre (huile selon les auteurs du blog, peut-être, je mets personnellement gouache, mais c'est peut-être de l'huile...) datée de 1965, ou de 1963, avec le monogramme d'AG au-dessus ; photo transmise par Claire Ambi

    Ce peintre m'intrigue et me séduit beaucoup, au point que je lui ai consacré un article dans la revue Création Franche n°29 en avril 2008. J'en ai peu parlé sur ce blog en fait, je ne sais pas pourquoi, d'autres sujets ayant pris le dessus entre temps. Deux notes seulement, pas particulièrement centrées sur le Goupil (cliquez sur ce mot et puis ici aussi) en question, ont reproduit deux peintures photographiées chez un brocanteur qui m'avait laissé les prendre avec beaucoup de complaisance (merci à Jean-Philippe Reverdy). Je vais essayer de réparer cet oubli dès aujourd'hui. D'abord en publiant l'image que m'a transmise Claire Ambi, qui l'a aussi insérée sur son propre blog, Ambiphoque, (voir image ci-dessus) et en signalant d'autres peintures du même Goupil sur un autre blog, celui d'un M.Yves Barré, intitulé Ah Oui... Suivre les liens... Et puis, en mettant en ligne de temps à autre d'autres peintures de Goupil, comme celle ci-dessous, qui montre que le monsieur aimait les calembours traduits en images.

Armand Goupil,Des os et des bas, 1959, ph.Bruno Montpied, 2008.jpg
Armand Goupil, Des os et des bas, des hauts et des bas, 9-III-59 ; photo B.Montpied, 2008

    Armand Goupil, on ne sait que très peu de chose sur lui, il serait mort en 1965, avance Ambiphoque (c'est vrai que la plupart des peintures vues de lui ne dépassent pas cette date). Des brocanteurs (Philippe Lalane par exemple qui m'a mis à l'origine sur la piste de ce peintre) le présentent comme un instituteur qui aurait peint à la retraite, "de 1953 à 1964"... La famille vivrait toujours dans la Sarthe. Ce serait elle qui aurait décidé de disperser chez un brocanteur l'oeuvre de leur aïeul (au moins deux mille oeuvres...). Mais tout ceci n'est que bruits et rumeurs, sur lesquels personnellement j'ai résolu sciemment de divaguer à loisir, en reconstituant rêveusement les motivations de l'artiste telles qu'on peut les découvrir présentes au gré des peintures que j'ai pu photographier en un beau choix (50 environ), un jour à Chatou... C'est ce qui a servi pour l'article que j'ai publié dans Création Franche. Cependant, je reconnais que ce texte peut se réduire en définitive à un pur délire d'interprétation! Qui sait...? Par le détour du délire, j'ai pu toucher à quelque port aussi bien...

Armand Goupil,sans titre,1965, photo Bruno Montpied.jpg
Armand Goupil, sans titre [Une funambule à l'ombrelle], 17-I-63, ph.B.Montpied, 2008

13/01/2009

De Rien à l'Usine

    Un nouveau vernissage à la galerie associative l'Usine, 102 boulevard de la Villette, 19e arrondissement. Une exposition, des films, des lectures, tout cela pour fêter la réédition des 50 numéros de De Rien. Je parie qu'un grand point d'interrogation se dresse immédiatement autour de vos crânes, voltigeant de ci de là dans votre intérieur bien douillet. Sachez qu'il en est de même pour moi. Je n'ai jamais entendu parler de ce De rien. Et dire qu'ils ont déjà 50 numéros à leur actif... Oserai-je me pointer à cet anniversaire de peur de devoir y trahir mon ignorance bien entendu coupable?

invitation-pour-De-rien-à-l.jpg

    Quelques noms ou mots cités sur le carton d'invitation, Guénolé Azerthiope (créateur d'objets humoristiques dont on entendait parler à un moment dans Les papous dans  la tête sur France Culture)... le musée Dupuytren (ses monstres dans le formol, son mystère...)... Stéphane Mahieu (auteur d'ouvrages fort plaisants chez l'éditeur Gingko comme Le phalanstère des langages excentriques -2005-, ou Le Petit Manuel de littérature d'Outre-tombe -Anthologie des tables tournantes- (2008)... André Stas, membre influent des Cahiers de l'Institut (dont nous reparlerons bientôt)... Autant d'indices que peut-être il faut oser se pointer là-bas samedi 17 ou dimanche 18, ignorance ou pas...

24/09/2008

Connaissez-vous Claire Chauveau?

Cet article contient des mises à jour (de janvier 2020)...

 

    Je ne sais pas trop où il faudrait ranger les trois gravures que je mets ici en ligne. Art brut, naïf ou singulier, ou tout simplement inclassable, et séduisant, parlant à la délicatesse et à l'imagination.

    Je suis tombé sur ces gravures lors d'une de ces journées portes ouvertes improbables, où je ne vais généralement pas, de peur d'être rasé de près par les artisteuhs hyper narcissiques se croyant tous sortis de la cuisse de Jupiter parce qu'ils ont la bonne fortune d'étaler un peu de dégoulinade colorée avec plus ou moins d'inspiration et de maestria sur tous les supports de leur choix (allez, je ne vise, on l'aura compris que ce qu'on appelait autrefois les m'as-tu-vu ; a-t-on remarqué du reste à quel point on n'emploie plus ce mot, alors que la chose est pourtant si fréquente?). On m'avait mis au parfum, faut dire. Monelle Guillet et Joël Gayraud m'avaient signalé une "artiste" intéressante dans l'atelier d'un de leurs amis, André Elalouf.

Claire Chauveau, gravure aux chasseurs, vers 1995, ph.B.Montpied.jpg
Gravure, sans date, vers 1995 ; ph.B.Montpied

    Elle était sur les lieux, dans cet atelier de la rue Bichat dans  le 10e ardt, il y a déjà quelques années maintenant. Il était difficile de lui parler. Sa mère très présente à ses côtés répondait pour elle. Quelque chose commençait à se dire, mais la protectrice, sans doute inquiète, venait se superposer à ce discours qui ne parvenait pas à l'esquisse d'une formulation qui aurait eu peut-être - c'est l'impression toute subjective que j'en retirais - besoin de plus de temps pour se déployer.

Claire Chauveau, gravure aux hippocampes, vers 1995, ph.B.Montpied.jpg
Gravure sans titre, sans date, vers 1995 ; ph.B.M.

    En attendant (en attendant quoi?), j'acquis trois gravures où les sujets représentés distillaient une sensation de raffinement enfantin. C'était une scène de chasse avec hommes des bois avec fusil et arc. Plus une autre où l'on découvrait un avion à réaction larguant des bombes à côté, au-dessus, on ne savait trop, d'un Pégase géant (il me semblait reconnaître des souvenirs de mythologie gréco-latine), une chèvre attachée par le licol comme un appât pour un improbable tigre, un ange en robe, des arbres fragiles tentant vaille que vaille de croître dans le vide. Une troisième image représentait dans un médaillon central tout déchiqueté sur son pourtour une scène de chasse à la baleine, comme dans un dessin d'Inuit, avec des hippocampes, ces animaux démodés...

Claire Chauveau, gravure au Pégase, vers 1995, ph.B.Montpied.jpg
Gravure sans titre, sans date, vers 1995 ; ph.B.M.

     Je ne les ai jamais encadrés, jamais accrochés au mur chez moi. Je les garde dans un carton, où je vais les repêcher de temps à autre, les regardant avec reconnaissance pour leur grâce et leur finesse, leur simplicité raffinée. J'ai revu d'autres gravures de Claire Chauveau il y a quelques années à la Halle Saint-Pierre, dans l'espace pompeusement nommé "galerie" entre cafétaria et moignon de collection Max Fourny, au rez-de-chaussée. Le charme n'était plus le même, une certaine sophistication avait remplacé l'élan candide des départs. Comme si avait été conjurée l'immédiateté poétique, un peu étrange, hors-normes, des débuts... Mais peut-être n'est-ce là que suppositions et devrai-je faire place ici, plus tard, à un correctif...

 

Note du 14 janvier 2020 : Je reviens sur cette note de 2008 pour signaler le nom de l'animatrice de l'atelier de gravure de l'ADAC, rue des Arquebusiers dans le IIIe ardt (où, entre parenthèses, j'ai moi-même pratiqué de manière éphémère la typographie dans les années 1980), Mireille Baltar, qui accompagna, m'a-t-elle écrit ces jours-ci, Claire Chauveau dans ses travaux de gravure durant vingt ans, sans se préoccuper de ses coordonnées psychiques.

20/03/2008

Y.A.Gil, les dessins venus d'ailleurs

   Le blog a ceci de bon qu'on peut y faire des rencontres tout à fait intriguantes, en l'occurrence avec un artiste de la région de Nîmes, Y.A. Gil, qui en venant me parler de la maison d'éditions et site web qui l'héberge lui et toute une flopée d'autres artistes m'a aussi révélé, en marge de ses nombreuses activités (performances, sculpture, collages et cinéma), des dessins tout à fait remarquables.

Y.A. Gil, Marmiton, 2008.jpg

   Réalisés au stylo, ils sont nés cette année 2008, au nombre d'une cinquantaine pour le moment, après une éclipse où leur auteur s'était davantage exercé aux activités ci-dessus mentionnées. Bien sûr il est loisible d'y retrouver des influences graphiques diverses et variées, mais je préfère m'attacher à leur timbre personnel, à un certain goût du bizarre, de l'irréel volontairement assumé, tel que l'illustre cette phrase citée par un ami de Gil, Eric Garnier (auteur par ailleurs d'un Cabinet d'Eroscopie délectable, voir le site Venus d'aileurs), phrase dûe à Paul Valéry: "Que serions-nous donc sans le secours de ce qui n'existe pas?".

Y.A. Gil, Les murs roses des vents, 2008.jpg

   Ces dessins sont de format 35 x 22 cm. Une douzaine d'entre eux ont été reproduits en format A5 dans un  carnet édité en fac-similé imitant les carnets de dessin à spirale. Voir ici la page du site qui en montre la couverture.

Y.A. Gil, Cabal-Z, 2008.jpg

   Le groupe d'artistes auquel appartient Y.A.Gil édite une revue qui édite fort soigneusement apparemment, une fois par trimestre, une déclinaison de trois "livrets", le premier étant un ouvrage à système fait à plusieurs, le deuxième se consacrant à un artiste ou à un écrivain, le troisième se vouant à une réédition d'un ouvrage court "méconnu ou à redécouvrir" (William Blake, Hakim Bey par exemple...). Le n°5 de la revue devrait sortir en mai, un dépôt serait prévu à la librairie du Palais de Tokyo et une présentation aura peut-être lieu à l'Ecole des Beaux-Arts... Mais une information plus précise viendra ultérieurement.

   Affaire à suivre donc...

15/12/2007

Le "Lulu Club", qui saura le décrypter?

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Coll.privée, Paris, photos B.Montpied

   "Lulu club", on lit ces mots inscrits en capitales sur la nappe de part et d'autre d'une table où sont rassemblés des hommes du monde. Que sont-ils venus faire en ce lieu? Difficile à dire... Un seul homme se tient debout derrière le rang de droite, il semble parler et pointe du doigt quelque chose ou quelqu'un. Peut-être le gros oeuf sommé d'un noeud enrubanné qui trône au milieu de la table, orné d'un profil de femme, qui, d'après moi, pourrait bien être la fameuse "Lulu"...

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   "D'après moi", eh oui, j'en suis réduit aux conjectures et peut-être, derrière l'hypothèse intuitive, au délire d'interprétation. Au fond, j'aime assez en être réduit à de telles extrémités! Si vous voulez bien, délirons ensemble, et peut-être même, proposez vos propres interprétations...

   Celui qui pointe du doigt pourrait bien être une sorte d'imprécateur, un qui a quelque chose sur le coeur, quelque chose d'assez lourd pour provoquer la réalisation d'une telle composition (crayons de couleur, craie...) dessinée sur une fine feuille de papier de 55 sur 11O cm. C'est le seul personnage qui se tient debout, il domine la scène, tel un juge ou mieux, tel le peintre, le narrateur... Il paraît désigner l'oeuf où est peint le doux profil d'une femme, la femme pour le souvenir, l'évocation de laquelle est réuni cet étrange aréopage d'hommes aux sourires de commande, légèrement béats, non loin du rictus.

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   Ils ont tous été réunis pour Lulu, conviés à déjeuner, puisque ce qui ressemble bien à une oie rôtie, au centre de la table, pleure déjà à la pensée du repas que l'on va faire sur son dos, ses cuisses, ses pilons (la larme qui coule sous l'oeil du volatile fait écho à la "larme" en pendentif qui orne l'oreille de la dame)...

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   Une "oie", dis-je? On connaît le double sens de ce mot. Une oie, une gourde (pour la soif des instincts masculins primaires?), une sotte qui s'est bien fait avoir ("posséder", là aussi, plein de double sens). L'imprécateur leur reproche-t-il leur comportement avec Lulu? L'oeuf, ou le médaillon aussi bien, où se montre le profil, a été entouré de fleurs, des roses, cela paraît bien être un hommage... 

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    Deux mots sont inscrits au-dessus de la scène, "Amitié", "Solidarité"... Est-ce de l'ironie? Solidarité entre butors, entre soupirants sans soupirs, toujours prêts à revenir dévorer celle qu'ils ont prise pour une oie blanche, mais dont le peintre, par désir de vengeance, a décidé de laisser les portraits caricaturaux afin de les ridiculiser dans la mémoire?

    Tous ces éléments paraissent composer un joli petit puzzle qui s'enchaînerait bien, s'il n'y avait qu'eux... Seulement voilà, un grain de sable vient enrayer ce beau mécanisme... Il existe un élément dans la composition dont on ne comprend absolument pas la présence... Et c'est, vous l'avez certainement tout de suite remarqué, l'étrange pingouin placé tout en haut du premier rang, fort énigmatique et inexplicable (depuis Wallace et Gromit, on sait comment les pingouins peuvent se révéler énigmatiques et inexplicables) ...

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    Seule hypothèse qui puisse éclairer sa présence, le jeu sur les mots, le goût du calembour visuel que paraît grandement priser l'auteur de cette charge satirique (une signature malaisément déchiffrable dans le bas à gauche paraît révéler la signature d'un certain "G.Georgeon", inconnu de moi ; à signaler à droite une autre inscription, "Max", qui désigne peut-être seulement l'homme sur qui est placé le prénom), un "pingouin" en argot, c'est un avocat ou un huissier. Le caricaturiste représente-t-il un avocat qui aurait été impliqué dans cette sombre affaire d'amants en goguette?

    A vous de me dire!   

22/10/2007

Rectification de bob

   Voici une photo historique pour happy few comme disait le copain Stendhal. Une prise sur le vif de celui que le pilote de Belvert qualifie de "bob" et qui serait plutôt ce que mon défunt père appelait familièrement (attention je ne garantis pas l'orthographe, et si un lecteur de passage pouvait me la faire connaître, accompagné si possible d'une savante dissertation lexicologique à son sujet, je lui en serais éternellement reconnaissant...), un "NID d'OEILLASSE", c'est-à-dire un galure sans forme à présent, objet-fétiche, compagnon de toutes les flâneries au long cours, voici donc la chose dont, j'ose le dire, je suis très fier, et pour que nul ne l'ignore... :

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"Bob" ou nid d'oeillasse? (d'après photo E.B.)