25/09/2024
Jacques Brunius sur France-Culture bientôt
Voici que dans les archives sonores de France-Culture, on annonce à une heure très matinale la rediffusion d'une émission de 1983 sur Jacques Brunius. Jugez-en plutôt ci-dessous. Ce sera l'occasion d'en apprendre plus sur ce sympathique surréaliste anglophile, touche à tout génial comme disait André Breton, collectionneur d'art insolite, grand curieux de toutes sortes de créations inopinées, cinéaste inventif (Violons d'Ingres, c'est lui), acteur, collagiste, critique de cinéma. J'en ai souvent parlé sur ce blog.
Jacques Brunius dans le rôle de Fouché dans La Belle Espionne de Raoul Walsh.
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Nuit du vendredi 11 octobre au samedi 12 octobre 2024
04:27 - 06:37 Les samedis de France Culture - A la recherche de Brunius (1ère diffusion : 07/05/1983)
Par Paule Chavasse et Jean-Pierre Pagliano - Avec André Bay, Yannick Bellon, Louis Bloncourt, Anne Cottance, Marguerite Fawdry, Roland Penrose, Paul Grimault, Claude Heymann, Ado Kyrou, Pierre Prévert, Michel Laclos, Lucien Logette, Marc Maurette, Jean Mitry et Claude Roy - Avec en archives, les voix de Jacques Prévert et de Jacques Brunius dans la dernière émission des "Français parlent aux Français" (BBC) - Textes de Jacques Prévert, Lewis Carroll et Jacques Brunius - Interprétation Michel Bouquet, Pierre Delbon, René Farabet, Dominique Jayr, Michaël Lonsdale, Jean Topart et Maurice Travail - Réalisation Christine Berlamont.
Comptine lue par le sciapode à partir d'un recueil de comptains, comptines, formulettes et autres nursery ryhmes recueillis par Jacques Brunius (inédit?)
Photo d'Eli Lotar en off du tournage (1936) de Partie de Campagne de Jean Renoir, avec les acteurs principaux, dont le deuxième à partir de la gauche, Brunius, et la troisième, Sylvia Bataille. Le film ne sortit qu'en 1946.
10:43 Publié dans Art de l'enfance, Art immédiat, Cinéma et arts (notamment populaires), Littérature jeunesse, Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jacques brunius, jean-pierre pagliano, france-culture, violons d'ingres, la bele espionne, raoul walsh, andré breton, surréalisme, cinéma, comptines | Imprimer
25/08/2024
Présences (et absences) arabes au Musée d'Art Moderne de la Ville de Paris
Je suis allé visiter la nouvelle exposition du MAMVP, curieux de voir quels artistes étaient proposés dans ce panorama de l'art moderne dans les pays arabes entre 1908 et 1988. J'avais été alléché, je dois dire, par quelques noms jetés de-ci, de-là, dans les informations traînant sur le Net. J'y avais pointé quelques noms familiers, Baya, Jaber (oui, Jaber!), Chaïbia (qui fut défendue, me semble-t-il, par Cérès Franco dans sa galerie L'Œil de Bœuf, rue Quincampoix, à Paris, dans les années 1980), Fahrelnissa Zeid (une artiste d'origine turque, entre autres amie de Charles Estienne qui était un critique d'art proche des surréalistes à l'époque du tachisme dans les années 1950), Abdul Kader El Janaby (un surréaliste d'origine irakienne dont j'ai croisé superficiellement la route dans les années 1980), le Tunisien Gouider Triki (dont j'avais admiré il y a plusieurs décennies, à l'Institut du Monde arabe, des peintures fort séduisantes et originales), etc. Il y était question aussi du surréalisme en Egypte...
Baya (1931-1998), Femme en orange et cheval bleu, gouache, crayon graphite et encre sur papier marouflé sur carton, vers 1947, collection du LaM de Villeneuve-d'Ascq, Donation de l'Aracine ; exposé dans une alcôve à part dans "Présences arabes".
Baya, terres cuites peintes, de gauche à droite: Janus vert et rouge, 1947, Bête noire et rouge, 1947, Femme candélabre, 1948 ; exposées dans "Présences arabes", MAMVdP ; ces terres cuites seulement peintes sont à rapprocher des terres cuites vernissées que l'on trouve (ou trouvait) à un moment dans d'autre spays du Maghreb, comme la Tunisie (voir ci-dessous), où existent (existaient?) des communautés villageoises où l'on pratiquait la poterie décorée de motifs naïfs (stylisés) ; comme le signalait très justement le cartel placé à côté des terres cuites de Baya ci-dessus : ."[e style de Baya], trop souvent interprété comme de l'art brut, est une manière raffinée de revisiter ses souvenirs d'enfance de la Kabylie, sa végétation, ses contes et son artisanat, mais aussi les femmes qui lui ont transmis cet héritage. " ; cette association de Baya à l'art brut est assez proche d'autres cas, où l'on ne veut pas reconnaître dans des œuvres singulières la trace renouvelée de l'inventivité populaire anonyme (ou pas) appliquée à des expressions modestement diffusées, bien souvent circonscrites aux cercles de communautés restreintes, comme les sculptures en roche volcanique par exemple d'Antoine Rabany dans le Puy-de-Dôme, qui se retrouvèrent trente ans après la mort de leur auteur enrôlées dans l'art brut sous le vocable de "Barbus Müller", pourvus d'une aura de mystère lié à leur anonymat (provisoire, jusqu'à ce que je les rapporte à leur véritable auteur en 2017-2018) ; photo Bruno Montpied.
Art populaire tunisien, travail de femme dans un village reculé, acquis par le couple Cerisier lors d'un séjour en Tunisie dans les années 1980 ; ph. et collection B.M (ce n'est évidemment pas exposé dans "Présences arabes").
Exposition "Présences arabes", une sculpture de Jaber placée devant un agrandissement d'une photo d'une partie de l'exposition "Singuliers, Bruts ou Naïfs?" qui s'était tenue en 1988 au Musée des enfants, structure éphémère autrefois sise à l'intérieur du MAMVdP ; on y aperçoit d'autres sculptures de Jaber de même type (faites à l'aide de bandes plâtrées surpeintes entourant des objets en infrastructure, sans doute les œuvres les plus abouties et originales parmi toutes celles, souvent passablement bâclées, que réalisa Jaber par la suite), installées devant une peinture de Macréau, avec laquelle les sculptures entretenaient visiblement des points communs stylistiques en effet, de façon éphémère, cela dit ; le cartel, dans l'expo "Présences arabes", qualifie très étonnamment l'art de Jaber d'"esthétique punk et anarchiste" proche de celle du collectif Le Désir libertaire, installé et actif à Paris à la même époque. Moi qui ai rencontré dans cette même décennie un des membre du DL, dont il est question à un autre endroit dans cette expo du MAMVdP, Abdul Kader El-Janaby, un surréaliste irakien, je ne sais pas si on peut vraiment tant que cela rapprocher les deux démarches... Cela reviendrait à identifier deux formations culturelles très éloignées l'une de l'autre, et du coup nuire à l'exactitude de l'approche d'un Jaber, bateleur excentrique, délirant histrion des rues, quoiqu'un chouïa matois... ; ph. B.M.
Fahrelnissa Zeid, Alice au pays des merveilles, huile sur toile, 236 x 210 cm; 1952 ; ce n'est pas une œuvre de ce type qui est exposée dans "Présences arabes", mais elle correspond mieux, selon moi, à la période la plus intéressante de Fahrelnissa Zeid lorsqu'elle croisa la route du critique d'art Charles Estienne dans les années 1950 ; cet ami des surréalistes (Breton ou Péret) invita Zeid parmi d'autres (notamment Jan Krizek, Loubchansky, ou Toyen) en villégiatures répétées du côté d'Argenton et de Ploudalmézeau, au point qu'on parla pour ce cénacle informel d'une "École des Abers" (les abers étant les bras de mer de cette côte nord de la Bretagne) ; Toyen, en particulier, qui était sensible à la poésie des bords de mer, y peignit des toiles inspirées par la sublimation des estrans laissés par la marée , j'eus le bonheur d'en voir une, sortie de façon tout à fait primesautière, sans le moindre chichi, du grenier d'une connaissance de Charles Estienne qui me reçut avec deux amis au milieu des années 1990, lors d'un séjour estival en Bretagne.
Sur une table vitrée de l'exposition, des exemplaires de la revue The Moment du groupe néo-surréaliste qui publiait Abdulkader El Janaby, Guy Girard (dont j'ai plusieurs fois parlé sur ce blog), Peter Wood ou encore Stéphane Mahieu (devenu aujourd'hui un 'pataphysicien distingué), pour ne citer que des personnes que j'ai connues (et connais encore pour deux d'entre eux) ; Abdul Kader El Janaby est évoqué dans l'expo également par des exemplaires de ses "gommages", technique inventée par El Janaby où des stars du cinéma se retrouvent spectralisées du fait de leurs têtes gommées; ph. B.M.
Un point de vue était de temps à autre évoqué dans les cartels et les panneaux explicatifs de cette exposition, à savoir qu'au moment des diverses Indépendances, un certain nombre d'artistes et intellectuels arabes (on a insisté en fait surtout sur des artistes égyptiens, notamment ceux du groupe Art et Liberté fondé par Georges Henein) avaient cherché à se déprendre des influences artistiques occidentales académiques, assimilées aux menées colonialistes, qui se paraient intellectuellement de visions orientalistes consistant à construire des mythes et des clichés plaisant aux esprits occidentaux, peignant "l'Orient" sous des dehors factices, avec ses harems aux femmes désirables et soumises, ses palais de Mille et une nuits, ses vizirs cruels (dont les avatars seraient aujourd'hui les imams nécessairement tous fous de Dieu, clones de Ben Laden, appelant à des croisades terroristes : le mythe de l'Orient enchanté ayant tendance aujourd'hui à se renverser en Enfer aux portes de l'Occident). Les artistes arabes ou orientaux ont cherché à établir cet art indépendant, c'est-à-dire tout neuf, jamais vu jusque là, parfaitement original, sans retomber pour autant dans une tradition et une imprégnation nécessairement islamiques, et pour ce faire, sont allés chercher dans les avant-gardes occidentales, notamment les groupes les plus anticolonialistes, comme les surréalistes, dès la guerre du Riff au Maroc, des stimulations aptes à les libérer des académismes et des dominations coloniales.
Ramsès Younan (1913-1966), tropique du Cancer, vers 1945, huile sur toile, collection particulière, Le Caire ; expo "Présences arabes", MAMVdP, ph. B.M. ; cette toile fait écho au texte des surréalistes égyptiens, "Vive l'art dégénéré!", qui défendait les artistes occidentaux poursuivis par les Nazis ; on retrouve dans la composition des citations de Picasso, Dali et Chirico, voire peut-être des cubistes et des expressionnistes.
L'exposition cependant m'a paru, à moi qui y venais en parfait béotien, plutôt décousue et partiale, de par les échantillons accrochés aux cimaises. Cela partait un peu dans tous les sens, de façon émiettée, fournissant cependant au passage – dans ses marges – des noms intéressant méconnus (par exemple Valentine de Saint-Point, une anti colonialiste et féministe complètement oubliée par nos contrées, ou Gustave-Henri Jossot (1866-1951), caricaturiste anarchiste converti à l'Islam par opposition au colonialisme, auteur de livres particulièrement toniques¹). Il me semble aussi qu'on a oublié de parler dans cette exposition de catégories artistiques telles que l'art dit naïf ou populaire qui représentent pourtant un réservoir fourni d'expressions originales, qui peuvent faire figure de formes d'art spécifiques aux pays des territoires d'Afrique du Nord, voir des pays plus à l'est, vers le Moyen Orient (je pense aux peintures murales des pèlerins égyptiens par exemple).
Fresque à Gourna (Haute-Egypte) peinte sur un lait de chaux et un mortier apposé sur le mur de briques crues par un artiste local afin de permettre à ceux qui sont restés au pays, faute des moyens pour faire le pèlerinage de La Mecque, de se recueillir et de méditer sur des images symboliques liées aux lieux et moyens de transport du pèlerinage ; ph. Hughes Fontaine, extraite du recueil de photos et textes de Hughes Fontaine et Frédérique Fogel, Mémoires des façades, maisons peintes des pèlerins d'Egypte, éditions Twiga, 1992.
Art bruto-naïf contemporain d'Essaouira, découvert par Philippe Saada d'Escale Nomad : Ahmid Gnidila, sans titre (2 hommes se battant), 43x45 cm, gouache aquarellée sur carton, vers 2020 ; ph. et coll. B.M.
Les artistes autodidactes d'Essaouira, dont j'ai eu l'occasion de parler sur ce blog, auraient pu en effet aussi être convoqués, ce qui aurait brillamment illuminé l'exposition, en ne la laissant pas aux seules mains des artistes professionnels. On retrouve là les préjugés de nos commissaires d'exposition toujours rétifs à incorporer dans leurs expositions rétrospectives des auteurs d'art non reconnus comme artistes, parce qu'étrangers au cirque spectaculaire des Beaux-arts établis. Il y avait pourtant des prémisses de cette reconnaissance peu développée, avec les présences d'oeuvres de Baya, Jaber ou Triki. Allons, encore un effort si vous voulez, messieurs-dames les commissaires d'exposition, devenir révolutionnaires...
Couverture du petit catalogue consacré à des œuvres de Gouider Triki, publié à l'occasion d'une exposition en 1992 à l'Institut du Monde Arabe, à Paris.
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¹ De Henri Jossot, je signale cependant que les éditions bordelaises Finitude ont réédité (pour le premier) et édité (pour le second), il n'y a pas si longtemps, deux livres, Le Fœtus récalcitrant (1ère édition 1939, puis Finitude 2011) et Sauvages Blancs! (2013), où il se livre à une descente en règle des attitudes et comportements colonialistes dans les pays du Maghreb sous domination française.
12:18 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art moderne méconnu, Art singulier, Art visionnaire, Questionnements, Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : présences arabes, anti colonialisme, surréalisme, surréalisme égyptien, art et liberté, georges henein, the moment, jaber, musée des enfants, baya, art d'essaouira, ahmid gnidila, fahrelnissa zeid, école des abers, charles estienne, toyen, jossot, estran, ramsès younan, musée d'art moderne de la ville de paris, abdul kader el janaby, gouider triki, maisons peintes des pèlerins d'egypte, hughes fontaine | Imprimer
06/07/2024
Anne-Marie Brauge, dans la série des Enchanteurs et autres insolites laissés pour compte...
Anne-Marie Brauge (1942-2003), sans titre, aquarelle (?), encre (?) et crayons sur papier, 31 x 23 cm, daté 1967 et signé en bas à droite. Acquis aux Puces de Vanves le 25 novembre 2023 ; ph. et coll. Bruno Montpied ; l'image apparaît comme un agrégat d'images hétéroclites assemblées au gré des outils de traçage, comme un précipité de mémoire en vrac.
Curieuse aquarelle, me suis-je dit, en la trouvant gisant sur un trottoir de la Porte de Vanves, par un petit matin froid. Sa composition enchevêtrée m'a cependant aimanté, je trouvais là sans doute un dessin cousin, par l'esprit et la forme, de mes propres dessins. Le broc' me confia que l'on trouvait des "choses" sur l'autrice sur internet. En effet...
Anne-Marie Brauge est née à Grenoble et s’est installée à partir des années 1960 au Danemark après son mariage avec l’artiste danois Gunnar Saietz, qui l’a aidée à écrire son autobiographie intitulée Le demi soleil (en danois, Den halve sol).
Elle paraît avoir souffert de schizophrénie par bouffées intermittentes jusqu’à la fin de sa vie. Elle peignait, sculptait, et écrivait. Lors de ses crises, ses dessins perdaient de leurs couleurs, et en noir et blanc, se déclinaient en des compositions symétriques qui l'aidaient peut-être à se stabiliser. Elle a fait l’objet d’une exposition en 2011 au Musée Ovartaci (musée consacré au Danemark à Ovartaci, un créateur visionnaire transgenre rangé dans l’art brut). Elle me paraît parfaitement ignorée en France, cette Anne-Marie. Cependant, des œuvres d’elle passent de temps à autre en ventes aux enchères. Voici ce que l'on pouvait trouver comme remarques à propos de ses peintures sur le site web de ce Musée Ovartaci: "Malgré leur polyvalence, de nombreuses œuvres présentent des caractéristiques communes : de petits univers, des éléments de style oriental avec des harems et des palais ; mais en même temps, les œuvres sont souvent une collection de plusieurs motifs plus petits, tels que des animaux, des visages et des fleurs. Ces éléments reviennent souvent dans ses images."
Anne-Marie Brauge, scène fantastique avec figure féminine et palais orientaux, encre et aquarelle sans doute, dimensions et photographe non renseignés, 1969.
Anne-Marie Brauge, Court bouillon, huile sur toile, 81x65 cm, 1996, photographe non renseigné.
Anne-Marie Brauge, sans titre, sculpture en deux parties, bronze patiné, 40 cm de hauteur, ph, date non renseignés.
Elle paraissait pratiquer le dessin de façon automatique à la manière des surréalistes, mais aussi la sculpture. Il a d’ailleurs été spécifié dans les notices qui traînent sur internet à son sujet qu’elle aurait fondé au Danemark un groupe surréaliste en 1965, intitulé « Passepartout ». Et aurait appartenu à un second groupe par la suite, appelé PRO… Je gage que les spécialistes du sujet ne savent pas grand chose de ces "groupes" qui ne paraissent pas avoir laissé de grandes traces dans l'histoire du mouvement. Il est à noter qu'il y eut un surréalisme déjà par le passé au Danemark, mais ce fut plus tôt, dans les années 1930, avec une figure importante, celle de Vilhelm Bjerke-Petersen (1909-1957) qui a laissé derrière lui, en 1933, un ouvrage intéressant : "Des symboles dans l'art abstrait" (traduit en français par Joël Gayraud et Peter Ölund chez Yves Rivière, il ya bien longtemps, en 1979 exactement...). Représentant de l'art moderne au Danemark avec Richard Mortensen et Ejler Bille, où il anima la revue "La Ligne", de 1934 à 1935, il se rallia au surréalisme d'André Breton en 1935, se séparant de ses premiers camarades, et en montant d'importantes expositions à Copenhague avec des artistes surréalistes internationaux. Je me suis laissé dire qu'Asger Jorn, fondateur par la suite de COBRA et de l'Internationale Situationniste, fut proche de Bjerke-Petersen dans ses années de jeunesse.
Anne-Marie Brauge est donc une Française qui a travaillé plutôt au Nord de l'Europe, exposant surtout dans des pays germaniques mais aussi en Italie (elle a cependant participé à une "Biennale" en France, en 1967). Son graphisme me paraît un mixte de dessin automatique proche de l'art médiumnique et de bande dessinée imprégnée des modes psychédéliques des années 1970.
13:10 Publié dans Art des jardins secrets, Art moderne méconnu, Art singulier, Art visionnaire, Erotisme populaire, Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : anne-marie brauge, surréalisme danois, groupe passe-partout, groupe pro, automatisme graphique, bande dessinée psychédélique, puces, trouvailles de brocante, musée ovartaci, ventes aux enchères, gunnar saietz, bjerke-petersen | Imprimer
25/03/2024
Une vente aux enchères chez Tajan, déclaration liminaire non gardée dans son catalogue
Art naïf, art brut, art singulier, outsiders, inclassables, étoiles filantes de l’art passées inaperçues, grands isolés, ermites de l’art, indomptés, rebelles, art hors-les-normes, passagers clandestins, art buissonnier, art immédiat, tous ces termes recouvrent un corpus de créateurs ou d’artistes que l’histoire de l’art dominant ignora longtemps, avant que les avant-gardes du début XXe siècle ne se penchent vers eux, les chantant, les défendant, les citant en exemples. Le positionnement de ces mouvements eut ainsi une conséquence qui n’est toujours pas perçue bien clairement : la reconnaissance d’un art qui dépasse les catégories usuellement établies, et qui remet en question les hiérarchies, les castes, les écoles, les professeurs distributeurs de brevets de créativité. Un art non séparé de la vie quotidienne était désormais reconnu.
J’ai longtemps admiré l’invention de l’art brut par Dubuffet, qui eut le mérite d’ouvrir la porte aux curieux de ces grands talents marginaux, issus des hôpitaux psychiatriques, des cercles de spirites, du monde des exclus. Avant qu’on parcoure les théories de Dubuffet, affectant de détester l’art cultivé, on peut s’intéresser d’abord, en effet, à ses sauvegardes, à ses collections désormais conservées, sans cesse enrichies, à Lausanne. Elles rassemblent des orthodoxes de l’art brut ‒ c’est-à-dire des créateurs non vénaux, œuvrant dans un cercle strictement intime, indépendant des Beaux-Arts ‒, mais aussi des créateurs relégués, dans les premières décennies de la collection de Lausanne, en « annexe », dans un département renommé par la suite, en 1982, « Neuve Invention », ce qui indiquait en creux comme un repentir vis-à-vis d’artistes que l’appellation « annexe » avait pu stigmatiser. Parmi ces créateurs refoulés et oubliés/négligés, nombre d’entre eux me paraissent tout à fait dignes d’être recherchés – je n'en citerai que quelques-uns, au hasard : Lambert Josèphe Degaude (actif au XVIIIe siècle), Madame Favre (créatrice entre 1858 et 1860), Louis Soutter (1871-1942), Berthe Coulon (1897-1979), Jules Godi (1902-1986), Jean Deldevez (1909-1983 ; dont l’œuvre est retombée dans l’oubli, après avoir circulé dans les années 1980-90), Claire Farny (1915-1988), Unica Zürn (1916-1970), Gérard Lattier, Marie-Rose Lortet, Alexis de Kermoal (1958-2002), etc., etc.
Jean Deldevez, une parodie du tableau "Les Epoux Arnolfini" (de Van Eyck), collection de la Fabuloserie.
La collection, dite primitivement « annexe », dans la Collection de l’Art Brut à Lausanne, ainsi que les premiers créateurs dont Dubuffet, au début de l’aventure de son « art brut », recueillit les productions ‒ que ce soit des masques populaires du Lötschental en Suisse, des peintures d’enfants, les sculptures en pierre volcanique des Barbus Müller ou les œuvres mystificatrices de Robert Véreux (alias le docteur Robert Forestier, qui produisait des tableaux naïfs plaisantins, parfois démarqués du Douanier Rousseau, voir ci-contre un de ses tableaux ayant appartenu à Boris Vian) ‒, reflétaient en réalité un corpus extrêmement étendu, et varié, de créateurs tantôt autodidactes, tantôt cultivés quoiqu’en rupture. Leur relégation, ou au contraire leur exclusion, dans des corpus tels que celui de l’art brut ‒ concept d’un art sans concession, un art « pur », rêvé par Dubuffet, qui se le souhaitait à lui-même pour sa propre création ‒ tendit à travestir et maquiller l’existence de ces artistes et créateurs indépendants, mais ne satisfaisant pas toujours aux critères d’originalité promulgués très subjectivement par Dubuffet, et, surtout, s’entêtant à communiquer avec les galeries, le marché et la critique d’art...
Dubuffet, parallèlement, rejeta l’art dit naïf, en le caricaturant comme un art du mimétisme et du réalisme. Cela cachait sa rivalité avec ceux qui avaient avant lui défendu les autodidactes ingénus (je pense à Anatole Jakovsky ou à Wilhelm Uhde).
Avec le temps, l’art brut, en tant que plus pure des collections, a perdu de son autorité, et l’ensemble des créateurs inclassables redevient davantage visible, suscitant une curiosité chez beaucoup de collectionneurs et autres amateurs d’art, d’autant que le marché de l’art a perpétuellement besoin de renouveler son lot de chair fraîche ! Qui plus est, la difficulté du public des amateurs à s’y retrouver dans la terminologie de l’art des autodidactes et des indépendants milite pour l’éclatement des frontières.
Le terme de Singuliers de l’Art, datant de l’exposition éponyme de 1978 au Musée d’Art moderne de la Ville de Paris, est aujourd’hui devenu inadéquat pour qualifier les différentes catégories de créateurs venus de l’art naïf, de l’art brut, des marges de l’art populaire autodidacte. Le mot « singulier » s’applique davantage, comme je l’ai dit, aux artistes primitivistes semi-professionnels, des surréalistes inconscients bien souvent. Il vaudrait mieux en réalité utiliser le terme de francs-tireurs de l’art, qui a le mérite d’inscrire l’esprit de liberté et d’indépendance dans la démarche de ces créateurs et artistes hétéroclites.
Les festivals d’art dit « singulier », bien que l’on puisse y découvrir de temps à autre quelques bonnes surprises, ont eu tendance en effet à faire de ces semi-professionnels un équivalent modernisé de l’ancien terme de « peintres du dimanche », qui désignait les amateurs de peintures de genre (paysages, natures mortes, etc.), tous plus ou moins producteurs de « croûtes », flirtant parfois avec le kitsch. La « modernisation » des contenus a consisté chez nos semi-professionnels à intégrer, au lieu de l’impressionnisme et du naturalisme du XIXe siècle, les leçons des avant-gardes ayant prôné la spontanéité en art (par exemple le groupe COBRA de la fin des années 1940) ou le recours à l’inconscient (le surréalisme), ainsi que le goût des arts animistes dits « premiers », voire l’art brut de Dubuffet, ou encore des rudiments d’art naïf.
C’était au fond ce que recherchaient les avant-gardes, ce déferlement de créativité débordant des espaces professionnels de diffusion de l’art, une créativité qui s’exercerait dans la vie quotidienne.
Michel Macréau, De l'un à l'autre (2e version), Maman., j'en es Raz le Biberon De ton Cordon..., 1975, expo Halle Saint-Pierre, 2009 ; photo Bruno Montpied.
Ces nouveaux artistes « du dimanche » (alternatifs, en somme) ne peignent plus réaliste, à la manière d’une Rosa Bonheur, mais davantage sous l’influence d’un Gaston Chaissac ou d’un Michel Macréau, au style plus spontané, voire à l’image des peintures surréalistes célébrées et très médiatisées (Max Ernst, Yves Tanguy, Magritte, le Dali de la période surréaliste, etc.). On rencontre chez nombre d’entre eux des redites, des démarquages le plus souvent fades d’après les artistes ou créateurs singuliers inventifs qui n’ont pas su se faire connaître, ce qui les encourage ici ou là à des plagiats faciles. Mais on y trouve aussi des créateurs vraiment originaux et talentueux, et parmi eux beaucoup de femmes depuis quelques temps.
Ces artistes singuliers cherchent à faire connaître leur art ‒ contrairement aux « bruts » qui œuvrent de manière autarcique, non vénale, car la proie de pulsions ou d’esprits désincarnés (comme dans le cas des artistes dits médiumniques).
Les Naïfs, quant à eux, rassemblent des artistes, bien souvent issus de modestes milieux populaires de petits employés ou d’artisans, qui pratiquent une peinture ou une sculpture qui se réfèrent invariablement à la perception de la réalité extérieure, leur inconscient modifiant imperceptiblement cette réalité.
L. Plé, exemple de peinture semi anonyme représentant un homme à la mer, en train d'être dévoré par des requins assez ressemblant à des murènes, XIXe siècle? ; ph. et coll. B.M.
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Joseph Baqué, extraits de ses planches zoologiques de monstres divers, revue Viridis Candela (le Correspondancier n°1 du collège de 'Pataphysique).
Ils sont légion, ces originaux, ces francs-tireurs de l’art. On peut citer pêle-mêle parmi eux : Ovartaci (Danemark), Fred Bédarride, Robert Coutelas, Joseph Baqué (Espagne), Roger Lorance, Louis et Céline Beynet, Armand Goupil, Lucien Blanchet… Ou encore, présents dans la vente de chez Tajan du 2 au 12 avril 2024 : Paban das Baul (Inde), Gilles Manero, Ruzena, José Guirao, Marie-Jeanne Faravel, Gérald « Creative » de Prie (USA), Henry Speller (USA), Victor Amoussou ou Benjamin Déguénon (tous deux du Bénin), Joël Lorand, Imam Sucahyo (Indonésie), Oscar Haus, Michel Delannoy, Yves D’Anglefort, Jean Pous, Yvonne Robert...
Un nouveau venu, Paban das Baul (Inde), qui sera en vente chez Tajan en avril 2024.
José Guirao, sans titre, en vente chez Tajan en avril 2024.
Oscar Haus, œuvre en vente chez Tajan en avril 2024.
Yves D'Anglefort, œuvre en vente chez Tajan en avril 2024.
Gageons que ces noms ne sonnent pas (encore) familiers aux oreilles des amateurs et collectionneurs d’art buissonnier, plus connaisseurs de quelques grands noms ‒ quelques grandes marques ? ‒ de l’art brut, de l’art naïf, voire de l’art dit singulier, imposés par quelques rares marchands ambitionnant une sorte de monopole de l’offre d’art brut sur le marché.
Pourtant ces œuvres moins connues fascinent tous ceux qui détectent leur valeur intrinsèque, sans se soucier de la rumeur médiatico-urbaine qui cherche toujours à imposer ses hiérarchies, ses palmarès obligatoires (souvent du fait de surdéterminations commerciales cachant mal le besoin de monopole ci-dessus pointé), rumeur qui cherche à trier parmi les œuvres hors système apparues depuis deux siècles. Ces créateurs différents, situés en dehors des écoles d’art, en dehors de l’art admis, il paraît à certains qu’il serait urgent de réduire leurs effectifs ‒ la contagion d’un déferlement de création sauvage non régimentée, non captive, non réservée à quelques marchands, étant à craindre, dirait-on…
Or, ce déferlement est bel et bien en marche. Petits musées de création alternative, grands musées redécouvrant dans ses réserves des cas atypiques (revenus du passé où on les avait oubliés), commissaires d’exposition ayant compris l’intérêt grandissant du public pour toutes formes d’art surprenantes, hors des chemins battus, historiens d’art et chercheurs eux-mêmes autodidactes battant la campagne dans les archives, ou les bords de routes, collectionneurs à l’affût de toutes formes de création poético-insolite oubliée, méconnue, et aussi, venons-en au fait, ventes aux enchères qui sont régulièrement le siège de surgissements de curiosités en tous genres, dans le brassage permanent qu’elles suscitent, d’une collection dispersée à l’autre (pas nécessairement spécialisées en art brut), tous militent pour accroître le corpus, le champ de l’art inspiré inopiné. Cela déborde les quelques rares galeries cherchant à dominer ‒ outre le marché ‒ surtout l’offre des créateurs atypiques, inclassables, sauvages, irréguliers, autodidactes à la naïveté ambiguë, l’offre des « pas comme tout le monde » en somme, qui remettent en cause, volontairement ou non, les certitudes en matière d’expression artistique.
Bruno Montpied
Vente aux enchères "Les Francs-tireurs de l'art: Bruts, Naïfs, Singuliers et autres Outsiders" en deux parties, une d'abord "on line" du 2 au 12 avril 2024 à 14h, et une autre, sur place, dans les salons de la Maison Tajan, 37 rue des Mathurins (8e ardt), le 10 avril. J'en suis le consultant, pour une bonne partie des lots proposés (B.M.)
Liste des créateurs ou artistes proposés à cette vente par mézigue (à côté de ceux proposés directement par les deux commissaires-priseurs de chez Tajan, Eva Palazuelos et Loren Richard), soit en vente sur place, soit en vente en ligne :
Jean Ferdinand, Hector Trotin, Anselme Boix-Vives, Jacques Trovic, Khadija, Katia, Nikifor, Yves D'Anglefort, des anonymes (dont un attribué à Gabriel Jenny), Charles "Cako" Boussion, Gerald "Creative" de Prie, Inès Nathaniel Walker, Henry Faust dit "Pop-Eye", Patrick Chapelière, Kashinath Chawan, Paban das Baul, Jean Pous, Yvonne Robert, Michel Delannoy, Gérald Stehr, José Guirao, Johann Fischer, Christian Gauthier, Ilmari Salminen dit "Imppu", Martha Grünenwaldt, Genowefa Jankowska, Genowefa Magiera, Solange Lantier dite "Sol", Alexis Lippstreu, Dwight Mackintosh, Mimoune Ali, Benjamin Déguénon, Victor Amoussou, Ezékiel Messou, Masao Obata, Dimitri Pietquin, Henry Speller, Imam Sucahyo, Emmanuel Tharin, Simone Le Carré Galimard, John Henry Toney, David Braillon, Ted Gordon, Scottie Wilson, Ginette Chabert, Didier Estival, Patrick Gimel, Marie-Jeanne Faravel, René-François Gregogna, Alain Lacoste, Joël Lorand, Gilles Manero, Ruzena, Miguel Amate, Pierre Albasser, François Burland, Ignacio Carles-Tolra, Alain Pauzié, l'abbé Coutant, Mario Chichorro, Béatrice Elso, Michel Nedjar, Philippe Dereux, Jean Rustin, Ghislaine, Fred Deux, Louis Pons, Gilbert Pastor, Armand Avril, Emilie Henry, Léontine Indelli dite "Mimuna Indelli", Rosemarie Köczy, Natasha Krenbol, Pierre Lefèvre, Jaber, Francis Marshall, Jean Vernède, Pierre Bettencourt, Georges Bru, René Moreu, Patrice Cadiou, Jean Clerté, Alfred Kremer, Paul Duhem.
09:29 Publié dans Anonymes et inconnus de l'art, Art Brut, Art immédiat, Art naïf, Art populaire insolite, Art singulier, Art visionnaire, Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : ventes aux enchères, francs-tireurs de l'art, art naïf, art brut, art singulier, art outsider, tajan, bruno montpied, consultant, inspirés, déferlement | Imprimer
18/09/2023
Le Singulier de l'art naïf, collection Bruno Montpied (un extrait choisi), au MANAS de Laval
Prévue pour débuter le 23 septembre prochain et durer jusqu'au 10 décembre 2023, cette exposition, que la directrice du Musée d'Art Naïf et d'Art Singuliers de Laval, Antoinette Le Falher, m'a fait l'honneur d'accepter dans ses murs, est l'occasion, à travers une sélection choisie au sein de ma collection d'œuvres éclectiques (relevant de l'art naïf, de l'art singulier, de l'art brut, de l'art populaire insolite, voire de quelques surréalistes pas trop chers (!)), de tenter une défense et illustration de ce que j'aime dans l'art naïf, et qui serait de nature à revaloriser et réévaluer ce dernier, que l'on a beaucoup trop associé à la mièvrerie, aux bons sentiments bêlant, à une sorte d'art gentillet, à relents d'encens et de chapelles.
Armand Goupil, sans titre (pioupiou dansant avec une partenaire fantôme), huile sur bois, 38 x 29 cm, sd (années 1960) ; ph. et coll. Bruno Montpied ; à noter qu'il y a quatre peintures d'Armand Goupil présentées dans cette expo.
L'art naïf, en effet, ce ne sont pas les mignons petits chats, les illustrations pour couvercles de boîtes à biscuits, les innombrables scènes de foules au marché rangées en rangs d'oignon, les natures mortes destinées aux loges de concierge, les croûtes en somme, lénifiantes, sucrées, qui font détourner le regard des amateurs d'art les plus exigeants, ceux qui savent que l'art n'est pas parfumé à la fleur d'oranger, et que ce n'est pas une tisane pour digérer, en attendant la mort...
Henri Trouillard, Winston Churchill en dieu Mars, huile sur toile, 1955, dépôt famille Neveu, collection permanente du MANAS de Laval ; ph. B.M. (2020)
Les collections permanentes du MANAS de Laval sont riches d'œuvres figuratives singulières justement (Lucien Le Guern, Trouillard, Bauchant, Rousseau, Claude Prat, Colette Beleys, Karsenty-Schiller, Dominique Lagru, Déchelette, Jean-Jean, Van der Steen, Le Gouaille, etc.), depuis son année de création en 1967, ce qui justifiait ma demande de proposer une exposition en cet écrin (elle se tient dans la salle en rez-de-jardin, à l'entrée du musée). La figuration dite naïve, c'est-à-dire aussi bien surréelle, sur-réaliste, cache de nombreux artistes autodidactes qui ont tenté de représenter des sujets empruntés à la réalité extérieure (c'est la peinture de genre qui caractérise l'art naïf: natures mortes, portraits, nus, paysages, sujets animaliers, scènes historiques...), tout en réinterprétant celle-ci grâce à l'intrusion, volontaire ou le plus souvent involontaire, de l'inconscient, de l'acte manqué, du lapsus, dans le rendu des objets et des êtres. Perspectives fausses, proportions aberrantes, hiérarchisation inhabituelle des dimensions des personnages, tout cela peut faire associer l'art naïf au "réalisme intellectuel", terme inventé par le critique d'art Georges-Henri Luquet qui voyait dans les dessins d'enfant des déformations en lien avec le retentissement psychologique des objets et des êtres dans le psychisme de ces dessinateurs en culotte courte. Leurs tailles étaient fonction de leur importance psychologique et non pas de leur dimension physique.
On devrait selon moi ranger dans l'art naïf toutes les œuvres d'autodidactes primitivistes ou "bruts" qui comportent une reproduction de sujets empruntés à la réalité extérieure. Ce qui entraîne que plusieurs œuvres que l'on range dans l'art brut peuvent être revendiquées aussi bien par l'art naïf. Le rapt de divers artistes naïfs (Wittlich, Auguste Moindre, Séraphine Louis, Emeric Feješ, Anselme Boix-Vives, and so on) par les thuriféraires de l'art brut peut se retourner dans l'autre sens, par conséquent.
Anselme Boix-Vives, sans titre, gouache ?, peinture industrielle ?, sur papier ou carton, sd, 49 x 66 cm ; ph. et coll. B.M.
"Boix-Vives"?, se récrieront ses partisans... Oui, Boix-Vives aussi, car je rejoins Anatole Jakovsky sur ce point, notamment quand il écrivait, à propos du peintre catalan installé en Savoie, dans son Dictionnaire des peintres naïfs du monde entier (1976): "Partant du réel, ou du moins tel qu'il le voit, il le transfigure complètement sous une apparence primitive et barbare."
"Le singulier de l'art naïf", titre proposé par mézigue, regroupe 35 artistes en 40 œuvres.
J'ai divisé la présentation en trois sections : 1, le réalisme poétique (l'art naïf "classique"), 2, l'art naïf plus singulier, et 3, l'art naïf visionnaire. Donnons ci-dessous un exemple emprunté à chaque section.
1.
Anonyme (J.C.), sans titre (le voleur de melons), huile sur isorel, 33 x 41 cm,1945 ; ph. et coll B.M.
2.
Carter-Todd, sans titre, crayon graphite et crayons de couleur sur papier, 23 x 29 cm, 3-1-90 ; ph. et coll. B.M.
3.
Maurice Griffon, dit Maugri, sans titre, stylo sur papier, petits motifs ornementaux sur le cadre, 30 x 42 cm, sd (années 1980) ; ph. et coll. B.M.
L'exposition (gratuite, comme l'ensemble de la collection permanente du MANAS, du reste, qu'il ne faut absolument pas oublier de visiter) se tiendra au MANAS de Laval (Musée du Vieux Château, place de la Trémoille) du 23 septembre au 10 décembre 2023. Je ferai une visite commentée de l'expo le 1er octobre à 15h30 (visite gratuite, sans réservation). Un catalogue (7,80€) paraît à l'occasion de l'expo, disponible au musée et à la librairie de la Halle Saint-Pierre (à partir du 21 septembre), reprenant en reproduction la totalité des œuvres exposées, avec un texte de moi détaillant le projet de l'exposition section par section, avec des notices à chaque œuvre, ainsi qu'une préface d'Antoinette Le Falher.
A lire: un article éclairant d'Emma Noyant sur l'expo dans le n°181 d'Artension (septembre-octobre), à la suite d'un mien article sur l'art brut (Artension consacre en effet un intéressant dossier à l'art brut dans ce numéro).
Armand Goupil, sans titre (le clin d'œil), huile sur carton, 30 x 26 cm, datée « 5-XII-60 » ; ph. et coll. B.M. ; cette peinture sert de visuel principal à toute l'expo, et on la retrouve ainsi en affiche dans les rues de Laval, gloire (éphémère) pour cet "inconnu de la Sarthe", comme j'ai pu l'appeler dans le revue 303 il y a quelques années...
Et pour clore, provisoirement, le sujet, ci-dessous un petit poème de Joël Gayraud reçu, suite à l'annonce en privé de l'exposition:
Poème pour « Le Singulier de l’Art Naïf »
Naïf
mais pas niais
singulier
mais pas sanglier
brut
mais pas brutal
immédiat
mais pas immédiatiste
instinctif
mais pas extincteur
autodidacte
mais pas autocuiseur
inspiré
jamais expirant :
telle est la logique
authentique
poétique
rustique
extatique
voire mystique
mais sans casuistique
du créateur anarchique
Joël Gayraud
11:01 Publié dans Anonymes et inconnus de l'art, Art Brut, Art immédiat, Art naïf, Art populaire contemporain, Art visionnaire, Confrontations, Galeries, musées ou maisons de vente bien inspirés, Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : art naïf, art visionnaire, réalisme poétique, musée d'art naïf et d'arts singuliers de laval, armand goupil, maugri, peintures anonymes curieuses, réalisme intellectuel, boix-vives, carter-todd, henri trouillard, le singulier de l'art naïf, bruno montpied, joël gayraud | Imprimer
14/06/2023
Appel du 18 juin: "Alcheringa" n°4 est paru et ses animateurs viennent en causer à la Halle Saint-Pierre
Alcheringa, j'en ai déjà parlé lors de la parution de son n°3. Il continue de se manifester, puisque son n°4 sort à présent, toujours édité (et maquetté) par Venus d'Ailleurs du côté de Nîmes. Il sera présenté dimanche prochain à l'auditorium de la Halle, à 15h, en présence de Joël Gayraud, Guy Girard, Régis Gayraud et mézigue. Je dois y présenter en effet les articles que j'ai donnés à la revue, l'un sur l'art en commun (il y aura quelques images projetées) et l'autre, plus réduit, consacré à une remarque concernant le catalogue de la récente exposition "Chercher l'or du temps", consacrée au surréalisme, l'art magique et l'art brut, au LaM de Villeneuve-d'Ascq. Ce catalogue contient en effet une prodigieuse découverte due à l'une des conservatrices de ce musée, Jeanne Bathilde-Lacourt, découverte qui regarde les prémisses de la collection d'art brut de Jean Dubuffet. Il me paraissait important de la souligner un peu plus, notamment auprès de lecteurs intéressés par le surréalisme.
Voici le sommaire de la revue:
Numéro 4 - Été 2023
(128 pages ; 22 €)
Dans ce numéro:
Guy Girard, Devant le feu
Joël Gayraud, Métamorphoses de l’alkahest
Sylwia Chrostowska, Tout et son contraire
Jacques Brunius, Le jardin n’a pas de porte
Bruno Montpied, L’art en commun, si peu commun…
Laurens Vancrevel, Will Alexander et l’usage surréaliste du langage
Natan Schäfer, Vers le Phalanstère du Saï
Régis Gayraud, Souvenons-nous de Serge Romoff.
Autour d’une lettre inédite d’André Breton
ainsi que d’autres articles, poèmes, récits de rêves, notes critiques et images par :
René Alleau, Aurélie Aura, Jean-Marc Baholet, Anny Bonnin, Massimo Borghese, Anithe de Carvalho, Eugenio Castro, Claude-Lucien Cauët, Juliette Cerisier, Sylwia Chrostowska, Darnish, W. A. Davison, Gabriel Derkevorkian, Kathy Fox, Antonella Gandini, Joël Gayraud, Régis Gayraud, Yoan Armand Gil, Guy Girard, Beatriz Hausner, Jindřich Heisler, Alexis Jallez, S. L. Higgins, Marianne van Hirtum, Richard Humphry, Andrew Lass, Michael Löwy, Albert Marenčin, Alice Massénat, Bruno Montpied, Peculiar Mormyrid, Leeza Pye, Pavel Rezniček, Alain Roussel, Bertrand Schmitt, Carlos Schwabe, Petra Simkova, Dan Stanciu, Wedgwood Steventon, Ludovic Tac, Virginia Tentindo, Marina Vicehelm, Sasha Vlad, Susana Wald, Gabriela Žiaková, Michel Zimbacca.
Bruno Montpied et Petra Simkova, "Des êtres se rencontrent et une douce musique s'élève dans leurs cœurs", hommage à Jens-August Schade, 3 x 4 m, peinture industrielle sur toile PVC, 1999.
Des exemplaires de la revue seront bien sûr ensuite disponibles à la vente dans la librairie de la Halle Saint-Pierre.
Signalons aussi par la même occasion la parution d'un autre n°4, de la revue L'Or aux 13 îles (qui devient également un foyer éditorial), qui lui de même qu'Alcheringa est disponible à la vente à la librairie de la HSP (accompagnant, c'est à noter, les trois premiers numéros de la revue, qui contiennent trois articles copieux de moi-même: dans le n°1 (2010), un grand dossier sur les bois sculptés de l'abbé Fouré, où j'avais réédité le Guide du Musée de l'ermite, dans le n°2, une prose poétique sur ma collection illustrée de plusieurs reproductions, Le royaume parallèle, et dans le n°3, un article sur les bouteilles peintes de Louis et Céline Beynet, des autodidactes inconnus et inventifs qui vivaient en Limagne, près d'Issoire).
12:15 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Questionnements, Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : alcheringa n°4, groupe surréaliste de paris, art en commun, création collective, joël gayraud, régis gayraud, guy girard, bruno montpied, venus d'ailleurs éditeur, art brut, l'or aux 13 îles n°4, jacques brunius, richard humphry, sylwia chrostowska | Imprimer
04/03/2023
Dessin prémonitoire d'une artiste ukrainienne
Taisiia Cherkasova, "La peur donne de grands yeux" (proverbe ukrainien qui sert de titre à ce dessin), mine de plomb sur papier, 28 x 22 cm, 2019 (trois ans avant le début de l'agression russe contre l'Ukraine) ; photo et collection Bruno Montpied.
19/10/2022
"Des Pays Habitables", six numéros, et "Alcheringa", trois numéros, des revues amies à la Halle Saint-Pierre
Cette rencontre (au sommet) de deux revues – auxquelles je participe (pour le n° 5 de Des Pays Habitables, et pour les numéros 2 et 3 d'Alcheringa) – aura lieu samedi 22 octobre prochain, à 15h dans l'auditorium de la Halle Saint-Pierre. Il y aura présentation de sa revue par l'animateur de Des Pays Habitables, Joël Cornuault, avec lecture de quelques textes de James Ensor par Nicolas Eprendre, et présentation de la leur – Alcheringa (Le temps du rêve, en langage aborigène d'Australie) – par trois membres du groupe surréaliste de Paris, Guy Girard, Sylwia Chrostowska et Joël Gayraud. Pour clore la réunion, qui devrait durer environ une heure (et plus si affinités), je serai également présent pour ajouter aux traits d'union entre ces revues cousines, en passant quelques images en rapport avec mes contributions dans les deux publications, contributions ayant bien sûr à voir, me connaissant – et connaissant ce blog –, avec les arts spontanés (bruts, naïfs, populaires). En l'occurrence, il s'agira d'oeuvres réalisées par divers autodidactes, certaines (celles d'Emile Posteaux, sculpteur de bouchons de champagne), datant des années 1930, d'autres plus récentes, plus ou moins en rapport avec des tentations infernales...
Gabriel Jenny, sans titre (crèche "païenne"), terre cuite vernissée, 43 x 35 cm, années 2000 (?) ; photo et collection Bruno Montpied ; cette photo sera projetée samedi parmi 13 autres ayant un un rapport avec deux de mes articles dans les revues.
Ce sera aussi l'occasion pour les deux revues de proposer à l'achat les derniers numéros parus, le 6 pour Des Pays Habitables et le 3 pour Alcheringa. Les anciens numéros seront églement disponibles bien sûr.
Des Pays Habitables n°5, couverture et 4e de couv'.
On en saura plus en consultant la newsletter des "événements" à la Halle Saint-Pierre: https://www.hallesaintpierre.org/2022/09/05/lectures/
Pour se procurer la revue Des Pays Habitables, on peut en savoir plus en allant sur le site web des éditions La Brèche. Ce sera aussi l'occasion de consulter les autres livres toujours séduisants que cette maison édite. A signaler en particulier la réédition par La Brèche du merveilleux Journal de neiges du poète Jean-Pierre Goff (un journal tenu uniquement les jours de neige à Paris) qui n'avait pas été republié depuis 1983 (voir ci-dessous la couverture de l'édition originale de 83 – qui a malheureusement pris un "coup de soleil"–, ainsi que le dessin (fait à la carte à gratter, il me semble) que Jean Benoît avait offert à Le Goff en guise de frontispice).
La réédition du Journal de neiges de Jean-Pierre Le Goff par La Brèche éditions, 2022.
L'édition originale aux éditions le Hasard d'être, 1983.
Dessin en frontispice de l'édition originale de Jean Benoît ; le petit homme moustachu sur le chemin, c'est Le Goff bien sûr.
00:12 Publié dans Art des jardins secrets, Art immédiat, Art moderne ou contemporain acceptable, Art populaire insolite, Art singulier, Art visionnaire, Littérature, Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : des pays habitables, alcheringa, groupe surréaliste de paris, joël cornuault, joël gayraud, sylwia chrostowska, guy girard, bruno montpied, surréalisme, poésie contemporaine, la brèche éditions, journal de neiges, jean-pierre le goff poète, halle saint-pierre | Imprimer
08/09/2022
"Alcheringa" n°3 : le surréalisme contre l'aliénation
Il existe un groupe de Paris du mouvement surréaliste qui continue l'action contre vents et marées de la condescendance, du mépris, de l'oubli organisé, ou, tout au contraire, de la récupération passéiste. Il mène cette action en coordination avec différents autres groupes surréalistes internationaux. Moi, j'ai toujours trouvé que l'activité en question pouvait s'exercer sans s'abriter à l'ombre géante, un peu trop grandiose, du mot de surréalisme, parfois taillé trop grand pour les épaules de ceux qui s'en revendiquent. Mais voilà, ils s'entêtent, les Joël Gayraud, les Sylwia Chrostowska, les Michaël Löwy, les Guy Girard, voire même les Régis Gayraud¹. Ils brandissent toujours, avec les moyens dont ils disposent, le flambeau de la révolte, du déni jeté au monde capitaliste qui nous entraîne progressivement vers la fin du monde. Et moi, de culture surréaliste, mais principalement attiré depuis des décennies par la création artistique des imaginatifs sans voix, des sans grade, des sans diplômes, des sans lettres de recommandation, qu'ils se rangent dans l'art brut, l'art naïf (de qualité), l'art singulier, ou parmi les inspirés du bord des routes, je me suis toujours dit qu'il fallait accrocher mon petit wagon à leur train, en digne compagnon de route...
Couverture d'Alcheringa n°3, avec une composition de Yoan-Armand Gil dessus, été 2022.
Ces fidèles au surréalisme éditent une revue, nommée Alcheringa, qui signifie le Temps du Rêve dans la langue des Aborigènes d'Australie. Des récits de rêve, on en retrouve à foison dans cette tribune bien maquettée (par l'un des animateurs des éditions Venus d'Ailleurs, Yoan-Armand Gil), à côté de poèmes (pas tous à mon goût, ces derniers), d'enquêtes (dans ce numéro, proposé par Guy Girard, il y en a une intitulé "l'acte surréaliste le moins simple") ou de jeux, ce qui est une délectable tradition surréaliste. Peintures, collages, photographies oniriques sont également au rendez-vous, sans transition ni hiérarchie vis-à-vis des textes des divers intervenants. Un manifeste signé par seize personnes, "Au pied ailé de la lettre. Quand le surréalisme aura cent ans", (re-)proclame la nécessité de mettre "la Poésie au-dessus de tout", et fait l'éloge de la désertion ("pratique et intellectuelle, psychique et sociale, individuelle et collective"). On y précise aussi, ce qui me paraît personnellement salutaire, que les productions surréalistes de tous ordres n'ont que "l'apparence d'œuvres d'art", car elles sont plutôt "les résultats cristallisés d'une subversion permanente de la sensibilité, les témoins sensibles d'un nouvel usage du monde". A l'heure où tant d'artistes grenouillent pour grimper sur les tréteaux de la gloire afin d'y exhiber leurs nombrils, le rappel est nécessaire en effet.
Ce sommaire contient tout en bas le moyen de contacter les animateurs de la revue: alcheringa.revue@gmail.com
Une critique du recours aux technologies numériques et aux réseaux sociaux me laisse plus en retrait, personnellement. Comment souscrire, en effet, à cette affirmation, posée à un détour de ce manifeste, que "le logiciel prend le pas sur le créateur"? On retrouve là la vieille méfiance des surréalistes historiques (Péret ou Breton) vis à vis de la science, des machines, et aussi des voyages dans la Lune... Certes, je m'accorde volontiers, comme les signataires de ce manifeste, avec les "réseaux "anti-sociaux", ceux qui se nouent spontanément dans la rue, au coin d'un bois (...), au comptoir d'un café, dans une tempête de neige", mais je n'oublie pas les révélations que peuvent véhiculer, à l'occasion (sans s'hypnotiser pour autant sur leurs prestiges) les Instagram, ou les blogs, aidant à abattre de temps à autre les barrières érigées par les media dominants pour nous séparer d'une partie de la véritable inspiration du moment... Les réseaux sociaux peuvent aussi contenir de l'information alternative. Les deux démarches peuvent être parallèles. Il incombe seulement de ne jamais être dupe.
Sylwia Chrostowska, Le don des langues, pierre noire, 65 x 50 cm, 2021.
De ce n°3, j'ai pour le moment retenu, en outre, lues de prime abord, les contributions suivantes: le poème "Corbeau" de Sylwia Chrostowska, un dessin de la même (très frappant) : "Le don des langues" ; un texte de Bertrand Schmitt, "Toyen et l'enfer des imbéciles" ; de Régis Gayraud : "André Breton, une fiche de police de l'Union des écrivains soviétiques en 1938" ; "La photographie surréaliste en 2020", présentée par Guy Girard (je m'étais fait l'écho de l'exposition qui avait eu lieu à la Galerie Amarrage, où j'avais moi-même exposé trois photos) avec quelques exemples empruntés à Sylwia Chrostowska, José Guirao, Kenneth Cox, Lurdes Martinez, Steven Cline ; de Joël Gayraud : "Transformer le monde pour le rendre digne d'être parcouru" (critique du voyage) ; Sylwia Chrostowska et son "Rapport sur un état hypnagogique" (état de conscience particulier entre veille et sommeil, au moment de l'endormissement), etc...
De mon côté, j'ai donné à la revue un texte intitulé "Peintures domestiques et tentations infernales, Louis Carmeil, Dominique Dalozo, Louis Delorme, Armand Goupil, Gabriel Jenny" sur divers artistes à l'oeuvre intriguante, échoués aux Puces, et ayant en commun d'avoir représenté ici et là dans leurs productions des fantasmes diaboliques, des images de la tentation et de l'enfer. C'est par ce texte, outre le petit wagon dont je parlais ci-dessus, la continuation de ma tentative de dévoilement d'œuvres interloquantes restées dans l'ombre, et entrées dans ma collection.
Armand Goupil, Les Hussards de la paix, huile sur bois, 38,2 x 30 cm, 20-I-57, n°450 ; ph. et coll. Bruno Montpied.
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Alcheringa n°3 est disponible (à 20€) dans les librairies suivantes :
Librairie Centre Pompidou, Le Dilettante (7, pl de l’Odéon – 75006 Paris. 01 43 37 99 41), La Petite Égypte (35, rue des Petits Carreaux – 75002 Paris. 01 47 03 34 30), Tschann (125, bd du Montparnasse – 75006 Paris. 01 45 83 39 81), Halle Saint-Pierre (2, rue Ronsard – 75018 Paris. 01 42 58 72 89), Librairie Michèle Ignazi (15-17, rue de Jouy – 75004 Paris. 01 42 71 17 00), EXC Librairie (Passage Molière – 157, rue Saint-Martin – 75003 Paris. 01 87 04 44 02), Vendredi (67, rue des Martyrs – 75009 Paris. 01 48 78 90 47), Galerie Les Yeux Fertiles 27, rue de Seine – 75006 Paris. 01 43 26 27 91), Galerie Amarrage (88, rue des Rosiers – 93400 Saint-Ouen jusqu’au 25 septembre 2022, samedi et dimanche de 14h à 19h), Le Carré des Mots (30 Rue Henri Seillon – 83000 Toulon. 04 94 41 46 16), LA MAB // MAISON ANDRÉ BRETON (Place du Carol – 46330 Saint-Cirq-Lapopie. 06 30 87 70 58)
Également en vente chez l’éditeur, Venus d’ailleurs : paiement par carte cliquer ici .Par Paypal, virement, ou chèque contacter venusdailleurs@free.fr
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¹ On exceptera du surréalisme, dont, finalement, ils n'ont aucun droit à se revendiquer, selon moi, les nommés Ody Saban et Thomas Mordant, imposteurs qui, pour la première, mange à tous les râteliers, un matin artiste brut, un autre "surréaliste", un autre encore artiste féministe et trotzkyste (vernis "radical" indispensable pour briller en société), au gré de son opportunisme et d'un arrivisme qui fait feu de tout bois et de toute appellation un tant soit peu ronflante, tandis que le second joue les petits poseurs boursouflés de suffisance, se drapant sous une risible défroque de fausse modestie. Ce monsieur donne des "conférences", paraît-il, d'où, m'a-t-on dit encore, le poète Michel Zimbacca sortait, écumant de colère d'avoir entendu si mal traiter du "surréalisme", prétexte à débiter les plus grosses bêtises.
11:02 Publié dans Anonymes et inconnus de l'art, Art immédiat, Art insolite, Art naïf, Questionnements, Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : alcheringa, le temps du rêve, groupe surréaliste de paris, sylwia chrostowska, joël gayraud, guy girard, régis gayraud, michaël löwy, bruno montpied, artistes marginaux, art brut ou naïf, armand goupil, louis carmeille, venus d'ailleurs éditeur, photographie surréaliste, tentations infernales | Imprimer
28/08/2022
Guy Girard, le surréaliste de Saint-Ouen
Guy Girard expose bientôt à la galerie associative Amarrage avec un acolyte, Thierry Pertuisot (dont je ne sais pas grand-chose, sauf que son oeuvre ne relève pas, comme celle de Guy, du surréalisme).
Ce dernier a eu plusieurs périodes depuis le temps qu'il peint. Nous avons été quelques-uns à être frappés de ses "anagraphomorphoses", fût un temps, où des paraphes de personnages historiques figurant au Panthéon personnel de l'artiste se métamorphosaient sur la surface des toiles (il a toujours peint à l'huile sur toile, héritier de la peinture classique et de ses supports traditionnels) en images déduites des rubans d'écriture de ces signatures. Parfois, comme dans une très belle toile que je détiens de lui, le paraphe – en l'occurrence, celui de Freud – jouait à cache-cache avec des lettrines, imagées elles aussi, formant le nom de Merlin, le tout planant au-dessus de la ville de Paris, représentée selon son historique plan du XVIe siècle...
Guy Girard, Roi d'argot (la rencontre du nom de Freud et de celui de Merlin au-dessus du ciel de Paris), huile sur toile, 30 M, 1985 ; photo et collection Bruno Montpied. Non exposé à Saint-Ouen.
Guy Girard aime bien les mots rares, tarabiscotés, quasi ésotériques. De même son écriture (il est parfois aussi essayiste et théoricien) prend des tours parfois fort labyrinthiques. Il se cache derrière ou dedans, affublé d'une modestie indécrottable, tout en se faisant en interne une haute idée du rôle de l'artiste qui se confond bien sûr – selon une doxa surréaliste que je partage moi-même – avec l'image de poète. Un poète qui suit les préceptes du "Ne travaillez jamais!" surréalisto-situationniste... Sa (quasi maladive) modestie, son refus de la "ramener" – il se refuse à donner l'impression qu'il cherche à parader sur les mêmes tréteaux que les histrions, qui eux, cervelles d'oiseux, ne cherchent qu'à "communiquer" (quoi? nécessairement des contenus creux...) –, cela a amené notre Normand (il est originaire du Cotentin) à mener sa vie, et son art, au sein d'une ombre quasi complète. Il y a ainsi en ce temps, toutes sortes de créatifs qui répugnent à sacrifier à la maladie du paraître et du spectacle médiatique qui fascinent tant les faibles d'esprit contemporains. On retrouvera ces artistes secrets sur les trottoirs des Puces, et devenus à leur tour des énigmes. Car on ne peut compter sur les brocanteurs pour vous donner des biographies...
Guy Girard, Un café sur le boulevard, huile sur toile, 50 x 61 cm,, 2018 ; ph. B.M. Non exposé à Saint-Ouen.
Malgré ses différentes autres périodes (tribulations de Napoléon, une période que j'ai appelée en mon for intérieur sa période "spaghetti", une période "suédoise", une autre série de peintures stylisées en 2018 (voir-ci-dessus le dragon et la tasse remplie de personnages), ou encore ses portraits doubles de 1998 – cf. les tableaux reproduits dans le n°3 de la revue du groupe surréaliste auquel il appartient, Alcheringa, numéro qui vient de sortir, voir au bas de cette note), malgré une oeuvre désormais variée et conséquente, où l'imagination n'a jamais cessé d'être au pouvoir, qui a, en effet, jamais entendu parler de notre héros¹?
Guy Girard, Toyen et Victor Considérant (portrait double), huile sur toile, 1998., ph. Guy Girard. Non exposé à Saint-Ouen.
L'exposition (-vente!) qui débute le 1er septembre (jour du vernissage) pour se poursuivre jusqu'au 25 de ce même mois sera donc une occasion à ne pas rater si les amateurs de peinture souhaitent en découvrir davantage... Les tableaux qui seront présentés font partie des oeuvres oniriques inspirées à Guy par son voyage en Chine d'il ya quelques années. On pourra aussi se procurer durant l'exposition le n°3 de la revue Alcheringa, où, je le signale entre parenthèses, votre serviteur a donné un article pour défendre des inconnus de l'art, retrouvés aux Puces, et adeptes de tentations infernales.
Guy Girard et Thierry Pertuisot, "Passage du Sud-Est", exposition du 3 au 25 septembre 2022, Galerie Amarrage, 88 rue des Rosiers, Saint-Ouen, ouv. les samedis et dimanches de 14 à 19h et sur RV en semaine au 06 15 63 93 11 (c'est en lisière des Puces de Saint-Ouen).
Alcheringa n°3
La revue Alcheringa n°3 sera disponible (ainsi que quelques exemplaires restants du n°1 et du n°2), pour quelques exemplaires au nombre limité, à la galerie durant le temps de l'expo, et sinon, on pourra l'acquérir auprès des éditions Venus d'ailleurs, qui l'éditent, en cliquant sur ce lien, où l'on trouvera entre autres le sommaire très varié du numéro.
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¹ Peut-être n'est-il pas inutile de rappeler le texte que je lui ai personnellment autrefois consacré: Bruno Montpied, « Guy Girard, peintre d’histoire d’un nouveau genre », catalogue de l’exposition Visions et créations dissidentes au Musée de la Création franche, Bègles, du 27 septembre au 30 novembre 2003.
15:00 Publié dans Art moderne ou contemporain acceptable, Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : guy girad, galerie amarrage, surréalisme actuel, groupe surréaliste de paris, alcheringa n°3, anagraphomorphoses, portaits doubles, huiles | Imprimer
31/07/2022
Une histoire de racines en l'air (Chaissac/Jesuys Christiano)
Gaston Chaissac, certains le savent, a écrit en 1946 dans la revue Centres pour René Rougerie qui, alors âgé de 20 ans, y collaborait, chargé de repérer de nouveaux talents, un merveilleux texte, intitulé Surréalisme!!!. Je recopie ci-après deux extraits qui m'ont toujours plu :
"Nous avons des littérateurs, des peintres surréalistes, et ils ont fait des trouvailles indéniablement intéressantes, utiles.
Demain ce sera des artisans, des ouvriers, des paysans surréalistes que nous aurons aussi ; d'eux nous avons un besoin urgent, et leurs trouvailles également intéressantes et utiles changeront la face du monde.
Le bon travail est devenu chose rarissime et pour le réapprendre il nous faut des novateurs.
Quand nous verrons des artisans construire de chariots avec des roues carrées et des paysans planter des choux les racines en l'air ce sera de bon augure ; car ces hommes, enfin plus esclaves des exigences d'autrui, feront à leur idée en hommes libres, en surréalistes, et retrouveront les secrets qui permettent de faire du bon travail honnête. Cela dans la joie, car le travail libre c'est la joie, celle qu'on ne saurait trouver à courir après la fortune ou simplement gagner beaucoup d'argent (en étant l'esclave d'autrui) pour satisfaire des vices. (...)
"Sœur Jeanne de là-haut ne vois-tu rien venir? - Je vois à l'horizon des surréalistes accourir avec des pelles, des rabots, des fourches ,des enclumes et bien d'autres outils". (...)"
Revue Centres n°3, 1946.
Cette histoire de planter des choux les racines en l'air m'a toujours marqué.... Quelle ne fut pas ma surprise en lisant l'autre extrait de texte ci-dessous, publié récemment dans le catalogue de l'excellente récente exposition (terminée le 17 juillet dernier) de cette extraordinaire découverte brute qu'est l'œuvre du Brésilien nommé – probablement un surnom – Jesuys Christiano (Jésus-Christ, en somme), à la galerie Christian Berst (passage des Gravilliers, à Paris, le catalogue doit y être toujours disponible, du moins à partir de la rentrée de septembre) :
"(...) Son objectif était d'ériger un nouveau monde, l'ancien devait donc être inversé – c'est ainsi qu'il arrachait des fleurs et des plantes pour les enterrer afin que les racines pointent vers le ciel. Pour que les voix qu'il entendait chaque jour se taisent, que les vers qui lui rongeaient le crâne se calment, que la peur de la persécution et du châtiment s'éloigne de lui. (...)"
Thilo Scheuermann (hôtelier allemand installé au Brésil ayant découvert en 2011 les dessins tracés par Jesuys Christiano sur les murs du quartier miséreux de Malhado à Ilhéus ; il s'occupa alors de lui jusqu'à la mort de ce dernier survenue en 2015).
Jesuys Christiano, sans titre, graphite sur papier, 42x59 cm, 2013. Extrait du catalogue d'exposition à la galerie Christian Berst "Jesuys Christiano, A contrario".
Etonnant parallèle, n'est-ce pas? Entre le cordonnier de Vendée et le pauvre hère brésilien qui bien entendu n'a jamais entendu parler du premier... A signaler que Jesuys Christiano est allé plus loin que Chaissac, en plantant réellement ses végétaux les racines en l'air... Mais bon, chez le cordonnier, il est plutôt question d'une métaphore, d'un appel au monde à l'envers, un thème cher à la culture populaire.
20:48 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art singulier, Art visionnaire, Confrontations, Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : gaston chaissac, surréalisme, monde à l'envers, jesuys christiano, galerie christian berst, a contrario, catalogue d'exposition, revue centres, rené rougerie, art et vie quotidienne | Imprimer
14/03/2022
Une nouvelle technique du sieur Darnish : le « coinçage »
C’est en voulant tuer le temps alors que j’attendais du côté de la place Monge à Paris que j’ai coincé ma première image dans le vieux volet d’une boutique qui avait tout l’air d’être abandonnée.
Darnish, coinçage, place Monge, Paris, janvier 2022.
Assis sur la fontaine de la place Monge je venais de découper un bonhomme sur un marque-page légèrement cartonné. Tout en le découpant soigneusement, je me disais que j’allais pouvoir en faire quelque chose, l’abandonner quelque part plutôt que le mettre directement à la poubelle...
Comme il était cartonné, il ne se prêtait pas vraiment au collage. De toute façon je n’avais pas de colle sur moi. Sur le coup, je ne voyais pas à quoi il allait servir, le poser sur un rebord de trottoir ? Le glisser entre un pare-brise et son essuie-glace ? Le garder des mois au fond de mon sac ?
Ce n’est qu’en rejoignant mon rendez-vous qu’en passant devant cette boutique au volet usé, fendu par endroit, que m’est venu l’idée de l’y coincer. La rigidité du carton me permettait de forcer un peu et de l’enfoncer vigoureusement dans une fente du bois.
Bien coincé, le bonhomme en noir et blanc donnait l’impression de se pencher pour voir la rue, comme on se penche à la fenêtre pour voir qui arrive. C’était mon premier « coinçage » !
Darnish, coinçage, avec un personnage de Bosch, Paris, février 2022.
Darnish, autre coinçage avec Bosch, Paris, février 2022.
De retour à la maison j’ai trouvé de vieilles images cartonnées (condition sine qua non pour réitérer l’opération) de Jérôme Bosch. Ces trognes inquiétantes m’ont semblé parfaites, comme sortant déjà de quelque part, comme pointant déjà leur nez d’une fissure. Elles ont été rejointes par des anges de Giotto, et par quelques autres visages aussi, au gré des trouvailles (personnages de Dürer, de Van Eyck entre autres).
Darnish, coinçage avec Bosch, Paris, février 2022.
Darnish, coinçage, avec Giotto, Paris, février 2022.
Darnish, coinçage avec Giotto, Paris, février 2022.
Darnish, coinçage avec Van Eyck, Paris, février 2022.
Darnish, coinçage avec Dürer (peut-être), Paris, février 2022.
Et c’est en me promenant avec ces quelques amis en carton dans mon sac que j’ai coincé, à Paris et au Havre ces quelques images que le Poignard Subtil a la gentillesse de montrer ici.
Darnish. Mars 2022
17:51 Publié dans Art moderne ou contemporain acceptable, Street art marginal (art de rue sauvage), Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : darnish, art de rue nouveau, coinçage, intervention poétique urbaine, bosch, van eyck, giotto, dürer, art contemporain original, détournement, modifications d'oeuvres d'art | Imprimer
13/10/2021
Info-miettes (39)
Encore des Info-miettes, va-t-on me dire... Mais c'est qu'ils se passe des choses, des expos, des salons, des publications... Alors, j'ai préféré diviser les sous-notes en plusieurs notes. Deuxième brassée ci-dessous:
Yves Elléouët, à la Galerie Plein-Jour, Douarnenez
Le vernissage de cette exposition du poète et peintre Elléouët (1932-1975), que l'on associe au surréalisme, aura lieu le 16 octobre, en présence d'Aube Breton-Elléouët et Oona Elléouët. L'expo est prévue pour durer du 16 octobre au 28 novembre 2021. On trouvera plus d'information (le dossier de presse en particulier) à cette adresse: www.galeriepleinjour.fr/yves-elleouet
Yves Elléouët, une peinture de 1958.
Galerie Plein-Jour, 4 rue Eugène Kérivel, 29100 Douarnenez. Tél: 07 81 73 41 85.
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Janet Sobel à la Galerie de Toutes Choses (Gallery of Everything)
Montrée en France à l'occasion du premier salon d'art outsider tenu à l'Hôtel le A (voir ma note de l'époque ici) en 2013, Janet Sobel (1893-1968), précurseuse de l'expressionnisme abstrait et du dripping de Jackson Pollock, revient en Europe, à Londres plus précisément, du 10 octobre au 14 novembre, à la galerie de James Brett et affidés, avec d'autres femmes créatrices (dont Unica Zürn, Hilma af Klint, Emma Kunz,Anna Zemánková, ou bien Judith Scott), ainsi que dans le salon Frieze Masters qui se tient dans Regent's Park (mais dans ce lieu un peu moins longtemps, des peintures de Sobel seront exposées du 13 au 17 octobre). On aura plus de renseignements sur le site de la Gallery of Everything.
Janet Sobel, sans titre, huile sur cannage sur panneau, 76,5 x 56,3 cm, visuel Gallery of Everything.
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Escale Nomad, nouvelle exposition entre République et Strasbourg-Saint-Denis
Pas d'Outsider Art fair cet automne, suite sans doute aux incertitudes qui pesaient en début d'année sur les mois d'automne quant à la possibilité de monter cette foire avec de nombreuses galeries à contacter (de plus, n'y aurait-il pas quelque vent de fronde chez certains galeristes trouvant la place bien chère...?). Certaines galeries d'art brut (Berst, Ritsch-Fisch) se tournent vers la FIAC qui elle se tient aux dates prévues. Cependant, il se murmure que l'Outsider Art Fair ne serait pas remise non plus aux calendes grecques, ce serait pour le printemps prochain, après tout, une saison plus en rapport avec l'éternelle jeunesse des pulsions brutes...
Vue de certaines oeuvres proposées par Escale Nomad.
D'autres, en attendant cette foire printanière, font cavalier seul durant l'automne, comme Escale Nomad de Philippe Saada qui revient présenter ses découvertes d'art brut d'un peu partout à côté des poulains auxquels il reste fidèle (Babahoum). Ce sera du 14 (demain) au 24 octobre, à la Galerie L'Œil Bleu.
Galerie l’OEIL BLEU, 32 rue Notre-Dame de Nazareth, 75003 (Métro République ou Arts et Métiers). Apparemment, c'est tous les jours...
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Et la Galerie Pol Lemétais revient chez Soulié d'un bon pas
Pour sa part Pol Lemétais proposera aussi un large éventail de créateurs et artistes (Noviadi Angkasapura, Anselm Boix-Vives, Kenneth Brown, Jean Crié, Darédo, Olivier Daunat, Paul Duhem, Anaïs Eychenne, Madge Gill, Daniel Gonçalves, Johann Hauser, Alain Kieffer, Dwight Mackintosh, Mina Mond, Friedrich Schröder-Sonnenstern, Lewis Smith, Henry Speller, Carter Todd, August Walla, Scottie Wilson, Zefrino, Carlo Zinelli...), du lundi 18 au dimanche 24 octobre 2021 dans le local de la Galerie Béatrice Soulié (21 rue Guénégaud 75006 Paris), de 13h à 20h, et sur rendez-vous.
Pol Lemétais, tél : 06 72 95 60 18. http://www.lemetais.com
Alcheringa n°2, sous titré 'Le surréalisme aujourd'hui", été 2021.
Pour se procurer la revue (tirée à 300 exemplaires, mieux vaut s'adresser directement à l'éditeur, les éditions du Retrait, basées à Orange (on trouve le bulletin de commande ici, sur leur site web).
Signalons aussi une exposition actuelle, "Le Tarot de cocagne", du peintre-théoricien-poète du groupe surréaliste Guy Girard à la Maison Rignault (librairie de la Maison André Breton), à Saint-Cirq-Lapopie, consistant en une réinterprétation sous forme de toiles des différentes lames du tarot. L'expo est prévue pour aller jusqu'au 29 octobre.
Guy Girard, une des peintures de l'expo actuelle.
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Et chez Dettinger, qu'est-ce qu'on y voit? Jean Veyret, puis Fatima-Azzahra Khoubba, bientôt...
Celle qui scrute les étoiles, une boîte de Jean Veyret, Galerie Dettinger-Mayer.
Après une expo consacrée au grand peintre surréaliste lyonnais Max Schoendorff, qui s'est terminée le 9 octobre, Alain Dettinger continue dans sa galerie de la place Gailleton (Lyon 2e ardt) de proposer de réjouissants menus, puisqu'à partir du 30 octobre, on retrouvera de nouvelles boîtes pleines d'onirisme de Jean Veyret, visibles jusqu'au 20 novembre, date après laquelle l'intrigante Fatima-Azzahra Khoubba (on fait un prénom mot-valise à partir de son prénom composé quand on lui écrit ou lui parle: Fatimazara, sinon on s'épuise...), qui exposait naguère des tableaux semblant illustrer la théorie des fractales (voici déjà huit ans que je n'en avais pas revus, mais elle a peut-être été réexposée depuis), prendra la suite du samedi 27 novembre 2021 au 1er janvier 2022 (elle a mis des yeux à ses bras de terre et cela change tout dans ces fjörds bleus). C'est elle qui sera donc le cadeau de fin d'année à la galerie. Il se murmure qu'elle devrait également au vernissage de son expo signer un livre de ses poèmes, Nuit intranquille, que l'on attend avec curiosité. Y retrouvera-t-on sa gentillesse et son humour légers?
19:46 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Galeries, musées ou maisons de vente bien inspirés, Hommages, Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : yves elléouët, galerie plein-jour, gallery of everything, janet sobel, escale nomad, philippe saada, art brut, galerie pol lemétais, alcheringa n°2, groupe de paris du mouvement surréaliste, guy girad, michel zimbacca, joël gayraud, gilles manero, bruno montpied, hey!, maison andré breton, galerie dettinger-mayer, jean veyret, fatima-azzahra khoubba, nuit intranquille, poèmes | Imprimer
05/07/2021
Du plagiat funéraire?
En me baladant récemment au cimetière du Père Lachaise, je suis tombé sur une épitaphe que j'avais déjà vue ailleurs, sur une tombe bien plus célèbre.
Tombe Rocherolle, avec marqués en dessous du nom: "Je cherche l'or du temps"....
Les connaisseurs de la vie d'André Breton savent pertinemment que ces mots, "Je cherche l'or du temps", empruntés à un poème du fondateur du surréalisme, ont été inscrits en 1966 sur sa tombe au cimetière des Batignolles.
La tombe d'Elisa et André Breton au cimetière des Batignolles.
Alors? Qu'est-ce qui explique ce doublon de la tombe Rocherolle, qui paraît de fraîche date (j'avoue avoir oublié de regarder si l'on trouvait des dates de l'autre côté du tombeau...)? Aurait-on affaire à un plagiat funéraire? Excusable si l'on considère la parfaite adaptation de ce vers au genre de l'épitaphe, mais tout de même, n'aurait-on pas dû accomplir quelque renvoi à l'épitaphe originale...? (A moins que ce ne soit le contraire, la tombe Rocherolle bâtie avant celle d'André Breton, avec l'idée de l'épitaphe empruntée à Breton tout de même... (Je doute cependant fort de cette dernière hypothèse).)
11:57 Publié dans Danse macabre, art et coutumes funéraires, Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : tombes, art funéraire, cimetières, andré breton, épitaphes | Imprimer
01/05/2021
Plutôt qu'une nécrologie: je me souviens de mes rencontres avec Marie Jakobowicz
Alors, c'est ainsi, je n'aurai plus jamais l'occasion d'entendre le téléphone sonner et à l'autre bout du fil résonner la célèbre entame " Allôôô...? Céééé Mâââ-rie...", m'annonçant l'inévitable monologue que Marie Jakobowicz, d'un ton un peu désabusé, comme refusant d'avance toute phrase qu'on pourrait lui rétorquer, s'apprêtait à débiter. Ça durait un petit moment, tellement, que j'en lâchais parfois l'écouteur, posais le téléphone et allais vaquer à d'autres occupations. Je revenais cependant bien vite, de peur qu'elle croit qu'on lui avait raccroché au nez... Et invariablement, je constatais qu'elle était toujours en train de parler à l'autre bout. Puis elle rompait brusquement la conversation, disait: "Bon, eh bien, au revoir...", tout à trac, sans que rien ait pu le laisser prévoir. Je me faisais avoir à chaque coup.
Marie Jakobowicz au Musée de la Création Franche à Bègles, pour l'exposition que le musée lui consacrait en 2016 ; ph. archives du Musée de la CF.
Marie Jakobowicz (1934-2020) est morte il y a un an, dans le XVe arrondissement de Paris. Je l'ai appris avec retard, grâce au Musée de la Création franche, à qui elle avait fait donation d'une centaine de ses œuvres ces dernières années (d'autres collections ont conservé de ses oeuvres, la collection Cérès Franco et la Fabuloserie). Nous n'étions que des connaissances, nos relations les plus suivies ayant existé surtout au début des années 1980. Pas vraiment ce que l'on appelle des amis, plutôt des complices, des collègues... Plus âgée que moi, d'une vingtaine d'année, j'étais tombé sur elle à la suite d'une petite annonce dans Libération. Un monsieur qui s'appelait André Chamson (si ma mémoire ne me trompe pas sur l'orthographe de ce patronyme), comme l'écrivain, invitait à exposer dans sa "galerie" du côté de Louveciennes. Je m'y étais rendu pour découvrir avec dépit qu'il ne s'agissait que d'un garage... Mais il m'avait donné le contact d'une personne qui s'intéressait à l'art brut et avec qui j'avais peut-être des points communs. J'ai alors dû lui téléphoner, et, un jour Marie a débarqué dans l'appartement que je partageais avec Christine, ma bonne amie de l'époque, dans le Xe ardt. Elle eut, je pense, toujours de l'intérêt pour les gens plus jeunes qu'elle. Elle donnait des cours particuliers de dessin à des enfants dans son appartement du XIIe arrondissement, très curieuse de ce qui allait provenir d'eux...
Marie Jakobowicz, sans titre, dessin à l'encre, 21 x 29,7 cm, vers 1984; ph. et coll. Bruno Montpied.
De qui ou de quoi parlâmes-nous? D'art brut sans doute, que je venais de découvrir à travers quelques fascicules du même nom, sans bien en comprendre les limites. Elle non plus je pense ne savait pas exactement à quoi s'en tenir (et je pense qu'elle ne s'en est jamais vraiment souciée davantage par la suite)... Nous étions désireux d'explorer la possibilité de montrer ce que nous dessinions et peignions, et l'art brut – on l'imaginait – paraissait pouvoir accueillir des gens comme nous, non issus des écoles d'art. Ce n'était pas de l'arrivisme de notre part, seulement un besoin naturel de confronter ce que nous créions à un public de gens extérieurs, puisque l'on concevait l'art comme un autre langage, plus essentiel, allant au cœur des choses. Elle me parla d'un ami, Jean Couchat, qui avait envoyé des dessins et avait été pris par la Collection de l'Art Brut à Lausanne (ouverte au public en 1976). C'était donc simple, il suffisait de faire comme lui, et d'envoyer des dessins. C'est ce que je fis. J'expédiais quelques photocopies de mes dessins à Lausanne, que je me vis prestement retourner avec une lettre de refus de Michel Thévoz, quoique bienveillante. Il m'écrivit – avec un mot dont il usait abondamment à l'époque – qu'il ne voyait pas assez de "jubilation" dans mes dessins. En 1983, au Forum des Halles, devant les animateurs de l'Aracine, qui avaient monté leur deuxième exposition dans une salle louée au niveau -3 de ce centre commercial, mes dessins n'eurent pas plus de succès. On me répondit que j'étais trop "décoratif", que cela faisait "BD"... Bref, ça n'était pas pour eux (mais ce fut dit avec une certaine sévérité, bien différente du ton plein d'urbanité de Thévoz). Et c'est vrai que je n'avais au fond rien à voir avec l'art brut, que Madeleine Lommel recherchait. Je le compris mieux plus tard.
Bruno Montpied, le genre de dessin montré en 1983 aux collectionneurs d'art brut, comme ceux de l'Aracine ou de la Collection de l'Art brut ; ph. B.M.
Je ne peux pas leur en vouloir. De plus, les dessins que j'avais choisis de montrer, étaient très cernés, un peu figés. J'étais bien naïf de vouloir à tout prix les montrer. Et peut-être que je m'étais trompé de destinataires, qui plus est... Marie Jakobowicz, à cette époque, ne recueillait pas plus de suffrages. Cela changea avec le temps.
La jaquette dépliée de la pochette de notices (en simples photocopies) ayant servi de catalogue pour la première exposition de l'association L'Aracine, à Aulnay-sous-Bois, "Jardins Barbares", 8 janvier-14 février 1982 ; archives B.M.
L'Aracine, c'était Marie Jakobowicz aussi qui m'en avait parlé la première (en avait-elle entendu parler à la fac' de Vincennes, que Madeleine Lommel, la principale animatrice de l'association, fréquentait aussi?), en me prévenant en particulier de la première expo que l'association monta en région parisienne à la Maison de la Culture de la Seine Saint-Denis, à Aulnay sous-Bois en 1982. Cela s'appela "Les Jardins Barbares", expo mythique de l'association l'Aracine. Celle-ci réussit le tour de force de faire entrer dans un musée national, celui du LaM à Villeneuve d'Ascq, à côté de Lille, la collection d'art brut qu'elle avait rassemblée en à peine 15 ans. Soit dit entre parenthèses, les trois animateurs de l'Aracine (Lommel, Nedjar et Teller) obtinrent ainsi d'inclure une collection d'art brut dans un musée d'art moderne et contemporain, ce que Dubuffet pour sa part avait décliné hautement, suite à la proposition du ministre de la Culture de l'époque, Michel Guy, au début des années 1970. Selon Dubuffet, l'art brut n'avait pas à être mélangé à l'art moderne. A Lausanne, la collection a trouvé un espace à elle seule dévolue, et c'est aussi bien.
Au LaM, cela dit, la collection d'art brut jouit tout de même d'un espace indépendant, ce qui est étrange lorsque l'on se rend là-bas. L'art brut irradie des ondes qui le séparent des autres collections plus contemporaines et modernes, montrant bien qu'il est quelque chose d'autre, n'en déplaise à certains marchands et critiques d'art actuels.
Autre aussi se sentait Marie Jakobowicz alors. Elle avait des préoccupations, des hantises bien légitimes (quand je l'ai rencontrée, elle ne savait pas encore de façon assurée ce qui était arrivé à son père, dont elle n'ignorait pas qu'il avait été déporté par les Nazis, tandis qu'elle et sa mère, plus un cousin, avaient été cachés par la concierge de leur immeuble à la cave, la veille de la rafle du Vel d'Hiv' ; elle apprit véritablement le sort de son père – tué par les Nazis à Auschwitz – seulement au début des années 1990). J'étais assez différent, polarisé sur d'autres motifs, et issu d'une famille de Français ordinaires. Critiques vis-à-vis de la société, nous l'étions tous deux, mais sans être de la même génération. En 1966, année de la mort d'André Breton, elle était dans le public du colloque sur le surréalisme à Cerisy-la-Salle (on retrouve ses interventions dans les actes du colloque dans certaines discussions suivant les conférences, actes qui ont été republiés chez Hermann en 2012). Moi, en 1966, j'avais 12 ans et j'ignorais tout de ces sujets, n'en ayant jamais entendu parler dans ma famille qui était globalement ignorante des événements culturels. 1968 arrivant derrière, Marie, qui avait 34 ans, fut touchée en profondeur par les événements, les nouvelles problématiques, les libérations des mœurs surgissant alors. Sur moi, qui n'avais que 14 ans au même moment, les événements provoquèrent aussi une onde de choc, quoique atténuée dans la gangue de coton où m'enfermait ma famille.
Notre rencontre, vers 1980 ou 1981, a tenu donc du hasard objectif. Par elle, j'entendis parler de Michel Nedjar, d'Art Cloche, d'Ody Saban... Qui relevaient plutôt des "Singuliers de l'Art" (Nedjar seul y figurait du reste), terme qu'Alain Bourbonnais et Suzanne Pagé avait mis à la mode au moment de l'exposition du même nom en 1978 au Musée d'Art moderne de la Ville de Paris.
Après "les Jardins Barbares", je ne lâchai plus l'Aracine jusqu'au début des années 1990, me plongeant dans les problématiques de l'art brut de mon côté sans fin, tandis que Marie restait plus distante vis-à-vis de ces sujets. Elle se sentait plus concernée par la politique, les minorités opprimées – ou plutôt les minorées, si l'on pense aux femmes elles-mêmes –, par les migrants, et cela s'accentua à partir de 2000. Cela se déduisait de nos quelques échanges, mais je l'ai compris davantage en relisant la petite monographie que lui édita André Rober en 2015.
Marie Jakobowicz, dessins, peintures, sculptures, écritures, éditions K'A, février 2015.
Marie Jakobowicz, sans titre (?), dessin au pastel sur papier Canson noir, 50 x 65 cm, collection Cérès Franco.
Quad je l'ai rencontrée elle était en plein dans la création de dessins au pastel ou à l'encre de Chine. Il semble que cette période ait duré de 1980 à 1985 (d'après une notice biographique parue sur le site web de la Collection Cérès Franco). Par la suite, elle se mit à relativiser cette production (et l'abandonner, à mon avis une erreur ; elle disait même que cela lui venait trop facilement), préférant insister sur le fait qu'elle s'était mise à la sculpture, voulant avec ostentation montrer qu'une femme, même fragile comme elle (elle souffrait alors de vertiges de Ménière qui la faisait s'écrouler dans les lieux où elle restait trop longtemps debout), était capable de se colleter à des matériaux lourds, a priori peu maniables par une "faible" femme... Elle voulut aussi par la suite, au fil des années, me démontrer que l'art pour elle se devait de s'engager au service de causes politiques, en l'occurrence celle des Palestiniens, ou des migrants, ou de l'anti racisme. Je comprenais fort bien, étant donné son histoire personnelle, la tragédie familiale dont elle et sa parentèle avaient été victimes, qu'elle subissait une pression mentale terrible de ces côtés-là. Mais je n'étais pas d'accord avec cette mise sous tutelle de l'expression créative, et lui répétais, à chaque fois que je la voyais, que sa période des pastels était ce que je trouvai de plus fort dans sa production. En témoignage d'amitié, après l'exposition collective que Danielle Jacqui m'avait laissé le loisir d'organiser dans une salle, avec 16 artistes ou créateurs que j'avais sélectionnés, dans le cadre du 9e Festival d'art singulier d'Aubagne, elle finit par m'offrir un des dessins sur papier Canson qu'elle y exposa, en format raisin, le genre de format qu'elle affectionnait.
Vue de la salle "carte blanche à Bruno Montpied" dans le 9e festival de l'art singulier d'Aubagne (2006) ; au premier plan, des sculptures de Bernard Javoy, et de Roland Vincent, au fond, de gauche à droite: Marilena Pelosi, Michel Boudin, Marie Jakobowicz, Olivier Jeunon et Pierre Albasser ; ph. B.M.
Marie Jakobowicz, sans titre, pastel sur papier Canson noir, 50 x 65 cm, ph. et coll. B.M.
Je n'ai en effet quasiment jamais choisi (à quelques exceptions près au début de ma production) de plier l'inspiration qui préside à l'expression graphico-picturale à la défense ou l'illustration d'une cause politique ou idéologique. L'art à mon sens n'est jamais plus fort que lorsqu'il se déploie sans autre but que le message inconscient qu'il cherche à délivrer.
Bruno Montpied, Portrait de Marie Jakobowicz, 30 x 30 cm, 2021.
03/01/2021
Info-Miettes (36)
Actualité de Benjamin Péret
Un livre sort, édité par l'Association des amis de Benjamin Péret, intitulé Comme un haricot au clair de lune. Les collections Benjamin Péret de la Bibliothèque municipale de Nantes.
"Les collections Benjamin Péret réunies par la Bibliothèque municipale de Nantes n’ont pas d’équivalent ailleurs en Europe, comme aux États-Unis. Cet ensemble est impressionnant autant par le nombre que par la qualité des documents. L'ouvrage est un complément indispensable à l'exposition La parole est à Péret qui s'ouvre à Nantes en janvier 2021." (Association des Amis de Benjamin Péret). Pour en savoir plus, cliquez sur le lien ci-dessus ("Un livre", ou "L'ouvrage").
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Sortie de la revue Trakt n°12
Paru en novembre dernier, j'ai oublié de mentionner la sortie de ce numéro où figure un article de mézigue sur la découverte aux Puces de sept peintures d'une artiste réservée, qui exposa rarement, en dépit du charme hors-modes de son univers visionnaire symboliste, Dominique Dalozo, d'origine argentine comme sa compagne Yvonne Bilis-Régnier, dont, d'ailleurs, je ne suis pas sûr que cette dernière ne soit pas l'autrice de quelques-unes des peintures retrouvées dont seules quatre sont signées de Dalozo (dont celle reproduite ci-contre).
La revue nous apprend également, par le truchement de Jeanine Rivais, le décès du docteur Jean-Claude Caire (1933-2020), le passionné qui anima longtemps, en compagnie de sa femme Simone le désormais célèbre Bulletin des amis de François Ozenda. Il était impossible d'aller parler quelque part en leur compagnie chez un autodidacte quelconque sans avoir la surprise de retrouver tous les propos retranscrits dans leur bulletin à la suite d'un enregistrement secret dont personne évidemment n'était prévenu à l'avance. Cela faisait partie du folklore attaché aux pas de l'ineffable docteur.
Pour acquérir la revue ou savoir où on la trouve (la librairie de la Halle St-Pierre) c'est par là.
Jean-Claude Caire, à Nice, ph. Bruno Montpied, 2008.
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Brut, Singulier, Hors-normes, Le Guide de l'Art Buissonnier, un nouvel Hors-série du magazine Artension
Autre parution, celle-ci début décembre 2020, ce Guide, un hors-série du magazine Artension – auquel j'ai collaboré par plus de 60 notices sur divers lieux et sites à travers les quatre régions dont j'avais la charge (Ile-de-France, Pays de la Loire, Nouvelle Aquitaine, Occitanie), plus une liste d'événements, un éditorial que j'ai signé en commun avec la rédactrice en chef du magazine, Françoise Monnin (qui signe parfois quelques notices éparses dans mes régions), un texte aussi sur ma conception des arts spontanés – ce Guide est consacré à la présence de l'art brut, des environnements spontanés (populaires ou alternatifs), à l'art singulier, l'art naïf tels qu'ils se manifestent à travers divers lieux, associations, galeries, musées en France. Une critique cependant ici, l'art singulier tel qu'il est représenté dans ce Guide (pas par moi!), justement, commence à être noyé de plus en plus dans l'art contemporain alternatif de province, perdant peu à peu de sa spécificité qui reposait sur une originalité esthétique, un anarchisme des contenus, une référence en creux à l'art brut, un comportement de ses auteurs en rupture avec les traditions et les hiérarchies dans la diffusion des arts plastiques. Un peu plus de rigueur n'aurait pas été de trop dans la sélection de certaines adresses.
Ce Guide aussi a quelques autres défauts (en plus d'être peut-être un peu cher –19,50€). On n'aperçoit pas assez, par exemple, la distinction entre les pages achetées par des annonceurs et les pages et photos qui relèvent strictement des rédacteurs.
Pages du Guide ouvertes sur la Nouvelle-Aquitaine, avec deux photos et des notices de Bruno Montpied.
Mais en dépit de ces quelques défauts, il représente cependant un outil supplémentaire utile à tous ceux qui cherchent du nouveau et des adresses du côté des arts spontanés et primesautiers en notre joli territoire. Il est trouvable en kiosque et chez les marchands de journaux, maisons de la presse, librairies diffusant habituellement Artension. C'est bien sûr une exhortation à repartir sur les routes buissonnières en espérant retrouver notre liberté et nos cultures alternatives le plus tôt possible (vaccinez-vous dès que vous le pourrez!)...
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Exposition Alain Sanfourche et Jean Dominique à Limoges
Montée à l'initiative de leur principal défenseur, de la même région qu'eux (le Périgord), Jean-Luc Thuillier, cette exposition permet – entre deux confinements et couvre-feux (la barbe)? – de découvrir quelques œuvres de ces deux créateurs, Alain Sanfourche (qu'il ne faut pas confondre avec Jean-Joseph Sanfourche dont la notoriété lui a longtemps fait de l'ombre), naïf et expressionniste visionnaire (voir tableau ci-contre, Paysage imaginaire, 70 x 80 cm, 2007, ph. Bruno Montpied) , et le rural Jean Dominique, plus brut, sculpteur ultra modeste et infiniment touchant (voir ci-dessous la photo de B.M. prise dans la collection permanente du Musée de la Création franche à Bègles). C'est dans la Galerie (d'encadrement) Vincent Pécaud, à Limoges, que cela se passe. Les dates (à vérifier auprès de la galerie, comme toutes les dates d'expo en ces moments troublés où aucune information n'est vraiment stable) sont du 28 novembre 2020 au 30 janvier 2021.
21 rue Elie Berthet 87000 LIMOGES. Tél. : 05 55 34 35 47
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Exposition "Hors les murs" du Musée de la Création Franche
Si on ne sait pas encore exactement, en dépit d'informations ayant filtré sur Sud-Ouest (dont je me suis fait l'écho dans le Guide de l'Art Buissonnier cité ci-dessus) ce que sera l'activité du musée durant la période de travaux assez longue qui s'annonce à partir de la mi janvier, avec fermeture du musée, qui sera le nouveau responsable de la Création Franche (Pascal Rigeade prenant sa retraite, qu'on lui souhaite la meilleure possible bien entendu), et ce que l'on a prévu comme activités – ou non – à l'extérieur du musée, pendant ces deux années, on peut tout de même signaler une expo hors-les-murs d'ores et déjà en place à l'EHPAD Marion Cormier, situé à Bègles, du 15 décembre 2020 au 15 mars 2021. "Hyménée automnal : un chœur de conteurs", c'est son titre. Une sélection d'œuvres du musée est proposée aux résidents, "en résonance" avec trois récits similaires à des contes créés par des personnes "physiquement isolées mais réunies par ce travail d'écriture". Le terme de conte étant probablement envisagé de manière extensive, non relié rigoureusement à la notion de conte de tradition orale, qui lui n'a pas d'auteur précis.
Yvonne Robert, La Noce à Julia, 1977, coll. Musée de la Création Franche.
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La Patatonie de Serge Paillard
Aux éditions Chatoyantes (joli nom!), est sortie en décembre, ultra discrètement, un nouvel ouvrage consacré au monde imaginaire, la Patatonie, inventé par le peintre et dessinateur Serge Paillard qui se blottit bien loin des sunlights de la médiatisation. Aux dessins exécutés d'après des visions déduites de sa contemplation divinatrice de pommes de terre, se sont ajoutées ces dernières années des broderies sur le même thème. Il s'agit d'un livre d'artiste, si l'on en juge par cette description technique: "Couverture rigide avec titre, texte de présentation et propos recueillis. Format 28 cm x 27,5 cm. Tirage prévu 50 exemplaires. Prix 150 €. Exemplaires numérotés et signés par l’auteur. Chemise intérieure Munken pure 400 gr. Contenant 11 doubles pages au format 27 x 54 cm. Impression sur papier aquarelle 190 gr."
On peut acquérir le livre en s'adressant à... :
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Les Amies et Amis de Martine Doytier font des promesses pour 2021
Reçu ces jours-ci la newsletter de cette association, née l'année dernière (et pas repérée par les auteurs des notices sur l'art buissonnier en PACA, voir le Guide mentionné ci-dessus...). Elle propose un court film intitulé "Martine Doytier, l'étrange monsieur Martin" au sujet de l'automate (c'est lui, M. Martin, justement) qu'elle créa vers 1975, et qui sera bientôt restauré. Une exposition se prépare, des peintures sont retrouvées, un site internet est en gestation, bref l'année 2021 sera sans doute l'année de l'éclatante réapparition de Martine Doytier, étrange artiste atypique.
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L'association l'Art Brut en Compagnie présente ses vœux et ses projets pour l'année nouvelle
Cette autre association, basée sur la collection d'art brut d'Alain Moreau – collection pour une fois réellement en rapport avec le véritable sens de l'art brut –, en recherche d'un local où pouvoir montrer et monter des expositions et autres animations sur les créateurs qui lui sont chers, nous envoie ses vœux pour l'année nouvelle tout en communiquant le programme des manifestations auxquelles elle collaborera dans les mois qui suivront. Voir ci-dessous :
Raymonde et Pierre Petit, Départ pour l'Amérique du Cirque Pinder, coll. A. Moreau, ph. Dominik Fusina.
Carte de vœux et programme à venir... Corrigée par moi (Alain Moreau me pardonnera).
15:55 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art naïf, Art singulier, Art visionnaire, Environnements populaires spontanés, Environnements singuliers, Galeries, musées ou maisons de vente bien inspirés, Hommages, Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : benjamin péret, association des amis de benjamin péret, jean-claude caire, bulletin des amis d'ozenda, dominique dalozo, bruno montpied, symboliste secrète, revue "trakt" n°12, guide de l'art buissonnier, hors-série artension, françoise monnin, alain sanfourche, jean dominique, jean-luc thuillier, galerie vincent pécaud, création franche, yvonne robert, serge paillard, patatonie, éditions chatoyantes, art brut en compagnie, alain moreau, raymonde et pierre petit, martine doytier, les amies et amis de martine doytier | Imprimer
14/12/2020
La poésie aujourd'hui (2): les poèmes de mots collés de Vanessa Ancelot
Il y a quelques années, alors que je travaillais encore en Bibliothèque Centre de Documentation (BCD) d'une école primaire du Bas Belleville, je proposais de temps à autre aux enfants dans mes ateliers d'écriture organisés le soir pour des CE1 (des 7-8 ans) d'écrire des phrases en piochant dans des boîtes de mots découpés au préalable par d'autres enfants, notamment des CP, pendant le service d'interclasse du milieu de journée. L'essentiel étant de réaliser des phrases "qui tiendraient debout", qui seraient syntaxiquement valables. J'étais un animateur et non pas un enseignant, et je proposais cela comme une expérimentation ludique. Le collage des mots avec leurs couleurs, leurs typographies variées, souvent attractives, plaisait aux enfants qui fréquentaient l'atelier et la BCD (ils avaient choisi cet atelier-lecture (et écriture) avec leurs parents et étaient a priori motivés).
Collage de Fatima (toute une philosophie du comportement à avoir vis-à-vis de son enfance parmi les autres condisciples quand on est une très jeune fille), vers 1996, archives Bruno Montpied.
Collage de Tseman M., (qui soupirait peut-être de ne pouvoir faire comme le corbeau, au plumage noir comme la couleur de sa peau ; d'origine africaine, Tseman, par ce texte, retrouvait (ou répercutait?) le ton des proverbes africains par ailleurs), archives B.M.
Collage de Arnaud (grave question...), archives B.M.
Collage de Christine W., (un coup de dés n'abolit jamais le hasard?), archives B.M.
Collage de Léa M. (qui dans ses collages aimait les phrases lapidaires mais au sens - comme le lait - condensé), archives B.M.
Les résultats étaient curieux. Le hasard nous donnait des sortes de poèmes impromptus. On s'accordait eux et moi sur le fait que la phrase devait avoir quelque sens. Je n'étais jamais été sûr qu'ils en perçoivent toutes les dimensions. Pour m'en assurer davantage, je leur demandais d'illustrer ensuite la phrase obtenue.
Poème de mots collés de Louis Aragon, extrait d'un cahier de collages de 1924, (exposé actuellement à "L'Invention du surréalisme", jusqu'au 7 février 2021, à la Bibliothèque Nationale de France, site Mitterrand).
Il y avait des télescopages de mots qui donnaient des éclairs poétiques surprenants, déroutants. Sans bien le savoir, sans m'en souvenir précisément, on mettait nos pas dans ceux des dadaïstes qui avaient joué au début du XXe siècle de même que nous avec des mots découpés et collés, selon la technique que l'on appelle aussi, dans les manuels d'ateliers d'écriture, des lettres anonymes.
On peut convoquer aussi le souvenir dans les années 1950-1960 des collages de mots de Guy-Ernest Debord dans ses livres, illustrés de "structures portantes" d'Asger Jorn, Mémoires ou Fin de Copenhague.
Mots collés dans un carnet par Vanessa Ancelot, 2020. Photo et collection de l'artiste.
Mais tout cela m'est revenu ces temps-ci grâce à d'excellents collages réalisés récemment par une jeune femme de nos amis, Vanessa Ancelot, qui excelle dans cet art, je dois dire, obtenant des poèmes très drôles, percutants, qui renouvellent avec bonheur la poésie contemporaine, faite de ronron et de vers obscurs très souvent enquiquinant. Jugez plutôt d'après les exemples ci-dessus et ci-dessous. Chaque poème, pour se distinguer des voisins, est entouré d'un trait de crayon.
Vanessa Ancelot, ph. et coll. de l'artiste.
Vanessa Ancelot, ph. et coll. de l'artiste.
Vanessa Ancelot, ph. et coll. de l'artiste.
Et cet avant-dernier pour la route, imprégné d'un bel humour noir, ce dernier prenant souvent le relais de la tendre moquerie, du goût de l'absurde aussi parfois, ou de la poésie directe à coloration narquoise.... :
Vanessa Ancelot, ph. (détail) et coll. de l'artiste.
Enfin, un dernier collage sur les structures portantes cette fois de l'ami Darnish, bien connu sur ce blog, par ses commentaires fréquents.
Mots collés, Vanessa Ancelot, peinture, Darnish, ph.et coll. des artistes, 2020.
Dernier?... Pas tout à fait cependant. J'oubliais de joindre aux collages ci-dessus cette affiche photographiée avenue Trudaine dans le IXe arrondissement ces jours-ci, alors que je méditais cette note:
Adresse à l'attention de "Monsieur le Coronavirus" qu'on prie de s'en aller et de nous rendre toute liberté... Mais ce texte, s'il est réalisé par la technique des mots collés, n'est pas fait du tout au hasard, il est laborieusement volontaire ; ph. B.M. 2020
17:15 Publié dans Art de l'enfance, Art immédiat, Littérature, Poèmes choisis du sciapode, Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : mots collés, poèmes de mots collés, collages de mots, art enfantin, louis aragon, dadaïsme, vanessa ancelot, humour noir, goût de l'absurde, surréalisme, guy-ernest debord, asger jorn, darnish | Imprimer
14/10/2020
La photo surréaliste en 2020
Photo de Pierre-André Sauvageot (René Magritte, sors de ce corps!).
Guy Girard, membre du Groupe surréaliste de Paris (groupe contemporain), remet ça à la Galerie associative Amarrage rue des Rosiers à Saint-Ouen. Après "le Collage surréaliste en 2018", "le Dessin surréaliste en 2019", voici donc "la Photo surréaliste en 2020". Si les participants du côté français semblent devoir pour le moment se porter timidement vers Ouen-Ouen (terrifiés par la Covid?), les exposants internationaux paraissent avoir davantage répondu présents. Personnellement, je prêterai trois photos (voir l'une d'entre elles ci-dessous).
Il est intéressant de voir comment chaque participant s'investit dans l'idée d'une photo surréaliste actuelle. Non? A noter que certains exposants n'appartiennent pas formellement à un groupe surréaliste (José Guirao par exemple, ou mézigue), cela ne les empêche pas de pratiquer une photo qu'ils pensent correspondre, en partie ou totalement, à la notion surréaliste. La pratique de fixation des paréidolies diverses que l'on rencontre dans la vie quotidienne – et que ce blog recense régulièrement (cela dit, internet en est rempli) – en participe par exemple, je trouve.
Réponse à ces questions à partir du 16 octobre à partir de 18h30, jusqu'au 15 novembre. Attention! La galerie n'est ouverte que les après-midi de week-end, au même moment en fait que les Puces de St-Ouen dans le voisinage desquelles elle se trouve.
Bruno Montpied, Naissance du visage de la rose, 30 x 30 cm (tirage papier), 2017 ; exposé à la galerie Amarrage; cette photo fut prise dans le jardin d'une maison à... Rauzan (Gironde), village où les roses ont des visages, donc.
23:35 Publié dans Art immédiat, Art visionnaire, Photographie, Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : photo surréaliste en 2020, guy girard, groupe surréaliste de paris, bruno montpied | Imprimer
02/07/2020
Disparition d'un grand collectionneur
Désormais, il faudra écrire sur les pages d'histoire de l'art brut l'inscription Gerhard Dammann (1963-2020).
Directeur médical de la Clinique psychiatrique de Münsterlingen et directeur des services hospitaliers psychiatriques du canton de Thurgovie, en Suisse, Gerhard Dammann, d'origine allemande, était psychiatre, psychologue et psychanalyste. Sa femme Karin et lui étaient des collectionneurs passionnés d’œuvres créées dans le contexte psychiatrique, associées à l’art brut et l’art outsider, avec des incursions aussi du côté de l'art médiumnique.
J'adresse toutes mes condoléances à sa femme et à ses quatre filles. Cette nouvelle m'a, je l'avoue, passablement ému, même si je ne faisais pas partie des intimes.
Le lit sculpté de Bonneval, photo extraite du catalogue "Collecting Madness, outsider art from the Dammann Collection" (exposition 2006 à la Fondation Prinzhorn à Heidelberg).
Dans le cadre de l'OAF, vers 2016, on s'était croisé lui et moi au détour d'un couloir. J'avais apprécié la finesse, la simplicité et la courtoisie du personnage. On était entre collectionneurs au fond, même si je n'avais guère les mêmes moyens. Simplement, on était avant tout entre sincères amateurs. Il s'était spécialisé, en accord avec son métier, dans la collection de la folie, comme le titre d'un catalogue de la Fondation Prinzhorn à Heidelberg, "Collecting madness", le rappelait, en accompagnant une exposition de sa collection. Mais il ne se limitait apparemment pas à ce champ d'exploration, puisque, outre certaines pièces remarquables en provenance d'asiles divers (comme un lit étonnant à l'auteur énigmatique, venu d'un asile près de Chartres, peut-être celui de Bonneval), il lui arrivait de mettre la main sur des œuvres dites "médiumniques", peut-être pour masquer l'absence totale d'informations les concernant, comme le tableau ci-dessous, intitulé au sommet de la bâtisse représentée: "Le Château des deux sœurs jumelles".
Auteur inconnu, Le Château des deux sœurs jumelles, 123 x 135 cm, sans date, provenance France, collection Gerhard et Karin Dammann.
Lorsque Gerhard Dammann m'a interrogé sur ce que je pensais de ce tableau, je n'ai pas pu lui rétorquer grand-chose, comme je n'avais guère donné d'éclaircissements non plus à François Vertadier de la galerie Polysémie qui l'avait détenu auparavant et qui lui aussi avait demandé aux internautes via sa newsletter des informations. Il est d'ailleurs intéressant de donner les précisions suivantes que m'avait délivrées M. Vertadier (en janvier 2016):
"Des inscriptions : au dos rien, mais impossible à décoller de son support, car il est fait de plusieurs morceaux.
Sur le dessin, pas de signature mais quelques mots :
Gros, devant les jambes d’un personnage entre deux fenêtres.
Bas nylon, au centre en bas.
Galilée, pour le personnage dans la partie haute de la tour de droite.
Et surtout au tampon T SCHEWEICHLEIN au dessus du personnage en dessous. Est-ce l’auteur ou quelqu’un d’autre ? A ce jour, mystère. Je n’ai trouvé aucune trace d’artiste ou de personnalité de ce nom."
Je gage qu'aujourd'hui, quatre ans après, on n'a guère progressé au sujet de ce tableau. De plus, pour bien l'analyser, il faudrait, de prime abord, une reproduction en meilleure résolution. Le château en question avec ses loges me fait penser personnellement à un théâtre de marionnettes. Les "sœurs jumelles" n'ont pas l'air très jumelles justement. Certains détails, comme la caravelle (du moins est-ce ainsi que je l'identifie) survolant la composition, permet de dater l'oeuvre des années 1960 environ...
J'ajoute que M. Vertadier m'avait également informé que le tableau aurait été connu d'André Breton, et que parmi les nombreuses mains entre lesquelles il est passé, avant d'atterrir, donc, finalement, chez Gerhard et Karin Dammann, il y aurait eu une femme très connue des milieux surréalistes, amie avec Breton (Joyce Mansour par exemple? Hypothèse gratuite que je lance ici...).
Conférence et présentation de la collection du couple Dahmann par Gerhard Dammann, en 2011, dans les cadre des Hôpitaux Universitaires de Genève.
18:33 Publié dans Amateurs, Anonymes et inconnus de l'art, Art Brut, Art immédiat, Art visionnaire, Correspondance, Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : gerhard damman, collecting madness, collectionneurs d'art brut, art asilaire, art médiumnique, château des deux soeurs jumelles, femme surréaliste, lits sculptés, galerie polysémie, françois vertadier | Imprimer
04/02/2020
Un tableau de Camille Van Hyfte, avec interprétation quasi automatique de Bihalji-Mérin
Ici, j'ai l'occasion, simultanément, d'entamer une nouvelle catégorie de ce blog, les écrits de personnalités en rapport avec les arts de l'immédiat ("Ecrivains et arts de l'immédiat"), en l'occurrence l'historien d'art Oto Bihalji-Mérin, pour sa façon d'interpréter un tableau sous une forme poético-littéraire, peut-être pas totalement contrôlée, comme je l'ai déjà pratiqué personnellement dans des notes précédentes de ce blog (voir cette autre catégorie que je crée aussi aujourd'hui, "Lecture d'images", à ne pas confondre avec la rubrique "Délires d'interprétation", quoique la frontière soit parfois ténue...). Le but premier est de rendre avant tout l'écho de l'image chez l'interprétateur, honnêtement, sans faire de fioritures littéraires, et en laissant passer des propos relevant d'associations d'idées, d'intuitions... Ici, on retire vraiment l'impression que Bihalji-Mérin a lâché les chevaux du rêve éveillé dans son évocation du tableau de Van Hyfte, d'une manière peu usuelle, me semble-t-il, chez lui.
C'est en cherchant des informations sur le peintre belge Camille Van Hyfte, peintre boucher hippophagique¹ d'origine flamande, et coureur cycliste aussi, par la suite installé en France, dans l'Oise, à Mouy (au nom curieux, on dirait un assentiment mou...) dont un vieux numéro de la revue Phantômas (n°7-8, de 1956, spécial Art Naïf) reproduisait en noir et blanc un tableau, que j'ai rebondi ensuite vers un livre de 1960 où il y avait le même tableau en couleur avec l'interprétation de Bihalji-Mérin, que je reproduis ci-dessous :
Camille Van Hyfte (1886-1960), Intérieur avec fleurs, ancienne collection Edmonde Charles-Roux, reproduit en couleur dans Oto Bihalji-Mérin, Les peintres naïfs, Delpire éditeur (1960).
"Ainsi son Intérieur avec fleurs, d'une perspective gauche et ramassée, offre-t-il une harmonie de tons fanés, comme étouffés, où même le bouquet traité en touches vives semble s'éteindre dans l'atmosphère vieillotte et petite-bourgeoise. On dirait que les tables aux pieds tournés, les deux chaises et les deux fauteuils, seuls meubles de cette chambre vide, attendent d'entrer en scène. Sous les énormes fleurs, le vase de porcelaine blanche ornée de motifs, a quelque chose d'insolite. Il n'y a jamais eu personne pour le poser là. La disproportion dans le rapport des objets entr'eux, comme le rapprochement inattendu des tons, laissent une impression étrange : on croirait que quelque chose vient de se passer là, que nous sommes incapables de savoir, ou que quelque chose d'insoupçonnable va arriver, et peut-être pas dans le domaine humain."
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¹ Le seul boucher hippophagique de l'art naïf à ma connaissance!
16:45 Publié dans Art immédiat, Art naïf, Ecrivains et arts de l'immédiat, Lecture d'images, Littérature, Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : art naïf, camille van hyfte, boucherie hippophagique, phantômas, oto bihalji-mérin, lecture d'images | Imprimer
23/01/2020
Dictionnaire du Poignard Subtil
Pensée :
"Un examen réfléchi, approfondi, des possibilités de la pensée, de la pensée commune à tous, rend vaine toute hiérarchie entre les hommes. Entre l'homme et la femme, elle serait la négation même de leur rôle propre."
(André Breton, Paul Eluard, "Notes à propos d'une collaboration", manuscrit original publié, entre autres, sur le site web André Breton, destiné à servir d'introduction à l'édition japonaise du recueil L'Immaculée conception de 1930¹).
NB: La dernière phrase de cette citation me paraît aller à rebours de l'opinion commune à beaucoup de commentateurs malveillants du surréalisme, n'hésitant pas à présenter les membres du mouvement comme anti-féministes.
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¹ Voir aussi le tome I des Oeuvres complètes d'André Breton , dans la Notice sur l'Immaculée conception, p.1633). Le texte fut rédigé par Eluard qui le soumit à Breton qui apparemment ne le toucha pas.
00:28 Publié dans DICTIONNAIRE DE CITATIONS DU POIGNARD SUBTIL, Questionnements, Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : pensée, surréalisme, féminisme, paul éluard, andré breton, l'immaculée conception, la poésie faite par tous | Imprimer
30/11/2019
Info-Miettes (35)
Dominique Lajameux à la Fabuloserie-Paris
Dernière exposition à la Fabuloserie de la rue Jacob (qui se termine le 7 décembre, dépêchez-vous...), une dessinatrice de première force, très sensible, très acharnée, inconnue de moi jusqu'à présent. Elle a déjà été exposée dans le cadre de différents festivals d'art singulier, chez Hang-Art ou à la galerie Polysémie notamment. Le carton d'invitation sur le web ne nous en dit pas grand-chose, en dehors d'un beau texte poétique de l'artiste. A voir et à découvrir en tout cas.
D.Lajameux
La compagnie l'Excentrale...
Le terme de "Massif excentral" que j'avais inventé naguère pour une série de notes sur divers lieux, facéties et créateurs insolites du Massif Central a été repris, avec mon blanc-seing, par de jeunes musiciens auvergnats qui se sont réunis, en plusieurs groupes, dont un, les Tzapluzaires, fait également écho à une autre de mes anciennes recherches, et sous la bannière, si j'ai bien compris d'une seule compagnie, l'Excentrale. Plus de renseignements sur leurs concerts, les groupes, les tournées, voir ce lien...
Par ailleurs, les Tzapluzaires collaborent de temps à autre avec le violoniste Jean-François Vrod, dont j'ai eu l'occasion de citer son intérêt pour diverses formes d'art brut ou singulier populaire, dans une note de ce blog, en 2012...
Mariage musical avec une taille de bois...
Un surréaliste peu connu d'après-guerre, Pierre Jaouën
J'ai rencontré il y a plusieurs années Anne-Yvonne Jaouën, qui était une amie du critique d'art Charles Estienne. Elle avait été amenée à héberger dans sa maison de famille à Ploudalmézeau certains des artistes (notamment Krizek) qu'Estienne, critique d'art proche des surréalistes, invitait à séjourner dans la région finistérienne chez lui à Argenton. Des artistes (ceux que je préfère) tels que Toyen, Krizek, Fahr-el-Nissa Zeid, ou Marcelle Loubchansky, ou bien (je les goûte moins) René Duvillier, Jean Degottex, Serge Poliakoff, tous visiteurs que certains historiens de l'art moderne ont rangés par la suite sous l'étiquette d'"Ecole des Abers", du nom de ces bras de mer qui découpent la côte dans cette région. Anne-Yvonne, après m'avoir montré des peintures magnifiques qu'elle possédait de Toyen (des vues des bords de mer appelés estrans revisités par l'imagination picturale de l'artiste tchéque), me parla de son frère qui était peintre, mais elle ne me montra aucune reproduction de son œuvre. Un jour, simplement, en feuilletant la revue Le surréalisme même (n°2, 1957), je suis tombé sur un dessin (encre?) de ce frangin, prénommé Pierre.
Je la trouvais intéressante, mais si seule, oubliée ainsi dans un coin de la revue, n'ayant pas nécessité plus de prolongement, du coup, je ne m'appesantis pas davantage. Voici que l'occasion est donnée d'en apprendre plus sur le talent de cet artiste discret, peu mis en lumière par l'histoire de l'art moderne (cependant, on lira l'intéressante notice insérée sur Wikipédia, très complète, qui parle de lui et des peintres défendus par Charles Estienne). Il fait un peu partie de cette famille de peintres ou poètes qui vivaient dans le sillage du surréalisme après-guerre, abritant leur talent dans une ombre nécessaire, comme Jacques Le Maréchal, ou Yves Elléouët, ce dernier étant un proche de Jaouën, comme me l'a signalé Marc Duvillier, spécialiste des artistes d'Argenton apparemment...
Une page extraite du livre d'artiste Mélusine d'emmanuelle k. (pseudonyme voulu sans majuscules) et Pierre Jaouën, image copiée du film Mélusine (38 min.).
La galerie Hébert en effet, 18, rue du Pont Louis Philippe, près du métro Saint-Paul à Paris, héberge une exposition des planches d'un livre commun d'emmanuelle k. et de Pierre Jaouën (disparu en 2012), dont le texte a donné également lieu à un "oratorio pop" avec la participation des jazzmen Emmanuel Bex, Simon Goubert et François Verly (il existe un coffret avec DVD d'un film sur le livre, CD de cet oratorio et un livret). Ce livre est une réussite dans le domaine du livre d'art, ne serait-ce que par l'harmonie, la fusion de la disposition typographique avec les structures portantes, aquarellées, de Pierre Jaouën, qui rappelle, quoique dans un autre ordre d'idées au point de vue thématique, les livres de Guy Debord et d'Asger Jorn. Mais, même s'il est donné ici d'en voir un peu plus sur cet artiste qui se révèle, par prédilection semble-t-il, un paysagiste "abstrait", on aimerait que la même galerie ait l'idée de nous proposer par la suite une exposition entièrement et seulement consacrée à lui.
Expo du 27 novembre au 15 décembre 2019.
Un nouveau label dans le genre "prise de tête", les arts "situés"... A traduire du belge
"COLLOQUE : PENSER LES ARTS SITUÉS, 04, 05 & 06 décembre 2019. Cité Miroir - Espace Francisco Ferrer - ULiège - Accès libre"... voici l'annonce que j'ai reçue ces jours-ci en provenance de l'anciennement nommé MadMusée de Liège. Car ce musée, décidément pris d'une fièvre onomastique incontrôlée, a décidé aussi de se débaptiser et de s'appeler désormais Trinkhall... Pourquoi pas? D'autant qu'ils ont désormais un nouveau bâtiment avec 600 m2 de surface pour exposer au mieux les oeuvres (souvent fort intéressantes) produites par différents handicapés mentaux (et trinquer dans le hall?). Mais pourquoi ce nouveau label d'"art situé"? Totalement ésotérique, si ce n'est parfaitement creux? Voici le laïus qui est servi par le musée pour expliciter, si possible le nouveau label:
"La notion d’arts situés définit la politique muséale du Trinkhall. Elle repose sur un mode de perception et de compréhension des œuvres qui intègre la dimension fondamentale de leurs environnements : une œuvre d’art est un système de relations localisées dont l’expression esthétique est le moyen et l’effet. Toute œuvre d’art, en ce sens, est située. Mais certaines, plus que d’autres, étant donné leur apparente singularité ou leur relative marginalité, font entendre plus fortement la voix de leur situation."
4e Biennale de l'Art Brut: Théâtres, à la collection de l'Art Brut à Lausanne, avec entre autres Ni Tanjung...
Du 29 novembre 2019 au 26 avril 2020, prend place une 4e biennale thématique à Lausanne, après "Corps", "Véhicules" et "Architectures". Cette fois, c'est le "théâtre" au sens de "performances", analogies avec les marionnettes, voire déguisement... La référence en creux au théâtre d'ombres indonésien du Wayang kulit a par exemple incité les commissaires d'exposition à y exposer Ni Tanjung à laquelle le LaM avait déjà pensé dans le cadre de son exposition "Danses".
Georges Bréguet, l'anthropologue suisse qui s'est instauré protecteur de Ni Tanjung, la faisant connaître en Occident, 28 novembre 2019.
Anselme Boix-Vives en visite en Suède
Information tardive! Boix-Vives n'en finit pas de voyager à travers le monde. Une exposition lui a été consacrée du 26 mai au 15 septembre dernier avec la complicité du Centre Vendôme pour les arts plastiques au musée d'art d'Uppsala, en Suède donc... La manifestation comprenait 140 peintures et dessins ainsi que – chose inédite – quelques œuvres de ses petits-enfants Philippe et Julie Boix-Vives.
Julie Boix-Vives, la danse des échelles ; on est loin de l'œuvre du grand-père...
Et Anne-Marie Vesco, vous connaissez?
Anne-Marie Vesco, Tête de profil, A-M.Vesco, huile et pastel sur paper, 78 x 63 cm, 2003.
Cette artiste dessine fort bien les éléphants. C'est déjà un bon point pour elle. Elle expose bientôt du 3 au 15 décembre dans une galerie, Le Génie de la Bastille (126 rue de Charonne dans le XIe ardt parisien), des petits formats. Vernissage samedi 7 décembre de 16 à 20 h et finissage dimanche 15 aux mêmes horaires. La Bastille...? Il y a encore un rapport avec les éléphants en plus (voir Hugo et son Gavroche).
Anne-Marie Vesco, des mini formats...
20:34 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art moderne ou contemporain acceptable, Art singulier, Musiques d'outre-normes, Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : lajameux, fabuloserie-paris, l'excentrale, tzapluzaïres, massif excentral, pierre jaouën, arts situés, trinkhall, ni tanjung, collection de l'art brut, biennale théâtres, georges bréguet, boix-vives, anne-marie vesco, éléphants, toyen, krizek, fahr-el-nissa zeid, charles estienne | Imprimer
23/11/2019
Mme Zka est partie en Catalogne (espagnole) dans un magnifique et stimulant musée du Jouet
Madame Zka, dont ce n'était pas le nom et "qui n'était pas absolument folle", selon les dires de Guy Selz dans la revue La Brèche n°2, (sous-titrée "Action surréaliste", et datée de mai 1962 ; son texte sur elle s'intitule "Les doigts de la mémoire"), a échappé aux collections d'art brut où elle n'aurait pas détonné¹. Sans doute parce que celui qui possédait ses "poupées" pas comme les autres les aura protégées d'un tel transfert... Simple supposition, car je ne sais pas grand-chose de la collection de Guy Selz (frère de Jean Selz et de Jacqueline Selz – elle-même, en compagnie d'Yvon Taillandier, collectionneuse d'art populaire essentiellement méditerranéen² –, et père de Dorothée et Philippe Selz, Dorothée étant connue comme artiste créatrice d'œuvres en sucre). On sait seulement qu'il fut une connaissance proche d'André Breton, qui lui demanda un article sur Mme Zka pour le n°2, en mai 1962, de la revue La Brèche qu'il dirigeait.
Une des illustrations de l'article de Guy Selz dans La Brèche, montrant les poupées peu communes de Mme Zka.
Les poupées possédaient sous les vêtements, particularité insolite, des visages aux yeux, bouches et autres pommettes, cousus de fils ; ici c'est un détail de la figure 7 reproduite ci-dessus et empruntée à la revue La Brèche.
Les poupées de Mme Zka, telles qu'elle étaient présentées à l'expo "Poupées" à la Halle Saint-Pierre en 2004 ; à noter que le catalogue ne les reproduisit pas, car elles furent prêtées inopinément à l'exposition, après que le catalogue avait été lancé ; du coup tout élément biographique ne put être donné dans l'ouvrage à leur sujet³ ; photo Bruno Montpied, 2004.
Ces poupées de Mme Zka ont aussi, autre particularité, le don d'exhiber des membres virils qui sortent des pantalons, comme oubliés... ; photos B.M., 2004.
Cette collection Selz vient – en partie? En entier? On ne le précise pas – d'entrer dans le remarquable et vivant Muséu del Joguet de Catalunya à Figueres (le Musée du Jouet de Catalogne), suite à une donation, précisément, de ses enfants, Philippe et Dorothée. Voici le laïus de ce musée au sujet de Guy Selz :
"Guy Selz (Paris, 1901-1975), designer graphique et journaliste, a été membre de l’équipe fondatrice de la revue Elle et chargé des chroniques culturelles du magazine. Collectionneur avide, il s’est intéressé à la créativité et à l’art populaire. Cela l’a conduit à collectionner des objets insolites, surprenants ou fascinants, sans hiérarchie ni frontières entre les genres et les arts. Et il est parvenu à rassembler plus de 30 000 pièces qu’il conservait chez lui, exposées et regroupées suivant son propre sens de l’esthétique. Cet espace abrite la plupart des fonds de la collection dont ses enfants, Philippe et Dorothée Selz, ont fait don au musée, tout en recréant l’aspect qu’elle avait lorsqu’elle était exposée chez lui. En 1974 la collection fit l’objet d’une exposition, qui connut un grand succès, au musée des arts décoratifs de Paris dont le commissaire était le conservateur en chef, François Mathey (à noter cependant que cette exposition était consacrée à plusieurs collections, et que celle de Françoise et Guy Selz, si elle était particulièrement bien représentée en effet dans l'expo, n'en était qu'une parmi beaucoup d'autres ; voir ci-dessous une page du catalogue de 1974).
Une des pages consacrée à la collection Françoise et Guy Selz dans le catalogue de l'exposition "Ils collectionnent..." du musée des Arts Décoratifs en 1974.
L’intérêt de Selz pour l’art populaire dans sa collection se manifeste, entre autres, sur la série de siurells (figurines en céramique, intégrant un sifflet, typiques des Baléares), compte tenu qu’entre 1933 et 1936, il tenait un bar sur l’île d’Ibiza."
J'ajouterai que ces sifflets en céramique originaires de Majorque furent très importants pour le peintre surréaliste catalan Joan Miro (qui en possédait, comme celui ci-contre, qui appartient au musée catalan). Ce musée du jouet de Figueres est remarquable, disais-je, par sa façon extrêmement vivante de présenter ses collections classées par départements aux thématiques insolites, surprenantes et ludiques, où diverses activités liées au jeu sont proposées en lien avec différents thèmes où l'esprit de curiosité règne en maître : le jeu dans l'antiquité, les jouets animaliers, les théâtres miniatures et les marionnettes, les illusions d'optique, la magie et l'illusionnisme, les soldats de plomb, une évocation de l'enfance et la jeunesse de Salvador Dali, les jeux de papier, les jouets mécaniques (avec une section consacrée en particulier aux jouets japonais), les jouets d'éducation sexuelle (les figures japonaises Kar Kar - la fille - et Tac Tac - le garçon -...), les figurines de la guerre civile espagnole, les jouets liés à la thématique spatiale avec des robots, des soucoupes volantes, les déguisements, les jouets bricolés par les enfants du Sahara, les jouets sonores, les jeux pour non-voyants, les casse-têtes, les instruments-jouets de Pascal Comelade, les figurines créées par José Antonio Heredia Navarrete, un autodidacte populaire (dont j'ai bien l'impression d'avoir un jour, il y a fort longtemps acheté l'une d'entre elles, une sirène, pour l'offrir à ma muse Christine Bruces ; voir ci-contre une de ces sirènes par Navarrete), les œuvres d'art inspirées par les jouets, etc., etc. Une maquette de réseau ferroviaire est présente également dans ce musée due à Andreu Costa Pedro (1926-2013) qui la réalisa durant dix-huit ans. Mention spéciale aussi doit être faite à des représentation de "caganers", c'est-à-dire des figurines de chieurs... Sortes de santons d'un genre spécial que l'on cachait dans les crèches (Catalogne, région de Valence, Baléares) pour soi-disant attirer la chance et la richesse (on sait que le caca est selon Freud la première monnaie d'échange, et donc l'origine de l'argent... ; dans une crèche, la défécation est censée fertiliser le sol de la crèche... argument qui sent bon - si j'ose dire - la justification). Il existe des caganers de toutes sortes (comme on le devine...), notamment actuellement, "des politiciens, des sportifs et des personnages célèbres ou médiatiques"...
Les caganers du musée du Jouet de Figueres...
____
¹ Bizarrement, une notice du musée du Jouet de Figueres signale que les poupées en question parvinrent entre les mains de Guy Selz grâce à Jean Dubuffet. Si cette information a un fondement quelconque, on se demande alors pourquoi l'inventeur de l'Art Brut n'en a pas gardé pour lui dans sa prestigieuse collection? En tapant les mots-clés "Mme Zka" sur la base de données du musée lausannois, on ne rencontre que "0 résultat"...
² Jacqueline Selz et Yvon Taillandier qui eux-mêmes ont fait donation de leur collection d'art populaire personnelle au musée départemental de Noyer-sur-Serein dans l'Yonne.
³ On n'a en guise d'éléments biographiques sur Mme Zka que quelques lignes extraites du n° de La Brèche par Guy Selz: "Sans doute d'origine polonaise, Mme Zka fut chanteuse lyrique, et fit probablement aussi du théâtre et du music-hall (...) Elle a vécu en Russie, en Italie, en Egypte, en Roumanie et peut-être dans d'autres pays où "ses tournées" et ses 4 ou 5 maris la conduisirent (...) Deux choses se remarquent aussitôt : un talent extraordinaire de couturière, et un bon lot de poupées figurant des officiers de l'ancienne armée polonaise..." Si le lecteur veut en apprendre plus, il se référera à l'article entier ici en PDF...
20:10 Publié dans Art Brut, Art populaire contemporain, Art visionnaire, Galeries, musées ou maisons de vente bien inspirés, Jeux, Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : guy selz, la brèche n°2, surréalisme, madame zka, poupées sexuées, poupées, jouets, figueres, caganers, navarette, maquettes de trains, musée de noyers sur serein, jacqueline selz, yvon taillandier, art brut, ils collectionnent, musée des arts décoratifs | Imprimer
12/11/2019
Roger Cardinal (1940-2019), après Laurent Danchin et Jean-François Maurice...
Des pages générationnelles, en matière de médiation autour des arts spontanés, se tournent décidément depuis quelque temps... Voici que j'apprends avec une tristesse certaine que Roger Cardinal vient de nous quitter.
C'était un médiateur réputé de l'art qu'il avait qualifié d'"outsider" en Grande-Bretagne, terme repris aux USA et dans le monde anglo-saxon, voire jusqu'ici, où il est de bon ton de parler anglais à tout bout de champ en désertant la langue française.
Roger Cardinal recueilli ; Bibliothèque de Bègles, avril 2009. Photo Bruno Montpied.
La dernière fois que je l'avais vu, c'était il y a trois ans, il me semble, dans un escalier de l'Hôtel du Duc où se tenait l'Outsider (comme de juste) Art Fair. Il était assis sur un banc, grignotant un sandwich ; je l'avais salué, en lui tendant je ne sais plus laquelle de mes publications, et il était resté assez bizarrement sans réaction, alors que nous nous connaissions et avions usuellement des relations cordiales. Quand j'avais envoyé ensuite des informations par mail, il n'avait pas non plus réagi, et je m'étais demandé ce qu'il se passait. La fatigue de l'âge (selon l'euphémisme convenu)?
C'était un gentleman d'une grande bienveillance, un gentleman des années 1970, et un poète incontestablement, davantage qu'un théoricien (ainsi m'est-il toujours apparu en tout cas). C'est lui qui a lancé le terme d'Outsider art, en montant des expositions sur ce thème dès 1972 (parfois avec l'aide de la Fabuloserie d'Alain Bourbonnais) et pendant de nombreuses années, tout en écrivant de nombreux articles et études sur les arts spontanés (où il ne hiérarchisait pas l'art naïf par rapport à l'art brut). Certes, il n'était pas le seul au Royaume-Uni, il y avait aussi Victor Musgrave et Monika Kinley (la Madeleine Lommel britannique), et aujourd'hui il y a la Gallery of Everything de James Brett et ses amis. Mais Cardinal a eu un rôle déterminant, en influençant la création de la revue Raw Vision, de John Maizels en 1989 notamment. Le terme d'outsider a eu un retentissement énorme aux USA, ce qui a causé en retour une onde de choc vers l'art brut européen.
Le catalogue de l'expo "Outsiders" de 1979.
Ce que l'on sait moins – surtout dans le petit monde des spécialistes de l'art brut et autres – c'est qu'il avait donné, dans ces mêmes années 1970, quelques textes au groupe surréaliste qui tentait internationalement de conserver une activité structurée en réaction à la décision que d'autres avaient prise de décréter, trois ans après la mort d'André Breton (soit en 1969), la fin du mouvement organisé. J'ai retrouvé ses deux contributions dans le Bulletin de Liaison surréaliste réédité en 1977 par l'éditeur Savelli : "Tout un roman" et "Je note des signes", d'une très belle et très claire venue poétique.
En Grande-Bretagne, il avait prolongé et adapté l'activité d'un Dubuffet pour tenter d'attirer l'attention du public sur des arts spontanés où il mélangeait artistes marginaux et auteurs d'art brut. Je possède son livre de 1979, paru à l'occasion d'une exposition à la Hayward Gallery, où l'on retrouve au sommaire des créateurs bien connus désormais : certains venus de l'Atelier Jacob (1972-1982) comme Alain Bourbonnais, Francis Marshall, Jano Pesset, Mario Chichorro, Joël Negri, Denise Aubertin, Pascal Verbena, François Monchâtre, ou Emile Ratier, d'autres en rapport avec la maison des artistes psychotiques de Gugging en Autriche comme Johan Hauser, Johann Scheïbock, Philipp Schöpke, Oswald Tschirtner, ou August Walla ; bien sûr, il y avait quelques grands créateurs de l'Art Brut venus d'autres collections, comme Aloïse, Scottie Wilson, Wölfli, Henry Darger, Joseph Yoakum, Martin Ramirez, Anna Zemankova, Heinrich Anton Müller, des patients artistes de la collection Prinzhorn à la clinique de Heidelberg comme Joseph Sell, Gustav Sievert, August Neter, Peter Moog, Johann Knüpfer, ou Karl Brendel, un créateur d'environnement visionnaire, Clarence Schmidt, mais aussi de grands inclassables comme Louis Soutter, ou ce dessinateur allemand étrange revendiqué par le surréalisme, Friedrich Schröder-Sonnenstern (voir ci-contre).
Cette expo prolongeait celle des "Singuliers de l'art" qui s'était tenue un an auparavant au Musée d'Art moderne de la ville de Paris, là aussi organisée avec l'aide d'Alain Bourbonnais et de son Atelier Jacob (galerie qu'il animait avant de fonder son musée de la Fabuloserie dans l'Yonne.
Au fond, ce qui me séduisait, dans la perspective de Cardinal, c'était son origine et sa culture surréalistes. On sait que ce mouvement, surtout du vivant de Breton, incorporait des autodidactes naïfs ou bruts, de même que de la poésie naturelle sous forme d'objets insolites trouvés dans la nature, sans faire de séparation de valeur entre ces créateurs et les artistes plus explicitement en relation avec le mouvement. Je pense que c'était dans ce sillage que se situait Cardinal. D'autant qu'en Grande-Bretagne, on pouvait le faire sans dommage, ce pays ayant fait l'économie de la dispute qui eut lieu sur le continent entre ces deux crocodiles que furent Dubuffet et Breton, se colletant au fond du même marigot (image que me délivra un soir Philippe Dereux au fond d'un restaurant lyonnais)... Les défenseurs de l'art brut français et suisses en effet ont longtemps hérité du clivage entre les deux crocodiles, et il est fort difficile de retisser les liens rompus de ce côté du Channel. J'en sais quelque chose, puisque moi aussi je m'efforce de me situer dans ce double sillage du surréalisme et de l'art brut...
Étrangement, cette origine surréaliste de Cardinal ne paraît pas avoir été perçue par le milieu suisse de l'art brut, puisqu'il fit partie sans difficulté du comité consultatif de la Collection de l'Art brut à Lausanne (comme Laurent Danchin, pourtant pas très orthodoxe en matière de doxa brute...). Pourtant, on s'est longtemps méfié des surréalistes du côté de la Collection (du moins peut-être jusqu'à l'après-Michel Thévoz¹ ; car, avec Lucienne Peiry, directrice de la collection de 2002 à 2012, la méfiance se tempéra et s'atténua me semble-t-il). Probablement parce que Roger resta toujours fort civil, diplomate, élégant, avec Dubuffet lui-même d'abord (qui lui avait fait part de son accord pour le terme d'"art outsider") puis avec les conservateurs successifs de la CAB.
Sur ce terme d'art outsider, j'ai déjà évoqué sur ce blog par le passé la traduction qu'on aurait pu lui donner : art alternatif. Roger Cardinal m'avait écrit son assentiment face à cette traduction, comme je l'ai déjà signalé. Certes, ce mot qui lui avait été imposé, comme il me l'a écrit, par son éditrice, devait servir de synonyme à "art brut". En réalité, c'est un tour de passe-passe, dans la mesure où il recouvre beaucoup d'expressions différentes, du folk art, aux artistes marginaux, en passant par l'art brut au sens strict, et les environnements spontanés. En France, il sert d'ailleurs souvent de mot lui-même alternatif à la place d'art singulier. Le Musée de la Création Franche de Bègles par exemple, qui se sert beaucoup en ce moment du terme d'art brut – à mon avis inadéquatement – serait mieux inspiré de parler d'art outsider pour ses collections.
Concernant Roger Cardinal, il serait judicieux de rassembler et de traduire ses principaux textes pour les lecteurs français. Il en a donné quelques-uns pour des catalogues, comme le premier qu'édita l'Aracine ou ceux édités par la Halle Saint-Pierre au fil des années.
____
¹ Michel Thévoz qui écrivit un jour: "André Breton fusille les spirites et leur fait les poches". Ce qui, on en conviendra peut-être, est assez odieux...
18:09 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art naïf, Art singulier, Art visionnaire, Environnements populaires spontanés, Hommages, Lexique et définitions des arts populaires, Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : roger cardinal, outsider art, raw vision, art brut, collection de l'art brut, surréalisme, bulletin de liaison surréaliste, gugging, prinzhorn, atelier jacob, alain bourbonnais, dubuffet, andré breton, michel thévoz | Imprimer
09/10/2019
Une histoire de modification sur œuvre préexistante : José Guirao/Bruno Montpied
L'histoire de l'art moderne recèle, si l'on veut bien y plonger, loin des chemins battus, des expérimentations d'art en commun qui devraient bien faire l'objet d'une exposition dans quelque musée (si les "curateurs" pouvaient oublier leurs sempiternels tropismes individualistes classiques). On connaît les cadavres exquis des surréalistes dont il existe de nombreux résultats fort séduisants, réalisés en différentes techniques, (dessin, pastel, collage, en tailles variées...). Mais du temps de Cobra, ou des groupes variés post-Cobra, voire les situationnistes artistes (au début du mouvement), on a pu aussi rencontrer de nombreux exemples de travaux exécutés en commun, peintures, bas-reliefs muralistes, maisons peintes intérieurement... L'initiative de créer en commun s'est perpétuée jusqu'à nous, d'après ce que j'en sais, essentiellement à travers des jeux pratiqués par les groupes surréalistes divers et variés qui subsistent encore actuellement. De même ce genre d'expérience a pu se pratiquer dans les cours d'art plastiques alternatifs, que ce soit en milieu scolaire ou en milieu péris-scolaire (j'ai ainsi personnellement beaucoup peint avec des enfants, notamment de maternelle ; mais dès que je le peux, j'aime continuer aussi à peindre en commun avec d'autres artistes).
Bruno Montpied et Petra Simkova, sans titre (cadavre exquis en forme de bandeau ou de frise), 1999, ph. Bruno Montpied.
L'art en commun peut se vivre de plusieurs manières, et par exemple par la modification d'une œuvre préexistante – certains diraient par le détournement, mais je veux rester fidèle à l'emploi du mot "modification" qu'avait choisi le peintre et théoricien danois Asger Jorn, qui modifia picturalement beaucoup de croûtes trouvées aux Puces.
Tout cela dit pour présenter les deux oeuvres ci-dessous exécutées par mézigue et par un camarade, José Guirao, à partir d'une même affiche, représentant un pic, dont je donne l'image originale. Nous l'avons chacun de son côté copieusement caviardée je dois dire, au point qu'il n'en est resté que quelques reliefs – si l'on peut dire pour cette image en deux dimensions. Je me demande si d'autres artistes se livrent à ce genre d'expérimentation en commun, ailleurs, aujourd'hui...?
Un pic, affiche éditée d'après une planche de zoologie de la bibliothèque du Muséum d'Histoire naturelle de Paris.
Première modification, par José Guirao:
Deuxième modification (intitulée Le Démiurge), par Bruno Montpied:
Chaque œuvre, de 2019, faisant 53,5 x 38 cm.
00:52 Publié dans Art collectif, Art singulier, Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art en commun, art collectif, cadavres exquis, modification, cobra, surréalistes, asger jorn, situationnistes, muralisme, expérimentation artistique, bruno montpied, petra simkova, josé guirao, peinture caviardée | Imprimer
13/09/2019
Le dessin surréaliste en 2019....
Voici que reprend le cycle d'expositions que le peintre, essayiste et poète du Groupe de Paris du mouvement surréaliste, Guy Girard avait entamé l'année dernière avec "le collage surréaliste", et ce toujours dans la même galerie Amarrage, rue des Rosiers, en lisière des Puces de St-Ouen.
Régis Gayraud, Pêcheurs d'âmes, 18 x 24 cm, 2019.
Bruno Montpied, Les Trois Grâces, technique mixte sur papier, 30,5 x 23 cm, 2019. PH. B.M..
En tant qu'ami du groupe, je prête outre trois de mes dessins (le cahier des charges de l'expo exigeait le noir et blanc, condition qui n'a pas été suivie par nombre de participants, mais personnellement, je m'y suis tenu), trois œuvres de ma collection. il s'agit d'un dessin au crayon, accompagné d'un collage de tarlatane sur papier photographique, dû à Gilles Manero, d'un dessin plus ancien de l'Islandais Alfred Flóki (dont j'ai parlé naguère sur ce blog) et d'un dessin d'un anonyme, vraisemblablement du XIXe siècle, présentant quatre personnages caricaturaux énigmatiques (j'en ai également déjà parlé sur ce blog lorsque je venais de l'acquérir).
Anonyme du XIXe siècle, sans titre, crayon graphite sur papier, 24 x 34 cm, sd. Photo et coll. B.M.
Autour de ce dernier, le groupe au cours d'une de ses réunions hebdomadaires a proposé un jeu à certains de ses membres et amis. Que s'est-il passé "une heure après" sur la scène où se trouvent les quatre personnages de mon dessin? Les résultats de cette "heure d'après" seront présentés dans l'exposition de St-Ouen. Enfin, j'ai également prêté un dessin collectif fait par mézigue en compagnie de Guy Girard et de feue Sabine Levallois.
L'expo dure du 19 septembre au 20 octobre. On vous attend nombreux au vernissage le jeudi 19 à partir de 18h30. A signaler le jeudi 3 octobre une projection de "surprises cinématographiques" (je me suis laissé dire qu'il s'agirait de dessins animés d'inspiration surréaliste).
L'expo poursuivra ensuite sa route, pour une majeure partie des œuvres présentées chez Amarrage, à la Maison André Breton animée par l'association La rose impossible à Saint-Cirq-Lapopie du 25 octobre au 22 novembre (inauguration le vendredi 25 octobre à 19h)
16:13 Publié dans Anonymes et inconnus de l'art, Art naïf, Art singulier, Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : dessin surréaliste, galerie amarrage, guy girard, régis gayraud, bruno montpied, créateurs anonymes, anonymes de l'art naïf, gilles manero | Imprimer
10/08/2019
Réhabiliter l'art naïf de qualité, trier le mauvais grain de l'ivraie...
Louis-Auguste Déchelette
Erich Bödeker, Autoportrait assis sur une chaise, musée de Thurgovie, Suisse.
Erich Bödeker, groupe, photo transmise par les Amoureux d'Angélique.
Erich Bödeker, Famille royale (?), photot transmise par les Amoureux d'Angélique.
Bruno Bruno, Romantica, huile sur toile, 65 x 50 cm, Lyon, 1973, ph. et coll. Bruno Montpied ; ce tableau a été chiné à l'origine par Jean-Louis Cerisier qui a eu la gentillesse de me le céder.
L. Plé, sans titre (un homme en train de se noyer), huile sur toile, 22,5 x 33,5 cm, sd (milieu XIXe siècle ?), ph. et coll. B.M.
Abram Topor, un paysage, collection privée région parisienne (Abram était le père de Roland Topor), photo B. M.
E. Daider, Le Grand bal, bas-relief en plâtre peint, oeuvre découverte par Claude Massé, don famille Michel, Atelier-Musée Fernand Michel,1970 ; ph. B.M. ; cet auteur est inconnu, ce me semble dans le corpus connu de l'art naïf, du moins dans celui qui a été circonscrit par les livres de Jakovsky ou de Bihalji-Merin ; de celui-ci, on consultera toujours avec fruit, pour se faire une idée des plus qualitatives et variées, son monumental ouvrage, rédigé en compagnie de Nebojša-Bato Tomašević, L'Art naïf, Encyclopédie mondiale, paru chez Edita en 1984.
12:47 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art naïf, Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (14) | Tags : art naïf, art brut, surréalisme et art naïf, déchelette, louis roy, trouillard, séraphine, fejes, bosijl, réalisme intellectuel, beranek, trillhaase, erich bödeker, anonymes naïfs, bruno bruno, anatole jakovsky, otto bihalji-merin, abram topor | Imprimer
13/06/2019
Quand André Breton définissait l'art brut...
Dédicace à un vieil ami qui refuse de comprendre de quoi il retourne quand je parle d'art sans artistes...
André Breton, définit un jour, de façon brève, l’art brut à sa fille Aube.
Voici dans quels termes, en effet, dans sa lettre du 12 octobre 1948, Breton décrit son projet d'Almanach de l'art brut à sa fille, alors âgée de treize ans :
"Tu te demandes peut-être ce que ça peut être que l'art brut? Cela groupe tous les tableaux et objets que font quelquefois des gens qui ne sont pas artistes : par exemple un plombier-zingueur, un jardinier, un charcutier, un fou, etc. C'est extrêmement intéressant". (Passage souligné par moi)
2009.
14/05/2019
Rue de Seine ou rue Elzévir, à Paris, deux façons de découvrir l'art imaginatif, singulier ou brut
La rue de Seine, depuis quelque temps, voit régulièrement de l'art brut, ou singulier, voire "outsider" pour parler franglais comme à la galerie Hervé Courtaigne¹, se présenter sur ses cimaises, est-ce le début d'une tache d'huile?
En face de chez Courtaigne, on peut voir ainsi en permanence des bruts et de l'art populaire de curiosité dans la petite galerie qui fait l'angle avec la rue de l'Echaudé de Laurent de Puybaudet (42 rue de Seine, www.laurentdepuybaudet.com). Plus loin, dans la galerie Les Yeux Fertiles, animée par Jean-Jacques Plaisance et Benoît Morand (27 rue de Seine), on aime aussi de temps à autre glisser un "brut" (Charles Boussion, Thérèse Bonnelabay, Madge Gill ou Gabritschevsky) parmi des surréalistes historiques (Jacques Hérold par exemple), ou quelques visionnaires (Fred Deux), voire quelques grands Singuliers (comme Yolande Fièvre, Ursula, Philippe Dereux... Marilena Pelosi à l'occasion). Dans l'ensemble, ces galeristes restent cependant prudents, préférant miser sur des valeurs déjà consacrées dans le milieu des amateurs d'art d'autodidactes inspirés. C'est le cas avec l'exposition Bruts et Raffinés, apparemment, qui commence bientôt, dans deux jours, le 16 mai et qui s'achèvera le 16 juin à la galerie Hervé Courtaigne.
Les artistes ou créateurs présentés sont Anselme Boix-Vives, Jacqueline B. (Jacqueline Barthes), Gaston Chaissac, Ignacio Carles-Tolrà (dont il y a eu récemment une rétrospective au Musée de la Création franche, et dont il y aura une exposition très prochainement, à ce que m'a dit mon petit doigt, à la galerie de la Fabuloserie-Paris, dans la rue Jacob qui est perpendiculaire à la rue de Seine...), Philippe Dereux, Fred Deux, Gaël Dufrêne, François Jauvion, Yolande Fièvre, Antonio Saint-Silvestre, André Robillard (incontournable...), Robert Tatin, Augustin Lesage, Germain Vandersteen, Pépé Vignes, et Scottie Wilson. Cherchez les véritables bruts dans le tas... Et amusez-vous à rendre à César ce qui appartient à César (rien à voir avec le Nouveau Réaliste spécialiste des compressions) sur la mosaïque de l'affiche courtaignesque ci-dessus... A part Dufrêne, récemment mis en avant par la galerie, et peut-être cet Antonio Saint-Silvestre que personnellement je ne connais pas, les autres sont comme on le voit un peu connus déjà...
Affiche de l'exposition prochaine de l'Escale Nomad rue Elzévir ; oui, je sais, c'est pas très alléchant, mais soyez curieux, ne vous arrêtez pas à ce pauvre habit, et vous ne serez certainement pas déçus...
Sur la rive droite, se tiendra, plus confidentielle, une seconde exposition intitulée assez immodestement, je dois dire – quoique probablement avec humour mégalo...– "Petit tour du monde de l'art brut" par Philippe Saada, dans le cadre de sa galerie ambulante, Escale Nomad. Il loue la galerie Six Elzévir (au 6 de la rue Elzévir comme de juste... L'adresse est dans le nom de la galerie ; on est dans le Marais, 3ͤ arrondissement parisien) du 4 au 9 juin prochains. Cette fois, Philippe Saada est parti un peu plus loin que l'Inde et le Maroc, ses terrains de "chasse" de prédilection (même si le Maroc est encore présent dans cette expo avec Babahoum et deux créateurs apparemment nouveaux pour moi). Il annonce des trouvailles réalisées en Belgique, aux USA et au Japon (il est parti loin, ce coup-ci, Escale Nomad devient globe-searcher d'art brut). Je ne peux pas dire grand-chose des créateurs annoncés à part Babahoum que j'apprécie particulièrement et dont j'ai souvent parlé sur ce blog, voir en suivant ce lien... C'est une galerie et un dénicheur à suivre, prenant des risques avec tous ces noms inconnus (et de plus, les déguisant sous des affiches vraiment trop moches!). Mais suivez mon conseil, allez-y jeter un œil... C'est souvent derrière cette discrétion très particulière que se cache le pot-aux-roses...
Babahoum, dessin aux crayons et à l'aquarelle (?) sur papier, 26 x 37 cm, vers 2018, ph. et coll. Bruno Montpied.
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¹ Dans le laïus de la galerie Courtaigne, il nous est dit ceci à propos des "outsiders": "Dubuffet a affirmé que les artistes "outsider" (même si le nom n'existait pas à son époque, évidemment), en échappant à la "culture" des mouvements établis, étaient les dépositaires de la véritable innovation qui est l'essence du travail artistique." Rappelons tout de même que le terme d'art outsider a été inventé par l'ancien surréaliste Roger Cardinal en 1972 à l'occasion d'une expo montée en Grande-Bretagne. Il servait à englober à cette époque aussi bien l'art brut que l'art d'artistes contemporains autodidactes et marginaux. Dubuffet était encore vivant à l'époque (il meurt en 1985)... Donc le nom d'outsiders existait bien "à son époque"... Les Singuliers de l'art, titre de l'expo de 1978 au musée d'art moderne de la ville de Paris, au titre trouvé paraît-il par Alain Bourbonnais, au fond, était un terme synonyme des outsiders de Roger Cardinal. Ce dernier terme pourrait se traduire par art alternatif.
21:49 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art singulier, Art visionnaire, Galeries, musées ou maisons de vente bien inspirés, Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art singulier, outsiders, art brut, art visionnaire, surréalisme, galerie hervé courtaigne, galerie laurent de puybaudet, charles boussion, galerie les yeux fertiles, escale nomad, philippe saada, babahoum | Imprimer
07/05/2019
Avec le printemps, revient le festival Hors-champ du "film d'art singulier", le 22e du nom...
C'est à Nice, en trois lieux, que l'association Hors-champ, animée par Pierre-Jean Wurst et quelques autres acolytes restant usuellement dans l'ombre, monte son festival annuel, dans les tout premiers jours de juin. Voici l'affiche de cette 22e édition...
Trois lieux, disais-je, la Bibliothèque municipale Louis Nucéra, la librairie Masséna et l'auditorium du Musée d'art moderne et d'art contemporain... En effet, au départ le festival n'était prévu que pour le samedi, avec une programmation se voulant foisonnante et multiple – ce qui avait pour conséquence de la part de son programmateur de sélectionner avant tout des films courts pour pouvoir en placer un maximum dans la matinée et l'après-midi ; de plus une programmation variée et multiple a l'avantage de moins fatiguer les spectateurs... Mais, à la longue, plusieurs réalisateurs, auteurs et amateurs de cinéma documentaire (les fictions sont toujours "blacklistées" en effet, on ne sait pourquoi, la durée de ces films-là n'en étant pas la seule cause ; on sait qu'il existe de nombreux films de fiction ou des "biopics" sur des auteurs d'art brut ou d'art naïf, Ligabue, Aloïse, Séraphine, récemment Cheval, Pirosmani...). ont fait valoir que Hors champ pourrait tout de même faire un effort du côté des moyens métrages (50 minutes) voir longs métrages (il n'y en a pas eu des masses jusqu'à présent, un de 90 minutes environ, sur Robillard, l'année dernière, d'Henri-François Imbert, et un tout récemment (mars 2019) de l'animateur de ce blog (Bruno Montpied) et de Jacques Burtin, intitulé Eric Le Blanche, l'homme qui s'enferma dans sa peinture, de 80 minutes environ, consacré à une nouvelle découverte d'un peintre intime s'étant exprimé en partie sur les murs intérieurs de son logis – j'y reviendrai dans les semaines qui viennent, car là aussi il y aura projection publique ; j'ai mise en ligne l'année dernière une photo de ses fresques dans la note qui se cache sous ce lien).
Le programme...
A ne pas manquer dans cette programmation, projeté à la bibliothèque Nucéra : le film de Luc Ponette sur Gabritschevsky (que l'on peut trouver en DVD dans le catalogue de l'exposition de 2018 à la Galerie Chave), ce Max Ernst spontané, interné pendant près de 40 ans en Allemagne, plus près du surréalisme que de l'art brut. Ne manquez pas non plus un film, plus merveilleux encore, le court film sur une révélation bien peu connue par nos contrées, l'Ecossais Angus Mc Phee, tisseur d'objets en herbe séchée, lui aussi disponible en DVD. Si l'on veut savoir comment se définit l'art brut (je pense à un commentaire récent de M. Kolotoko), eh bien, là, on y est en plein. En guise d'hommage à Jacques Trovic récemment disparu, sera (re?)projeté le film de Jean-Michel Zazzi qui lui avait été consacré (où l'on aperçoit le célèbre mais discret Pierre-Jean). Le petit film d'animation de Jeunet et Segaud est tout à fait charmant et sympathique. Deux films de Mario Del Curto et Bastien Genoux, sur des créateurs que je ne connais pas ne peuvent que susciter la curiosité car ces auteurs nous ont habitué depuis longtemps à leur curiosité bien orientée.
10:42 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art naïf, Art singulier, Cinéma et arts (notamment populaires), Confrontations, Environnements populaires spontanés, Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : association hors-champ, mamac de nice, pierre-jean wurst, cinéma et arts populaires, art brut, festival du film d'art singulier, gabritschevsky, jacques trovic, del curto et genoux, angus mac phee, éric le blanche | Imprimer