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17/12/2023

A François Monthoux, jeune poète de l'immédiat, toute notre admiration!

       Merci à Darnish pour m'avoir fait découvrir ce jeune poète inspiré et quelque peu naïf qui vit en Suisse, en pays vaudois (où l'accent est si joli), tel un bienheureux avec son chien, ses parents charmants et compréhensifs (il ne gagne pas sa vie, il n'a jamais aimé l'école...): François Monthoux :

Film "Nietszche, la glaise et les fourmis" de Marie-Emilie Catier

11/11/2023

Cagnotte à faire grossir pour que se réalise un film sur Picassiette

      https://www.proarti.fr/collect/project/le-grand-reve-disi...

    Ci-dessus donc le lien et le teaser (la bande annonce, en bon français...) pour aller voir si les lecteurs de ce blog veulent ajouter leur morceau de vaisselle cassée au projet de faire un film sur Raymond Isidore, dit Picassiette. Personnellement, je me retiens, cherchant moi-même des sous pour financer mon prochain livre aux éditions du Sandre (qui sera un prolongement/variante au précédent livre, le Gazouillis des éléphants, qui fut édité à une époque où les subventions (mécènes, régions, état) existaient encore...). 

    A signaler, en regardant la bande-annonce, que l'on y rencontre une "animation" de Raymond Isidore, qui m'intrigue. Est-elle basée sur des photographies, a-t-on engagé un sosie? On le fait parler aussi... tout cela rend perplexe.

09/11/2023

Alain Nahum, "pour tout levier, un mouchoir"

      Alain Nahum, les passants qui croisent par cette colonne déroulée depuis 2007 dans le secret de l'océan Internet, l'ont peut-être déjà repéré. Je l'avais déjà évoqué pour un recueil de photos sur les images trouvées (Paris, passages piétonniers) dans les bandes de passages piétonniers paru aux éditions Travioles en 2002. Alain-Nahum-passages-piéton.jpg L'évocation se cachait au sein d'une note sur la poésie de hasard. C'est que cette catégorie me mobilise depuis fort longtemps. J'aime à recueillir mes propres découvertes photographiques (j'ai, je le reconnais, moins de métier que M. Nahum, mais le regard est semblable) quant aux paréidolies en tous genres que nous fournit le hasard des rues ou celui de la nature. J'aime aussi à héberger les paréidolies recueillies par d'autres amateurs.

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Couverture du nouveau livre d'Alain Nahum, paru aux éditions l'Œil de la Femme à Barbe.

 

    "Photographe urbain, Alain Nahum s'intéresse aux bribes d'histoires humaines et saisit les traces et vestiges qui racontent notre monde, souvent à notre insu: affiches arrachées sur les murs, restes de petites annonces collées sur les gouttières, passages piétonniers marqués par l'usure des roues et des chaussures, reflets des passants sur les trottoirs et mouchoirs en papier abandonnés..." (Extrait de la présentation de l'artiste dans le livre Lien rouge. Akai Ito, 2023).

     L'album paru récemment à l'enseigne de l'Œil de la Femme à Barbe (Ghislaine Verdier) part cette fois de mouchoirs en papier abandonnés sur les trottoirs de la nuit parisienne (pour alimenter l'œil du photographe, il paraît moins interdit de les jeter sur le bitume, par conséquent...!). Détrempés, ramollis, piétinés avec l'empreinte des semelles dessus, déchirés, triturés au petit bonheur des divers avatars de la circulation, contrastant par leurs blancheurs douteuses avec le noir asphalté et nocturne, ils représentent en effet, pour celui qui sait voir au-delà des apparences, un petit trésor esthétique involontaire.

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Mouchoir écrasé sur un trottoir, dans la partie du livre intitulé "Papiers de nuit", photo Alain Nahum, extrait de Lien Rouge. Akai Ito.

 

       Alain Nahum en a recueilli, et parfois retravaillé plusieurs (ce qu'il ne faut pas trop recommander, la trouvaille brute paraissant souvent, au final, plus forte que ce que la main de l'artiste pourra orienter ; ce n'est pas Georges-Charles Waintraub, qui collectait des objets de hasard, dans les années 1980, en les collant sur des cartes pliantes, en refusant d'y adjoindre la moindre retouche, en véritable puriste (voire intégriste!) du ready-made de hasard, qui m'aurait dit le contraire...). Le livre à l'Œil de la Femme à Barbe en publie plusieurs tels quels.

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De bien curieux fantômes...

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Un lien rouge est ici figuré en dessous des "fantômes" pour évoquer la relation qui unit ces êtres.

 

         Mais Nahum a voulu aller plus loin que cette seule captation de la poésie du hasard. Il a organisé certains de ses "fantômes" trouvés sur bitume en faisant écho à une tradition japonaise du lien, le "en ga aru", qui explique les "liens familiaux, amoureux, amicaux" entretenus dans la vie présente par de "précédentes rencontres lors d'existences passées". "Si le hasard nous ballotte au gré d'un destin qui nous échappe, le "en" nous ancre dans les lieux et auprès des êtres qui de tout temps sont faits pour nous" (cité par Corinne Atlan dans Le Pont flottant des rêves, éditons de la Contre Allée, 2022). Pourquoi pas, même si la philosophie fataliste qui s'y exprime me laisse, je dois dire, un peu, beaucoup, perplexe?

        Par ailleurs, je vois dans cette orientation du ciné-photographe (car la profession de cinéaste de Nahum a certainement une responsabilité dans le fait de l'avoir poussé à imaginer un jeu de relations entre des figures collectées sur les trottoirs), un autre avatar du choix de retravailler certaines images trouvées (en rajoutant peut-être des yeux, des bouches par un simple trait, mince, mais tout de même rajouté?) que je signalais ci-dessus. De plus, je trouve que dans l'édition du livre, la façon de représenter le lien, par un rouge un peu trop vif, contraste par trop avec la matière de hasard des mouchoirs. Un blanc, voir un gris contrasté, n'auraient-ils pas été plus adaptés? Toujours est-il que l'on perd avec ce fil rouge (un peu trop cousu de fil blanc...), un peu, beaucoup, de la poésie brute du mouchoir trouvé initialement. C'est Georges-Charles Waintraub qui ne serait pas content, s'il revenait parmi nous...

Pour se procurer le livre, on se connecte avec la maison d'édition L'Œil de la Femme à Barbe: https://loeildelafemmeabarbe.fr, ou bien le site Librairies.com. On peut également écrire à l'éditeur : lafemme@loeilabarbe.fr, ou téléphoner au +33(0)681 221 687. Il est possible sans doute aussi de trouver le livre à la librairie de la Halle Saint-Pierre, rue Ronsard dans le 18e arrondissement parisien. D'autre part, on peut aussi prendre connaissance des trois haïkus vidéographiques qu'Alain Nahum a insérés sur Vimeo :

Lien rouge from Nahum Alain on Vimeo.

 

16/07/2023

Conserver (on non) les environnements populaires spontanés: 4e et 5e volets du Vidéoguide de la Nouvelle-Aquitaine sur les Inspirés du bord des routes

      Viennent d'être mis en ligne le 4e et le 5e volet de la série éditée par l'Inventaire de la Nouvelle-Aquitaine et pilotée par les conseils scientifiques de Yann Ourry à propos des inspirés du bord des routes en Nouvelle-Aquitaine. Ces petits courts-métrages sont toujours réalisés par Juliette Chalard-Deschamps, avec des prises de vue par Arnaud Deplagne.

    Dans le 4e "opus", on me retrouve comme dans le premier volet, toujours avec mon superbe pull (!), répondant en quelque sorte à l'interview d'Hélène Ferbos qui, pourtant, eut lieu plusieurs semaines après le mien, et qui figure ici en tête de gondole. Il s'est agi d'évoquer quelque peu le sujet compliqué des mesures conservatoires – ou non – qui peuvent être mises en place pour prolonger autant que faire se peut ces créations de plein vent, réalisées par des auteurs qui ne se souciaient guère de la pérennité de leurs travaux exécutés dans l'immédiat de leur vie. Est-ce humilité de leur part? Sans doute pour certains, mais ce n'est pas assuré dans tous les cas. Plusieurs créaient dans l'immédiat de leurs temps de loisirs, hors vision artistique, hors système des Beaux-Arts, sans se préoccuper de la postérité, qui est un paramètre spécifique aux artistes professionnels plutôt.

       Et, donc, vouloir – ce qui est naturel, on aime à conserver ce que l'on aime – prolonger et conserver ces sites et réalisations naïfs, plus rarement bruts, pose divers problèmes que nos interviews croisées, à Hélène et à moi, effleurent seulement. Problèmes qui ont trouvé des solutions ici et là, assez variées, qu'il m'est arrivé de décrire sur ce blog à l'occasion, et surtout dans mon inventaire (désormais épuisé, trouvable en bibliothèque ?), Le Gazouillis des éléphants, paru en 2017 aux éditions du Sandre.

     Hélène Ferbos indique cependant qu'en tant que conservatrice et directrice du Musée de la Création Franche à Bègles (réouverture prévue en 2025), elle reste favorable à la sauvegarde de parties et d'éléments extraits de divers environnements. Par exemple, le Musée a très récemment acquis  le vélo couvert d'une toile d'araignée de colifichets d'André Pailloux que j'avais révélé et éclairé dans Eloge des Jardins anarchiques en 2011. L'affaire fut réalisée grâce à la médiation d'un autre admirateur de ce vélo, Philippe Lespinasse. Je suis très favorable à ce genre d'extraction, quand il n'y a pas d'autres possibilités de sauvegarder l'intégralité d'un site sur place. Bien sûr, les pièces extraites se doivent d'être alors accompagnées de contextualisations photographiques ou filmées, voire de témoignages écrits ou enregistrés dus aux auteurs et à leurs médiateurs, etc.

 

4e volet du Vidéoguide Nouvelle Aquitaine consacré aux Inspirés du bord des routes et diffusé sur YouTube.

 

     Dans  le film que j'avais co-écrit avec son réalisateur, Bricoleurs de paradis, dans la séquence consacrée à André Pailloux et son vélo, je lâche un peu vite le mot de "patrimonialisation" appliqué à ces créations environnementales éphémères. Il me parut dès l'achèvement du film un peu trop sacralisant, et si j'avais pu assister au montage, ou du moins, voir une première épreuve du montage final, j'aurais plaidé pour qu'on l'enlève. Car utilisé comme cela, isolé, il donne l'impression que je défends cette intégration au patrimoine de façon généralisée pour tous les sites (il y a en effet un effet pervers de la patrimonialisation à tout va ; je me souviens d'un village du Queyras, Saint-Véran, où l'on exhibait deux paysans en train de manger leur soupe au fond d'une masure "à la manière d"autrefois"...). En l'occurrence, j'essayais avant tout de convaincre André Pailloux de songer un jour à léguer son vélo à une musée d'art populaire contemporain.

     Il a fini par se laisser convaincre, plusieurs visiteurs ayant sans doute poussé à la roue (c'est le cas de le dire) entretemps dans ce sens. Et tant mieux, après tout, Mais bonjour le travail des restaurateurs futurs dudit vélo... Tant ses matériaux, du plastique entre autres, pourront se révéler difficiles à maintenir en bon état... Sans compter le changement de statut de cette œuvre, issue de la vie quotidienne au départ, comme le pointe Hélène dans son interview, qui interviendra dans son élection au rang d'œuvre d'art, trônant peut-être sur un futur piédestal mobile, à l'entrée des collections de la Création Franche?

 

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Jardin et ses vire-vent d'André Pailloux à Brem-sur-Mer (Vendée) : le portail défendait l'allée hérissée d'une haie de vire-vent, menant au garage où se cachait le vélo extraordinaire de Pailloux ; photo Bruno Montpied, 2008.

 

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André Pailloux ayant sorti son vélo, devant le portail de son jardin ; ph. B.M., 2010 (durant le tournage de Bricoleurs de paradis)

 

     Le 5e volet du Vidéoguide de Nouvelle-Aquitaine concerne exclusivement le jardin de Gabriel Albert, cas unique d'environnement constitué de statues multiples conservé et restauré grâce aux efforts de la Région à laquelle il appartient désormais, après le legs primitif de l'auteur à sa commune de Nantillé (Charente). On y suit Yann Ourry décrivant d'un ton le plus neutre et avec un aspect le plus inexpressif possibles (par volonté sans doute de s'effacer au maximum derrière le créateur qui est pour Yann le vrai héros du film) le pourquoi et le comment du site qui recelait au départ 420 statues, dont certaines ont disparu à la suite de vols (ce qui n'est pas dit dans le film). Ce 5e volet contient à la fin un tout petit fragment de mon film Super 8 montrant le jardin dans l'état où il se trouvait en 1988, date de ma visite en compagnie de Christine et Jean-Louis Cerisier, ce qui nous avait permis de parler un peu avec Gabriel Albert, qui devait décéder douze ans plus tard.

30/04/2023

Quand aurons-nous une rétrospective de l'œuvre formidable d'Ovartaci?

          Je dois à Martine Bismuth, via José Guirao, l'information d'un petit sujet vidéo très synthétique diffusé par France 24 sur Youtube à propos de ce créateur danois hors du temps que fut Ovartaci, de son "vrai" nom Louis Marcussen, dont je trouve chaque reproduction de ses œuvres absolument fascinante. Le pseudonyme dont il s'était affublé veut dire "le plus important". Bien trouvé et très juste!

      Il est dit également dans le film ci-dessous (au titre par trop racoleur – "L'Art de la démence"...) que Dubuffet vint le voir dans son hôpital psychiatrique dans les années 1960. Je me demande si ce n'est pas par Asger Jorn – que Dubuffet fréquentait à cette époque et qu'il avait intégré à sa nouvelle Compagnie d'Art Brut siégeant rue de Vaugirard – que l'inventeur de la notion d'art brut était arrivé à la connaissance d'Ovartaci.

      Il serait de toute urgence de pouvoir en découvrir davantage en France à propos de ce personnage et de son œuvre (surtout cette dernière). Qu'attend-on, nom de d'là? Sa fascination et son admiration sans bornes pour les femmes, au point de le pousser à vouloir changer de sexe et à se mutiler, le fait rapprocher d'un Marcel Bascoulard, ce dessinateur hors pair qui vivait comme une sorte de semi clodo à Bourges, se faisant photographier dans des habits de femme, parce qu'il trouvait ces derniers plus seyants. 

 

06/04/2023

François Michaud (Creuse) et Antoine Paucard (Corrèze), deuxième film du Vidéoguide de l'Inventaire du Patrimoine de Nouvelle-Aquitaine

        Voici que la réalisatrice de la série sur les inspirés du bord de routes produite dans le cadre du Vidéoguide du Patrimoine de Nouvelle Aquitaine, Juliette Chalard-Deschamps, me fait suivre le second volet de cette série (le premier, on s'en souvient, a été mis en lien sur ce blog le 13 mars dernier), cette fois consacré à l'évocation des sculptures de François Michaud à Masgot dans la Creuse, site qui m'est cher, d'autant que je fus des premiers à le défendre et le faire connaître (dans Plein Chant d'abord dans les années 1990, dans un texte intitulé Le Ciment des rêves, puis dans le livre qui lui fut consacré par les éditions Lucien Souny dans ces mêmes années ; le texte que je lui consacrai dans ce dernier ouvrage fut repris ensuite, en 2011, dans mon livre Eloge des Jardins Anarchiques), mais aussi aux sculptures d'Antoine Paucard, présentées dans un abri vitré derrière la mairie de son village de Saint-Salvadour en Corrèze. Les deux hommes étaient tous deux maçons, tailleurs de pierre, ayant vécu chacun dans un siècle différent.

     François Michaud (1810-1890) est présenté dans ce film par le maire de Fransèches, la commune de rattachement de Masgot (qui est un hameau de fort belle allure, aux maisons de pierres probablement taillées par Michaud lui-même, dont les deux qui lui appartinrent et qu'il décora de statues à diverses périodes de sa vie), Daniel Delprato. Antoine Paucard (1886-1980), pour sa part, est également présenté par un maire, celui du village de Saint-Salvadour, Pierre-Marie Capy. Les deux sites bénéficient de vues aériennes prises par le drone piloté par l'excellent caméraman de la série, Arnaud Deplagne. Cette façon de tourner me fait rêver d'un inventaire des environnements de France qui se déroulerait ainsi, vu du ciel, allant d'un point à l'autre de l'Hexagone, comme pendant les retransmissions des étapes des courses cyclistes, telles celles du Tour de France par exemple!

      Dans son commentaire sur les œuvres d'Antoine Paucard, Pierre-Marie Capy donne des éléments d'information nouveaux par rapport à Paucard, en particulier lorsqu'il évoque le gisant que le sculpteur alla tailler dans les bois pour évoquer la tuerie de résistants dans le lieudit de La Servantie par les Allemands pendant la Seconde Guerre. Il nous apprend également que Paucard a laissé des photos derrière lui, montrant l'intérieur du petit musée où il avait disposé de son vivant ses statues aux bustes bardés d'inscriptions (Paucard a laissé 123 carnets remplis de poèmes, et un livre de souvenirs de voyages en URSS en 1933 ; il se voulait donc écrivain aussi bien que sculpteur). Ce musée, nous dit M. Capy, présentait une certaine muséographie, les statues étant orientées les unes par rapport aux autres, et, donc, le maire avance l'idée qu'il faudra en tirer une leçon pour la valorisation future de cet ensemble dans un autre musée.

 

 

       Concernant les sculptures de François Michaud, que je n'avais pas revues depuis quelque temps, il me semble, à voir ce film, qu'elles ont dû être soigneusement nettoyées de leurs mousses et lichens qui souvent après chaque hiver avaient tendance à perturber passablement leur appréhension par les visiteurs du hameau. Mais il m'a semblé qu'elles présentent désormais un aspect quelque peu usé, presque raboté, les détails d'expression ayant tendance à avoir été gommés... J'espère qu'il n'y a pas eu trop de zèle à vouloir les remettre comme à l'état neuf...

         J'ajoute que je n'ai été pour rien dans le commentaire de ce second film.

30/11/2022

Evocation et hommage à Jean-Marie Massou à la Halle Saint-Pierre le 4 décembre

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      Un livre sort sur Jean-Marie Massou (1950-2020), homme des bois, creuseur de galeries souterraines, chanteur de mélopées au fond de ses souterrains, prophète accessoirement (mais qui ne l'était pas dans les années 1970, 1980?) de la fin du monde et de l'urgence de ne plus faire d'enfants, interpelleur des media sur cette question (et particulièrment Mireille Mathieu, du moins à l'époque où je l'ai rencontré en 1987 ; on me dit que par la suite, il pensa plutôt à Brigitte Bardot et ses bébés phoques comme porte-paroles...), archéologue sauvage (ses trous, c'était parce qu'il était persuadé qu'il trouverait un nouveau Lascaux sous son bois), graveur de pictogrammes sur pierres parce qu'il ne trouvait pas de Lascaux justement, et qu'il avait entendu parler des signes gravés sur les rochers de la Vallée des Merveilles dans les Alpes du Sud... Et depuis quelque temps, depuis que des nouveaux amateurs du personnage se sont intéressés à lui, l'ont aidé, l'ont enregistré, ont reccueilli ses expérimentations graphiques diverses, Massou et devenu aussi un "artiste", selon cette terminologie que personnellement je continue à trouver confusionnelle (s'il était "artiste", tout le monde le serait, et à la fin des fins, le mot n'aurait plus le sens qu'il a aujourd'hui et deviendrait synonyme d'homme ; artiste, ce n'est pas qu'une pratique expressive, c'est aussi une raison sociale, une profession considérée comme un peu à part, de l'ordre d'une caste élitiste, ou maudite, selon les points de  vue, dans tous les cas, à part...).

 

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Des productions (collage, photos, pierre gravée, dessins) de Jen-Marie Massou exposées au cours d'une manifestation temporaire au LaM de Villeneuve-d'Ascq, ph. Bruno Montpied, 2018.

 

     Or, je trouve que les œuvres qui nous sont présentées, en particulier dans le livre de la Belle Brute and co, des gravures, des croquis sur ses enveloppes de cassettes audio, des dessins assez sommaires, des collages sans grande originalité, ses chants eux-mêmes (peut-être le meilleur de sa production), ressemblant à des cantiques détournés, ces artefacts déplacent le sens à tirer de l'existence de Massou. Ce ne sont pas ces pauvres schémas aux limites de l'informe qui font l'intérêt de ce personnage, c'est plutôt la conduite de sa vie, l'amour de sa mère, au point d'être allé chercher son cadavre au cimetière après sa mort, parce qu'il ne pouvait accepter sa chute dans le néant, c'est sa croyance aux extra-terrestres chargés après l'apocalypse qui ne pouvait manquer d'arriver selon lui (avait-il tort sur ce point?) de créer un monde radieux pour les survivants, son amour pour les minéraux, ses fouilles à la poursuite d'un rêve de civilisation préhistorique inconnue...

 

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Jean-Marie Massou et Gaston Mouly, filmés par Bruno Montpied, lors de notre rencontre à trois en 1987 ;  on aperçoit la poulie et la corde qui permettaient à Massou de remonter divers objets ou masses du fonds du puits qu'il avait creusé à mains nues, situé à côté de lui, caché par l'angle de prise de vue ; photogramme extrait de Jean-Marie Massou, un archéolo,gue sauvage, film Super 8 inclus dans B. Montpied,  Les Jardins de l'art immédiat, ensemble de seize petits films  tournés entre 1982 et 1992, disponibles à la bibliothèque Dominique Bozo du LaM à Villeneuve-d'Ascq, ou dans la Documentation de la Collection de l'Art Brut à Lausanne.

 

      Le livre sur Massou est édité par Knock outsider, la Belle Brute, et Art et Marges, et cela accompagne une expo toujours sur Massou dans ce même centre Art et Marges, à Bruxelles (elle se tient du 23 novembre 2022 jusqu'au 19 mars 2023).

          Bon, à Paris, à l'auditorium de la Halle Saint-Pierre, il y a de plus un petit événement pour marquer cette expo et ce livre, avec une conférence de la directrice d'un atelier pour handicapés mentaux (la S grand atelier), Anne-Françoise Rouche, qui aime plaider pour une mixité (encore la confusion...) ou un "décloisonnement" entre l'art brut et l'art contemporain (si l'art brut fut jamais enfermé dans des cloisons, ce fut lorsque Dubuffet tenta de le révéler et qu'on le regarda faire du bout des lèvres, en s'en moquant ; c'est l'establishment qui érigea des cloisons, pas ceux qui défendirent l'art brut avec les pauvres moyens dont il disposait - j'en fais toujours partie). Ce "décloisonnement" colle bien avec les menées des marchands et des galeristes, désireux d'élargir leurs clientèles...

 

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       Ce dimanche 4 décembre, il y aura de surcroît, dit le programme, et c'est le plus intéressant, la projection du très bon documentaire d'Antoine Boutet, le Plein Pays (2015). Voir l'annonce plus haut dans cette note. C'est à partir de 15h30 jusqu'à 17h.

19/09/2022

Une idée pour un autre Salon...

       Je ne suis qu'un écrivain et un artiste, et j'en ai marre de cette Outsider Art Fair qui nous revient depuis dix ans, avec son prix d'entrée pour élite friquée, et sa conception étriquée, parce que strictement mercantile, de la communication autour des arts spontanés et alternatifs.

    En fait, cette Foire disparaîtrait corps et biens, que je n'en souffrirai pas le moins du monde.

  Un Forum basé sur des principes différents, organisé et monté par des Français qui plus est, à un coût moins élevé, pas seulement axé sur le marché de l'art, mais où on inviterait, dans une conception infiniment plus large, des musées, des associations, des ateliers collectifs pour handicapés, des photographes, des architectes alternatifs, des libraires, etc. serait beaucoup plus intéressant à monter.

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Halle Saint-Pierre, 2e étage, exposition "Sous le Vent de l'Art Brut 2", 2014 ; à gauche des oeuvres à moi... ; photo Bruno Montpied.

 

   Quel local faudrait-il proposer pour un tel Forum? Eh bien, la Halle Saint-Pierre serait toute indiquée. Qu'elle soit installée au pied de Montmartre, aux lisières de quartiers populaires (la Goutte d'Or notamment), et de quartiers plus chics (la Butte Montmartre), me paraît tout à fait adapté aux substrats culturels des différentes formes d'expression que ce Forum réunirait et présenterait. Disposant d'un auditorium et d'un cafétaria permettant les échanges informels, elle autoriserait dans une seule unité de lieu toutes sortes d'animations, conférences, débats, présentations de films. Le forum pourrait durer une grosse semaine (dix jours), plutôt que les quatre malheureux jours de la Foire d'Art Ousider actuelle. Les prix de location pour les galeries et autres musées et associations concernés (qui tourneraient au fil des éditions) ne seraient pas trop élevés, ce qui éviterait que les prix des oeuvres en vente soient trop élevés, les participants craignant de ne pas rentrer dans leurs frais à la fin du Forum (ce qui est le cas actuellement pour les galeristes qui participent à l'OAF). Les musées, librairies, associations de défense des arts indigènes (entre autres), ateliers pour handicapés, collectionneurs, organisation pour l'auto-construction, etc., qui participeraient pour faire connaître  leurs passions et leurs activités, vendant au passage des catalogues d'expositions, procédant à des échanges divers et variés.

    On aurait davantage affaire en l'occurrence à une réunion ayant pour but la communication et l'échange autour de passions communes ou à découvrir qu'à une vulgaire foire de mercantis, qualification dans laquelle l'OAF est en train de se couler (à tous les sens du terme "couler")...

03/05/2022

"Trouvé sur le bord", la collection de Pavel Konečný vient faire un tour à Paris

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Couverture du dépliant édité à l'occasion de l'exposition, avec un texte de présentation de Terezie Zemánková (pas très bien traduit) et une mini bio de Pavel  Konečný.  

 

      Jusqu'au 5 juin, les amateurs d'art brut et d'art naïf tchèques (version populaire), passant par Paris et sa rive gauche, ou y résidant, pourront aller au Centre culturel tchèque qui se trouve rue Bonaparte, à deux pas de l'Ecole des Beaux-Arts, dans le VIe arrondissement, admirer de fort belles pièces prêtées par le collectionneur et ancien directeur du théâtre musical d'Olomouc, Pavel Konečný. C'est une petite sélection bien entendu, mais fort alléchante, que l'on peut voir actuellement au premier étage de ce Centre (le rez-de-chaussée étant occupé par une petite exposition de la galerie Arthur Borgnis, plus centrée sur des œuvres d'art brut tchèque, en deux dimensions, plus particulièrement dominée par des créateurs médiumniques, tels que Pecka ou Havlicek).

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Vue de la moitié de la salle consacrée à la sélection d'œuvres de la collection Konečný, ph. Bruno Montpied, 2022 ; dans le fond à gauche on aperçoit La Reine des eaux.

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Václáv Beránek, La Reine des eaux, 1972, ph. B.M., 2022 ; c'est la représentation d'un naufrage et de l'accueil rendu par les sirènes aux noyés, tandis que les survivants s'éloignent en barque en haut à droite...

 

     La totalité de la collection de Konečný comprenant 700 pièces, il n'était évidemment pas possible d'envisager autre chose à Paris, dans le petit espace disponible au centre culturel tchèque, qu'en extraire une petite sélection. Cette dernière est illuminée par la présentation en majesté de la très grande toile de Václav Beránek, La Reine des eaux (1972). Celui-ci est un artiste que  mes lecteurs ont pu déjà rencontrer sur ce blog, grâce à la note en deux parties, due à Emmanuel Boussuge, qui s'évertuait à nous présenter au mieux l'artiste en question, peu connu de ce côté de l'Europe (comme tant d'autres artistes des pays d'Europe centrale ou de l'Est appartenant pourtant autant à ce continent que ceux de l'Ouest), alors qu'il est très attachant, illustrant à merveille un art naïf de type onirique et visionnaire.

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Tableau de Václáv Beránek, de 1981, un qui n'était pas dans la note du blog citée plus haut... Ph. B.M., 2022.

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Autre partie de la salle d'exposition, avec une table au premier plan supportant diverses sculptures d'auteurs multiples: Andrej Hankovský, Ján Hadnagy, Vincenc Jahn, etc.

 

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Jan Labuda, un couple, avec une femme l'épaule couronnée d'une chouette, ph. B.M., 2022.

 

       C'est en effet tout le mérite de M. Konečný que de n'opérer aucune hiérarchisation – au rebours d'un Jean Dubuffet avec son art brut, selon lui plus mirifique que tout le reste de la créativité autodidacte – entre art brut, art naïf (de qualité onirique), et art populaire, n'hésitant pas non plus à y inclure des créations de plein air dues à des inspirés du bord des routes tchèques ou slovaques. De la figuration liée à la perception rétinienne, où entre pour beaucoup une distorsion due à l'interprétation subjective propre à chaque artiste, jusqu'au détachement presque complet, quasi "abstrait", d'un graphisme inventé, tel qu'Anna Zemankova, présente sur un mur de l'exposition, l'illustre parfaitement avec sa "botanique" parallèle, la collection de Pavel Konečný, commencée dès 1972, nous offre un bel éventail non orthodoxe de la créativité autodidacte.

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Martin Sabaka, "habitant-paysagiste" slovaque à Východná, photo Alan Hyža, 2014.

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Pavel Konečný édite toute une série de petits livres d'art consacrés à certains auteurs qui sont dans sa collection, ou pas ; il est également l'auteur d'un Atlas de l'art spontané que je n'ai hélas pas pu consulter (on trouve cependant sur le net le sommaire, et l'on peut ainsi constater qu'on y parle de Vaclav Levy que mon blog a déjà évoqué, en 2007, soit dès la première année de création de ce blog...)

 

      A signaler qu'il est également l'organisateur depuis quelques années (depuis 2012 exactement) d'un festival de films autour de l'art brut basé à Olomouc (une sorte de festival analogue à celui qu'organise l'association Hors-Champ à Nice à la fin du mois de mai – voir ici pour le programme de cette année), où il vit, où fut projeté il y a quelque temps le film Bricoleurs de paradis que j'ai écrit avec Remy Ricordeau. Autre information du reste, puisque l'occasion se présente de parler de ce dernier, notre film est à présent disponible en entier, gratuitement sur Youtube: https://youtu.be/8nNcORjRUZA ; à noter que le film commence aléatoirement – en tout cas pas au début réel du film –, mais il est possible de déplacer le curseur en remontant à son véritable départ heureusement).

 

28/03/2022

"Les Solèls de Jacques Trovic", un film en préparation

      Cela fait un bout de temps que la réalisatrice Francine Auger-Rey m'a parlé de son projet de film sur Jacques Trovic, ce brodeur et "tapissier" autodidacte dont j'ai déjà parlé ici (en particulier pour annoncer sa disparition en 2018), que j'avais rencontré une seule fois personnellement, à Anzin, sa ville natale, en compagnie de Juliette et Jean-Louis Cerisier en 2009. Ce film, intitulé les Solèls de Jacques Trovic, long de 70 minutes, devrait bientôt sortir. Les "solèls", mot de patois du Nord, la région à laquelle Trovic était profondément attaché, renvoie aux soleils par lesquels il commençait toujours ses oeuvres en patchworks multicolores, sans doute – comme on le devine – parce que l'astre en question espaçait par trop ses apparitions dans ce pays de mines...

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Jacques Trovic, Combat de coqs, 1994, vue prise à l'exposition "Sur le Fil", à la Folie Wazemmes, à Lille, en 2009, ph. Bruno Montpied.

 

     Francine Auger-Rey a confectioné un site internet où l'internaute intéressé trouvera toutes sortes d'informations, et pourra également particper financièrement à la production du film: https:

//docu-solels-de-trovic.org/

       Pour ceux qui ne voudront pas prendre le temps de suivre ce lien, voici le résumé du projet filmique que m'avait transmis la réalisatrice il y a quelque temps:

Résumé du documentaire de création :  ″Les Solèls“ de Jacques Trovic

Ce documentaire raconte l’histoire d’un homme né en 1948 dans une ville du Nord : Anzin, cité de la fin des mines et de la sidérurgie moribonde. Dès l’adolescence, sur la table de la cuisine obscure de sa maison de coron,  il fait jaillir, malgré ses entraves et son milieu rude et modeste, une œuvre lumineuse et colorée. Ses mosaïques, ses tapisseries composées de patchworks et de broderies montrent un univers joyeux dont Trovic pressent qu’il est en train de s’éteindre. Son handicap, son épilepsie ont-ils été la circonstance fondatrice de son œuvre mais aussi ce qui brisa douloureusement son aspiration à rejoindre la communauté humaine ordinaire ? Cette tension sera, avec son indéfectible attachement à l’histoire, la culture, de son Nord natal, au cœur de la problématique de ce documentaire.

 

30/09/2021

Les Journandises, manifestation artistique sur le campus de Bourg-en-Bresse et ma venue le 12 octobre

journandises 2021.jpg

      Je dois dire, qu'avec l'âge, je m'y perds de plus en plus dans les annonces que je reçois. Les "Journandises", par exemple, dans le cadre desquelles je suis invité le 12 octobre prochain à venir débattre avec qui veut (des étudiants a priori) d'art brut, d'art naïf, d'art populaire, et, accessoirement, à partir de la maison peinte d'Eric Le Blanche dont je montrerai l'intérieur, via le film que j'ai écrit et coréalisé en 2019 en autoproduction (y a marqué "Zoom back productions" dedans, mais c'est un mot bidon)... C'est une manifestation qui se tient apparemment de manière régulière (du moins quand il n'y a pas de pandémie par-ci, par-là), dans une bourgade appelée Journans (c'est la première fois, n'étant pas de la région, que j'en entends parler ; mais comme il y a internet, maintenant, tout le monde fait dans l'implicite et comme si tout le monde savait ; donc, je regarde sur internet moi aussi et je vois que Journans, c'est dans l'Ain (hein? c'est au sud-est de Bourg-en-Bresse (prononcer Bourk-en-Bresse), et donc au nord-est de Lyon aussi). Mais je ne sais trop pourquoi, il se trouve que dans le cadre de ces Journandises, (la manifestation qui se tient à Journans s'appelle comme ça, donc), qui, elles-mêmes cette année, se tiennent dans le cadre de la Biennale Hors-les-Normes de Lyon (plus communément appelé BHN : un acronyme, ça fait toujours bien dans le décor) - ce qui accentue la complexité de la chose, tout de même, non? -, la manifestation (une expo de trois personnes, Jean Branciard, Hanna Chroboczek et Marcel Vinsard (1930-2016 ; un créateur sur qui j'ai abondamment renseigné par un livre et par des notes sur ce blog) dont c'est le vernissage pas plus tard qu'aujourd'hui, une rencontre avec mézigue autour d'un film donc (le  12 octobre à 18h30), et le 14 octobre, un atelier avec Jean Branciard qui incitera les étudiants de Bourg à fabriquer des bateaux à partir de matériaux recyclés) se tient non pas à Journans, ni à Lyon, mais sur le campus de l'université de Bourg-en-Bresse (je ne savais pas qu'il y avait une université là-bas, ne pensant personnellement qu'aux poulets quand j'entends le mot Bresse, qu'on me le pardonne, SVP...). Avouez qu'il y a de quoi s'y paumer, non, quand on n'est pas familier des secrets des dieux (c'est-à-dire des animateurs de la BHN), non?

     Donc... A bientôt?

13/08/2021

Aube Breton-Elléouët expose ses collages avec les tableaux de coquillages de Youen Durand

     L'association des Amis de Youen Durand,  ce Breton qui dirigeait la Criée de Lesconil, auteur d'une trentaine de petits chefs-d'oeuvre en mosaïque de coquillages, continue son travail méritant de passeuse de mémoire au service de l'art d'un autodidacte de grand talent. Pour cet été, du 17 août au 5 septembre 2021, elle a eu l'idée de lancer une invitation à Aube Breton-Elléouët, qui a des attaches en Bretagne (son mari était le poète et peintre breton Yves Elléouët, disparu trop tôt), afin qu'elle prête des collages. Le goût du merveilleux est le point commun qui rassemble les deux créateurs, pourtant de cultures différentes. Aube, fille d'André Breton comme on sait, si elle est aussi la fondatrice de la collection de DVD, Phares, consacrée à 24 figures du surréalisme, "éditée à fonds perdus", montre régulièrement sa sensibilité à l'égard des autodidactes qui vont dans le sens du merveilleux (elle était présente ainsi à la première, à la SCAM, du film "Bricoleurs de paradis" que j'ai co-écrit avec son réalisateur Remy Ricordeau en 2011).

Invitation vernissage YD invite AEB recto.jpg

Flyer verso YD invite ABE.jpg

      Parmi les collagistes actuels, Aube Elléouët représente une figure éprise de la quête d'une image la plus unitaire possible, allant dans le sens du poème visuel merveilleux. Le n° 150 de la petite revue Regard, de l'artiste Marie Morel, vient de lui avoir été justement consacré, en avril dernier, avec une minuscule interview illustrée de plusieurs belles reproductions de ces collages. Je ne suis peut-être pas très bien informé à ce sujet, mais il me semble que les interviews d'Aube Elléouët ne sont pas fréquents.

*

      Ici, cependant, je dois faire une parenthèse au sujet de ce numéro de Regard. Il contient une petite brochure encartée, qui reproduit des petits textes d'un M. Francis Pellerin qui à un moment se met à parler d'Eric Le Blanche... Dont les lecteurs de ce blog – ou de la revue Création Franche, ou encore de la revue Artension, auxquels j'ai donné des articles pour faire connaître ce peintre et dessinateur introverti et secret, qui avait peint l'intérieur de sa maison en Vendée dans le plus grand secret – se souviendront que j'ai déjà abondamment parlé (en lui consacrant de plus, en mars 2019, un film en auto production, L'Homme qui s'enferma dans sa peinture qui fut programmé à la Halle Saint-Pierre au mois de juin suivant).

Flyer film sur ELB par BM à la Halle SP.JPG

Le flyer que j'auto-éditai en juin 2019 pour présenter mon film sur Le Blanche à l'auditorium de la Halle Saint-Pierre et en débattre avec le public ; la réalisation du film est signée dans le générique de mon nom et de celui de Burtin, mais ce dernier est surtout participant de ce film en tant que conseiller technique, car bien qu'autodidacte, il maîtrise fort bien cet aspect dans la création d'un film ; c'était entre autres raisons (il fut un ami aussi autrefois, avant, hélas, de devenir une grenouille de bénitier) pour cela que j'avais recouru à lui, pressé que j'étais par le risque d'effacement de l'intérieur de la maison de Le Blanche, dont m'avaient alerté les cousins d'Eric.

 

      Ce M. Pellerin, hélas, est fort mal informé. S'il l'avait été, je veux croire qu'il n'aurait pas écrit ces mots dans ce petit livret de Regard: "...Le peintre et cinéaste Jacques Burtin s'investit totalement depuis quelques années afin de faire connaître cette œuvre hors normes, exceptionnelle. il a réalisé des films (que j'ai vus), a créé une association, organisé des expositions (une, d'importance, devrait avoir lieu cet automne à la Vendéthèque de la Châtaigneraie) et construit un site internet que je vous conseille vivement de visiter..." Quelle prétention, et quel tour de passe-passe...

    Il faut rétablir quelque peu la vérité et mettre certains points sur les i. D'abord il est tout à fait exagéré de présenter "l'œuvre" d'Eric Le Blanche comme "hors-normes" (au départ Le Blanche s'inspirait de la peinture gréco-latine...) et "exceptionnelle" (ce n'est pas par la qualité de ses peintures et dessins que Le Blanche est intéressant – comme je le dis dans mon film de mars 2019, film qui a précédé ceux de Burtin qui s'est empressé de faire les siens pour supplanter la communication que j'avais initiée autour de Le Blanche (à la suite de la demande de sa famille) – c'est par son comportement de peintre introverti projetant son imaginaire et ses admirations artistiques tout seul à l'intérieur de sa maison entre deux séjours à l'hôpital.

      M. Burtin ne s'investit pas depuis "quelques années" (cette façon de s'exprimer donne l'impression que Burtin s'occupe de Le Blanche depuis toujours et surtout seul, ce qui est faux (en réalité c'est moi qui lui ai fait découvrir l'existence de la maison de Le Blanche en août 2018, en l'engageant à tourner des images pour le film que je désirais faire ; j'étais venu un mois auparavant, en juillet 2018, faire tout un reportage photo à la demande de la famille, Soizic et Jean-Louis Sapey-Triomphe, que j'avais rencontrée à la Halle Saint-Pierre en juin 18). Quand M. Pellerin parle ainsi de Burtin, il valide, peut-être sans le savoir, une imposture qui me paraît en train de se mettre en place à l'instigation de ce même Burtin (ce dernier cherche en effet à monopoliser la communication autour de Le Blanche afin de propager sa vision idéaliste et réactionnaire du personnage).

     Ce serait oublier, non seulement ma propre action, mais aussi celle de l'Association Arts Métiss', en Vendée, à La Chemillardière, qui fut la première, avec ses animateurs, Laurent Pacheteau et Jean-Pierre Rouillon (ce dernier ayant acheté beaucoup de dessins qui traînaient par terre dans la maison lors d'une vente aux enchères, où ni moi, ni les parents de Le Blanche, et encore moins le sieur Burtin, n'étaient présents), à monter la plus complète des expositions¹ sur Le Blanche, les 4 et 5 juillet 2019, à partir des éléments du décor de la maison Le Blanche qu'ils avaient contribué à faire sauver (j'ai gardé moi-même quelques dessins), entre autres par les affaires culturelles du département de la Vendée (via M. Julien Bourreau) qui acheta au nouveau propriétaire de la maison les volets et les portes intérieures de la maison Le Blanche (située dans le village vendéen de Vouvant). "L'association" de M. Burtin, le site internet qu'il a créé, représente surtout avant tout lui-même, et sa femme. Son action tend à imposer, par une sorte de confiscation de l'interprétation du phénomène de cette maison peinte intérieurement, une seule façon d'envisager le phénomène, à base d'idéalisme et de religiosité des plus ringards. Le bouffon "Institut Eric Le Blanche" qu'il a inventé, au titre ridiculement trop grand pour son sujet et trop pompeux pour être honnête, est de l'ordre de l'auto proclamation, servant avant tout à faire la promotion dudit Burtin, se prenant pour un génie (chose que personne n'a vraiment envie de vérifier) et projetant cette illusion sur le pauvre Le Blanche, qui, effectivement, était un peu mégalomane lui aussi... C'est là sans doute la seule justification de l'hystérique activité de l'ineffable M. Burtin...

____

¹ Ils en ont monté une autre, plus récemment, cet été même, aux Sables d'Olonne, les 2 et 3 juin à l'Abbaye d'Orbestier.

31/05/2021

Festival Hors-Champ des arts singuliers au cinéma (documentaire seulement, hélas...): le retour!

     L'année dernière, ce sympathique festival organisé par l'Association Hors-Champ sur un jour et demi avait été annulé pour cause de virus.

Programme 24e festival On n'est pas des gueux,final, 2021.JPG

A souligner dans ce programme qui sera diffusé les 4 et 5 juin dans la salle L'Artistique, 27 boulevard Dubouchage à Nice, les films consacrés à Lee Godie, à Italo Farinelli (nouvel environnement populaire spontané que je ne connaissais pas), ou les films de Lespinasse sur La Pommeraie et Pépé Vignes.. Pour le reste, je botte en touche, soit parce que je ne connais pas, soit parce que je trouve les films assez quelconques.

 

     Il ne s'en est pas complètement remis, puisque cette année, il revient quand même, mais en petite forme, avec un programme allégé (au point de vue variété et originalité), et dans un nouveau lieu d'hébergement, la salle de l'Artistique – l'auditorium du MAMAC à Nice n'étant pas disponible, cause Covid, et l'Hôtel Impérial, le délicieux Hôtel Impérial ayant, trois fois hélas!, fermé ses portes, apparemment définitivement... condamné par le Covid et ses répercussions économiques.Clé de la chambre 25 à Nice.jpg

     On se souviendra avec une nostalgie désormais poignante des rencontres que les invités à ce festival (dont j'ai été) eurent à maintes occasions le bonheur de vivre, dans la salle de séjour très cinématographique de ce vieil Hôtel Impérial, avec ses vases, ses bouquets de fleurs, ses tableaux, ses murs couverts de tapisseries, ses tentures, ses meubles baroques, ses poutres peintes, ses fauteuils en cuir – où parfois étaient projetés certains films, comme ceux de Guy Brunet, un peu longs, mais diffusés comme en avant-premières, dans une sorte de projection familiale – ou dans la salle de réception du petit déjeuner, avec son lustre de cristal, sa fresque de putti au plafond, ses baies donnant sur un jardin abrité à l'ombre de quelques palmiers, où dormait, marginalisée, une table ronde en rocaille attendant ses chevaliers, devenus  définitivement fantômes....hôtel impérial à nice,association hors-champ,cinéma documentaire et arts singuliers,lee godie,italo farinelli,philippe lespinasse,caroline bourbonnais,francis david,claude massé,guy brunet,pierre-jean wurst,on n'est pas des gueux

Hôtel Impérial façade (2).jpg

La façade de l'Hôtel Impérial (et la clé de la chambre 25, recto et verso ci-dessus, avec son message original en cas d'oubli), photos Bruno Montpied, juin 2018.

Salle à manger le plafond aux vénus et angelots (2).jpg

Les Vénus et les amours au plafond de la salle à manger, ph. B.M., 2018.

 

    Dans ma mémoire, j'aime à faire défiler les personnages d'un certain matin au petit déjeuner, Caroline Bourbonnais, avec qui je n'avais jamais eu l'occasion de me retrouver en tête à tête, Francis David, ce photographe mystérieux et réservé, comme venu d'un autre espace-temps, eût-on dit, Claude Massé que l'on m'avait dépeint bourru, difficile, mais qui me parut au contraire aimable et charmant (était-ce l'atmosphère de ce lieu magique qui métamorphosait tous ceux qui y passaient?), Vincent Monod le rire jamais loin des lèvres, Philippe Lespinasse, à la fois semblable à un passager tombé l'instant d'avant de la Lune et l'œil bientôt narquois, et Pierre-Jean, l'ineffable Pierre-Jean Wurst, l'hôte généreux et incapable de ne pas blaguer, venant faire la revue de ses invités, Guy Brunet... Marc Décimo... Alain Bouillet... Charles Soubeyran, un peu pontife en dépit de ses sandales sans chichis... Anic Zanzi, de la Collection de l'Art Brut de Lausanne, comme sur la défensive...

24e festival On'est pas des gueux, affiche, 2021.JPG

Affiche de ce 24e festival... Avec son titre choc habituel, tel qu'aime à en choisir, à chaque festival, l'équipe de l'association Hors-Champ...

15/03/2021

Un film nouveau sur Pape Diop, le dessinateur des murs de la Medina de Dakar

       Tilleen, le débile et le génie, d’Ugo Simon (2021, France, 23 min), tel est le titre du court-métrage consacré au dessinateur compulsif de rue Pape Diop (déjà évoqué par moi sur ce blog l'année dernière) parmi douze autres petits films qui sont proposés sur le site de Mediapart dans le cadre de la section "Première Fenêtre" du festival Cinéma du Réel (se tenant du 12 au 31 mars, sans doute en ligne...). Sur le site de Mediapart (voir LIEN), c'est le 4e.

P Diop et Modboye (à dr) Film de Ugo Simon, 2021 sur Pape Diop.JPG

Photogramme extrait par moi du film d'Ugo Simon. Pape Diop (à gauche) place touts sortes de petits objets dans la main de Modboye (à droite, avec son tee-shirt marqué "Dakar Art Brut"), dans un échange étrange.

 

    On y retrouve Modboye l'artiste médiateur sénégalais qui suit Pape Diop (un médiateur et un créateur, on retrouve ainsi "l'attelage" traditionnel qui signale que l'on a affaire à de l'art brut), et  recueille les contreplaqués que ce dernier abandonne ou donne, sans souci apparemment de ce qu'ils pourraient devenir (je pense bien sûr au marché de l'art brut en Europe ; m'est avis qu'un petit malin ira bien le proposer un de ces jours dans une quelconque Outsider Art Fair ; il a déjà été exposé à Paris dans la galerie parisienne de la Fabuloserie, comme le  contait la note que j'ai mise en lien ci-dessus).

Pape Diop dessinant sur lebitume, film d'Ugo Simon, 2021.JPG

Pape Diop dessine obsessionnellement sur le bitume, les murs, les bouts de contreplaqués... Photogramme extrait de Tilleen ,le débile et le génie, court-métrage d'Ugo Simon, 2021 ; je n'ai personnellement pas compris à quoi ou à qui correspondait ce mot de "Tilleen", le film étant assez avare de commentaires et d'explications, tissé surtout d'impressions visuelles.

 

Merci à Remy Ricordeau qui m'a envoyé le lien vers ce film.

 

01/12/2020

L'Atlas des Régions Naturelles, une entreprise cousine de ce blog

      Signalé par ma jeune camarade Tamaya Sapey-Triomphe, que je remercie hautement au passage, l'Atlas en question a entrepris de recenser par le truchement de classifications et surtout de photographies toutes sortes de réalisations volontaires ou involontaires dans l'espace en France,  relevant peu ou prou de ce que l'on appelle l'architecture vernaculaire. Le territoire  est envisagé dans le cadre de ses régions dites naturelles, et non pas dans son découpage administratif de départements et régions artificielles. Un index de ces régions est donné sur la page d'accueil du site web. La mise en ligne de ce dernier est très récente (le 5 novembre 2020), tandis que le recensement lui-même, ayant produit jusqu'à présent plus de 12 000 clichés, a été commencé en 2017.

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Le découpage de la France en régions naturelles selon l'ARN.

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A Nassigny, ph. ARN.

 

      Les auteurs, Eric Tabuchi et Nelly Monnier, paraissent bien sympathiques, si l'on s'en rapporte à leur portrait, lorsqu'ils sont assis à l'arrière de leur voiture d'explorateurs...

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Nelly Monnier et Eric Tabuchi, les auteurs de l'Atlas des Régions Naturelles, ph ARN.

 

      "Au moment d’entreprendre ce travail, cela faisait déjà un moment que nous nous demandions comment documenter l’architecture vernaculaire française et, plus largement, comment représenter un territoire dans toutes ses nuances." (E. Tabuchi et N. Monnier) 

        Cet ARN, cliquez pour la page d'accueil ICI, on s'y balade par plusieurs entrées. Personnellement, j'ai d'abord essayé la section "art brut" (on ne se change pas...), peu fournie (pour le moment... ;  à signaler que l'art brut de cet ARN se limite aux environnements spontanés). Puis je me suis dirigé vers "petit patrimoine", "initiative personnelle". "maisons modestes", "fresque figurative", "tas et reliquats", et encore "enseigne-objet", "cinémas" (désaffectés ou non), ou "graffiti" (hélas, seulement perçus sous la forme des graffiti pulvérisés et non pas incisés, plus anciens, et historiques).

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Portail original à Ruan sur Egvonne (Perche vendômois), photo ARN (à noter que les photos que j'extrais ici par capture d'écran, justifiée par les besoins de la communication autour de ce site web, ne peuvent être que d'une médiocre résolution, le site ne permettant pas l'enregistrement). Ce décor m'est inconnu et n'a donc pas été recensé par moi dans le Gazouillis des éléphants.

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Construction insolite à Vic-le-Comte, Limagne, ph. ARN ; idem, site inconnu de moi jusqu'à présent...

 

     Bien entendu l'écrasante majorité des entrées est dominée par des polarisations architecturales (toujours à la surface des sols, on ne va pas dans les souterrains), mais enfin, l'éventail de la curiosité de ces deux chercheurs qui ne dédaignent pas de présenter leur entreprise comme une "aventure artistique" (j'ai pensé au couple d'Allemands, Bernd et Hilla Becher, qui ont fait une oeuvre de photographe en dressant une typologie d'architectures industrielles, et des châteaux d'eau notamment ; il est probable que ce soit une référence pour nos deux explorateurs de l'Atlas) est très vaste et très hétéroclite.  Si pour le moment ils ne sont pas allés apparemment vers les cimetières, rare manque pour le moment,  – on pourrait pourtant y rencontrer beaucoup d'édicules, tombeaux et autres ornementations diverses parfois fort insolites – à se promener dans leur site, on se convainc rapidement de l'étonnante variété des monuments de tous ordres que l'on peut rencontrer en France.

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Monument aux morts insolite, La Ville en Tardenois, ph. ARN.

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Sculptures en fers à cheval, à Gondrecourt le Château, ph ARN.

 

      Sur ce blog, cela fait un certain temps que je m'efforce de le faire percevoir à ma manière, dans une perspective moins architecturale, et plus dans l'esprit de ce que j'appelle "la poétique de l'immédiat". Sans parler des environnements populaires spontanés, à la Cheval ou à la Picassiette, cela fait longtemps que je reste étonné devant les créations d'artisans rocailleurs, les tours Eiffel en toutes matières (c'est une des catégories que l'on rencontre sur l'ARN, avec plusieurs exemples que je ne connaissais pas, voir la note que je leur ai consacrée récemment), les architectures ou les monuments incongrus dont on a perdu la fonction, les monuments aux morts atypiques, les boîtes aux lettres insolites, les enseignes hors normes, les arbres morts sculptés, les vieux cinémas de province ancienne mode (avant l'époque des multiplex), etc.

      Allez, on se précipite tous sur l'ARN... Bon voyage !

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Eolienne (de Girard ou de Bolée), à Bouge, près de Laval, ph. Bruno Montpied, 2020.

 

11/08/2020

Les restes de Maître Jacques Burtin, euh... de Jacques Burin...

Les restes de Maître Jacques Burin (2).jpg*

 

* Jacques Burtin, du nom d'un ex-ami que j'avais convié à faire un film sur un autodidacte ayant peint l'intérieur de sa maison en Vendée (cf "Eric Le Blanche, l'homme qui s'enferma dans sa peinture"), et qui, dans la foulée, décida de faire son propre film sur le même sujet, film qui reflète une vision esthétisante, académique-risible, idéalisante-boursouflée, ne tenant aucun compte d'un certain nombre d'éléments de témoignage et de faits relatifs à cet autodidacte (Eric Le Blanche).

21/12/2019

Jeanne Devidal, "La Dame de Saint-Lunaire", le film d'Agathe Oléron bientôt en DVD

    Véritable parcours du combattant, le passage de son film en DVD est long et semé d'embûches pour Agathe Oléron, cette cinéaste sans fortune qui n'a pourtant jamais ménagé son énergie ni sa persévérance pour défendre la mémoire de cette étonnante femme, Jeanne Devidal, qui créa une maison sous carapace, comme un camp retranché, une barricade de matériaux reyclés à Saint-Lunaire la bien nommée, construite des années 1950 à la fin des années 1980. On peut retrouver une évocation de cette demeure hautement insolite dans mon livre Le Gazouillis des éléphants, paru fin 2017. Ainsi que sur ce blog en cliquant ici.

 

Bande-annonce du film La Dame de Saint-Lunaire.

 

    Pourtant, la dernière ligne droite pour la sortie du coffret DVD, avec livret et bonus (portrait de Savine Faupin qui s'est intéressée aux dessins inédits de Jeanne Devidal, souvenir d'enfance en Super 8 des enfants de la classe de CE1 de St-Lunaire qui avaient visité Jeanne Devidal, deux concerts en rapport avec le film, du rock et du classique), est en vue. On peut dès maintenant soit s'adresser directement à la société De Fil en films de Déborah Gillet pour commander la chose pour 20€ (film + frais de port), soit se rendre vers le système KisKissBankBank pour un financement participatif au choix. La sortie est prévue pour le mois de janvier prochain.

La Dame de St-Lunaire affiche du film.jpg

 

08/12/2019

Václav Beránek, une présentation par Emmanuel Boussuge (2e partie)

      On sait que les sirènes sont une des obsessions tenaces du tenancier de ce blog, qui est aussi fort féru de naufrages¹. La toile de Beránek pouvait donc se retrouver ici en pays familier, mais c’est bien sûr d’abord parce que Beránek lui-même mérite grand intérêt, alors qu’il est très méconnu en France, qu’il faut en parler.

václav beránek,emmanuel boussuge

Václav Beránek, La Reine des Eaux, (détail), 1972 (coll. et phot. Pavel Konečný).

 

     C’est comme peintre naïf qu’il obtint une certaine reconnaissance à la fin des années soixante. C’était un naïf très original, dénué de la mièvrerie que l’on accole bien trop automatiquement à cette catégorie. L’Encyclopédie mondiale de l’Art naïf (Edita, 1984), dit de lui qu’il est un « des cinq plus fascinants peintres naïfs de la Tchécoslovaquie ».

václav beránek,emmanuel boussuge

Václav Beránek, femmes dans un paysage, œuvre reproduite dans l’Encyclopédie mondiale de l’art naïf (sous la direction d’Otto Bihalji-Mérin et Nebojša-Bato Tomašević).

 

      D’autres publications polonaises ou tchèques lui ont consacré quelques pages². Ses œuvres ont été exposées à Montréal (1967), Brno (1968), Lugano (1969) ou Bratislava (1969), et la dernière exposition de son vivant eut lieu à Olomouc en 1981, organisé par Pavel Konečný. Quelques-unes de ses toiles ont été acquises par des musées ou institutions. Il faudra un jour se renseigner sur les œuvres que possède la galerie nationale slovaque de Bratislava ou le fonds Max Fourny en France.

        Les six pièces conservées au musée de Bohême du nord à Litoměřice méritent le détour car elles sont tout à fait remarquables. Deux films lui ont encore été consacrés. Le premier, tout spécialement difficile à voir (mais on ne désespère pas), date de 1972. Réalisé par Eugen Šinko, il est consacré aux artistes cheminots³. L’autre, bien plus récent, a été tourné en 2006 par Antonín Jiráček. Il dure 13 minutes et c’est une mine de renseignements, avec notamment les témoignages de la femme et du fils du peintre.

         À partir de ce film et des quelques notices qui lui ont été consacrées, on peut retracer la biographie de ce personnage vraiment très attachant.

      Václav Beránek est né le 7 juillet 1915 dans une famille paysanne du tout petit village de Bezděkov, en Bohème orientale, le dernier d’une fratrie de quatre. Son père meurt alors que Beránek n’a que sept ans. La famille avait été jusque-là relativement prospère, mais l’incident la plonge dans une grande précarité. Les privations exposent le jeune Václav Beránek à une forme de rachitisme. Cependant, ses frères et sœurs, bien plus âgés que lui, prennent soin de l’enfant et il est le seul d’entre eux à faire des études prolongées au-delà de l’école primaire. Il acquiert d’abord une formation de menuisier, puis entre à l’École Technique de Hradec Králové. À la sortie de l’établissement, il est embauché dans les Chemins de fer tchèques.

      D’abord employé à Prague, dans le quartier de Bubeneč, il déménage après la guerre dans un autre coin de la ville, aux ateliers de Nymburk, où il rencontre sa femme et se marie avec elle six mois plus tard. Le couple s’installe rapidement à Děčín, près de la frontière allemande. Le traitement d’une maladie de la thyroïde l’amène cependant à rentrer dans sa région natale, la Vysočina. Il travaille alors à Jihlava, puis à Havlíčkův Brod, où il prend sa retraite. En dehors de son travail, il consacre son temps à cultiver les arbres et les roses de son jardin. Il possède aussi dix ruches. Si la mécanique et les chemins de fer semblent n’avoir absolument aucun écho dans son œuvre, ce n’est pas le cas de ses hobbies favoris.

     Václav Beránek s’est lancé dans la peinture lorsque ses collègues lui demandèrent de faire l’affiche et de fournir plusieurs lots colorés pour une tombola, ce qui me fait immanquablement penser au film si drôle et cruel de Miloš Forman, Au feu les pompiers!, qui date à peu près des mêmes années. Loin d’être une catastrophe comme au cinéma, le succès rencontré lors de ces réjouissances professionnelles encouragea Beránek à persévérer et, bientôt, il multiplia les peintures. D’abord sur des panneaux et non sur des toiles et sans utiliser de cadre. «Tout au moins cher», comme dit son fils.

       Beránek devient alors un autodidacte à l’inspiration impérative. « Il peignait dans la cuisine pendant que je faisais à manger, dit sa femme. Quand il avait une idée en tête, il peignait toute la nuit jusqu'au matin. Il se réveillait même quelquefois pour rendre en urgence une idée venue pendant son sommeil. Ses plus grandes toiles pouvaient prendre absolument toute la place en travers de la cuisine. Certaines de ses peintures lui prenaient trois mois, mais il en avait toujours plusieurs en cours ».

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Photo de Václav Beránek, transmise par P. Konečný.

 

     Beránek ne vendait jamais ses toiles. Il les donnait volontiers en revanche. Il peignait beaucoup. Un jour, un collectionneur vint le voir qui voulait lui acheter plusieurs peintures mais, fidèle à sa ligne de conduite, Beránek préféra lui en donner une. Quand il apprit que le collectionneur l’avait ensuite revendue, il fut vert de colère. Cependant, quand il repassa le voir, il se contenta de lui proposer ses nouveaux travaux mais pour quelques millions de couronnes, sans ergoter une minute de plus avec ce malappris.

     Beránek défendait un monde de générosité sans mélange, centré sur ses peintures, son jardin, ses ruches. Il donnait toutes ses productions avec immense plaisir, qu’il s’agisse de tisanes ou de créations picturales. Il ne buvait pas du tout mais n’en faisait pas moins un savoureux vin de cassis qu’il offrait à ses visiteurs.   

       C’était un peintre visionnaire qui n’imitait personne et ne peignait jamais sur le motif. C’était exclusivement un peintre d’intérieur. Il utilisait toutefois une documentation pour peindre les animaux ou bien sûr les villes où il n’était jamais allé.

      Il devint relativement connu mais ne changea jamais de manière de peindre. Certains le pressaient d’apporter telle ou telle modification mais il leur répondait : «Si un jour vous peignez, vous ferez les choses à votre manière. Moi, je les fais à la mienne ».

       Beaucoup de gens venaient le voir. Le plus célèbre de ces visiteurs est le peintre Jan Zrzavý (1890-1977), un peintre inclassable, à l’inspiration extrêmement originale, très injustement méconnu en dehors de son pays. Zrzavý avait rencontré son collègue autodidacte en voisin et il prit l’habitude de le visiter une ou deux fois par an.

       Son fils garde une image radieuse de son père, un homme sans détestation, sans colère, un père qui ne donnait jamais de punition.

      Les choses se passaient cependant quelquefois plus rudement avec sa femme, qui n’avait pas accueilli sa passion avec enthousiasme et qui était même un peu jalouse (elle l’avoue) de cette activité envahissante. L’érotisme naïf de ses compositions l’exaspérait aussi quelque peu. « Toutes ces femmes nues aguicheuses, ce n’est pas de l’art », disait-elle et elle lui fit une petite guerre qui l’amena à en couvrir certaines, heureusement pas toutes et souvent d’un vêtement fort peu opaque. Ouf !

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Václav Beránek, les fées attendent la nymphe, huile, 62,5 x 72,5cm, 1970 (œuvre reproduite dans le catalogue d'Insita 4, la triennale d'art "insitic" (voir note 3 ci-dessous) à Bratislava en 1972).

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Dessin de Václav Beránek, Danseuses, 1977, reproduction transmise par  P. Konečný.

 

     Au total, Beránek réalisa peut-être deux cents peintures. Elles sont dispersées pour la plupart sans que son fils sache où elles peuvent maintenant se trouver. Avant 1975, Beránek n’a fait aucune liste de ses travaux. Seules quelques photos dans des albums familiaux témoignent de l’existence de quelques-unes de ses toiles non-localisées. Et comme nous l’avons déjà dit, Beránek donnait volontiers ses œuvres, quelquefois à de parfaits inconnus.

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Václav Beránek, Le Spectre d'un moine de Strahov, 1966, 35 x 30 cm, passé en vente en 2018 et repéré par Jimmy Virani (merci).

 

       Pavel Konečný avait pris en photo un certain nombre des peintures de Beránek, on en voit aussi plusieurs dizaines dans le film d’A. Jiráček, qu’elles appartiennent à la collection familiale ou à celle du musée de Litoměřice. Quelques toiles sont aussi passées en vente. Bref, on connaît peut-être un quart ou un tiers de la production de Beránek, ce qui laisse de bonnes perspectives pour des trouvailles enthousiasmantes.

     Beránek a peint quelques villes, de nombreux bouquets et beaucoup de femmes plus ou moins vêtues (quelquefois de simples fils en relief) et souvent accompagnées de fleurs. Il illustre aussi des anecdotes locales ou personnelles et surtout revisite avec grand bonheur la mythologie tchèque. Sa plus vaste série est dédiée à l’histoire des amours tragiques de la Roussalka, fille de l’Esprit du lac, aussi mise en musique dans le célèbre opéra de Dvořák. Beránek lui a consacré pas moins de 24 tableaux dont plusieurs sont à Litoměřice. C’est aussi un dessinateur captivant et il a encore constitué un extraordinaire jeu de tarot complètement personnel, à usage de divination domestique.

        Beránek est un type épatant et l’idée de rester encore un moment sur ses traces me plaît beaucoup.

       À suivre, donc.

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Václav Beránek, Russalka amie des oiseaux, 1968, 91,5 x 106 cm (Musée des beaux-arts de Bohème du Nord, Litoměřice, photo Emmanuel Boussuge).

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¹. Je ne me crois pas particulièrement obsédé par les naufrages… Même si en effet les sirènes viennent régulièrement onduler entre ces "pages". Ces dernières ne sont, cela dit, pas la seule raison pour laquelle j’accepte cet article. C’est que Beránek est avant tout un Naïf qui illustre parfaitement ma défense de l’art naïf de qualité (Note du « tenancier » du blog).

². Ksawery Piwocki, Dziwny świat współczesnych prymitywów (Le Monde étrange des primitifs contemporains), Varsovie, 1975, p. 182-183 ; Eva Matyášová, Naivní malířství (La Peinture naïve), Prague, 1986, p. 12-13. Ajoutons que l'on trouve une minuscule notice sur Beránek dans le livre d'Anatole Jakovsky, Les Peintres  Naïfs (déjà cité en légende de notre première illustration de la première partie), et une reproduction d'une autre toile (non encore relevée par Emmanuel) dans le catalogue de la triennale d'art "insitic" (art enraciné, art inné) de Bratislava, "Insita 4", en 1972 (voir la reproduction de cette peinture ci-dessus ; Note de l'animateur du blog).

³. Malované uhlím (Peinture au charbon). Selon Pavel Konečný, pendant les cinq minutes du film qui lui sont consacrées, on voit Beránek en train de peindre La Reine des eaux ; par ailleurs, le catalogue d’une exposition de 2015 à Litoměřice présente une notice et une reproduction d’une toile de 1980 avec deux femmes au milieu de fleurs géantes : Art brut a naivní umění – Spontánní umění ze sbírky Poetické galerie [Art brut et Art naïf. Art spontané de la Collection du « Musée Poétique »], exp. du 9 octobre au 22 novembre 2015, Antonín Jiráček, Alena Beránková, etc., p. 32-33.

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Remerciements :

Grand merci à Pavel Konečný qui, outre le fait qu’il nous a fait découvrir Beránek, nous a confié les informations nécessaires pour partir sur ses traces et très généreusement donné accès à sa riche documentation. Merci beaucoup à Alena Beránková, du musée de Litoměřice pour ses précieuses informations et surtout merci à Martina Balážová pour son aide tendre et ses nécessaires traductions.

 

Emmanuel Boussuge

29/10/2019

Honneur aux hommes ennuyeux (frères des amateurs de banal)

       Merci à Audrey Montpied pour le lien vers cet excellent petit film...

06/06/2019

Eric Le Blanche, l'homme qui s'enferma dans sa peinture, un film de Bruno Montpied et Jacques Burtin

     Pour présenter cette nouvelle découverte liée à l'art brut et aux environnements intérieurs d'autodidacte – des peintures murales dans une maison ouverte seulement après la mort de leur auteur, Eric Le Blanche (1951-2016), à Vouvant, en Vendée (une terre de créateurs populaires en plein air ou en intérieur), et des milliers de dessins punaisés par-dessus, par un créateur inconnu ayant œuvré dans un secret quasi complet (souffrant d'une schizophrénie qui le coupait apparemment du monde extérieur) – j'ai choisi cette fois, non pas le livre ou la revue sur papier, mais le cinéma documentaire. En compagnie d'un collaborateur cinéaste lui-même autodidacte (quoique savant et fort bon technicien formé sur le tas, comme on dit), Jacques Burtin – qu'on aura déjà aperçu sur certaines pages de ce blog – nous avons en effet terminé en mars dernier, en auto-production, un film de 85 minutes, Eric Le Blanche, l'homme qui s'enferma dans sa peinture. Ce n'est pas le premier long-métrage sur un auteur unique d'art brut, car nous avons été doublés par un film sorti l'année dernière sur Robillard par Henri-François Imbert, nous nous contenterons d'être dans le peloton de tête...

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Eric Le Blanche, fresques murales dans sa chambre, ph. Bruno Montpied, juillet 2018.

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Eric Le Blanche, fresque dans l'escalier menant à l'étage, représentant Eve, ph. B.M., juillet 2018.

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Eric Le Blanche, fresque sur les murs, les portes dans une chambre à l'étage, ph. B.M., juillet 2018.

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Deux dessins d'Eric Le Blanche, gouache ou cirage sur cartons, coll. et ph. B.M.

 

     Je présente le film à l'auditorium de la Halle Saint-Pierre, en avant-première, le samedi 22 juin à 15h (réservation conseillée). Voir la newsletter pour prendre contact avec la Halle. Je serai présent à cette occasion pour répondre à d'éventuelles questions et faire face aux éventuelles remarques.

      C'est une première étape avant l'édition ultérieure en DVD, je l'espère bien.

    Par ailleurs, à partir du jeudi 4 juillet (jour du vernissage où toutes et tous passant par la Vendée cet été sont bien entendu invités) jusqu'au dimanche 1er septembre 2019, aura lieu une exposition, organisée par l'association Art Métiss',intitulée "Eric Le Blanche, art brut" à l'Espace Jean Galipeau, dans le hameau de La Chemillardière, sur la commune de St-Mesmin, non loin de Vouvant. Voir le flyer ci-dessous pour plus de renseignements (ou bien, pour plus de lisibilité, voir le PDF).

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       Nous projetterons dans le cadre de cette expo le film Eric Le Blanche, l'homme qui s'enferma dans sa peinture, le 24 juillet à 20h30. Là aussi, je serai présent, ainsi que peut-être aussi le deuxième réalisateur, Jacques Burtin.

07/05/2019

Avec le printemps, revient le festival Hors-champ du "film d'art singulier", le 22e du nom...

    C'est à Nice, en trois lieux, que l'association Hors-champ, animée par Pierre-Jean Wurst et quelques autres acolytes restant usuellement dans l'ombre, monte son festival annuel, dans les tout premiers jours de juin. Voici l'affiche de cette 22e édition...

Festival film 22e (affiche), 2019.JPG

     Trois lieux, disais-je, la Bibliothèque municipale Louis Nucéra, la librairie Masséna et l'auditorium du Musée d'art moderne et d'art contemporain... En effet, au départ le festival n'était prévu que pour le samedi, avec une programmation se voulant foisonnante et multiple – ce qui avait pour conséquence de la part de son programmateur de sélectionner avant tout des films courts pour pouvoir en placer un maximum dans la matinée et l'après-midi ; de plus une programmation variée et multiple a l'avantage de moins fatiguer les spectateurs... Mais, à la longue, plusieurs réalisateurs, auteurs et amateurs de cinéma documentaire (les fictions sont toujours "blacklistées" en effet, on ne sait pourquoi, la durée de ces films-là n'en étant pas la seule cause ; on sait qu'il existe de nombreux films de fiction ou des "biopics" sur des auteurs d'art brut ou d'art naïf, Ligabue, Aloïse, Séraphine, récemment Cheval, Pirosmani...). ont fait valoir que Hors champ pourrait tout de même faire un effort du côté des moyens métrages (50 minutes) voir longs métrages (il n'y en a pas eu des masses jusqu'à présent, un de 90 minutes environ, sur Robillard, l'année dernière, d'Henri-François Imbert, et un tout récemment (mars 2019) de l'animateur de ce blog (Bruno Montpied) et de Jacques Burtin, intitulé Eric Le Blanche, l'homme qui s'enferma dans sa peinture, de  80 minutes environ, consacré à une nouvelle découverte d'un peintre intime s'étant exprimé en partie sur les murs intérieurs de son logis – j'y reviendrai dans les semaines qui viennent, car là aussi il y aura projection publique ; j'ai mise en ligne l'année dernière une photo de ses fresques dans la note qui se cache sous ce lien).

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Le programme...

 

     A ne pas manquer dans cette programmation, projeté à la bibliothèque Nucéra : le film de Luc Ponette sur Gabritschevsky (que l'on peut trouver en DVD dans le catalogue de l'exposition de 2018 à la Galerie Chave), ce Max Ernst spontané, interné pendant près de 40 ans en Allemagne, plus près du surréalisme que de l'art brut. Ne manquez pas non plus un film, plus merveilleux encore, le court film sur une révélation bien peu connue par nos contrées, l'Ecossais Angus Mc Phee, tisseur d'objets en herbe séchée, lui aussi disponible en DVD. Si l'on veut savoir comment se définit l'art brut (je pense à un commentaire récent de M. Kolotoko), eh bien, là, on y est en plein. En guise d'hommage à Jacques Trovic récemment disparu, sera (re?)projeté le film de Jean-Michel Zazzi qui lui avait été consacré (où l'on aperçoit le célèbre mais discret Pierre-Jean). Le petit film d'animation de Jeunet et Segaud est tout à fait charmant et sympathique. Deux films de Mario Del Curto et Bastien Genoux, sur des créateurs que je ne connais pas ne peuvent que susciter la curiosité car ces auteurs nous ont habitué depuis longtemps à leur curiosité bien orientée.

 

08/02/2019

Juste un téléfilm pour le Facteur Cheval

 affiche du biopic Tavernier.jpeg       L'Incroyable histoire du Facteur Cheval, réalisé par Nils Tavernier, a un titre bien tapageur, pour un résultat très en deçà de ce que l'on nous promettait a priori. On a finalement affaire à un simple téléfilm vaguement mélodramatique, réduisant la véritable question de la geste Cheval – à savoir la conception et la réalisation durant trente-trois ans de ce monument extraordinaire, le Palais Idéal – à une vague bluette imaginaire entre un Ferdinand bourru, mutique à la limite de l'autisme, et sa femme Philomène, jouée par la belle Laetitia Casta, bien loin au point de vue ressemblance de la véritable seconde femme du Facteur. En prime, on nous donne droit aussi à l'hypothèse du bon papa qui aurait construit une sorte de château de sable amélioré pour sa petite fille Alice (née la même année, à peu de chose près, que le Palais Idéal, celui-ci commencé en 1879), dont le prénom a fait rêver le scénariste et le réalisateur bien sûr – Cheval avait-il lu Alice au pays des Merveilles (hypothèse séduisante, mais pas confirmée (première traduction française 1869, soit dix ans avant le début du Palais Idéal)? 

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Alice Cheval

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Palais Idéal, angle façade nord et façade ouest, photo Bruno Montpied, septembre 2011.

 

    Cette hypothèse du terrain de jeu enfantin peut séduire... Elle a plus de poids en tout cas que l'hypothèse sentimentale un peu cul-cul du Gamblin moustachu transi devant la belle et noble Casta (hypothèse pour téléfilm). Si on avait voulu donner toute la lumière nécessaire sur le cas Cheval, Il aurait fallu élargir, en montrant aussi que Cheval eut peut-être, parmi plusieurs autres motivations, le désir de s'égaler par un autre enfantement à celui généré par sa femme. Un autre mobile était aussi à chercher du côté du désir de montrer ce que peut réaliser un plébéien, face aux merveilles monumentales que l'exposition universelle parisienne de 1878 – montée un an juste avant la pose de la première pierre du Palais – exhibaient, ou que Cheval découvrit en lisant le Magasin pittoresque.

      En face de la mise au monde féminine, de quoi peut accoucher un homme sinon d'une œuvre? Et qui plus est, en l'espèce, d'une œuvre que Cheval voulut comme quelque chose qui pourrait défier la mort en accédant à une temporalité plus longue (cette thématique est présente tout au long de la vie de Cheval qui fut confronté sans cesse à la perte de ses proches, au cours d'une vie, pour l'époque, exceptionnellement longue, 88 années, de 1836 à 1924). En bâtissant le Palais Idéal, il faisait par avance la nique à la mort qui emporta  tous ses enfants avant lui, ceux d'un premier mariage, comme celle qu'il eut avec Philomène, cette Alice, passée définitivement de l'autre côté du miroir à 15 ans...

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Ferdinand Cheval, cadran solaire, sur le Belvédère érigé pour contempler la façade est du monument ph. B.M., 2011.

 

     On sait qu'il eût aimé y être enterré avec ses proches du reste, que ce Palais aurait dû être aussi un mausolée, un tombeau, en même temps qu'un musée lapidaire dévolu à chanter la beauté de la poésie naturelle, ou bien encore qu'un exploit architectural, qu'un temple parsemé d'inscriptions morales ou philosophiques, reflétant toutes sortes de styles et de thèmes venus des monuments du monde entier réunis dans un syncrétisme d'une folle inspiration.

 

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Ferdinand Cheval, inscription dans la galerie intérieure du Palais Idéal: "Le Panthéon d'un héros obscur", ph. B.M., 2011.

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Ferdinand Cheval, détail ("La Reine des Grottes") de  la façade sud du Palais, ph. B.M., 2011.

 

        Entreprendre de bâtir sur le phénomène Cheval une fiction plutôt qu'un documentaire, dès le départ, ne pouvait aboutir qu'à cette erreur. Car le principal héros de cette vie est ce "monstre" architectural : le Palais Idéal. C'est lui qu'il fallait avant tout montrer. Hélas... On n'en voit que très peu. 

      Sans doute parce que la production n'avait pas beaucoup de moyens. Ce qui apparaît dans le film, une espèce d'ébauche cheap de la primitive forme du Palais, suivie assez vite de plans du Palais tel qu'il est aujourd'hui, toujours filmé de face, sans restituer son volume (même lorsque la caméra se déplace en hauteur, à l'aide d'un drone, la réalisation continue à nous l'aplatir ce Palais, en s'élevant dans le ciel au point de ne plus en montrer que le plan au sol), ne pouvait à elle seule contenter le spectateur. C'est sans doute pourquoi le scénario s'est orienté vers le développement d'une intrigue du genre mélo. Hélas, par son côté cliché, elle ridiculise la portée possible du film, par sa pauvre idée, d'une terrible platitude elle-même...

        La scène finale du bal, sur un parquet installé devant la façade est du Palais (façade privilégiée tout le long du film par la réalisation, ce qui accentue l'interprétation du monument tout en façade), montre également que la réalisation, faisant ici les yeux doux aux conservateurs du Palais Idéal, cherche à justifier l'utilisation depuis des années du Palais Idéal comme super décor, fond d'écran luxueux pour des concerts de jazz ou de variétés. Ce qui est une manière de réduire la portée de cette création, désormais envisagée seulement pour sa capacité à rapporter des rentrées d'argent comme simple attraction touristique¹...

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      Ce que Cheval voulut faire avec son Palais Idéal, énorme architecture automatique avant l'heure (plutôt que "médianimique", comme l'écrivit Breton, qui voulait ainsi  indiquer sa dimension pré-automatique en l'associant aux créateurs spirites de la fin du XIXe siècle), est probablement impossible à montrer dans une fiction, à visée toujours plus ou moins commerciale. Les producteurs jugent toujours le public incapable de s'intéresser à l'aventure d'un processus de création.

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Valentine Hugo, Elisa et André Breton au Palais Idéal, après guerre, photo  fonds Valentine Hugo Bibliothèque municipale de Boulogne-sur-Mer.

 

        Une autre hypothèse, celle d'un Cheval mutique (et pas seulement taiseux ou bourru), répondant à côté quand on l'interroge (quand il répond!), trahit dans le film une vision psychologisante du réalisateur – plus explicite dans le livre signé de son nom chez Flammarion (Le Facteur Cheval jusqu'au bout du rêve, octobre 2018 ; y aurait-il eu un nègre derrière la rédaction de ce livre, plus intéressant que le film à vrai dire?) – puisque le terme d'autiste y est marqué noir sur blanc, voir p. 314 : "Le sujet du film est l'histoire d'un homme qui a un mal fou à se positionner dans son environnement social et qui, tout autiste qu'il est, parvient à s'accomplir grâce à la liberté qu'il trouve dans son art." (souligné par moi). Ainsi, on veut nous faire croire à un Cheval souffrant de quelque travers psychologique, ce qui va plus loin qu'un Cheval simplement taiseux. Son intégration sociale, ses deux mariages, ses relations avec divers intellectuels rencontrés à Hauterives (Joseph Cadier, l'archiviste André Lacroix, des poètes régionaux...), sa gestion de l'économie familiale, cadrent mal avec cette hypothèse, qui est au fond un cliché intéressé à nous planter un Cheval, homme exceptionnel, mais en quelque sorte tabou...

     S'il y eut aliénation, elle fut à mes yeux essentiellement sociale, celle d'un homme issu du monde rural, cherchant à se hisser loin de sa condition de humble, ravalé à des taches subalternes, et voulant prouver les grandes choses que peut, lui aussi, réaliser un homme du peuple.

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Ferdinand cheval, entre autres inscriptions, on peut lire en bas: "Tout ce que tu vois, passant, est l'œuvre d'un paysan..."

 

      Nils Tavernier, le dimanche 13 janvier dernier, au cours d'une rencontre avec le public (qui eut lieu à la Halle Saint-Pierre  voir ma note précédente) pour, a priori, présenter son livre récemment paru chez Flammarion (fin 2018) –  alors qu'étrangement, il parlait avant tout de son film  qui, à cette date, n'était pas encore sorti – insista sur le fait qu'il n'avait pas cherché à comprendre le créateur, jugeant qu'il fallait lui laisser son auréole de "mystère".

     Cette position me pose personnellement problème. A trop vouloir plonger un créateur, même aussi "énorme" qu'un Ferdinand Cheval, dans un bain d'inexplicable, on le rend en quelque sorte ineffable, et l'auréole qu'on lui compose a de fait beaucoup à voir avec l'aura sacralisante d'une nouvelle sorte de saint (un saint à rebours, fondé sur un mythe de créateur "fou") auquel un simple mortel ne saurait bien entendu se comparer... En tissant ce linceul de mystère, on sépare le créateur de tout un chacun, et on enseigne qu'il ne saurait y avoir d'exemple à prendre chez lui (en dépit des défis lancés par Cheval dans les inscriptions de son Palais, "Au champ du labeur, j'attends mon vainqueur")... Ce qui, au bout du compte, constitue un tour de passe-passe pas très sympathique. Une manipulation que tant d'autres artistes endossent aisément, tant, pour eux, il reste primordial que leurs spécificités, leurs statuts restent le fait d'une caste peu disposée à partager ses privilèges.

     Le droit de s'exprimer ne doit-il n'être partagé que par une coterie de spécialistes? Tout le corpus de l'art naïf, de l'art brut, des arts populaires spontanés, auquel appartient de plein droit Cheval (n'en déplaise à Pierre Chazaud²), milite contre cette idée (et n'en déplaise aux marchands qui ces temps-ci cherchent à refermer ce corpus sur quelques rares vedettes, ce qui aide à faire monter les cotes).

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¹ La dernière idée du Palais Idéal consiste à monter depuis le 21 janvier une exposition d'un artiste (nommé Samsofy) créant dans un style très gadget, avec des briques Lego, des reconstitutions de sites touristiques de la Drôme, dont le Palais idéal sans doute. Encore un gars qui a trouvé un créneau pour se trouver une place.

² Cet auteur est cité dans le livre signé du nom de Tavernier, p. 138, où sont repris ces mots extraits de son livre, Le Facteur Cheval, un rêve de pierre (éd. Le Dauphiné, 2004) : "Il n'est plus possible aujourd'hui de réduire sa trajectoire à celle d'un excentrique, relégué au mieux dans un coin de l'art naïf ou de l'art brut." Si je suis d'accord pour ne pas voir Cheval comme un excentrique en effet, ce n'est pas le réduire que de l'associer au vaste corpus de l'art naïf et de l'art brut. Au contraire, cela donne plus de force à son entreprise qui ne fut pas si isolée que cela, hormis sa taille et son ampleur restées (malheureusement) uniques.

09/01/2019

Biopic et biographie de Ferdinand Cheval, une communication très au point

     L'Incroyable histoire du Facteur Cheval, le  biopic de Nils Tavernier, sort le 16 janvier, après que sa biographie, parue chez Flammarion, a été préalablement publiée courant novembre 2018. Ça, c'est de la com' bien huilée, n'est-il pas? Et comme il devient incontournable de le faire, le double auteur vient à l'auditorium de la Halle St-Pierre présenter livre et film très bientôt. Ce sera ce dimanche 13 janvier à 15h (entrée libre). Il nous dira peut-être pourquoi il a préféré voir Philomène, la deuxième femme de Cheval, sous les traits de la belle - et intelligente - Laetitia Casta. Cela dit, après ça, il deviendra difficile d'ignorer notre sublime Facteur drômois¹.

               Bio Nils Tavernier.jpeg           affiche du biopic Tavernier.jpeg

famille Cheval.jpg

Ferdinand, assis, Alice (qui n'a pas l'air de rigoler), et Philomène debout, en 1884 (Cheval a 48 ans). C'est cette dernière que joue Laetitia Casta. Histoire d'enjoliver la réalité?

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¹ Car on ignore bien souvent l'existence de cet extraordinaire autodidacte qui a construit pendant une trentaine d'années un "Palais Idéal", à l'aide de pierres et de ciment armé à la fin du XIXe siècle, chanté par Jacques Brunius en 1929 et André Breton en 1932 et classé monument historique en 1969, la même année où des hommes posaient le pied sur la Lune... On l'ignore, c'est pourquoi la production du film a cru nécessaire d'apposer sur l'affiche que le film raconte "une histoire vraie"...  Mais pourquoi l'ignore-t-on depuis si longtemps? Il faudrait analyser les raisons de ce silence sans doute intéressé des grands media culturels. 

20/11/2018

Emile Jouve et René Rigal, deux artistes rustiques modernes de plus

   "La peinture rustique moderne", c'est un terme inventé par Gaston Chaissac dès 1946¹, pour qualifier sa propre peinture, avant de connaître Dubuffet et son Art brut². C'était pas mal trouvé, du point de vue de ce que ça signifiait. Un peu moins du point de vue publicitaire. L'"art brut", certes, cela a une autre allure sur le plan de la "communication" (pour quelque chose, le brut, qui ne se préoccupait pas spécialement de communiquer, comme le soulignait autrefois avec délectation Michel Thévoz). Exactement comme le "réalisme intellectuel" pour l'art naïf, terme inventé par Georges-Henri Luquet et repris par Georges Schmits, très précis dans ce qu'il voulait désigner mais peu aisé à mémoriser. Cette nécessité d'être repérée facilement, immédiatement, du public est souvent cause que telle ou telle invention conceptuelle, désignée de façon trop précise, est négligée et, peu à peu, tombe dans l'oubli.

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Gaston Mouly (1922-1997), peinture sur bois (acrylique ou huile), ph. B.M. 1989 (chez Gaston Mouly), non localisée actuellement (peinture exécutée, donc, avant que l'auteur ne se mette à systématiquement dessiner aux crayons de couleur après une demande de Gérard Sendrey pour sa galerie Imago qui préfigura le Site, puis le Musée, de la Création Franche à Bègles) ; Mouly, ancien entrepreneur en maçonnerie d'origine rurale, marqué par la fréquentation d'artistes modernes qui avaient été ses clients (Bissière, Zadkine), à la retraite, se mit à peindre sur bois et sculpter le ciment, puis par la suite à dessiner ; il était conscient d'être un autodidacte, de culture rurale occitane, mais se piquait de faire "moderne" dans ses œuvres, adoptant une posture indubitablement artistique, se confrontant à d'autres formes d'art( lorsqu'il "montait" de sa région lotoise jusqu'à Paris par exemple ; je peux en témoigner, l'ayant souvent accompagné dans des galeries ou musées de la capitale).

 

     Pour Chaissac – et cela peut s'appliquer à d'autres (Gaston Mouly par exemple, actif entre 1982 et 1997, alors que Chaissac était disparu depuis 1962) – il s'agissait de créer dans le respect d'une certaine tradition populaire, avec des naïvetés, des raccourcis expressifs, des couleurs franches, etc., tout en cherchant à faire nouveau (un sens de la composition encore plus affranchi du réalisme que dans l'art naïf, par exemple). Ce désir de novation s'enracine dans une imitation de l'attitude observée chez les artistes modernes, cherchant à s'affranchir des valeurs établies de leur temps.

     Dans mon Gazouillis des éléphants, consacré à des créateurs œuvrant essentiellement en plein air, entre leur habitat et la route le bordant, on pouvait ainsi découvrir deux cas de créateurs populaires influencés par l'art moderne, Maurice Guillet à Olonne-sur-Mer (Vendée) – un ferronnier mêlant du démarquage de Calder à de l'imitation de nouveaux réalistes sans oublier une pratique de la sculpture allégorique ou symbolique – et François Llopis, de Céret (en pays catalan français), qui a produit des sculptures et autres bas-reliefs ou mosaïques, influencé par l'exemple des artistes qui fréquentaient autrefois sa ville comme Braque ou Picasso, mais surtout par des exemples artistiques plus lointains (les mosaïques de Ravenne, voire des croix de chemins de sculpteurs régionaux).

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Chez Maurice Guillet, à l'arrière de sa maison, à Olonne sur-Mer, ph. Bruno Montpied, 2008.

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François Llopis, une Vierge inspirée semble-t-il des Madones de croix de chemin du Massif Central, Céret ; ph. B.M., 2014.

 

      Mais on peut également songer à rallier à ce corpus de l'art rustique moderne ("art", parce que cela ne se limite pas à la peinture, mais englobe aussi la sculpture) deux autres cas, d'origines ouvrière ou rurale.

      René Rigal tout d'abord, ancien cheminot originaire de Capdenac, qui arrivé à la retraite se prit d'amour pour les branches choisies parmi les plus filiformes d'entre elles, qu'il écorçait scrupuleusement et interprétait ensuite en leur trouvant à chaque fois une incarnation. C'était une sorte de Giacometti populaire, qui pouvait en sculptant enfin se permettre, loin des trains où il avait bossé toute sa vie, de "dérailler" en toute liberté. C'est du reste ce qu'évoque le titre de l'article que j'ai publié à son sujet dans le n°36 de la revue Création Franche en juin 2012 : « René Rigal, hors des rails ». Certes, on peut lui trouver des ressemblances avec d'autres sculpteurs populaires travaillant comme lui à partir de la forme des arbres et arbustes ( par exemple Michel Maurice à Cornimont, dans les Vosges, voir le "Musée des Mille et une racines" dont j'ai aussi parlé dans le Gazouillis des éléphants et dans Création Franche n°45, en décembre 2016), mais il a un style qui lui est propre, avec ses figures systématiquement longilignes (voir ci-dessous). Cette signature plastique proche d'une certaine forme d'"abstraction" est peut-être la cause de son adoption par les galeries aveyronnaises, comme celle de la Menuiserie, de Jeanne Ferrieu, à Rodez, qui l'ont régulièrement exposé au milieu d'artistes contemporains. Peu d'amateurs d'art populaire ou d'art brut ont su le repérer jusqu'à présent. Personnellement, je le découvris grâce à un film de messieurs Pennet et Macary, "René ne tape pas la belote" (2000),  vu au Festival de cinéma autour des arts singuliers organisé par l'association Hors-Champ à Nice. En projetant ce film dans un contexte de documents autour des arts spontanés, les animateurs de ce festival réintroduisaient malicieusement (et peut-être sans y penser plus que ça?) René Rigal parmi les créateurs spontanés, où est sa véritable place, à mon sens.

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Salle d'exposition dans la maison de feu René Rigal, ph.B.M., 2012.

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Livret de "petites histoires et anecdotes" (des témoignages des uns et des autres qui ont connu René Rigal) paru aux éditions La Menuiserie en juillet 2016, archives B.M.

 

     Cela faisait plusieurs années que, par ailleurs, j'avais entendu parler d'Emile Jouve, sculpteur et peintre autodidacte qui habitait St-Côme d'Olt dans l'Aveyron et qui était né plus haut, en Aubrac, à Laguiole, ville célèbre pour un excellent fromage souvent associé au Cantal même s'il est fabriqué dans l'Aubrac voisin. Jean Estaque, le sculpteur de la Creuse, m'avait évoqué ce Jouve, connaissant mon goût pour ces créateurs de l'ombre venu des milieux populaires, mais sans pouvoir me montrer des images de ses œuvres. Il avait été éleveur de bovins la plus grande partie de sa vie, les bovins qui sont une autre spécialité de Laguiole où un fier taureau trône sur la place du village, spécialité qui ne doit pas faire oublier cependant l'autre produit qui a fait la renommée du lieu, le couteau avec son célèbre design...peinture rustique moderne,art rustique moderne,chaissac,gaston mouly,maurice guillet,françois llopis,rené rigal,emile jouve,galerie la menuiserie,art naïf,art singulier,le gazouillis des éléphants,croix de chemin,poésie naturelle interprétée,association hors-champ

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Emile Jouve, sans titre (il me semble), 50x0cm, technique mixte, coll. privée (Aveyron), ph. B.M..

Emile Jouve, ss titre, 40x60cm, technique mixte,, coll Alain Christofle_edited (2).jpg

Autre tableau d'Emile Jouve, sans titre (il me semble), pastel ou craie sur bois, 40x60cm, coll. privée (Aveyron), ph. B.M.

 

    Je finis par tomber sur deux de ses tableaux par hasard, chez un sympathique amateur de bonne chère et de vie au grand air, habitant tout près de Marcillac (Aveyron encore), au secret d'une gorge oubliée...

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    Là encore, cet artiste autodidacte avait été exposé (plusieurs fois, semble-t-il) à la galerie La Menuiserie  de Jeanne Ferrieu. Mais, loin de Rodez, comment le savoir? Il aurait fallu scruter tous les jours la presse régionale du coin, où de rares magazines relayant l'information artistique en province (comme Artension, dont c'est un des principaux mérites). La femme de René Rigal, Micheline Rigal, intervint opportunément en me prêtant le catalogue que là encore la Menuiserie avait édité sur ce créateur d'origine populaire (édition de 2001).

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Catalogue consacré à Emile Jouve par la galerie La Menuiserie, Rodez, 2001.

 

    L'ouvrage contenait, un peu comme dans le cas du livret récemment édité sur Rigal (voir ci-dessus), de nombreux témoignages et surtout plusieurs illustrations en couleur, de peintures mais aussi, ce qui achève de permettre de se faire une opinion favorable sur les talents de ce monsieur Jouve, de sculptures peintes réalisées à partir de bois trouvés et de bois flottés qui sont, à mon goût, ce que Jouve a fait de mieux, dans l'état actuel de mon information. On sent chez cet homme de pleine nature un appétit évident pour les recherches formelles qui l'apparente aux élaborations sophistiquées d'artistes des villes.

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Emile Jouve, Le Dragon du Golfe, 30cm de hauteur ; reproduit (en image compressée) d'après le catalogue de la Menuiserie.

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Emile Jouve, Brigitte Bardot et les animaux, 20 cm de hauteur. Extrait du catalogue de la Menuiserie (image compressée).

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¹ Cf. Gaston Chaissac, "Peinture rustique moderne", paru initialement dans le n°3 de la revue Centres, 1946, et réédité dans Je cherche mon éditeur, Rougerie, 1998.

² Dubuffet enrôlera, au début de sa collection, Chaissac dans l'Art Brut avant de l'en retirer, à juste titre si l'on se rapporte à ses critères (art brut = inventivité hors des milieux artistiques), pour le verser dans la collection annexe rebaptisée "Neuve Invention" par la suite. Chaissac lui était apparu au fil du temps trop en contact avec les milieux littéraires et artistiques (avec lesquels cependant Chaissac pratiquait des rapports relativement réservés). Cela n'empêchait pas ce dernier de développer, selon moi, une expérimentation à tout va, et de déployer une grande inventivité plastique et littéraire.

10/10/2018

Onirographies sauvagesques d'un côté et cinéma différent de l'autre...

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      Le 11 octobre, demain jeudi, il va falloir que je me coupe en deux, car la soirée propose deux événements, le vernissage de l'exposition de collages de Pierre-André Sauvageot à la Galerie l'Usine dans le XIXe ardt,, expo intitulée "Onirographies" (Pierre-André Sauvageot était exposé récemment aussi à St-Ouen dans l'expo collective "Le collage surréaliste en 2018", qui vient d'être prolongée jusqu'en décembre, par l'association La Rose Impossible, sous d'autres cieux, à St-Cirq-Lapopie, dans l'ancienne Auberge des Mariniers, plus célèbre pour avoir été aussi un temps la maison d'André Breton), et une projection de huit petits films "hors-les-normes" dus à des francs-tireurs excentriques du cinéma, à 20h dans le Ve ardt.

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Pierre-André Sauvageot, Pigeons de Moscou, collage.

 

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1 Programme de la séance de cinéma "hors-les-normes" du 11 octobre au Grand Action

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     Ce programme qui prendra place dans une belle salle du cinéma Grand Action rue des écoles dans le Ve ardt parisien sera présenté par les trois mousquetaires du cinéma "différent", voire "hors-les-normes", Florian Maricourt, Boris Monneau (du groupe "Margins", c'est-à-dire "Marges", mais en anglais, comme d'hab', c'est plus à la mode...) et Théo Deliyannis du Collectif Jeune Cinéma. Cinq auteurs apparemment fort excentriques sont présentés donc, Horst Ademeit, Enrique Ley, Alain Bourbonnais (avec son court-métrage de fiction qui met en scène sur l'île de Groix ses créations carnavalesques qu'il appelait des "Turbulents"), Georges Andrus et Le Déboucheur. Andrus est un poète des irisations sur bulles de savon, Ademeit paraît s'exciter sur des phénomènes inexpliqués et des décryptages magiques d'après retransmission de tirages du Loto (il me paraît relever davantage à ce titre de l'immense cohorte des "fous littéraires" que de l'art brut où on le range depuis quelque temps), Ley fait de l'animation en pâte à modeler pour dénoncer les dangers que court la société actuelle, tandis que "Le Déboucheur", entreprise familiale bruxelloise, produit des films destinés à expliquer le débouchage qu'opère l'entreprise sur les tuyauteries de ses clients, ces films pouvant être vus au second degré comme du cinéma abstrait "aux qualités plastiques insoupçonnées", nous affirme Florian Maricourt.

    Entre ces deux événements, l'un étant nettement plus éphémère que l'autre, je sais de quel côté je vais aller, quitte à m'enquérir de l'autre un peu plus tard...

 

23/09/2018

Les automates de La Celle-Guenant (2), quelques images supplémentaires

      Mon correspondant Pierre Chevrier m'a adressé d'autres photos des automates déjà signalés précédemment sur une brocante estivale de La Celle-Guenant (c'est près de Loches, en Touraine). Les saynètes animées représentent des métiers d'autrefois, lavandières, rémouleur, forgeron ou maréchal-ferrant, vignerons fouleurs de raisin, pompiers, pompeurs de l'eau communale qui en profitaient pour échanger et bavarder... A bien tout scruter, on aperçoit dans les panneaux explicatifs qui sont placés en dessous des scènes une date et des initiales qui sont peut-être celles de l'auteur des sculptures: A.M. On est ici en présence d'un de ces nombreux nostalgiques de la vie rurale du passé qui ne peuvent se résoudre pas à la voir glisser dans l'oubli...

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Photos Pierre Chevrier, juillet 2018.

15/07/2018

Des "Bricoleurs de paradis" au cinéma le Cin'étoile de Saint-Bonnet-le-château (Forez)

     Les Bricoleurs de paradis (qui était sous-titré Le Gazouillis des éléphants, titre initial refusé par FR3, que j'ai réutilisé en 2017 pour mon inventaire des environnements aux éditions du Sandre), le documentaire sur des environnements populaires spontanés du Nord et de l'Ouest de la France, que j'ai co-écrit avec son réalisateur Remy Ricordeau (sorti en 2011), sera projeté le samedi 21 juillet à 18h dans un cinéma associatif, le Cin'étoile, de St-Bonnet-le-Château, village du département de la Loire, et de la région du Forez, situé non loin de St-Etienne (et en dessous du village de Soleymieux dont, sur ce blog, j'ai parlé de son étrange fontaine...). Ceci, à l'initiative d'une association culturelle animée (entre autres) par Marie Oulion, "Regards sur...". 

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Présentation du DVD du film sur le rabat de la jaquette d'Eloge des Jardins anarchiques.

 

      Le programme du Cin'étoile annonçait il y a peu à la suite de la projection une conférence de Roberta Trapani sur les "lieux embellis". Elle ne pourra pas être là finalement... On m'a invité à la dernière minute pour dire quelques mots au sujet du film dont je suis le co-auteur – et celui qui proposa la majorité des différents sites et auteurs que l'on y voit égrenés, sites que l'on retrouve par ailleurs dans le livre, Eloge des jardins anarchiques (éditions L'Insomniaque) dans lequel fut inséré le DVD (voir sa galette ci-dessus). J'espère que ce sera l'occasion de débattre avec le public présent.

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Tournage de Bricoleurs de paradis, le réalisateur Remy Ricordeau, avec l'opérateur caméra, Pierre Maillis-Laval, sur le site (aujourd'hui démantelé) d'André Hardy à S-Quentin-des-Chardonnets (Orne) ; photo Bruno Montpied. 2010.

02/07/2018

Un tableau comme on les aime, vers lesquels il faut aller à présent...

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Auteur masqué, titre inconnu...

 

     L'autre jour, en me promenant dans mes archives iconographiques numérisées, j'ai découvert, ou redécouvert ce tableau que j'avais photographié je ne sais où, au gré d'une balade, peut-être dans un musée. Il m'a de nouveau frappé (j'écris "de nouveau", car si je l'ai photographié – alors que je n'ai pas noté sa référence très clairement, et qu'apparemment il relève d'un champ d'exploration qui n'est pas, ou qui n'est plus, souvent le mien – c'est qu'il m'avait déjà frappé une première fois), ce qui n'est pas si fréquent. On aperçoit parfois pour la seconde fois des images que l'on avait aimées sur le moment mais dont le charme, la surprise, se sont évaporés à la deuxième rencontre. Ce qui n'est pas le cas ici. Celui-ci m'a encore captivé.

     Il y a du Van Gogh qui souffle à l'intérieur, la folie – la tourmente – en moins, il me semble. Le paysage se soulève comme pris d'une danse de Saint-Guy.

 

Extrait de Paracelse, de Georg Wilhelm Pabst (1943, en Allemagne) ; du Michaël Jackson avant l'heure...

 

   Les pitons, les maisons, les chemins, tous se mettent à onduler telles des bayadères envoûtées, comme les personnages du film de Pabst ci-dessus (une surprise là aussi, que j'ai dénichée  en cherchant l'orthographe de Saint-Guy). Les nuages et les buissons eux-mêmes partent en sarabande. Le paysage, au départ classique, un peu fauve, ondoie, part en vrille, littéralement, travaillé de tourbillons, comme si de l'intérieur germait un outre-paysage, plus abstrait, plus surréel, délaissant la référence aux paysages réalistes. Ce tableau réalise la prouesse de marier figuration d'après motif avec figuration ne renvoyant qu'à elle-même, dans un jeu détaché de la copie du monde environnant.

PS: J'offre un de mes petits dessins à qui trouvera le nom du peintre au tableau renversant (Mais, Régis  Gayraud, vous ne jouez pas! Désolé... Laissez une chance aux autres sur ce coup...). Et essayez, please, de ne pas recourir à internet, c'est trop facile, soyez honnête, ne vous fondez dans vos hypothèses que sur vos connaissances ou intuitions.

Le premier à donner, en commentaires (l'horaire d'arrivée de ces derniers faisant foi), le nom en question choisira parmi les deux dessins ci-dessous:

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Bruno Montpied, La Petite sorcière, 21x14,5cm, 2017.

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B.M., Le Clown triste, 14,5 x 21 cm, 2017.

25/05/2018

Les éléphants qui gazouillent, actualités à la Halle St-Pierre et à Nice (Festival du Film d'Art Singulier)

      Cela fait quelque temps que je n'ai pas parlé de ce qui advient autour de mon livre, Le Gazouillis des éléphants, mon inventaire d'environ 300 environnements populaires spontanés français, aux éditions du Sandre. Il est utile peut-être de signaler aux retardataires, qui ne se le seraient pas encore procuré, qu'il est désormais officiellement épuisé, à la fois chez le diffuseur (Harmonia mundi) et chez l'éditeur...

      On peut cependant encore le dénicher chez les quelques libraires qui ont décidé d'en garder des exemplaires en cas de demande de dernière minute. Au premier rang desquels, on peut citer la librairie parisienne de la Halle St-Pierre qui en possède encore une petite vingtaine. Du reste, dans le cadre de la manifestation culturelle "Le Pari des librairies", je serai amené à dédicacer l'ouvrage à la Halle St-Pierre le vendredi 8 juin à 16 heures (ça se passe dans le hall) pour ceux qui voudraient l'acquérir.

      Le livre traîne dans d'autres librairies sans que je sache bien les identifier. On me l'a signalé récemment acheté à Sète, par exemple. J'ai vu un exemplaire qui "résistait" également au bout du rayon "art brut" de la librairie L'Ecume des pages à St-Germain-des-prés. Il est probable que le comptoir de livres de la collection de l'Art Brut à Lausanne en a encore quelques exemplaires...(?) Etc. Si vous en voyez ici ou là, n'hésitez pas à le signaler à mes lecteurs via les commentaires suivant cette note. Cela peut être un agréable jeu de pistes.

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     Une autre occasion se présentera plus tôt, dans une semaine exactement, le 1er juin prochain, à Nice, à la librairie Masséna (55 rue Gioffredo), de 19h à 20h30, pour parler de mon livre et pour le dédicacer également auprès des amateurs. La librairie aura une dizaine d'exemplaires à vendre. Je causerai du livre avec le libraire et l'animateur du festival de cinéma autour des arts singuliers, Pierre-Jean Wurst, qui m'invite à la fois pour cette soirée du 1er, et le lendemain matin aussi, le samedi 2 juin donc, dans l'auditorium du musée d'art moderne et d'art contemporain (MAMAC) de Nice, dans le cadre de l'association Hors-Champ. Entre 10h30 et 12h, je présenterai succinctement en effet quelques films sur des créateurs d'environnements que l'on peut retrouver dans mon Gazouillis, comme François Michaud, Jean-Marie Massou (rencontre de 1987), Raymond Guitet, Marcel Landreau, et Roméo Gérolami. Jugez plutôt du programme de ces festivités (je vous le mets aussi en lien vers un fichier pdf plus lisible):

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Programme du 21e Festival du Film d'Art singulier, juin 2018.

 

     Les trois créateurs, Massou, Guitet et Landreau, figurant à cette projection, furent filmés par moi en format Super 8 (du cinéma amateur, donc – ce qui suffit à me faire qualifier parfois du titre ronflant de "cinéaste", surtout après avoir lu la fiche qui a été consacrée au groupe, plus informel et éphémère qu'autre chose, Zoom back Caméra!, sur Wikipédia, auquel son auteur me fait appartenir d'une manière un peu "romancée"¹ ; voir aussi la fiche qui m'a été plus spécifiquement consacrée). Les deux films sur les deux derniers sont trouvables en DVD dans les bonus du film Bricoleurs de paradis qui fut joint à mon livre Eloge des jardins anarchiques, paru aux éditions L'Insomniaque en 2011. Le petit film sur Massou est désormais une rareté. Il fut tourné en effet en 1987, bien longtemps avant le film d'Antoine Boutet (certes infiniment plus professionnel...), à une époque où Massou, encore vigoureux, grimpait à mains nues aux arbres, ou descendait pareillement dans les excavations qu'il creusait comme une taupe humaine un peu partout sur son terrain lotois. Je l'ai assez peu projeté en public. Les dernières fois, ce fut sans doute d'ailleurs déjà dans ce même festival à Nice (voir le petit dictionnaire Hors-Champ de l'art brut au cinéma aux éditions de l'Antre, livre disponible à l'occasion du festival).

      Sinon, autre petite nouvelle concernant le Gazouillis, le livre a été offert par un de mes lecteurs, Laurent Jacquy (voir le blog Les Beaux dimanches), à un créateur présent dedans, José Leitao (voir sa notice du Gazouillis, trouvable à la région Picardie, département de la Somme). Ce dernier, qui s'était un peu arrêté de sculpter est, paraît-il, reparti de plus belle, encouragé, paraît-il par sa présence dans le livre. En tout cas, j'aime à le croire...

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José Leitao avec le Gazouillis des éléphants, mai 2018, ph. Laurent Jacquy.

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José Leitao, ph. Laurent Jacquy, mai 2018.

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¹ Le groupe "Zoom back, caméra!", que l'auteur de la fiche Wikipédia présente comme ayant eu des activités "entre 1974 et 1984", n'a pas réellement existé, en toute rigueur historique. Nous étions trois amis, qui faisions effectivement diverses expérimentations à cette époque, telles que décrites avec justesse dans la notice, mais sans s'être organisés réellement, formellement, en groupe avec un nom. Le nom de "Zoom back, caméra!" (emprunté je crois à une réplique du film de Jodorowsky, La montagne sacrée, qui nous faisait beaucoup rire, Jacques Burtin et moi)  ne fut proposé, en manière de plaisanterie surtout, comme si nous étions vraiment un groupe, qu'à l'occasion de la projection dans le cadre du salon lettriste Ecritures en 1977 au musée du Luxembourg.le gazouillis des éléphants,environnements populaires spontanés,éditions du sandre,halle saint-pierre,habitants-paysagistes naïfs,art immédiat Et jamais à une autre occasion! Nos expérimentations se passaient le plus souvent à deux, tantôt Jacques Burtin et moi, tantôt Jacques avec Vincent Gille. Les expérimentations à trois (une conversation automatique qui échoua lamentablement, des photographies de situations créées, une peinture collective de tableau, le Triangle) furent rares.

16/05/2018

A mouche que veux-tu? Un film étonnant de 1959 par René Chaumelle

      Au rayon des films d'amateurs qui sont parvenus à un certain résultat au point de vue talent et inventivité (en dépit de certaines lourdeurs et maladresses inhérentes au bricolage fait maison...), il faut bien sûr ranger en tête de gondole le film de René Chaumelle, A mouche que veux-tu?, de 1959, d'une trentaine de minutes, dont le sujet pourrait bien heurter aujourd'hui tout à la fois féministes contemporaines et défenseurs de la cause animale... (Voir ci-dessous le film proposé par la Cinémathèque de Nouvelle-Aquitaine)

 

      Mais on ne contestera cependant pas l'originalité certaine de ce film incroyable, joué par un certain Jean-Marie Masse, qui fut par ailleurs un grand collectionneur de disques de jazz sur la région de Limoges. C'est la preuve qu'un cinéma amateur peut recéler quelques pépites. René Chaumelle, hors contexte du sujet de ses films, avait un sens inné du cadrage photographique et une appétence certaine pour les vues et les montages originaux, inventifs, expérimentaux. Pour en savoir plus sur lui, on cherchera du côté du cinéaste Sylvain Morin qui lui consacra un documentaire en deux parties, Cinéma maison.