Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

11/09/2007

Rabiots d'obscénités romanes...

Le hasard objectif, ces temps-ci, me ramène du côté des galipettes obscènes romanes (le terme n'a rien de péjoratif sur mon clavier), avec un texte qu'Emmanuel Boussuge vient de m'adresser tout droit depuis son Cantal chéri. Y a pas qu'à Mauriac qu'on peut découvrir des acrobaties et des exhibitions de parties dites honteuses. Voilà comment débute le texte d'Emmanuel : 
Rabiots d'obscénités romanes et précisions superflues
C'est ma tournée !
Modillon roman, Moussages, ph.E.Boussuge.jpg
 

 

 Encore un loup auto-fellateur. Mais ce n'est pas le même qui a déjà été présenté sur le blog Le Poignard Subtil (note du 2 août). Celui-ci est à Moussages, entre Trizac et Mauriac. La parenté saute aux yeux et ça n'a rien d'un hasard. Le modillon a été sculpté par le même atelier sévissant autour du grand chantier de Mauriac au cours du XIIe siècle. Les motifs favoris de celui-ci (c'est-à-dire du ou des sculpteurs spécialisés dans les modillons) se retrouvent dans un large rayon autour de la basilique alors en construction...

 

  Et voilà comment il se termine :
 ...Pour finir, un clin d'oeil. Entre deux modillons, comme entre deux doigts de pied, on a quelquefois des surprises. On trouve ainsi à Brioude entre deux trognes modillonnées anodines -seul l'appareil photo permet de la voir en agrandissant a posteriori- une figure étrange. Il s'agit d'un loup monopode, se suçant le pied, un parfait intermédiaire entre le sciapode et le loup autonome, donc. De quoi ravir les boucleurs de boucle (l'image est floue malheureusement).
b6832894175adc591b113d75fc05eb5b.jpg 
         
               Comme on le constate, on pourrait croire que le texte ne parle que d'auto-fellations. Mais ce n'est qu'une impression. Le texte se termine en boucle comme il commence voilà tout, dans une forme, finalement, qui colle assez bien à la position décrite! Si on veut en savoir plus, on lira avec profit l'ensemble du texte susdit en cliquant sur Rabiots d'obscénités romanes, texte d'E. Boussuge 2007.doc. Outre un texte rédigé dans un style rigoureux et peu académique (on y cause à certain moment aussi bien de rockn'roll), le lecteur y trouvera plusieurs photos de l'auteur qui viendront enrichir sa culture pornographique romane.
         Et si cela ne suffisait pas, je renvoie le lecteur qui en veut toujours plus à un film de Claus Josten, L'ennemi à nu,  (2004, 26 min), qui sera diffusé dimanche 16 septembre sur Arte (décidément, depuis quelques dimanches soirs, Arte cherche à relayer efficacement le Poignard Subtil). C'est l'histoire de Claudio Lange qui photographie les sculptures romanes des édifices religieux qui jalonnent le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle. Cet artiste, « Chilien installé à Berlin, qui étudie cette statuaire depuis 1989, interprète ces représentations incroyablement obscènes comme une forme de propagande anti-islamique développée par l'Église catholique pour justifier les croisades » (texte de présentation des programmes d'Arte). Voilà bien une autre interprétation des obscénités romanes à laquelle beaucoup, je gage, n'avaient pas encore pensé !... A voir et à supputer...

 

02/08/2007

Galipettes de corbeaux à Mauriac: MASSIF EXCENTRAL (3)

    Ne venez pas me dire, on connaît déjà ça, on en a déjà vu... (car il y a des lecteurs blasés, ils se sont manifestés pas plus loin que sur ce blog).

    Or donc, voici des corbeaux qualifiés sur les cartes postales vendues du côté du Cantal, non pas de "chers corbeaux délicieux", comme disait Rimbaud, mais  de "diableries". Ce qui devait être le terme autochtone pour parler à mots couverts, en pouffant ou tout au contraire d'un ton scandalisé, de ces postures affriolantes, voire "pornographiques" (une pornographie* moyen-âgeuse et ingénue) qui s'affichent depuis quelques siècles sur les corbeaux de l'église de Mauriac. Quid des "corbeaux"? Ce sont, dit le dico d'architecture, des "supports en surplomb accusant une faible saillie par rapport au nu d'un mur"... Saillie, nu du mur, on ne saurait mieux dire entre les lignes... Je parlerai personnellement davantage d'acrobaties aussi vieilles que l'homo sapiens (Pierre Molinier et ses contorsions n'avaient rein inventé). Quoi...? Ah, oui, on me souffle... Ce sont des modillons, pas des corbeaux... Bon, d'accord, M.Boussuge, mais je préfère les corbeaux... C'est plus petit que les modillons, ça saillit moins, mais c'est plus rigolo, corbeaux, pour les acrobaties.

   Rincez-vous donc l'oeil par ces beaux soirs d'été, pas seulement le gosier.

    0e2075a723ccb44adc095c28a0cfaa39.jpg          ff7ad71c16bc1524111a2482df9b9500.jpg
43118770da119b2587ead8f418ccbc04.jpg
   3fceff590b6edfd5865bafa9e4641b94.jpg          7836047ddaf54074c9c315e3dca84357.jpg
* Je ne mets aucune intention puritaine dans l'emploi du mot "pornographie", je dis ça pour tous ceux que ce mot peut hérisser...

01/08/2007

Le plafond merveilleux de Cheylade: MASSIF EXCENTRAL (2)

10bd7fc48f04cf6f57eb70ab1673fdcb.jpg 
  d2262e9f5f907a75f3d88ac895e838de.jpg

    Pour atteindre Cheylade, où l'on vient de loin pour voir un plafond d'église, on passe, venant de Murat (le voyage se déroule dans le Cantal), au large d'une zone bien désertique, ondulant sans un arbre, sans un buisson, tendre pâturage idéal sous le ciel, ce jour, bleu, paysage qui a pour nom Plateau du Limon (c'est une des coulées de lave de l'ancien volcan dont la bouche principale, nous assure-t-on (Voir le Guide de l'Auvergne Mystérieuse d'Annette Lauras-Pourrat) , se trouvait au Puy Griou (ce volcan a coulé en étoile, en soleil... On s'en convainc quand on vient du ciel).

38e2db77a608379c728177a549e30a07.jpg

 On laisse le plateau magnifique et lunaire (une Lune qui serait verte) à gauche, on ne s'y arrête pas, on n'est pas venu pour lui, et pourtant c'est une révélation qu'on emportera avec soi et qui reviendra nous hanter au fond de notre ville striée de pluie et de nuit.

109908ea1b961674b3ec080d2c199b3a.jpg
(Photo B.Montpied)

     C'est l'intervalle délicieux qu'il faut pour faire le vide avant la découverte du plafond merveilleux de l'église Saint-Léger de Cheylade

725f90985ecc3aa3e2a3a082606768bc.jpg

   Eglise qui a été classée monument historique en 1963,"la décoration de la voûte [ayant été] l'élément essentiel qui a motivé le classement", dixit l'Association Valrhue qui a écrit la plaquette "Eglise Saint-Léger de Cheylade" pour les éditions Créer (dont j'ai extrait ici plusieurs photos, notamment les premières en tête de note). On notera au passage que les classements d'églises sont plus rapides que ceux des environnements spontanés...

a2175dd989ef4429ba4809b20a1f3b55.jpg
(Photo B.Montpied)

     Des fleurs partout, comme s'il en pleuvait, poussées au ciel. Des fleurs, des animaux, des couteaux (sans doute des poignards subtils)... Des symboles bien sûr mais aussi des images profanes.

99ca55683ba916c670cea10d08eefdb6.jpg
Images (ci-dessus au centre et ci-dessous à gauche et à droite, puis en dessous...) extraites du livre de l'association Valrhue
 
dd24b25fc390467e249682710e364200.jpg

     On trouve des têtes de mort aussi avec des tibias entrecroisés comme sur des drapeaux de pirates, des animaux fantastiques (le basilicc5df446b360b1257b7141769e1eaa9eb.jpg, un oiseau à deux têtes, une Gorgone...), des serpents, mais des anges aussi bien entendu, des coeurs, enflammés ou sur la main... Un tabernacle, des écussons... Comme un déluge  d'images (elle sont au nombre de 1360, peintes sur autant de caissons), voulant instruire les fidèles de la magnificence de la création divine, de sa variété infinie, du langage symbolique permettant d'accéder à la reconnaissance de ce Dieu si puissant...c37d9db1f4c704d15ba0aa9228c599a9.jpg

     "A l'instar de la sculpture médiévale où la flore naturelle côtoie une végétation stylisée, créée par l'imagination à partir de certains modèles, le peintre de l'église de Cheylade utilise ce même élan d'inspiration dans ses représentations florales." (Pascale Bulit-Werner et Gérard Bulit, Association Valrhue).

 87838aff28c2bb9198b3b3d98e8a86b3.jpg        1082de325684ee1a452d70c57dd6f3f1.jpg

    On doit au respect des architectures religieuses la préservation de tels vestiges (de même qu'on doit à l'oubli dans lequel tombent souvent les lieux souterrains la préservation d'autres témoignages d'art naïf, je pense par exemple au "graffito" naïf relevé dans les carrières de Saint-Savinien en Charente-Maritime, que Michel Valière a signalé sur son blog Belvert ces jours-ci... Mais il y a d'autres exemples, j'y reviendrai). Les auteurs du livre sur l'église St-Léger mentionnent que "tous les auteurs du XIXe siècle" se sont accordés sur la date de 1743 pour la date de création de ces 1360 petites peintures, parce qu'une inscription "finis opus 1743" aurait été vue sur un caisson au fond de l'église côté nord, caisson qui aurait été ensuite caché par la construction d'une tour qui l'aurait recouvert...

e3fe9dfb7a972c0a859d3b3bf00c1cb1.jpg
(photo B.M.)

     On ne sait pas grand chose de l'auteur de ces peintures, c'est un peu du reste toujours la même chanson avec ces rares vestiges de peinture populaire ancienne (qui nous montre que le Douanier Rousseau n'est bien sûr pas le premier peintre naïf, seulement le premier peintre d'une catégorie nouvelle de l'Art Naïf).

a449020835247c4da34b7c82aa7ea20b.jpg
(Photo Association Valrhue)

    La mémoire populaire garde l'hypothèse que ce serait un artiste italien, "aujourd'hui non encore identifié", de passage dans la région, qui aurait réalisé la peinture des voûtes. Ce genre d'improbables indices sur la personnalité de créateurs restés dans l'ombre fait penser au Déserteur qu'a évoqué Giono dans une fameuse nouvelle, ou à l'auteur inconnu des boiseries naïves en provenance d'une maison patricienne de Jettingen peintes vers 1840 et conservées  au Musée Historique de Mulhouse (là, on parlait d'un peintre "peut-être tzigane, ou russe (ou russe tzigane?)", nomade louant ses talents de peintre amateur à qui en avait besoin ; Giono lui dans son récit brode à l'envi sur les corporations méridionales de peintres ambulants d'ex-voto, et c'est vrai que cela fait rêver ces chemineaux peinturlureurs, la boîte de couleurs sur le dos, le quignon de pain et la tome de fromage, le litron peut-être en sus dans la besace...)

99cbef860a83b92dee0cf561ff6a348e.jpg