15/12/2007
Le "Lulu Club", qui saura le décrypter?
Coll.privée, Paris, photos B.Montpied
"Lulu club", on lit ces mots inscrits en capitales sur la nappe de part et d'autre d'une table où sont rassemblés des hommes du monde. Que sont-ils venus faire en ce lieu? Difficile à dire... Un seul homme se tient debout derrière le rang de droite, il semble parler et pointe du doigt quelque chose ou quelqu'un. Peut-être le gros oeuf sommé d'un noeud enrubanné qui trône au milieu de la table, orné d'un profil de femme, qui, d'après moi, pourrait bien être la fameuse "Lulu"...
"D'après moi", eh oui, j'en suis réduit aux conjectures et peut-être, derrière l'hypothèse intuitive, au délire d'interprétation. Au fond, j'aime assez en être réduit à de telles extrémités! Si vous voulez bien, délirons ensemble, et peut-être même, proposez vos propres interprétations...
Celui qui pointe du doigt pourrait bien être une sorte d'imprécateur, un qui a quelque chose sur le coeur, quelque chose d'assez lourd pour provoquer la réalisation d'une telle composition (crayons de couleur, craie...) dessinée sur une fine feuille de papier de 55 sur 11O cm. C'est le seul personnage qui se tient debout, il domine la scène, tel un juge ou mieux, tel le peintre, le narrateur... Il paraît désigner l'oeuf où est peint le doux profil d'une femme, la femme pour le souvenir, l'évocation de laquelle est réuni cet étrange aréopage d'hommes aux sourires de commande, légèrement béats, non loin du rictus.
Ils ont tous été réunis pour Lulu, conviés à déjeuner, puisque ce qui ressemble bien à une oie rôtie, au centre de la table, pleure déjà à la pensée du repas que l'on va faire sur son dos, ses cuisses, ses pilons (la larme qui coule sous l'oeil du volatile fait écho à la "larme" en pendentif qui orne l'oreille de la dame)...
Une "oie", dis-je? On connaît le double sens de ce mot. Une oie, une gourde (pour la soif des instincts masculins primaires?), une sotte qui s'est bien fait avoir ("posséder", là aussi, plein de double sens). L'imprécateur leur reproche-t-il leur comportement avec Lulu? L'oeuf, ou le médaillon aussi bien, où se montre le profil, a été entouré de fleurs, des roses, cela paraît bien être un hommage...
Deux mots sont inscrits au-dessus de la scène, "Amitié", "Solidarité"... Est-ce de l'ironie? Solidarité entre butors, entre soupirants sans soupirs, toujours prêts à revenir dévorer celle qu'ils ont prise pour une oie blanche, mais dont le peintre, par désir de vengeance, a décidé de laisser les portraits caricaturaux afin de les ridiculiser dans la mémoire?
Tous ces éléments paraissent composer un joli petit puzzle qui s'enchaînerait bien, s'il n'y avait qu'eux... Seulement voilà, un grain de sable vient enrayer ce beau mécanisme... Il existe un élément dans la composition dont on ne comprend absolument pas la présence... Et c'est, vous l'avez certainement tout de suite remarqué, l'étrange pingouin placé tout en haut du premier rang, fort énigmatique et inexplicable (depuis Wallace et Gromit, on sait comment les pingouins peuvent se révéler énigmatiques et inexplicables) ...
Seule hypothèse qui puisse éclairer sa présence, le jeu sur les mots, le goût du calembour visuel que paraît grandement priser l'auteur de cette charge satirique (une signature malaisément déchiffrable dans le bas à gauche paraît révéler la signature d'un certain "G.Georgeon", inconnu de moi ; à signaler à droite une autre inscription, "Max", qui désigne peut-être seulement l'homme sur qui est placé le prénom), un "pingouin" en argot, c'est un avocat ou un huissier. Le caricaturiste représente-t-il un avocat qui aurait été impliqué dans cette sombre affaire d'amants en goguette?
A vous de me dire!
12:50 Publié dans Art inclassable | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : G.Georgeon, caricature, Lulu Club, art inclassable | Imprimer