25/08/2017
Cyril Constantin, un artiste total très méconnu...
Un ouvrage d'art récemment paru (2016) sur un artiste savoyard oublié.
Le mot "singulier" est parfois un peu accommodé à toutes les sauces. Cyril Constantin, géant barbu qui n'aima guère quitter les bords du Lac du Bourget, fut un artiste que, je parie, peu de gens connaissent, un artiste certes autodidacte, mais assez difficilement rattachable au corpus des artistes dits singuliers (dont le père tutélaire est peut-être Gaston Chaissac). C'est un prototype d'artiste ayant fait carrière avant tout dans sa région. Né en 1904 à Chambéry, il passa la plus grande partie de son existence à Aix-les-Bains, avec une parenthèse à Tresserve, près du Lac, où il se bâtit sa propre maison qui se voulait un Temple de l'Art et un "Empire de Cyrilie" avec une monnaie propre. Il décède à Aix en 1995 à 91 ans.
Certes, il n'a pas de formation en écoles des beaux-arts. C'est un autodidacte qui a des intuitions géniales. Au départ, il se crée une affaire de confection et chapellerie, il est sportif, et passionné de mécanique, suffisamment pour pouvoir construire un petit avion en kit qu'il appelle le "Pou du ciel". En 1937, il dépose un premier brevet d'invention. Ce goût de l'invention est sans doute ce qui le caractérise en premier, même si la plus grande partie de son existence se passe à la lumière de l'art. Lors de son mariage, il se déclare d'ailleurs avant tout "inventeur". La peinture lui est venue, écrit Geneviève Frieh-Giraud, sur "un coup de tête", en 1943. Il peint une grande toile, reproduite curieusement partiellement dans le livre, alors que cela paraît son œuvre-clé, en 1944, "Satan conduit le bal".
Le peintre âgé devant sa toile "Satan conduit le bal", peinte dans sa jeunesse, photo extraite du livre Cyril Constantin artiste singulier ; il y a du Ensor dans ce tableau-là, qui fut offert par la suite à la ville d'Aix-les-Bains.
Il va, semble-t-il, rencontrer un certain succès dans les milieux parisiens, il expose en galerie, l'Etat lui achète deux tableaux "pour les Collections nationales". Il fréquente Frédéric Delanglade, le peintre surréaliste qui était aussi ami du Dr. Ferdière. Mais il ne paraît pas s'entendre avec ce milieu de galeristes parisiens, il s'embrouille lors d'un accrochage à la galerie de Katia Granoff. L'homme a du caractère, peut-être trop ? Il va surtout se contenter dans ces années d'après-guerre de créer un mouvement d'artistes dans sa région natale. C'est un bon vivant, il a tout du rapin friand d'agapes et de beuveries, les canulars ne sont pas pour l'effrayer. Il projette à un moment d'aménager le Lac du Bourget de façon révolutionnaire.
Cyril Constantin projetait d'araser une montagne, la Dent du Chat, pour en faire une pyramide ; les roches enlevées serviraient de fondations pour des îles artificielles : l'Ile au trésor, l'île déserte, l'île aux rats, L'île Liputienne, le belvédère des dieux, etc. ; plan extrait du livre de Geneviève Frieh-Giraud.
Sa peinture a quelque chose d'à la fois naïve et expressionniste. Hélas, si l'on se base sur ce que met en avant le livre de Geneviève Frieh-Giraud, les sujets qu'affectionnent le peintre manquent passablement d'imagination, se complaisant fréquemment dans l'iconographie chrétienne ou les autoportraits qui trahissent chez Constantin une admiration sans borne pour son reflet. C'est peut-être cette faiblesse d'inspiration dans les sujets qui ont rejeté ce peintre dans l'ombre. Il faudrait une exposition rétrospective bien choisie qui nous présenterait ses œuvres les plus originales pour se faire une idée plus juste. Car, c'est un des mérites du livre, on voit, de ci de là, tout de même, surnager quelques pépites, des tableaux, mais aussi des résultats d'expérimentations de tous ordres, la vocation initiale d'inventeur ayant fini par reprendre le dessus au cœur de l'art. Constantin grave, tripatouille la matière, invente un nouvel alliage, le cyrillium, qu'il trouve le moyen de fondre avec le verre en compagnie d'un maître-verrier de ses amis. Il mène toutes sortes d'expériences, il a un côté alchimiste. Puis il paraît abandonner à un moment, dans les années 1960, la peinture pour se consacrer à ce qu'il appelle la "cyrillovision", projection lumineuse de couleurs et de formes aléatoirement mélangées, en mouvement. L'époque où il se lance là-dedans est celle de l'art cinétique, d'autres sont aussi intéressés que lui par la création avec la lumière (Asger Jorn, le peintre danois, par exemple fixe sur des toiles les trajectoires de faisceaux lumineux qu'il a tracées dans l'air).
Cyril Constantin a quelque chose de l'Italien Giuseppe Pinot-Gallizio, autre créateur autodidacte (à la base, il était pharmacien) peu connu en France, alors que ce fut un créateur génial, situationniste (au début du mouvement), promoteur d'une "caverne de l'anti-matière" aux parois couvertes de peinture, et initiateur de la peinture explosive, puis de la peinture industrielle produite par une machine crachant aléatoirement de la peinture sur des dizaines de mètres de rouleaux de toile blanche, le but étant la destruction du marché de l'art... Constantin participait ainsi - le sut-il? - des expérimentations de son époque, mais encore une fois, le sujet souvent religieux de ses peintures l'éloigne de toute velléité de rapprochement rigoureux avec les autres artistes d'avant-garde que j'ai cités, parfaitement athées, eux, et ennemis de toute adhésion à une quelconque religiosité.
Cyril Cosntantin, exemple des résultats obtenus par le procédé de projection de la "Cyrillovision", photo extraite (comme celles ci-dessus) du livre de Geneviève Frieh-Giraud.
Cependant, il peut être curieux de chercher à mieux connaître la vie et l'œuvre de ce personnage "singulier" que je ne fais ici qu'effleurer et que restitue au plus près l'ouvrage de Geneviève Frieh-Giraud, car l'homme était à n'en pas douter un phénomène hors du commun, quoique fils de son époque.
Pour se procurer le livre, on ira voir à la librairie de la Halle Saint-Pierre (à partir de septembre, car en août ils sont fermés), et sinon, on peut le commander directement à l'Association pour la sauvegarde du patrimoine de Tresserve, Mairie, 40 chemin de Belledonne, 73100 Tresserve.
00:57 Publié dans Anonymes et inconnus de l'art, Art moderne méconnu, Art singulier, Art visionnaire | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : cyril constantin, geneviève frieh-giraud, tresserve, lac du bourget, cyrillie, cyrillovision, temple de l'art, art singulier, art moderne méconnu, asger jorn, giuseppe pinot-gallizio, art expérimental, art sacré, athéisme, frédéric delanglade | Imprimer
01/01/2015
Voeu!
Bon Athée en 2015!
00:05 Publié dans Art immédiat, Curiosités, modifications et divertissements langa, Questionnements, Voeux de bonne année | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : athéisme, anticléricalisme, irréligieux, blasphème, profanation, apostasie, voeux de nouvel an | Imprimer
03/02/2008
A la niche les glapisseurs de dieu!...
La Fédération de Paris de la Libre Pensée et le groupe Francisco Ferrer organisent une conférence de Guy Ducornet à la Bourse du Travail, salle Jean Jaurès, (3, rue du Château d'Eau, tout près de la place de la République à Paris), le jeudi 21 février prochain à 19h 30:
"Surréalisme et athéisme
«A la niche les glapisseurs de dieu !»"
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Guy Ducornet (membre du mouvement surréaliste américain depuis 1967) y présentera son dernier ouvrage Surréalisme et athéisme «A la niche les glapisseurs de dieu !» (Gingko éditeur).
«A la niche les glapisseurs de dieu !» est à l'origine un pamphlet signé par André Breton et 50 surréalistes en 1948, qui a été contresigné sur la proposition de Guy Ducornet, en 2006, par 175 surréalistes du monde entier. Se calquant sur le mot d’ordre «A chacun selon ses désirs» clairement antagonique à la morale chrétienne, ce projet est l’occasion de revenir sur les combats anticléricaux et antireligieux du mouvement surréaliste.
Dans cette anthologie de textes méconnus – historiques ou contemporains – l’auteur revient en détail sur l’engagement politique (sur son aspect marxiste et libertaire) des surréalistes.
(Cette note est basée sur une information émanant de la Libre Pensée et de Guy Ducornet, que j'ai remontée et légèrement remaniée pour l'adapter au blog ; j'ajoute que je n'ai pas encore eu le livre entre les mains, je répercute de confiance l'information en laissant juges mes lecteurs)
19:40 Publié dans Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : Guy Ducornet, A la niche les glapisseurs de dieu!, Surréalisme, Athéisme, Libre Pensée | Imprimer