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Rechercher : Philippe Lespinasse

Noms prédestinants, ça continue

     Pour commencer, voici une lettre intéressante de notre honorable correspondante Isabelle Molitor:

       "Cher Sciapode,

    Il y a des faits divers qui ont lieu dans des lieux aux noms quasi prédestinants, de vrais calembours par anticipation. A cause sans doute de l'aspect épouvantable de ces actes, les journalistes tournent autour sans oser l'indiquer, malgré toute leur envie, semble-t-il. 
     C'était le cas cet automne avec la tuerie de Chevaline (dans les Alpes). Partout on lisait : "La Tuerie de Chevaline". C'était l'expression consacrée. Et personne n'a jamais osé parler de boucherie, alors que, bien sûr, chacun y pensait.
    Et maintenant ce nouveau drame. Tué pour un ballon dans une fenêtre. L'article ci-dessous est agrémenté d'une carte. Et le ballon y est. On ne voit que lui.
      Isabelle Molitor"

     On songera également que l'individu rendu furieux par ce ballon sous le Ballon¹ finira au ballon.ballon de guebwiler,isabelle molitor,noms prédestinants,aptonymes,lieux prédestinants

     Et signalons au passage qu'un autre de mes correspondants, Jean Branciard, dans une note du 29 février 2012, avait déjà mis en évidence une possible influence de la toponymie sur les destinées des individus qui y résident.

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    Pour rester dans les boucheries hippophagiques, signalons cette boutique et son enseigne vues à Romans dans la Drôme en juillet 2011 qu'il faut examiner de près afin d'y apercevoir l'imperceptible patronyme qui me fit tiquer.

Boucherie-Breyton-Romans.jpg

A priori, cette boucherie Breyton n'a rien à voir avec l'aptonymie... Mais si on y regarde de plus près, que voit-on?...

Chevalier-et-boucherie-chev.jpg

... Un chevalier amateur de viande de cheval! Quelle décadence dans la chevalerie moderne... Ph. Bruno Montpied, 2011

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       Dépêche AFP du samedi 2 oct 2010, dans le cadre d’une affaire de harcèlement par internet d’un étudiant homosexuel qui aboutit au suicide de ce dernier, ce témoignage d’un voisin au nom insolite étant donné le contexte (le hasard ne s’encombre pas avec la morale): 

« Ce qui s'est passé est impardonnable. Chacun a droit à ce que sa vie privée soit respectée", estimait un étudiant de deuxième année, Luke Fess ».

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        Régis Gayraud m'a également signalé en avril 2010 : « Jean Le Bitoux, fondateur du journal homo Gai-Pied, qui est mort récemment… »

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    Hervé Brulé, à la direction Eau et Biodiversité du ministère de l’Ecologie, s’occupe de la question des restrictions d’eau… (Yahoo info,  août 2010). L’eau, ça compte, quand on s’appelle Brulé (même sans accent circonflexe sur le u).

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      Le footballeur Sydney Govou, de l’équipe de Lyon, avait à un moment un avocat nommé Thierry Braillard… (avr. 10)

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        Philippe Lalane de son côté me transmet un bouquet d'aptonymes qu'il a relevés récemment, mais il me les transmet seulement oralement ce qui fait que j'ai pas forcément l'orthographe exacte des cas suivants: Mme Blé, gestionnaire de collège dans l'Eure ; Benjamin Millepied, chorégraphe (là, on peut se demander s'il ne s'agit pas d'un pseudonyme fabriqué de toutes pièces en rapport avec la discipline de cet artiste) ; M. Mangenote, accordeur de pianos...

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        Et pour finir deux images...

 

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Ph. Jean-Pierre Willems (j'en profite pour le remercier hautement de m'avoir transmis cette très belle plaque)

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Ph. Darnish (Rouillé est une entreprise de carrosserie et de transports par poids lourds), 2013

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¹Le Ballon d'Alsace est lui-même couvert d'un ballon qui est un radar pour le trafic aérien je crois...



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Hamid Aït Dadda et Jaber Al Mahjoub, si ce dernier s'en va, le premier est toujours là

        Jaber était très connu des Parisiens qui croisaient autour de Beaubourg, du moins à une époque, quand il y faisait de la musique sur les trottoirs. Il était aussi connu du petit milieu des amateurs d'art singulier ou brut (difficile de le classer dans l'une ou l'autre catégorie). Il était amusant de noter aussi tous les endroits improbables (j'avais fait une note à ce sujet) où il avait réussi à se faire exposer, jouant probablement de sa faconde, séduisant par son épate. Il avait un côté camelot déjanté en effet, le Jaber.

     Après avoir vécu ces dernières années, d'après ce qu'il s'en disait, dans des conditions matérielles difficiles tout en étant âgé (il avait 83 ans, puisqu'il était né en 1938), il est parti ce 21 octobre, juste après que la Fabuloserie-Paris lui a consacré une petite exposition au vernissage de laquelle, paraît-il, il n'avait pu se rendre ; elle est prolongée au 1er étage de la galerie jusqu'à une date indéterminée pour le moment, en parallèle de celle qui débutait ce samedi 23 octobre, consacrée au créateur brut marocain Hamid Aït Dadda, prévue pour se terminer, elle, le 27 novembre. On trouvera sur Jaber nombre de renseignements, par exemple sur le site de la Collection Cérès Franco, installée à Montolieu (cette dernière l'ayant exposé dans les tout premiers, et ayant de ce fait acquis des œuvres de très bonne qualité, comme on pourra s'en convaincre aisément ici ; en effet, ce n'est pas faire injure à sa mémoire que d'avancer que les productions de Jaber avaient un peu perdu en inspiration dès les années 2000, je trouve, sauf exceptions). On trouvera également des pistes dans les deux livres qui lui avaient été récemment consacrés (disponibles à la librairie de la Halle Saint-Pierre).

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Jaber, sans titre, plâtre peint à la gouache et plexiglas, 46 x 43 cm, Collection Cérès Franco 162.

 

      Toujours vivant, lui, est présenté à la Fabuloserie-Paris donc – en collaboration avec la galerie Escale Nomad de Philippe Saada, qui le défend depuis plusieurs années (en compagnie d'autres artistes d'Essaouira au Maroc, comme Mohamed Babahoum, Asmah ou encore Ahmed Gnidila) –, Hamid Aït Dadda, âgé de 92 ans...

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Etrange portrait d'Hamid Aït Dadda, photo Escale Nomad/Fabuloserie.

 

      Voici quelques mots de présentation tels qu'ils se présentent sur le site de la Fabuloserie:

       "Agé de 92 ans. Né dans la région d’Essaouira, de la tribu des Haha, Hamid vient d’une famille assez aisée. Très affecté par la mort de sa mère, il souffre du remariage de son père et ne se sent pas de vivre avec sa nouvelle famille.

       Très jeune, il quitte donc le foyer pour aller à Essaouira, puis voyager dans les grandes villes du Maroc. Il vit de petits boulots : marchand, vendeur de rue…

         Grâce à ses voyages et à son retour à Essaouira, où vivent de nombreux étrangers, il apprend le français, l’espagnol, l’anglais et le portugais, ce qui lui permet de devenir guide touristique.

       Tous les visages, qui reviennent de façon obsessionnelle, sont les gens qu’il croise dans les rues et qui se moquent de lui. "

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Œuvres reproduites sur le site de la Fabuloserie

 

       Cette remarque sur les moqueries des passants à son égard, très touchantes je trouve, et ne grandissant pas ceux qui les profèrent, a tout l'air d'un leitmotiv:

    "Aït Dada est un homme intelligent, discret, qui s’est fait lui-même et qui a toujours été la risée des habitants d’Essaouira, ce dont il souffre. Il traîne sa douleur de vivre..."

     Les différents peintres d'Essaouira – j'en ai souvent causé ici – sont toujours aussi passionnants à prospecter. J'ai acquis personnellement, il y a quelques années, deux œuvres d'Aït Dadda. Je les mets en ligne ci-dessous.

 

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Hamid Aït Dadda, sans titre, 26x23 cm, peinture sur carton, ph. et coll. Bruno Montpied.

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Hamid Aït Dadda (à noter que dans sa signature, Hamid ne met pas toujours deux D à son patronyme, son orthographe en caractères romains n'étant pas nécessairement fixée), ss titre, 28 x 20 cm, sd (années 2010), ph. et coll. B.M.

 

LA FABULOSERIE-PARIS. 52 rue Jacob 75006 - 01 42 60 84 23. Du mercredi au samedi 14h - 19h. fabuloserie.paris@gmail.com

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Timbrés

    "Je me souviens que, quand il en avait le temps, mon grand-père Alphonse réalisait des tableaux entièrement composés de timbres-poste découpés et collés comme autant de touches de peinture pointilliste. Son "Coucher de soleil" dans lequel abondaient des fragments de vignettes jaunes à l'effigie de Cérès et d'autres, rougeâtres, du type Semeuse, impressionnait. Son "Bouquet de fleurs", fait de timbres allemands et italiens, ne manquait pas de charme non plus. Cette technique artistique eut de nombreux adeptes. Elle semble avoir complètement disparu de nos jours."

     (Michel Laclos, Troyes et moi, éditions Cahiers bleus/Librairie bleue, Troyes, 1999 ; pour la petite histoire, l'exemplaire que je possède provient de l'ancienne bibliothèque de Pierre Tchernia)

       Pour accompagner ce texte, écrit par Laclos en suivant la phrase stimulante de Georges Pérec, "Je me souviens", voici quelques œuvres exécutées selon la même technique que celle mise en œuvre par son grand-père.

Timbrés,W.Desnoyer, paysage, 27x34cm, peut-être années 1930 (2).jpg

W. Desnoyers, sans titre, 27 x 34 cm, peut-être années 1930 si l'on s'en remet aux dates tamponnées sur les timbres ; ph. et coll. Bruno Montpied.

 

     Généralement, à côté des paysages, ce que l'on déniche en brocante ce sont souvent des compositions florales, l'imagination des artistes amateurs étant peu portée sur des sujets plus étranges. L'attention est avant tout portée à la technique minutieuse, au record et à l'exploit que cela représente, attitudes, qui avec la copie, plus ou moins transfigurée, font partie intégrante de l'art populaire. D'autres porteront tous leurs efforts vers les marrons, les bouchons (qui, là, bien souvent, débouchent volontiers sur de la caricature et du grotesque) ou les architectures d'allumettes.

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Anonyme, sans titre, env. 32 x 25 cm, ph. et coll. B.M.

 

        Il y a fort longtemps, bien avant que je me mette à collectionner de façon plus systématique, j'avais rencontré par hasard en compagnie de deux amis, du côté du Bras du Chapitre à Créteil, sur les bords de la Marne, un vieux monsieur qui invitait les passants à visiter son garage qu'il avait transformé en galerie improvisée. Il y exposait des dizaines d'arbustes artificiels, principalement des rosiers, réalisés sur des armatures de fil de cuivre, grâce à un enrobage de timbres verts et rouges soigneusement découpés et collés autour des troncs et branchettes.  Certains avaient été présentés aux concours Lépine, concours qui vit de nombreux amateurs, dans les premières décennies du XXe siècle, se mettre sur les rangs pour montrer des réalisations de toutes sortes, tenant à la fois de l'artistique, du bricolage, et du passe-temps d'amateur (beaucoup de créateurs populaires sont à redécouvrir dans les archives de ce concours, voire dans les cartes postales d'époque qui les évoquent souvent). J'achetais à ce monsieur Mauquest un petit arbuste ("artbuste"?), que j'ai toujours.

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Mauquest, Sans titre, 20cm de haut avec étiquette au pied déclarant : "Fleurs artistiques en timbres-poste. Médaille d'Or Concours Lépine 1933. MAUQUEST, 16 rue du Moulin Bersot, 94000 Créteil . Téléphone 207-21-73. Cette fleur est faite de 80 timbres-poste. A Créteil le 8. 1982."

 

     Cela dit, une des compositions les plus élaborées qu'il m'ait été donné d'acquérir – temporairement –, ce fut le paysage ci-dessous, chiné auprès du brocanteur Philippe Lalane, composition que j'ai été cependant amené à échanger récemment contre une autre oeuvre d'art avec un autre collectionneur amateur de ce genre d'artisanat original.

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Anonyme, sans titre (paysage), collage de timbres, 33 x 45 cm, sd, ; ph. B.M., collection privée, Paris.

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Salon d'art alternatif, Hôtel le A

     Enigmatique appellation, isn't it? Ce serait pourtant l'exacte traduction d'"Outsider Art Fair", ce salon organisé par Andrew Edlin, par ailleurs directeur de la galerie du même nom à New York, galerie qui se consacre à diverses découvertes classables ou non dans l'art brut.

     On sait qu'aux USA, le terme d'art brut est difficilement traduisible, et pas seulement le terme, mais la notion elle-même. On lui préfère "outsider art" qui sert à regrouper dans un vaste pot-pourri l'art des pionniers (limners naïfs américains des XVIIIe et XIXe siècles), art populaire, art des environnements, et art d'individus autodidactes marginaux (pensionnaires d'asiles, médiumniques, et une sacrée tripotée de zinzins mystico-visionnaires, qui paraissent florissants aux States). Derrière cette étiquette, mêlés sans aucun distingo aux créateurs autodidactes non artistes professionnels, se cachent cependant aussi toutes sortes d'artistes en voie de professionnalisation, visionnaires étranges, marginaux à l'intérieur de l'art contemporain, que l'on aurait pu aussi bien voir revendiqués par le surréalisme en un autre temps.

 

OAF hôtel le A octobre 13.jpg


     Les Américains ont donc décidé de venir à Paris pour quatre jours (ça se termine ce dimanche) rassembler dans un petit hôtel quatre étoiles de six étages, rue d'Artois, à deux pas des Champs-Elysées et de la FIAC, 24 galeries plus ou moins spécialisées dans les divers champs de ce qu'ils appellent l'art outsider, galeries venues d'Amérique ou d'Europe. Le prix d'entrée est du même genre qu'à la FIAC, 15€, pour venir voir si l'on peut dépenser plus dans les galeries présentées (!), et encore plus cher pour avoir le droit de venir au vernissage (re-!). Tout ça n'étant pas, comme s'en convaincront les lecteurs du Poignard Subtil, very, very democratic. Il fallait certes rembourser les frais de location de l'hôtel 4 étoiles. Mais qui obligeait ces messieurs à investir un hôtel si chic (autour de 500 € la nuit d'hôtel)? Hormis la nécessité à leurs yeux d'offrir l'art des miséreux, des aliénés et des souffrants de l'âme aux privilégiés et aux favorisés de la vie (à la recherche d'un peu de réalité et de bonne conscience probablement?), fréquentant les Champs et accessoirement croisant du côté de la FIAC proche?

       Mais oublions ces propos un peu amers, et reconnaissons aussi, comme Philippe Dagen dans une chronique qu'il a donnée au Monde ces jours-ci, que l'on pouvait vite oublier ce paradoxe lamentable au fur et à mesure que l'on découvrait, grâce à nos coupe-files (Dagen oublie de le dire), d'étage en étage, des créateurs passionnants présentés de façon succincte mais fort soigneusement.  L'idée d'un hôtel, dans l'absolu, du reste, était amusante et déroutante. Chaque galerie possédait une chambre, le lit n'en avait pas été déménagé, les œuvres se distribuaient tout autour, la situation, lorsque la charmante hôtesse qui s'y trouvait vous ouvrait la porte -comme me le fit remarquer RR que j'avais invité à me suivre dans cette étrange foire- pouvant relever d'une certaine confusion des sentiments. On entrait après tout dans des chambres décorées d'art brut, invitées par une charmante jeune fille, le lit trônant comme une invite au centre de la pièce, certains pouvaient hésiter entre elle et lui (l'art brut)...

 

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Janet Sobel en action, 1948, Raw Vision n°44, ph. Ben Schnall

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Janet Sobel, galerie Gary Snyder, New-York


     Vingt-quatre heures se sont écoulées depuis que j'ai fait une visite à ce salon. Qu'en surnage-t-il? Pas les gribouillages de Dan Miller en tout cas, contrairement à M.Dagen, que je trouve toujours bien trop proches d’œuvres de la modernité plastique pour être honnêtes (façon de parler...). Non, c'est avant tout la découverte de Janet Sobel dont je n'avais jamais vu de peintures et qui a fait l'objet d'un article apparemment fourni dans un vieux numéro (le n°44) de Raw Vision vers 2003. Si j'ai bien compris, je ne suis pas fortiche en anglais, cette dame, Juive d'origine ukrainienne et émigrée aux USA, disparue en 1968, fut à la fois perçue comme appartenant à l'expressionnisme abstrait, ayant influencé peut-être Pollock, et redécouverte comme une "outsider" plusieurs années plus tard (une situation qu'elle partage avec quelques autres grands aérolithes inclassables, tel Jan Krisek par exemple). Ses œuvres sont tout à fait remarquables. J'en montre ci-dessus et ci-dessous quelques exemples que je dois à l'obligeance de la galerie Gary Snyder qui la représentait dans ce salon.

 

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Janet Sobel, sans titre, technique mixte sur papier

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Janet Sobel, galerie Gary Snyder


    Par contre, j'ai été fortement déçu par les photos d'Eugen Von Bruenchenhein (par ailleurs aussi exposées actuellement à la galerie Christian Berst à Paris, galerie représentée à l'Outsider Art Fair), que finalement je trouve assez banales, n'ayant pas d'intérêt, ni d'un point de vue érotique, ni d'un point de vue photographique. Ses meubles en os assemblés sont pour le coup bien plus intrigants. Mais il n'y en avait pas à l'Hôtel le A.jadu 17.7x108.5 site Perdriolle.jpg

    La galerie d'Hervé Perdriolle montrait pour sa part de l'art populaire indien contemporain, notamment toute une série de petits papiers dessinés genre "patua", à fonction magique, destinés par des peintres anonymes ambulants à permettre aux défunts de se libérer des démons qui auraient voulu traîner leurs âmes en enfer (je récite, approximativement sans doute, la leçon que me fit la charmante hôtesse de la galerie). Les patua sont aussi des rouleaux narrant des histoires terrifiantes appuyant visuellement les récits de conteurs-peintres ambulants (voir ci-contre ce rouleau extrait du site web de la galerie). La galerie d'Hervé Perdriolle donne là-dessus ses éclaircissements.

 

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Dessin de Radmila Peyovic, extrait du catalogue de l'exposition "Ai Marginali dello Sguardo" de 2007 en Italie


     Philippe Eternod et David Mermod formaient un couple de galeristes extrêmement passionnés à un autre étage, gambadant mentalement d'un créateur à l'autre d'une manière tourbillonnante qui donnait l'impression d'une valse aux murs tapissés de dessins d'Aloïse, de Gaston Teuscher, de Jules Fleuri, de Raphaël Lonné, d'Abrignani, de Radmila Peyovic, etc. Au milieu de cette valse, apparut brusquement le visage du créateur ACM qui me serra la pogne dans un flash ultra fugitif qui me donna le regret de ne pas en savoir plus. Ces initiales mystérieuses avaient tout à coup un  visage.

 

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Un dessin de Susan King, extrait d'un catalogue chez Marquand Books à Seattle

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Richard Kurtz, extrait du site web du créateur


      D'autres révélations me furent prodiguées, l'ex-boxeur Richard Kurtz au dernier étage chez Laura Steward, les cahiers de croquis étonnants de la Néo-zélandaise Susan Te Kahurangi King qui métamorphose constamment un petit personnage publicitaire de la marque de soda Fanta, le vagabond David Burton (1883-1945)davidburtonportr.jpeg qui dessinait sur les trottoirs (il fit l'objet d'un sujet dans les archives d'actualités de la firme Pathé, un beau motif de quête pour l'ami Pierre-Jean Wurtz, ça, n'est-il pas?), représenté par la galerie anglaise de Rob Tufnell, le naïf grec Giorgos Rigas, représenté par la galerie C.Grimaldis de Baltimore, et cet étonnant créateur brut, Davide Raggio (voir ci-dessous l'œuvre sans titre de 59 x 47 cm de 1998), travaillant avec trois fois rien, des matériaux fragiles à portée de main, friables, aux limites de l'évanescence et de l'inconsistance, créateur qui s'est fait connaître par ses figurations faites de peaux de carton décollées et déroulées de manière à produire des silhouettes plus claires par contraste avec la teinte  kraft plus sombre des cartons.davide raggio, 59x47 cm, 1998, decollage.jpg Sur le salon, on en trouvait à la fois chez Rizomi, la galerie turinoise, et à la Galerie lausannoise du Marché chez Eternod et Mermod. Ce créateur a ceci de remarquable qu'il a pratiqué en dépit de sa situation d'enfermé (en asile) diverses techniques d'expression toujours marquées par le sceau de la précarité mais enfin fort variées ce qui est rare chez nos grands obsessionnels.

     Enfin, chez Cavin Morris, galerie new-yorkaise, on pouvait admirer du coin de l’œil sur le mur et étalés sur la courtepointe quelques magnifiques dessins de Solange Knopf, œuvres que j'aime décidément beaucoup.

 

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Solange Knopf, Botanica, 2013

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Solange Knopf, Spirit Codex, 180x100 cm, 2013


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Info-miettes (25)

     C'est bientôt l'automne, ma saison préférée, et il pleut des événements plus ou moins bruts: demandez le programme...

    Dans le cadre de la "S" Grand Atelier, structure dans les Ardennes belges (Vielsahm)... pour les créateurs déficients mentaux, on aime à mixer ces derniers avec des auteurs de bande dessinée voire d'autres types d'artistes (il sont, je cite: "pour l’éclatement des catégories artistiques et la valorisation des nouveaux langages issus de la mixité entre artistes outsiders et artistes contemporains":...Ouais, ouais, ouais... Le grand méli-mélo à la mode ces temps-ci où l'art contemporain tente de se faire une perfusion de sang frais)

     Diverses expos, conférences, débats sont annoncés en France, plus ou moins en rapport avec cette "S" Grand Atelier, je ne retiens personnellement que les expos ci-dessous :

1. L’ARMY SECRÈTE
Au sein de l’exposition : Bruno DECHARME, Art Brut/ Collection ABCD
La Maison Rouge, 10 Boulevard de la Bastille, 12ème
Du 18 octobre 2014 au 18 janvier 2015

(Une grande exposition de la collection ABCD? Hmm... Cela devrait être le grand événement de la fin de l'année donc).

2. "Chefs-d'oeuvre", carte blanche à Bruno Decharme en parallèle à l'expo de La Maison Rouge (le titre exact étant "Masterpieces", mais j'ai traduit car j'en ai marre du snobisme qui consiste à se  coucher, en France, devant les clients anglo-saxons en se mettant à parler leur langue). Ce sera du 21 octobre au 29 novembre à la Galerie Christian Berst : 5 Passage des Gravilliers, 3ème, Paris. Avec des œuvres d'Aloïse, Jaime Fernandes, Domsic, Guo Fengyi, Joseph Lambert (peu connu, il me semble), Tichy, Stoffers, Schroder-Sonnenstern, Zemankova, Scottie Wilson, etc... On ne sait pas si parmi ces œuvres certaines seront à vendre, car en définitive on est encore dans une galerie. ABCD se séparerait-elle de certains de ses joyaux?

 

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Un dessin d'Eric Derkenne tel qu'on le voit sur le site web d'ABCD, des faces, ou des bouts de faces agrandies, striées...


3. ÉRIC DERKENNE : CHAMPS DE BATAILLE
Exposition rétrospective
Commissariat : Gustavo Giacosa
Espace abcd, 12 rue Voltaire, 93100 Montreuil
Du 26 octobre au 19 décembre 2014
Vernissage 25 octobre 19heures en partenariat avec l’Outsider Art Fair

Ce que j'ai vu de ce Eric Derkenne ne m'enthousiasme guère. C'est austère, très facile à rapprocher de certaines œuvres exsangues que l'on nous exhibe régulièrement chez nos plasticiens contemporains, un créateur venu d'atelier pour handicapés mentaux semble-t-il, posant une fois de plus la question des influences possibles occultes ou déclarées des artistes qui pilotent ces ateliers...

4. MATCH DE CATCH à VIELSALM / VIVRE à FRAN DISCO

Bandes dessinées, peintures, sculptures et installations, rencontre du créateur trisomique Marcel Schmitz et de l'auteur de BD Thierry Van Hasselt autour d'une cité imaginaire, Fran Disco, créée par Schmitz.
Commissariat : Barnabé Mons et Thierry Van Hasselt
Chez Agnès B., 17 rue Dieu, 10ème
Du 29 octobre au 08 novembre 2014
Vernissage 28 octobre 18 heures

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Coco Fronsac toujours sur la Rive Gauche

    Là, on est plutôt du côté de l'art contemporain franchement assumé. Mais un art contemporain primesautier, poétique, imaginatif, humoresque, pas très éloigné des anciennes œuvres de Prévert, du groupe Panique, de la 'Pataphysique, etc. L'exposition est déjà commencée, et se finira début octobre, comme on le verra en déchiffrant l'affiche ci-dessous.

 

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La Maison de verre, André Breton, initiateur et découvreur

    Au Musée Henri-Martin à Cahors commence ce 20 septembre une exposition consacrée principalement au Breton installé à l'Auberge des Mariniers de St-Cirq-Lapopie, qui cueillait des agates dans le lit du Lot, des racines aux formes suggestives, prenait fait et cause pour le mouvement des Citoyens du Monde de Gary Davis, se passionnait pour les hasards objectifs, autant de points qui seront évoqués dans l'exposition, avec un rassemblement, dit le dossier de presse, d'une impressionnante collection d’œuvres et de documents, dont certains parfaitement inédits, paraît-il. Un catalogue sort à l'égide de l'Atelier André Breton et des Editions de l'Amateur.

la s grand ateleir,art des déficients mentaux,trisomiques,marcel schmitz,mixité outsider et art contemporain,abcd,eric derkenne,gustavo giacosa,la maison rouge,cités imaginaires,galerie agnès b.    "Je n’ai pas connu d’homme qui ait une plus grande capacité d’amour. Un plus grand pouvoir d’aimer la grandeur de la vie et l’on ne comprend rien à ses haines, si l’on ne sait pas qu’il s’agissait pour lui de protéger la qualité même de son amour de la vie, du merveilleux de la vie. Breton aimait comme un cœur qui bat. Il était l’amant de l’amour dans un monde qui croit à la prostitution. C’est là son signe. » (Marcel Duchamp, entretien avec André Parinaud, Arts, 5 octobre – 11 octobre 1966).

 Photographe non identifié, André Breton observant un crapaud, date?

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 Dans la lumière du surréalisme, galerie Les Yeux Fertiles

Les Yeux Fertiles, cette sympathique galerie de la rue de Seine dans le 6e à Paris, a la bonne idée en parallèle de l'expo cadurcienne de montrer un ensemble d’œuvres liées au surréalisme dont ce manuscrit de poème sur bois dû à Breton ("Au Regard des divinités")la s grand ateleir,art des déficients mentaux,trisomiques,marcel schmitz,mixité outsider et art contemporain,abcd,eric derkenne,gustavo giacosa,la maison rouge,cités imaginaires,galerie agnès b. rehaussé par Slavko Kopac que l'on avait déjà vu ici et là (à commencer sur le site web de l'Atelier André Breton). Un beau poème-objet en vérité. Pour les dates, faudra attendre, je ne retrouve plus ce sacré carton d'invitation, et c'est pas le site internet de la galerie qui va nous aider, ils sont toujours en retard d'une annonce d'expo... (Cependant, l'Aigre de Mots a eu l'extrême obligeance de compléter l'info manquante, voir ci-dessous dans les commentaires).

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La galerie Polysémie, une actualité fertile

      Cette galerie marseillaise a en effet une activité plutôt débordante ces temps-ci, en rapport avec la rentrée bien sûr. Si je ne partageais pas leurs goûts pour certains des artistes exposés jusqu'ici (par exemple Jean-Pierre Nadau), j'ai été intrigué et séduit par les informations reçues de leur part récemment. J'ai déjà évoqué (le 2 août dernier) l'expo de Solange Knopf qui va bientôt s'ouvrir à Paris dans une galerie louée pour l'occasion (la galerie B&B,  6 bis rue des Récollets, 10e ardt, du 30 septembre au 6 octobre). Elle y sera accompagnée des Staelens, de Gérard Nicollet et de Huston Ripley. Mais la galerie ne s'arrête pas là. Elle annonce des présentations de travaux africains singuliers ou bruts dans ses locaux marseillais (titre de l'expo: "African outsiders", du 16 octobre au 20 novembre) dont Frédéric Bruly Bouabré (récemment disparu) et Franck Lundangi (ancien champion de football). La galerie sera également présente au Salon d'Art Alternatif (Outsider Art Fair, en langage marchand) qui se tiendra une fois de plus à l'Hôtel super chic "Le A" du 23 au 26 octobre. On devrait y voir entre autres des œuvres de Philippe Azéma et d'Evelyne Postic.

 

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Philippe Azéma, œuvre présentée actuellement dans l'exposition de la Halle St-Pierre, "Sous le vent de l'art brut 2, la collection De Stadshof"

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Et c'est reparti pour la Biennale de l'Art Partagé

        On en est à la 5ème et ce sera du 18 octobre au 16 novembre. A Rives en Isère dans le parc de l'Orgère à la Salle François Mitterrand, et toujours organisée par l'association Œil-Art de Jean-Louis Faravel. Il y a beaucoup d'artistes invités, et comme c'est l'usage avec l'art partagé (très partagé en l'espèce, vu le nombre d'invités), le récepteur béotien, qui trouve dans sa boîte aux lettres une invitation pour le vernissage (qui aura lieu le samedi 18 octobre à partir de 18h30), ce béotien aura du mal à savoir comment départager (faut croire qu'existe aussi l'art départagé...) le bon grain de l'ivraie. Sur les 70 (environ) artistes présents, je n'en retiens pour l'instant qu'un seul dont j'aurais été bien curieux de découvrir les œuvres, Gilles Manero, bien trop rare dans notre région parisienne, surtout si il a décidé d'exposer des dessins (ce que je préfère à ses sculptures, je dois dire). Ah si quelques autres aussi, Fatimazara Khoubba, Caroline Dahyot, Jacqueline Vizcaïno, Yves Jules, Alexis Lippstreu, Jean Aihade (un "singulier" africain découvert par le galeriste Alain Dettinger si je ne m'abuse), Virginie Chomette... Comme le signale Jean-Louis Faravel dans le commentaire ci-dessous, on peut se faire une idée de chaque exposant en cliquant sur le site web dont j'ai mis le lien ci-dessus (Œil-art).

 

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Gilles Manero, petit dessin au crayon, 2001, coll. BM

 

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Info-Miettes (28)

     Et voici un nouveau bouquet, ou plutôt panier, d'Info-miettes, qui suggèrent quelques pistes de voyage pour cet été aux uns et aux autres, mais aussi quelques idées pour rester résolument sédentaires à l'abri des flux touristiques...

 

Darnish exposé au Petit Casino d'Ailleurs

darnish, petit casino d'ailleurs, architectures babéliennes, maquettes, collages, cinéma     Le vernissage aura lieu le 26 juin. Darnish  expose, dans cet espace, situé à Ault dans la Somme (tout près de chez Caroline Dahyot), ses constructions babéliennes constituées de fragments de photos extraites de magazines, de peinture, de collage de papiers divers  dont j'ai déjà parlé à plusieurs reprises sur ce blog (voir ci-contre ce que Darnish intitule un "volume sans titre", hauteur 80 cm). Certaines d'entre elles se présentant comme des décors pour des éléments isolés, des silhouettes d'hommes ou de femmes comme évadés d'un film hollywoodien, ou bien réaliste poétique français, pour être projetés dans un monde souvent désert, infiniment plus kafkaïen (voir ci-dessous un bâtiment où apparaît le personnage joué par Bourvil apparemment dans La traversée de Paris)...

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Exposition "tout l'été", ouverte principalement le mercredi matin, les week-end, ou sur RDV au 06 08 37 90 97

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Roberta Trapani soutient une thèse à Paris: "Patrimoines irréguliers en France et en  Italie. Origines, artification, regard contemporain "

     Roberta Trapani appartient au CrAB (Collectif de recherche en Art Brut) et s'intéresse depuis plusieurs années aux environnements spontanés, sans se limiter, comme moi, aux créateurs populaires, mais en débordant vers un questionnement des possibilités d'un habitat autre, envisagé par les habitants ayant une conception inventive de l'architecture et de l'environnement. Elle a ainsi réalisé une thèse sur le sujet (menée sous la codirection de Fabrice Flahutez (Université de Paris-Ouest Nanterre La Défense) et d'Eva di Stefano (Università degli Studi di Palermo), avec qui elle collabore aussi régulièrement dans l'édition de la revue italienne OOA, sur l'art outsider). Elle s'apprête à la soutenir bientôt (pas Eva di Stefano, mais sa thèse...).

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      Cette soutenance, ouverte au public, aura lieu le mardi 28 juin prochain à l'Institut national d'histoire de l'art à 14h30 (INHA, Paris, 2 rue Vivienne, salle Fabri-de-Pereisc, rez-de-chaussée).

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Un passionné d'allumettes, Bernard Beynat, au musée du Veinazès

     Ce petit musée privé, dont j'ai déjà parlé aussi, notamment à propos du créateur d'un environnement nommé René Delrieu, dont des œuvres ont été abritées et protégées de l'anéantissement par ce musée, se trouve dans le Cantal non loin d'Aurillac.darnish,petit casino d'ailleurs,architectures babéliennes,maquettes,collages,cinéma,bernard beynat,musée du veinazès,architecture alternative,roberta trapani,soutenances de thèse,osservatorio outsider art,environnements spontanés,inha,crab Ses animateurs essayent d'enrichir ses collections, à partir de découvertes opérées semble-t-il la plupart du temps dans la région. Leur expo d'été (en lien le dossier de presse avec tous les renseignements pratiques pour venir au musée), intitulée "L'extraordinaire épopée d'un peuple d'allumettes", présente cette fois Bernard Beynat, un passionné de maquettes et de figurines en allumettes assemblées et mises en couleur.darnish,petit casino d'ailleurs,architectures babéliennes,maquettes,collages,cinéma,bernard beynat,musée du veinazès,architecture alternative,roberta trapani,soutenances de thèse,osservatorio outsider art,environnements spontanés,inha,crab On est, semble-t-il, dans l'exploit, le tour de force, l'habileté manuelle. Le personnage est épris d'Histoire et de monuments. il n'a pas hésité à déborder dans son jardin pour réaliser un village miniaturisé auquel il n'hésite pas à mêler des bâtiments inspirés de la Rome antique ou de l'Asie.

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 Pétition de soutien au maintien de l'émission de Philippe Meyer sur la chanson française sur France-Inter

     Au nombre de mes intérêts, je compte la chanson littéraire, poétique ou insolite francophone, qui, comme les cartes postales en matière de médium photographique populaire, est un vecteur de masse de la poésie pour le plus grand nombre. Il y a peu d'émissions de qualité je trouve sur la chanson dite  "à texte". Celle de Philippe Meyer, "La prochaine fois, je vous le chanterai", qui existe depuis 2002, hebdomadaire (tous les samedis à midi), en est une. Elle est actuellement menacée pour des raisons obscures (l'animateur de l'émission ne peut être, paraît-il, à la fois sur France-Culture et sur France-Inter ; il y a bien sûr une autre raison moins avouable). On m'invite à signer la pétition qui circule actuellement sur le site Mes opinions.com. Je l'ai fait ce matin, à vous de voir si vous voulez en faire autant.

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Claude Massé au Musée de la Création Franche cet été

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Joseph Sagués, donation Claude Massé (dans la collection permanente du Musée de la Création Franche), photo Bruno Montpied, 2009

Expo "Patots et autres de l'art", du 24 juin au 4 septembre, au Musée de la création franche à Bègles. "L'inauguration, le vendredi 24 juin à 18h au musée, sera précédée d'une rencontre, le "Grand partage de la Création Franche", autour du livre que lui consacre Serge Bonnery, Claude Massé l'Homme liège (éditions Trabucaire), à la Bibliothèque de Bègles le vendredi 24 juin à 16h30. Ce rendez-vous sera suivi d'une séance de signature."

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Exposition de Jean-Louis Bigou, artiste et pas seulement découvreur de talents immédiats

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Et toujours à Villeneuve-les-Genêts, l'expo de mes photos d'après des environnements spontanés...

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Café "Chez M'an Jeanne et Petit-Pierre", sans M'an Jeanne et Petit Pierre, mais avec d'autres inspirés ; vue de l'expo de photos de Bruno Montpied dans l'ancienne salle de bal de ce café de village réaffecté grâce à l'action de l'association Puys'art animée par Fabienne Clautiaux, ph. B.M., 28 mai 2016

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Alain Bouillet expose sa collection dans le Rouergue: "De l'humaine condition"...

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Très bonne collection d'art brut au sens orthodoxe du terme (des non artistes, des créateurs s'exprimant en dehors de tout souci d'être reconnus, pour eux-mêmes avant tout, en quêtant peut-être à travers une telle pratique un réconfort, un sursis existentiel, un enchantement dans leur vie...), que celle d'Alain Bouillet, qui l'a déjà montrée l'année dernière à Bages, et qui en a tiré un excellent catalogue où il raconte ses découvertes

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"Les unes et les autres" au Musée Singer-Polignac à Ste-Anne, derniers jours

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Info-Miettes (35)

Dominique Lajameux à la Fabuloserie-Paris

    Dernière exposition à la Fabuloserie de la rue Jacob (qui se termine le 7 décembre, dépêchez-vous...), une dessinatrice de première force, très sensible, très acharnée, inconnue de moi jusqu'à présent. Elle a déjà été exposée dans le cadre de différents festivals d'art singulier, chez Hang-Art ou à la galerie Polysémie notamment. Le carton d'invitation sur le web ne nous en dit pas grand-chose, en dehors d'un beau texte poétique de l'artiste. A voir et à découvrir en tout cas.

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D.Lajameux

 

La compagnie l'Excentrale...

     Le terme de "Massif excentral" que j'avais inventé naguère pour une série de notes sur divers lieux, facéties et créateurs insolites du Massif Central a été repris, avec mon blanc-seing, par de jeunes musiciens auvergnats qui se sont réunis, en plusieurs groupes, dont un, les Tzapluzaires, fait également écho à une autre de mes anciennes recherches, et sous la bannière, si j'ai bien compris d'une seule compagnie, l'Excentrale. Plus de renseignements sur leurs concerts, les groupes, les tournées, voir ce lien...

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    Par ailleurs, les Tzapluzaires collaborent de temps à autre avec le violoniste Jean-François Vrod, dont j'ai eu l'occasion de citer son intérêt pour diverses formes d'art brut ou singulier populaire, dans une note de ce blog, en 2012...

Mariage musical avec une taille de bois...

 

Un surréaliste peu connu d'après-guerre, Pierre Jaouën

 

      J'ai rencontré il y a plusieurs années Anne-Yvonne Jaouën, qui était une amie du critique d'art Charles Estienne. Elle avait été amenée à héberger dans sa maison de famille à Ploudalmézeau certains des artistes (notamment Krizek) qu'Estienne, critique d'art proche des surréalistes, invitait à séjourner dans la région finistérienne chez lui à Argenton. Des artistes (ceux que je préfère) tels que Toyen, Krizek, Fahr-el-Nissa Zeid, ou Marcelle Loubchansky, ou bien (je les goûte moins) René Duvillier, Jean Degottex, Serge Poliakoff, tous visiteurs que certains historiens de l'art moderne ont rangés par la suite sous l'étiquette d'"Ecole des Abers", du nom de ces bras de mer qui découpent la côte dans cette région. Anne-Yvonne, après m'avoir montré des peintures magnifiques qu'elle possédait de Toyen (des vues des bords de mer appelés estrans revisités par l'imagination picturale de l'artiste tchéque), me parla de son frère qui était peintre, mais elle ne me montra aucune reproduction de son œuvre. Un jour, simplement, en feuilletant la revue Le surréalisme même (n°2, 1957), je suis tombé sur un dessin (encre?) de ce frangin, prénommé Pierre.lajameux,fabuloserie-paris,l'excentrale,tzapluzaïres,massif excentral,pierre jaouën,arts situés,trinkhall,ni tanjung,collection de l'art brut,biennale théâtres,georges bréguet

      Je la trouvais intéressante, mais si seule, oubliée ainsi dans un coin de la revue, n'ayant pas nécessité plus de prolongement, du coup, je ne m'appesantis pas davantage. Voici que l'occasion est donnée d'en apprendre plus sur le talent de cet artiste discret, peu mis en lumière par l'histoire de l'art moderne (cependant, on lira l'intéressante notice insérée sur Wikipédia, très complète, qui parle de lui et des peintres défendus par Charles Estienne). Il fait un peu partie de cette famille de peintres ou poètes qui vivaient dans le sillage du surréalisme après-guerre, abritant leur talent dans une ombre nécessaire, comme Jacques Le Maréchal, ou Yves Elléouët,  ce dernier étant un proche de Jaouën, comme me l'a signalé Marc Duvillier, spécialiste des artistes d'Argenton apparemment...

Pierre Jaouën, page de Mélusine avec Emmanuelle K..JPG

Une page extraite du livre d'artiste Mélusine d'emmanuelle k. (pseudonyme voulu sans majuscules) et Pierre Jaouën, image copiée du film Mélusine (38 min.).

 

     La galerie Hébert en effet, 18, rue du Pont Louis Philippe, près du métro Saint-Paul à Paris, héberge une exposition des planches d'un livre commun d'emmanuelle k. et de Pierre Jaouën (disparu en 2012), dont le texte a donné également lieu à un "oratorio pop" avec la participation des jazzmen Emmanuel Bex, Simon Goubert et François Verly (il existe un coffret avec DVD d'un film sur le livre, CD de cet oratorio et un livret). Ce livre est une réussite dans le domaine du livre d'art, ne serait-ce que par l'harmonie, la fusion de la disposition typographique avec les structures portantes, aquarellées, de Pierre Jaouën, qui rappelle, quoique dans un autre ordre d'idées au point de vue thématique, les livres de Guy Debord et d'Asger Jorn. Mais, même s'il est donné ici d'en voir un peu plus sur cet artiste qui se révèle, par prédilection semble-t-il, un paysagiste "abstrait", on aimerait que la même galerie ait l'idée de nous proposer par la suite une exposition entièrement et seulement consacrée à lui.

Expo du 27 novembre au 15 décembre 2019.

 

Un nouveau label dans le genre "prise de tête", les arts "situés"... A traduire du belge

"COLLOQUE : PENSER LES ARTS SITUÉS, 04, 05 & 06 décembre 2019. Cité Miroir - Espace Francisco Ferrer - ULiège - Accès libre"... voici l'annonce que j'ai reçue ces jours-ci en provenance de l'anciennement nommé MadMusée de Liège. Car ce musée, décidément pris d'une fièvre onomastique incontrôlée, a décidé aussi de se débaptiser et de s'appeler désormais Trinkhall... Pourquoi pas? D'autant qu'ils ont  désormais un nouveau bâtiment avec 600 m2 de surface pour exposer au mieux les oeuvres (souvent fort intéressantes) produites par différents handicapés mentaux (et trinquer dans le hall?). Mais pourquoi ce nouveau label d'"art situé"? Totalement ésotérique, si ce n'est parfaitement creux? Voici le laïus qui est servi par le musée pour expliciter, si possible le nouveau label:

    "La notion d’arts situés définit la politique muséale du Trinkhall. Elle repose sur un mode de perception et de compréhension des œuvres qui intègre la dimension fondamentale de leurs environnements : une œuvre d’art est un système de relations localisées dont l’expression esthétique est le moyen et l’effet. Toute œuvre d’art, en ce sens, est située. Mais certaines, plus que d’autres, étant donné leur apparente singularité ou leur relative marginalité, font entendre plus fortement la voix de leur situation.

 

4e Biennale de l'Art Brut: Théâtres, à la collection de l'Art Brut à Lausanne, avec entre autres Ni Tanjung...

    Du 29 novembre 2019 au 26 avril 2020, prend place une 4e biennale thématique à Lausanne, après "Corps", "Véhicules" et "Architectures". Cette fois, c'est le "théâtre" au sens de "performances", analogies avec les marionnettes, voire déguisement... La référence en creux au théâtre d'ombres indonésien du Wayang kulit a par exemple incité les commissaires d'exposition à y exposer Ni Tanjung à laquelle le LaM avait déjà pensé dans le cadre de son exposition "Danses".

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Georges Bréguet, l'anthropologue suisse qui s'est instauré protecteur de Ni Tanjung, la faisant connaître en Occident, 28 novembre 2019.

 

Anselme Boix-Vives en visite en Suède

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     Information tardive! Boix-Vives n'en finit pas de voyager à travers le monde. Une exposition lui a été consacrée du 26 mai au 15 septembre dernier avec la complicité du Centre Vendôme pour les arts plastiques au musée d'art d'Uppsala, en Suède donc... La manifestation comprenait 140 peintures et dessins ainsi que – chose inédite – quelques œuvres de ses petits-enfants Philippe et Julie Boix-Vives. 

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Julie Boix-Vives, la danse des échelles ; on est loin de l'œuvre du grand-père...

 

Et Anne-Marie Vesco, vous connaissez?

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Anne-Marie Vesco, Tête de profil, A-M.Vesco, huile et pastel sur paper, 78 x 63 cm, 2003.

 

Cette artiste dessine fort bien les éléphants. C'est déjà un bon point pour elle. Elle expose bientôt du 3 au 15 décembre dans une galerie, Le Génie de la Bastille (126 rue de Charonne dans le XIe ardt parisien), des petits formats. Vernissage samedi 7 décembre de 16 à 20 h et finissage dimanche 15 aux mêmes horaires. La Bastille...? Il y a encore un rapport avec les éléphants en plus (voir Hugo et son Gavroche).

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Anne-Marie Vesco, des mini formats...

 

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30/11/2019 | Lien permanent

Roger Cardinal (1940-2019), après Laurent Danchin et Jean-François Maurice...

     Des pages générationnelles, en matière de médiation autour des arts spontanés, se tournent décidément depuis quelque temps... Voici que j'apprends avec une tristesse certaine que Roger Cardinal vient de nous quitter.

    C'était un médiateur réputé de l'art qu'il avait qualifié d'"outsider" en Grande-Bretagne, terme repris aux USA et dans le monde anglo-saxon, voire jusqu'ici, où il est de bon ton de parler anglais à tout bout de champ en désertant la langue française.

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Roger Cardinal recueilli ; Bibliothèque de Bègles, avril 2009. Photo Bruno Montpied.

 

    La dernière fois que je l'avais vu, c'était il y a trois ans, il me semble, dans un escalier de l'Hôtel du Duc où se tenait l'Outsider (comme de juste) Art Fair. Il était assis sur un banc, grignotant un sandwich ; je l'avais salué, en lui tendant je ne sais plus laquelle de mes publications, et il était resté assez bizarrement sans réaction, alors que nous nous connaissions et avions usuellement des relations cordiales. Quand j'avais envoyé ensuite des informations par mail, il n'avait pas non plus réagi, et je m'étais demandé ce qu'il se passait. La fatigue de l'âge (selon l'euphémisme convenu)?

     C'était un gentleman d'une grande bienveillance, un gentleman des années 1970, et un poète incontestablement, davantage qu'un théoricien (ainsi m'est-il toujours apparu en tout cas). C'est lui qui a lancé le terme d'Outsider art, en montant des expositions sur ce thème dès 1972 (parfois avec l'aide de la Fabuloserie d'Alain Bourbonnais) et pendant de nombreuses années, tout en écrivant de nombreux articles et études sur les arts spontanés (où il ne hiérarchisait pas l'art naïf par rapport à l'art brut). Certes, il n'était pas le seul au Royaume-Uni, il y avait aussi Victor Musgrave et Monika Kinley (la Madeleine Lommel britannique), et aujourd'hui il y a la Gallery of Everything de James Brett et ses amis. Mais Cardinal a eu un rôle déterminant, en influençant la création de la revue Raw Vision, de John Maizels en 1989 notamment. Le terme d'outsider a eu un retentissement énorme aux  USA, ce qui a causé en retour une onde de choc vers l'art brut européen.

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Le catalogue de l'expo "Outsiders" de 1979.

 

      Ce que l'on sait moins – surtout dans le petit monde des spécialistes de l'art brut et autres – c'est qu'il avait donné, dans ces mêmes années 1970, quelques textes au groupe surréaliste qui tentait internationalement de conserver une activité structurée en réaction à la décision que d'autres avaient prise de décréter, trois ans  après la mort d'André Breton (soit en 1969), la fin du mouvement organisé. J'ai retrouvé ses deux contributions dans le Bulletin de Liaison surréaliste réédité en 1977 par l'éditeur Savelli : "Tout un roman" et "Je note des signes", d'une très belle et très claire venue poétique.

    En Grande-Bretagne, il avait prolongé et adapté l'activité d'un Dubuffet pour tenter d'attirer l'attention du public sur des arts spontanés où il mélangeait artistes marginaux et auteurs d'art brut. Je possède son livre de 1979, paru à l'occasion d'une exposition à la Hayward Gallery, où l'on retrouve au sommaire des créateurs bien connus désormais : certains venus de l'Atelier Jacob (1972-1982) comme Alain Bourbonnais, Francis Marshall, Jano Pesset, Mario Chichorro, Joël Negri, Denise Aubertin, Pascal Verbena, François Monchâtre, ou Emile Ratier, d'autres en rapport avec la maison des artistes psychotiques de Gugging en Autriche comme Johan Hauser, Johann Scheïbock, Philipp Schöpke, Oswald Tschirtner, ou August Walla ; bien sûr, il y avait quelques grands créateurs de l'Art Brut venus d'autres collections, comme Aloïse, Scottie Wilson, Wölfli, Henry Darger,  Joseph Yoakum, Martin Ramirez, Anna Zemankova, Heinrich Anton Müller, des patients artistes de la collection Prinzhorn à la clinique de Heidelberg comme Joseph Sell, Gustav Sievert, August Neter,  Peter Moog, Johann Knüpfer, ou Karl Brendel, un créateur d'environnement visionnaire, Clarence Schmidt, mais aussi de grands inclassables comme Louis Soutter, ou ce dessinateur allemand étrange revendiqué par le surréalisme, Friedrich Schröder-Sonnenstern (voir ci-contre). roger cardinal,outsider art

    Cette expo prolongeait celle des "Singuliers de l'art" qui s'était tenue un an auparavant au Musée d'Art moderne de la ville de Paris, là aussi organisée avec l'aide d'Alain Bourbonnais et de son Atelier Jacob (galerie qu'il animait avant de fonder son musée de la Fabuloserie dans l'Yonne.

     Au fond, ce qui me séduisait, dans la perspective de Cardinal, c'était son origine et sa culture surréalistes. On sait que ce mouvement, surtout du vivant de Breton, incorporait des autodidactes naïfs ou bruts, de même que de la poésie naturelle sous forme d'objets insolites trouvés dans la nature, sans faire de séparation de valeur entre ces créateurs et les artistes plus explicitement en relation avec le mouvement. Je pense que c'était dans ce sillage que se situait Cardinal. D'autant qu'en Grande-Bretagne, on pouvait le faire sans dommage, ce pays ayant fait l'économie de la dispute qui eut lieu sur le continent entre ces deux crocodiles que furent Dubuffet et Breton, se colletant au fond du même marigot (image que me délivra un soir Philippe Dereux au fond d'un restaurant lyonnais)... Les défenseurs de l'art brut français et suisses en effet ont longtemps hérité du clivage entre les deux crocodiles, et il est fort difficile de retisser les liens rompus de ce côté du Channel. J'en sais quelque chose, puisque moi aussi je m'efforce de me situer dans ce double sillage du surréalisme et de l'art brut...

    Étrangement, cette origine surréaliste de Cardinal ne paraît pas avoir été perçue par le milieu suisse de l'art brut, puisqu'il fit partie sans difficulté du comité consultatif de la Collection de l'Art brut à Lausanne (comme Laurent Danchin, pourtant pas très orthodoxe en matière de doxa brute...). Pourtant, on s'est longtemps méfié des surréalistes du côté de la Collection (du moins peut-être jusqu'à l'après-Michel Thévoz¹ ; car, avec Lucienne Peiry, directrice de la collection de 2002 à 2012, la méfiance se tempéra et s'atténua me semble-t-il).  Probablement parce que Roger resta toujours fort civil, diplomate, élégant, avec Dubuffet lui-même d'abord (qui lui avait fait part de son accord pour le terme d'"art outsider") puis avec les conservateurs successifs de la CAB.

     Sur ce terme d'art outsider, j'ai déjà évoqué sur ce blog par le passé la traduction qu'on aurait pu lui donner : art alternatif. Roger Cardinal m'avait écrit son assentiment face à cette traduction, comme je l'ai déjà signalé. Certes, ce mot qui lui avait été imposé, comme il me l'a écrit, par son éditrice, devait servir de synonyme à "art brut". En réalité, c'est un tour de passe-passe, dans la mesure où il recouvre beaucoup d'expressions différentes, du folk art, aux artistes marginaux, en passant par l'art brut au sens strict, et les environnements spontanés. En France, il sert d'ailleurs souvent de mot lui-même alternatif à la place d'art singulier. Le Musée de la Création Franche de Bègles par exemple, qui se sert beaucoup en ce moment du terme d'art brut – à mon avis inadéquatement – serait mieux inspiré de parler d'art outsider pour ses collections.

    Concernant Roger Cardinal, il serait judicieux de rassembler et de traduire ses principaux textes pour les lecteurs français. Il en a donné quelques-uns pour des catalogues, comme le premier qu'édita l'Aracine ou ceux édités par la Halle Saint-Pierre au fil des années.

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¹ Michel Thévoz qui écrivit un jour: "André Breton fusille les spirites et leur fait les poches". Ce qui, on en conviendra peut-être, est assez odieux...

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12/11/2019 | Lien permanent

Infos-Miettes (21)

  Depuis novembre dernier, pas d'infos-miettes, palsambleu, il faut remédier à ça mon cousin... Ce n'est pas que les nouvelles manquent, au contraire, mais c'est que je n'ai pas toujours envie de servir la soupe... Tous les égoïstes (en voie de multiplication, non?) me comprendront.

Serge Paillard se donne un site

      Voici qu'il fait sa communication comme tout un chacun, le Sergio amateur de patatovision. On lui a bâti un site web, et c'est plutôt réussi, qu'on en juge plutôt ici. A partir d'aujourd'hui je le joins à la liste de mes liens (à droite).

serge paillard

Serge Paillard, Pomme de terre en lune, comme surprise


Charles Steffen à la collection de l'Art Brut du 23 mai jusqu'au 29 septembre

     C'est beau les dessins de ce monsieur Steffen (1927-1995), américain qui dessinait sur de grandes feuilles de papier genre kraft avec des crayons de couleur et de la mine de plomb.

 

serge paillard

Charles Steffen, 1995, © Estate of Charles Steffen


   Bizarres sont ses personnages. "Quand il ne dessine pas, il boit beaucoup et fume, surtout la pipe", dit le dossier de presse de la Collection de Lausanne. Il habite chez sa mère, avec sa sœur et son frère, dans un état psychique qui ne lui permet pas de s'insérer dans le monde du travail. Il dessine beaucoup mais sa soeur qui a peur que cela finisse par alimenter un incendie lui en fait détruire une bonne partie. De 63 à 89, rien  ne subsiste. Seule la production des six dernières années est parvenue jusqu'à nous... Ça fait tout de même 2000 dessins... Leurs sujets sont des nus, des danseuses, des crucifixions (drôe de mélange), des fleurs aussi, des personnages de sa vie quotidienne, comme sa mère dans son fauteuil roulant ou alitée. Mais il lui arrive de dessiner aussi des sujets moins classiques comme des flaques d'eau sur les trottoirs. Un personnage étrange surgit également dans son oeuvre à partir d'un moment, une sorte d'être humain mixé avec une plante du type tournesol, une plante humanisée en quelque sorte, cyclopéenne. C'est en tout cas un des exemples les plus inspirants qui nous soient parvenus via l'art brut américain. Il y aura une notice sur lui dans le fascicule n°24 de la collection de l'Art Brut, rédigée par la nouvelle conservatrice de la Collection, Sarah Lombardi.

serge paillard

Charles Steffen, Mère et enfant, Nu au tournesol, 1994, mine de plomb et crayon de couleur sur papier kraft, 112.5 x 76.5 cm ; Photo Atelier de numérisation - Ville de Lausanne; Collection ce l'Art Brut, Lausanne

Albasser sans miroir

serge paillard       Etrange titre d'info-miette, isn't it? C'est que Pierre Albasser qui toujours dessine sur cartons d'emballage avec feutres usagés et récupérés expose du 4 juin au 13 juillet 2013 (vernissage le jeudi 6 juin à 18h30) à la Galerie Anti-Reflets, 2, place Aristide Briand, à Nantes (tél: 02 40 89 23 69). Il se donne ces petites contraintes fidèlement depuis le début, depuis qu'il est à la retraite, et n'en finit pas de découvrir l'univers graphique qui en découle.

 La Maison Bleue de Da Costa Ferreira, suite

    Une deuxième tranche de travaux pour restaurer l'ensemble des petits monuments couverts de mosaïque par l'ouvrier d'origine portugaise Euclides Da Costa Ferreira à Dives-sur-Mer est prévue pour cette année, m'annonce l'Association "La Maison Bleue de Da Costa" (siège social: Mairie, rue du Général De Gaulle, 14160 Dives-sur-Mer, http://lamaisonbleue.unblog.fr).

Anna Zemankova vient faire un tour chez Christian Berst serge paillard

     Du 31 mai au 20 juillet, c'est la célèbre dessinatrice de l'aube, Anna Zemankova qui aura des dessins exposés à Paris dans la galerie Christian Berst. C'est une "classique" de l'art brut, et un de mes créateurs préférés. La botanique débridée de cette dame qui se levait aux aurores avant toute sa petite famille, dépliant son attirail en catimini et traçant ses automatismes probablement imprégnés des rêves de la nuit qui achevait de se dissiper de son corps, est à mettre en rapport avec celle d'autres médiumniques que l'exposition d'art brut tchèque montée par Alena Nadvornikova nous avait fait découvrir il y a quelques années à la Halle Saint-Pierre. On a beau jeu de décrire ses plantes comme porteuses de sensualité, comme on le dit aussi pour les fleurs charnues et ruisselantes de jus mystique d'une Séraphine Louis, mais on peut tout aussi bien se contenter de souligner le raffinement graphique de ses lignes et de ses doux tons. Le raffinement seul...


Galerie Christian Berst, 3-5, passage des gravilliers 75003 paris | mardi > samedi 11h > 19 h | +33 (0)1 53 33 01 70 | contact@christianberst.com


LaM de Villeneuve-d'Ascq, "Corps subtils", expo d'art brut et d'art indien à partir de la collection de Philippe Mons

    Là, c'est prévu pour aller du 8 juin au 20 octobre. Enfin une expo d'art brut au LaM qui depuis sa réouverture avec une extension des bâtiments pour présenter leur nouvelle collection d'art brut essentiellement basée sur la donation de l'association l'Aracine a adopté un rythme assez tranquille. Il ne fallait en effet pas s'attendre au même dynamisme que celui pratiqué à la Collection de l'Art Brut à Lausanne. Le LaM, c'est sur un même front de l'art moderne, de l'art contemporain, et de l'art brut. Donc, leurs grandes expositions, leurs expositions secondaires (celles qui s'intitulent "théma", "Corps subtils" en est une) alternent en fonction des trois départements, au risque de faire oublier tel ou tel, au gré des publics préférant l'un ou l'autre de ces secteurs.

 

serge paillard


     En l'espèce, on a affaire à une proposition de confrontation entre 350 œuvres d'art indien issus de l'art tantrique et des œuvres d'art brut. Voici un extrait du laïus de présentation de l'expo: "Il s’agit de partir à la recherche de cette fusion du moi et du monde que l’on prête autant à la folie qu’à l’expérience mystique, autant à des œuvres relevant de l’art tantrique que de l’art brut. La question est posée d’une « existence esthétique » qui traverserait l’éthique et le religieux comme le champ des créations artistiques. Les œuvres réunies par Philippe Mons forment une fable à même de nous enseigner les liens entre « amour fou » et expérience de fin du monde, « expérience intérieure » et appréhension globale du monde".

Travaux d'aiguille au Musée de la Création Franche, avec Jacques Trovic entre autres

    J'aime beaucoup également les "tapisseries" de Jacques Trovic, qui sont à dire vrai plutôt des fresques brodées. J'ai déjà eu l'occasion de les évoquer lorsqu'il y a eu à Lille l'expo "Sur le Fil" (l'un des commissaires de l'exposition était Barnabé Mons qui collabore également à l'organisation de l'expo précédemment citée, "Corps subtils"). J'étais allé le visiter en compagnie de bons amis qui m'introduisirent auprès de lui dans sa modeste maison d'ouvrier, dans un alignement de corons. La pluie et la grisaille environnante reculaient ce jour-là comme elles le font sans doute perpétuellement devant la couleur et la cordialité de l'ambiance qui régnait chez Trovic.

 

serge paillard

Jacques Trovic, "tapisserie" représentant une course du Tiercé, tenue et tendue par Jean-Louis et Juliette Cerisier, ph.Bruno Montpied, 2009 (Chez Trovic, quand des créateurs divers de l'art singulier se rendent visite les uns aux autres... Notre médiation n'est-elle jamais mieux faite que par nous-mêmes?)

 

     Le voici qui expose au Musée de la Création Franche à Bègles, en compagnie de deux autres créateurs, Jacky Garnier et Adam Nidzgorski, du 17 mai au 23 juin, c'est déjà commencé donc. On se reporte au site web du musée (tiens, il y a une nouveauté depuis quelque temps, des vidéos tournées par le directeur de l'endroit Pascal Rigeade, qui inaugurent sans doute une collection de témoignages des créateurs ou de leurs proches, actuellement Louis Pelosi (pour Rosemarie Kocsÿ), Marilena Pelosi (rien à voir avec le précédent), André Labelle, André Robillard...).

Bernard Thomas-Roudeix expose à Paris

     Où ranger Thomas-Roudeix? Art singulier, art contemporain (voire même en l'occurrence "expressionnisme contemporain"? L'oeuvre est remarquable, de qualité, intrigante, peintures à l'huile ou céramiques émaillées, comme la statuette ci-dessous, "L'élégance du fumeur" qui fait un pied-de-nez à la diabolisation actuelle des intoxiqués de la nicotine. Il expose actuellement dans une galerie ouverte depuis peu (avril 2013) au pied de la Butte Montmartre. serge paillard,anna zemankova,charles steffen,art brut,art naïf,art singulier,création franche,pierre albasser,environnements naïfs,da costa ferreira,corps subtils,lam,philippe mons,barnabé mons,jacques trovic,jean-louis cerisier,juliette cerisier,bernard thomas-roudeix,éric gougelin,galerie le coeur au ventre

Thomas-Roudeix avec Jörg Hermle et Bernard Le Nen, du 11 mai au 9 juin, à la galerie Art d'aujourd'hui, 8, rue Alfred Stevens, Paris 9e ardt. Tél: 01 71 37 93 51 ou 06 52 34 98 24. Ouvert du jeudi au dimanche 15h/20h.

Eric Gougelin à la galerie Le Cœur au Ventre, Lyon

     Je connais assez mal le travail d'Eric Gougelin dont on m'a rappelé récemment qu'il avait fait un travail sur les momies (un livre aussi je crois) avec Jean-Michel Chesné. Comme moi et les momies ça fait deux, je n'avais pas dû y accorder une grande attention, fuyant un peu le mortifère (ce qui n'a rien à voir avec la poésie du macabre qui me séduit davantage)...

 

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Eric Gougelin

       Mais la Galerie Le Cœur au Ventre, basée dans le Vieux-Lyon dans le quartier Saint-Georges, 5e ardt (27 rue Tramassac exactement, tél 06 86 10 36 70, ouv. du jeudi au samedi de 14h30 à 19h et sur rendez-vous), m'a envoyé un carton annonçant sa prochaine exposition ("Explorations sans voyage") chez eux qui reproduit une très belle image (ci-dessus). Comme une coupe anatomique dans l'inconscient, avec les strates mises à nu de souvenirs, images aperçues et transposées dans le grand mixeur de la mémoire touillée, et puis aussi on songe à un paysage de montagne où la neige se serait déposée aux reliefs, laissant de l'encre ruisseler dans les torrents des gorges rongées par quelque acidité... Je comprends qu'on puisse avoir plaisir à se rouler dans une telle efflorescence. Alors, j'oublie les momies...

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Mes récentes publications (Info-Miettes n°21 bien narcissiques car centrées sur ma pomme)

"Art populaire et art brut, quelques exemples de comparaison", Actes I du séminaire sur l'art brut 2010-2011, dirigé par Barbara Saforova, éditions ABCD, 2012

 Actes I Séminaire B Safarova001.jpg    J'ai participé à ce séminaire qui se déroule dans les locaux du Collège International de Philosophie afin de présenter quelques éléments pemettant de mettre en regard art brut et art populaire insolite. Le but était de tenter de mettre en lumière à quel point, tout au moins pour une bonne part des collections d'art brut de Dubuffet transférées à Lausanne, l'art brut recélait des œuvres dont le style et les sujets étaient visiblement proches ou dérivés, malgré des ruptures, d'œuvres faisant partie des corpus de l'art populaire des campagnes d'autrefois. Comme je l'ai dit (briévement) dans mon intervention (dont le texte est donc paru dans ses Actes I publié l'année dernière), cette couleur populaire des collections était apparente surtout dans les premières décennies de la collection (commencée comme on sait vers 1945).

      Depuis quelque temps, l'art brut tend à être redéfini dans différents travaux, notamment ceux de la directrice de ce séminaire Barbara Safarova, travaux qui insistent sur la dimension transgressive de l'art brut, détachée de tout souci de communication, quasi volcanique, se limitant à la matière pure du signe. Le rapport à la culture, à une présupposée absence de culture (même seulement artistique), est moins abordé désormais. L'aspect sociologique est beaucoup moins présent (l'aspect de démocratie directe dans l'art n'intéresse pas les commentateurs actuels, peu politiques). On se concentre désormais davantage sur le côté anthropologique (comme le fait par exemple dans ces Actes une Céline Delavaux) ou esthétique des productions de l'art brut (voire poétique, comme le fait l'assez délirant Manuel Anceau, toujours un peu à la limite de la voyance).

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Une page d'illustrations de "Art populaire et art brut, quelques éléments de comparaison", intervention de Bruno Montpied, p.77 (de haut en bas et de gauche à droite, Thuilant, Forestier, un anonyme au De Gaulle membré -voir sur ce blog-, Müller et Leclercq)

      Au sommaire de ces Actes I, on retrouve outre mon texte, illustré d'oeuvres comme les autres contributions (le tout édité avec le goût extrême que l'on reconnaît à chaque publication de l'Association ABCD, et je vous prie de croire que je ne leur fais pas de la léche), des interventions de Philippe Dagen sur Marcel Réja, de Céline Delavaux sur une réaffirmation qu'il ne faut pas limiter l'art brut à l'art des fous, de Baptiste Brun qui revient sur la notion d'homme du commun mise en avant par Dubuffet au début de ses recherches d'après-guerre, de Lise Maurer sur Laure Pigeon, de Béatrice Steiner (avec des illustrations montrant d'intéressantes oeuvres – je ne parle pas ici de celles de Serge Sauphar, assez mièvres, mais plutôt de celles d'un Adrien Martias – venues des archives de la section du patrimoine de la Société Française de Psycho-pathologie de l'Expression et d'Art-Thérapie)  et enfin de Manuel Anceau interrogeant "L'art brut: une contre-culture?", mais ne répondant pas vraiment à la question, préférant céder à une dérive au fil de la plume, basculant la plupart du temps en termes abscons et se révélant à d'autres moments capables de traits de lumière, comme dans l'envolée finale de son texte  où il cite une nouvelle de Philippe K. Dick dont le propos devient un beau symbole de ce que peut représenter l'art brut.

Actes I, séminaire sur l'art brut, "De quoi parle l'art brut?", dirigé par Barbara Safarova, 2010-2011, 160 p., 29€, éd.ABCD, sd, 2012. Disponible en vente à la librairie de la Halle Saint-Pierre, à la galerie ABCD, 12, rue Voltaire à Montreuil, et à la Collection de l'Art Brut à Lausanne. Voir également le site d'ABCD. A signaler en outre que la galerie de Montreuil est ouverte en ce moment pour l'exposition "Voodoo Chile" consacrée à J-B.Murray et Mary T.Smith le samedi et le dimanche de 12h à 19h jusqu'au 17 mars.

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Cinéscopie n°26, 2012: BM, "Brunius, un cinéaste surréaliste en DVD"

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     Bon, je vais pas la ramener trop encore sur Jacques Brunius, parce que j'en ai déjà abondamment parlé dans cette colonne de notes sans fin (ou presque). Le compte-rendu que j'ai publié dans la revue ci-dessus citée, en juin 2012, est une reprise de la note qui a paru ici même et qui est donc désormais aussi fixée sur papier (car les blogs durent ce que durent les fleurs, en un peu plus longtemps seulement...). A noter que cette revue destinée aux fondus de cinéma amateur, notamment Super 8, animée par un passionné fort sympathique, par ailleurs dessinateur autodidacte de grand talent (voir ci-dessous un de ses dessins), Michel Gasqui (alias Migas Chelsky), s'est aussi intéressée aux Bricoleurs de Paradis entre autres pour mes films Super 8 des années 1980 qui se retrouvent dans les bonus du DVD paru avec mon livre Eloge des Jardins Anarchiques, et dans certaines des incrustations du film.

 

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Migas Chelsky, Bidule 1

Pour obtenir Cinéscopie, voir le blog http://cinescopie.unblog.fr/

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Création Franche n°37, décembre 2012, BM: "Bernard Jugie, un petit musée à usage interne"

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     Autre découverte que j'ai faite l'été dernier, avec la maison Péridier et autres merveilles dont je devrais bientôt parler, voici un petit article, avec de belles photos en couleur, bien imprimées (j'en suis très fier, si, si) sur un créateur populaire à la retraite, Bernard Jugie.B.Jugie-dans-son-petit-musé.jpg Je l'avais repéré en passant un jour par Billom dans le Puy-de-Dôme, du moins n'avais-je entraperçu que des petits décors naïfs placés au-dessus d'une porte et d'une fenêtre en rez-de-chaussée. J'ai attendu deux ans pour faire le tour du petit musée qui se cachait à l'étage. Quelques merveilles nous y attendaient moi et les deux camarades de dérive de cet été-là. Dont certaines se retrouvent ainsi photographiées et en pleine page dans ce dernier numéro de Création Franche. C'est la révélation d'un attachant créateur populaire caché au fond de l'Auvergne.

 

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Une des pages consacrées au petit musée de Bernard Jugie, Création Franche n°37

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Bernard Jugie, un renard taillé dans de l'aggloméré, coll. et photo inédite BM, 2012

       A noter au sommaire de cette livraison d'autres contributions de Gérard Sendrey sur "Lucie M. dite de Syracuse", de Bernard Chevassu sur Christian Guillaud, de Joe Ryczko sur un "Monsieur Grosjean, constructeur d'automobiles en chambre", un projet des étudiants de l'association Campus dynamique sur une prochaine exposition du musée de la Création Franche hors les murs ("La Création Franche s'emballe! Itinérance d'une collection insoumise", du 4 au 14 février 2013 au Bâtiment 20 des Terres Neuves aux lisières de Bordeaux et de Bègles, première étape d'une exposition d'une centaine d'œuvres de la collection qui devrait partir en balade, nous dit-on, excellente initiative...), un texte de Pascale Marini sur Aloïse et Dubuffet et aussi des contributions de Paul Duchein sur Labelle et Dino Menozzi sur Enrico Benassi.

 

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On reconnaît sur cette affiche un masque de Simone Le Carré-Galimard

La revue est disponible au musée ou en écrivant au contact du site web du musée.

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Les Maçons de la Creuse, bulletin de liaison n°15, daté juin 2011 (en réalité imprimé et disponible en janvier 2013), avec deux textes de BM: "François Michaud n'était pas seul, quelques exemples d'environnements populaires créés avant le Palais Idéal du Facteur Cheval" et "La dynastie des Montégudet, inspirés de père en fils"

 

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     Dans ce bulletin, le deuxième texte sur les Montégudet, je l'avoue sans peine, est  le même que celui publié dans mon livre Eloge des Jardins Anarchiques (qui lui-même était dérivé des notes parues sur ce blog...). Il est cependant mis en page différemment et comporte des photos supplémentaires inédites du petit musée privé de René et Yvette Montégudet, descendants et continuateurs de Ludovic Montégudet l'ancien maire de la commune creusoise de Lépinas qui avait créé un espace ludique et poétique avec statues et divertissements variés autour de son étang.

    Le premier texte quant à lui, "François Michaud n'était pas seul", est par contre une amplification d'un texte précédent paru dans Création Franche n°28 en 2007 (« François Michaud et les autres, quelques exemples d’environnements populaires sculptés avant le Palais Idéal du facteur Cheval »). De nouvelles photos inédites et des paragraphes nouveaux évoquent quelques sites anciens ayant précédé les Facteur Cheval, abbé Fouré ou abbé Paysant. Par exemple les statues du sabotier Jean Molette auteur dans les monts du Lyonnais d'une œuvre naïve, taillée dans la pierre et le bois, tout à fait remarquable. Il fit des Napoléon, Ier et IIIe du nom, une immense Madone, une fontaine ornée d'un écu et de lions, des croix de chemin, le tout en plein air (certains restaurés par les architectes des Monuments Historiques, car ils sont classés à l'Inventaire). Ce bulletin me permet aussi de présenter un extraordinaire panneau sculpté du même Molette – en 1854, excusez du peu... –, parfaitement inédit jusqu'à présent, consacré à la gloire de l'Empereur Napoléon III dont ce sabotier était raide dingue (comme François Michaud le tailleur de pierre de la Creuse dont mon article le rapproche). "Le Tableau des Souverains de France" étant le titre de l'œuvre de Molette entièrement vouée à chanter les louanges impériales (Napoléon III est représenté à cheval entouré de 78 médailles chargées de figurer les rois de France que l'Empereur surclasse selon l'auteur). Ce bas-relief fut longtemps conservé dans les archives locales jusqu'à ce qu'il parte chez les brocanteurs à une date récente, et de là dans une collection privée parisienne. Ces représentations naïves et populaires de Napoléon correspondent au regain de bonapartisme que l'on put observer dans diverses campagnes auour de 1852 en France lors du retour au pouvoir d'un Bonaparte. On trouve maintes références à cette napoléonimania, qui ressemble à un culte, sous la forme de statuettes ou d'imagerie, voire de fresques.

 

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Le Napoléon Ier et le panneau sculptés par Jean Molette, et autres décors situés en plein air avant le Palais Idéal... Les Maçons de la Creuse n°15, pages de l'article de BM

 

      Dans ce bulletin, je donne un autre exemple de décor napoléonolâtre photographié (là aussi, c'est complètement inédit) dans le Puy-de-Dôme près de La Tour d'Auvergne (voir ci-dessus). D'autres décors sculptés sur des maisons rurales du Cantal, que m'avait naguère signalés Emmanuel Boussuge sont également présents dans le numéro. Par ailleurs, l'article est flanqué d'encarts dus à la rédaction du bulletin (Roland Nicoux) et de nombreuses photos qui ajoutent de précieux renseignements sur les sculptures de François Michaud à Masgot. L'édition du livre que nous avions fait à plusieurs en 1993 sur ce créateur précurseur des environnements bruts et naïfs du XXe siècle aux éditions Lucien Souny étant désormais épuisée, ces précisions et photos sur Michaud viennent redonner un peu de lumière au sujet.

 

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Raymond Arthur, arrière-petit-fils de François Michaud, sur le seuil de sa maison en 2009, ph. BM

 

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