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17/11/2012

Postérité des environnements (7): Gabriel Albert sous cloche?

     Transmis par Patrick Métais, un article de Sud-Ouest m'apprend que le jardin de Gabriel Albert a reçu la visite de l'ineffable Ségolène Royal, la présidente du conseil régional de Poitou-Charentes, qui a fait part de son désir de valoriser et préserver le site et que sa région soit maître d'œuvre de ce point de vue. Il semblerait, à lire cet article, que l'Etat, via la DRAC, et la Région travailleraient sur un projet de valorisation culturelle et scientifique du jardin. On souhaiterait ainsi créer sur place un centre d'interprétation et un atelier de restauration des statues. Ces dernières sont on le sait passablement abîmées, tandis que plusieurs ont disparu, victimes de voleurs.

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Le jardin de Gabriel Albert (que l'on voit coiffé d'une casquette au fond devant le moulin), avec Christine Bruces-Cerisier, Anita Albert, Jean-Louis Cerisier, le jour où nous visitâmes les Albert en 1988, ph. Bruno Montpied 

     Il paraît que l'on songe même à mettre l'ensemble du site dans une serre... Alors Gabriel, bientôt comme le fromage, sous cloche? Cela illustre bien les conséquences de la reprise en main d'un site d'art populaire par une instance conservatrice. Avec la perspective de le faire entrer dans la postérité et de l'installer dans une certaine pérennité, le site se métamorphose en autre chose, de plus pétrifié. Un comble pour un jardin de statues en ciment armé... Du coup,  par contraste avec ce qui risque d'advenir quand on l'aura réifié sous un dôme (comme chez Euclides da Costa Ferreira), ce ciment reviendra dans nos souvenirs, à l'époque où son auteur était encore vivant, moins solide, presque palpitant.

     Mais l'on dira bien sûr, en chœur, "c'est mieux que rien..." Ah, mais je m'interroge décidément sur ce "rien". Pas sûr, pas sûr... Mais, bon, on pourrait dire aussi, un jardin, ça peut se mettre sous serre, argument habile...

Article Ségolène et Gabriel001.jpg

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La Maison Bleue d'Euclides da Costa Ferreira à Dives-sur-Mer, vue de la rue, état en juillet 2012 (le site fut recouvert d'un dôme en urgence, avec les moyens du bord, dans l'idée de le mettre hors d'eau, mais la situation perdure... Peut-être faut-il voir dans ce sarcophage plus ou moins translucide comme la métaphore d'une chrysalide dans laquelle une mue s'opère, prélude à l'essor d'un futur nouveau papillon?), ph BM

 

Commentaires

Une serre serait quelque chose d'assez désastreux à mon sens (une idée bouffonne qui montre bien l'incapacité de certaines personnes à comprendre ce que c'est que l'air libre). Mais l'effet de serre est décidément au goût du jour, et semble avoir contaminé jusqu'aux idées (bon, on me dire que "idées", ici, c'est un grand mot). Pourquoi ne pas emballer tout ça dans du papier bulle et le stocker dans un container souterrain en béton armé ad aeternum, patrimoine (on aime ce mot) de l'humanité cultureuse (cul-terreuse ?), non sans avoir préalablement numérisé le tout pour un accès "virtuel" depuis le canapé de chez soi, ou, mieux, avoir fait faire des copies parfaites, grandeur "nature", que l'on placerait ensuite dans ce même jardin désormais "valorisé", i. e. vidé de ses véritables habitants? Un peu comme on fait des vestiges archéologiques, poussés par ce souci pathologique de tout vouloir conserver (et c'est encore la peur de la mort et du changement), quitte à remplir le monde vivant de statues sans vie, et les musées de cadavres impuissants.
Laissez-moi dire beurk, tout simplement. La colonisation de l'espace sauvage, sous couvert de sauvegarde bienséante (comme dans les zoos) et de mise à l'abri des "patrimoines de l'humanité", ça me retourne l'estomac.

(Cette réaction est beaucoup dictée, je crois, par la difficulté que j'ai à voir des politiciens s'intéresser - eh oui, dans quel intérêt ? - à ce que nous appelons de l'art, et qu'ils appellent du matériel à "valoriser".)

Écrit par : Mauro | 17/11/2012

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