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07/10/2021

Le petit musée de monsieur Costecalde

Cette note contient une mise à jour du 9 octobre 

 

   Cela fait déjà quelque temps (quatre ans environ) que j'ai dans mes collections de cartes postales une image qui montre l'intérieur d'une habitation à Lapanouse de Sévérac (Aveyron), à l'est de Rodez, organisé en forme de petit musée privé (on en a déjà rencontré sur ce blog de ces petits musées ultra personnels). Parmi un capharnaüm d'objets et d'œuvres sculptées, on y aperçoit l'auteur – ou le "conservateur", un certain François Costecalde – d'une étonnante collection d'allure hétéroclite.

Lapanouse-de-séverac - le-musée (2).jpg

Lapanouse de Sévérac, le musée ; c.p. A.P., Millau, coll. Bruno Montpied.

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Agrandissement où l'on s'aperçoit que le visage de ce monsieur Costecalde, en train de manipuler une canne (semble-t-il) de sa collection, paraît avoir été traité surexposé (à dessein ?).

 

      Cette carte m'avait été signalée par un autre amateur de créations populaires, dijonnais, Julien Gonzalez, par ailleurs grand dénicheur d'autodidactes inconnus présents sur des cartes postales anciennes, ou décrits dans des journaux ou magazines peu repérés. Je reprends dans les renseignements ci-après des citations d'après les mails que m'avait adressés ce chercheur distingué en 2017 puis en 2020, et tout récemment encore en 2021 (tracées en vert)...

     Ce monsieur Costecalde, ancien menuisier (ce qui doit aider pour tailler du bois), né à Saint-Grégoire, commune de Lavernhe en 1835, est décédé en 1916. "Les enfants de celui-ci prenaient leur père pour [un "foulatras" ( ça sonne comme fou la trace), comme on dit en Aveyron¹]. Ils ont brûlé toutes ses créations peu après sa mort. Ne reste plus que la carte postale que nous avons pu trouver sur internet. Le lieu était très visité au début du XXe siècle, il y avait un restaurant juste à côté et les clients de celui-ci allaient visiter le musée après leur repas. Il avait été baptisé le musée de la sorcellerie."

   "...il reste encore une réalisation sauvegardée de cet autodidacte : une armoire avec des scènes et des visages humains sculptés qui a été rachetée par un habitant du village après son décès..."

     Après ces informations, Julien m'adressa une reproduction de la même carte que ci-dessus, augmentée de précieuses annotations d'un visiteur anonyme du musée – musée que cet anonyme qualifie de "ridicule" (on ne sait lequel des deux, du visiteur ou du "conservateur" l'était le plus, ridicule, d'autant que ses autres commentaires, comme on le voit ci-après, sont d'une tonalité descriptive assez précise, même si légèrement condescendants par endroits ; on retrouve ici une ambivalence analogue à celle de l'archéologue Léon Coutil lorsqu'il tomba sur les sculptures d'Antoine Rabany à Chambon-sur-Lac, cf. mon enquête sur l'auteur des Barbus Müller).

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Voir les annotations du visiteur anonyme (du 20 août 1912) en bas de la carte, et à gauche, celle qui invite à lire "l'explication" au dos de la carte (voir ci-dessous). C.p.collection Julien Gonzalez.

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"Ce que l'on voit dans ce ridicule musée...", verso de la c.p. de la coll. Julien Gonzalez ; transcription ci-dessous.

 

Transcription de la description du musée par le visiteur ci-dessus :

"- Quantité de bonshommes : un évêque, dit de la Martinique ; des guerriers avec pipe ou cigare à la bouche ; bonnes femmes avec seins proéminents - tous avec figures antiques et grotesques sculptées sur bois massif - divers animaux réels ou légendaires assez bien représentés: lions, serpents, hiboux, petits oiseaux, etc, etc.

- Têtes de sangliers ou de cochons - Un mort avec tous ses accessoires - Une superbe canne entourée de reptiles, etc. - Un diable à 6 cornes, etc. 

- Divers menus objets, tel un livre de messe creux renfermant un chapelet sans apparence extérieure d'ajustage offrant un travail patient et intelligent.

- Plus sérieux : Trois lits ; deux buffets et divers tables admirablement sculptés, sans placage - A droite de la carte on voit l'Artiste, né en 183(9? ou 5?), vrai phénomène - De caractère très doux et très enthousiasmé de son talent..."

    Qui était ce visiteur, écrivant sans faute d'orthographe, passablement outrecuidant (cf. ces soulignements sur ce qui lui paraissait plus sérieux dans la production de Costecalde, à savoir des meubles, donc des objets utilitaires, les objets plus artistiques ne trouvant que mépris aux yeux de ce visiteur instruit, mépris à peine tempéré par la reconnaissance de l'habileté et de "l'intelligence" du sculpteur improvisé...)? On ne peut que deviner un personnage quelque peu dérouté en creux (voire scandalisé...) par l'audace de ce créateur ne s'étant autorisé de personne, hors lui-même, pour confectionner et ouvrir son musée  personnel.

     Plus récemment, Julien Gonzalez, m'a également envoyé une autre description du "Musée" - datée de novembre 2017 - par une habitante de Lapanouse (tracée ici en violet), propriétaire de l'armoire rescapée de l'imbécile autodafé des héritiers de Costecalde (voir photo ci-après), intéressante parce qu'on peut la recouper avec la description de l'annotation ci-dessus:

       "Monsieur, je vous envoie un peu de la vie d'un Musée de mon village Lapanouse où se trouvait ce Musée.

       Je ne peux vous faire la photocopie du journal dont je vous avais parlé, elle est trop fripée et n'a rien donné. C'était [dans] le journal L'Union catholique (février 1905 ou 1906) : "Ce menuisier ébéniste n'a eu d'autre guide que son imagination, sur la carte postale on aperçoit le général Pélissier avec son sabre, l'évêque de la Martinique, Saint-Roch et son chien, Robespierre à cheval sur une chèvre, etc. (illisible), au second plan : un sanglier, un ânon, un crocodile, une tête de bœuf, un écureuil grignotant une noix, des lapins, des poules, (etc...) Nous ne saurions trop recommander aux touristes sillonnant notre pays, et ils sont nombreux, et à tous les amis du beau qu'une visite dans les ateliers de cet artiste, (etc...), ils trouveront toujours quelque objet digne de leur convoitise".

     L'auteur de cet article serait un Dominique de Saint-Léon, écrivain de la région.

    A savoir dans une pièce obscure il y avait une chambre mortuaire, 2 cierges, un Christ, un bénitier, un lit, et sur ce lit, un mort en bois bien sûr, les visiteurs qui voulaient bien sûr, devaient faire le signe de la croix et bénir le mort, il paraît que c'était très lugubre, et juste que la lueur des chandelles, ce lit aussi avait une tête de mort à chaque pied de lit, un corbillard, un fossoyeur, mon grand-père l'avait acheté mais ni mon oncle, ni mon père ne voulait y dormir, ils l'ont vendu à un antiquaire de Béziers contre une chambre à coucher (armoire à glace)... Ma grand-mère était fière, car ils avaient fait une affaire.

    Des quatre enfants Costecalde, aucun n’est resté au pays et, à son décès, ils vendirent quelques meubles et tout le reste [est parti] au feu... Ils avaient honte que leur père soit un "foudralas" [foulatras, plutôt, non ?], mot patois qui veut dire "dérangé".

     Que reste-t-il aujourd'hui ici : deux ou trois armoires et une pierre sculptée mais que l'usure du temps a détériorée".

     "Cette dame m'a envoyé joint à son courrier une photo de l'armoire sculptée qu'elle possède encore aujourd'hui." (Julien Gonzalez). Voir ci-après la carte du musée que j'ai enrichie de légendes apposées près des effigies évoquées dans les descriptions, plus la photo de l'armoire évoquée mon correspondant Julien.

 

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Carte avec légendes incrustées sur la photo par B.M.

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Magnifique armoire actuellement conservée chez une habitante de Lapanouse, ph. transmise par Julien Gonzalez.

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¹ Ce  mot de "foulatras", je ne sais trop d'où il vient. En fouillant sommairement sur Internet, j'ai trouvé, sans être sûr de moi, que le mot était courant dans le parler Gaga de  la région de Saint-Etienne, désignant quelqu'un de dérangé, d'anormal, de pas comme tout le monde, etc. Régis Gayraud me propose une dérivation occitane de "folâtre"... Ô, comme nous manquent les conseils avisés de ce distingué occitaniste qu'était Michel Valière...

30/09/2021

Les Journandises, manifestation artistique sur le campus de Bourg-en-Bresse et ma venue le 12 octobre

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      Je dois dire, qu'avec l'âge, je m'y perds de plus en plus dans les annonces que je reçois. Les "Journandises", par exemple, dans le cadre desquelles je suis invité le 12 octobre prochain à venir débattre avec qui veut (des étudiants a priori) d'art brut, d'art naïf, d'art populaire, et, accessoirement, à partir de la maison peinte d'Eric Le Blanche dont je montrerai l'intérieur, via le film que j'ai écrit et coréalisé en 2019 en autoproduction (y a marqué "Zoom back productions" dedans, mais c'est un mot bidon)... C'est une manifestation qui se tient apparemment de manière régulière (du moins quand il n'y a pas de pandémie par-ci, par-là), dans une bourgade appelée Journans (c'est la première fois, n'étant pas de la région, que j'en entends parler ; mais comme il y a internet, maintenant, tout le monde fait dans l'implicite et comme si tout le monde savait ; donc, je regarde sur internet moi aussi et je vois que Journans, c'est dans l'Ain (hein? c'est au sud-est de Bourg-en-Bresse (prononcer Bourk-en-Bresse), et donc au nord-est de Lyon aussi). Mais je ne sais trop pourquoi, il se trouve que dans le cadre de ces Journandises, (la manifestation qui se tient à Journans s'appelle comme ça, donc), qui, elles-mêmes cette année, se tiennent dans le cadre de la Biennale Hors-les-Normes de Lyon (plus communément appelé BHN : un acronyme, ça fait toujours bien dans le décor) - ce qui accentue la complexité de la chose, tout de même, non? -, la manifestation (une expo de trois personnes, Jean Branciard, Hanna Chroboczek et Marcel Vinsard (1930-2016 ; un créateur sur qui j'ai abondamment renseigné par un livre et par des notes sur ce blog) dont c'est le vernissage pas plus tard qu'aujourd'hui, une rencontre avec mézigue autour d'un film donc (le  12 octobre à 18h30), et le 14 octobre, un atelier avec Jean Branciard qui incitera les étudiants de Bourg à fabriquer des bateaux à partir de matériaux recyclés) se tient non pas à Journans, ni à Lyon, mais sur le campus de l'université de Bourg-en-Bresse (je ne savais pas qu'il y avait une université là-bas, ne pensant personnellement qu'aux poulets quand j'entends le mot Bresse, qu'on me le pardonne, SVP...). Avouez qu'il y a de quoi s'y paumer, non, quand on n'est pas familier des secrets des dieux (c'est-à-dire des animateurs de la BHN), non?

     Donc... A bientôt?