23/01/2018
A propos des fous littéraires, une rencontre avec Marc Décimo
La Halle Saint-Pierre ne lâche jamais l'affaire. Dans le cadre des animations de l'auditorium, elle invite cette fois Marc Décimo, distingué professeur, sémioticien (ouh le mot qui fait peur...), historien d'art, j'en passe et des meilleurs, samedi 27 janvier 2018 de 16h à 17h30, pour venir nous entretenir de sujets en rapport avec ceux que Charles Nodier, Raymond Queneau et André Blavier, entre autres, ont qualifié de fous littéraires. L'actualité éditoriale de Marc Décimo, aux Presses du Réel, ces temps-ci, est extrêmement active. Il vient de faire paraître en même temps deux épais ouvrages, l'un en collaboration avec le sieur Tanka G.Tremblay, Le texte à l'épreuve de la folie et de la littérature (600 p., 42€), et l'autre, en solo, Des fous et des hommes. Avant l'art brut, suivi de Marcel Réja: L'art chez les fous, le dessin, la prose, la poésie (1907), édition critique et augmentée. Dans ce dernier, il paraît, aux dires de l'auteur lui-même qu'outre l'édition augmentée, il apporte des lumières nouvelles sur plusieurs créateurs présents dans l'historique livre de Réja (alias le docteur Paul Meunier, nom démasqué en son temps par Michel Thévoz), qui avait déjà été réédité il y a plusieurs années.
Le premier livre, Le texte à l'épreuve de la folie et de la littérature, que personnellement j'ai préféré prendre (il y a tant de choses à lire, tant, qu'une seule vie ne peut y suffire), traite de la relativité du terme de "folie", selon que tel ou tel chroniqueur l'emploie, et selon l'époque où il l'emploie. Pour Marc Décimo, surtout, semble-t-il, on a traité de fous des auteurs qui bien souvent étaient parfois en avance sur leur temps, avec des projets tellement audacieux qu'ils paraissaient aberrants aux yeux de leurs contemporains. Notamment, notre sémioticien distingué (qui écrit dans une langue fort claire, en dépit de quelques mots rares dont le lecteur pas paresseux ira repêcher le sens dans un dictionnaire de figures de style, comme par exemple ces étranges termes : "apocope", "métathèse"...) voit dans ces fous littéraires souvent de "la pataphysique par anticipation" et rappelle l'article de Noël Arnaud, paru dans le n° spécial de la revue Bizarre, en avril 1956, sur "les Hétéroclites et les fous littéraires", où il traitait Louis de Neufgermain (ailleurs qualifié de "fou littéraire") de "poète hétéroclite". Décimo, pour sa part, ajoute qu'on aurait pu également considérer le même comme "oulipien", "par anticipation" là aussi... Collège de Pataphysique et Oulipo sont deux ensembles pourvus de nombreuses passerelles et d'auteurs en commun qui intéressent Marc Décimo au premier chef, lui qui est par ailleurs régent du fameux Collège et titulaire de "la chaire d'Âmoriographie littéraire, ethnographique et architecturale"... Peut-être peut-on alors voir dans ce dernier ouvrage la dernière vision des fous littéraires telle que les entendent les pataphysiciens et les oulipiens actuels, à savoir des génies précurseurs, entre autres des inventions en termes de langage?
Rendez-vous donc samedi prochain pour tous ceux qui voudront bien faire un bout de balade en compagnie de cet érudit ludique, Marc Décimo, digne héritier des Queneau et des Blavier...
15:59 Publié dans Fous littéraires ou écrits bruts | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : halle saint-pierre, marc décimo, presses du réel, pataphysique, oulipo, jeux de langue, marcel réja, fous littéraires, l'art chez les fous | Imprimer