25/10/2019
Après le Gazouillis (5): des nouvelles du Restaurant de la Gaieté des Villéger, des sites de Gabriel Albert et Franck Vriet, d'André Hardy et de la maison de Didier Rossetti...
Ismaël et Guy Villéger
Aux dernières nouvelles, en provenance de divers correspondants qui ont la gentillesse de me tenir au courant du devenir de certains des sites dont j'ai parlé dans mon inventaire des environnements spontanés paru sous le titre du Gazouillis des éléphants (2017), on m'a appris récemment que le Restaurant de la Gaieté (que l'on appelle aujourd'hui, populairement, "la Maison de la Gaieté"), cet ancien cabaret rural situé à Chérac, en Charente, qui conservait des décors naïfs en mosaïque, en façade (voir ci-contre le "roi des cocus", photo Denise Delprato de 2015) mais aussi en intérieur, créés entre 1937 et 1952 (comme c'est inscrit sur la façade) par un père et son fils – Ismaël et Guy Villéger –, a été choisi dans le cadre du Loto du Patrimoine pour bénéficier d'une subvention de plusieurs milliers d'euros, qui va aider les deux propriétaires, réunis en SCI. Il s'agit d'un peintre, Julien Graizely, et du gérant d'une entreprise (Ici Média), Laurent Hervé, qui se sont portés acquéreurs du bâtiment, dans l'idée de le restaurer, et de lui redonner une nouvelle jeunesse dans le respect de son lustre ancien (et notamment d'y reconstituer un cabaret, prolongement logique de ce qu'était le Restaurant de la Gaieté à l'origine...). Voici un article que m'a transmis récemment mon correspondant charentais Patrick Métais:
Ouest-France ; à noter quelques éléments biographiques peu connus qui sont donnés en marge dans cet article sur les Villéger: on sait que ces mosaïques furent assemblées entre 1937 et 1952 par Ismaël Villéger, puis complétées par son fils Guy (selon une inscription sur la façade), on savait moins qu'Ismaël s'était engagé dans la Marine à 20 ans et qu'il avait participé à plusieurs expéditions en Chine.
A noter que l'un des deux nouveaux propriétaires du lieu signale ici de la main la lettre É, qui était en mosaïque comme le reste de l'inscription verticale en capitales "LA GAIETÉ", et qui manque à présent sur la façade.
Carte postale moderne (années 1950-1960) montrant l'estaminet du temps de sa splendeur, coll. Bruno Montpied ; on notera qu'au pied du palmier (qui fut scié par la mairie il n'y a pas très longtemps, le jugeant trop dangereux) avait été assemblé tout un jeu d'assiettes ou de médaillons peut-être eux-mêmes en mosaïque ; l'établissement se nommait, à l'époque de cette photo, "Restaurant de la Gaieté", sous titré "Buvette"... A noter que la façade de la maison basse à droite ne recelait pas beaucoup de mosaïques, seulement autour des ouvertures.
Sur ces mosaïstes, Patrick Métais m'a appris qu'existait dans le centre du village de Chérac une autre façade en mosaïque, que l'on imagine facilement comme ayant été réalisée par le même Ismaël Villéger, à moins que ce ne soit dû à son fils Guy. C'est tout à fait du même style... Peut-être était-ce un second logis de cette famille?
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L'autre façade en mosaïque à l'intérieur du village de Chérac : encore un coup des Villéger? Ph. Patrick Métais, 2016.
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Gabriel Albert et Franck Vriet
Le Jardin de Gabriel Albert en 2018, reprenant peu à peu tout son lustre... ph. Jean-Loup Montpied.
J'ai également des nouvelles du site de Gabriel Albert à Nantillé (Charente), transmises par Yann Ourry (Service Patrimoine et Inventaire - Direction Culture et Patrimoine - Site de Poitiers) :
"Nous avons effectué l’année dernière les premières mesures d’urgence : mise à l’abri des 59 statues et bustes les plus fragiles et traitement des statues restées sur place : https://inventaire.poitou-charentes.fr/le-jardin-sculpte-...
En attendant les prochaines étapes. Le site est ouvert quelques jours dans l’été, avec un certain succès (moyenne de 50 visiteurs par jour). Pour cette année, il reste le mardi 13 août et le dimanche 22 septembre (journées du patrimoine).
Par contre, je crois savoir qu’il ne reste plus grand-chose de l’œuvre de Franck Vriet dans la commune voisine de Brizambourg."
Ce dernier, qui avait travaillé avec Gabriel Albert, peut-être sur certaines petites statues animalières du site de Nantillé, était en quelque sorte un émule d'Albert. Il avait créé lui aussi, en effet, à quelques encablures de son ami, un ensemble de statues hétéroclites, toutes naïves, en lisière de sa maison, dans des bouts de terrain enclos et visibles de la route, mais aussi dans la cour de sa maison. J'ai récemment, dans ma note nécrologique sur Michel Valière, mis en ligne une photo de cette cour où on voit Franck Vriet avec sa femme parler avec Valière et sa propre épouse, Michèle Gardré-Valière. Et l'on peut également se reporter à la brillante note (parfois un peu ésotérique) que Denis Montebello a consacrée sur son blog à la destruction du site de Vriet, qu'il attribue apparemment à un édile (ça rime avec débile). Denis Montebello est par ailleurs l'auteur d'un livre de digressions littéraires qui prennent le site des Villéger comme point de départ: Denis Montebello, La Maison de la Gaieté, éditions Le Temps qu'il fait, Bazas, 2017.
Une statuette de Franck Vriet, une guenon et son petit, ph. et coll. Bruno Montpied (extrait de mon musée de fragments d'environnements...).
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André Hardy (1921-2013)
De ce dernier, peu de nouvelles de ses statues qui ont été dispersées après la vente de sa maison et de son jardin empli de statues. Simplement, j'ai parlé il y a peu de quelques statues d'Alfonso Calleja, autre inspiré des bords de routes, que j'ai croisées au marché Paul Bert aux Puces de St-Ouen. Au passage, je mentionnais avoir vu plus loin d'autres statues animalières, un éléphant, une girafe, un zèbre et un ours dont les couleur s'étaient fait la malle depuis quelque temps...
André Hardy au marché Paul Bert, le zèbre et l'ours (blanc?), août 2019, ph. B.M.
L'éléphant me trottait dans la tête... Je pensai d'abord à Horace Diaz, dont les statues ont été également mise à l'encan après sa mort à Lodève. Mais non, ça ne collait pas, en comparant les photos... Et puis, la lumière s'est faite en moi. Ces autres statues animalières du marché Paul Bert, placées dans un stand différent de celui des Calleja, sont d'André Hardy! Elles aussi, donc, continuent de voyager...
André Hardy, l'éléphant, ph. B.M., août 2019.
Je peux ajouter à ce signalement une autre information de transfert d'une installation du même Hardy, cette fois en Mayenne, dans le jardin de Michel Leroux où Jean-Michel Chesné, qui s'est formé au métier de rocailleur – et, ma foi, qui s'en tire pas trop mal ! –, a rehaussé et restauré un portique de Hardy qui se trouvait originellement dans un potager jouxtant la maison de ce dernier. Voir ci-dessous les deux photos que Chesné m'a confiées. Qu'il en soit ici vivement remercié.
Jean-Michel Chesné au travail, 2016.
Et voilà le travail, un portique d'André Hardy (et de Jean-Michel Chesné) tout neuf ou presque.
Quant à la maison de Didier Rossetti au Mans...
...elle est à vendre. Ou du moins, elle l'était, il n'y a pas si longtemps, comme me l'a aimablement signalé M. Laurent Le Meur, qui m'avait aidé à la trouver en lisière de la ville pour que je puisse la photographier pour mon Gazouillis des éléphants. C'est une maison aux décors en façade à la fois naïfs et un peu art déco, à thèmes animaliers. Un beau bas-relief naïf, à la thématique bachique, pouvait se voir à l'arrière de la maison. Cette demeure ne peut être dissociable de deux autres maisons, dont l'une a disparu à une date indéterminée (le photographe Francis David avait eu le temps de la photographier et de la publier dans son catalogue des Bricoleurs de l'imaginaire), de style rocaille qui avaient été construites, avant la maison en question, par deux amis communistes, M. Pennier et M. Rossetti père. La deuxième, "Les Etoiles", due à ce M. Pennier apparemment, était toujours debout aux dernières nouvelles. Il faut souhaiter que le nouvel acheteur de la maison Rossetti saura (a su?) l'apprécier dans son jus actuel.
Ancienne maison de Didier Rossetti, telle qu'on peut la voir sur Google Street, rue du Soleil, au Mans
00:52 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art naïf, Environnements populaires spontanés | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : ismaël et guy villéger, la maison de la gaieté, chérac, cabarets de campagne, environnements populaires spontanés, yann ourry, service patrimoine, loto du patrimoine, le restaurant de la gaieté, horace diaz, didier rossetti, le gazouillis des éléphants, mosaïque naïve, andré hardy, gabriel albert, franck vriet, jean-michel chesné, marché paul bert, patrick métais | Imprimer
31/12/2018
Art très modeste...
Décor en bordure de rue à S-Quentin-les-Anges (nom prédestinant?), entre Laval et Angers, à la frontière exacte de la Mayenne et du Maine-et-Loire ; une crèche, un père Noël, divers personnages richement costumés, et pourvus de masques peints ; ph. Patrick Métais, 2018.
Voici un insolite ensemble de personnages en plein air entrant dans la catégorie de l'Art modeste, plus que dans celles des environnements populaires spontanés. Cela fait partie de cette habitude développée au fil de ces dernières années qui consiste à décorer son habitat extérieurement aux couleurs de Noël, la plupart du temps de manière temporaire. C'est souvent kitsch (mot que l'on définira en fonction d'une volonté de dupliquer l'apparence de réalité par des moyens de copie facile, par exemple des moulages en résine)... Et manifeste, hormis l'étalage d'un savoir-faire spécial (ici les costumes qui ont demandé du travail et du temps, dues à un atelier du village appelé "l'Armoire aux saltimbanques"), un manque d'inventivité en ce qui concerne la création de formes. On cherche à faire réaliste, et on pallie le manque d'audace en matière de façonnage par l'assemblage de masques tout faits, de gants en caoutchouc parfois tout faits là aussi, d'habits propres, et neufs, à la différence des loques des épouvantails, qui sont leur contraire...
Épouvantails que je préfère infiniment.
13:53 Publié dans Art populaire contemporain | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : décorations extérieures de noël, patrick métais, créches, père noël, kitsch, art modeste | Imprimer