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Monsieur Arthur Borgnis cherche de l'aide pour financer son film sur une Histoire de l'Art Brut
C'est la mode, on adore prendre des termes anglo-saxons pour intituler ses œuvres, la langue française étant désormais perçue par tant de gens – à mon avis de façon désolante – comme moins sexy... M. Arthur Borgnis n'y a pas coupé en reprenant une citation (quelque peu sybilline, je dois dire, surtout si on la rapporte au sujet du film) d'une créatrice rangée dans l'art brut, Madge Gill, Eternity has no door of escape (= "On ne peut pas s'échapper de l'éternité"), pour en faire le titre d'un documentaire qu'il souhaite réaliser et éditer en DVD l'année prochaine (pas de diffusion possible sur les chaînes de télé, que la dictature de l'audimat continue d'écraser), et qu'il rêve de voir comme une "histoire de l'art brut", projet qui n'aurait pas été tenté selon lui (et pourtant, ne pourrait-on pas citer le film de Bruno Decharme, Rouge Ciel, qui a déjà été sur le même "créneau"?).
Trailer du film d'Arthur Borgnis projeté
Ce titre a déjà été utilisé pour l'exposition de la collection Eternod-Mermod il ya quelques années (2001) à Lugano, et je me demande s'il est bien adéquat pour un tel projet (évidemment, surtout auprès d'un public francophone)... On lira cependant attentivement le projet du film avec la demande de collaboration participative (Kiss Kiss Bank Bank...) demandée auprès de tous ceux qui veulent le soutenir.
Cependant, personnellement, une phrase dans ce projet, qui évoque "quatre figures emblématiques incontournables" de l'art brut, me chiffonne assez considérablement : "Jean Dubuffet, qui théorisa l’art brut, sera la figure tutélaire du film. Hans Prinzhorn, qui fut le premier à considérer les œuvres d’aliénés comme des œuvres à part entière, puis Harald Szeemann qui l’introduisit dans l’art contemporain, et Alain Bourbonnais qui l’ouvrit à l’art autodidacte sous différentes formes seront nos guides, nos passeurs." Si je peux m'accorder avec l'auteur du projet avec la première partie de cette déclaration (Dubuffet, Prinzhorn...), la seconde me paraît ultra délicate. Szeemann aurait introduit l'art brut dans l'art contemporain? Si c'est vrai, cela n'a aucun sens et ne peut être réalisé qu'à la faveur d'une entourloupe, d'une manipulation et d'une usurpation du sens des mots "art brut". C'est en effet, cependant, ce qu'essayent de faire aujourd'hui, certains marchands (la galerie Christian Berst par exemple), créer une confusion entre art brut et art contemporain, mais cela n'a pas à être défendu par les vrais amis de l'art brut. Dire ensuite qu'"Alain Bourbonnais" aurait ouvert l'art brut "à l'art autodidacte" est incohérent et confus, puisque l'art brut, par définition, est précisément le fait d'autodidactes. Il semble que le texte veut dire autre chose, si on me permet de l'interpréter en dépit de sa confusion: ne veut-on pas insinuer en effet qu'Alain Bourbonnais aurait "élargi" l'art brut à l'art des marginaux contemporains en tous genres, classés dans la neuve invention ou dans l'art singulier, ou selon le terme utilisé par Bourbonnais justement, "l'art hors-les-normes"? Qu'il aurait en quelque sorte adhéré par là à l'amalgame très anglo-saxon de l'art "outsider"? Cela serait défendre une contre-vérité là aussi, puisque Bourbonnais a bifurqué au contraire par rapport à l'art brut, en s'intéressant avant tout à des formes de création inclassables, singulières : de l'art contemporain de marginaux, pas assimilables à l'art autarcique propre à l'art brut. Il ouvrait ainsi une voie qui s'est poursuivie avec l'art dit singulier (après 1978) qui reste une catégorie d'art à distinguer de l'art brut. Quelques créateurs de l'art brut se retrouvent certes dans la collection de la Fabuloserie de la famille Bourbonnais (Ratier, Aloïse, Podesta par exemple), mais ils sont minoritaires au sein de la collection, n'étant là que parce qu'Alain et Caroline Bourbonnais étaient avant tout éblouis par leur créativité. Il est aussi à noter que la Fabuloserie recèle peu d'œuvres venues du monde asilaire.
13/12/2016 | Lien permanent
Disparition de Caroline Bourbonnais, et hommage à la Fabuloserie
Caroline Bourbonnais est décédée dimanche dernier. Décidément, après Madeleine Lommel, Monika Kinley (décédée au début de cette année à 88 ans), Charlotte Zander (elle aussi disparue cette année), une page se tourne avec ces femmes d'une incroyable pugnacité qui bâtirent des collections d'art hors les sentiers battus des années 70 aux années 2000. Caroline Bourbonnais, devenue la vestale de la Fabuloserie après le décès de son mari architecte et artiste Alain Bourbonnais en 1988, tenait d'une main de fer dans un gant de velours la collection d'Art-Hors-les-Normes qui est installée à Dicy dans l'Yonne, et divisée en deux parties particulièrement révélatrices dans leur spatialité des conceptions du couple Bourbonnais. Elle paraissait éternelle, personnellement je ne me souciais aucunement de chercher à connaître son âge, tant son rôle de gardienne intemporelle des lieux lui composait un masque d'intangibilité. Je n'ai découvert son âge (90 ans) qu'en apprenant sa mort, cette dernière inéluctablement associée au temps qui nous emporte tous.
Parc de la Fabuloserie consacré aux environnements spontanés, avec des statues de Camille Vidal et des médaillons en mosaïque de François Portrat sur le mur de présentation rouge conçu par Alain Bourbonnais, ph. Bruno Montpied, 2011
A la Fabuloserie, ouverte en 1983, il y a le bâtiment, qui se ramifie par des surgeons greffés ou ouverts ces dernières années, conçu comme un labyrinthe et qui abrite des œuvres peintes, brodées, tissées, collées, sculptées, etc., et il y a le parc, consacré à une sorte de musée des environnements spontanés d'habitants-paysagistes quasi unique en France, voire en Europe. Ce parc a reçu en effet au fil du temps des fragments d'environnements sauvés de la destruction et du vandalisme, ce qui est le lot quasi fatal de ces formes de créations de non-artistes, fragments entretenus, restaurés, par des équipes formées par les Bourbonnais, des passionnés qui entrent en empathie avec les œuvres qu'ils choisissent de prolonger en les réparant et en les remontant, qu'on songe au magnifique sauvetage du "manège" de Petit-Pierre par exemple.
Le manège de Petit-Pierre, ph. BM, 2011
La Fabuloserie fut créée dans le prolongement de l'activité de l'Atelier Jacob qui s'était constitué dans le VIe arrondissement parisien dès le début des années 70, Alain Bourbonnais collectionnant depuis les années 60, activité qui lui servait de jardin secret à côté de son activité professionnelle (il fut l'architecte, à ce que j'ai entendu dire, entre autres de l'aménagement intérieur de la station RER Nation, et de l'église Stella Matutina à Saint-Cloud -église où entre parenthèses le signataire de ces lignes, bien avant de connaître l'art brut, à douze ans, fit sa communion... avant d'abjurer toute croyance en Dieu, le jour même de la cérémonie !). Bourbonnais avait décidé de continuer en France la prospection d'art brut, d'autant qu'il regrettait le départ de la collection de Dubuffet vers la Suisse en 1971.
A l'intérieur de la Fabuloserie, des enseignes de coiffeur africaines, un Fernand Michel semble-t-il, des sculptures de René Guivarch, de Jean Rosset, un bateau de Ratier, photo extraite du site web de la Fabuloserie
Cela dit, est-ce tout à fait le même "art brut" que l'on trouve à Dicy et à Lausanne? S'il y a des Aloïse à la Fabuloserie, et des Ratier, on y trouve aussi, mêlés sans distingo, beaucoup d’œuvres d'artistes singuliers, comme Nedjar, Francis Marshall, François Monchâtre, Verbena et autres Moiziard ou Lortet et Chichorro. Les deux Bourbonnais recherchaient semble-t-il avant tout l'étonnement et l'émerveillement générés par les œuvres qu'ils rencontraient au gré de leur quête, qu'ils proviennent du contact de créateurs autodidactes, bruts, populaires ou naïfs, ou d'artistes marginaux. L'exigence de leur regard esthétique aidait à fondre ces créations, hétéroclites au départ, dans un creuset unitaire. La Collection d'Art Brut de Dubuffet était plus intransigeante, cherchant avant tout chez le créateur recherché l'écart vis-à-vis de toutes références culturelles artistiques. Les créations plus mêlées au cirque artistique ambiant étaient rejetées dans une collection dite "annexe" qui fut rebaptisée par la suite la collection Neuve Invention.
Caroline Bourbonnais faisant visiter le manège de Petit-Pierre à la Fabuloserie, photo A.Gacon, sur le site lYonne.fr
Caroline Bourbonnais aura grandement fait grandir la collection qu'elle avait commencée avec son mari, tout en préservant l'unité architecturale labyrinthique voulue par Alain Bourbonnais. Depuis plus de trente ans, c'est grâce à elle que l'on continue d'avoir au cœur de l'Yonne ce double cabinet des merveilles, conjuguant intériorités et extériorités poétiques d'autodidactes divers. Ses filles Agnès et Sophie la secondaient depuis quelques années, reprenant progressivement le flambeau. Il semble donc que dans l'avenir immédiat il n'y ait pas de souci à se faire pour la poursuite de l'aventure "fabulose"... Mais Caroline Bourbonnais, elle non plus, nous ne l'oublierons pas.
15/08/2014 | Lien permanent | Commentaires (11)
Monleme Gladys (c'est pas une jeune fille)
De passage à Lyon, le week-end du 1er mai dernier, j'ai fait un petit bonjour à mon galeriste préféré, l'ineffable Alain Dettinger qui, en dépit du black out des lieux fermés pour cause de pont du 1er mai, était resté ouvert, parce que pour lui il ne s'agit pas d'un travail mais d'une passion, de l'air qu'il respire chaque jour, quelle que soit l'actualité. Il y avait toujours autant de tableaux et d'objets, de photographies accrochés aux murs et surtout entassés au sol, bouchant toute l'arrière-boutique. En voilà un à qui on devrait donner un peu plus d'espace, tant son travail de découvreur et de défricheur de talents ressemble à une entreprise de salubrité publique. Car nos esprits ont autant besoin de remèdes que nos corps.
Il exposait les savants travaux d'équilibrisme en noir et blanc de Danielle Stéphane, je l'ai déjà signalé. Et comme toujours, en marge de son expo du moment, il y avait pour moi une autre découverte à faire. Alain Dettinger est un passionné d'Afrique comme on sait, c'est l'autre registre de sa galerie, parallèle à l'art plastique et graphique de singuliers contemporains. Il avait rencontré en compagnie d'une amie galeriste, située un peu plus loin de son échoppe (il est place Gailleton dans la Presqu'île à Lyon), à savoir la Galerie du Triangle, 33, rue Auguste Comte, un artiste béninois autodidacte (comme semblent l'être beaucoup de créateurs contemporains en Afrique noire), se présentant sous l'étrange prénom féminin de "Gladys". La Galerie du Triangle lui organise une exposition qui dure jusqu'au 16 mai.
Alain Dettinger pour sa part s'est contenté d'acquérir deux peintures de cet artiste, toutes deux signées plus complètement "Monleme Gladys". Il paraît vivre à Abomey, au Bénin, et créerait quelque peu dans l'orbite d'un autre artiste de là-bas, déjà pas mal "lancé", le dénommé Dominique Zinkpe, créateur d'un centre culturel, qui lui-même a parmi ses influences admises le peintre d'origine haïtienne Jean-Michel Basquiat. Et ce dernier, pour le côté peut-être un peu déstructuré de ses compositions paraissant souvent sur le point de se dissoudre, est sans doute une référence aussi pour notre Gladys.
Monleme Gladys, sans titre (un homme tient à bout de bras sa tête coupée, tandis qu'un autre homme le menace de sa lance), 83 x 87 cm, technique mixte (sur papier marouflé sur panneau de bois?), 2010, Galerie Dettinger-Mayer, Lyon, ph. Bruno Montpied
Monleme Gladys, sans titre (accouchement d'un serpent par le bas et accouchement d'un être humain par le haut...), 83 x 87 cm, technique mixte (sur papier marouflé sur panneau de bois?), probablement de la même année 2010 que le précédent, coll. privée, Paris ; ph. B M
Les deux compositions m'ont fait penser que l'homme doit en outre être inspiré par les mythologies propres à son pays, car en dépit du fait qu'elles sont assez sobres, tracées sur un fond uni quoique plein d'une matière graineuse, elles restent assez difficiles à interpréter pour un Européen peu au fait de ces mythes, ce qui est mon cas.
Détail d'un portrait de Gladys devant ses peintures, archives Alain Dettinger, 2015
Le problème, c'est qu'à côté de ces deux compositions-là, l'artiste en question paraît travailler parfois un peu plus vite, et peut-être de façon moins inspirée (afin de satisfaire à une commande qui le bouleverse ?). L'exposition de la Galerie du Triangle de mon point de vue révèle cet aspect préoccupant (car le fait de se montrer inégal peut desservir grandement un artiste, par la réputation qu'elle risque de lui tailler), même si dans l'ensemble on peut découvrir de fort belles choses en ce lieu courageux. Si un grand tableau sans titre au centre de l'expo reste de très belle facture (voir ci-dessous), ainsi que deux ou trois autres compositions sur panneaux, plusieurs dessins sur papier paraissent cependant moins frappants.
Gladys, sans titre, sans date (?), environ 1 m x 1 m (?), peinture sur panneau ou toile, exposition Galerie du Triangle, 2015 ; ph. BM ; c'est l'une des plus intéressantes œuvres de l'expo
Gladys, une autre de ses grandes peintures exposées Galerie du Triangle, elle aussi fort belle... ; ph. BM
Gladys, une de ses peintures sur papier datée de 2014; l'inspiration n'est-elle pas moins forte ici (personnages moins narratifs, posés platement côte à côte, seule la couleur paraissant avoir été traitée avec attention) ? Exposition Galerie du Triangle, 2015 ; Ph BM
Alors? Qu'est-ce qui explique cette différence d'inspiration et de graphisme entre les peintures de 2010 et les quelques œuvres de 2014 montrées en ce moment à Lyon? Mais il faudra sans doute attendre d'en voir davantage... Ce qui n'est pas sûr d'arriver quand on connaît le grand nombre d'artistes qui créent en Afrique, notamment de l'Ouest.
08/05/2015 | Lien permanent
C'est parti pour Fatima-Azzara Khoubba à la Galerie Dettinger-Mayer
J'en remets une couche pour inciter tous les Lyonnais et autres à aller voir les nouveaux dessins de Fatima-Azzahra chez Dettinger (du 27 novembre 2021 au 1er janvier 2022), œuvres proposées pour les Fêtes, à mettre dans toutes les hottes, toutes les bottes, entre deux oranges, surtout si l'on manque d'idées de cadeaux cause pénuries diverses...
Oeuvre de Fatima-Azzahra Khoubba (son titre n'a pu être retenu par moi, en raison de son aspect un peu "cabalistique" (il est composé de lettres détachées, dont je n'ai pas saisi le sens)
Fatima-Azzahra avec un admirateur, ph. non référencée, arch. Galerie Dettinger-Mayer, 2021.
Falaises, découpures bleues, ocellées, sont ses dernières créations (curieux comme les yeux envahissent Fatima en ce moment, jusqu'à ces boucles d'oreille ocellées arrachées à la queue d'un paon, qu'elle portait à la séance de signature de son recueil de poèmes, Nuit intranquille, signé seulement de son deuxième prénom, Azzahra, le jour du vernissage de son exposition). Falaises, si on les regarde dans le sens vertical qu'elle préfère, mais, à l'horizontal, on songe aussi à une cartographie de pays imaginaire, archipel ou continent aux côtes crevées de déchirures. Et sur tout cela, des yeux qui pullulent, dardant vers ceux qui les regardent.
"Eternelle saison", poème d'Azzahra lu par elle-même, décembre 2021.
Fatima-Azzahra Khoubba campant fièrement devant ses œuvres devant les objets africains épars dans la galerie d'Alain Dettinger, 2021, archives Galerie Dettinger-Mayer.
28/11/2021 | Lien permanent | Commentaires (3)
MASSIF EXCENTRAL (14): Soulier, Masseboeuf, Canis et Mamelle
Clermont-Ferrand, ville des prédestinants, pourrait-on ainsi l'appeler? Notre correspondant Régis Gayraud y chasse pour nous depuis quelque temps déjà ce que d'autres sur d'autres sites ont appelé des "aptonymes" et que je me contente d'appeler des noms prédestinants. Quel régal, qu'on en juge...
Notre correspondant naguère nous avait aussi envoyé un entrefilet sur une affaire de "chiens écrasés" (paru dans La Montagne du 17 janvier 2002), comme on dit en argot journalistique, ou plutôt en l'occurrence de chiens volés... Ce n'était pas les noms des jeunes prévenus dans l'affaire qui faisaient réfléchir mais bien le patronyme de leur avocat, le bien nommé Maître Jean-François CANIS... Ce qui, pour nos lecteurs non latinistes, veut dire "chien". Normal, dés lors, qu'il ait tenu à défendre ces amoureux trop zélés des animaux?
Régis, enfin (tout au moins dans le cadre de cette note...) lit le Monde avec attention et y déniche certaines perles à la rubrique nécrologique... Comme au sujet de cette Nicole Mamelle, "chercheuse engagée au service de la santé périnatale", hélas décédée en novembre 2005:
20/05/2008 | Lien permanent | Commentaires (1)
Une pétition pour demander la réouverture du marché aux puces du Jeu de Balle à Bruxelles
Je partage ici le lien pour signer la pétition en cours réclamant la réouverture du marché de la place du Jeu de Balle à Bruxelles, inexplicablement fermé depuis des mois, alors que le lieu est en plein air, et qu'il y est facile de maintenir les gestes barrières, et que dans d'autres endroits en France – les différentes Puces parisiennes par exemple –, on n'a pas fermé les brocantes (hormis certaines foires comme celle de Chatou, pourtant à l'air libre, à part quelques zones sous chapiteaux qu'on aurait pu se contenter de fermer, en laissant par contre les stands extérieurs, alignés côte à côte, libres d'accès...).
Voici le lien: https://www.change.org/p/pour-la-r%C3%A9ouverture-imm%C3%...
09/02/2021 | Lien permanent | Commentaires (1)
Sur la route, François Michaud
10/06/2007 | Lien permanent | Commentaires (1)
Info-Miettes (9)
Galerie Susi Brunner, Zürich
Je viens de recevoir des dépliants, une carte postale, pour m'inciter à aller faire mon marché - mon expéditeur me supposant collectionneur avisé - du côté de l'art brut à Zürich, à la galerie de Susi Brunner, apparemment une bonne adresse pour ce genre d'emplettes. "C'est depuis 1973 que je m'implique de façon professionnelle dans l'art "outsider" et l'Art Brut", écrit-elle dans une courte présentation traduite en français dans sa présentation de la galerie. Le programme des derniers mois de 2010 s'annonce comme d'habitude stimulant: nous aurons ainsi Umberto Gervasi, Giuseppe Zivieri, Alberto Guindani et Nicola Gianini, quatre créateurs apparemment italiens - l'Italie se fait beaucoup remarquer ces temps-ci du côté de l'art brut ; voir Bonaria Manca, ou ce Giovanni Bosco sur lequel un blog parallèle, celui de la Madame Figaro de l'Art Brut, en fait des caisses depuis déjà quelque temps - quatre créateurs qui exposeront entre le 18 septembre et le 18 octobre ; un certain Alain Signori, venu de France (une sorte de figuratif naïf on dirait? Il y a pas mal de renseignements sur lui et ses travaux sur internet, notamment un site web à lui seul consacré), exposera ensuite de ce 18 octobre jusqu'au 18 novembre, date à laquelle sera fait place aux "acquisitions" de la galerie et ce jusqu'au 18 décembre, date à laquelle les relaieront Paul Amar et ses boîtes de saynètes incrustées de coquillages et autres loupiotes parfaites pour aller avec les arbres de Noël qui refleuriront, façon de parler, un peu partout en Europe en cette fin d'année... Un film de Philippe Lespinasse sur Amar (déjà ancien) sera également projeté à cette occasion.
Galerie Susi Brunner, Spitalgasse 10, Suisse, 8001 Zürich. Tél 41(0)44 251 23 42. www.susibrunner.ch
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Jarousse chez Chave
La galerie Alphonse Chave de son côté poursuit son défrichement des créateurs un zeste obsessionnels en exposant du 21 août au 30 novembre Isabelle Jarousse et ses oeuvres en papier épais, couverts de faunes et flores divers dessinés méticuleusement à l'encre par-dessus des vagues et des plis tortueux. Nous avons déjà eu l'occasion de l'évoquer sur ce blog ainsi que dans la revue Création Franche (n°23, cotobre 2003, article Sans paroles, Isabelle Jarousse).
A signaler la parution d'un catalogue à l'occasion de cette exposition, reproduisant 25 oeuvres d'Isabelle Jarousse, faisant partie d'une série intitulée "Fleurs et couronnes", avec un texte de Damien Chantrenne. Deux expositions supplémentaires consacrées respectivement à Pascal Verbena et à "l'Art Brut et ses alentours" se poursuivent dans la même galerie, à ses premier et second étages.
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Insectes en tous genres à Verderonne
Photos et dessins d'insectes sont au menu de l'expo d'été qui se poursuit actuellement au Centre Artistique de Verderonne, animé par Caroline Corre dans l'Oise jusqu'au 27 novembre prochain. Pour les photos (d'Alain Muriot), je suppose que c'est de la photographie entomologico-poétique, style Roger Caillois (à seconde vue, ce serait plutôt proche des évocations de Nabokov). Pour les dessins, nous avons l'occasion ici de retrouver les bestioles voraces de Michel Boudin, que j'ai déjà aussi eu l'occasion d'évoquer ici et là (dans le catalogue de l'exposition Créations et Visions Dissidentes au Musée de la Création Franche à l'automne 2001).
29/08/2010 | Lien permanent
Art, folie et alentours, le n°24 de la revue Area
(Cette note contient une petite mise à jour à la fin, datant du 24 mars...)
Area est une revue fort bien maquettée, dirigée par le critique d'art et collectionneur, curieux de diverses formes d'expressions picturales Alin Avila, qui travailla aussi sur France-Culture. Dans la série déjà longue de ses numéros, on rencontre à l'occasion divers évocations de figures autodidactes de l'art, comme Henry Darger ou Jacques Trovic, qui se retrouvent ainsi mêlés sans distinction particulière au tout-venant de la création contemporaine. Alin Avila a une sensibilité pour la création hors des chemins battus, en témoigne un des articles parus dans le n°16 de novembre 1978 de la revue Autrement, dossier "Flagrants délits d'imaginaire". Consacré à un ancien mineur du Nord devenu concierge à Paris, Félix Picques, peignant naïvement ses souvenirs de la mine, la découverte provenait d'une "rencontre" d'Alin Avila, nous y dit-on.
Voici que le n°24 de la revue se trouve consacré aux rapports de l'art et de la folie, et leurs alentours. Je n'ai pas le détail du sommaire (en scrutant avec une loupe la couverture reproduite sur le carton d'invitation, on devine des entretiens avec beaucoup d'acteurs connus et moins connus du champ de l'art brut ; même mézigue y a participé sur une proposition de Roberta Trapani, par un mini-entretien autour de mon livre Eloge des jardins anarchiques ; on trouve aussi au hasard de la revue une évocation du griffonneur de Rouen Alain Rault, "lettriste" spontané, déjà mentionné sur ce blog ). Le carton d'invitation annonce un vernissage pour le jeudi 31 mars prochain, avec une exposition d'oeuvres provenant de la collection de l'hôpital Sainte-Anne (le Centre d'Etude de l'expression, animé par Anne-Marie Dubois qui a déjà consacré pas moins de quatre tomes de livre à cette collection, belle et intriguante surtout grâce à ses oeuvres anciennes, c'est-à-dire entrées dans la collection avant 1950). Les oeuvres qui seront montrées chez Area proviennent de Gilbert Legube, Aloïse Corbaz, Francisca Baron, Fikaïte, Guillaume Pujolle, etc.
Aquarelle de Guillaume Pujolle ci-dessus, rare et belle...
L'exposition s'intitule "60 ans après? Reconstitution de l'Exposition internationale d'art psychopathologique de 1950". Le sous-titre m'a plongé immédiatement dans des abîmes de perplexité. Veut-on nous dire qu'il va s'agir de reconstituer cette exposition historique fort vaste dans le loft de la galerie Area? Cela serait digne du livre Guiness des records. Ou bien est-ce l'annonce d'un projet à venir au musée Singer-Polignac à Ste-Anne, wait and see... Si l'on veut se renseigner sur ce Centre d'Etude de l'Expression (et l'exposition "d'art psychopathologique" de 1950), voici un lien vers un document en PDF, rédigé par Anne-Marie Dubois pour un numéro de la Revue du Praticien daté de 2004 (il est à télécharger sur le site de cette revue). Il a le mérite d'être court et condensé.
L'exposition à la galerie Area (50, rue d'Hauteville, 10e Paris, fond de cour 2ème étage) se tient entre le 31 mars (jour de vernissage) et le 14 mai 2011. Elle est ouverte du mercredi au samedi de 15h à 19h. Le n° 24 de la revue sort au même moment. A signaler également, le jeudi 24 mars à 20h, la présentation de ce même numéro spécial à la librairie L'atelier (2 bis, rue Jourdain, Paris 20e), avec une "conversation autour de l'art brut : de la folie à la reconnaissance ?" entre les intervenants Alain Avila, Anne-Marie Dubois et Céline Delavaux.
20/03/2011 | Lien permanent | Commentaires (5)
Emmanuel Boussuge s'échappe de la brume
Emmanuel Boussuge sort de la brume, me suis-je dit, en repensant à une photo prise pendant une randonnée d'un jour vers le Puy Mary en juillet 2007, le brouillard tentant de nous cerner... Il s'efforce de marcher sur les traces de ses aînés... Le voici donc en train d'exposer (jusqu'au 28 février) à Clermont-Ferrand, sous le volcan, dans la ville noire et rouge, au Breschet, 6, rue du Breschet.
Qu'est-ce qu'il expose? Des dessins et des photographies. Lui aussi s'est mis ces dernières années à scruter les sols, les bitumes, les taches dues au hasard, le hasard, ce grand créateur, plus grand que tous les artistes qui s'efforcent en vain de l'égaler.
Certes, il n'est pas le premier, mais il apportera sûrement son oeil et sa façon de voir dans l'affaire. Car chacun dans cette auberge espagnole de la divination apporte son boire et son manger. Pas une tache qui ne ressemble peu ou prou à qui la choisit et la photographie. Tache ou tout autre assemblage de hasard. J'en apporte deux exemples ci-dessous pour compléter celui que j'ai inséré ci-dessus d'après Emmanuel (j'en profite pour remercier Louis Watt-Owen pour la transmission de sa photo).
Le photographe avait lui aussi remarqué les splendides dessins que l'on trouve à Paris sur les bandes blanches des passages pour piétons. Il avait cependant -tâche délicate et "casse-gueule" si l'on procède trop vite! - décidé de rehausser ses photos au crayon, afin d'accentuer certaines expressions trop absentes des figures devinées sur ses photos. Personnellement, je suis aujourd'hui tenté d'employer les moyens que donne l'informatique pour retoucher ces images de hasard, quand un coup de pouce reste nécessaire...
Les dessins qu'expose Emmanuel Boussuge en compagnie de ses photos sont en quelque sorte cousins des voyances tachomanciennes, puisqu'il travaille parfois à partir de couleurs posées au hasard, automatiquement aurait dit le surréaliste de passage. J'aime assez le dessin ci-dessus reproduit, qui me fait penser à un improbable croisement entre Eugen Gabritschewsky et Michel Boudin (pour ceux qui connaissent ces derniers).
16/02/2009 | Lien permanent | Commentaires (5)