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Rechercher : Jacques Trovic

Une nouvelle revue, ”Profane”, consacrée aux amateurs

      "Amateur, adjectif singulier invariant en genre : 1 Non professionnel ; 2 Connaisseur, intéressé par ; 3 Dilettante, négligent [plus péjoratif dans cette troisième acception donc...]. Nom singulier invariant en genre : 1 Personne pratiquant un sport, une activité, sans en faire sa profession ; 2 Dilettante." (Site web Le Dictionnaire)

     Amateur, c'est un terme qui a ma faveur lorsque je pense aux créatifs de tous poils, que l'on range aussi dans l'art brut, dans l'art naïf, dans l'art populaire insolite, contemporain ou ancien. On n'a pas affaire à un spécialiste, à un professionnel. Et l'on signifie aussi par là que l'individu en question est un passionné, un connaisseur, même s'il se révèle passionné de manière intermittente et dilettante. L'amateur, c'est celui qui aime.

      Par contre, on ne peut oublier non plus la dimension péjorative que prend aussi le mot: négligent, approximatif, peu rigoureux, désinvolte..., dimension qui personnellement m'éloigne parfois de choisir finalement cette épithète.

 

amateur                                      amateur

 

     Ce n'est pas cet aspect du mot bien sûr qu'ont choisi les animateurs de la nouvelle revue Profane, dont le deuxième numéro vient de paraître en avril dernier (le premier date d'octobre 2015). "Art d'amateur, amateur d'art" paraît en être, au moins pour ces deux premiers numéros, le sous-titre, donnant en creux l'intention des concepteurs et des animateurs de la revue, montrer le geste amateur dans toutes ses dimensions et variations et, simultanément, se montrer soi-même à travers cela, peut-être et avant tout, amateur d'art. Ce qui me déroute, moi qui suis plus enclin à l'exclure de mes champs d'investigation, c'est la passion de ces jeunes gens pour l'art contemporain. En effet, leur culture, leur formation paraissent  largement en procéder. Je ne rejette pas systématiquement l'art contemporain, me contentant de le regarder la plupart du temps de loin et sans passion (j'abhorre par contre ce que d'aucuns appellent "l'AC", c'est-à-dire l'art officiel contemporain, soutenu artificiellement par les grands argentiers, style Pinault, Vuitton et autres richards).

      Les rencontres qui se sont multipliées ces dernières années entre art contemporain et art brut sont peut-être responsables de ces mariages curieux qui naissent actuellement. Profane me paraît en être un exemple. On y trouve des articles (généralement courts et rapides à lire, ce qui est appréciable dans ce monde "communicant" et envahi de bavardage) sur la photographie amateur, sur des collections ou des pratiques en lien avec l'art populaire (la cochliophilie, c'est-à-dire la collectionnite des cuillers, la lucieextinguophilie (la collection des éteignoirs de chandelles), les coiffes bretonnes, les collecteurs de poésie naturelle...), les couronnes de palmes tressées en Corse pour le jour des Rameaux par exemple), mais aussi sur des créations d'autodidactes (patchworks en tissu, créatrice de tapis, fabricant japonais de figurines en papier), et des évocations de dadas parfois insolites (les fondus qui se rassemblent pour évoquer leur passion pour les palmiers par exemple).

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Sculpture de Jacques Servières, vallée de la Dhuys, photo de l'association Gepetto (Musée des amoureux d'Angélique, Le Carla-Bayle, Ariège), 2011 (photo non reproduite dans la revue Profane) ; cet artiste apparemment autodidacte, mais tout aussi apparemment non dénué de culture artistique (goût pour l'onirisme et les arts visionnaires ? On pense un peu aussi aux sculptures géantes du parc de Bomarzo ou à celles de la Villa Palagonia en Italie), récupère des pierres d'un pont bombardé pendant la guerre dans la région ; ses œuvres, de proportions conséquentes, émaillent les berges de la Marne, proposant une promenade fort séduisante...

 

      Outre des entretiens avec certaines personnalités (comme Hervé di Rosa, le "pape" de l'art modeste), les articles qui m'intéressent le plus sont ceux consacrés par exemple dans le n°2 de la revue à l'appartement de Boris Vian, Cité Véron (on nous indique dans la revue un contact pour aller le visiter), dont je n'avais jamais eu l'occasion personnellement de voir des photos, ou encore aux sculptures surréalisantes-naïves de Jacques Servières, installées en plein air le long de la Marne du côté de Lagny, "à quelques pas de Disneyland", avec qui elles n'ont rien à voir (petite critique cependant ici, les photos choisies pour illustrer l'article sont toutes  soit des détails soit des gros plans, aucune ne donnant le contexte plus général dans lequel s'insèrent les  statues).

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Sur cette page du n°2 de la revue Profane, nous est présenté un tableau au naïf onirisme de Robert Véreux (on n'en voit pas souvent, personnellement, c'est la première fois que j'en vois une reproduction), intitulé Grands-pères volants, encore installé aujourd'hui dans l'appartement de Boris Vian ; l'auteur de l'article sur celui qui signait parfois "Bison Ravi" ne paraît pas connaître le nom véritable de Robert Véreux (dont le nom à lui seul était déjà une promesse de pastiche et de supercherie...), en réalité un certain docteur Robert Forestier (1911-1969), comme l'a signalé Lucienne Peiry dans son ouvrage de 1997, L'Art brut (voir la notice à lui consacrée p.300); il s'était fait passer aux début  de la constitution de la collection de l'Art brut de Dubuffet, auprès de Michel Tapié, pour un faux "malade mental", créateur autodidacte, mais pour le coup véritable peintre naïf visionnaire, producteur d'une œuvre qui mériterait d'être plus connue...

 

     Mon attention a été attirée sur cette revue par Pascal Hecker, le libraire de la Halle St-Pierre à Montmartre que je remercie ici par la même occasion (on trouvera bien entendu la revue avant tout dans cette librairie). Le n°1 contenait aussi un article non signé évoquant –croyait son auteur– "pour la première fois" les peintures d'un anonyme seulement désigné par ses initiales: "A.G.". Quelle ne fut pas ma surprise de reconnaître sous ce monogramme (il est vrai, seule signature que l'on retrouve apposée sur ses petits tableaux sur supports récupérés) "mon" Armand Goupil, dont je  m'évertue depuis plusieurs années à faire connaître, et reconnaître, l'œuvre tendre et humoristique restée cachée pendant plus d'une trentaine d'années après sa disparition (1964) et celle de son épouse (1988)... L'article du n°1 commettait quelques petites erreurs et approximations, comme celles qui consistaient à le présenter comme "médecin", peignant uniquement au revers de boîtes de lessive des œuvres qui n'auraient été réalisées qu'entre "1957 et 1963", œuvres qui seraient toutes la propriété d'un "collectionneur bruxellois amoureux de l'art brut"...  Tout ceci n'était pas exact. En réalité, il semble que ce soit plus d'un millier de peintures réalisées sur des supports infiniment plus variés qui sont aujourd'hui dispersées chez plusieurs collectionneurs et brocanteurs (j'en possède moi-même un certain nombre).

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Armand Goupil, Seule dans les bois, 17-XI-1952, marqué "n°57" au verso, photo et coll. Bruno Montpied

 

     Je proposai donc à deux animateurs de la revue de rétablir quelque peu les faits pour leur n°2, ce qu'ils acceptèrent avec la meilleure grâce du monde. J'ai ainsi pu donner le nom complet de cet autodidacte de l'art, et donner plus d'éléments véridiques à son sujet, comme les dates de sa création (il touchait depuis sa jeunesse à la peinture, mais sa production s'envola en flèche à partir de sa mise à la retraite en 1951, se poursuivant jusqu'à sa mort en 1964, où il fut victime d'un AVC). Mon article s'intitule A.G.? Armand Goupil et son théâtre intime. Je renvoie tous les amateurs à lui...

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09/06/2016 | Lien permanent

Tante Chinoise et les autres: ”Elle aurait pu s'appeler Fragile, Cocasse, Maladive ou Malice”

       Sont curieux les chemins qui mènent aux révélations. Je venais d'entrer au vernissage Marcel Storr en décembre dernier, et voilà que pour fuir l'affluence de la première salle j'avise dans la seconde un éventaire de livres sur l'art brut et consorts organisé par la librairie Le Monte-en-l'air. Au moment où je me dis que je ne vais sans doute rien trouver de nouveau, pan, voilà que mes yeux sont attirés magnétiquement par une couverture qui m'appelle.

        Tante chinoise et les autres, c'est le titre de ce reprint à la Table Ronde (2009), d'après un album de croquis légendés d'une plume calligraphique, en 1894, par une enfant apparemment prodige, Marguerite Bonnevay (1882-1903). Un fac-similé qui a tout de même nécessité plus de cent ans pour que cette œuvre passe enfin quelque peu à la postérité! Soixante années s'étaient écoulées avant que l'on en fasse un film, dû à David Perlov, en 1956, qui fut la première occasion de sortir cet étonnant opus de son oubliette familiale (on lira l'éclairante présentation de l'objet par Nathalie Jungerman qui a établi l'édition du livre à la Table Ronde)

 

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         Prodige? Elle avait 12 ans certes, et ne vécut pas longtemps hélas (elle disparut à l'âge de 21 ans des suites d'une tuberculose). Etait élevée à l'époque chez les sœurs que l'on disait "bonnes" et chez qui apparemment elle devait s'ennuyer ferme, de même que pendant ses vacances à Gonfaron dans le Midi, d'après ce qu'en dit sa lointaine parente Nathalie Jungerman.marguerite bonnevay,tante chinoise,art enfantin,art naïf,art brut,art immédiat,caricature,grotesque,david perlov,jacques brunius,jacques prévert,andré heinrich Etait-on prodige lorsqu'on passait ses loisirs à dessiner à une époque où les distractions pour les enfants n'avaient rien de commun avec celles d'aujourd'hui? On devait s'appliquer infiniment plus dans ses travaux de croquis, de même lorsqu'on laissait son imagination gambader dans des récits d'aventures qui avaient un souffle autrement plus épique que ce qu'un enfant d'aujourd'hui peut produire, accaparé qu'il est par d'autres dadas plus électroniques.

 

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"Catastrophe de Thomas et d'Apollonie au retour de leur voyage de noce. Grand effroi du révérend." Page 7 dans le livre Tante Chinoise et les autres

      Ce qui n'empêche pas que ces dessins coloriés à l'aquarelle ou avec des gouaches d'écolière hésitent entre l'art enfantin et ce que l'on n'appelait pas encore, ni art naïf, ni art brut en 1894. Ils entretiennent un rapport de cousinage troublant avec diverses autres expressions populaires naïves, comme ce dessin de la catastrophe du retour de noce des nouveaux épousés "Thomas et Apollonie", qui paraît construit comme un de ces ex-voto que l'on trouvait en abondance à l'époque dans les églises du Midi et que peut-être, très certainement même, Marguerite avait vus.

 

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"Noce de Thomas et d'Apollonie", extrait de la page 5 du livre de Marguerite Bonnevay

 

       La "noce de Thomas et d'Apollonie" de même ne va pas sans me rappeler un tableau que j'ai dans ma collection, dû au peintre naïf Louis Roy,marguerite bonnevay,tante chinoise,art enfantin,art naïf,art brut,art immédiat,caricature,grotesque,david perlov,jacques brunius,jacques prévert,andré heinrich,gonfaron,tuberculose,nathalie jungerman,ex-voto,art populaire insolite déjà évoqué sur ce blog le 12 août 2008, où les personnages sont traités de profil, rapetissés, comme un cortège d'homuncules, tandis que chez Marguerite, la réduction de taille sert plutôt un besoin de traduire la perspective du cortège des mariés.

 

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"La vaillante armée du Salut, N°1: La Tante Chinoise, N°2: Coeur d'artichaut, N°3: la mère Tripotatibus, N°4 la mère au tabac, N°5: Perruche Grise, N°6: Grippe-sous, N°7: Chonchon, N°8: Reniflette, N°9: Toupinette, N°10: Guignolette, N°11: Piperette leur adressant un gracieux bonjour, N°indéfinissable: le général de l'armée du Salut protégeant ses combattants." Page 1 de Tante Chinoise et les autres

       Les croquis de Marguerite, qui ne sont  pas loin de la bande dessinée alors tout juste naissante en France, comme le rappelle Nathalie Jungerman, paraissent aller du côté de la chronique villageoise moquant les aspects des adultes souvent perçus comme grotesques, prétentieux, hypocrites, tels qu'une jeune fille de douze ans, particulièrement lucide (et tendre cependant), était à même de les mettre en évidence, à la distance où elle se trouvait, entre deux âges, avant que les vicissitudes liées à la vie sociale l'aient amenée à plus de concessions (la tuberculose l'en préserva, seul bénéfice de sa sale besogne).

 

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Tous les dessins de l'album de Marguerite Bonnevay font l'objet d'un récapitulatif en fin de première partie avec les légendes transcrites en caractères typographiques pour plus d'intelligibilité comme ci-dessus p.54 du livre

 

       Cet ouvrage en fac-similé est déjà en soi un remarquable plaisir visuel, mais la surprise ne s'arrête pas là. Car, avant que l'album ne soit sorti de l'oubli, un fim de dix-sept minutes fut tourné par David Perlov, jeune cinéaste alors, qui s'était enthousiasmé à la découverte de l'album de Marguerite que lui avait montré la nièce de cette dernière, mère de Nathalie Jungerman. Il put être financé grâce à l'aide d'une nuée d'artistes, de comédiens et de littérateurs, parmi lesquels Prévert (qui signe dans le film un remarquable prologue poétique en prose), Vieira Da Silva et Arpad Szenés, Abrasza Zemsz (ethnologue), Czeslaw Milosz, Jeanne Moreau, Calder, Magnelli, Gabrielle Buffet-Picabia, le docteur Claude Olivenstein, André Heinrich (qui est crédité de "conseiller technique" dans le film), etc... La musique, importante contribution, est composée par Germaine Tailleferre.marguerite bonnevay,tante chinoise,art enfantin,art naïf,art brut,art immédiat,caricature,grotesque,david perlov,jacques brunius,jacques prévert,andré heinrich La production et la réalisation furent chaotiques et ne purent être terminées qu'avec l'aide du British Film Institute, ce qui explique que sa première fut donnée d'abord à Londres en 1956 dans une version anglaise. Cependant, une version en français put être ensuite réalisée pour une projection à la Cinémathèque Française en 1957. Et devinez qui prêta sa voix au commentaire en off? L'inévitable et mythique Jacques-Bernard Brunius, le même homme qui avait réalisé le non moins mythique premier film d'art sur les autodidactes comme le facteur Cheval, l'abbé Fouré, et divers Naïfs, Violons d'Ingres en 1939... (Voir ici les notes que je ne cesse de lui consacrer sur ce blog). Ce film, excellente initiative, est donc joint au livre sous la forme d'un DVD fixé à la troisième page de couverture.

Le film de David Perlov, Tante Chinoise et les autres sera projeté au festival de cinéma organisé par l'Association Hors-Champ autour des Arts Singuliers qui se tiendra à la Bibliothèque Louis Nucéra et au MAMAC de Nice les vendredi 1er, et samedi 2 juin 2012. Mais j'aurai l'occasion d'y revenir.

 

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"Le maire Pompée assisté de Tambour, son premier adjoint, unit les deux novices: Crépin Pistolet Mea et Rigolette Eucalyptus...", page 21 de l'album Tante Chinoise et les autres

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"Au début du siècle, dans un village de Provence, il y avait une pauvre petite fée.

Elle aurait pu s'appeler Fragile, Cocasse, Maladive ou Malice. Mais elle s'appelait tout bonnement Marguerite et n'avait pour toute baguette magique qu'un crayon à changer les gens..."

(Jacques Prévert, extrait de son Prologue dans le film de David Perlov )

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La Fabuloserie, aperçu au ”Consulat”, espace open de style berlinois à Montparnasse

     Très actif depuis quelque temps, Antoine Gentil, qui s'était déjà fait remarquer  par des organisations d'expo au MAHHSA (musée de Ste-Anne émanant du Centre d'Etude de l'Expression), a invité la Fabuloserie à taper l'incruste dans un sacré foutoir installé provisoirement (quelques mois) dans une espèce de friche industrielle, aux murs nus, tout près de Montparnasse, dans ce quartier où les aménagements de Ricardo Bofill, il y a déjà longtemps (1985), avaient contribué à enfoncer le clou de l'effacement, vingt ans auparavant, de tout un quartier de petites maisons et d'ateliers d'artisans qui ne surent et purent résister – à rebours des habitants qui le réussirent plus loin, dans ce même XIVe arrondissement, du côté de la rue des Thermopyles et de la Cité Bauer. Ce sont les chantiers de l'actuelle gare Montparnasse (gare qui ne ressemble à rien),  en effet, qui avaient entraîné en 1965, par exemple, la disparition  du bâtiment où se trouvait l'atelier du Douanier Rousseau, rue Perrel, que l'on aperçoit dans l'admirable film de Jacques Brunius, Violons d'Ingres (1938) – atelier qui fut, par la suite, également, le lieu de travail de Victor Brauner.


podcast

Formulette recueillie par Jacques Brunius dans un recueil (de comptines et formulettes) resté inédit (merci à Lucien Logette de  nous l'avoir communiqué) ; lue par B.M., 2018

 

      Le "Consulat"¹, donc, est un vaste espace sur deux niveaux, prêté pour quelques mois, où l'on trouve disséminés sur des centaines de m², une friperie, des buvettes, un restaurant, une salle de concert, des tables de ping-pong, des chaises dépareillées et des canapés défoncés distribués au petit bonheur, des espaces d'exposition (au 2e étage) où voisinent, dans deux espaces distincts qu'on ne pouvait confondre, art contemporain d'une part, présenté anonymement, tel des puces, sous l'autorité d'un texte liminaire d'une prétention insondable (intitulé le "blind marché", titre d'un snobisme au ridicule achevé), et d'autre part, l'art hors-les-normes de la Fabuloserie, exposé jusqu'au 15 août, et mêlant lui-même art brut (Emile Ratier, Pierre Petit, Giovanni Battista Podesta, Guy Brunet, Jean Tourlonias, François Portrat, Edmond Morel, un grand tableau de fleurs, assez rare, d'Abdelkader Rifi) et artistes singuliers (Le Carré Galimard, Nedjar, Francis Marshall, Alain Bourbonnais, Verbena).

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Des éléments de l'environnement créé par François Portrat dans les années 1980, ph. Bruno Montpied, 2018.

 

       Si l'on oublie cependant le contexte désordonné de la première exposition, la zone dévolue à la Fabuloserie permettait de découvrir des ensembles d'œuvres souvent méconnues. Dommage cependant qu'on n'ait pas souhaité, du côté du responsable des expos  (un certain Samuel Boutruche), laisser les animateurs de la Fabuloserie, ainsi que le commissaire d'exposition, Antoine Gentil (le bien nommé), apposer tout de suite les noms des auteurs exposés, dès le vernissage (cela a changé par la suite), au nom d'un anonymat revendiqué (l'anonymat paraît devenir par les temps qui courent un argument à la mode, ici employé très superficiellement (comme souvent, avec tout ce qui est à la mode), puisque les noms des artistes circulent par dessous...).

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Emile Ratier, deux musiciens, ph. B.M., 2018.

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Michel Nedjar, quatre assemblages de tissus colorés, ph. B.M., 2018

 

       Pour ma part j'ai découvert dans l'expo de la Fabuloserie, parmi les cinq pièces d'Emile Ratier – des maquettes  et machineries de bois brun, faites au départ pour être actionnées –, trois dispositifs qui sont des machines à produire des sons, en fait des instruments de percussion ultra bricolés à ranger au nombre des instruments de musique alternatifs. J'ai été également  surpris par des assemblages de tissus colorés de Michel Nedjar, exposés seulement le jour du vernissage, que j'ai trouvés bien plus séduisants, et moins montrés que ses sempiternels "chairdâmes", sorte de poupées noirâtres d'exorcisme imaginaire, qui personnellement me dégoûtent, et qui sont faites pour dégoûter (scandale facile à produire). Hélas, l'artiste, victime d'un caprice de diva, a fait retirer ses œuvres les jours suivants, n'appréciant pas l'exposition voisine semble-t-il. Je publie ci-dessus les quatre assemblages dont je parle plus haut, présentés dans l'expo, donc, de façon éphémère. Même si le voisinage avec l'expo d'art contemporain assez inconsistante était discutable, il n'en reste pas moins que l'idée de montrer l'art hors-les-normes de la Fabuloserie en un tel lieu fréquenté par la jeunesse et par un public n'ayant peut-être jamais entendu parler de l'art brut l'art singulier, etc., n'en était pas moins une bonne initiative. Il faut tenter ce genre de passerelle, pour que les transmissions s'effectuent entre générations. Et peut-être aussi détourner le public de l'art contemporain absurdement mis en avant par les temps qui courent par toutes sortes d'intérêts capitalistiques². Il y va d'une forme de résistance.

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Pierre Petit, Laboratoire Frela, ph. B.M., 2018.

 

       L'accrochage, dans le fond,  à droite, sur un mur où ils sont seuls, de divers éléments provenant de l'environnement créé par François Portrat à Brannay dans l'Yonne (voir mon Gazouillis des éléphants où je lui ai consacré une notice), agencé par Marek de la Fabuloserie, frappait l'esprit du visiteur. Podesta était également présent par des peintures qui relèvent davantage de l'art naïf, en tout cas inattendus. Surtout, on restait charmé par le "Laboratoire Frela" et ses personnages délicieusement angéliques, humanoïdes ineffables, du retraité Pierre Petit, qui vivait autrefois à Bourges, et dont nous avons ici quelques maquettes et autres "maisons de poupée" d'un nouveau genre.

     Rien que pour cette exposition, rare à Paris – reléguée en marge de tout le reste dans ce labyrinthe de béton, de façon cohérente au fond, car on n'a pas affaire ici à de "l'art hors-les-normes" pour rien! : il reste en marge quel que soit le contexte d'exposition – il faut se rendre dans ce Consulat, en traversant jusqu'à l'espace fabulosant ces 3000 m² d'un trait, sans se disperser outre mesure dans les autres espaces, plutôt vides de sens (si ce n'est pour aller se boire une bière sur une terrasse aux herbes sauvages poussant sous des gratte-ciels ou des immeubles du genre cages à lapins, en rêvant des fantômes de Rousseau et de Brauner).

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Abdelkader Rifi, sans titre, env. 1m sur 1,20m, sans date, ph.B.M., 2018.

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¹ Ce "Consulat", nous apprend un article du Quotidien de l'Art, "est issu de l’association GANG, dirigée par Lionel Bensemoun, petit-neveu du fondateur des casinos Partouche. Il a créé avec l’artiste André Saraiva son agence événementielle La Clique et le club Le Baron, et vient de s’installer à Paris dans le 14e, pour une nouvelle saison (jusqu’en octobre 2018), dans l’espace des futurs Ateliers Gaîté de 3000 m2..." L'adresse de ce Consulat éphémère est au 2 de la rue Vercingétorix, 14e ardt donc.

² A ce sujet, on lira avec fruit le livre  d'Annie Le Brun, Ce qui n'a pas de prix, récemment paru chez Stock.

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13/07/2018 | Lien permanent

Info-Miettes (27)

      Ma dernière volée d'infos-miettes remonte au 19 avril de l'année dernière. Cela ne veut pas dire un "Info-miettes" par an tout de même... En voici donc quelques-unes.

Une expo "Pépé" Vignes au Musée des arts buissonniers

Expo_Pepe_Vignes-recto musée des arts buissonniers.jpg       Pol Lemétais et l'association Les Nouveaux Troubadours montent une exposition sur cet étonnant dessinateur qui au ras de sa table, handicapé par sa vue déficiente, traçaient, entre autres, une légion de véhicules de tous types, cars, voitures, steamers, à l'aide de crayons de couleur ou de feutres. Les crayons de couleur tiennent mieux dans le temps comme on sait. Je connais un collectionneur amateur qui a vu ainsi  ses Vignes se volatiliser progressivement puisqu'il les avait imprudemment laissés à la lumière du jour.  A côté d'une centaine de dessins des années 1970 et 1980, on verra aussi à Saint Sever du Moustier (pas loin d'Albi) des objets, livres, photos et films en rapport avec ce "créateur emblématique de l'art brut". Cela apparaît comme une manifestation apportant du nouveau sur le sujet Pépé Vignes. C'est du 9 avril au 5 juillet.Expo_Pepe_Vignes-verso MAB.jpg

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Joseph dit "Pépé" Vignes, photo JDLL (illibérien, c'est-à-dire, un habitant d'Elne), sans date

 

Et, pendant ce temps, Paul Amar à la galerie Nicaise à Paris...

photo Pa Au mus des arts buiss.jpg         Une autre vedette de l'art brut, cette fois plus contemporain, Paul Amar (voir portrait ci-contre, au musée des arts buissonniers où une salle lui est consacrée), est exposé quant à lui dans une galerie parisienne qui était plutôt connue autrefois comme une librairie vouée aux livres d'art, aux estampes, aux gravures. Il semble que Nicaise ait tourné sa veste en faveur des arts bruts. Elle a récemment exposé André Robillard, décidément devenu un incontournable de l'art brut (en dépit des coups de main qui cherchent à épauler ses bricolages de ci, de là ; je crois savoir que les fusils en assemblages de matériaux recyclés, il aimerait bien les abandonner pour se consacrer exclusivement au dessin et aux objets spatiaux, mais la commande l'en empêche et il est gentil, il veut faire plaisir et peut-être aussi que ça met du beurre dans les épinards). Voici que la galerie récidive avec Amar, connu pour ses assemblages de coquillages rutilants, et peut-être parfois un peu trop clinquants. Personnellement, dans ses travaux je préfère les petits monstres qui ressemblent parfois à des gremlins, proches parents des monstres que dessinait l'ancien gardien de la paix catalan, Josep Baqué, lui aussi présent dans les collections d'art brut. Cela durera jusqu'au 7 mai, c'est plus bref, donc.

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Créations naïves et singulières en Mayenne... et en Pays de Loire

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        L'association CSN 53 reste toujours fort active. Après des expositions loin de France (chroniquées sur ce blog) , la voici qui revient au pays natal. Avec une brochette d'artistes et de créateurs que ses différents membres ont pris l'habitude de défendre: Cahoreau (qu'adore Michel Leroux, "l'égaré" de l'art obscur – label récupéré de la corbeille de Dubuffet), Cerisier, Chapelière (dont une œuvre sert d'illustration à l'affiche de l'expo, voir ci-dessus), Marc Girard, Céneré Hubert (un créateur populaire d'environnement dont plusieurs œuvres ont été sauvées par Leroux), Alain Lacoste (un grand ancien de l'art singulier), Patrick Le Cour (je connais pas), Joël Lorand (lui, on connaît), Serge Paillard ("l'homme aux patates", comme on commence à le surnommer ici et là), Jacques Reumeau, Antoine Rigal, et Robert Tatin (que sa veuve ne voulait surtout pas qu'on range dans l'art singulier, label qu'elle trouvait sans doute réducteur, à tort bien sûr). Et puis nos Mayennais, souvent protectionnistes (je taquine) et jaloux de leur "mayennité" (je re-taquine), ont daigné ajouter à ce premier lot des artistes des Pays de la Loire: Noël Fillaudeau (dont une belle sélection est désormais accrochée au Musée d'art naïf et d'arts singuliers du Vieux-Château à Laval), Stani Nitkowski (dont j'apprécie les premières œuvres et beaucoup moins les suivantes, plus "expressionnistes-explosives", invitant le public à lorgner sur ses souffrances, et à se complaire dans ce spectacle), François Monchâtre et Yvonne Robert (naïve, brute ou singulière?).Jardin de la Perrine, entrée discrète (2).jpg L'exposition se passe à Laval mais pas au Vieux-Château, plutôt au "musée-école de la Perrine", charmant hôtel particulier installé dans le jardin de la Perrine, à deux pas de la tombe du "gentil Douanier Rousseau" (auquel le Musée d'Orsay consacre comme on sait une grande rétrospective en ce moment à Paris, avec, paraît-il, l'exhibition du fameux tableau "Le Rêve", venu des USA, d'où il voyage rarement).

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Musée-école de la Perrine, ph. Bruno Montpied, 2016

Tombe du Douanier Rousseau, 2016 (2).jpgLa tombe du Douanier Rousseau, avec, incisé à sa surface, le poème d'Apollinaire, Jardin de la Perrine, ph. B.M., 2016

 

Et la Fabuloserie continue d'exposer de manière décentralisée, Auxerre cette fois-ci

csn 53,art naïf,art singulier,paul amar,joseph pépé vignes,musée des arts buissonniers,musée-école de la perrine,douanier rousseau     "Itinéraires fabuleux" est le titre de l'expo montée à l'Abbaye St-Germain au Logis de l'Abbé du 26 mars au 13 juin à l'initiative de l'Espace d'Arts Visuels de la ville d'Auxerre. Cela se veut une rencontre entre les créateurs de la Fabuloserie (basée elle aussi en Bourgogne, à Dicy) et des œuvres de l'artothèque de la ville. Sur l'affiche on reconnaît une pierre peinte par Jacques Renaud-Dampel, dont j'ai déjà parlé ici, confrontée à une œuvre du célèbre membre du groupe Cobra, Karel Appel, cette dernière pièce (un poil infantile, un Appel à tarte, si j'ose m'exprimer ainsi) provenant sans doute de l'artothèque, car je ne sache pas qu'il y en ait à la Fabuloserie.

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 Sortie d'un nouveau livre sur Hauteville House de Victor Hugo

csn 53,art naïf,art singulier,paul amar,joseph pépé vignes,musée des arts buissonniers,musée-école de la perrine,douanier rousseau,fabuloserie,renaud-dampel      Paris-Musées édite un nouveau livre sur la maison étonnamment décorée que posséda Hugo à Guernesey. Je ne connaissais personnellement jusqu'ici qu'un livre ancien, dû au poète Pierre Dhainaut, et édité au début des années 1980 (il me semble) aux éditions Encre (les mêmes qui éditèrent des livres sur le Facteur Cheval et Picassiette). Ce nouvel ouvrage, intitulé exactement Hauteville House, Victor Hugo décorateur, 160 pages, comporte des photographies et des dessins dus à deux arrières-arrières-petits-enfants du poète, Jean-Baptiste et Marie Hugo.  Et Laura Hugo, fille de Marie, a sélectionné des écrits familiaux permettant de situer l'apport du Hugo décorateur, adepte d'un art total. Il a décidément tâté de tout, le grand homme,  poète, romancier, dramaturge, photographe, peintre et décorateur. La parution du livre prend place à l'occasion de l'exposition "Les Hugo, une famille d'artistes" (du 14 avril au 18 septembre).

 

Ursula à la galerie Les yeux fertiles

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    Sur cette artiste à part, compagne du peintre Bernard Schulze (aussi exposé à côté d'elle dans cette même galerie Les yeux fertiles), on a peu de renseignements (en français). Cela fait des années que je la vois mentionnée ici et là, notamment au moment de la donation Cordier au MNAM (Daniel Cordier l'exposa dans sa galerie), et je n'arrive pas à me décider à creuser la question. Je la prends pour une autre Unica Zürn au fond, une artiste visionnaire, para-surréaliste, marginale par rapport à ce mouvement (on dirait que comme dans le cas de Bellmer et Zürn, on aurait encore affaire ici à un autre couple d'artistes allemands où une femme se cache, à tort ou à raison, dans l'ombre de son compagnon). A lire la base patrimoniale des musées de Suisse romande, plusieurs œuvres d'elle (Ursula Bluhm) figurent dans la Collection de l'art brut, sans doute dans l'ancienne collection annexe dite de la "Neuve Invention" (les cas-limites entre art brut et art reconnu ; la base patrimoniale en question ne mentionne pas le distingo, et c'est un peu embêtant, accroissant la confusion entre créateurs de la Neuve Invention et la collection princeps de l'art brut). Dubuffet acquit de ses œuvres avant qu'Ursula se marie avec le peintre Bernard Schulze. L'automatisme très présent dans ses œuvres, accompagné d'une grande richesse chromatique, ses jungles de petites touches mosaïquées, rendent la fréquentation de ses œuvres fort agréable.

L'exposition d'Ursula et Bernard Schulze, aux Yeux fertiles,  dure du 17 mars au 7 mai.

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Un dessin aux crayons de couleur d'Ursula Bluhm, de 1959, tel qu'il figure sur la base patrimoniale de Suisse romande

 

Et que va-t-on montrer à la galerie Dettinger-Mayer en ce printemps? Christelle Lenci

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     Plus récente exposition de la galerie lyonnaise, c'est prévu pour durer du 9 avril au 4 mai. "Il était une fois", c'est son titre et, comme on le devine un peu en regardant le carton d'invitation, ce sont des dessins qui sont exposés de cette artiste, Christelle Lenci, dont je n'avais jamais entendu parler jusqu'ici. Histoire de nous emmener en promenade dans une forêt de contes à usage interne peut-être... L'intéressant pour moi dans ce genre de dessins c'est l'usage parallèle du noir et blanc et de la couleur. Le noir et blanc paraissant réservé aux évidements, à la réserve laissée par les espaces colorés... Enfin, je le suppose à partir de ce seul dessin...

 

Armand Schulthess à Lugano 

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Inscriptions accrochées sur le terrain (de 20 000 m²) que possédait Armand Schulthess au Tessin ; ph. Hans-Ulrich Schlumpf, années 1970

 

    J'avais déjà mentionné l'exposition qui avait été montée au Centre Dürrenmatt de Neuchâtel sur cet ancien fonctionnaire qui abandonna son travail à 50 ans pour se retirer en ermite du côté du Monte Verita dans le Tessin, lieu emblématique et historique où tant d'artistes, de poètes, de philosophes et de révolutionnaires, firent des séjours. On peut imaginer que l'exposition qui a commencé le 19 mars au MASI (musée d'art moderne) de Lugano, pour durer jusqu'au 19 juin, sous le commissariat de Lucienne Peiry, est le prolongement de celle de Neuchâtel. Pour en savoir plus sur ce créateur encyclopédiste  qui avait semé des médaillons couverts d'inscriptions chargées d'informations scientifiques de tous ordres sur les arbres de son jardin (assez proche par le projet d'un Gregory Blackstock aux USA, ou d'un Arthur Bispo de Rosario au Brésil, eux-mêmes passablement férus d'accumulation d'informations), on peut écouter Lucienne Peiry interviewée dans une émission de radio, "A vous de jouer", sur Espace 2 (elle intervient seulement à 41'30, attention). Ou se référer aussi à son site, Notes d'Art brut.

 

Du côté de la création franche, le musée de Bègles réaménage ses salles et son accrochage

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Info-Miettes (32)

La Maison sous les Paupières

    Revoilà l'antre sous les paupières qui se remet à pondre de l'expo(-pière). Son animatrice, Anne Billon, est passée dans le village perché du Carla-Bayle en Ariège où il y a, outre le très joli petit musée enchanté des Amoureux d'Angélique (art populaire et naïf et brut), tout plein d'artistes.

    Le Carla-Bayle, c'est un peu St-Paul-de-Vence avant les touristes et l'artifice. Sera donc exposée du 6 au 28 octobre, à Rauzan (7 rue du Pont-Long), bourg de l'Entre-deux-Mers, la très inspirée Mélissa Tresse au nom comme un programme (autre que pileux).

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Mélissa Tresse, la Joute, eau-forte et aquatinte, 44x30 cm, 2017.

 

Curzio Di Giovanni, une exposition proposée par Lucienne Peiry à Lausanne

Lucienne Peiry, l'ancienne responsable de la collection de l'Art Brut, même si elle fut "débarquée" par le syndic de Lausanne en 2012, d'une façon bien peu fondée, n'en continue pas moins de s'intéresser à l'art brut, bien entendu. Et je dois dire que, prisant passablement ses goûts en cette matière, j'accorde toujours beaucoup d'intérêt à ses choix de créateurs. Elle est un bon guide... Elle propose à partir du 26 septembre jusqu'au 22 novembre 2018, à Lausanne, à la HEP Vaud, une expo consacrée à Curzio Di Giovanni et à ses têtes aux étranges conformations. Elle comportera une soixantaine de dessins issus de collections privées, dont celui ci-dessous.

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L'Atelier-Musée Fernand Michel à Montpellier expose Helmut Nimcewski 

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Ph. Bruno Montpied, 2016.

     Ce musée aux collections d'art brut et d'art singulier bien sympathiques (surtout en ce qui concerne l'art brut) monte des expositions temporaires en sus de ses collections permanentes (au cœur desquelles on trouve un important fonds consacré à l'artiste singulier Fernand Michel qui constitue le socle du musée).

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    En voici une qui ouvrira bientôt ses portes du 3 octobre prochain au 10 janvier 2019, consacrée au créateur Helmut Nimcewski, féru de représentations de foules aux petits personnages serrés en rangs d'oignon, le tout dans des couleurs de bonbons acidulés. C'est un type de représentations que l'on retrouve souvent dans l'art brut et l'art naïf. Certaines sont même nettement plus poussées dans ce domaine, Berthe Coulon par exemple...

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L'Atelier-musée se situe 1 rue Beauséjour, à Montpellier, tél: 04 67 79 62 22, mail: <CONTACT@ATELIER-MUSEE.COM> . Le site internet du musée est annoncé en (perpétuelle?) construction...

 

Monsieur Jacques Burtin en balade à travers l'Espagne...

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Goya, gravure, communiquée par Jacques Burtin.

 

    "Hier, à Saragosse, la rencontre (...) avec l’une des gravures de Goya que je mets au-dessus des autres : « Légèreté et audace de Juanito Apiñani dans la Corrida de Madrid» (1814 -1816). Elle définit le mieux à mes yeux la situation de l’artiste. Non point le moment de la mise à mort : je laisse à ses partisans et à ses adversaires l’inutile, le vain plaisir de se combattre. Mais ce moment d’élévation où l’on risque sa vie pour la beauté d’une figure impossible."

 

"Histoires de femmes" aux Yeux Fertiles, de l'art brut et surtout de l'art singulier...

         "Histoires de femmes", la nouvelle exposition de la galerie Les Yeux Fertiles rue de Seine (Paris VIe ardt ; du 2 octobre au 3 novembre) est sous-titrée "Art brut, art singulier".

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     Mais, à part deux ou trois  créatrices effectivement cataloguées dans l'art brut (Thérèse Bonnelalbay, Madge Gill, et... Sol (Solange Lantier)), toutes les autres relèvent plutôt de de l'art moderne, voire d'un art contemporain de plus en plus éloigné de ce que l'on appelle art singulier. Certaines sont devenues au fil du temps de vraies "vedettes", comme Yolande Fièvre ou Ursula, géniale artiste, qui a déjà été présentée à la galerie les Yeux fertiles. On peut même avancer que ces deux-là sont désormais entrées dans le Panthéon de l'art moderne, non loin des surréalistes, dans la grande cohorte des assembleurs, des collagistes, des artistes fidèles à l'imaginaire (Unica Zürn peut en être rapprochée). Les autres artistes ici présentées, comme Isabelle Jarousse ou Josette Rispal, voire Ody Saban et Christine Sefolosha, se hissent même aisément dans les rangs des artistes contemporaines. Le mot "singulier", qui comme l'art brut, combine une notion esthétique (pas de volume, des aplats, une grande stylisation dans le rendu des figures, invention des techniques d'expression) à une notion sociologique (autodidacte, situation de l'artiste en dehors du milieu professionnel de l'art, influence de l'exemple moral et esthétique de l'art brut), selon moi, ne s'applique pas vraiment ici, devenant, en l'occurrence, passablement galvaudé.

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Madge Gill, image du carton d'invitation à "Histoires de femmes".

 

De l'art brut (et "outsider", c'est-à-dire "singulier") iranien à la Galerie Polysémie à Marseille

     La Galerie Polysémie file de temps à autre vers des contrées lointaines où l'on ne pense pas d'habitude que l'on puisse rencontrer de l'art dit brut.

    La galerie propose ainsi de l'art brut de Chine continentale en ce moment je crois, mais ce choix me paraît personnellement de qualité fort moyenne, étant donné qu'il s'agit, j'en ai bien l'impression, à voir ce qui est proposé, pour la plupart de peintures du même genre que celles qu'on a pu voir à la dernière Biennale Hors-les-Normes de Lyon,  en provenance d'ateliers pour handicapés (à Marseille, il me semble que François Vertadier, responsable de Polysémie, a fait appel au Nanjing Outsider Art Studio), et donc de créateurs stimulés par des animateurs dans ces ateliers, ce qui est souvent en contradiction avec le principe même de l'art brut – une expression irrépressible, surgie de façon autonome, comme le chiendent parmi une végétation disciplinée. Mais, surtout, c'était, à Lyon, des œuvres peu originales, peu surprenantes, en dépit d'un certain savoir-faire.

     La galerie présentera cependant bientôt (du 6 octobre au 3 novembre prochain) des créateurs plus étonnants, en provenance d'Iran donc, plus en rapport avec ce qui correspondrait  à de l'art brut, tel que défini plus haut.

    J'ai déjà eu l'occasion par le passé, sur ce blog, de citer des créateurs originaires de l'ancienne Perse, comme Mokarammeh, Akram Sartakhti, ou plus connu depuis quelque temps dans les milieux de l'art brut, Davood Koochaki (que l'on retrouve ici à Polysémie). A la dernière exposition de groupe montée à l'Île d'Oléron en 2017 par Jean-Louis Faravel, j'avais aussi remarqué un autre créateur, Mehrdad Rashidi (également présent à l'expo à venir chez Polysémie). J'accueille donc cette expo marseillaise avec grand intérêt et je la conseille à tous ceux qui cherchent de l'art à la fois bruto-naïf et original.

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Mahmoodkhan, trois dessins de 50x70cm, extraits du dossier de presse de la galerie Polysémie

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Trois œuvres de Reza Safahi.

 

      Le dossier de presse fourni par la galerie énumère les artistes et créateurs exposés. Personnellement, dans l'échantillon proposé je retiendrai essentiellement les dessins de Mahmoodkhan, commencés à plus de 70 ans, Reza Safahi, visiblement instruit et cultivé mais ayant conservé dans son graphisme une grande fraîcheur de tracé "brute" ou "naïve", et aussi Zabihollah Mohammadi, à l'inspiration plus empreinte de références à de grands récits épiques iraniens. On retrouvera dans l'expo cela dit aussi Davood Koochaki et ses esprits noirâtres, ainsi que Mehrdad Rashidi. Chacun pourra se faire sa propre opinion en consultant le dossier de presse.

 

Le livre d'Hervé Couton sur "Las Pinturitas" bientôt présenté par son auteur à la Halle Saint-Pierre

         "La Pinturitas", "la  Petites peintures", c'est cette femme, de son nom d'état-civil Maria Angeles Fernández Cuesta qui depuis des années (depuis 2000) réalise en Espagne, en Navarre, non loin du Pays Basque, une œuvre picturale sur le support des murs d'un bâtiment désaffecté à la sortie de la ville d'Arguedas. Ses fresques sont immenses, mixtes de street art sauvage et d'environnement brut, en constant renouvellement. C'est pourquoi le photographe Hervé Couton a trouvé nécessaire de fixer depuis huit ans ce work in progress, dont l'éphémère est la marque de fabrique. Il viendra en parler à l'auditorium de la Halle St-Pierre le 27 octobre prochain, à 15 h. Toutes précisions sont à retrouver sur le site web de la Halle St-Pierre. 

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Charles "Cako" Boussion sur le mur de la boutique d'Antoine Gentil jusqu'à début octobre

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     Une vingtaine d'œuvres de l'ami Boussion, en provenance de la Pop Galerie de Pascal Saumade, sont actuellement exposées chez Antoine Gentil au 75 bis bd de Rochechouart, dans le IXe à Paris (Sur R-V.: tél: 06 58 34 72 09). Restent quelques jours seulement... 

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26/09/2018 | Lien permanent

Naïfs et Singuliers de Mayenne à Minsk, nul ne serait prophète en son pays?

   Jean-Louis Cerisier, auto-bombardé ces temps-ci président d'une nouvelle association des Créateurs Naïfs et Singuliers de la Mayenne (CNS 53), me transmet l'information d'une exposition fort intéressante qui va se monter en Biélorussie à Minsk. Génial, les populations de là-bas pourront découvrir ce qu'ici en France on ne paraît pas capable de découvrir, à savoir qu'a existé, qu'existent encore, à Laval et dans sa région, une pléiade de créateurs et d'artistes talentueux et originaux, à la figuration tantôt poétique tantôt singulière (j'en ai déjà plusieurs fois parlé sur ce blog, voir plus loin). Nul ne serait décidément prophète en son pays, l'adage ne cesse de se vérifier dans notre beau pays qui paraît condamné à s'exporter pour se faire reconnaître. Comme me le disait récemment Jean-Louis, il y a de la frilosité dans ce pays. En témoignent, entre autres, toutes ces expositions d'art brut japonais, britannique, américain, italien, serbe, etc., qui se succèdent à Paris, tandis que pas une ne se consacre à nous montrer l'art brut français. Quoi? Qu'ai-je dit? On dirait presque un gros mot. Vous avez bien écrit: l'art brut français? Mais il ne faut pas y songer, nom d'une pipe. Cela ne peut être envisagé, ou bien alors il faut le faire à l'étranger, mis à distance, on acceptera peut-être de considérer la question. Je me demande aussi quelquefois si ces expos d'art brut de plus en plus exotiques ne se font pas surtout pour permettre aux commissaires et "curateurs" (ouh, le vilain mot à la mode) des collections d'art brut de se payer des voyages aux frais de la princesse... Parler de ce qui se produit en France serait-il forcément une attitude nationaliste? Ne serait-ce pas plutôt lié à notre volonté de parler de nos voisins créatifs, de ceux qui vivent sur un territoire quotidien que nous connaissons bien, dans un pays qui est le nôtre, autour de nous où nous pouvons facilement voyager, les distances étant courtes...? Ne serait-ce pas parler d'une création démocratique se manifestant dans l'immédiat et de façon directement poétique?

 

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    Voici la lettre qui annonce l'événement. Avec le bon de souscription pour commander le catalogue qui aura 56 pages et 31 illustrations (si l'on veut imprimer le bon de commande plus nettement on clique ici). L'exposition qui va être montée à Minsk prendra place au Musée National des Beaux-Arts de Biélorussie du 2 décembre 2013 (demain) au 6 janvier 2014. Elle devrait présenter en tentant d'en expliciter les rapports et les filiations les œuvres du Douanier Rousseau (le grand ancêtre d'où tout découle... Et ceux qui exposeront à ses côtés en sont grandement honorés), Henri Trouillard (un Naïf visionnaire trop méconnu dont on peut admirer au musée de Laval les chefs-d’œuvre), Jules Lefranc (fondateur en 1967 du musée d'art naïf de Laval grâce au don de ses propres œuvres et d'une partie de ses collections d'art naïf d'autres créateurs), Jacques Reumeau, Robert Tatin, Alain Lacoste, Brigitte Maurice, Serge Paillard, Jean-Louis Cerisier, Céneré Hubert (un habitant-paysagiste populaire, une fois n'est pas coutume), Patrick Chapelière (pour le coup pas originaire de Laval je crois).

 

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Jean-Louis Cerisier, sans titre, février 1976, coll privée, version avant retouche restauratrice (avec traces de maculation), Laval, ph. Bruno Montpied

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La même peinture sans titre, stylo bille et gouache, 29,7x21 cm, 1976, retouchée et rénovée, coll. privée, Laval, ph. J-L.Cerisier

      Il faut espérer, et faire une petite prière pour que le musée de Laval, entre autres, par la suite accepte d'héberger cette exposition pour laquelle il prête  des Reumeau, des Trouillard, et des Lefranc. Après tout ce musée qui s'ouvre depuis quelque temps déjà à l'art singulier, sautant depuis l'art naïf dans la chronologie des arts d'autodidactes à pieds joints par-dessus l'art brut, poursuivrait sa mise en valeur des artistes régionaux qui ont peut-être été à l'origine de sa mue actuelle. Car plusieurs d'entre eux sont déjà accrochés aux cimaises du musée (en plus des trois déjà cités et prêtés, on notera que Cerisier, Lacoste et Tatin sont présentés en parmanence au musée).

 

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Henri Trouillard, Le Yéti, 1962, Musée d'Art Naïf et d'Art Singulier du Vieux-château, Laval, ph. BM


      Il serait urgent de mettre en lumière ce que j'ai appelé dans le n°49 de la revue 303, Arts, recherches et Créations, en 1996, il y a déjà quatorze ans, "l'Ecole de figuration poétique lavalloise" qui, du fait de ses artistes consacrés de l'Art Naïf, Rousseau, Trouillard et Lefranc, naquit petit à petit, se développant en direction de formes d'art figuratif poétique ou singulier avec les Tatin, Reumeau, Lacoste, puis les Cerisier, Paillard et tutti quanti, et s'ancrant dans la région mayennaise sans se couper pour autant d'autres régions (Lefranc entretenait des rapports avec la Vendée par exemple, où il prit contact avec Elie-Séraphin Mangaud et Gaston Chaissac, encore deux créateurs dont les liens avec Lefranc n'ont pas fait l'objet de beaucoup de recherches parmi ceux qui s'intéressent aux arts singuliers).

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Serge Paillard, Pomme de terre dite de la petite lampe, 2007

     Enfin, voici en prime un petit documentaire de la télévision biélorusse diffusé ces jours-ci je pense, que je ne peux vous traduire (M. Gayraud nous éclairera peut-être en commentaire) mais qui présente en arrière-plan quelques-unes des œuvres de l'expo, des Trouillard, des Paillard, des Reumeau, des Cerisier, etc., ainsi que des vues du Vieux Château à Laval. Merci à Jean-Louis Cerisier qui nous a communiqué le lien et l'info. Le tapis rouge est décidément déroulé à Minsk pour nos chers Lavallois!


 

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Des jardins de fantaisie populaire à Dives-sur-Mer (presque) tout l'été

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      Je continue à présenter Bricoleurs de paradis (cette fois avec son réalisateur Remy Ricordeau), ainsi que mon livre Eloge des Jardins Anarchiques, le 10 juillet prochain à 20h à la Médiathèque Jacques Prévert de Dives-sur-Mer, dans le Calvados, ville où comme on sait se trouve la Maison Bleue d'Euclides da Costa Ferreira.

 

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Euclides da Costa Ferreira, détail au caméléon, dans les décors en mosaïque de "la Maison Bleue" à dives-sur-Mer, ph. Bruno Montpied, 2011 (pas dans l'expo)

       Cependant, il y a un bonus en supplément pour l'occasion, je prête également une petite exposition que j'ai conçue pour cette médiathèque, "Les jardins de fantaisie populaire", exposition prévue pour durer du 11 juillet jusqu'au 1er septembre.Emile-Taugourdeau,-masque-d.jpg Il y aura vingt photos de votre serviteur consacrées à divers sites d'inspirés du bord des routes (vingt sites différents: Châtelain, Litnianski, Jean Grard, Darcel, Taugourdeau, Calleja, Guitet, Gourlet, Escaffre, Pastouret, Clément, Licois, Le Breton, Bernard Aubert, Pailloux, Vanabelle, Jenthon, da Costa Ferreira, l'abbé Fouré, Bernard Roux),Clément,-un-schtroumpf,-boi.jpg plus quelques objets rescapés ou en provenance de divers sites (Taugourdeau, Pailloux, Clément, Céneré Hubert,Cénéré-Hubert,-Sans-titre-(.jpg Paul Waguet, René Jenthon, Donadello) et des affiches (des photos agrandies d'après le livre EJA). On pourra également se procurer  des exemplaires de mon livre en vente sur place (sous l'égide d'une librairie de Caen).Paul-Waguet,-sans-titre,-(r.jpg

 

Verso cart expo Dives.jpg


      Voici le texte qui est prévu pour accompagner l'expo (ici légèrement remanié):

       Le propos de cette petite exposition, montée en prolongement de la présentation le 10 juillet en cette même médiathèque de Dives du film de Remy Ricordeau, Bricoleurs de paradis (Le Gazouillis des éléphants), film inséré dans le livre Eloge des Jardins anarchiques de Bruno Montpied, est d’inviter à une balade et à une prise de conscience face aux créations de plein vent qui sont disséminées discrètement à travers le territoire de la France. Œuvres de gens du commun, le plus souvent commencées à la retraite, comme par un désir de clamer au monde que non, tout n’est pas fini, ces espaces « corrigés » sont variés. On rencontre ainsi des mosaïstes de bouts d’assiette, comme da Costa Ferreira, bien connu à Dives-sur-Mer, des jardins de statues naïves, des accumulations d’objets et de matériaux hétéroclites, des installations en maquettes de tanks, canons, ou monuments du monde entier réassemblés dans un nouvel ordre, des rochers sculptés, des branches interprétées, des arboretums semés de plaisanteries taillées dans le granit, un jardin comme un conte d’Andersen, une forêt de moulinets multicolores, le vélo extraordinaire, sculpture ambulante, de M. Pailloux en Vendée, un habitat troglodytique couvert de bas-reliefs, un autre à thématique mythologique, des jardins « zoologiques », etc.

A.Le-Breton-Accordéon,-bini.jpg

Aubade pour taureau (cornemuse, guitare, accordéon) par Alexis Le Breton, ph. BM, 2010 (pas dans l'expo)

         Les ouvriers, les artisans, les paysans s’abandonnent à leur fantaisie, dans un espace intermédiaire entre habitat et route, entre chez eux et chez tous, dans une sollicitation de leur imaginaire qui se déploie à la fois intimement, comme dans les œuvres de l’art brut, et pour être montrée au vu et au su de tous ceux qui passent (sans qu’il soit nécessaire d’entrer). Ils font de l’art, puisqu’ils sculptent, peignent, bâtissent, assemblent, collent, sans être pour autant des artistes (au sens convenu du terme, et notamment marchand). Ils le disent, ils sont avant tout des créateurs modestes, ne voulant pas se distinguer du commun des mortels, ils créent sur place pour se donner des fêtes à eux-mêmes et aux passants, dans une geste gratuite, toute de dépense sans autre contrepartie que la reconnaissance de ceux qui les visitent. Ils ne vendent généralement pas leurs travaux qui font partie de leur vie, ils se sont peut-être assez vendus comme ça durant leur vie de labeur. Ils se donnent le luxe de ne pas se lancer dans un petit commerce sur le tard. Ils ont une galerie en plein vent où il n’y a pas de marchandise (ou alors, très marginalement).

         Ils le savent, c’est le temps de la création qui est le meilleur de la vie.

        Da Costa Ferreira le savait, lui qui n’eut jamais d’autre richesse. Venez voir ses frères et sœurs qui sont plus nombreux que l’on aurait cru.

      Mais il ne faut pas oublier que la majorité de ces sites sont sur des terrains privés pas nécessairement ouverts aux visites. Dans ce domaine, il faudra faire preuve de tact et de respect à l’égard de créateurs atypiques montrant leur art sans inviter nécessairement à l'envahir…

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03/07/2012 | Lien permanent

Un autre regard, la collection permanente de la création franche s'expose

       Du 11 juin, date du vernissage (pour les Bordelais, car cela a lieu un vendredi soir, les gens qui habitent plus loin ne sont pas invités à venir ce soir là, à moins de casser un bout de leurs RTT?), au 5 septembre, "à l'occasion de la parution d'un nouveau catalogue", voici que le fonds permanent du musée de la Création Franche est exposé avec prés de 300 oeuvres sur les 13000 inscrites à l'inventaire, le tout réparti sur les onze salles du musée. C'est le retour en force de la collection qui n'était que trés, trés partiellement montrée depuis des lustres, la plupart du temps confinée dans les trois quatre salles du fond du premier étage, où il ne fallait pas hésiter à faire un tour aprés chaque expo temporaire, dans l'espoir d'y voir surgir, ou resurgir, telle ou telle oeuvre inconnue, ou oubliée.

Jean-Louis Cerisier, Fragment organique,1974, mus. de la Création Franche.jpg

Jean-Louis Cerisier, Fragment organique, 1974

       Comment présenter cette masse d'oeuvres assez diverses il faut l'avouer (cela me plaît à moi cette variété)?

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Claude Massé, des patots comme s'il en pleuvait..., Collection du musée, ph Bruno Montpied, 2008

      Les organisateurs ont opté pour une classification par ensembles et thèmes semble-t-il. Les "pionniers" de la collection sont au rez-de-chaussée, à côté d'une salle plus spécifiquement consacrée aux créateurs classés dans les collections de l'art brut (comme Madge Gill, Louise Tournay, Benjamin Bonjour, Martha Grünenwaldt, etc - seul Michel Nedjar, il est vrai classé généralement dans l'art brut, y fait figure d'erreur, sa place étant plutôt selon moi parmi les singuliers, créateurs francs et autres "neufs inventeurs"...), dans lequel la création franche, nous dit le prospectus (non signé) de la présentation (consultable sur le site web du musée, voir plus haut), "prend sa source". Une autre salle du rez-de-chaussée est vouée à Claude Massé et à ses découvertes d'art "autre",Joseph Sagués, donation Claude Massé au musée de la Création Franche, ph.Bruno Montpied 2009,-avril-.jpg à la succession du peintre Jacques Karamanoukian, et à Gérard Sendrey, dont beaucoup d'oeuvres, à ce que j'ai découvert, aprés sa récente méga-exposition au Musée, ont rejoint la collection permanente, ce qui met un terme à son refus maintes fois réitéré de mêler sa propre oeuvre à celles de la collection qu'il avait grandement contribué à rassembler. Gérard Sendrey devient in fine un créateur franc tout à coup...

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Emile Ratier, grande roue de fête foraine, ph. BM, sept 2009

      L'étage paraît plus labyrinthique, du moins dans l'exposé de la présentation de l'expo. On y a ménagé des espaces avec des thèmes hétéroclites, le coin des "visionnaires" ou des "rêveurs de mondes", un cabinet de curiosités (avec paraît-il des oeuvres "inclassables et insolites" - miam-miam, c'est là que j'aimerais être! - un coin "maternité et enfance", qui sent presque sa crèche... En salle 10 (cela vous prend un petit air de jeu de l'oie tout à coup cette expo), ont été parqués les "tourmentés", merci pour eux...Stani Nitkowski, (sans titre mentionné), musée de la Création Franche.jpg Les "tronches", c'est en salle 9... "L"homme du commun" (le bouseux en somme?) est en salle 5, avec ses travaux des champs, ses animaux... Et le visiteur n'aura encore vu qu'une petite partie de l'ensemble de la collection, que seule une plus grande surface, souvent annoncée sous cape, jamais effective, pourrait révélér dans toute sa munificence éclatée.

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Jean Dominique, un "homme du commun" comme dit la présentation de l'exposition,en des termes qui deviennent presque moqueurs, et pourquoi? Ce genre d'oeuvre est plus prés de la plus grande poésie que tous les chefs d'oeuvre ciselés du monde..., ph. BM 2009

      Je n'ai pu voir l'accrochage, je ne fais ici qu'un compte rendu basé sur le dossier de presse envoyé en signe avant-coureur. Mais pourquoi ne pas faire moi aussi mon mini-accrochage à partir de quelques photos prises au cours des années? Chaque visiteur devrait ainsi avoir le droit à son accrochage perso, ses préférences, ses passerelles à lui, ses analogies, ses confrontations d'une oeuvre face aux autres, etc. Pourquoi pas?

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Bruno Montpied, Les masques de la mort rouge, 35x27cm, collage et technique mixte sur papier, Musée de la Création Franche
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Guy Girard, peinture à l'huile, anagraphomorphose sur la signature de René Char, ph BM, 2009, musée de la Création Franche
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Alain Garret, La diligence de Gustave, Musée de la Création Franche, ph BM, juillet 2008
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Cathy Massé, Rêve, déc.1985, Musée de la Création Franche, ph. BM, avr. 2009
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Pépé Vignes, 1979, Musée de la Création Franche, ph. BM, mars 2009
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Marilena Pelosi, dessin sans titre, 2001, Musée de la Création Franche, ph. BM, avr. 2009
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Jean Tourlonias, "Spéçiale Gérard Sendrey", 1996, Musée de la Création Franche, ph. BM, juil. 2008 
 

     

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08/06/2010 | Lien permanent

Info-Miettes (11)

Disparition de René-François Gregogna

     Gregogna a quitté cette vallée de larmes le 17 janvier dernier dans sa 85e année. J'ai eu l'occasion de parler ici du film qui lui avait été consacré par Anne Desanlis (disponible aujourd'hui en DVD). Tous ceux qui voudraient ne pas le perdre complètement sont invités à le revoir. Pour les autres, ce sera l'occasion de découvrir un créateur marginal haut en couleur, d'une élégance physique hors du commun, qui eut une grande influence sur les artistes de la Figuration dite Libre du côté de Sète et Pézenas. Et qui, ce que l'on sait moins, avait été dans sa jeunesse durablement marqué par la rencontre avec un inspiré du bord des routes des années 30, Alphonse Gurlhie (on voit des oeuvres de ce dernier dans le Violons d'Ingres de Jacques Brunius, doc de 1939). J'avais eu le temps, lors du passage de René-François à Paris pour l'avant-première du film d'Anne Desanlis, de l'interviewer au sujet de Gurlhie et autres.

Gregogna disparaît le 17 janvier 2011 à 84 ans.jpg

Bernard Thomas-Roudeix, de la toile à la terre, et au Sel

Expo Thomas-Roudeix, Espace Galerie du Sel, Sèvres 2011

     Au fil du temps, j'aime à contempler les travaux de Thomas-Roudeix, avec un plaisir qui s'affirme toujours davantage. Il  travaille la céramique émaillée et l'acrylique en peinture. Et voici l'occasion de découvrir le fruit de cinquante années de travail dans un Espace appelé la Galerie du Sel, installé 47, Grande Rue à Sèvres.Bernard Thomas-Roudeix, sans titre

     On dit de lui dans le carton d'invitation à cette prochaine expo (du 3 février au 6 mars) qu'il "a choisi le corps humain comme support principal de son art". "Impossibilité de communiquer, difformités, souffrances: l'homme est pour lui un vaste champ d'expériences et de possibilités d'expression". Il semblerait que parmi les influences qu'il revendique, on trouve Bacon. Il marche en effet sur ses traces, notamment en explorant une palette chromatique extrêmement raffinée et sensible. Et sans que son dessin se complaise dans la représentation de corps déchirés ou avilis qui sont parfois si en faveur chez d'autres peintres contemporains qui ne se lassent jamais de montrer les plaies et les chancres, les postures abaissantes.

Petit Pierre, pièce de théâtre pour la jeunesse par Suzanne Lebeau

Le manège de Petit Pierre,album pour la jeunesse de Michel Piquemal.jpg    Après André Robillard, Aloïse et autres créateurs d'art brut (dont les écrits, par exemple, ont aussi inspiré des dramaturges, que l'on se souvienne de la pièce de Patricia Allio jouée naguère un peu partout), voici que le théâtre s'attaque (façon de parler bien sûr) à Pierre Avezard (1909-1992), le créateur du célèbre manège automatisé en fils de fer et autres matériaux recyclés anciennement situé à la Fay-aux-Loges dans le Loiret et remonté par la suite dans le Parc de la Fabuloserie à Dicy dans l'Yonne.

     C'est au Théâtre de l'Est Parisien que cela se joue du 18 janvier au 5 février (pressez-vous!). Le fait que la pièce ait été classée et aussi écrite dans la perspective d'un théâtre pour la jeunesse est sûrement à mettre en lien avec l'édition pas très lointaine de l'album documentaire de Michel Piquemal et Merlin, le manège de Petit Pierre aux éditions Albin Michel jeunesse (en 2005). A ma connaissance, c'est la première fois qu'une pièce de théâtre pour la jeunesse choisit de camper l'oeuvre et l'existence d'un créateur brut devant des enfants.

L'univers enchanteur d'Anselme Boix-Vives

      Est-ce la simultanéité de la magnifique nouvelle exposition qui vient de commencer à la Halle Saint-Pierre (Sous le vent de l'Art brut, collection Charlotte Zander, du 17 janvier au 26 août 2011, Paris), où l'on peut voir entre autres merveilles, à l'étage quelques oeuvres d'Anselme Boix-Vives, est-ce cette présentation qui a donné l'occasion aux responsables de la galerie Alain Margaron de ressortir de leurs cartons d'autres oeuvres de cet ancien vendeur de primeurs? On pourrait le penser.

Anselme Boix-Vives, peinture exposée à la Galerie Margaron, 2011

Boix-Vives, Mariage des deux races ou Grand Mariage jaune, ripolin sur carton, 80 x 108 cm, 1965, ph. A. Ricci ; carton d'invitation à la Galerie Margaron

 

      Eh bien, tant mieux puisque cela nous donne la possibilité de découvrir quelques nouvelles plumes de sa gerbe de 2400 peintures et dessins, ayant constitué, paraît-il, aux yeux du créateur, "son paradis sur Terre" (extrait du catalogue de la Halle Saint-Pierre).

Galerie Alain Margaron, 5, rue du Perche, 75003 Paris. Exposition jusqu'au 26 février 2011.

Henriette Zéphir, 50 ans de dictée

     On avait remarqué à la Halle Saint-Pierre, il y a quelque temps (une exposition sur le dessin je crois) les dessins "médiumniques" de Mme Henriette Zéphir, née en 1920 dans la région toulousaine, qu'Alain Bouillet cherche à faire reparaître sous la lumière, car on l'avait un peu oubliée cette chère dame, depuis le fascicule n°14 de la Collection de l'Art Brut (1986), où une notice de Jean Dubuffet (de 1966) révélait son existence et ses travaux. Comme si ses dessins, à l'exemple des âmes qu'il lui fallait aider à brasser (vivant "dans les zones grises inférieures ; [il faut] les aider pour qu'elles parviennent à s'élever dans les zones de lumière"), avaient désormais besoin à leur tour d'un autre médium pour leur permettre de se réincarner.

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Henriette Zéphir, sans titre, 1965, crayon de couleur et encre de Chine sur papier plastifié, 23 x 32 cm

 

     On pourra contempler de nouveau des dessins de Mme Zéphir (une petite Zemankova à la française?) à la galerie Christian Berst du 4 février au 5 mars prochains. Le soir du vernissage (jeudi 3 février, à 20h précises), on aura aussi la possibilité de visionner un film de Mario Del Curto et Bastien Genoux (avec la collaboration d'Alain Bouillet), d'une quinzaine de minutes sur la même Henriette Zéphir.    

 

 

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Un nouveau livre sur les Rochers sculptés de Rothéneuf, et une exposition sur place

     Annoncé depuis plusieurs mois, voici qu'est paru, selon une information de Joëlle Jouneau, fondatrice de l'Association des Amis de l'Abbé Fouré (qui veut se consacrer à mieux faire comprendre la vie et l'oeuvre du fameux ermite), le livre du photographe et cinéaste Jean Jéhan, Saint-Malo-Rothéneuf, au temps des Rochers Sculptés, aux éditions Cristel. Je peux montrer ici, transmis par cette même Joëlle, la couverture et le 4e de couv de cet ouvrage qui paraît fort coquet ma foi:

  

Couverture du livre Jean Jéhan, St-Malo-Rothéneuf au temps des rochers sculptés, éd. Cristel, 2010.jpgCouverture du livre de Jean Jéhan, éd Cristel, préface d'Alain Bouillet, 2010

4e de couverture du livre de Jean Jéhan.jpg

 4e de couv' avec un curieux photomontage

  

     On notera le format italien du livre qui paraît par son titre (ne mentionnant curieusement pas le nom de l'auteur des rochers sculptés) mettre l'accent avant tout sur l'aspect régionaliste du thème traité, annonçant des reproductions de cartes postales anciennes, ainsi que des photographies en noir et blanc de l'auteur extraites des 300 clichés de sa collection personnelle (prises à des époques où certaines statues, disparues depuis, existaient encore, ce qui permet de mettre en évidence la dégradation du site). Dès que j'aurai pu davantage le consulter, j'y reviendrai bien entendu (puisque mon blog sert de caisse de résonance à ma propre recherche sur l'abbé depuis déjà plusieurs notes). D'ores et déjà, on attend avec impatience de trouver dans le livre de Jean Jéhan  la reproduction promise de plusieurs pages du Livre d'Or de l'abbé, que celui-ci gardait à la disposition des visiteurs de son petit musée dans le bourg. Ce livre d'or contiendrait des dessins de l'abbé. Une rumeur court ainsi comme quoi certaines "enluminures" de ce livre, les dragons ci-dessous par exemple (reproduits d'après une photocopie d'un autre article paru cette année dans Le Pays Malouin sur l'existence de ce Livre d'Or, conservé jusqu'à présent par une descendante de l'abbé), seraient de la main de l'abbé, ce qui serait, si cela s'avère bien attesté, une belle découverte de la part de M. Jéhan.

 

 

Page du Livre d'Or de l'abbé fouré, d'après photo Pays Malouin.jpg

 "Enluminure" du Livre d'Or de l'abbé, tel que parue dans un numéro du Pays Malouin, journal de la région de St-Malo

 

    Autres révélations que l'on devrait aussi trouver dans ce livre de Jean Jéhan, des témoignages de personnes ayant connu dans leur enfance l'abbé, personnes disparues depuis. Le Pays malouin cite l'anecdote rapportée par l'une d'elles des bains de sable que l'on faisait prendre à l'abbé pour le soulager de ses rhumatismes... De même, le caractère taciturne et pour le moins taiseux du personnage se trouve corroboré dans ces témoignages (mais s'il avait des difficultés d'élocution engendrées par sa surdité, cela ne pouvait que le rendre taiseux, non?...). On attend certes beaucoup de ce livre que d'aucuns présentent déjà, de façon pour le moins précipitée comme celui qui traiterait enfin de "l'intégralité" de l'abbé Fouré... Attention de ne pas lui en demander trop. Mais il faut certes se féliciter de ce qu'un ouvrage sérieux ait enfin paru sur les terres mêmes de l'abbé Fouré, cent ans que ses mânes, errant entre les falaises de Rothéneuf, attendaient cela.

   Joëlle Jouneau me signale par ailleurs que le livre reprend « en annexe » le Guide du Musée de l‘ermite de Rothéneuf dont on se souviendra peut-être que j’ai donné au début de cette année, date anniversaire des cent ans de la mort de l’abbé Fouré, dans le n°1 de la revue apparentée au surréalisme L’Or aux 13 îles la première édition commentée depuis son édition originale en 1919. Je ne suis pas mécontent de vérifier qu’une fois de plus, face aux partisans de l’art brut, les surréalistes auront encore tiré les premiers ! (Ce qui explique peut-être l’attitude assez mesquine d’une Animula Vagula, sur un blog parallèle, qui s’empresse de ne pas mentionner notre première édition lorsqu’elle apprend avec ravissement la publication prochaine du livre de M. Jéhan - éternelle jalousie du parti de l’art brut ?).

     Mais revenons à Joëlle Jouneau. Cette dame, intéressée vivement à la vie et  à l'oeuvre de l'abbé, surprise comme beaucoup de visiteurs des rochers que l'on n'ait jamais songé sur place à communiquer davantage d'informations véridiques sur le compte de l'abbé, au lieu de se contenter des légendes créées de toutes pièces par les ancêtres des gérants du lieu, cette dame a décidé de créer donc une association qui se donne pour mission d'aider à restituer la mémoire et le sens de l'oeuvre de l'abbé. Il va de soi que je m'associe pleinement à cette mission. C'est pourquoi je viendrais à la journée du 18 décembre prochain à la salle de quartier de Rothéneuf, qu'organise Joëlle Jouneau en prélude à une exposition qui sera ensuite installée au manoir Jacques Cartier qui vient d'être donné à la Ville de St-Malo par la fondation canadienne qui le gérait jusque là. Voir l'affiche ci-dessous:

 

affiche exposition  sur l'abbé Fouré et journée du 18 décembre 2010 à la nouvelle salle de quartier de Rothéneuf.jpg

 

 

     Je devrai normalement, au cours de la soirée, si la technique ne nous fait pas faux bond, présenter un film surprise sur la question des environnements spontanés contemporains afin de situer les rochers sculptés dans un contexte plus général (je donnerai bientôt plus de détails à propos de ce film). L'exposition essaie de retracer l'ensemble de ce que l'on sait du parcours biographique de l'abbé, et de la signification de ses sculptures sur pierre ou sur bois, à partir des recherches des divers exégètes de l'abbé Fouré .

 

expo abbé Fouré, manoir Jacques Cartier.jpg

 

 

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