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29/06/2013

En passant par la Lorraine... Mais où était cette folle maison?

Cette note comporte une mise à jour du dimanche 30 juin

     En 1980, on publia chez Chêne/Hachette un gros livre de photographies de Michaël Schuyt et Joost Elffers, avec des notices de George R.Collins, Les Bâtisseurs du Rêve.Les Bâtisseurs du Rêve, 1980.jpg

     Un certain nombre d'environnements spontanés populaires français y étaient mentionnés dans un contexte plus généralement consacré à l'architecture fantastique de l'époque. Au détour de ses pages que je re-feuilletais récemment je suis retombé sur une image d'un site, une façade de "maison en Lorraine" – il n'y avait pas d'autre indication – que j'avais oubliée.

 

maison extravagante lorraine002.jpg

Photo extraite des Bâtisseurs du Rêve

 

      A n'en pas douter, il s'agit d'une réalisation exécutée par un rocailleur, et une réalisation étonnamment poussée, avec ses troncs d'arbres très bien imités, dégagés des murs, ses fausses mousses, ses stalactites au dernier étage, les pierres jointes à la diable dans sa maçonnerie.

          Mais à quel endroit cette maison pouvait-elle bien se dresser? Dans quelle ville de Lorraine? Nancy? Eh bien non, ce n'étais pas dans cette capitale de l'art nouveau. Le Poignard Subtil a mené l'enquête et dans son omniscience n'hésite pas à compléter le bouquin du Chêne trente-trois ans plus tard. C'était à Gondrexange en Moselle qu'elle se dressait, cette maison étonnante. On va aller vérifier cet été si elle s'y dresse toujours.

Post-Scriptum:

         Je dois à Jean-Michel Chesné, émérite animateur de blog, artiste et chercheur de cartes postales, braqué un peu comme moi sur les environnements et autres sites insolites, l'information complémentaire capitale suivante: il exista des cartes postales anciennes montrant cette maison, tout spécialement sous un angle qui permet de constater qu'il y avait une autre façade perpendiculaire à celle ci-dessus, et tout aussi spectaculaire. Jean-Michel Chesné a eu l'amabilité de m'envoyer une de ces cartes:

 

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"Gunderchingen" signifie en allemand "Gondrexange" (la Lorraine étant allemande entre 1871 et 1918); cette maison ainsi ornée donne furieusement l'impression d'être enserrée dans une racine prédatrice géante sur le point de l'étouffer ; à signaler que Michel Racine, au nom prédestinant, auteur de livres sur les rocailleurs, ne paraît pas avoir eu vent de ce site tout à fait remarquable pourtant (probablement parce que le site a disparu?)

 

         Comme on le voit, la maison est nommée "Villa Ch. Masson". Probablement le nom de Charles Masson, un entrepreneur spécialisé peut-être dans l'art de la rocaille¹? Tant et si bien que cette maison lui servait peut-être de gigantesque enseigne chargée de montrer au public et aux commanditaires éventuels, de la façon la plus évidente et massive possible, toute l'étendue de ses talents...

             A noter aussi que des tableaux paraissent accrochés ou incrustés sur les murs de la maison. Enfin, dernière réflexion, si cette maison date du début du siècle (comme semble l'indiquer l'âge de la carte postale), il apparaît qu'il y a de fortes chances qu'un siècle plus tard on ne trouve plus grand vestige d'icelle à Gondrexange... Wait and see, gardons espoir...

_____

¹Voir cependant le commentaire de Jean-Michel Chesné ci-dessous...

Commentaires

Si cette maison existait encore en 1980, elle a donc alors survécu à deux guerres qui n'ont pourtant pas épargné la Lorraine. Il faut donc en effet croiser les doigts en espérant qu'elle n'aura finalement pas été victime de quelque architecte ou urbaniste "rénovateur" formé à l'école du rationalisme dévastateur. (Mais y a t-il jamais eu d'autres écoles en matière d'urbanisme depuis l'effroyable baron Hausmann ?)

Écrit par : RR | 01/07/2013

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Hélas, c'est le livre où fut publiée la photo qui date de 1980. Il y a fort à parier que ma première photo, elle, date du début du siècle comme les cartes postales. Donc, il y a fort peu de chances de retrouver la maison... Mais on ne sait jamais.

Écrit par : Le sciapode | 01/07/2013

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Effectivement, comme tu l’évoques dans ta notice, une autre carte existe, visiblement promotionnelle mais concernant l‘entreprise Charles Masson, Il est davantage question d’une exploitation de carrières de calcaire. Cette entreprise produisait des pierres muschelkalk (calcaire coquillier) des moellons bruts ou taillés ainsi que des pavés . Je pense qu’il ne s’agit pas d’un artisan rocailleur et que cette maison rustique est une vitrine publicitaire comme tu le dis mais davantage pour les matériaux la constituant. C’est une hypothèse
Jean-Michel

Écrit par : Jean-Michel Chesné | 01/07/2013

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Cher Sciapode, délicieux J M Chesné, il me semble que cette bourgade,s'appela Gunderchingen lorsqu'une grande partie de la Lorraine, avec sa sœur l'Alsace, comme on disait à l'époque pour faire pleurer dans les chaumières, fut annexée par le Reich prussien. Gondrexange se trouvait dans l'ancien département de la Meurthe (arrondissement de Sarrebourg), et précisément dans la partie de ce département démembré qui rejoignit la Moselle pour intégrer l'Allemagne, tandis qu'une autre partie de la Meurthe, autour de Nancy, formait avec la partie restée française de la Moselle le nouveau département de Meurthe et Moselle. Après 1918, la délimitation antérieure des départements n'ayant pas été restituée, Gondrexange demeura dans le département de Moselle, ayant Metz comme chef-lieu. Vous suivez?
La carte postale date vraisemblablement de l'époque teutonne, et le caractère typographique employé est caractéristique, dans son austérité tragique, des pancartes indicatrices allemandes et autres inscriptions officielles de ce pays, qui ont traversé les âges jusqu'à ce jour et quelquefois se sont importées bien loin sur le territoire français, représentant originellement une modernité alternative à la complication gothique. Villa Masson reste en français, car c'est une appellation locale, comme dans ces villages de Bretagne où, même au plus sévère de l'assimilation à la France, on conservait sur les cartes et les pancartes les noms bretons des lieux-dits, et d'ailleurs, je ne vois pas très bien quelle pourrait être une version tudesque différente de ce terme. Il ne m'étonnerait pas non plus, d'ailleurs, qu'I.L. fût l'abréviation d'une des subdivisions en millefeuilles du Landkreis Saarburg, sous-partie du Bezirk-Lothringen, lui même subdivision du Reichsland Elsaß-Lothringen. Je ne pense absolument pas qu'il puisse s'agir déjà de l'Internationale Lettriste. Là, il y aurait une certaine incohérence.

Écrit par : Régis Gayraud | 02/07/2013

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