08/03/2014
Disparition de Jean-François Maurice, fondateur et animateur de "Gazogène"
J'ai appris le décès de Jean-François Maurice, l'animateur et fondateur de la revue Gazogène, et par ailleurs chercheur d'art populaire sous toutes ses coutures. Il est mort jeudi 6 mars, emporté par le sale crabe qui n'a pas de pinces d'or.
Je n'avais plus de relations avec lui depuis 2002. Mais, je m'en souviens encore, nous avions auparavant collaboré (je lui avais donné quelques articles pour son Gazogène primitif, certains que nous avons co-édités, à l'égide de Gazogène et de l'Art Immédiat : un "Tour de France de quelques bricoles en plein air" et une "Promenade dans l'Art Populaire du Rouergue") et souvent échangé, entre 1988, année où il m'avait écrit suite à mes articles dans Artension, et donc 2002. Je me rappelle entre autres lui avoir fourni sur sa demande un exemplaire du célèbre bouquin de Verroust et Lacarrière, Les Inspirés du bord des routes, célèbre s'entend uniquement dans le micro-milieu des mordus de l'art brut et consorts. Nous nous intéressions tous deux fortement au sujet.
Jean-François Maurice dans la merveilleuse machine à découvrir de l'art brut de l'Eco-musée de Cuzals, dans le Lot, photo Bruno Montpied (je crois bien inédite), 1991
Malgré mes divergences de goût et d'accord avec lui (il était dubuffetolâtre alors que je me prosternais devant André Breton), je dois avant tout reconnaître et saluer, alors que ses traces pourraient risquer de s'évanouir –on oublie si vite les médiateurs– sa passion qui resta entière des années durant pour les créateurs de l'ombre, les vagabonds sans culture au pays de l'inspiration. Il a apporté sa pierre à l'édifice mémoriel où l'on conservera encore longtemps j'espère le souvenir de la poésie des sans-grade (car cette poésie est faite pour annoncer le triomphe de la créativité de tous dans nos sociétés, ne l'oublions pas, c'était le rêve auquel Jean-François Maurice, tout comme moi, nous croyions).
S'il consacrait trop de temps à mon goût à divers plasticiens d'arrière-province, suiveurs sans grande originalité de la région du Lot, il restait fidèle à l'art populaire, à l'art brut et surtout aux environnements spontanés à la recherche desquels nous partîmes une fois en dérive de Limoges à l'Yonne dans l'espoir de voir si on pourrait en trouver par hasard (le butin fut maigre, et il profita plutôt du voyage pour m'emmener avec lui chez Jean-Joseph Sanfourche et André Escard, l'ancien colonial reconverti en chasseur d'inspirés, personnages qui m'intéressaient personnellement beaucoup moins –tous sont décédés à présent, et moi-même comme dirait l'autre je ne me sens du coup plus très bien...).
De gauche à droite, BM, Jean-Joseph Sanfourche et Jean-François Maurice, lors d'une visite à St-Léonard-de-Noblat, 1991, ph. (inédite là aussi), BM
Je pense que son principal mérite avec Gazogène fut en vérité lorsqu'il l'axa en direction des collections de cartes postales anciennes, notamment celle de Jean-Michel Chesné, montrant des environnements peu connus du passé. Cette idée, je l'avais appliquée en illustrations de certains de mes articles sur des sites du passé (la Villa des Fleurs à Montbard, le Père Eternel à Trégastel par exemple).
Les numéros spéciaux de Gazogène parus au cours de ces dernières années comptent certainement parmi les plus fertiles en découvertes de ce point de vue.
Cependant, que ses proches me pardonnent une dernière remarque : j'apprends qu'une "cérémonie religieuse" sera observée en l'église de son village de Belaye. Or, Jean-François Maurice ne se proclamait-il pas libertaire? Qu'est-ce que cette cérémonie vient faire là dans ce cas?
23:56 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art naïf, Art singulier, Environnements populaires spontanés, Fous littéraires ou écrits bruts, Hommages, Littérature | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : jean-françois maurice, gazogène, jean-jsoeph sanfourche, environnements spontanés, bruno montpied, art brut, littérature prolétarienne, dubuffetolâtre, dérives, grenouilles de bénitier, libertaires, cartes postales anciennes | Imprimer
Commentaires
C'est le jour où démontons l'exposition de " Babar, bricoleur de bonheurs " que le chemin de JF Maurice s'interrompt. L'éclairage de ses conseils et de son enthousiasme transmis à la genèse du projet, nous ont accompagnés tout du long de cette manifestation.
C'était un éveilleur, que son rêve continue dans nos mémoires et nos imaginaires.
Écrit par : Maurice Baux | 09/03/2014
Répondre à ce commentairemême si vous avez raison sur le fond la forme n'est pas .
Je suppose qu'il a eu assez de temps entre le moment ou il est revenu de Montauban et ces derniers jours pour prendre les dispositions nécessaires avec sa femme alors Lundi 10 à 15 H nous serons tous, croyants et non croyants pour l'accompagné à sa dernière demeure.
Au fait félicitations pour la photo du musée du Cuzals
Écrit par : erasme | 09/03/2014
Répondre à ce commentaireARTICLE PRETENTIEUX. Et souvent déplacé.
Écrit par : michel duplaix | 10/03/2014
Répondre à ce commentaireIl sait de quoi il parle, question vanité, le Monsieur Duplaix... Il suffit de faire un tour de quelques secondes sur son site...
Écrit par : Kaliaiev | 26/03/2014
Prétentieux? Bien moins me semble-t-il que d'étaler vos médailles en bronze ou argent sur votre site web.
Écrit par : Le sciapode | 10/03/2014
Répondre à ce commentaireOui, Sciapode, bien triste ce départ définitif de Jean François Maurice et nous nous sommes connus tous les trois à Bègles lors de la toute première exposition collective, un bail!
Mais je connaissais déjà J F M, habitant la même commune que lui et votre rappel sommaire de sa biographie a le mérite de ne pas dresser un panégyrique comme cela s' opère souvent en de telles circonstances.
Chacun a essayé de tracer son chemin comme il a pu et ce jour même des proches m' ont confirmé une fin de vie très douloureuse.
Nous avons partagé les mêmes enthousiasmes à l' époque et cela s' est traduit par des options très différentes, lui, vous et moi-même.
La vie réelle nous met quelquefois à vif et l' intransigeance que nous opposons à des compagnons de parcours n' a d' égal que la passion que nous partageons en fait.
Alors le temps en fera son affaire.
Au plaisir de vous lire et de vous rencontrer peut-être?
Bien à vous.
Écrit par : Jean Marie Staive | 11/03/2014
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