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08/01/2015

Assassinat des journalistes de Charlie-Hebdo: comme un marteau-piqueur pour tuer une mouche

      Fallait-il que les dessinateurs et les journalistes de Charlie-Hebdo soient influents et dangereux pour qu'on ait eu besoin de les faire taire à coups de kalachnikov, pourquoi pas une bombe atomique pendant qu'ils y étaient? En les tuant, les assassins ont prouvé leur faiblesse, leur sottise infinie alliée bien sûr à un manque total de sentiment humain. Ils ont prouvé que les dessins, les plaisanteries irréligieuses de leurs victimes leur faisaient peur en les faisant sortir de leurs gonds. Ils leur assurent désormais une publicité encore plus grande.

     Ils ont tué des dessinateurs de presse, des humoristes dont ils ne supportaient pas la liberté de ton. Et parmi eux, un graphiste qui s'était illustré entre autres en éditant chez Arléa des recueils de rébus littéraires, voir un exemple ci-dessous. C'était un artiste et dessinateur de presse plein de talent dont il m'arrivait souvent de feuilleter en librairie les albums plein de charme. Au début de la litanie annonçant les noms des morts les plus illustres, on l'a momentanément oublié. Né en juillet 1941 à Vichy, c'était un collaborateur de Charlie-Hebdo et d'autres organes de presse. Il se trouvait là à cette réunion éditoriale tragique... Les sombres connards illettrés qui l'ont massacré avec ses camarades, le talent, ils ne savent pas ce que ça veut dire et ce que cela pourrait changer dans leur vie de merde. Il s'appelait Honoré. Gageons que sa mort lui assurera une notoriété plus rapide que ce qui serait normalement arrivé au bout de plusieurs décennies, tant dans ce pays, on met de temps à reconnaître le talent lorsqu'il est vivant. Et ce sera une revanche sur son assassinat, ce que bien sûr ses assassins n'avaient pas envisagé dans leur abrutissement sans limite.

Honoré rebus2.gif

Rébus littéraire d'Honoré: "Haie-Loge-deux la-faux-lit" (Eloge de la folie - oui, mais pas celle des fanatiques)

Commentaires

Merci de nous en informer. Honoré était un artiste, quelle tristesse.

Écrit par : frédérique du corail | 08/01/2015

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Artiste ou pas artiste, le résultat est le même, chère Frédérique du Corail. Une pensée aussi pour l'agent d'entretien ou pour le correcteur de "Charlie" Mustapha Ourrad. Cette guerre est une guerre contre tous les esprits libres, contre tous les vrais humains. Avez-vous oublié les filles brûlées vives dans les cités parce qu'elles osaient porter des mini-jupes, ou embrasser un garçon dans la rue? Avez-vous oublié Mohamed Merah? Et l'antisémitisme croissant, le malheureux Ilan Halimi? Et vivez-vous au quotidien les harcèlements des petits caïds de trottoirs? Cette guerre du fascisme religieux contre nous vous paraît éclater aujourd'hui car elle touche symboliquement cette fois ce qui fait notre culture de liberté acquise à force de luttes contre les curés de tous poils, mais ses signes sont présents depuis longtemps. "Charlie hebdo", au sein de la gauche journalistique, était le seul organe de presse à ne pas s'être couché, à ne pas avoir cédé à la bienpensanse de la tolérance pour les intolérants dont "Libé" et "Le Monde" sont les béni oui oui les plus constants avec Besancenot ou Mélenchon, sans même parler des pas de deux entre Le Pen et Dieudonné, de la Manif pour tous avec l'islam intégriste, qui sont bien plus conventionnels.

Écrit par : Grizzly | 08/01/2015

"Charlie hebdo" était un journal athée et c'est l'athéisme et l'apostasie qui ont été frappés. Or, depuis trois jours, on n'entend que les curés, on n'interview que les imams, bien sûr auto-proclamés modérés. Parole doit être donnée aux athées ex-musulmans, seuls capables de montrer une autre voie que celle de la névrose religieuse à la jeunesse issue de l'immigration musulmane. Et hommage soit rendu à Mustapha Ourrad, correcteur kabyle athée et joyeux, lecteur de Nietzsche et de Cossery, qui savait ce qu'il faisait, ce qu'il risquait en travaillant à "Charlie".

Écrit par : Grizzly | 10/01/2015

Je suis assez d'accord avec vous, Grizzly, surtout en ce qui concerne Mustapha Ourrad dont je n'avais jamais entendu parler, ce que je regrette à présent. J'ai lu il y a peu sur le blog du Monde.fr une fable qu'il aimait rapporter, un peu dans le style des historiettes à la Nasr-Eddin Hodja qu'il m'est arrivé de reproduire sur ce blog. Voici l'extrait où cette petite fable, soufie paraît-il, est insérée:
"Autodidacte lettré né en Algérie (où il avait vécu à la dure), dans un village de Kabylie, Mustapha Ourrad, que Marie-Do ressentait comme un “athée soufi”, aimait parler par paraboles, raconte-t-elle. Telle celle-ci : "Deux hommes ont un différend, ils vont alors consulter un sage soufi pour les départager. Le premier expose son cas ; le sage lui dit : “Je te comprends, tu as raison.” Le second expose alors sa vision des choses : “Oui, je te comprends", lui dit le sage,"tu as raison.” Un témoin de la scène vient s'étonner face au sage : “Comment peux-tu dire à chacun qu'il a raison ? Ce n'est pas possible...”, “Tu as raison”, répond le sage."
Ceci dit, sur mon blog, on s'intéresse avant tout à mettre en avant la créativité et la poésie errantes en matière artistique, un peu moins à la critique sociale, question d'inclination et de disponibilité, c'est pourquoi j'avais décidé de focaliser sur Philippe Honoré, un dessinateur tout aussi talentueux que les quatre autres parmi les dessinateurs assassinés qu'au début les media privilégiaient.
Frédérique du Corail avait probablement perçu cette dimension de mon blog, et c'est donc un peu injuste de l'interpeller aussi vivement que vous le faites.
A ce moment-là, il aurait fallu parler de tous ceux qui sont morts dans cette tuerie, comme Michel Renaut qui animait une jeune biennale du carnet de voyage à Clermont-Ferrand et qui se trouvait là par hasard. Et il y a sûrement aussi d'autres choses à dire sur les victimes (toutes juives) de Coulibaly dans l'hypermarché casher de la Porte de Vincennes.

Écrit par : Le sciapode | 10/01/2015

Oui, pour ma part, je ne fais pas de tri entre les victimes de ces chiens : Juifs tués parce que juifs, artistes, balayeurs, correcteurs, et même flics, et flics musulmans encore. Il y a eu toute sorte de gens victimes des idéologies totalitaires du XXe siècle, et il y en a et il y en aura toute sorte de celle qui risque fort de pourrir la vie des hommes du XXIe siècle tout entier. Il y a eu toute sorte de gens qui s'y sont opposés, comme il y aura toute sorte de gens qui s'y opposeront. Mais je comprends parfaitement aussi que votre blog se concentre sur ce qui est sa dimension principale. C'est simplement la phrase de la commentatrice : "Honoré était un artiste, quelle tristesse" que je trouvais un peu - comment dire? - corporatiste. C'était sans doute de sa part une maladresse d'expression (comme votre "toutes juives?" du reste, qui pourrait aussi être mal interprété).

Écrit par : Grizzly | 10/01/2015

En l'occurrence, Coulibaly a choisi une épicerie casher, et a montré qu'il voulait tuer des Juifs avant tout, comme il avait voulu le jour d'avant tuer des flics. Je ne vois pas où serait ma maladresse de langage comme vous dites, Grizzly.
Ce qu'il voulait tuer c'était un fantasme, et il a finalement ôté la vie à quatre êtres à cause d'un délire antisémite.
J'ai enlevé mon point d'interrogation depuis que l'on sait que les victimes étaient bien tous juifs.

Quant à la phrase de Frédérique du Corail, je persiste à penser que vous l'interprétez mal. Le mot artiste sous ses doigts n'avait pas, je crois, de connotation élitiste. Elle regrettait simplement la disparition d'un homme de talent. C'est du moins comme ça que je l'ai compris. Cela ne préjugeait pas de ce que l'on pouvait penser des autres victimes.
Car certes, il semble que les gens qui passaient ce jour-là chez Charlie avaient tous quelque génie.
Il va falloir que l'on se fasse un rattrapage urgent de tous les anciens numéros de Charlie (car personnellement je ne le lisais que fort peu, très rarement).

Écrit par : Le sciapode | 11/01/2015

J'aime beaucoup le titre de cet article d'Elsa Cayat, la psychanalyste paraît-il anarchiste tuée à "Charlie Hebdo", paru en 2007 dans une revue de psychanalyse : « En quoi la fétichisation de la science par la technocratie aboutit-elle à la négation de l'homme et à l'éradication de la pensée ? »

Écrit par : Isabelle Molitor | 10/01/2015

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