17/09/2013
De la lenteur avant toute chose
L'association ABCD invite l'association Portraits pour une exposition où seront confrontées des œuvres d'art contemporain et des créations faisant partie des collections d'art brut d'ABCD. Il y a pas moins de cinq commissaires d'exposition pour cette association Portraits, tandis que Barbara Saforova reste bravement seule commissaire pour ABCD. "De la lenteur avant toute chose", titre et thème de l'expo qui commence à Montreuil-sous-Bois dans les locaux de la galerie ABCD le 29 septembre et se terminera le 16 novembre, invite à réfléchir si la lenteur des processus créatifs (terme qu'affectionne et creuse une des commissaires de l'expo, doctorante à Paris I et conservatrice au musée Picasso, Emilie Bouvard) ne pourrait être interprétée comme un comportement subversif dans un monde dominé par une consommation effrénée et étourdissante des images:
"La vitesse est révolutionnaire. Mais la vitesse peut devenir celle, mécanique et aliénante, de la machine, celle de la ville Babylone, industrieuse, faisant et défaisant les modes à un rythme rapide, effréné et superficiel. Dans un monde où l’artiste se voit imposer une productivité toujours plus soutenue, serait-il possible de penser, comme le sociologue Hartmut Rosa dans Accélération : Une critique sociale du temps (2010), que la modernité, à force d’accélérer, pourrait bien faire du surplace ? Il convient ici de s’intéresser à des processus créatifs qui, dans leur lenteur, impliquent une durée subversive par rapport aux injonctions contemporaines de consommation de l’art et des images, sans toutefois s’inscrire dans un anti-modernisme moralisateur" (extrait du dossier de presse de l'exposition).
Intéressante question qui paraît faire écho à des préoccupations plus anciennes d'un Paul Virilio, si je peux me permettre de citer ici un philosophe que je n'ai jamais lu mais seulement très effleuré, qui plus est en diagonale, aux étalages des librairies... La lenteur du processus créatif, le temps pris à confectionner minutieusement divers travaux sans se préoccuper des contingences extérieures, n'est-ce pas la même chose qui est pointée ici en creux que l'inactualité radicale d'une certaine création, le temps vécu en décalage absolu vis-à-vis du temps du travail, de la consommation, de l'obéissance aux clichés et aux modes? Un éloge de la désobéissance et du grand écart vis-à-vis de la société du spectacle?
Les commissaires de l'expo en question croient voir un éloge de la lenteur chez des artistes et créateurs qui travaillent avec minutie sans compter leur temps, mais apparemment assez hétéroclites si j'en juge par rapport aux quelques images semées dans le dossier de presse. On y retrouve la dessinatrice Sophie Gaucher dont j'avais proposé à la sagacité de mes lecteurs les dessins en leur demandant si cela pouvait être de l'art brut. Il paraît que c'est ma note qui aurait donné l'idée à Emilie Bouvard et ses amies de la confronter à des œuvres dites d'art brut, c'est décidément trop d'honneur. Mais je rappellerai ici que mes lecteurs dans leurs commentaires l'identifièrent sans hésiter comme une dessinatrice contemporaine...
Voici la liste des exposants: ACM, Arnaud Aimé, Anaïs Albar, Clément Bagot, Koumei Bekki, Jérémie Bennequin, Arnaud Bergeret, Gaëlle Chotard, Mamadou Cissé, Florian Cochet, Samuel Coisne, Isabelle Ferreira, Sophie Gaucher, Hodinos, Rieko Koga, Kunizo Matsumoto, Dan Miller, Mari Minato, Edmund Monsiel, Hélène Moreau, Benoît Pype, Daniel Rodriguez Caballero, Chiyuki Sakagami, Ikuyo Sakamoto, Judith Scott, Claire Tabouret, Jeanne Tripier, Najah Zarbout.
Je n'en connais pas beaucoup là-dedans, si ce n'est les créateurs d'art brut bien connus, ACM et ses maquettes de ruines rongées faites en agrégat de composants électroniques, Emile Josome Hodinos (qui personnellement me barbe avec ses litanies d'inscriptions et de médailles), Dan Miller (un as du gribouillage, une sorte de Cy Twombly spontané et plus brouillon), Judith Scott (qui avec ses cocons de fils, c'est sûr, était complètement barrée loin de nos préoccupations de grands aliénés de la survie), Edmund Monsiel (prolifération vaporeuse de visages) ou Jeanne Tripier (et ses broderies de bénédictine). Les autres noms ne me disent rien. Tout juste puis-je dire, à regarder les images du dossier de presse que je serais curieux de voir les œuvres de Benoît Pype, avec ses fonds de poche dont il fait des petites sculptures ce qui me rappelle une démarche plutôt dalinienne (de sa grande époque surréaliste, pas celle d'Avida Dollars). Ah si, Mamadou Cissé, je vois ce que c'est, on en a déjà vu à la Fondation Cartier, des villes ultra décoratives vues de haut comme des circuits imprimés filtrés par des lunettes psychédéliques, j'avais assez peu apprécié, je trouvais que cela démarquait en moins bien les maquettes de villes futuristes du congolais Bodys Isek Kingelez précédemment exposées dans la même Fondation Cartier...
00:13 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art moderne ou contemporain acceptable, Art singulier, Confrontations, Galeries, musées ou maisons de vente bien inspirés | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : abcd art brut, association portraits, émilie bouvard, art brut, dessin contemporain, sophie gaucher, acm, edmund monsiel, de la lenteur avant toute chose, benoît pype, sculptures de fonds de poche, mamadou cissé, fondation cartier | Imprimer
04/02/2013
Une Cecilia Gimenez complètement "destroy"
Bon, voici, en écho aux derniers commentaires sur Cecilia Gimenez, la "profanatrice" involontaire de Borja en Espagne, le portrait que le peintre Eric Lefeuvre lui a consacré (visible sur son site). Je la trouve ainsi complètement destroy la Cecilia. Un portrait en vieille dingue prête à exploser. Pas sûr que cela lui plairait...
Eric Lefeuvre, Retrato de Cecilia Gimenez, 2013
22:55 Publié dans Art moderne ou contemporain acceptable | Lien permanent | Commentaires (17) | Tags : cecilia gimenez, éric lefeuvre, dessin contemporain, borja, destroy | Imprimer
04/09/2012
Katuchevski dans le Marais
A signaler pour ceux qui suivent le feuilleton de la création katuchevskienne...
Expo du jeudi 6 au 29 septembre, Marcel Katuchevski et 3 autres artistes, Galerie Linz, 40 rue Quincampoix, Paris IVe, voir le site www.galerie-linz.com
09:33 Publié dans Art moderne ou contemporain acceptable, Art singulier | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : marcel katuchevski, galerie linz, dessin contemporain, art singulier | Imprimer
22/06/2012
Est-ce de l'art brut? Ben non... C'est de Sophie Gaucher
J'ai été long à la détente, il est vrai, que me le pardonne David... J'avais même carrément oublié ma note ancienne, "Est-ce de l'art brut?", où je vous avais proposé des dessins sans référence (comme celui ci-dessous). C'est sans doute qu'étonné devant la sagacité des commentateurs, qui avaient pressenti une dessinatrice contemporaine peu ou prou, j'avais eu envie de passer à autre chose. Il n'en reste pas moins que je vous devais le nom de l'artiste, à vous et à elle aussi: Sophie Gaucher, dont j'avais trouvé les dessins dans la revue Papier Gâché, une revue graphique d'images sans paroles (Cosmo, avec sa revue Collection, n'était pas loin). Une jeune artiste graphique donc, avec une écriture originale qui de ce fait méritait d'être confrontée à l'hypothèse de l'art brut. Mais mes commentateurs aux yeux de lynx ne se sont pas laissés entraîner vers de fausses pistes. Félicitations à eux. Quant à l'hypothèse, David, d'une illustratrice japonaise... Pourquoi pas? Mais Sophie ignore sûrement encore qu'elle est un peu nippone. Ne pas connaître le processus de production n'a pas gêné en tout cas l'identification, à ce que j'ai constaté.
Sophie Gaucher, dessin
00:14 Publié dans Art moderne ou contemporain acceptable | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : dessin contemporain, sophie gaucher, papier gâché | Imprimer