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20/11/2009

Gustave C., bien inspiré?

     Les sculptures et les dessins de Gustave C., ça me laisse parfois sur ma faim. Ce n'est pas parce que ce monsieur a eu bien des malheurs dans sa vie (une méningite, puis un patron -autre maladie...-  qui profitait de sa faiblesse pour lui interdire de dessiner ou de sculpter, voire le frapper parce qu'il continuait, et puis quoi encore, les patrons faudrait parfois leur faire un sort), ce n'est pas parce qu'il n'a pas été gâté jusque là que son inspiration est nécessairement toujours au rendez-vous. On a parfois l'impression que le récit de sa vie devrait servir à faire oublier que les oeuvres sont parfois un peu trop gentilles. La situation de santé de l'auteur musèlerait ainsi toute velléité de critique. Devant une telle faiblesse, on n'ose pas faire la fine bouche. Zut! Ce n'est pas respecter le créateur que de systématiquement l'encenser par charité. 

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Gustave C., photo Michel Leroux, extraite de l'article de Pascal Trégan, "L'enfance de l'art, Gustave C(...)", à paraître dans Maine-Découvertes du mois de décembre 2009
 
   

    Il arrive cependant que certains de ses dessins aux crayons de couleur (les délicieux crayons de couleur) -dessins qui me paraissent souvent préférables à ses sculptures, ces dernières étant de vagues totems inspirés de formes africaines - atteignent à une singularité qui montre que ce créateur pourrait nous donner plus, dans une inspiration des formes vraiment étrange.

Gustave CahoreauDessinMaine Découvertes.jpg
Dessin, représentant le pape Jean-Paul II, dans le même numéro de Maine-Découvertes à paraître

    Un article du magazine Maine-Découvertes, dû à Pascal Trégan pour le texte et à Gilles Kervella pour les illustrations, va paraître à son sujet (il est prévu pour le prochain mois de décembre, vers le 10). Il donne plusieurs éléments pour mieux connaître la biographie de ce monsieur désormais âgé, dont l'oeuvre a déjà été acquise par différentes collections dont celle de l'Aracine suite à une visite à Alain Lacoste. Un dessin (voir ci-dessus) publié dans le magazine attire l'attention par son originalité, en dépit de la simplicité de son tracé (dans ce même contraste qui nous plaît tant chez un Chaissac par exemple)... Dommage que le dessin représente, à ce que répète de plus complaisamment l'auteur de l'article, "le Saint-Père"... Malsain père, oui. Le côté lénifiant de la foi chrétienne, qui tend à niveler les caractères au sein d'une vision du monde artificielle et mièvre, est souvent cause de l'affadissement de l'expression chez les créateurs qui la professent. Après tout ce qu'avait déjà subi Monsieur C., pourquoi a-t-il fallu qu'on lui inflige Dieu en sus?

GustaveCahoreau-coll-perso.jpg
Gustave C., Bonhomme au chapeau, coll. B. M. 

 

Commentaires

Curieux ces sinogrammes écrits sur le chapeau: si certains sont inventés et d'autres reproduits, tous sont écrits à l'envers, c'est à dire la tête en bas. Je ne sais qu'en conclure si ce n'est qu'il a dû retourner la feuille pour exécuter cette partie du dessin. A noter que le caractère qui signifie "lune" apparait à trois reprises et celui qui signifie "bois" à deux, sans que j'en tire là non plus aucune conclusion sur la signification réelle du dessin.

Écrit par : RR | 21/11/2009

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Eh oui, cher Sciapode, "Maine découvertes", ça n'est pas vraiment "La Libre Pensée". Le lectorat des départements de la Mayenne ou de la Sarthe est ce qu'il est... Quoi qu'il en soit, amusant ce Jean-Paul II qui, sous sa mitre, affiche le strabisme divergent de Sartre. Ou alors c'est qu'il est censé avoir un oeil sur tout. Mais je préfère l'autre, quoi qu'il en soit. Et ces idéogrammes, effectivement, sont intrigants.

Écrit par : Régis Gayraud | 21/11/2009

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Les signes chinois inscrits sur ce chapeau (il en a fait toute une série semble-t-il) sont tracés par un analphabète, Gustave C. ne sachant ni lire ni écrire en français déjà. Alors vous pensez bien pour ce qui est du chinois... Il a dû copier au hasard sur une inscription placée à l'envers. On m'a signalé que cette série a commencé suite à un thé pris chez une amie qui l'avait invité. Les caractères chinois étaient sur le paquet (du thé vert peut-être?) et lui ont plu...
Du coup, ce genre d'ignorance qui produit une oeuvre peut ressembler à une énigme qu'il faudrait déchiffrer...

Écrit par : Le sciapode | 23/11/2009

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Bonjour,
peut-on dire que l'artiste met en avant sa vie pour faire valoir son oeuvre?
Gustave C(...) produit quotidiennement sans se préoccuper de l'avenir de ses oeuvres.
Il y a donc une indépendance entre ce qu'il est et ce qu'il fait. Il a trouvé un moyen d'expression et n'a pas besoin de renouveler sa palette et ses thèmes. Cette redondance est sa signature. Ces dessins sont intelligemment équilibrés, la pauvreté dont vous parlez relève d'une forme de pureté. Contrairement à beaucoup de peintres qui comblent votre appétit en vous gavant comme une oie, il évite la surcharge et le remplissage. Il a créé sa propre mythologie, son écriture en s'appuyant sur ses connaissances (négligeables par rapport aux vôtres). Il s'est inspiré de l'art africain et a trouvé une autre voie que le cubisme. L'omerta fictive dont vous parlez ne vous oblige pas d'aimer son oeuvre et de ne pas la critiquer en vous basant sur des propos plus cohérents. Selon l'article, C(...) est victime d'une crise mystique!! Permettez-moi de le remettre dans son contexte. Il vit modestement dans une maison de retraite et y dessine. Ce monsieur n'a pas la possibilité de vous répondre ou de snober cet article.

Cordialement Antoine

Écrit par : antoine | 27/11/2009

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Figurez-vous, cher M. Antoine, que je suis au courant que Monsieur C. n'aura pas la possibilité, ou ne sera pas en posture, de me répondre, "ou de snober" cette note.
Cette dernière s'adresse davantage aux médiateurs bien entendu. Qui voudraient nous faire passer la petite monnaie de l'art brut pour de l'or pur. En masquant effectivement, parfois, l'oeuvre par la vie (ce ne sont pas les "artistes" -en l'occurrence, je préfère dire "les créateurs"- qui font ça, mais les médiateurs, auxquels vous paraissez vouloir vous joindre du reste).
Il me paraissait tout de même cohérent de les rappeler à plus de relativité.
"L'autre voie" que C. aurait trouvée d'après l'art africain... Vous y croyez vraiment? Et vous mettez cela en parallèle avec la variante cubiste...! Vous n'y allez pas de main morte. C'est comme pour "l'intelligemment équilibré": vous bâtissez sur des nuages. Et joli, le tour de passe-passe, pauvreté= pureté... A ce compte-là, on nous vendra le moindre navet pour du caviar.
Si je comprends bien, ma petite hypothèse sur la foi du créateur qui pourrait lui couper les ailes (ce que vous travestissez en "crise mystique") ne vous a pas convaincu? C'est plus difficile à admettre, j'en conviens. Ca n'est qu'une hypothèse (bâtie, je l'avoue, pour taquiner un chouïa le lectorat mayennais...). Après tout, Dieu ou la méningite, ça pourrait être tout comme...

PS: Que viennent faire ici les artistes "qui font dans la surcharge", pourquoi les évoquer? N'aurions-nous donc guère le choix entre ce caricatural gavage et "la pureté intelligemment équilibrée", en réalité plate fadasserie? Dramatique système binaire, pauvre, pauvre fin de règne de l'art, alors...
PPS: Au fait, dans le deuxième paragraphe de votre commentaire, ce n'est pas "interdépendance" qu'il faut lire?

Écrit par : Le sciapode | 28/11/2009

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