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08/10/2016

Marjolaine Larrivé, l'Aubrey Beardsley de la savonnette sculptée

      Ça m'énervait, je n'arrivais pas à retrouver le nom de ce sculpteur sur savon, particulièrement brut dans la facture, que j'avais découvert à une exposition à la Halle St-Pierre voici quelques années... Et puis ça m'est revenu... Jeffrey Hill, un Américain de New-York, taulard, qui, pour s'occuper et exprimer ses désirs d'homme enfermé avait ciselé des savons avec un incontestable sens de la stylisation et de l'ambivalence des formes, réussissant des scènes érotiques réalistes (le savon implique, peut-être avant tout, des rêves d'amour, par l'évocation des soins corporels?) qui simultanément présentaient une géométrisation à la limite du pictogramme et du symbole.

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Jeffrey Hill, la même sculpture sur savon, vue sous deux angles différents, représentant une scène d'amour à trois ; ph. extraite de la revue Hey! n°6, 2011, se référant à l'exposition des œuvres de Jeffrey Hill dans l'exposition, la même année, à la Halle Saint-Pierre, "Sous le vent de l'art brut: la collection Charlotte Zander"

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Marjolaine Larrivé, Impalas (qui sont des antilopes ; à noter que seuls les mâles ont des cornes en forme de lyre chez les impalas, paraît-il, mais ici, l'artiste semble avoir fait exprès de renverser la proposition à l'occasion de ses créatures hybrides, à la fois humaines et animales) ; carton d'invitation à l'exposition "Secrètes savonnettes" à la galerie Dettinger du 8 octobre au 29 octobre 2016 

 

     Je cherchais à retrouver ce nom et cette occurrence, parce qu'en passant récemment à la galerie Dettinger, place Gailleton, à Lyon, son animateur me parla de sa prochaine exposition consacrée à l'œuvre de "Secrètes savonnettes", alias Marjolaine Larrivé. Rien que son prénom, déjà, fleurait bon le matériau employé. Je me dis, logiquement, qu'il y avait un dossier sur le savon sculpté à ouvrir sur ce blog. Comme me le confia l'artiste, une fois celle-ci contactée, la sculpture sur savonnette existe depuis fort longtemps, depuis au moins le XIXe siècle lorsque des concours de sculpture sur des matériaux insolites (savons, mais aussi marrons...) étaient organisés auprès de la population , sans doute par des magazines du style le Magasin pittoresque, Lectures pour tous, ou La Nature.

impala transparent gris souris.jpg

Marjolaine Larrivé, les mêmes impalas, éclairés par derrière...

 

      Cette artiste, basée sur Lyon, utilise le savon dans un style plus baroque et moins brut que Jeffrey Hill, elle joue par exemple des transparences en mettant une lumière derrière ses œuvres. Elle avoue aussi être grandement admiratrice des illustrateurs fin XIXe ou début XXe (Beardsley? Edmond Dulac? Pour Beardsley, c'est particulièrement vérifié dans certaines affiches qu'il lui arrive également de réaliser, car Mlle Larrivé est illustratrice à côté de ses savonnettes). La mollesse et la tendreté du matériau incline probablement le sculpteur à la virtuosité et à une précision bénédictine digne des chefs-d'œuvre de compagnons.

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Marjolaine Larrivé, Daphné en lauriers, image en provenance du site web de l'artiste ; cette dernière apporte un soin particulier à la mise en valeur de ses savonnettes ciselées en les incluant dans des boîtes

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Marjolaine Larrivé, Silver III, photo extraite du site web de l'artiste (comme la précédente)

 

      Et puis, pour prolonger un petit peu plus loin la connaissance de cette jeune artiste lyonnaise, et l'entendre parler de la "douceur lyonnaise" et de sa difficulté, dans les débuts, de se dire "plasticienne", difficulté que je partage avec elle, je dois dire, même à mon âge bien plus élevé... on regardera la vidéo ci-dessous:


Vidéo, source YouTube, auteur: Résonance Chronique ; au début légère introduction à propos de l'exposition d'œuvres de Marjolaine Larrivé à la Demeure du Chaos... La musique est grandiloquente, mais ça ne dure pas très longtemps, l'interview de l'artiste dans son atelier suit très vite...

 

L'exposition des savonnettes de Marjolaine Larrivé s'accompagne d'une autre consacrée  à des dessins de Béatrice Elso (même durée d'exposition). A signaler aussi que dans le dernier numéro de Hey! (n°27 je crois), paru très récemment, le travail de Marjolaine Larrivé a fait lui aussi l'objet d'une note, comme dans le cas de Jeffrey Hill, cinq ans plus tôt, ce qui a ravi l'artiste, m'at-elle confié...

Commentaires

Mon cœur chavire...

Écrit par : Atarte | 09/10/2016

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Dans Dillinger, le film de John Milius sorti en 1973, le célèbre gangster (interprété par le fameux Warren Oates) s'évade d'un pénitencier grâce à un revolver factice qu'il sculpte dans un savon et qu'il teinte avec du cirage. Je ne sais pas si ce fait est historique, ou s'il fait partie de la légende...

Écrit par : Darnish | 09/10/2016

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Dillinger, par conséquent, est à l'intersection de deux dossiers, l'art et le savon d'un côté, l'art et les flingues de l'autre. Jeffrey Hill et André Robillard réunis en Dillinger...

Écrit par : Le sciapode | 09/10/2016

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Cette très sympathique demoiselle fait revivre avec la plus grande fraîcheur l'art antique de l'intaille et du camée, mais au lieu de ciseler une pierre dure, elle a choisi d'éprouver la sensuelle tendreté du savon. Il y a un nom pour cette activité millénaire, c'est la glyptique, et au lieu de se voir affubler de l'épithète passe-partout de plasticienne, elle mérite qu'on invente plus elle le titre plus exact de glypticienne.

Écrit par : L'aigre de mots | 12/10/2016

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Vous n'avez pas l'impression, parfois, Monsieur l'Aigre, en nous ramenant votre culture, de glisser vers la pédanterie? Certes, le mot glyptique - dont la phonétique résonne comme un tressautement de grenouille flappie - est amusant, mais z-enfin, on voit bien que vous voulez nous en mettre plein la vue avec votre science...

Écrit par : Le sciapode | 13/10/2016

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Moi, cela me fait penser aussi aux gypseries que l’on trouve du côté de Riez-la-Romaine, aux linteaux des antiques demeures.

Écrit par : Atarte | 13/10/2016

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Les sculptures de savon font aussi penser à celles d'ivoire, par la couleur, la finesse des formes, la transparence de la matière et sans doute les formats.

Écrit par : Darnish | 14/10/2016

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...Et aux "netsuke" japonais aussi pendant qu'on y est, quoique ceux-ci soient nettement plus poussés du côté du détail. Le savon paraît empêcher quelque peu la trop grande finesse, les formes effilées, sans doute par risque d'effritement? Plutôt que de "finesse" des formes, Darnish, mieux vaudrait-il parler alors de souplesse des formes?

Écrit par : Le sciapode | 14/10/2016

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Oui, "souplesse" des formes c'est bien, mais "finesse" aussi tout de même dans les travaux de Marjolaine Larrivé. Pour moi, son travail intitulé Daphné en Lauriers est plein de finesse... et de souplesse.

Écrit par : Darnish | 14/10/2016

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