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22/05/2008

XIes Rencontres autour de l'Art Singulier à Nice

 Affichette des XIes rencontres autour de l'Art singulier à Nice le 7 juin 2008.jpg

 

    J'ai reçu enfin le carton annonçant la nouvelle programmation des excellentes Rencontres autour de l'Art Singulier qui se tiennent sous l'égide de l'association Hors-Champ, animée entre autres par Pierre-Jean Wurtz, une fois par an, généralement à la fin du mois de mai, à Nice, dans l'auditorium du Musée d'Art Moderne et d'Art contemporain. La prochaine rencontre se tiendra donc le samedi 7 juin de 10h à 17h30. Cela fait plusieurs années que cette association s'ingénie à réunir autour de l'art singulier -le terme englobe à leurs yeux tout ce qui relève de l'art brut, des environnements spontanés, voire de l'art naïf, et à l'étranger de l'art outsider- cinéastes, créateurs et amateurs de ces formes d'art marginal dans un climat qui se veut cordial. Ces rencontres furent souvent l'occasion de fructueux échanges de vues entre amateurs divers, de transmissions d'information qui se passent aussi bien dans le cadre de la journée de programmation qu'en dehors, dans les restaurants ou cafés du vieux Nice.

Carton d'invitation aux Xes Rencontres autour de l'Art Singulier à Nice en 2007.JPG
Carton d'invitation aux 10es Rencontres de 2007

    Cette année, on pourra découvrir des films sur Ni Tanjung (cette Balinaise dont on parle dans le dernier fascicule de la Collection de l'Art Brut à Lausanne), sur Joseph Donadello (dont le petit fanzine Zon'Art de Denis Lavaud et Bernard Dattas avait déjà parlé), sur Pya Hug (intrigante créatrice suisse dans un film de Mario Del Curto). Ainsi qu'un film de Guy Brunet (un extrait où ce grand candide raconte à sa façon dans un cinéma documentaire bricolé à la maison l'histoire du festival de Cannes... En présence d'acteurs ou de metteurs en scène célèbres réalisés en silhouettes peintes, voir ma note du 1er mai 08). A voir également, chaudement recommandé par Pierre-Jean Wurtz, un film d'Enrico Ranzanici sur un collecteur de galets de rivière, Luigi Lineri, qui les choisirait pour leurs formes parlantes -ça me rappelle Mme Bassieux à Dieulefit dans la Drôme... Pour le programme complet, voir les photos que j'insère à la suite.

Programme (contenant quelques trucages) des XIes Rencontres autour de l'Art Singulier, association Hors-Champ, Nice 2008.jpg
Programme des XIes Rencontres du 7 juin 2008 (contenant quelques trucages)

    L'association a chaque année la lourde tâche de trouver des subventions pour la réalisation de cette journée et il faut les féliciter d'y arriver depuis onze ans. Une parenthèse ici cependant: est-ce parce qu'ils sont trop obsédés par ces sponsors à dénicher qu'ils finissent par oublier de remercier les amis et les simples particuliers, qui, comme votre serviteur, leur ont proposé des idées de films à passer? Ainsi en va-t-il cette année du film de Jean Painlevé sur le créateur populaire danois Axel Henrichsen que j'avais proposé il y a quelque temps à Pierre-Jean Wurtz (voir la note du 17 février 2008 que j'ai consacrée sur ce blog à l'édition récente en DVD de ce film rare). Comme personne ne songera à opérer cette précision (dont j'ai la faiblesse de penser qu'au lieu de servir ma gloire, elle sert surtout à informer le public sur qui fait quoi), j'ai cru bon de l'ajouter (merci Photoshop) sur le libellé du programme de cette onzième journée niçoise...

détail du programme Hors-Champ 2008 comportant un rajout par nos soins.jpg
Détail du programme (comportant un ajout)

   Je n'en suis d'ailleurs pas resté là, puisque je me suis également amusé à "rectifier" sur ce programme le nom d'un des participants à cette journée, que je ne saurais appeler autrement que "La concierge de l'art brut" depuis qu'il fait circuler sur le net des "mémoires" (au reste assez ridicules) où il me prête des propos mensongers (courts certes mais mensongers et rapportés) dans le plus pur style délateur ou ragots de chiottes (voir le site de la galerie La sardine collée au mur), propos que j'aurais tenus sur des amis à lui. Belle attitude de concierge (de plus chez quelqu'un qui se prétend libertaire...). En conséquence, si je me dois de citer les travaux plus intéressants auxquels ce triste sire participe, lorsqu'il est infiniment mieux inspiré, comme la parution à l'égide de la revue Gazogène qu'il édite du côté de Cahors de numéros consacrés à l'extraordinaire collection de cartes postales consacrées aux environnements spontanés et autres de Jean-Michel Chesné, ou sa participation aux côtés de Chesné à ce XIe festival où ils présenteront un certain nombre d'images fascinantes, je ne saurais le citer autrement que sous ce grotesque vocable (je n'ai rien contre les concierges, sauf quand elles s'avisent de faire les pipelettes ce qui a été souvent leur vocation comme on sait).

en présence de Jean-Michel Chesné et de la concierge de l'art brut (directeur de la revue Gazogène).jpg
Détail du programme (comportant un ajout)

    J'en reviens à ces Rencontres 2008... Les programmations sont conçues aux dires mêmes de leur principal animateur, Pierre-Jean Wurtz, dans la perspective du documentaire avant tout. Point de fictions dans ce festival (et pourtant, il y aurait de quoi faire, car le cinéma s'est emparé plusieurs fois des biographies de créateurs de l'art brut ou de l'art naïf, comme Aloïse, Ligabue, Pirosmanachvili, récemment Hélène Smith...). Les responsables de Hors-Champ  se sont donnés comme règle de choisir des documentaires, et parmi ceux-ci, en priorité les films montrant les créateurs vivants au milieu de leurs oeuvres, les commentant le cas échéant (ce qui explique donc, qu'ils aient dés lors écarté les fictions). La durée des films aussi compte dans la composition de la programmation (et les fictions sont des longs-métrages la plupart du temps). Ceci étant établi, on ne peut que constater, au vu des programmations des onze années précédentes, l'étendue et la richesse du (hors-) champ "art brut et cinéma documentaire". Conscients du fait que l'information a été jusqu'ici par trop confidentielle sur l'ensemble des films montrés à Nice, les animateurs de cette sympathique association ont mis en chantier la publication d'un livre qui devrait réunir toute l'information souhaitable sur les créateurs présentés depuis onze ans dans le cadre de leurs festivals. On devrait y retrouver par la même occasion nombre d'acteurs de la médiation de ces créateurs. L'ouvrage serait prévu pour cet automne, à ce que je crois savoir...

 

01/05/2008

Guy Brunet, le Cecil B. De Mille de Decazeville, un exemple d'"art modeste"

    En mai 2004, j'eus la surprise de découvrir les affiches de cinéma hollywoodien repeintes par Guy Brunet, réfractées à travers le prisme de son imaginaire passionné. Les partisans de l'art modeste l'avaient bien exposé, notamment à Paris à la galerie Arts Factory (à son ancienne adresse de la rue d'Orsel à Montmartre), mais je l'avais manqué.

Guy Brunet, affiches de cinéma exposée au Musée d'art naïf de Nice dans le cadre des 7èmes Rencontres autour de l'Art singulier en 2005.jpg

    Tandis qu'en mai 2004, ce fut chose faite de façon amusante -j'étais venu assister à la programmation cinématographique toujours pleine de surprises, telle que la concoctent chaque année depuis dix ans Pierre-Jean Würtz et l'Association Hors-Champ. En 2004, c'était les "Septièmes rencontres autour de l'Art Singulier" qui se tenaient comme à l'habitude dans l'auditorium du Musée d'Art Moderne de Nice (cette année, les rencontres seront les onzièmes et sont prévues pour le samedi 7 juin, mais j'y reviendrai). Je présentais à cette occasion mes propres films sur des environnements que j'avais filmés de 1981 à 1992 en Super 8, en cinéaste amateur adapté à son sujet, avec un projecteur installé en plein milieu de l'auditorium que j'actionnais moi-même tout en commentant les films... Au cours de cette même journée, on passa aussi un film  sur Guy Brunet, dû à Philippe Macary et Jean-Marc Pennet (12 minutes). L'"artiste" avait suivi le film qui lui était consacré, accompagnant les réalisateurs, comme c'est souvent l'usage à Nice. Il avait pour l'occasion amené tout un lot de ses "affiches" peintes qu'il se mit à étaler sur l'estrade de l'auditorium dans une sorte d'exposition sauvage. Voici l'une des affiches qui fut acquise à cette occasion par un collectionneur parisien: "Fanfan la Tulipe"...Guy Brunet, affiche peinte d'après Fanfan la Tulipe, coll privée Paris, photo B.Montpied, 2007.jpg On comparera avec une affiche de l'époque et on notera les similitudes et les différences, celles-ci plus nombreuses que celles-là.Affiche originale du film de Christian-Jaque.jpg 

   Cette affiche n'est, cela dit, pas tout à fait représentative de l'ensemble de la production "affichiste" de Brunet, qui est un passionné du Hollywood de la grande époque. Ses affiches, véritables recréations, vont plutôt vers le cinéma américain. On put en voir d'autres en 2005, exposées au Musée International d'Art Naïf Anatole Jakovsky à Nice, dans le cadre d'une exposition organisée toujours par Hors-Champ à côté de sa programmation annuelle de chaque fin de mai (se reporter à la première image placée au début de cette note).

Guy Brunet, boîte-affiche-reliquaire consacrée à Un Américain à Paris, expo Rencontres autour de l'Art Singulier au MIAN de Nice, 2005, photo B.Montpied.jpg

 

    Mais notre héros ne s'arrête pas là... Guy Brunet peuple sa petite maison de Viviez, dans le bassin de Decazeville, d'innombrables silhouettes peintes sur carton qui représentent les comédiens, les producteurs, les metteurs en scène, les personnages du cinéma hollywoodien. Guy Brunet, silhouettes peintes de personnalités du cinéma hollywoodien, Rencontres autour de l'Art Singulier au MIAN de Nice, 2005.jpg Depuis peu, il est aussi passé aux vedettes de la télévision. Et il fait des réalisations aussi, des scénarii qui semblent des réécritures de films connus dont il modifie la fin lorsque l'originale ne lui plaît pas. Il paraît aussi procéder par montage de films célèbres en incorporant des scènes où il se filme commentant l'histoire du cinéma qui lui est cher avec une voix qui ressemble à celle de Frédéric Mitterand (la voix traînante de ce dernier, presque soporifique, lorsqu'il se veut commentateur distingué pour cinéphiles). Il faut bien entendu noter que Guy Brunet avait des parents qui tenaient un cinéma dans le Tarn (renseignement tiré du catalogue d'exposition "Le monde rêvé de Guy Brunet" à l'Espace Antonin Artaud de Rodez du 5 au 30 mars 2008).

Guy Brunet, boîte L'Age d'Or du Western, exposé à Nice, rencontres autour de l'Art singulier, 2005, photo B.Montpied.jpg

 Il a donc baigné tout enfant dans la marmite de la vie rêvée sur écran et n'en est jamais sorti. Les figures de Hollywood lui servant manifestement de véritables compagnons, plus solides à ses yeux peut-être que ceux qu'il pourrait avoir dans la vie réelle? La question se pose.

              Guy Brunet, silhouette peinte sur carton de Dracula, photo B.Montpied 2005 au MIAN de Nice.jpg           Dracula, joué par Bela Lugosi, peut-être la source de Guy Brunet?.jpg
Couverture du catalogue de l'expo Le Monde Rêvé de Guy Brunet, mars 2008, Espace Antonin Artaud,Rodez.jpg

    Guy Brunet se plonge toujours plus profond semble-t-il au fil des années dans la vie rêvée des anges, celle des acteurs qui ont remplacé les saints de jadis. Les tables tournantes ont été évincées pour l'occasion, le dialogue a été directement établi avec d'autres morts, plus proches et plus visibles, les dieux de la pellicule.

Guy Brunet, L'Age d'Or du Policier, expo Rencontres autour de l'Art Singulier, MIAN de Nice, 2005, photo B.Montpied.jpg

    Son travail se classe à la croisée des étiquettes, de l'art naïf, de l'art brut et plus adéquatement peut-être, de l'art modeste d'Hervé Di Rosa qui l'exposa dans son Musée éponyme à Sète (ce fut du reste, semble-t-il, la première exposition de Guy Brunet). Le terme d'art modeste sert généralement à désigner les productions d'art populaire contemporain, notamment tout ce qui est manufacturé, d'usage populaire, et imprégné de références à la culture artistique et médiatique de masse. L'art modeste, ce serait aussi bien le kitsch, sans le sens péjoratif de mauvais goût. Hervé Di Rosa a récemment publié un gros livre sur la question pour faire le point semble-t-il (L'Art Modeste, éditions Hoëbeke, Paris, 2007, avec l'aide de plusieurs photographes dont Francis David, Pierre Schwartz et Thierry Secrétan). Il englobe sous son terme de vastes territoires de production, aussi bien les épouvantails que les peintures de camions, les décors de boîtes de sardines que les espaces accumulatifs d'inspirés du bord des routes (voir les photos inédites de Virgili, de Marcel Landreau, et surtout de Jeanne Devidal à Dinard dans ce livre), les dessinateurs à la craie sur les trottoirs que les pochettes de disque, les portraits-robots que les enseignes publicitaires insolites, les cercueils imagés du Ghana que l'art des maquettes et des modèles réduits, les tatouages contemporains que les sculptures gastronomiques, etc., etc. On se reportera avec fruit à cet ouvrage fort instructif quant aux questions de délimitation des différentes possibilités de classification de la créativité populaire.

Hervé Di Rosa, couverture de son livre paru chez Hoëbeke en 2007.jpg
Couverture du livre d'Hervé Di Rosa.
(Qu'on me permette de faire remarquer au passage que si l'art est modeste, le corps des caractères du nom de son inventeur ne l'est pas sur cette couverture tout au moins...)

Ci-dessous, extraite du site du MIAM (Musée International d'Art Modeste, à Sète), voici la date exacte de l'expo de Guy Brunet telle qu'elle se tint dans ce lieu. On notera le paralléle tout à fait judicieux établi par les organisateurs de l'expo avec les affiches du cinéma ghanéen populaire (plutôt des films d'horreur de série Z), affiches peintes à la main tout à fait étonnantes (voir à ce sujet le livre Hollywoodoo, incredibles movie posters du Ghana, avec une préface de Pascal Saumade, produit par le Dernier Cri, Marseille, janvier 2003): 

   


Cinémodeste,

il était une fois de Broadway

à Accra

15 septembre - 1er décembre 2002

Le MIAM ouvre son département Cinémodeste

et présente pour la première fois en France une

centaine d'affiches de cinéma peintes par des

artistes ghanéens et l'univers de Guy Brunet,

passionné du 7ème art qu'il raconte et peint

inlassablement...