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2019, l'année des dialogues de sourds?

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D'après un tableau de Joseph Donadello, sans titre, peinture industrielle sur panneau de bois, 2003, ph. et Coll. Bruno Montpied.

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Et Escale Nomad vient refaire son tour de piste...

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      "Small is beautiful"... and is less expensive ?, serais-je tenté d'ajouter. Est-ce la motivation de départ de Philippe Saada, luttant contre la vie chère et les chardons dans les poches? Toujours est-il que le voici qui s'entête, revenant dans la galerie l'Œil bleu, qu'il loue rue Notre-Dame-de-Nazareth, près de la République, à Paris dans le IIIe arrondissement, pour nous présenter du 22 novembre au 4 décembre prochains, un nouveau lot de bruts glanés ici et là, notamment en Autriche, à la Maison des Artistes de Gugging. Comme on le voit en message subliminal sur le flyer de son expo ci-dessus, où l'on reconnaît une peinture de l'extraordinaire August Walla, le féru de Walhalla...

      On trouvera ainsi dans "Small is beautiful" des œuvres de créateurs, par ailleurs patients de ce foyer artistique fondé par le psychiatre Léo Navratil, et poursuivi par Johann Feilacher, etc., comme Johann Fisher, Ernst Herbeck, Franz Kernbeis, Heinrich Reisenbauer, Karoline Rosskopf, Gunther Schutzenhofer, Jurgen Tauscher, Oswald Tschirtner, et donc August Walla.

 

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Un exemple des producctions de Mohammed Babahoum (Maroc), sans titre (deux musiciens), 26 x 39 cm, vers les années 2010 ; photo et collection Bruno Montpied.

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Et un autre exemple : Carter Todd (USA), sans titre, crayon graphite et crayons de couleur sur papier, 23 x 29 cm, 3-1-1990 ; ph. et coll. B.M.

 

          Par ailleurs, seront également présentées des pièces de Mohamed Babahoum, Benjamin Bonjour, Marcello Cammi, Carter Wellborn, Carter Todd, Camilo Raimundo, Madge Gill, Ted Gordon, Dwight Mackintosh, Anna Zemankova etMarilena Pelosi (présentée depuis quelque temps fondue à l'art brut, à mon avis par erreur ; mais cela n'entache en rien la qualité de ses graphismes, je m'empresse de le préciser). 

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”Les Aboyeurs” de retour à Bordeaux

      Trente-et-un ans que ces Aboyeurs, datés de 1990 – œuvre peinte et faite d'un collage de papier journal en soubassement aussi, contrecollée sur panneau de bois peint, de format 56 x 65 cm –, n'étaient pas revenus sur une cimaise. C'est chose faite à l'occasion d'une exposition actuelle, intitulée "Féroces", faisant partie d'une série d'expos hors-les-murs du Musée de la Création Franche, établissement que l'on sait fermé pour travaux pour une durée approximative de deux années. Féroces, l'adjectif désigne une thématique liée aux monstres qui sont présents dans diverses oeuvres du fonds permanent du musée. Ces "monstres" sont invités par la Biblothèque Flora Tristan à Bordeaux (1 Place d’Armagnac, Bordeaux Belcier)  du 8 au 26  novembre.

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Bruno Montpied, Les Aboyeurs, technique mixte (acrylique, stylo et  collage) sur panneau de bois, 56 x 65 cm, 1990, collection Musée de la Création Franche.

 

     Cette manifestation voit mon ancienne peinture "Les Aboyeurs" (le terme désignant l'aboi canin appliqué à deux figures blanchâtres effectivement assez monstrueuses, mais aussi possèdant un rapport sous-jacent aux aboyeurs des places publiques, crieurs et annonceurs de nouvelles, et encore, plus précisément dans le cas de ce tableau, qualifiant deux personnages criant sur un autre, criant, ou s'apprêtant peut-être à le déchirer!) sortir des réserves du Musée, où il n'avait plus été exposé à ma connaissance depuis 1991, à une époque où l'on parlait du "Site", et  non pas du "Musée" de la Création Franche. A l'époque, l'exposition, qui comprenait aussi une partie consacrée à Martha Grünenwaldt, était montée sous l'égide de la galerie Imago, avatar issu de la structure première fondée par Gérard Sendrey, à l'origine dans une ancienne échoppe prêtée par la mairie de Bègles, si je me souviens bien, située quasiment en face de cette mairie, du  reste, et aujourd'hui disparue, remplacée par d'autres bâtiments (le local avec une galerie effective ne dura qu'un ou deux ans). Les mots de "galerie Imago" perduraient en 1991 pour présenter des artistes, en galop d'essai en quelque sorte, dans les locaux du Site, qui venait de s'installer dans les locaux du Conservatoire de la Morue (je ne me souviens plus si c'était le nom exact...) dont les collections avaient été remisées en entrepôt.

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Bruno Montpied, Lucide mais livide, acrylique et stylo sur panneau de bois, 120 x 36,7 cm, daté du 1-7-1990 ; photo B.M ; une œuvre de la même année... 

 

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13/11/2022 | Lien permanent

Guy Girard, le surréaliste de Saint-Ouen

      Guy Girard expose bientôt à la galerie associative Amarrage avec un acolyte, Thierry Pertuisot (dont je ne sais pas grand-chose, sauf que son oeuvre ne relève pas, comme celle de Guy, du surréalisme).

     Ce dernier a eu plusieurs périodes depuis le temps qu'il peint. Nous avons été quelques-uns à être frappés de ses "anagraphomorphoses", fût un temps, où des paraphes de personnages historiques figurant au Panthéon personnel de l'artiste se métamorphosaient sur la surface des toiles (il a toujours peint à l'huile sur toile, héritier de la peinture classique et de ses supports traditionnels) en images déduites des rubans d'écriture de ces signatures. Parfois, comme dans une très belle toile que je détiens de lui, le paraphe – en l'occurrence, celui de Freud – jouait à cache-cache avec des lettrines, imagées elles aussi, formant le nom de Merlin, le tout planant au-dessus de la ville de Paris, représentée selon son historique plan du XVIe siècle...

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Guy Girard, Roi d'argot (la rencontre du nom de Freud et de celui de Merlin au-dessus du ciel de Paris), huile sur toile, 30 M, 1985 ; photo et collection Bruno Montpied. Non exposé à Saint-Ouen.

     

      Guy Girard aime bien les mots rares, tarabiscotés, quasi ésotériques. De même son écriture (il est parfois aussi essayiste et théoricien) prend des tours parfois fort labyrinthiques. Il se cache derrière ou dedans, affublé d'une modestie indécrottable, tout en se faisant en interne une haute idée du rôle de l'artiste qui se confond bien sûr – selon une doxa surréaliste que je partage moi-même – avec l'image de poète. Un poète qui suit les préceptes du "Ne travaillez jamais!" surréalisto-situationniste... Sa (quasi maladive) modestie, son refus de la "ramener" – il se refuse à donner l'impression qu'il cherche à parader sur les mêmes tréteaux que les histrions, qui eux, cervelles d'oiseux, ne cherchent qu'à "communiquer" (quoi? nécessairement des contenus creux...) –,  cela a amené notre Normand (il est originaire du Cotentin) à mener sa vie, et son art, au sein d'une ombre quasi complète. Il y a ainsi en ce temps, toutes sortes de créatifs qui répugnent à sacrifier à la maladie du paraître et du spectacle médiatique qui fascinent tant les faibles d'esprit contemporains. On retrouvera ces artistes secrets sur les trottoirs des Puces, et devenus à leur tour des énigmes. Car on ne peut compter sur les brocanteurs pour vous donner des biographies...

 

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Guy Girard, Un café sur le boulevard, huile sur toile, 50 x 61 cm,, 2018 ; ph. B.M. Non exposé à Saint-Ouen.

 

      Malgré ses différentes autres périodes (tribulations de Napoléon, une période que j'ai appelée en mon for intérieur sa période "spaghetti", une période "suédoise", une autre série de peintures stylisées en 2018 (voir-ci-dessus le dragon et la tasse remplie de personnages), ou encore ses portraits doubles de 1998 – cf. les tableaux reproduits dans le n°3 de la revue du groupe surréaliste auquel il appartient, Alcheringa, numéro qui vient de sortir, voir au bas de cette note), malgré une oeuvre désormais variée et conséquente, où l'imagination n'a jamais cessé d'être au pouvoir, qui a, en effet, jamais entendu parler de notre héros¹?

 

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Guy Girard, Toyen et Victor Considérant (portrait double), huile sur toile, 1998., ph. Guy Girard. Non exposé à Saint-Ouen.

 

     L'exposition (-vente!) qui débute le 1er septembre (jour du vernissage) pour se poursuivre jusqu'au 25 de ce même mois sera donc une occasion à ne pas rater si les amateurs de peinture souhaitent en découvrir davantage... Les tableaux qui seront présentés font partie des oeuvres oniriques inspirées à Guy par son voyage en Chine d'il ya quelques années. On pourra aussi se procurer durant l'exposition  le n°3 de la revue Alcheringa, où, je le signale entre parenthèses, votre serviteur a donné un article pour défendre des inconnus de l'art, retrouvés aux Puces, et adeptes de tentations infernales.

Guy Girard et Thierry Pertuisot, "Passage du Sud-Est", exposition du 3 au 25 septembre 2022, Galerie Amarrage, 88 rue des Rosiers, Saint-Ouen, ouv. les samedis et dimanches de 14 à 19h et sur RV en semaine au 06 15 63 93 11 (c'est en lisière des Puces de Saint-Ouen).

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La revue Alcheringa n°3 sera disponible (ainsi que quelques exemplaires restants du n°1 et du n°2), pour quelques exemplaires au nombre limité, à la galerie durant le temps de l'expo, et sinon, on pourra l'acquérir auprès des éditions Venus d'ailleurs, qui l'éditent, en cliquant sur ce lien, où l'on trouvera entre autres le sommaire très varié du numéro.

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¹ Peut-être n'est-il pas inutile de rappeler le texte que je lui ai personnellment autrefois consacré: Bruno Montpied, « Guy Girard, peintre d’histoire d’un nouveau genre », catalogue de l’exposition Visions et créations dissidentes au Musée de la Création franche, Bègles, du 27 septembre au 30 novembre 2003.

 

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Aux frontières de l'Art Brut

       La Halle Saint-Pierre, à Paris, va bientôt ouvrir une nouvelle exposition (qui durera du 20 septembre 2023 au 25 février 2024) consacrée à "15 artistes inclassables, selon les critères de l’art brut ou de l’art naïf traditionnel". La présentation de l'expo sur le site de la Halle poursuit en expliquant: "Sans formation artistique pour la plupart mais possédés par le démon de la création, tous sont des expérimentateurs intarissables, obsessionnels, proliférants, dont l’univers a sa marque particulière, reconnaissable au premier coup d’œil. Peu habitués aux circuits professionnels de l’art, ils sont restés méconnus..." Sans formation artistique pour la plupart, certes (on y retrouvera en particulier Babahoum, Jean Branciard, Gabriel Audebert, ou Roger Lorance). Et d'ailleurs, on y rencontre même Marc Décimo, le célèbre universitaire pataphysicien et historien de l'art brut, qui cherche peut-être à acquérir une virginité toute neuve. Un de nos correspondants à l'étranger l'a ainsi surpris en plein stage de déconstruction intellectuelle, au fond d'un rade des plus populaires. Qu'on en juge ci-dessous:

 

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Marc Décimo?

Ce que l'art recherche avant tout, c'est l'incognito, comme disait (à peu près) Dubuffet, autre pataphysicien (plus célèbre mais plus éphémère)...

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Age d'Or et Age de Fer

    Dans une note d'août 2008, parue au moment des précédents Jeux Olympiques qui se déroulaient alors à Pékin, j'évoquais le manque de réussite de la kayakiste Emilie Fer qui avait échoué à monter sur le podium. Et voici que quatre ans plus tard, cette dame ferrugineuse, en bonne alchimiste qui sait se révéler au moment décisif, a pu transformer en or le métal qui n'avait pas rouillé entre temps. Bravo à elle. Je n'ose pas écrire qu'elle a su repasser.

     A noter aussi que son nom qui pouvait être considéré comme un aptonyme, un nom prédestinant, qui pouvait influer sur la qualité de ses performances aux Jeux en 2008, est devenu désormais un contre-aptonyme puisqu'il l'a peut-être conduite à un dépassement, une transmutation.

 

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Photo AFP


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Une lettre de Paul Duchein à la ministre de la Culture Aurélie Filipetti sur l'occultation des ATP

A Madame Aurélie Filipetti,

Ministre de la Culture et de la Communication

3, rue de Valois, 75033 Paris

                                                                                             Montauban, le 7/7/2013

Madame La Ministre,

Vous m'avez fait le grand honneur de m'accorder le titre d'officier dans l'ordre des Arts et Lettres ; cette décoration m'a été remise par Monsieur Henri Michel Comet, Préfet de la région Midi-Pyrénées. Je vous remercie infiniment pour cette haute distinction.

Depuis près de cinquante ans l'association dont je suis président présente au musée Ingres un exposition au cours de laquelle je m'efforce de faire cohabiter, souvent, des créations contemporaines avec des oeuvres d'Art Premier ou d'Art Populaire tout cela à titre bénévole.

J'ai d'ailleurs écrit un ouvrage La France des Arts Populaires paru aux éditions Privat et préfacé par Pierre Bonte.pau dichein,aurélie filipetti,mucem,atp

Il se trouve que j'ai été assez proche des principaux acteurs qui ont conçu le musée des Arts et Traditions Populaires qui resta ouvert au public (notamment aux jeunes) jusqu'à sa fermeture il y a quelques années sous le prétexte qu'il serait transféré au MUCEM de Marseille ; or il n'en est rien.

Nous sommes nombreux à nous poser la question de savoir ce qu'il est advenu de ces collections. Or il est difficilement acceptable, dans un temps où nous devons plus que jamais retrouver nos racines pour resserrer le lien social, que ce musée soit rayé de la liste des établissements publics français.

N'attendons pas que d'autres (avec des arrière-pensées populistes) viennent nous donner des leçons pour nous apprendre à savoir d'où nous venons.

Nous sommes nombreux à déplorer cette fermeture, certains petits musées privés tentent, avec très peu de moyens, de faire revivre ces objets porteurs de poésie, quelquefois de mystère, mais derniers témoins d'un mode de vie qui a totalement changé.

pau dichein,aurélie filipetti,mucem,atpVous voudrez bien excuser cette démarche, mais je vous sais attentive aux choses simples qui ont un sens et qui témoignent de notre passé.

Sans doute le qualificatif de "populaire" associé aux objets les dévalorise aux yeux d'une partie du public qui les méconnaît. Cependant au cours de conférences avec projections, j'ai été ravi de constater que les spectateurs étaient enthousiasmés par la qualité des pièces présentées. A côté des objets utilitaires, des créateurs anonymes nous ont laissé des œuvres surprenantes et dignes d'admiration par le pouvoir créatif et imaginatif qui les anime.


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Cet objet incroyable de 67,5 x 54 cm, probablement créé à la fin du XIXe siècle, décrit par Philippe Audouin dans L'Archibras n°1 en 1967, a été republié dans le livre La France des arts Populaires de Paul Duchein ; ne pourrait-il s'agir d'une œuvre créée en milieu psychiatrique? En tout cas, c'est une pièce d'une incontestable originalité, en tous points égale en qualité au "Nouveau monde" de Francesco Toris, cette magnifique sculpture d'assemblage en os, montrée récemment à la Halle Saint-Pierre dans le cadre de l'exposition "Banditi dell'Arte"

 

D'ailleurs je prépare une exposition "Le regard ébloui" dans laquelle des artistes plasticiens loin de toute culture vont dialoguer avec d'insolites objets "d'art populaire". J'ai eu le grand privilège de déménager la maison d'André Breton à St-Cirq-Lapopie et certains objets viendront de là.

Veuillez agréer, Madame la Ministre, l'assurance de mes respectueuses salutations.

Paul Duchein

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Hommage au Tour de France, pour Armand Goupil le spectacle était surtout sur le bord de la route...

     Cela fait longtemps que je n'avais pas parlé d'Armand Goupil, l'instituteur peintre et dessinateur à ses heures perdues du côté du Mans dans les années 50/60 (voir ici l'ensemble de mes notes du Poignard Subtil).

          L'actualité avec le Tour de France me donne l'occasion de mettre en ligne une autre reproduction de ses peintures, participant de sa veine gentiment érotique voyeuriste. Armand ne regardait pas les coureurs (lui-même en étant peut-être un, de coureur, quoique seulement dans ses rêves?)... C'est aussi ça être un inspiré des bords de routes.

 

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Armand Goupil, Tour de France, 27-IV-59


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Un coup de sang de Pat Atarte concernant le MUCEM (à rebaptiser MUCM...)

      Je relis avec un tendre sourire en coin cette note déjà ancienne où vous exprimiez votre espoir de pouvoir un jour contempler de nouveau les merveilleuses collections du musée des ATP au fameux MUCEM qui tardait alors à sortir de terre. Eh bien nous y sommes. Le MUCEM est né, il est inauguré, et le tendre sourire se transforme en rictus.

     Ce MUCEM n'est qu'un fantasme de conservateur bilieux rendu fou par sa haine du public. Les collections des ATP sont invisibles. Elles y sont, paraît-il, mais enfouies, cachées au fond des réserves, inaccessibles hormis à quelques chercheurs qui devront montrer patte blanche. Dans ATP, il y a tradition et il y a populaire, deux mots absolument détestables sans doute pour les politiciens invertébrés qui font la culture, et qu'il faut surtout arracher à la conscience du public - et que l'on continue d'offrir, au passage, par la même occasion, à l'extrême droite comme on lui a offert sur un plateau, il y a quelques années, celui de laïcité.

    Surtout, oublions le rapport sensuel à l'objet, à la fois creuset et produit de l'imaginaire! Surtout, que le peuple, s'il existe encore, ne voie pas les beaux meubles paysans qu'on fabriquait avec dix bouts de bois et deux outils ruraux, sans aide de la force électrique, il y a deux cents ans, et qui tiennent encore debout aujourd'hui! Que le simple fait de se fabriquer un coffre où mettre ses pauvres vêtements continue de paraitre à tous tellement compliqué, et IKEA sera bien gardé! Qu'on enfouisse au plus profond de l'oubli l'idée même de décoration, qui ennoblissait tous ces objets du quotidien et élevait l'âme de leurs utilisateurs, car son rappel risquerait d'anéantir l'esthétique carcérale du design imposée aux masses comme solution aliénante! Qu'on oublie vite tous ces outils qui libéraient au lieu d'asservir! Et qu'on oublie vite le pauvre Georges-Henri Rivière et toute son ingénieuse muséographie, au besoin en le canonisant au passage, pour définitivement anéantir son ouvrage!

Pat Atarte

Note du rédacteur du blog:

J'éviterais de me prononcer trop catégoriquement contre le MUCEM en question, ne l'ayant pas encore visité (attendons que les foules téléguidées par média interposés se soient évanouies, déjà on nous dit qu'elles se contentent des promenades et des panoramas offerts par les passerelles et les points de vue du nouveau site), et restant curieux de la richesse des cultures populaires méditerranéennes (une très belle charette sicilienne entièrement sculptée et peinte est ainsi montrée semble-t-il dans la collection permanente, transfuge peut-être de l'ancien Musée de l'Homme parisien où l'on pouvait en voir une, très belle, dans le département Ethnologie européenne). Je suis d'accord avec Atarte cependant, quant à sa dénonciation de la bureaucratie ethnologiste qui se détourne des objets façonnés poétiquement par le peuple préférant se concentrer sur le discours plutôt que sur l'objet. Et surtout, je soulignerai pour le moment le fait que la dénomination Musée des Civilisations d'Europe et de Méditerranée impliquerait a priori qu'on puisse y découvrir, à côté de la culture populaire méditerranéenne, les arts et traditions populaires d'Europe de l'ouest, du nord et de l'est, sous peine de devoir plutôt se limiter à l'appeler le MUCM. Cela me confirme dans ce que je subodorais dans ma note sur l'expo de 2011 de "Morceaux exquis" à savoir que le projet du MUCEM était peut-être trop grandiose. A vouloir trop embrasser, trop mal étreint...?

 

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Charette sicilienne amenée au Canada par son propriétaire Joseph Pillitteri en 1962, ph. Musée canadien des Civilisations


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L'Iran naïf? Un texte de Marc Grodwohl et un prolongement du Sciapode en direction de MOKARRAMEH GHANBARI

Dans la région du Guilan existe une tradition tout à fait étonnante pour nous de peintures figuratives naïves, notamment sur les sanctuaires (Husseinzadé).
En voici quelques images prises dans un village du delta oriental du Sefid Rud (photos 1-2-3) .
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           Cet art populaire et l'art des réalisations publiques sont de la même veine surtout dans les périodes les plus récentes, fin XIXe, début XXe siècle, et il serait ethnocentrique de qualifier de "naïf " ce qui peut relever en réalité des conventions régissant la représentation des personnes. A titre de comparaison avec l'art public urbain, les faïences d'un hammam fin XIXe, début XXe s. à Rasht, la capitale du Guilan avec la représentation du héros Rostam (photos 4-5-6).

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(Trois vues consacrées aux mêmes faïences)
Les thèmes légendaires iraniens dits préislamiques (tirés du Livre des Rois de Ferdowsi) sont assez courants et volontiers prétexte à des oeuvres d'art officiel au milieu des ronds-points (exemple l'oiseau Simorgh dans un rond-point près de Chaboksar).
J'ai vu aussi se diffuser le motif du char d'Athéna, choisi par un commerçant pour décorer sa boutique, et qu'on voit maintenant décliné aussi dans des réalisations publiques.
Enfin deux photos (7-8) du pèlerinage de Immamzadé Ebrahim, montrant le développement du goût pour la couleur et un jeu d'adresse ingénieusement réalisé avec des vieilles poupées.
Marc Grodwohl
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LE POINT DE VUE DU REDACTEUR DU BLOG: 
M.Marc Grodwohl, ancien responsable de l'Ecomusée d'Alsace est revenu récemment d'un séjour en Iran où il a été invité par des confrères à visiter leur propre musée du patrimoine rural  dans la région du Guilan, dans le but de procéder à un échange de vues.
 Son site internet (voir dans nos liens ci-contre à gauche) évoque cette visite et contient aussi plusieurs autres images. Elles renvoient vers un autre lieu, à Fuman, un espace ouvert au public, où sont disposées plusieurs statues qui font penser un peu aux statues que l'on voit dans certains jardins ou environnements de créateurs populaires autodidactes européens (par exemple celui de Gabriel Albert en Charente-Maritime, ou celui de René Escaffre, dans le Lauragais). J'en présente quelques-unes ci-dessous:
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(Toutes les photos jusqu'ici sont de Marc Grodwohl) 
Le mot de "naïf" est employé, on l'a vu ci-dessus dans son texte, par Marc Grodwohl qui lui trouve par moments un accent "ethnocentrique". En Europe, ce même terme revêt aussi une connotation ou une intention réductrices de temps à autre, de la part des historiens ou des critiques d'art paternalistes ou condescendants à l'égard des créateurs autodidactes dont ils ne voient pas l'originalité et l'extrême fraîcheur d'expression. Personnellement, quand je l'emploie, ce n'est bien entendu pas du tout dans une telle optique . Naïf pour moi est synonyme d'"immédiat".
Si l'on retient ce caractère d'"immédiat", on peut juger les statues de Fuman "naïves". Cependant, à ne considérer que les photos (je n'ai jamais vu les oeuvres originales), je leur trouve un aspect assez analogue à celui des santons provençaux, que je ne qualifie pas de naïfs, mais plutôt d'artisanat populaire à la limite du kitsch (je parle des santons surtout). Il me paraît bon de les faire figurer ici à titre de documentation servant à nourrir nos regards d'amateurs d'arts populaires.
Pour compléter la confrontation des styles et aider à se faire une idée plus juste de ce qui se joue sous ces termes de "naïf" ou de "brut", il est bon de signaler qu'il existe aussi en Iran une immense artiste autodidacte qui n'a été révélée pour le moment en France que par le magnifique film d'Ebrahim Mokhtari, "Mokarrameh, et soudain elle peint", diffusé dans de nombreux festivals (notamment celui de Vic-le-Comte dans le Massif Central, merci Régis Gayraud de nous l'avoir signalé en son temps; cliquez ici pour plus de renseignements sur le moyen actuel de se procurer le film, apparemment seulement en version anglaise). Elle s'appelait Mokarrameh Ghanbari. Née en 1928, elle est décédée tout récemment le 24 octobre 2005.
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Photos de Mokarrameh ci-dessus et ci-dessous récupérées sur le site Mokarrameh.com

              Sa première exposition date de 1995 (soit environ quatre ans après qu'elle eut commencé à 63 ans à peindre) et eut lieu bien entendu en Iran à la galerie Seyhun (par la suite, elle a exposé en Suède et aux USA ; en France, comme d'hab, on n'a encore rien vu venir, malgré la diffusion du film dans des festivals...). Il semble que ce soit son fils artiste qui la voyant en train de barbouiller spontanément dans le décor de sa vie quotidienne eut l'idée de lui fournir du matériel de peinture et qui l'encouragea (ça fait songer à d'autres cas similaires, Boix-Vives, ou Joseph Barbiero, aussi me semble-t-il en France furent poussés par leur progéniture vers la création). Elle a peint des toiles mais aussi les murs de son logement. Parmi ses thèmes de prédilection, on retrouve entre autres le héros Rostam dont parle Marc Grodwohl dans son texte.

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               Elle fut mariée contre son gré à une sorte de cacique de son village (Dankandeh dans la province de Mazandaran, au nord de l'Iran) qui obligea par la torture son père à lui donner sa fille. Elle eut plusieurs enfants de ce mariage pour le moins houleux (émaillé de brutalités).

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                On annonce un film en préparation aux USA avec Meryl Streep dans le rôle de Mokarrameh, et un metteur en scène iranien résidant en Californie, Essy Niknejad... Ah, ces Yankees, ils ne manquent jamais de prendre le train en marche...

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