13/09/2019
Le dessin surréaliste en 2019....
Voici que reprend le cycle d'expositions que le peintre, essayiste et poète du Groupe de Paris du mouvement surréaliste, Guy Girard avait entamé l'année dernière avec "le collage surréaliste", et ce toujours dans la même galerie Amarrage, rue des Rosiers, en lisière des Puces de St-Ouen.
Régis Gayraud, Pêcheurs d'âmes, 18 x 24 cm, 2019.
Bruno Montpied, Les Trois Grâces, technique mixte sur papier, 30,5 x 23 cm, 2019. PH. B.M..
En tant qu'ami du groupe, je prête outre trois de mes dessins (le cahier des charges de l'expo exigeait le noir et blanc, condition qui n'a pas été suivie par nombre de participants, mais personnellement, je m'y suis tenu), trois œuvres de ma collection. il s'agit d'un dessin au crayon, accompagné d'un collage de tarlatane sur papier photographique, dû à Gilles Manero, d'un dessin plus ancien de l'Islandais Alfred Flóki (dont j'ai parlé naguère sur ce blog) et d'un dessin d'un anonyme, vraisemblablement du XIXe siècle, présentant quatre personnages caricaturaux énigmatiques (j'en ai également déjà parlé sur ce blog lorsque je venais de l'acquérir).
Anonyme du XIXe siècle, sans titre, crayon graphite sur papier, 24 x 34 cm, sd. Photo et coll. B.M.
Autour de ce dernier, le groupe au cours d'une de ses réunions hebdomadaires a proposé un jeu à certains de ses membres et amis. Que s'est-il passé "une heure après" sur la scène où se trouvent les quatre personnages de mon dessin? Les résultats de cette "heure d'après" seront présentés dans l'exposition de St-Ouen. Enfin, j'ai également prêté un dessin collectif fait par mézigue en compagnie de Guy Girard et de feue Sabine Levallois.
L'expo dure du 19 septembre au 20 octobre. On vous attend nombreux au vernissage le jeudi 19 à partir de 18h30. A signaler le jeudi 3 octobre une projection de "surprises cinématographiques" (je me suis laissé dire qu'il s'agirait de dessins animés d'inspiration surréaliste).
L'expo poursuivra ensuite sa route, pour une majeure partie des œuvres présentées chez Amarrage, à la Maison André Breton animée par l'association La rose impossible à Saint-Cirq-Lapopie du 25 octobre au 22 novembre (inauguration le vendredi 25 octobre à 19h)
16:13 Publié dans Anonymes et inconnus de l'art, Art naïf, Art singulier, Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : dessin surréaliste, galerie amarrage, guy girard, régis gayraud, bruno montpied, créateurs anonymes, anonymes de l'art naïf, gilles manero | Imprimer
25/04/2018
Retour de chine: un dessin de Lucie Valore, une peinture de "Bl.Mouron"
Lucie Valore, sans titre, sans date (entre 1940 et 1965), crayons de couleur sur papier, 20x23cm, coll. et ph. Bruno Montpied.
Dimanche dernier, au milieu de cet océan de drouille et autres rossignols qu'est la Réderie d'Amiens, il fallait pouvoir trouver quelques îlots où gisent les trouvailles qui rachèteront de tant d'errance au milieu des laids produits de notre contemporanéité. J'ai fini par tomber sur l'étal d'un couple de braves gens de la région qui vendait le petit dessin ci-dessus. J'ai cru sur l'instant à un magnifique dessin d'enfant. Il me faisait signe avec insistance, il me fallait l'acquérir. Le couple en question m'apprit alors qu'il s'agissait d'une œuvre d'une femme qui avait été l'épouse du peintre de Montmartre, Maurice Utrillo, fils de Suzanne Valadon. Elle s'appelait Lucie Veau dans sa jeunesse. Née à Angoulême en 1878, elle disparut à Paris en 1965. Amie de Suzanne Valadon, ancienne épouse d'un banquier, dont elle prit le nom passagèrement (Lucie Pauwels), elle épousa en 1935 Utrillo et changea alors une troisième fois de nom, pour s'appeler Lucie Utrillo. Au contact de ce peintre qu'elle protégea des ses penchants à l'alcoolisme, en l'abritant au Vésinet dans une charmante demeure, "La Bonne Lucie", elle put manifester à son tour sa vision incontestablement ingénue et naïve du monde, dans des paysages, des portraits et des natures mortes. On sait qu'Utrillo lui-même a parfois été qualifié de peintre naïf. Et c'est vrai que certains tableaux, par leurs coloris et les axes difformes de leurs perspectives, peuvent faire songer par association au "réalisme intellectuel" des Naïfs. Sans doute Lucie fut-elle lasse de ses changements multiples d'identité, et profita de l'occasion pour se créer enfin un nom qu'elle se serait choisi en tout indépendance. Elle s'appela alors Lucie Valore, magnifique patronyme qui, en raison de "l'or" qu'il renferme – se le dit-elle? –, pourrait lui assurer un certain succès... Rappelons qu'Anatole Jakovsky a cru bon, dans un ancien numéro des Cahiers du Collège de 'Pataphysique des années 1950, de relever ce fait que nombre de patronymes contenant les lettres "O,R" sont souvent liés à des destinées fastes et prospères...
Lucie et Maurice...
Lucie Valore, Autoportrait à l'aigrette.
Lucie Valore, Printemps.
Lucie Valore, paravent peint, 1959.
Tombe de Lucie et Maurice Utrillo au cimetière St-Vincent, à Montmartre, tout près de chez moi...
Je n'ai pas retrouvé pour autant trace de son inscription dans une quelconque histoire de l'art naïf. Jakovsky, Dasnoy, ou Bihalji-Merin l'ignorent superbement. Mais cela ne nous étonnera pas, il manque beaucoup d'autres artistes du même genre au bataillon, surtout bien entendu du côté des naïfs récents, mais aussi du côté des anonymes, ou des artistes autodidactes dont la production est restée limitée ou a été dispersée (et parfois détruite?) comme j'en donne un autre exemple ci-dessous, chinée aux puces, en compagnie d'un autre tableau (un portrait de Charles Maurras...).
Bl.(Blanche? Blandine?) Mouron, Autoportrait, 22x29 cm (3 Figure), 1958 ; ph et coll. B.M ; Qui connaît cette Bl. Mouron, avis aux amateurs...?
10:58 Publié dans Art naïf | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : lucie valore, maurice utrillo, peintres de montmartre, bl. mouron, art naïf, anonymes de l'art naïf, réderie d'amiens, puces, chine | Imprimer
18/03/2015
De l'art naïf anonyme en remontant le temps
C'est beau les Puces de Vanves, on y rencontre toutes sortes d'épaves, d'objets venus y faire un petit tour au gré des marées perpétuelles du souvenir et des occasions, sous le prétexte d'être objets de commerce. L'autre jour, mêlées à des peintures du genre plutôt moderne (XXe siècle), je suis tombé sur deux peintures sur papier, un peu abîmées certes (de l'humidité y avait laissé des taches, des crevasses serpentaient dans les coins, peut-être certaines taches de couleur étaient plus la résultante de frottages intempestifs essuyés au fil des âges, au gré des déplacements, plutôt que de la volonté du peintre), mais encore pimpantes, joliment colorées, et dessinées avec une certaine naïveté. Par exemple, pour preuve de ce que j'appelle "naïveté" et qui est plutôt signe d'une grâce qui ne s'encombre pas d'une volonté de réalisme autre qu'intellectuel (comme aurait dit peut-être Georges-Henri Luquet), voyez dans le dessin ci-dessous la position des joueurs de trompettes aux chapeaux munis de plumets. Leurs pieds reposent sur une colline située à l'évidence bien plus loin que celle sur laquelle reposent les cinq autres personnages qui pourtant sont de même taille à côté d'eux, groupés autour d'une femme et de son enfant, personnages accompagnés d'une sorte de biche (aux oreilles de lièvre?), peut-être un symbole de cette famille aristocratique, qui fait un peu penser aux représentations d'animaux sur les tapisseries de l'époque. Un cheval aussi est de même taille que les personnages...
Anonyme ; on notera la chaise à porteurs à droite, en train d'arriver peut-être pour charger la dame à la robe rose et l'emmener ensuite au château que l'on aperçoit au lointain ; ce pourrait être un facteur de datation, de même que le style des vêtements (XVIe siècle? Ou XVIIIe siècle, époque où aurait peint l'auteur, se référant à un événement historique ancien?) ; il est possible que la scène se passe ailleurs qu'en France (?) ; ph. Bruno Montpied
Le collectionneur qui les acquit me laissa avec bienveillance les prendre en photo, grâces lui soient rendues (il préfère rester discret quant à son identité).
Voici le deuxième dessin, lui aussi une gouache sur papier, et lui aussi de la même main visiblement, même si on ne trouve aucune signature, aucune date, aucune inscription de quelque sorte que ce soit apposées dessus. Cette fois, le sujet est plus rude. Il s'agit à l'évidence d'une scène d'écartèlement. Le condamné est livide, en contraste avec les visages colorés de ses bourreaux. Les bœufs chargés de le démembrer sont gros afin que le spectateur du tableau ne puisse douter de leur efficacité. L'espèce de belvédère qui est placé en arrière-plan est curieux. Est-ce un poste d'observation pour cette zone de torture? Est-il seulement là pour remplir la composition qui serait sans cela un peu trop vide? Le dessin fait en tout cas un curieux pendant au précédent, même si rien ne permet de penser qu'ils étaient ensemble pour être exposés en vis-à-vis. Comme si le supplice du gueux était l'autre face d'une pièce dont le recto représenterait le faste des seigneurs. Ces derniers ne pouvant briller sans l'exécution de quelques révoltés ici ou là...
Anonyme, XVIIIe siècle ?, 31x40 cm, scène d'écartèlement, ph. BM
00:26 Publié dans Art immédiat, Art naïf | Lien permanent | Commentaires (16) | Tags : anonymes de l'art naïf, art naïf du xviiie siècle, écartèlement, supplice, chaise à porteurs, g-h luquet, réalisme intellectuel, peinture naïve à thématique historique | Imprimer