29/06/2015
A Rothéneuf, expo de l'association des amis de l'oeuvre de l'abbé Fouré et redécouverte d'une sculpture de "l'Ermite"
Voici la nouvelle exposition à la fois documentaire et artistique sur l'abbé Fouré et "l'art brut en Bretagne" que présente l'association des amis de l'œuvre de l'abbé pour cet été à l'Hôtel le Terminus du Val, avec à la clé, l'exhibition, au moins sur l'affiche, d'une nouvelle sculpture attribuée au fameux ermite. Je dis cela ainsi, avec une feinte réticence, parce que rien ne nous a été transmis au sujet des conditions de cette attribution, d'où la sculpture provient, comment elle est parvenue entre les mains de l'association, est-on sûr qu'il ne s'agit pas d'une copie des œuvres de l'abbé dans un style "à la manière de", etc.
La sculpture retrouvée attribuée à l'abbé Fouré, avec la même inscription que sur le rosier précédemment retrouvé en 2010
Détail d'une carte postale du vivant de l'abbé montrant à gauche le gisant de St-Budoc avec l'ange étendant ses ailes au-dessus du gisant et des trois niches
Ce qui restait en 2010 du même autel de St-Budoc... ; l'ange est complètement rongé..., ph. Bruno Montpied
A bien la détailler, avec son inscription, "Œuvres de l'Ermite de Rothéneuf A. Fouré", surmontant la représentation taillée en bas-relief d'un gisant que paraît protéger un ange, représentation visiblement démarquée de la sculpture qu'avait taillée l'abbé dans les rochers le long de la côte (toujours visitables aujourd'hui comme on sait, quoique fort dégradés) montrant le gisant de Saint-Budoc, à bien la détailler, donc, on se dit que le style ressemble apparemment bien à celui de l'abbé, et qu'il pourrait s'agir, par exemple, d'un panneau autrefois apposé à l'extérieur de l'ermitage pour indiquer aux curieux ce que le musée de l'abbé abritait derrière son mur crénelé, surmonté de têtes sculptées en pierre. Si cette hypothèse se révélait fondée, cela ouvrirait un espoir que d'autres pièces de ce petit musée incroyable aient pu être sauvées.
Autre sculpture retrouvée de l'abbé Fouré en 2010, apportée par sa propriétaire au cours d'une exposition montée à Rothéneuf par Joëlle Jouneau, ph. BM
Je veux le croire en tout cas. Sans pourtant effacer l'intuition funeste que j'ai depuis fort longtemps, selon laquelle on risque bien de ne retrouver des sculptures de l'abbé, finalement, que peu de pièces décisives, soit des cadeaux faits à des obligés (comme la sculpture d'un rosier qu'on vit réapparaître à Rothéneuf lors d'une expo des débuts de l'Association en 2010, j'en avais parlé ici même, et voir ci-dessus), soit des meubles, des objets manufacturés ayant appartenu à l'abbé, ou des sculptures sans grande valeur, ayant quitté l'ermitage en 1910 lors de la vente aux enchères qui suivit la mort de l'abbé et dont j'ai publié le récit, écrit par Eugène Herpin, alias Noguette, dans le dossier que j'ai consacré au musée disparu de l'abbé Fouré dans la revue L'Or aux 13 Îles n°1 en janvier 2010 (dossier qui contenait aussi la réédition du Guide du Musée de l'Ermite). J'ai ainsi personnellement vu passer (récemment) sous mes yeux des reproductions d'un fauteuil de l'abbé (authentique puisqu'on le reconnaît sur une carte postale de la Belle Epoque, l'abbé étant assis dessus), parti d'une collection privée parisienne en direction de Montpellier (paraît-il), de même qu'on a pu voir il y a bien plus longtemps un tabernacle de l'abbé reproduit dans le livre de Michel Ragon, Du côté de l'art brut, ou qu'on peut encore découvrir une commode que possède Bruno Decharme dans la collection d'art brut ABCD (voir ci-dessous).
Fauteuil de l'abbé de passage dans une collection privée parisienne (voir ci-dessous du temps où l'abbé s'asseyait dessus)
Le même fauteuil (qui provient d'une vente aux enchères qui se tint à St-Malo dans les années 1980, où selon le témoignage du collectionneur qui le posséda un temps se vendirent quelques rares meubles de l'abbé que fort peu de gens se disputèrent...)
Tabernacle à usage privé de l'abbé Fouré ,tel que reproduit dans le livre cité de Michel Ragon
Commode en provenance également de chez l'abbé Fouré, collection ABCD
La réapparition de cette seconde pièce de bois sculpté de l'abbé Fouré, due à l'incroyable ténacité de l'animatrice de l'association des amis de l'œuvre de l'abbé, Joëlle Jouneau, acharnée à collecter depuis environ cinq ans, à rassembler toute la documentation possible sur l'œuvre et la vie de "l'Ermite", apporte cependant une assise certaine à ces archives auxquelles on souhaite de trouver à Rothéneuf un local plus pérenne.
Simone Le Moigne, coll. Art Obscur (à noter une petite -j'ai dit "petite"...- parenté d'inspiration dans cette toile avec les images que crée en Vendée Yvonne Robert)
Détail d'un objet sculpté, du "patient de St-Avé", coll. Art Obscur
En parallèle de la présentation de cette sculpture retrouvée, l'association a choisi de présenter des œuvres provenant de divers autres points de la Bretagne, soit empruntées à la collection de l'Art Obscur de Michel Leroux (Simone Le Moigne, peintre naïve ; le "patient de St-Avé" avec une sculpture d'inspiration populaire assez énigmatique ; Yvette et Pierre Darcel, créateurs d'un environnement dans la région briochine dont j'ai abondamment parlé dans mon Eloge des Jardins Anarchiques et ici même au sein de plusieurs notes), soit provenant d'autres sources, comme des œuvres du sculpteur de Kerlaz, Pierre Jaïn (il est cher à mon cœur depuis que j'ai aidé à sa redécouverte dans l'exposition d'Art Insolite au musée rural des arts populaires de Laduz en 1991), probablement prêtées avec le concours de son petit neveu Benoît Jaïn, ou encore des œuvres de Jean Grard et d'Alexis Le Breton, tous deux créateurs d'environnements dont peu de pièces circulent en dehors des sites qu'ils créèrent en plein air (celui de Jean Grard a de plus été démantelé quelques années après sa disparition).
Pierre et Yvette Darcel, la table du petit déjeuner avec cafetière et moulin à café, ces deux accessoires ayant donc fait (voir témoignage de Michel l'égaré ci-dessous en commentaires) l'objet de répliques séparables de l'environnement proprement dit, certaines étant montrées dans l'expo à Rothéneuf, ph. Bruno Montpied, 2009
10:53 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art singulier, Environnements populaires spontanés | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : joëlle jouneau, association des amis de l'oeuvre de l'abbé fouré, abbé fouré, ermite de rothéneuf, environnements spontanés, terminus du val, rothéneuf, sculptures retrouvées de l'abbé fouré, pierre darcel, art obscur, alexis le breton, art brut en bretagne, pierre jaïn, per jaïn, jean grard, l'or aux 13 îles n°1, noguette, eugène herpin | Imprimer
12/10/2013
Le visage d'Ali, le créateur oublié d'Essaouira
Ali, photo (détail) Patricia Allio, 2001, extrait du catalogue de l'exposition à Dol-de-Bretagne, "L'art brut à l'ABRI"
Donc nous voyons ci-dessus à quoi ressemblait le Ali que le texte de Darnish, et le commentaire de Marianne Boussuge-Brault, récemment mis en ligne sur ce blog (voir ci-dessous), évoquaient. Cette photo fut publiée par Patricia Allio dans le catalogue de l'exposition "L'art brut à l'ABRI" qu'elle avait montée au Cathédraloscope de Dol-de-Bretagne (étaient exposés: des sculptures de Jean Grard, de Pierre Jaïn et de René Raoult, des peintures d'Ali, d'Asman Saïd et d'un autre peintre inconnu d'Essaouira, des photos d'Olivier Thiébaut, des cartes postales de l'Abbé Fouré (venues de ma collection), des peintures de Bruno Montpied, de Patricia Allio, des assemblages d'os sculptés de Gaston Floquet, des sculptures de Dominique Ronsin, et des "mécaniques apprivoisées" de Dino Pozzo).
Ces deux peintures d'Ali (photo Bruno Montpied) étaient accrochées dans l'expo de Dol-de-Bretagne en 2001 de même que la jarre peinte ci-dessous dont on voit les deux personnages peints au pourtour (elle corrobore l'indication de Marianne Boussuge-Brault qu'Ali affectionnait de peindre sur des supports variés, notamment en trois dimensions)
Pour faire bonne mesure, je remets ici, annobli en texte de note, le témoignage de Marianne Boussuge-Brault à propos de cette "Maison des Artistes" qui est à Essaouira décorée avec des peintures d'Ali. Dommage que l'hôte dont elle parle ait été si rétif que cela à ce qu'elle puisse prendre des photos.
"A Essaouira au mois de septembre, nous avons logé dans une maison d'hôte nommée la maison des artistes. S'y trouve exposée l'œuvre géniale d'Ali (brèves biographiques glanées auprès de notre hôte qui lui voue un culte: plus ou moins SDF durant toute sa vie (aujourd'hui terminée), ancien soldat de la guerre d'Algérie dont il a gardé un profond traumatisme, a vécu à la maison des artistes pendant un moment: le propriétaire lui a laissé "carte blanche" dans la maison en échange d'un toit, à manger et de leur amitié). Ali peint sur tout et utilise tous les supports: fenêtre, tables, chaises, toile etc. Des œuvres variées, parfois brutales rappelant les horreurs de la guerre, parfois très colorées et souvent oniriques. L'âne est une figure qui revient dans la plupart de ses toiles. Nous n'avons pas pris de photographies, notre hôte étant rétif à cette idée mais je pense qu'il suffit de frapper à la porte ...et de découvrir Ali." (Marianne Boussuge-Brault)
La salle de l'exposition "L'art brut à l'ABRI" où se trouvaient les œuvres de quelques créateurs d'Essaouira, dont Ali, découverts par Patricia Allio (l'ABRI était le nom de –la paradoxalement éphémère!– association qu'elle avait fondée avec Frédéric Nef dans le but de protéger des créations d'art brut... ; autour étaient disposées des pièces sculptées de Jean Grard, des photos, au fond, d'Olivier Thiébaut..., ph. BM, 2001
10:13 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art singulier | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : ali, essaouira, l'art brut à l'abri, patricia allio, art brut marocain, olivier thiébaut, jean grard, bruno montpied, pierre jaïn, art brut en bretagne, darnish | Imprimer