05/07/2009
Doudou saga
La petite chanson de l'été consacrée aux doudous est revenue... Voici qu'un lecteur enthousiaste m'adresse un rapport sur le doudou de sa fille de 6 ans et demi qui a un lapin nommé Rose Fleur pour compagnon, lapin tant adoré qu'il a fallu tout l'amour d'une mère pour le maintenir en vie à force de rapetassages divers et variés. Voici ce que m'écrit à ce sujet Cosmo Helectra (qui anime par ailleurs une émission de radio, Songs of praise, sur Radio Aligre à propos des "musiques de traviole"):
« Le lapin a subi plusieurs greffes car au bout d'un an, je pense, il était déjà en miettes, ma femme a eu l'idée de faire plusieurs masques de remplacement successif du visage et surtout des oreilles (importantes pour un lapin !) à partir de vieilles chaussettes d'enfant.
Il a été aussi rhabillé avec une tenue de poupée rose d'ou le nom que lui donne ma fille "Rose fleur", à l'origine il était bleu à rayure, et plutôt "masculin". »
Voici donc le doudou à trois stades de sa vie de doudou palpé, trituré, bisouillé, déchiqueté de tendresse pulsionnelle. Il finit par ressembler à l'autre doudou-lapin que j'avais dessiné chez des amis et que j'ai mis en ligne récemment.
01:04 Publié dans Art de l'enfance, Art immédiat, Art involontaire | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : art involontaire, art enfantin, songs of praise, musiques de traviole, doudous | Imprimer
16/06/2009
L'art à la recherche des doudous
Cela fait longtemps que je n'ai pas parlé de doudous. Ca m'est revenu récemment en voyant des poupées de chiffon fort séduisantes d'Alexis Nivelle que m'a laissé photographier au milieu de ses collections ce grand dénicheur devant l'Eternel qu'est Michel Boudin. A n'en pas douter, voici un artiste qui se souvient des doudous dans son art.
Et puis de passage dans le Cézallier, j'ai retrouvé un dessin que j'avais fait il y a quelques années du doudou du fils de mes hôtes, une espèce de lapin mangeouillé, défiloché, harassé...
00:43 Publié dans Art de l'enfance, Art singulier | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : doudous, art singulier, alexis nivelle, bruno montpied | Imprimer
08/05/2009
Le cerveau de l'enfant (new look)
Une poupée de chiffon, voilà des mots dont l'assemblage sonne tendrement à l'oreille... Sur le stand du brocanteur Philippe Lalane, grand fureteur devant l'Eternel, et dénicheur non pas d'oursons mais plutôt de nounoursons, pardon, de vieilles poupées chiffonnées, déchirées, tachées, entre autres, à l'occasion... Hier, sur la Foire de la Bastille à Paris... J'ai rencontré la souillon ci-dessous, repartie bien vite à mon bras pour être montrée, en premier, aux enfants de l'école où je travaille. Ils l'ont trouvée bien sale, d'abord! Puis, quand je leur eus dit que cette poupée avait traversé beaucoup, beaucoup d'années avant de pouvoir leur être présentée, ils se sont exclamés, mais alors la petite fille qui jouait avec, elle est morte maintenant...? Eh oui, ai-je rétorqué... Nous en sommes bien désolés. C'est la première chose à laquelle pensent les enfants lorsqu'ils regardent une photo ancienne montrant par exemple d'autres enfants du même âge qu'eux. I'sont tous morts, ces enfants-là? C'est gai... Leur appréhension du temps est tout de suite liée à la mort. Du coup, tout ce qui se rapporte au temps, l'Histoire par exemple, c'est un peu suspect... Je sais que si j'avais encore leur âge, je m'y calfeutrerais dans mon immédiateté...
La poupée, elle, ne s'est pas dissoute. Elle gît, l'air désolé, ou plutôt l'air passablement hantée... Ses yeux sont blancs, et cela lui confère une expression inquiétante, comme celle qu'arborent les poupées d'exorcisme. Cette poupée qui a vécu, et dont la robe porte des taches non de sang mais de temps, a des airs de poupées vaudou. Un doudou vaudou, une poupée vaudoudou? Errant entre la vie et la mort, cherchant à renouer les fils, à relier ceux que le néant sépare à jamais.
J'ai songé devant ce visage aux yeux vides au tableau de Chirico, Le Cerveau de l'enfant, où l'on voit un homme en buste les yeux fermés, une table devant lui avec un livre fermé d'où dépasse un fil de marque-page. Les surréalistes faisaient grand cas de ce tableau. Je ne me rappelle plus où ils s'amusèrent à publier une reproduction où l'homme ouvrait enfin les yeux...
20:28 Publié dans Art de l'enfance | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poupées de chiffon, art enfantin, doudous, philippe lalane | Imprimer
16/11/2008
Doudous mascottes
Une internaute lectrice du blog m'a transmis une photo de doudou qu'elle transporte paraît-il souvent avec elle (je ne sais rien de son âge, mais peu importe, peut-être est-ce en l'occurrence une sorte de mascotte, le doudou étant alors un porte-bonheur d'adulte après avoir été l'objet transitionnel de l'amour enfantin). Sa face fut-elle grignotée par un bébé affamé? Ce visage porte les stigmates d'une lèpre affectueuse, énormément affectueuse (mot qui contient "tueuse")...
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21/09/2008
Les Nefs des Fous (4)
Lancer un esquif que l'on a bricolé de ses petites mains potelées sur le bassin d'un parc, suivre ses trajectoires sur l'onde en tremblant de devoir le perdre, qu'il s'abîme... Y inscrire de toute la force de son âme ses rêves, ses espoirs, s'y projeter afin qu'il nous prolonge et nous grandisse... Qui ne comprendrait ces désirs d'enfants? Il était un petit navire...
Le bateau parfois informe que ses mains agrippent avec fragilité et fébrilité, l'enfant le voit peut-être comme une autre modalité de la chose qu'il suçotait il y a peu encore, ce doudou malaxé et déchiqueté à force d'amour.
Ces adultes qui jouent aux miniaturistes, se délectent à confectionner des maquettes, et ont prolongé vaille que vaille ces désirs enfantins. Ils lancent leurs esquifs comme bouteilles à la mer, messages envoyés vers un avenir imaginaire qui les sauverait de leur finitude. N'est-ce pas ce qui nous touche avant tout dans ces bateaux bricolés, sculptés avec amour dans l'art populaire, brut, singulier? Voici une nouvelle moisson de pièces repérées depuis nos précédentes notes (retrouvables en cliquant sur la catégorie "Marine populaire et singulière"):
12:25 Publié dans Marine populaire et singulière | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : marine populaire et singulière, joseph donadello, gilles manero, bispo de rosario, frédéric lux, bruno montpied, doudous | Imprimer
02/02/2008
Doudous, racines de l'art?
Un doudou qu'est-ce que c'est? Une guenille souvent, un truc informe, qui eut une forme, difficile à reprendre à celui qui s'y agrippe, le petit enfant, cette espèce humaine à part dirait-on quelquefois, cet alien de notre histoire intime. On les duplique parfois, pour les subtiliser aux petits, afin de pouvoir les laver (mais on ne nous dit pas toujours si ce subterfuge fonctionne à coup sûr). Car ils les traînent partout, dans n'importe quel milieu, parmi tous les microbes possibles qui semblent aussi collaborer à la transformation du doudou, chose triturée, infiniment aimé, enlacé, palpé, suçoté, englouti, chargé de matérialiser tout l'amour, tout l'élan d'amour que l'adulte en gestation est capable de porter au fond de lui, cette force cordiale, ce désir d'embrasser la nature autre que l'on a élue...
Le doudou est un objet fascinant, comme l'épouvantail, son antithèse, qui, lui, est chargé de repousser, de faire peur... Dans le doudou, se projette tant d'amour, tant de désir, qu'il est passionnant de reconnaître les traces de ces élans dans l'aspect matériel de ces loques, de ces peluches abîmées. C'est à la détérioration de l'objet que l'on reconnaît l'amour de l'enfant. C'est pourquoi ma préférence va à la peluche déglinguée, au tissu effiloché plus qu'au doudou trop propre, trop intact (comme le sont souvent les doudous que l'on a réussi à conserver après usage, rangés dans quelque musée des familles).
Malheureusement, lorsqu'on en cherche, afin de les photographier (j'ai commencé en août 2007, à la suite de conversations avec une autre professionnelle de l'enfance, Arielle Gallet, durant un centre aéré en école maternelle), ceux qui se proposent sont souvent des peluches un peu trop "nickel".
Difficile à photographier le doudou... Combien de fois ai-je été tenté ces derniers mois de demander dans le métro l'autorisation de prendre en photo le doudou dépenaillé et crado que triturait le bébé placé sur le strapontin en face de moi... Impossible, me disais-je, les parents vont me prendre pour quelque escogriffe dégénéré aux intentions peu claires! C'est le genre de proposition qui vous classe immédiatement du côté des personnages extrémement ambigus... Et puis, l'enfant ne veut pas forcément le lâcher, son doudou, c'est trop intime, témoin celui que l'on voit sur la photo ci-après, perdu deux jours après ma photo peut-être par refus inconscient de ma photo, l'enfant a refoulé le doudou (son nom, le "la"...). Tu as dévoilé mon doudou, alors qu'il fallait le cacher, est-ce ce qu'elle a voulu dire? Comme les populations de certains pays qui ne veulent pas qu'on les photographie de crainte qu'on ne leur vole leur âme, (ou par refus de la médiation, refus d'être extirpées de l'immédiat de leur vie?)...
Non, le doudou, il me le faut en loques, en guenille déchiquetée et auréolée de taches variées, ou bien peluches aux nez tordus, mordillés, aux trompes démesurément allongées, aux oreilles déchirées, aux poils hérissés, au pelage galeux... Et, autre recherche connexe, comme me l'a fait remarquer Arielle, il est bon d'essayer de noter le nom donné par l'enfant à la chose, car en plus de la création involontaire qui s'opère sur la forme et l'apparence du doudou (création par la force de l'amour qui ressemble à une destruction, ou à une consomption par excés de consommation...), il y a aussi création langagière par l'enfant, venue parfois à l'âge de la lallation et du babil, lorsque le bébé balbutie ses premiers sons, papa, maman, caca, pipi, dodo. Arielle me citait le nom d'un doudou qu'une personne de son entourage avait appelé "REU-REU"... Le mot "doudou" lui-même est né d'un redoublement de syllabe, comme on l'aura noté certainement dès le départ de cette note. Et du coup, s'intéresser à ce genre de création langagière me ramène à une enquête sur les mots privés des familles que je menais il y a plus de vingt ans et dont je n'ai jamais donné les résultats (ce blog servira peut-être aussi à cela).
Bon, il me faut avouer aussi que j'ai découvert pas plus tard qu'hier, qu'un livre était sorti sur le sujet aux Editions du Chêne (c'est "énervant", dès qu'on a une idée, on peut être sûr que quelqu'un l'a en même temps que vous ailleurs!) ... Photographies d'Alexandra Coslin, présentation et idée de Françoise Boyer.
Les auteurs ont placé en vis-à-vis des portraits d'enfants tenant leurs doudous (en noir et blanc) avec ces mêmes doudous photographiés en couleur sur l'autre page, avec le nom donné aux doudous en question, heureux détail. Je reproduis ci-dessous deux des doudous choisis en fonction de leur aspect de guenille ou de leur état de dégradation (ils sont rares dans le livre malheureusement).
14:30 Publié dans Art de l'enfance | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : Doudous, Françoise Boyer, Alexandra Coslin | Imprimer
21/10/2007
Dictionnaire insolite des petits akadémiciens
Paru en 2001, un amusant petit dictionnaire réalisé par une institutrice de maternelle (Mme Nina Harrus) avec ses élèves a retenu mon attention. Voici quelques définitions telles que ces enfants (de 4/5 ans) les établissent spontanément à l'écoute des mots proposés en classe...
ASSIS: On se met sur le banc avec ses deux fesses.
BOEUF: C'est une viande, on la mange quand elle est morte.
CRAPAUD: Ca saute, c'est dégoûtant, c'est pour les sorcières, il a des boutons partout sur lui, il est tout vert.
DECOUVRIR: On part dans un autre pays et on peut trouver un trésor de pirates.
ENFERMER: On claque la porte, on la ferme avec une clef et on peut pleurer.
FICHIER: "Dis-donc, est-ce que par hasard ce ne serait pas un gros mot?"
[Ca me fait penser au mot NYCTALOPE que j'avais moi-même un jour proposé -avec un peu de malice je l'avoue...- aux enfants de mon atelier-lecture en leur demandant d'imaginer la définition du mot que je savais inconnu d'eux. Immédiatement, j'avais enregistré des récriminations du style: "T'as dit un gros mot...OOOOh!", etc...]
GALOPIN: C'est un enfant qui galope.
HORIZONTAL: C'est une ligne qui est couchée.
INDEX: Il est accroché à la main, c'est un doigt après le pouce.
JARDINIER: Il a un râteau, parfois il a un chapeau, il arrose les plantes, il porte une salopette.
K.O: Un soldat a fait la guerre et il est très très mort.
Etc...
(Dictionnaire insolite des petits akadémiciens, les mots quotidiens revus par nos enfants, préface Florence Delay, éd. Cosmopole, Paris, 2001.)
13:10 Publié dans Art de l'enfance | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : dictionnaire enfantin, nina harrus, cosmopole, florence delay, art de l'enfance, doudous | Imprimer