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09/08/2014

Que voyez-vous?

    On va jouer à un autre jeu. Je propose aux internautes de passage par ce blog de me dire ce qu'ils voient, ce qu'ils interprètent, lorsqu'ils contemplent l'image ci-dessous. Un petit texte à publier dans les commentaires, s'il vous plaît... Les plus inspirés (mon jury de lecture est payé très cher) seront sélectionnés et anoblis à la dignité de textes principaux, posés en dessous de l'image. Il s'agit d'arriver face à elle de la manière la plus vierge possible

Jean-Pierre-Paraggio-.jpg

Jean-Pierre Paraggio, Mon Chien - La nuit sur l'ongle, 29x19, cm, 2002

 

Que voient-ils donc? :

"Une grotte aux pirates"

(Benjamin Ravage)

"Trés intrigant ce dessin littéralement en camaïeu. A première vue, il m'inspire beaucoup de musiques avec ses cordes multiples et ses volutes. Et puis, sur la droite je voudrais y reconnaître un(e) "persona",un masque de théâtre grec, avec une bouche qui déclame ou chante ; une barbe même au menton... Cet assemblage de formes géométriques, orales et musicales, évoque un souvenir lointain des portraits "horticoles" d'un Archimboldo."

(Michel Valière)

"Pour fabriquer les objets en écume de mer – pipes, brosses à dents, gratte-dos, étuis péniens et autres prolongements de notre anatomie – on ne dédaigne pas la tonalité romantique des nuits de lune, on marche sur les plages au cours de telles nuits, les yeux fixés sur le feston grisâtre que forme la mer à son contact avec le sol du littoral. Les plages sont des cimetières où l'on aime se promener pieds nus pour sentir les craquements des coquilles sur les talons. Il faut marcher à pas rapides en fixant le ruban d'écume qui pétille au clair de lune. Muni d'une petite pelle pentagonale en bois de coudrier, le ramasseur d'écume guette dans la forme de la mousse l'émergence d'une tête, d'un animal, d'un paysage, plus rarement d'une scène entière, et quand il la trouve, il décolle une plaque d'écume avec sa pelle et la dépose plus haut sur la plage, à l'abri de la marée, où elle sèchera à la lumière pâle, s'agglomérant aux fragments de cadavres que recèle le sable modifiant encore la forme originelle.
Ensuite interviennent les pâtissières, en nombre identiques aux ramasseurs d'écume. Elles ne sont plus vierges depuis une lunaison. En haut de la plage, elles ont allumé un feu de branches de coudrier, et elles y font chauffer dans un grand chaudron un caramel de miel qui brille comme de l'or en fusion. Lorsque le caramel est bien fluide, chacune en lance une grande louchée sur un grand miroir où elle s'étale en plaque translucide ; pendant toute la fin de la nuit, les plaques ainsi déposées par les pâtissières vont sécher, se gonfler, se charger de bulles et prendre des formes particulières, selon l'humeur et les désirs des jeunes filles qui les ont créées. Pendant ce processus, ramasseurs d'écume et pâtissières, en commun, construisent des cages en bois de coudrier un peu plus haut encore sur la plage.
Quand plaques d'écume de mer et plaques de caramel sont sèches, on compare l'effet obtenu et on regroupe par paires les plaques dont des détails se superposent absolument. Il y en a toujours qui forment ainsi des couples. Jeunes pâtissières et ramasseurs d'écumes s'apparient ainsi et se tiennent main dans la main devant leurs plaques réunies.
Alors interviennent les verriers. Toute la journée suivante, reproduisant les dessins des plaques dans la pâte de verre, ils soufflent pour chaque couple cinq plaques de verre dans lesquelles se retrouvent superposés les désirs de chaque ramasseur d'écume et de chaque pâtissière. Une fois les plaques de verre obtenues, au soleil couchant, chaque couple s'allonge dans la cage qui lui est dévolue et on fixe sur les charpentes de bois de coudrier les quatre plaques de verre des murs, et la plaque de verre du toit. Il s'agit de verre couleur d'ambre, où se retrouvent tous les motifs des désirs figés dans l'écume des hommes et le caramel des femmes. Pendant toute la lunaison suivante, les couples se feront l'amour dans ces cages de verre coloré, et sur leur peau nue l'image des motifs des plaques de verre projetée par le soleil le jour, par la lune la nuit, s'imprime fugacement. Le sol est recouvert d'une membrane enduite de gélatine de veau. Sur cette membrane, l'image projetée des corps et des motifs des désirs se fixe.
A la fin de la lunaison, lorsque les amants s'échappent des cages et s'éloignent main dans la main le long du littoral, intervient Jean-Pierre Paraggio. Muni d'un petit pinceau, il reprend quelques détails des motifs imprimés sur les membranes abandonnées, estompe ici, renforce là. Voici enfin percé le secret de son œuvre.
Sur ce fragment, une huître joue de la guitare."

(Régis Gayraud)

"Je vois un singe aztèque, un animal savant et moqueur qui porterait la coiffe des civilisations perdues. Quelque chose comme l'ironie des mondes enfouis."

(Laurent Albarracin)

"Un maraudeur, le ventre plein de fils de pêche, d'écrous et d'épingles à linge, se laisse envahir par la moisissure au sortir de la nuit."

(Darnish)

"Comme cette œuvre me semble faite d'objets métalliques, je dirais que c'est un automate oiseau escargot perché sur son nid en train de nourrir son petit."

(Voilesdoiseaux)

"Il me fait penser au Château Ambulant, l’œuvre si forte de Miyazaki inspirée du roman "le Château de Hurle" de Dianna Wynne-Jones. Un château ambulant qui aurait une tête et un corps germés sur l'édifice primitif (mais il me semble me rappeler que le château de Miyazaki a en effet bien une tête...). Corps et tête très semblables à ceux de quelque soudard, quelque reître du Moyen-Age. Son armure est tatouée des mille déchets dans lesquels il s'est roulé au cours de ses combats. Et comme le château dont il est le prolongement, il avance en brinquebalant à travers la campagne, dans les ténèbres, guidé par une pauvre petite étoile qui brille au firmament, constamment en butte aux risques d'un démantèlement, d'une démantibulation de ses vis, écrous, plaques de métal mal attachés, le tout grinçant dans des bruits crispant de fer rouillé frotté sans huile depuis des lustres. En son cœur dort encore et toujours Calcifer, son feu secret qui le maintient en vie, et qui supplie la jeune-vieille Sophie: "Sophiiiie, attention! Mon feu s'éteiiiint...!" "

(Le Sciapode)

"Les rouages d'un hibou prolifèrent sous l'écorce de la nuit."

(David N.)

"Elle tend le cou, le tend pour essayer de se débarrasser de ce masque qui l'empêche de respirer... Sans mains c'est difficile de se libérer... Sans doute voudrait-elle hurler à la lune... mais les pièces, les rouages, les vis empêchent les cris de sortir de sa gorge... Combien sont-elles à souffrir ainsi...?"

(Claudine)

"Le chien hurle entre chien et loup une caresse douce à l'oreille d'une fraise sauvage des bois. La lune monte pendant ce temps sur la table du ciel en bois. J'ai traversé à cheval le miroir intime des dures relations humaines. Le loup a tué le chien. J'ai ouvert un livre sans images et sans mots. Je me suis assis sous la lune pour attendre le lever du soleil...."

(J.Guirao)

"C'est une omoplate, celle d'une femme très mince, voire maigre, un peu osseuse, une de ces femmes tellement émouvantes, dont le corps ne semble qu'une ébauche façonnée pour en agrémenter les orifices offerts au plaisir. Décharnée, celle-ci n'a que la peau tendue sur des épaules qui passeraient pour enfantines, s'il n'y avait pas ces excroissances, ces calcifications, ces tumeurs."

(Isabelle Molitor)

Commentaires

une grotte aux pirates

Écrit par : benjamin ravage | 10/08/2014

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Oui. Trés intrigant ce dessin littéralement en camaïeu. A première vue, il m'inspire beaucoup de musiques avec ses cordes multiples et ses volutes. Et puis, sur la droite je voudrais y reconnaître un(e) "persona",un masque de théâtre grec, avec une bouche qui déclame ou chante; une barbe même au menton... Cet assemblage de formes géométriques , orales et musicales évoque un souvenir lointain des portraits "horticoles" d'un Archimboldo.
Vous souhaitiez Cher Sciapode un délire ...voici celui qui s'est "imposé" à moi, coupé du monde du net depuis près d'un an...
Je vous remercie d'avoir pensé à m'envoyer cette note, ça m'a un peu déridé et fait oublier le reste du morne et douloureux quotidien

Écrit par : Michel Valière | 10/08/2014

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Pour fabriquer les objets en écume de mer – pipes, brosses à dents, gratte-dos, étuis péniens et autres prolongements de notre anatomie – on ne dédaigne pas la tonalité romantique d es nuits de lune, on marche sur les plages au cours de telles nuits, les yeux fixas sur le feston grisâtre que forme la mer à son contact avec le sol du littoral. Les plages sont des cimetières où l'on aime se promener pieds nus pour sentir les craquements des coquilles sur les talons. Il faut marcher à pas rapides en fixant le ruban d'écume qui pétille au clair de lune. Muni d'une petite pelle pentagonale en bois de coudrier, le ramasseur d'écume guette dans la forme de la mousse l'émergence d'une tête, d'un animal, d'un paysage, plus rarement d'une scène entière, et quand il la trouve, il décolle une plaque d'écume avec sa pelle et la dépose plus haut sur la plage, à l'abri de la marée, où elle sèchera à la lumière pâle, s'agglomérant aux fragments de cadavres que recèle le sable modifiant encore la forme originelle.
Ensuite interviennent les pâtissières, en nombre identiques aux ramasseurs d'écume. Elles ne sont plus vierges depuis une lunaison. En haut de la plage, elles ont allumé un feu de branches de coudrier, et elles y font chauffer dans un grand chaudron un caramel de miel qui brille comme de l'or en fusion. Lorsque le caramel est bien fluide, chacune en lance une grande louchée sur un grand miroir où elle s'étale en plaque translucide ; pendant toute la fin de la nuit, les plaques ainsi déposées par les pâtissières vont sécher, se gonfler, se charger de bulles et prendre des formes particulières, selon l'humeur et les désirs des jeunes filles qui les ont créées. Pendant ce processus, ramasseurs d'écume et pâtissières, en commun, construisent des cages en bois de coudrier un peu plus haut encore sur la plage.
Quand plaques d'écume de mer et plaques de caramel sont sèches, on compare l'effet obtenu et on regroupe par paires les plaques dont des détails se superposent absolument. Il y en a toujours qui forment ainsi des couples. Jeunes pâtissières et ramasseurs d'écumes s'apparient ainsi et se tiennent main dans la main devant leurs plaques réunies.
Alors interviennent les verriers. Toute la journée suivante, reproduisant les dessins des plaques dans la pâte de verre, ils soufflent pour chaque couple cinq plaques de verre dans lesquelles se retrouvent superposés les désirs de chaque ramasseur d'écume et de chaque pâtissière. Une fois les plaques de verre obtenues, au soleil couchant, chaque couple s'allonge dans la cage qui lui est dévolue et on fixe sur les charpentes de bois de coudrier les quatre plaque de verre des murs, et la plaque de verre du toit. Il s'agit de verre couleur d'ambre, où se retrouve tous les motifs des désirs figés dans l'écume des hommes et le caramel des femmes. Pendant toute la lunaison suivante, les couples se feront l'amour dans ces cages de verre coloré, et sur leur peau nue l'image des motifs des plaques de verre projetée par le soleil le jour, par la lune la nuit, s'imprime fugacement. Le sol est recouvert d'une membrane enduite de gélatine de veau. Sur cette membrane, l'image projetée des corps et des motifs des désirs se fixe.
A la fin de la lunaison, lorsque les amants s'échappent des cages et s'éloignent main dans la main le long du littoral, intervient Jean-Pierre Paraggio. Muni d'un petit pinceau, il reprend quelques détails des motifs imprimés sur les membranes abandonnées, estompe ici, renforce là. Voici enfin percé le secret de son œuvre.
Sur ce fragment, une huître joue de la guitare.

Écrit par : Régis Gayraud | 11/08/2014

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Je vois un singe aztèque, un animal savant et moqueur qui porterait la coiffe des civilisations perdues. Quelque chose comme l'ironie des mondes enfouis.

Écrit par : Laurent Albarracin | 11/08/2014

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Un maraudeur, le ventre plein de fils de pêche, d'écrous et d'épingles à linge, se laisse envahir par la moisissure au sortir de la nuit.

Écrit par : Darnish | 11/08/2014

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Moi je vois un oiseau avec des cornes d escargots perché sur son nid entrain de nourrir son petit. Comme cette œuvre me semble faite d objets métalliques je dirais que c est un automate oiseau escargot perché sur son nid entrain de nourrir son petit.

Écrit par : voilesdoiseaux | 11/08/2014

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Il me fait penser au Château Ambulant, l’œuvre si forte de Miyazaki inspirée du roman "le Château de Hurle" de Dianna Wynne-Jones. Un Château ambulant qui aurait une tête et un corps germés sur l'édifice primitif. Corps et tête très semblables à quelque soudard, quelque reître du Moyen-Age. Son armure est tatouée des mille déchets dans lesquels il s'est roulé au cours de ses combats. Et comme le château dont il est le prolongement, il avance en brinquebalant à travers la campagne, dans les ténèbres, guidé par une pauvre petite étoile qui brille au firmament, constamment en butte aux risques d'un démantélement, d'une démantibulation de ses vis, écrous, plaques de métal mal attachées, le tout grinçant dans des bruits crispant de fer rouillé frotté sans huile depuis des lustres. En son coeur dort encore et toujours Calcifer, son feu secret qui le maintient en vie, et qui supplie la jeune-vieille Sophie: "Sophiiiie, attention! Mon feu s'éteiiiint...!"

Écrit par : Le sciapode | 11/08/2014

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Les rouages d'un hibou prolifèrent sous l'écorce de la nuit.

Écrit par : David N. | 13/08/2014

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David, votre lien ne fonctionne pas, je vous signale...

Écrit par : Le sciapode | 15/08/2014

Oui, merci Bruno de me le signaler, il y avait bien une faute dans l'URL du site de La vertèbre et le rossignol.
Maintenant, le lien devrait fonctionner.

Écrit par : David N. | 15/08/2014

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elle tend le cou, le tend pour essayer de se débarrasser de ce masque qui l'empêche de respirer...sans mains c'est difficile de se libérer...sans doute voudrait-elle hurler à la lune...mais les pièces, les rouages, les vis empêchent les cris de sortir de sa gorge...combien sont-elles à souffrir ainsi...?

Écrit par : claudine | 21/08/2014

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Le chien hurle entre chien et loup une caresse douce à l'oreille , à l'oreille d'une fraise sauvage des bois. La lune monte pendant ce temps sur la table du ciel en bois. J ' ai traversé à cheval le miroir intime des dures relations humaines. Le loup a tué le chien. J'ai ouvert un livre sans images et sans mots. Je me suis assis sous la lune pour attendre le lever du soleil....

Écrit par : j. Guirao | 21/08/2014

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C'est une omoplate, celle d'une femme très mince, voire maigre, un peu osseuse, une de ces femmes tellement émouvantes, dont le corps ne semble qu'une ébauche façonnée pour en agrémenter les orifices offerts au plaisir. Décharnée, celle-ci n'a que la peau tendue sur des épaules qui passeraient pour enfantines, s'il n'y avait pas ces excroissances, ces calcifications, ces tumeurs.

Écrit par : Isabelle Molitor | 23/08/2014

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Rien de moins émouvant qu'une "femme osseuse" couverte de "calcifications et de tumeurs", autant trouver du charme aux squelettes, et sombrer dans la nécrophilie. Quelle mouche à cadavre vous a piqué Madame Molitor?

Écrit par : James Song | 27/08/2014

Quand je parlais d'émouvantes, c'étaient des femmes osseuses que je parlais, sans calcifications ni tumeurs. mais voilà, l'omoplate de celle-ci est recouverte de toute sorte de scrofules. Et en plus, il y a un petit malin qui a profité de cette omoplate-là pour y tendre quatre cordes et en faire une cithare. Elle s'allonge sur le ventre et lui joue des airs de Ravi Shankar par dessus. C'est lamentable mais vraiment émouvant.

Écrit par : Isabelle Molitor | 31/08/2014

C'est la Duchesse du tout nucléaire. Très riche et couverte de bijoux exotiques et onéreux, coiffée d'un chapeau extravagant pour dissimuler l'étroitesse de son cerveau et sa calvitie irrémédiable, elle est encore très fière de sa réussite financière et de tous ses artifices et refuse de se rendre compte qu'ils avancent dans un état de décomposition irréparable.

Elle s'est faite tellement tirer la peau qu'elle a maintenant la gueule d'un boule-dogue chétif. Ses chirurgiens esthétiques lui ont placé maintes prothèses pour essayer de la tirer d'une vieillesse implacable.

Il lui reste un joli ruban de satin doré qui lui a été offert par son dernier gigolo, un bel esclave qu'elle a du payer très cher pour se faire sauter.

Mais ce n'est peut-être qu'un chien sympathique après tout représenté par l'imagination fascinante d'un artiste, un chien souriant et à l'oeil vif qui n'a de rouages que ceux que lui a prêtés son maître pour en faire un portrait curieux et original qui va développer les imaginations, les cauchemars ou les rêveries de ceux qui vont le contempler.

Je vais lire les autres commentateurs. ça promet d'être varié, insolite et intéressant!

Valérie

Écrit par : librellule | 31/08/2014

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C'est la tête d'un lion aveugle, une épingle à nourrice en travers de l'oeil le transforme en fragment de guitare, mais dans sa crinière germe un monde en devenir, une oreille démesurée pour écouter le fond d'un coquillage, et en même temps vue d'avion une côte envahie par la marée noire au fin fond du Finistère.

Écrit par : Carniflow | 10/05/2015

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