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21/02/2022

Epouvantail plus que girouette, c'est-à-dire "pignols"

     J'aime infiniment les épouvantails, leurs silhouettes sur le ciel d'orage, loques au vent, l'air désolé, pour ne pas dire piteux, regrettant leur condition, eux que l'on a placés par tous les temps dans les champs, et qui n'effraient pas les oiseaux, les corbeaux venant jusqu'à prendre la pose sur leurs épaules, les gratifiant à l'occasion d'un trait de fiente sur leurs pardessus déchiquetés.

    Parmi eux, on peut distinguer une sous-catégorie, les épouvantails à pales, sièges d'un mouvement censé épouvanter les moinillons, un mouvement et peut-être aussi quelques éclairs de lumière réverbérée suite aux rayons du soleil. Une ancienne carte postale m'a récemment fait découvrir qu'on les appelait du côté de la Bretagne, à un moment, des "pignols". Je ne sais d'où vient le mot qui ne sonne pas bien breton, a priori.

Le fabricant de pignols, à Plouigneau (Finistère)(2).jpg

D'après l'éditeur de la carte, les pignols seraient des "sortes de girouettes pour effrayer les oiseaux"... Cela s'appelle en bon français des épouvantails, monsieur l'éditeur (sans doute l'Hamonic signalé dans le coin supérieur droit de la carte) ; coll. Bruno Montpied.

Le fabricant de pignols et sa femme.jpg

Le sculpteur réjoui, un de ses "enfants", un marin apparemment, entre ses mains, et sa femme, prenant le frais parmi d'autres réalisations, Plouigneau (Finistère).

Pignols, évêque et marin.jpg

Un évêque et un autre marin.

Pignols, deux autres.jpg

Deux autres personnages que j'identifie moins bien (peut-être un meunier à droite)...

 

      C'est assez rare de pouvoir voir à quoi ressemblaient les fabricants d'épouvantail, à quelle classe sociale ils appartenaient (du moins en ce qui concerne les véritables épouvantails destinés à faire fuir la gent ailée, et non pas les épouvantails artistiques, participant à des concours de néo-ruraux¹). C'est pourquoi j'ai également récemment acquis une autre carte, plus moderne, en couleur, affichant un de ces artefacts en compagnie de son "Gepetto", un certain Yves Guérin, capté en Eure-et-Loir en 1989.

Fabricant d'épouvantail en Bretagne.jpg

Coll. B.M.

 

     Mais, pour ne pas quitter les épouvantails à pales, il m'est revenu que je possédais aussi depuis très longtemps une autre carte, éditée autrefois par le Musée Rural des Arts Populaires de Laduz (dans l'Yonne), présentant là aussi un de ces mêmes épouvantails aux "bras" tournoyant.

Epouvantail a pales, musee de Laduz (2).jpg

Un autre épouvantail à pales, peut-être plus élaboré que ceux de Plouigneau, appartenant à la collection Humbert, Musée Rural des Arts Populaires, Laduz ; carte postale coll. B.M.

 

     Il fait partie des collections extraordinaires de ce musée, hélas fermé depuis deux ans, Jacqueline Humbert, qui le tenait à bout de bras quasiment seule (pendant les 32 années qui ont suivi la disparition de son mari, Raymond Humbert), ne pouvant plus s'en occuper. L'avenir de cette collection, qui enchanta nombre de générations d'amateurs de poésie rurale et insolite, paraît désormais très incertain. On aimerait en recevoir de meilleures nouvelles.

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¹ Je ne range bien sûr pas dans les épouvantails proprets des néo-ruraux ceux qu'élabore Denise Chalvet sur les pentes de l'Aubrac, à Rimeizenc exactement. Là, ses centaines de créatures plantées sur une colline ou stockées densément dans une grange et une étable, relèvent plutôt  de l'art rustique moderne, dont se prévalait Gaston Chaissac, qui inventa le terme pour qualifier sa propre production, et pour se distinguer de l'art brut de son ami Dubuffet.

Commentaires

Buñuel, dans son "Robinson Crusoé" parvient à glisser quelques touches anticléricales bien que ce film soit un film de commande destiné au grand public, voire au jeune public...Robinson se décide à réagir pour protéger ses cultures assiégées par les oiseaux. Il est déterminé à installer quelque chose qui les effrayera à jamais. On le voit alors fabriquer une croix, la porter sur son épaule comme le christ et la planter avec force au milieu de son modeste champ...avec satisfaction il contemple son œuvre et on l'entend se dire qu'avec ça, aucun volatile n'osera plus le piller...puis il enfile un vêtement (une jupe?) pour habiller sa croix et c'est finalement un épouvantail somme toute tout à fait classique...

Écrit par : Darnish | 22/02/2022

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Mister Niche d'Art, vous avez l'air d'être drôlement féru, pour ne pas dire obsédé, de cinéma. Je vous verrais bien développer, avec le temps, l'âge venant, cette passion à l'instar d'un Guy Brunet, tellement mordu par les héros hollywoodiens ou du cinéma français des années 30 aux années 70, acteurs, metteurs en scène ou producteurs mêlés, qu'il produisit des dizaines de silhouettes peintes de ces héros, des dioramas en carton peint, des affiches réinterprétées, le tout convergeant dans la réalisation de films tournés au caméscope (vous, plus actuel, vous feriez ça avec un mobile dernier cri) où il racontait face caméra, en recopiant des livres, l'histoire du cinéma, d'une voix, à un moment, imitant les intonations d'un Frédéric Mitterrand... Avouez, Mister Niche d'Art, que ça vous tente, non?

Écrit par : Karl Hambourg | 25/02/2022

Une référence photographique pour illustrer ces épouvantails : Hans Silvester
"En 1960, le photographe Hans Silvester découvre en Provence la beauté de ces silhouettes fantomatiques qui peuplaient alors les champs entre Luberon et monts de Vaucluse : les épouvantails. Fasciné par ces silhouettes dépenaillées, formes d’art brut et éphémères, Hans Silvester a voulu en garder la mémoire photographique tout en liant un contact avec les fermiers des continents qu’il a traversés. Pendant des décennies, au cours de ses pérégrinations en France, en Europe, au Japon, au Maroc et en Afrique, il a photographié plusieurs centaines d’épouvantails qui, en même temps que des myriades d’oiseaux, ont peu à peu disparu de nos campagnes."

Écrit par : Gilles | 22/02/2022

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C'est très juste cette remarque sur la disparition des épouvantails concomitante de la disparition des oiseaux. Elle a précédé quelque peu la destruction des oiseaux dans les campagnes. Comme si ce couple, l'oiseau, l'épouvantail. était inséparable, les deux n'étant pas opposables comme l'aurait voulu l'épouvantement.

Écrit par : Le sciapode | 23/02/2022

Cela dit, Gilles, je préciserai que les épouvantails continuent parfois de résister ici et là. Ne vous souvenez-vous pas de cet épouvantail que je photographiai un jour en votre compagnie? C'était en lisère d'une vigne, si je me souviens bien, sur la commune de Naujan-et-Postiac, en Gironde, dans l'Entre-Deux-Mers que vous connaissez bien. Mais il est vrai que cela eut lieu en 2009... Voici déjà 13 ans donc.

Écrit par : Le sciapode | 25/02/2022

Cher Karl, oui ça me plairait bien de tourner des images...le problème c'est que je suis un quasi handicapé des technologies modernes...je pense que même les caméscopes de Guy Brunet me poseraient des problèmes...alors un portable dernier cri comme vous dîtes, je vous raconte pas!

Écrit par : Darnish | 25/02/2022

Eh ouais, plus d'oiseaux, plus d'épouvantails; plus d'abeilles, plus de fleurs; plus de vivants, plus de morts. Beau programme, non ?

Écrit par : L'aigre de mots | 22/02/2022

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Et un père Ubu russe rêvant de reconstituer son empire par-dessus tout ça!

Écrit par : Le sciapode | 23/02/2022

On parle ici des épouvantails qui résistent. Mais on pourrait aussi parler de ceux qui attaquent, comme l'abject Poutine, chef du nouvel Empire knouto-tsariste, et de l'immense lâcheté des dirigeants d'Europe et d'Amérique qui baissent leur froc devant lui comme l'ont fait Chamberlain et Daladier en 1938 à Münich devant Hitler. Ici, l'épouvantail retrouve pleinement sa fonction d'épouvanter. Et la remarque que faisait le théoricien de l'École de Francfort, Max Horkheimer, après l'écrasement de la Révolution hongroise en 1956, conserve toute sa validité : « Le monde occidental se déshonore à chaque sourire adressé aux meurtriers du Kremlin, avec lesquels il serait en très bons termes si seulement ceux-ci n'avaient pas une attitude aussi menaçante. Ce même monde occidental périra de préférer ses propres affaires matérielles à la protection de l'humanité, de ce côté-ci des frontières ou de l'autre ≫ (Max Horkheimer, Notes critiques, 1956-58).

Écrit par : L'aigre de mots | 25/02/2022

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Que préconisez-vous donc, cher Aigre? Que tout le monde s'étripe à coups de bombes nucléaires? "Plus(se) de morts", disiez vous dans votre commentaire précédent?

Écrit par : Le sciapode | 25/02/2022

Avant de jouer la java des bombes atomiques, il y a bien d’autres manières de faire valser les dictateurs.

Écrit par : L’aigre de mots | 26/02/2022

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J'ai comme l'impression que tout le monde y pense et même s'y emploie, non? A commencer par ses adjoints au Kremlin, ses généraux mêmes... et le peuple russe doit en avoir marre de le subir, lui et sa clique de corrompus.

Écrit par : Le sciapode | 26/02/2022

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OTAN en emporte le vent ....

Écrit par : y | 28/02/2022

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