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12/02/2012

"303" n°119

      C'est bien énigmatique comme titre, n'est-ce pas?303,eva prouteau,art brut,art immédiat,art singulier,bruno montpied,laurent danchin,armand goupil

    303, arts, recherches et créations est en réalité le titre complet de cette belle revue qui existe depuis au moins trente ans, financée par la région des Pays de la Loire, dans un premier temps consacrée en grande partie au patrimoine de cette région, puis depuis quelques années plus spécialement à la recherche en art. Le n°119, daté de janvier dernier, est un numéro spécial "art brut, outsider, modeste", concocté par Eva Prouteau qui collabore régulièrement à la revue.

    Au sommaire, on n'a pas joué forcément la carte du foisonnement comme ce fut le cas lors du numéro spécial de la revue Area sur le même sujet l'année dernière. Les textes sont plus longs que dans ce dernier magazine qui privilégie les entretiens synthétiques plutôt que les textes de fond. Eva Prouteau a préféré placer l'éclairage sur certains points permettant de souligner l'éclectisme des productions classées avec plus ou moins de rigueur dans l'art soi-disant "brut", toutes relevant cependant d'une forme de poésie singulière. Derrière son entreprise de "décloisonnement" des catégories et des appellations –ce qui ne signifie pas pour elle confusion des genres et des catégories, mais plutôt besoin d'établir des passerelles dans le respect de la valeur des uns et des autres– on sent chez elle un goût marqué pour les petites collections secrètes, notamment d'art populaire insolite, comme celle du musée des traditions de la Guérinière à Noirmoutier, ou celle des cibles de tir du Cercle de Chemazé (sud de la Mayenne ; déjà évoquées par Pascale Mitonneau dans le n°78 de la même revue 303 en 2003 avec des illustrations différentes), passionnantes œuvres d'art forain destinées à être criblées de balles, goût également apparent lorsqu'elle évoque avec sagacité l'existence de la Folk Archive, ce collectage par la photographie de "formes esthétiques non valorisées" (graffiti, sculptures de sable, motos et voitures customisées, épouvantails... Que des sujets que sur ce blog nous prisons particulièrement comme nos lecteurs l'ont sûrement remarqué) établi par deux artistes anglais, Jeremy Deller et Allan Kane. Il est aussi question ici et là dans la revue de l'art des douilles d'obus ciselées par les Poilus (article de Laurent Tixador et Eva Prouteau), et aussi d'un environnement belge, celui de Jean-Pierre Schetz, à Jupille, prés de Liège (dont Brigitte Van Den Bossche, collaboratrice du MADmusée dans cette dernière ville, auteur de l'article dans 303 a contribué à sauver des vestiges à la Fabuloserie, comme je l'avais constaté en juillet dernier –voir également la note que j'avais consacrée à ce site sur ce blog ; les quelques sculptures conservées par Caroline Bourbonnais ont été installées sur une sorte de ponton)

 

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Le cochon, 1963, contreplaqué, collection des cibles de l'Union de Chemazé, photo extraite du n°78 de la revue 303 (article de Pascale Mitonneau) en septembre 2003

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Cible peinte, collection Jean Estaque, ph. Bruno Montpied, 2009 (collection donc distincte de la collection des cibles de Chemazé)

 

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Fragments préservés de Jean-Pierre Schetz à la Fabuloserie dans le parc d'environnements, et au loin les statues de Camille Vidal, ph. BM, 2011 (ceci n'est pas dans le n° spécial de 303)

   A propos d'environnements, j'ai participé à ce numéro avec deux textes, l'un sur les sites d'habitants-paysagistes dans les Pays de la Loire (Aux jardins des délices populaires, texte où sont évoqués Louis Licois, Marcel Baudouin, Camille Jamain, Emile Taugourdeau, André Pailloux, Michel Chauvé, Henri Travert, Bernard Roux, et les maisons de Rossetti et Pennier dans la périphérie du Mans), plus un autre sur Armand Goupil, ce peintre amateur étonnant, ancien instituteur, originaire de la Sarthe, dont j'ai déjà eu l'occasion de donner sur ce blog maints autres aperçus.

 

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Armand Goupil, Barbe blanche, 11-X-61, huile sur carton, rassemblement Jean-Philippe Reverdy (image inédite, non publiée dans le numéro de 303)


    Laurent Danchin publie une contribution à propos de la distinction à faire selon lui dans l'art des médiumniques entre les créateurs savants et les créateurs plus populaires. Oubliant peut-être de préciser que l'art brut n'a pas insisté sur cette distinction parce que ses thuriféraires cherchant à mettre en évidence l'existence d'un art intime, surgi des profondeurs de l'inconscient, n'avaient que faire d'opérer de telles distinctions (de même qu'entre art des fous et art des non-fous). En fait, l'intervention de Danchin participe d'une remise en cause de la validité conceptuelle de l'art brut, ce qui peut paraître surprenant de la part de quelqu'un qui fait désormais partie du comité consultatif de la collection d'Art Brut à Lausanne. Personnellement, dans l'art des médiumniques, à qui je trouve généralement de l'unité, (s'il fallait opérer des distinctions, ce serait plutôt au niveau formel, les architectures, les symétrisations d'Augustin Lesage, Fleury-Joseph Crépin, Victor Simon d'un côté, face aux sinuosités botaniques des spirites tchèques par exemple), dans l'art des médiumniques donc, je trouve un raffinement qui n'est lui pas plus le fait des autodidactes populaires que des savants en rupture de ban (comme Victorien Sardou ou Marguerite Burnat-Provins), provenant en fait plutôt du recours à l'automatisme graphique, ce qui avait fasciné André Breton en 1933 (dans Le Message automatique), mais n'avait pas empêché un peintre comme André Masson de pratiquer le dit automatisme dans son dessin et sa peinture dès les années 20.

 

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Cecilie Markova, sans titre, daté 22-5-1960, coll. BM (illustration non insérée dans le numéro de 303)

    Ce numéro se focalise sur certains autres points, les écrits de Chaissac, l'art d'Hélène Reimann, le point de vue de Savine Faupin sur la réouverture du LaM avec son extension vouée à l'art brut, et surtout avec son opinion sur l'art brut aujourd'hui, cohérente avec la position d'une conservatrice de musée. Ce qu'elle dit de la façon dont André Breton envisageait l'art brut, et de son clivage avec Dubuffet me paraît discutable mais ce serait trop long d'en parler ici.

 

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Hélène Reimann, sans titre, avant 1987, donation L'Aracine, LaM de Villeneuve-d'Ascq ; reproduit dans 303


     La coordonnatrice de ce numéro a également donné l'occasion à Jean-Louis Lanoux alias Animula Vagula (le pseudo a été révélé publiquement sur internet) de se lancer dans un grand numéro impérialiste de "mère des blogs" qu'il espère sans doute, comme à son habitude, masquer sous l'humour (jamais exempt de coups de pied de l'âne). Le chapeau de cette intervention intitulée "les  Dérives d'Animula Vagula" définit comment, avec sa femme Catherine Edelman, il a orienté leur projet de blog fin 2005, en élaborant une autofiction campant une "jeune blogueuse affairée" imaginaire, "qui adore jouer avec les codes identitaires de la blogosphère"... [Ce chapeau, rédigé par l'éditeur du dossier sans que cela soit indiqué par un artifice typographique distinctif – voir commentaire de J2L ci-après – reflète assez bien le concept du blog animulesque selon moi, à tel point qu'y sentant à ce point l'influence des auteurs de ce blog, je suis fondé à considérer ce chapeau comme étant écrit par eux...]. Lanoux cherchant ainsi comme souvent à paraître rester "djeune", non déconnecté de la réalité, toujours "in", comme on disait autrefois. Cette explication permet aussi, bénéfice secondaire, de noyer le fait que ce genre de "cybercarnet" n'est en réalité qu'un support d'expression nouveau pour des intellectuels marginaux qui faisaient
auparavant, par exemple, des fanzines tapés à la machine, et qui, désolé Jean-Louis, pour le coup, l'avaient du reste cette fois précédé, en particulier dans l'intérêt pour les formes d'art populaire les plus hétéroclites ("Animula" ne cesse de le répéter, elle se veut la prem's, belle imposture). "Mère des blogs", tu parles! Sa dérive dérape vite dans le gonflage de chevilles (comme il s'en aperçoit d'ailleurs, car il est lucide le bougre, trop peut-être), et dans un narcissisme échevelé dont le lecteur n'a que faire. Laissons-le se caresser avec ces qualifications de "référence dans le monde de l'art brut" et passons à autre chose. 

   On regrettera dans ce numéro spécial, au chapitre des absents, qu'on n'ait pas plutôt interrogé ou demandé des contributions à la Collection ABCD qui s'interroge sur l'art brut aujourd'hui, ou bien qu'on ne se soit pas intéressé à l'évolution, en direction de l'art singulier, du musée d'art naïf de Laval, musée de la région des pays de la Loire pourtant. Etait-ce par manque de place? Le numéro en l'état actuel suscitera déjà, rien que dans les régions ouest, de bien fécondes questions sur les nouvelles façons d'envisager et de pratiquer l'art aujourd'hui. 

A signaler le samedi 21 avril, au Lieu Unique à Nantes, la présentation de la revue, dans le cadre d'un "week-end singulier" organisé par Patrick Gyger (auteur également dans la revue d'un article sur Daniel Johnston), où sera également projeté le film Bricoleurs de Paradis, Le Gazouillis des éléphants de Remy Ricordeau, avec un débat pour suivre, animé par Eva Prouteau. Durant la période du 7 mars au 20 mai, se tiendra au Lieu unique une expo consacrée à Daniel Johnston, Welcome to my world! D'autres intervenants sont également annoncés durant ce week-end comme Bruno Decharme, Barbara Safarova, Mario Del Curto, etc. Voir le site web du Lieu unique.

Commentaires

Un détail : je ne suis pas l'auteur du chapeau de "l'intervention intitulée Les Dérives d'Animula" publiée dans le n°119 de la revue 303.

Ce chapeau est de la direction éditoriale. A noter qu'il ne mentionne nullement "ma femme".
Il dit seulement très bien: "Animula vagula est un personnage imaginaire de sexe féminin, qui adore jouer avec les codes identaires de la blogosphère (...)".

Ceci pour l'information de vos lecteurs à qui je présente mes bonnes salutations.

Jean-Louis Lanoux

Écrit par : Jean-Louis Lanoux | 13/02/2012

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Donc Animula Vagula, avec sa façon de parler de midinette mi-nonette, ses airs de dinde faussement populo, et sa collection d'escarpins dont personne n'a rien à cirer, est un personnage imaginaire.
C'est plutôt rassurant.

Écrit par : Valérie | 14/02/2012

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Vos polémiques sont stupides et stériles. Je continuerai à fréquenter les deux blogs, car j'y trouve des informations, et c'est la chose qui m'intéresse.

Écrit par : armand | 14/02/2012

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Ainsi, comme le dadais est toujours grand, la polémique serait toujours stérile... Mais, voyons, réfléchissez un peu, dignes commentateurs, polémos n'est-il pas le père de toutes choses ? Ces débats, ces prises de bec, ces escarmouches ne font-ils pas tout le sel qui relève la sauce de chacun des mets spirituels offerts par nos blogueurs au jugement de notre goût ? Et n'est-il pas savoureux de voir périodiquement le Sciapode user de son pied unique et démesuré pour botter le cul d'une pauvre petite âme errante ? Botter le cul d'une âme, cette métaphore digne de Monsieur Prudhomme, c'est grâce à votre humeur amère, ô Sciapode, qu'elle est sortie dans toute sa nudité de ma cervelle fiévreuse...

Écrit par : L'aigre de mots | 15/02/2012

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Ô Aigre, mon humeur est amère en slip.

Écrit par : Le sciapode | 15/02/2012

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Sur vos lignes rouges: nous ne sommes pour rien dans le chapeau dont vous parlez.
Il y a un(e) pilote dans l'avion 303 et il (elle) tient très bien le manche de l'écriture.
C'est un des attraits de ce numéro 119.
Vous auriez pu facilement vérifier cette information.

Écrit par : les auteurs du blog animulesque | 17/02/2012

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Je le sais bien que la "pilote" de ce dossier de 303 tient trés bien le manche de l'écriture, elle vous a lu attentivement, et elle a en effet fort bien compris le projet de votre blog, l'autofiction assez débile que vous avez fabricotée. Et c'est ce qui me permet d'écrire que vous l'avez "influencée" (mot pas forcément péjoratif, pas forcément synonyme de "manipulée").
J'avais deviné à un ton différent du reste du texte "d'Ani" que l'introduction de son texte pouvait être en réalité de la rédaction. Mais il est probable que d'autres lecteurs ont pu se laisser tromper par l'absence d'indication typographique ou autre annonce.
Puisque vous aimez donner des petites leçons dans le genre désinvolte, comme ça sans avoir l'air d'y toucher, espèces de jésuites, je vous rétorquerai d'ailleurs que c'est vous qui auriez pu aller vous enquérir des épreuves de votre contribution avant publication, vous auriez ainsi pu remarquer l'erreur de maquette.
Mais allez-y, continuez de tenter de me mettre en défaut, cela ne fera jamais que renforcer la visibilité de votre malveillance. Vous cherchez à me faire passer pour une bille et par-dessus le marché tentez de me mettre mal avec la "pilote" de 303. Joli travail. Les lecteurs apprécieront.

Écrit par : Le sciapode | 17/02/2012

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Si votre humeur est amère en slip, je me demande bien en quoi votre humour est amène.
Euh non, rien.

Écrit par : Valala | 17/02/2012

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L'autofiction animulesque n'est pas à proprement parler débile, elle est plus simplement ridicule. Comment imaginer en effet une jeune blogueuse affairée midinette mi-nonette comme l'écrit Valérie, s'interessant à l'art brut, singulier ou hors les normes. Il faut avoir de la patience et un "regard" sur le monde qui suppose un esprit critique pour cela, bref, avoir une expérience de la vie dont ne peut qu'être dépourvue une jeune blogueuse affairée. Je trouve donc que ce choix de l'autofiction, assez pénible à lire en effet dans la forme, dessert vraiment le propos de ce blog par ailleurs souvent intéressant dans son contenu. Pourquoi se cacher derrière un personnage imaginaire pour parler de ce qui nous émeut, de nos passions et de nos détestations ?

Écrit par : jean | 17/02/2012

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