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Les fous littéraires à la Bibliothèque Nationale de France
Les fous littéraires (et artistiques), pilotés par Marc Ways et son équipe de la revue Les Cahiers de l'Institut, émanation de l'Institut International de Recherche et d'Exploration sur les Fous Littéraires (IIREFL), débarquent ce mercredi 1er avril, jour des blagues proposé paraît-il par hasard et sans aucun rapport avec le sujet (faut-il y croire?), dans le cadre d'un colloque ouvert à tous, libre d'accès. Des colloques gratuits, ouverts à tous sans distinction de fortune, c'est pas tous les jours que cela arrive...
Alors... Demandez le programme...
LES FOUS LITTERAIRES ET ARTISTIQUES
Mercredi 1er avril 2009
Bibliothèque nationale de France, site François-Mitterrand
Petit auditorium, hall Est, quai François Mauriac, Paris 13e, de 14h30 à 20h
(Après-midi proposé avec l'IIREFL)
ENTREE LIBRE
À l'aube du XXIe siècle, dans un monde où le politiquement correct et la pensée unique sont de règle, où la raison n'est que ruine de la fantaisie, il est venu le temps d'exhumer et de considérer enfin - pour éviter que ne meurent une seconde fois les grandes oeuvres des petits auteurs - la piétaille des « Fous Littéraires, Hétéroclites, Excentriques, Irréguliers, Outsiders, Tapés, Assimilés... »
Fous musicaux : Au cours de l'après-midi, Fanchon Daemers rythmera les communications par des interventions chantées autour et alentour des fous littéraires ou des hétéroclites.
14h30 - 18h :
Ouf, petit film d'introduction
de Laurent Gervereau, président du comité scientifique de l' IIREFL
Histoire d'une passion
par Marc Ways, président et fondateur de L'IIREFL
Présentation de l'IIREFL : Qu'est-ce que l'Institut?
par André Stas, vice-président et co-fondateur de l'IIREFL
Les Cahiers de l'Institut
par Marc Décimo, vice-président et co-fondateur de l'IIREFL
Hersilie Rouy
par Laurent Soulayrol, psychiatre-psychanalyste
Pour une histoire de la folie littéraire. De Charles Nodier à André Blavier : en quête d'immoralité
par Tanka G. Tremblay, doctorant en langue et littératurefrançaises à l'Université McGill, Canada et co-fondateurde l'IIREFL
Warungka : perdre le sens des mots et des pas chez les Warlpiri du désert central australien
par Barbara Glowczewski, directrice de recherche au CNRS Laboratoire d'Anthropologie Sociale, Collège de France
Pause
Les fous scientifiques
par Michel Criton, président de la Fédération française des jeux mathématiques
Les Causeries brouettiques du Marquis de Camaras,
par Francis Mizio, écrivain et scénariste
Un éditeur chez les fous littéraires
par Marc Kopylov, éditions des Cendres
La guérison infinie : quelques cas de folie en histoire de l'art
par Nicolas Surlapierre, conservateur au Musée d'Art moderne de Lille Métropole
Paul Tisseyre, Ananké-Hel! et Jean-Pierre Brisset
par Marc Décimo
18h30 - 20h :
Lecture de textes de Brisset, Roux, Boudin et Gagne
par Sagamore Stévenin , comédien
Projections d'extraits des films
Praline, autour des fous de Rimbaud
par Jean-Hugues Berrou
Sacrées bouteilles,
film tunisien de Fitouri Belhiba
Brouettes. Autour du marquis de Camarasa,
par Laurent Gervereau
31/03/2009 | Lien permanent
André Robillard parmi nous, et puis Gérard, Lucienne et Roger dans la bibliothèque...
André Robillard, on peut le toucher, on ne nous l'a pas encore embaumé, enfoui sous un tas de cotes, d'attitudes vitrifiantes marchandes ayant pour inévitables corollaires la réification des artistes et de leur geste vivante.
C'est un brut de décoffrage tout ce qu'il y a de plus agissant et palpitant. Ceux qui l'approchaient, l'autre week-end à Bègles pour le vernissage de son exposition courant jusqu'au 19 avril prochain, ne savaient pas toujours comment se comporter vis-à-vis de lui. Cela tournait parfois au spectacle du montreur d'ours, sans qu'il y ait pourtant de montreurs en l'occurrence, en tout cas surtout pas les deux animateurs de la compagnie des Endimanchés, Alexis Forestier et Charlotte Ranson qui jouent avec lui la pièce "Tuer la misère", le soutiennent, créent avec lui (comme me l'a confié Charlotte Ranson entre deux paravents d'exposition, certaines oeuvres présentées sur les scènes de leurs performances à mi chemin du rock alternatif, du théâtre, de la poésie sonore et de l'art brut, ayant été réalisées en commun, ce qui va de pair avec leur création théâtrale actuelle, création elle aussi éminemment collective). On lui demandait l'inévitable couplet à l'harmonica, de psalmodier le langage martien ("chiop, chiop, chiop...")...
Placé dos à dos avec lui au repas d'après vernissage, je lui demandai, pour changer de ces prestations un peu trop commandées, s'il avait entendu parler d'Hélène Smith qui comme lui prétendait pouvoir parler martien, mieux, pouvait même l'écrire. Je me hasardai à lui suggérer qu'il pourrait transcrire à sa manière comme la protégée de Théodore Flournoy ce langage qu'il lui était déjà si facile de restituer à coup de chiop-chiop-chiop (c'est ainsi que je le traduis moi-même ce martien robillardisé)...
Il était là, bien campé sur ses deux jambes, les pognes formidables ballantes au bout de bras immenses, septuagénaire encore vivace, avec sa coupe de cheveux de jeune homme, sa tenue sportive (comme s'il venait de quitter son vélo) et sa disponibilité intacte à l'égard du tout venant. De plain pied avec tous ceux qui l'abordaient. Débordant d'énergie, et curieux de ce qui lui arrivait, content de voir toutes ces têtes plus ou moins nouvelles, sa mémoire paraissant assez prodigieuse puisqu'il paraissait reconnaître certains qu'il n'avait pourtant que peu rencontrés jusque là. J'eus ainsi l'illusion qu'il me reconnaissait, alors que je ne lui avais serré qu'une fois la main au Théâtre parisien de la Bastille des mois plus tôt, et encore au milieu d'une foule, et dans la fatigue d'une fin de représentation...
Des dessins étaient exposés, à côté des inévitables fusils dont certains étaient plus originaux que d'autres (deux gros calibres venus de la collection de Frédéric Lux par exemple, ou un comme ramolli par suite d'un traitement dalinien on aurait dit, venant de la collection de Bernadette Chevillon). Michel Boudin m'a confié avoir trouvé une inspiration d'origine populaire à l'un des dessins présentés. Il représente un "renard de la forêt d'Orléans". Michel retrouve dans ses contours la forme de ces hachoirs taillés en forme d'animaux qui ne sont pas rares aux cimaises des antiquaires spécialisés en outils populaires. Est-ce une source d'inspiration du gars André? Pourquoi pas: quand on l'entend souffler dans son harmonica, surgit le plus souvent le fantôme d'une mélodie traditionnelle, répétitive, nouée en boucle obsédante, ce qui lui assure une forme nouvelle. Robillard partage cette façon de jouer de la musique avec Pierre Jaïn, autre sculpteur de l'art brut qui lui aussi recyclait des airs traditionnels quand il s'amusait à faire de la musique.
Preuve une fois de plus que la culture populaire est le substrat qui sous-tend pas mal de créations dites "brutes". Depuis la salle, j'ai essayé de l'insérer à l'intérieur de la causerie où, le samedi 4 avril à la bibliothèque jouxtant le musée de la création franche, conférençaient Gérard Sendrey, Lucienne Peiry et Roger Cardinal. Le public intervint un peu durant cette causerie qui réunissait ces trois personnages fort contrastés. Qu'en ai-je retenu? Une phrase de Sendrey le rimbaldien, la création travaille toujours à partir de l'inconnu, jamais du connu. Lucienne Peiry insista sur l'art des enfants qu'elle n'a pas envie de tacler comme Dubuffet l'a fait (j'avoue être moi plutôt de l'avis de Dubuffet qui reprochait aux enfants leur besoin de singer la réalité, leur conformisme ; mais s'ils le font, c'est aussi sans doute par suite de la pression énorme qu'exercent les adultes sur eux à ce sujet). Roger Cardinal trouvait qu'art brut et art savant peuvent rester chacun de leur côté, c'est quelquefois pas plus mal. A un autre moment, il répéta aussi cette évidence que le poète est toujours en avance sur l'homme de science.
Bref, on échangea gentiment mais exclusivement sur le thème de l'art brut, personne n'ayant remarqué que le sujet initial de la causerie qui devait aborder la question de la nouveauté de la création après l'art brut (titre original: "De l'Art Brut à l'Outsider Art et à la Création Franche, héritage et novation") avait été purement et simplement évacué... Ni Sendrey, ni Cardinal ne voulant par égard pour la conservatrice de la Collection de l'art brut signifier que la notion d'art brut aurait pu être aujourd'hui dépassée. Ou tout simplement, parce que ces protagonistes avaient conclu implicitement à la cohabitation simultanée de leurs trois "labels" (création franche pour Sendrey, art brut pour Peiry, outsider art pour Cardinal), sans possibilité de friction entre eux.
12/04/2009 | Lien permanent | Commentaires (6)
Exposition George Schmits à la bibliothèque Ulysse Capitaine (de Liège)
J'aimerais bien m'appeler Ulysse Capitaine, moi, quel beau nom de héros qu'on imagine ayant conquis ses lettres de gloire au cours d'explorations aux confins de la terre et des mers. Heureux qui comme Ulysse Capitaine a fait de beaux voyages...
Mais je ne chercherai pas à savoir qui était en réalité cet illustre Capitaine, je l'ai abandonné à ma rêverie et me suis plutôt contenté de focaliser sur l'exposition que consacre la bibliothèque ainsi nommé à Georges Schmits, romaniste, historien d'art, critique et éditeur liégeois à Verviers (commune de Wallonie célèbre à mes yeux pour avoir hébergé longtemps André Blavier, l'anthologiste des fous littéraires et écrivain fort estimable), et qui, à côté de diverses marottes littéraires – c'est là où je veux en venir – s'est aussi occupé d'art naïf belge. Oui, "naïf belge"... L'adjonction de ces deux épithètes doit nous incliner à dresser davantage l'oreille et aiguiser nos yeux. Le Naïf belge, c'est souvent du super-naïf, du bon naïf, rien à voir avec l'art naïf "cu-cul" que stigmatise le peintre, collectionneur et très bon connaisseur de l'art naïf, Yankel.
Armand Funcken, Le départ du soldat, huile sur toile, 1915, anc.coll. André Blavier, ph. J. Keil
; Funcken avec son père était peintre populaire d'enseignes et de baraques foraines, lui-même peignant des charrettes de marchands de glaces italiens ; ce "départ du soldat", sujet patriotard colporté par l'imagerie populaire est à comparer avec le retour du soldat, intitulé "Victoire-Défaite" que j'avais mis en ligne le 10 juin 2011, à propos d'un peintre appelé Galeani...
Georges Schmits paraît s'être surtout occupé des Naïfs wallons et d'un groupe de peintres nommés "les intimistes verviétois" (ça m'a amusé de tomber sur cet "isme"-là, étant donné que j'emploie le même terme en ce moment dans un projet d'expo), se caractérisant, écrit Monique Smal, par les mêmes "thèmes de prédilection : neige, paysages campagnards, objets du quotidien". C'est de l'intimisme très figuratif et très rétinien comme on voit.
Couverture de L'art naïf en Wallonie et à Bruxelles, Ed.Labor, 1981 ; le tableau reproduit sur la couverture est de Karl William (Souvenir de la guerre 14-18, huile sur papier, 100 x 100 cm, coll. G.Schmits-Daube).
Mais si l'on veut en apprendre plus sur le personnage, il faut acquérir ses ouvrages. Je ne sais pas ce qu'il en est de leur disponibilité aujourd'hui. Je conserve de lui seulement un ouvrage de 1981 paru chez Labor à Bruxelles intitulé L'art naïf en Wallonie et à Bruxelles. Très clair, précis, il recense environ une cinquantaine de peintres naïfs (il n'y est pas question des "intimistes verviétois"), choisis pour leur sincérité autodidacte, éloignée de tout maniérisme (maniérisme naïf qui est le fait de peintres plus savants, imitant la manière naïve par admiration ou par souci de petit commerce, maniérisme qui est une des raisons pour lesquelles l'art naïf masqua, et finit par disqualifier, le vrai naïf de qualité). Il rend hommage dans cet ouvrage à d'autres exégètes de la peinture naïve dans son pays comme Marcel G. Lefrancq ou Albert Dasnoy. Il témoigne surtout de son admiration pour Georges-Henri Luquet qui avait créé au début du XXe siècle le terme et la notion de "réalisme intellectuel" (à propos des dessins d'enfant et aussi je crois de l'art populaire en prison, des graffiti). Ce réalisme intellectuel, Schmits le voit à l'oeuvre dans l'art naïf qui l'interpelle tant.
Voici un extrait de ce livre qui explique ce qu'il entendait à la suite de Luquet par ce terme un peu oublié aujourd'hui (à tort selon moi):
"...dans le réalisme visuel, la surface à peindre apparaît en quelque sorte comme une fenêtre à ouvrir sur la trompeuse profondeur du réel, avec tout ce que cela suppose d'obéissance aux illusions de la perspective, [tandis que] le réalisme intellectuel considère le tableau comme une surface abstraite sur laquelle les objets se poseront comme autant de signes régis dans leur nombre, dans leur tracé, dans leur taille, par une volonté de lisibilité suffisante aux yeux du créateur ; celle-ci sera par conséquent variable au gré de son exigence comme au fil des progrès de sa main et de sa faculté d'observation.
Ce type de conception entraîne un certain nombre de changements dans nos habitudes de vision, de traitement de l'espace et du temps, dont le moindre n'est pas le non-emploi (par ignorance ou par rejet) de la perspective et des procédés qui visent à simuler la profondeur. Maladresse, dira-t-on, recul par rapport à la Renaissance! Pourtant, c'est là aussi la grande découverte du cubisme comme du fauvisme: rejeter la profondeur et la perspective pour restituer le tableau, dans un espace à deux dimensions qui est son caractère premier, à l'intégralité de son essence. C'est là aussi ce qui contribue à l'unité et à la tension des images populaires et des œuvres des primitifs où tout se passe sur le plan du tableau, sans que ne s'établisse par la fuite vers des lointains fallacieux, une perte de la tension plastique." Un peu plus loin, Schmits écrit ces autres phrases éclairant la découverte cardinale présente dans la peinture naïve: "Telle table ronde, qui deviendrait ellipse si la perspective entreprenait de la situer dans l'espace, sera maintenue dans sa forme réelle ; telle forme carrée refusera de devenir trapèze. Les choses ont aux yeux du naïf les formes dans lesquelles il vit sa relation avec elles [C'est moi qui souligne]. Le tabouret, expérimenté dans sa rondeur, sera maintenu tel ; le buffet, par contre, se dressera comme un rectangle. Mais vient-on à les reproduire ainsi, côte à côte, sur la toile : le tabouret suppose une vue plongeante et le buffet, une vue frontale. C'est ce que Luquet a nommé les perspectives multiples. Elles se contredisent mutuellement et font s'effondrer la profondeur". Art naïf et réalisme intellectuel sont ainsi synonymes.
Bonne idée donc pour cette bibliothèque de Liège de permettre à cette figure importante de la critique d'art belge de refaire surface.
Hommage à Georges Schmits, exposition du 11 mai au 10 juillet 2012, Bibliothèque Ulysse Capitaine, En Féronstrée 118 4000 Liège.
20/06/2012 | Lien permanent
Infos Expositions un peu partout
Le musée Im Lagerhaus de Saint-Gall en Suisse (voir ma note du 5 juin 2007) lance une nouvelle expo, intitulée (en allemand, mais je traduis comme je peux, en devinant): "Mère, Madone, Monstre", ce qui est une intéressante piste de recherche, n'est-il pas? Je ne comprends pas l'allemand, alors je vous renvoie si vos connaissances dans ce domaine sont plus grandes que les miennes au site du musée d'art brut et naïf de Suisse orientale. Et voici une image, dont je ne suis pas sûr de l'auteur, peut-être un certain ou une certaine "F.Shearer"...
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Je continue de signaler des expositions en vrac, comme elles viennent. Paul Duchein nous a écrit qu'il réunissait au musée Ingres à Montauban, dans le cadre d'une manifestation plutôt littéraire, "Lettres d'Automne", du 13 novembre au 10 décembre, un ensemble d'"artistes de l'"Art Brut" et assimilés". Cette présentation est destinée à prolonger l'exposition de photos de Mario Del Curto (qu'est-ce qu'elles se baladent ces photos-là...) installées dans le même lieu. Mais Paul Duchein ne donne pas plus d'explications sur les créateurs exposés, et le site municipal de Montauban ne nous en apprend pas davantage. Alors cette info risque fort de n'être réservée qu'aux Montalbanais et leurs voisins.
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Des Paysages de Raymond Humbert, artiste et fondateur du musée rural des arts populaires de Laduz dans l'Yonne, comme on sait, sont présentés à partir du 16 novembre au musée des Beaux-Arts de Quimper. Ce qui doit faire plaisir en tout premier à son ancienne colaboratrice Marie-José Drogou, elle-même excellente artiste méconnue, chez qui le peintre venait en visite à Porspoder, dans le Finistère nord dans les années 70-80... Il était normal que la Bretagne s'intéresse aux oeuvres de celui qui aimait ses paysages, et plus encore, les visions et les vertiges qu'il fixait sur ses papiers, entrevus dans le remous des vagues autour des récifs du grand Mouzou...
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Sinon, se termine aujourd'hui même, je sais, c'est pas sérieux (et ça l'était d'autant moins que j'y étais exposé...), j'aurais pu en parler avant, mais que voulez-vous, il faut croire que je suis avant tout altruiste... ou pas mal distrait! ... Se termine aujourd'hui même à Reggio-Emilia en Italie l'exposition Ai Marginali dello Sguardo (" Aux Marges du Regard"), l'art irrégulier dans la collection Menozzi, consacrée à la donation d'une partie de la collection
de ce critique et historien de l'art naïf venu sur le tard à l'art singulier, Dino Menozzi, qui animait naguère la revue Arte Naïve. Cette donation prend place dans le cadre de la Bibliothèque Panizzi (connue entre autres pour héberger aussi des archives d'anarchistes italiens) plus spécifiquement dans son Cabinet d'art graphique "A.Davoli". On retrouve dans cette exposition un petit contingent de créateurs habitués de la Création Franche, dont Charles Boussion, Gaston Mouly,
Pierre Albasser ou Ruzena (sur qui j'aurai sans doute l'occasion de revenir), des "Singuliers" (Kurt Haas, Danielle Jacqui, Martha Grünenwaldt par ex.), mais aussi des créateurs venus des collections d'ateliers d'hôpitaux psychiatriques italiens (l'atelier "Blu Cammello" de Livourne, ou l'atelier "Adriano e Michele", par exemple).
Un catalogue plutôt bien imprimé est paru à cette occasion.
11/11/2007 | Lien permanent | Commentaires (12)
L'art hors-les-normes italien, une nouvelle exposition à la Halle Saint-Pierre
Le printemps sera italien cette année. Du moins en ce qui concerne l'actualité des événements concernant la planète des arts bruts, naïfs ou populaires. C'est fait personnellement pour me plaire, étant donné les informations que j'ai souvent mises en ligne ici même sur le sujet.
Affiche de l'expo, Les "portes" de Francesco Nardi, coll privée, © Halle St-Pierre
"Banditi dell'arte" est le titre choisi par Martine Lusardy avec Gustavo Giacosa, commissaire désigné de l'exposition (j'ai déjà mentionné son nom en divers points de ce blog). C'est joli, ça fait bien ce titre, c'est offensif, les "bandits de l'art", mais est-ce bien tout à fait juste?... Les organisateurs de l'expo se fondent sur le fait que des travaux et des objets venus de collections historiques à la fois psychiatriques et carcérales, comme le musée Cesare Lombroso, le musée d'anthropologie de Turin et l'hôpital San Lazzaro de Reggio-Emilia (musée d'histoire de la psychiatrie) ont prouvé depuis longtemps le regard criminalisant qui fut porté sur certaines figures populaires créatives. Lombroso par exemple, au XIXe siècle, cherchait à mettre en évidence, en collectant tous les documents et objets possibles produits par des "criminels", l'origine innée de cette criminalité. Il allait jusqu'à trouver des traits physiques susceptibles d'être des marqueurs de la dangerosité des individus. Il lia folie, génie et criminalité, exerçant ainsi une influence notable sur les théories réactionnaires qui apparurent après lui, critiquant les avant-gardes artistiques (théories qui débouchèrent sur l'exposition nazie "d'art dégénéré" de 1933 en Allemagne, où furent mêlés œuvres expressionnistes, surréalistes, et travaux d'internés de la collection Prinzhorn, internés dont certains, comble de l'horreur, furent mis à mort par la suite dans les hôpitaux allemands).
Francesco Toris, Le Nouveau Monde, © Musée d'Anthropologie de Turin ; A noter qu'il manquerait selon Maria Teresa Dolfin, "découvreuse" de l'œuvre en 2002-2003, une pièce sculptée importante sur cette pièce, une "Chimère", que Toris considérait comme "la pièce maîtresse de son œuvre"
L'expo est construite ainsi en deux parties. La première donc, avec des travaux venus de ces collections –dont j'attends personnellement de voir avec beaucoup d'impatience l'extraordinaire maquette architecturée, en os de bovins, de Francesco Toris, "Le Nouveau monde" (1899-1905), sorti des réserves du musée d'anthropologie de Turin, véritable Tour de Babel arachnéenne, dressée depuis l'ossement d'une existence saccagée (à l'âge de 33 ans, cet ancien carabinier fut interné en hôpital psychiatrique), qui fut présentée pour la première fois en 2002-2003 par la Collection de l'Art Brut à Lausanne–, sans oublier les travaux venus des ateliers d'art pour divers patients en souffrance, comme Blu Cammello à Livourne, La Maninca Lunga, à Crémone, la Tinaïa à Florence, etc...
Quelques numéros de la revue Arte Naive dirigée par Dino Menozzi (69 numéros publiés à Reggio-Emilia de1974 à 2002), qui s'ouvrit à partir du n°59 (1997) à l'art "outsider" ; on y parlait déjà de plusieurs créateurs qui sont présentés à l'expo Banditi dell'Arte, voir aussi la note que j'avais consacrée à la donation Menozzi à la Bibliothèque Panizzi
La seconde partie est constituée, au premier étage (traditionnellement consacré à la Halle, sous un éclairage plus naturel, à l'art "ouvert"), aux "insiders" populaires par opposition aux oeuvres du rez-de-chaussée, espace du marginal, des créateurs enfermés, à tous les sens du terme, exposées du coup dans un espace noir, sans lumière venue de l'extérieur, "des représentants de l'art populaire contemporain" (selon les mots du dossier de presse de l'expo). Ces créateurs nous sont présentés comme des indépendants vis-à-vis du système des beaux-arts traditionnels, créant une "contestation institutionnelle et culturelle" (là aussi, je trouve cela exagéré). On y retrouve des "portes détournées" par Francesco Nardi, des peintures de Pietro Ghizzardi (que l'on a vu récemment exposé chez Christian Berst), des sculptures de Luigi Buffo (sauvées par le Musée des Amoureux d'Angélique dans l'Ariège ; voir photo Bruno Montpied ci-contre), des sculptures de Joseph Barbiero (préférées aux dessins du même). Y sont également évoquées les figures, récemment mises en lumière dans le livre sur les environnements spontanés italiens de Gabriele Mina, Costruttori di Babele, (les Bâtisseurs de Babel, éd. Eleuthéra), de Luigi Lineri, Vincent Brunetti, Mario Andreoli, Maurizio Becherini ou encore Marcello Cammi, ce créateur d'un jardin empli de centaines de statues à Bordighera, que j'ai chroniqué dès 1990 dans le Bulletin des Amis d'Ozenda, puis dans Raw Vision, et sur ce blog aussi.
Le livre de Gabriele Mina récemment paru en Italie, avec la collaboration de divers auteurs (dont mézigue)
A noter que la galerie Rizomi à Turin consacre à partir du 16 mars prochain, et ce jusqu'au 22 avril une sorte de rétrospective consacrée à Cammi, dont les sculptures furent balayées par une inondation de la rivière qui passait au milieu de son terrain. Un catalogue de 80 pages paraît à cette occasion (qui reprend mon texte de 1990 sur Cammi, Hôtel angoisse et jardin bachique, entre autres documents, et cette fois traduit en italien). (Voir ci-dessous dessin de Cammi à partir d'une tache de vin, coll. BM, et un détail de son jardin disparu à Bordighera, ph. BM, 1990)
Beaucoup de noms de créateurs sont mentionnés sur le carton d'invitation à l'expo, beaucoup étant à découvrir, d'autres à retrouver comme Filippo Bentivegna (connu depuis très longtemps par la Collection de l'Art Brut et le livre de Michel Random, l'Art Visionnaire, paru en 1979), Giovanni Podesta ou Carlo Zinelli, tous deux fort connus dans l'Art Brut, d'autres encore à confirmer comme Bonaria Manca, souvent chroniquée entre autres par Roberta Trapani, ou encore Giovanni Bosco, Marco Raugei, Oreste Nanetti, etc., etc.
Francesco Borrello, Atelier La Maninca Lunga, expo Banditi dell'Arte
Il reste qu'on s'étonne que les initiateurs de l'expo aient à ce point focalisé sur la notion de "bandits de l'art" qui évoquent une attitude offensive pas forcément patente chez les réprouvés ou les solitaires dont on met en évidence la créativité. Cette dernière s'exerce la majeure partie du temps, du reste, au sein d'une attitude non-violente. Ce qui colle mal avec cette vision activiste de l'art hors-les-normes ici mise en avant. Une posture hors-la-loi de pirate ou de brigand n'est pas spécifiquement l'attitude de la majorité de ces créateurs. Leurs expressions ne sont pas des brûlots dirigés vers la caste dominante. Mais plutôt le moyen de reprendre pied dans leur vie, dans un écart absolu vis-à-vis de la société de la multitude moutonnière. Un écart qui ne s'accompagne pas d'une prise d'armes pour autant... Tant et si bien que j'arrive à me convaincre que les commissaires de cette exposition, qui s'annonce certes passionnante, se sont faits surtout plaisir en titrant ainsi leur manifestation.
Enfin, une autre remarque. Il est loisible de déplorer que la Halle Saint-Pierre n'ait apparemment pas demandé de collaboration à Eva Di Stefano qui effectue depuis déjà un certain temps un travail remarquable de défrichage et d'étude sur l'art brut et outsider italien à l'ombre de l'Université de Palerme en Sicile. On se convaincra aisément de la qualité de son travail en allant télécharger les numéros de sa revue virtuelle Osservatorio Outsider Art qui a mis en ligne jusqu'ici trois numéros.
Et rappelons, au titre des manifestations ayant précédemment attiré l'attention sur l'art brut et hors-les-normes italien, l'exposition internationale d'art irrégulier, Beautés insensées, de 2007, qui, sous la direction de Bianca Tosatti, s'était tenue à la Salle d'Expositions du Quai Antoine Ier à Monaco. On y découvrait déjà, entre autres, les peintures de Tarcisio Merati, créateur que l'on retrouve annoncé dans Banditi dell'Arte.
Tarcisio Merati, Petite machine, sans date, Bergame, Association Merati ; photo extraite du catalogue Beautés insensées
"Banditi dell'arte", exposition ouverte du 23 mars 2012 au 6 janvier 2013, vernissage le jeudi 22 mars. Halle Saint-Pierre, 2, rue Ronsard, 18e ardt Paris. T: 01 42 58 72 89.
"Marcello Cammi", exposition à la galerie Rizomi, Turin du 16 mars au 22 avril, corso Vittorio Emmanuele II, 28, 10123 Turin. T: 01 15 78 88 08.
11/03/2012 | Lien permanent | Commentaires (18)
Une lecture de textes bruts à Bordeaux
"Monsieur, nous organisons une lecture de textes issus de l'Art Brut, à Bordeaux, le 26 octobre, à 17h, à la Bibliothèque du Grand-Parc qui accueille, en même temps, des œuvres¹ du Musée de la Création Franche de Bègles. Une comédienne, Valérie Pédezert, va lire ces textes issus du recueil "Ecrits bruts", de Thevoz ainsi que de certains fascicules de l'Art Brut. Seriez vous disposé à relayer cette information dans votre blog ? Si oui, nous vous en remercions. Denis Decourchelle, Valérie Pédezert"
____
¹ Bien, mais quelles œuvres ? (NDLR)
24/10/2013 | Lien permanent
Jacqueline Humbert, fixés sous verre, Auxerre, Jacques Lacarrière: appel d'air
Jacqueline Humbert, qui continue vaillamment à animer contre vents et marées la collection Humbert du musée rural des arts populaires de Laduz dans l'Yonne, expose bientôt une trentaine de fixés sous verre à la bibliothèque Jacques Lacarrière(allée du panier vert, Auxerre, Tél: 03 86 72 91 00, voir aussi le site de la bibliothèque) du 10 mars (jour du vernissage, à 17h) au 21 avril. Voici ce qu'elle écrit au sujet de ce travail:
Un fixé de Jacqueline Humbert présenté à Auxerre.
Et puis un autre...
Jacqueline Humbert l'avoue, elle a délaissé ses peintures plus anciennes qu'elle pratiquait avec des pochoirs pour se consacrer exclusivement aux fixés. Je garde personnellement un attachement marqué à ses anciens pochoirs, dont certains se dénichent parfois sur les brocantes, comme celui que je mets en ligne ci-dessous...
Jacqueline Humbert, Sans titre, sans date (années 70?), ph Bruno Montpied
Et pour complaire à M. Belotti (voir commentaire ci-dessous), j'insère un autre ancien pochoir de Mme Humbert, retrouvé par moi comme le précédent en brocante:
Jacqueline Humbert, sans titre, image ayant servi pour l'affiche d'un Gala de l'Union (des années 60? 70?), si je ne suis pas victime d'un faux souvenir... En tout cas, peinture bien mirifique, d'une immense poésie délicate
04/03/2012 | Lien permanent | Commentaires (5)
Présentation prochaine du ”Gazouillis des éléphants” à Bègles (Gironde)
Je poursuis ma tournée de présentation, juste avant une pause pour cause de fêtes à venir... Je vais donc à Bègles, au Musée de la Création Franche pour une présentation, accompagnée de photos tirées de mon livre, le mercredi 20 décembre prochain à 19h. L'animation en question, en entrée libre, se déroulera dans les locaux de la bibliothèque qui est voisine du musée. A l'issue de la présentation et du débat qui, j'espère, s'ensuivra, je dédicacerai également mon livre aux lecteurs intéressés...
Bruno Montpied sera l'invité du Musée de la Création Franche mercredi 20 décembre à 19h. Il présentera et débattra autour de son ouvrage Le gazouillis des éléphants, paru aux éditions du Sandre. Son ouvrage est une « sorte d'inventaire général » regroupant plus de trois cents jardins oniriques, fantasmagoriques et inédits à travers la France.
La rencontre sera suivie d'une dédicace.
58, avenue du Maréchal de Lattre de Tassigny 33130 BEGLES
Le portrait de mézigue (photographe José Guirao), choisi ci-dessus par le musée de la Création Franche pour illustrer la rencontre, je l'espère, ne fera pas trop peur aux éventuels amateurs des inspirés du bord des routes, car, pas d'inquiétude, en dépit de cet air quelque peu grincheux (je préfère dire : consterné, accablé...), je ne mords tout de même pas...
15/12/2017 | Lien permanent | Commentaires (1)
Dictionnaire du Poignard Subtil
OMELETTE:
A la demande générale, je ne résiste pas au plaisir de donner une fois encore une de ses courtes histoires campant les sagesses et folies de Nasreddine Hodja, telle qu'elles me tombent dessus au détour de la bibliothèque que j'anime auprès des enfants. J'adore celle-ci (qui fait pousser, après un suspens magnifique de la réflexion qui fait tout le prix de cete historiette, des "oooh" délicieusement choqués aux enfants...):
"L'OMELETTE
Nasreddine invita un jour son voisin à dîner. Il avait préparé des langues d'agneau avec du persil et du citron. Le voisin s'offusqua en voyant le plat.
- Ah non! dit-il. Je ne mange jamais ce qui sort de la bouche des animaux, je trouve ça vraiment dégoûtant.
- Qu'à cela ne tienne, répondit Nasreddine, je vais te préparer une omelette."
(Jihad Darwiche, Sagesses et malices de Nasreddine, le fou qui était sage, Tome I, Albin Michel, 2000)
28/01/2009 | Lien permanent
15e Rencontres du cinéma documentaire et des art singuliers à Nice
Oyez, oyez, c'est reparti à Nice pour les XVe Rencontres organisées annuellement à Nice autour des arts spontanés ou singuliers (bruts, naïfs et extra dry), pour cette fois en deux jours, le vendredi après-midi à l'Auditorium de la bibliothèque Louis Nucéra et le samedi toute la journée à l'auditorium du MAMAC. Demandez le programme, voir la liste ci-dessous (c'est pour le week-end prochain début juin):
L’ASSOCIATION « HORS-CHAMP »
présente le 15ème Festival du Film d’Art Singulier
VENDREDI 1er JUIN 2012
Auditorium de la Bibliothèque Municipale à Vocation Régionale Louis Nucera de Nice
Après-midi de 14h30 à 17h :
Bricoleurs de paradis (le gazouillis des éléphants) de Rémy Ricordeau (52’), en présence de son co-auteur Bruno Montpied
Présentation du Gazouillis à l'auditorium de la Halle Saint-Pierre en avril 2011, photographe non noté (qu'il m'en excuse)
Il pleut jamais dans l’Nord! de Jean-Michel Zazzi (12’), en présence du réalisateur
Roland Roure, constructeur de machines ludiques de Deidi Von Schaewen (26’; 1983... Un travail de jeunesse de cet auteur passée plus tard aux environnements spontanés du monde entier, voir son livre Mondes Imaginaires chez Taschen), en présence de Charles Soubeyran
SAMEDI 2 JUIN 2012
Auditorium du Musée d’Art Moderne et d’Art Contemporain de Nice
Samedi matin de 10h30 à 12H :
Hubert, l’homme aux bonbons de Marie Paccou (8’)
DVD de l'Homme aux bonbons
Guo Fengyi et les rouleaux magiques de Philippe Lespinasse, Andress Alvarez (19’), en présence de Philippe Lespinasse
DVD Gregory Blackstock, l'Encyclopédiste et Guo Fengyi et les rouleaux magiques de Lespinasse et Alvarez
Tante chinoise et les autres de David Perlov (17’), en présence de Nathalie Jungerman
DVD inséré dans l'album de Marguerite Bonnevay (1882-1903), présenté par Nathalie Jungerman, Tante Chinoise et les autres, édité à la Table Ronde en 2009
Samedi après-midi de 14h30 à 17h30 :
Objectif : réussir ? de Michel Etter (20’), en présence du réalisateur
Petites actualités « Hors-Champ » de Grégoire Dumas (15’), en présence du « journaliste »
Grégory Blackstock, l’encyclopédiste de Philippe Lespinasse, Andress Alvarez (22’)
La valise de Lobanov de Erika Manoni (12’), en présence de Vincent Monod
Alexandre Lobanov, un de ses dessins, coll privée, Paris
Les grandes Vacances de Pépé Vignes de Victor Simal (20’ ; où l'on voit ce que peut être une "musique brute"...)
Le monde magique des frères Lumière (extraits) de Guy Brunet (20’), en présence du réalisateur
Contact : 04 93 80 06 39 - http://hors-champ.hautetfort.com
25/05/2012 | Lien permanent