07/01/2014
Deux expos d'art brut français, André Robillard, Jean Smilowski
Jean Smilowski
"L'association La Poterne a le plaisir de vous convier au vernissage de l'exposition "Infiniment Jean Smilowski" (du 18 janvier au 8 juin 2014) organisée par le Musée d'Ethnologie régionale de Béthune et la Ville de Béthune avec le concours de l'association La Poterne, qui se tiendra le vendredi 17 janvier, 18 heures, à la Chapelle Saint-Pry, rue Saint-Pry à Béthune." Tel est le message reçu récemment dans ma boîte à mails et dont je pense nécessaire de vous faire profiter si vous croisez dans les parages de Béthune. On ne découvre jamais mieux l'œuvre conservée de Smilowski, l'homme qui habitait un ranch souterrain près des fortifications de Vauban dans le Vieux-Lille, qu'à travers les présentations qu'en fait régulièrement l'association La Poterne, animée entre autres par Bénédicte Lefebvre, fidèle depuis des années à la mémoire de cet original Inspiré du Nord.
A noter qu'au vernissage, sera servi un cocktail préparé "par les élèves du Lycée Hôtelier Marguerite Yourcenar de Beuvry" (dixit le carton d'invitation). Il faut dire que Beuvry est un nom particulièrement prédestinant pour des personnes en charge de fabriquer des cocktails… Isn't it?
André Robillard est exposé au musée des Beaux-Arts d'Orléans
Autre exposition d'art brut français (moi qui en réclamais, je suis servi, quoique pas à la Halle Saint-Pierre et en ordre dispersé en province), dépêchez-vous de vous rendre à Orléans car il ne reste que quelques semaines de janvier pour vous rendre compte de ce qui a été montré du travail à multiples orientations d'André Robillard, qui aura 83 ans cette année, au musée des Beaux-Arts d'Orléans (du 24 octobre 2013 au 26 janvier 2014).
Couverture du catalogue de l'exposition du musée des Bx-Arts d'Orléans
Un fort joli catalogue est paru à cette occasion (ne coûtant que 10€, une autre façon de tuer la misère), avec des textes de Savine Faupin, de Jean Delaunay, des propos de Robillard retranscrits par Alexis Forestier, l'homme avec qui Robillard a beaucoup tourné dans les spectacles musico-théâtraux "Tuer la Misère" et "Changer la vie". Jean Delaunay est directeur des soins au centre hospitalier Georges Daumézon, centre où fut autrefois, dans les années 60 et après, hospitalisé Robillard, dès l'âge de 9 ans, par son père qui ne pouvait pas s'en occuper en raison d'une certaine violence et d'une trop grande "nervosité" (attitudes qui disparurent avec le temps et le recours à la créativité, qui fut encouragée, dès qu'elle fut reconnue, par les soignants de l'hôpital dont les Dr Renard Gentis). Son père était un garde-chasse, ce qui n'est pas étranger à la confection obsessionnelle par son fils André de toute une série de fusils bricolés à partir de matériaux de récupération, fusils qui ont fini par faire sa gloire dans le monde des amateurs d'art brut, et pas étranger non plus à sa grande fascination pour les animaux en tous genres.
Le monument au fusil d'André Robillard devant le centre Georges Daumézon ; André Robillard pose sans doute avec le responsable de l'entreprise qui a fabriqué le fusil (avec des tubes en acier inoxydable achetés directement en magasin, et non pas récupérés, pérennité du monument oblige, ce qui peut paraître contradictoire avec le côté très souvent éphémère de nombreuses réalisations brutes), ph. Frédéric Lux, 2013
Cette gloire, comme on sait lui a attiré l'intérêt du monde du théâtre (la compagnie d'Alexis Forestier et Charlotte Ranson, les Endimanchés) qui lui a proposé maintes collaborations sur scène. Récemment a été créé aussi devant le centre Daumézon d'Orléans un monumental fusil fabriqué par une entreprise avec, finalement, la collaboration de Robillard qui a surligné divers éléments dont la crosse (vernie, mais combien de temps durera ce monument, même si est annoncée une maintenance sous la supervision de la DRAC locale?). Comme l'écrit Savine Faupin dans le catalogue, tout va bien tant qu'on respecte la liberté de créer de Robillard, mais est-on bien sûr qu'on l'a respectée dans le cadre de ce fusil gigantesque dressé sous le ciel, dont il ne paraît pas que l'initiative revienne totalement au départ à André Robillard (et au fait, a-t-il touché le moindre kopeck sur cette commande?).
Ph. Frédéric Lux, 2013
Le catalogue présente les œuvres de Robillard telles qu'on les connaît depuis les années 80 (l'expo s'est faite avec des prêts du LaM qui possède des œuvres grâce à la donation de l'Association L'Aracine), du coup, comme la collection de l'art brut, qui possède des œuvres plus anciennes (puisque Robillard a commencé dans les années 50), n'a pas participé à cette expo, le public peut croire que Robillard a commencé dans ces années 80 (années de début de la collection de l'Aracine), ce qui est erroné. Le catalogue les présente dans leur chronologie, facile à reconstituer puisque Robillard appose scrupuleusement les dates de création sur toutes ses œuvres, qui sont loin de se limiter à des fusils en trois dimensions. On peut essayer de voir si son inspiration faiblit au fur et à mesure du temps (il avoue en aparté en avoir un peu marre de faire des fusils...!). Personnellement, je trouve d'ailleurs qu'il est bien meilleur dans ses expériences graphiques, dans ses paysages de la Lune où marchent Aldrin et Armstrong, comme on pourra s'en convaincre ci-dessous:
André Robillard, La Conquête de l'espace, coll. Frédéric Lux
Diverses œuvres d'André Robillard agencées par Frédéric Lux
10:32 Publié dans Art Brut | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : l'association la poterne, bénédicte lefebvre, jean smilowski, andré robillard, jean delaunay, tuer la misère, changer la vie, centre hospitalier georges daumézon, savine faupin, lam de villeneuve d'ascq, frédéric lux, monument robillard | Imprimer
13/05/2009
André Robillard continue la tournée
André Robibi, comme l'appellent certains décidément très familiers, continue à faire son cabotin. Cette fois il est, toujours en compagnie de ses amis les Endimanchés (Forestier, Ranson and co), au Théâtre de l'Echangeur, à Bagnolet, autant dire qu'il revient tout prés de Paris dans sa course sans fin pour Tuer la misère... Ce sera du 25 mai au 5 juin prochains.
M.François Legrand, du théâtre en question, propose, c'est vraiment gentil de sa part, le prix à tarif réduit de 7 euros pour tous ceux qui oseront sussurer devant la caisse du théâtre où se produisent André Robillard et ses amis qu'ils sont des lecteurs du Poignard Subtil. Si,si, puisque je vous le dis... ça, c'est vraiment tuer la misère tant morale que matérielle...
Veuillez noter que comme récemment à Bègles il y aura une exposition des oeuvres de Robillard en parallèle dans le théâtre. C'est pas au Théâtre de la Bastille qu'ils auraient eu cette idée-là...
23:27 Publié dans Art Brut | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : andré robillard, théâtre de l'échangeur, les endimanchés, tuer la misère, art brut | Imprimer
30/03/2009
Fusils chinois rapide 6h46 et chasseurs bombardiers du rêve noir, André Robillard
Du 28 mars au 19 avril, les sculptures d'assemblage et les dessins d'André Robillard viennent faire un tour plus conséquent que dans le passé (voir la présentation de la collection Eternod-Mermod) au musée de la création dite franche, à Bègles. Un vernissage, pardon l'inauguration, aura lieu le vendredi 3 avril, un peu confidentiel comme voudrait peut-être le suggérer ce terme d'inauguration placé là pas au hasard...
Cela a lieu en parallèle avec une autre série de représentations du spectacle Tuer la misère (voir ma note du 3 juin 2008 ) qui se tiendra à Bordeaux (au "TNT Manufacture de Chaussures", tél: 05 56 85 82 81, représentations les 7, 8 et 9 avril). Ce sera l'occasion de constater comment évolue le travail de Robillard, sur lequel j'ai entendu ces jours-ci de nombreuses rumeurs, sur des collectionneurs qui rafleraient son travail, sur une certaine excitation bref qui l'entourerait, lui dont la réputation de créateur de l'art brut ferait tourner la tête à nombre de rapaces...
Les performers du spectacle, Charlotte Ranson et Alexis Forestier, demandent régulièrement à Robillard de décorer de ses oeuvres les scènes où ils jouent, où il clame ses diatribes en langages martien ou allemand guttural burlesque. Sont-ce ces oeuvres-là aussi qui seront présentes? Peu d'oeuvres proviendront de la collection permanente du musée en tout cas (une ou deux ?). Quelques collectionneurs, dont Frédéric Lux, déjà cité ici, ou Michel Leroux, ont prêté des éléments de leurs trésors. Reste à savoir s'il n'y a pas au fil du temps (André Robillard crée ses fusils et autres depuis les années 60), comme dans le cas d'autres créateurs qui n'arrivent pas toujours à faire face à la demande trop pressante des "clients", une dévitalisation et une tendance à l'inachèvement embryonnaire des oeuvres de la part de cet étonnant créateur qui reste une véritable force de la nature (toujours solide malgré ses soixante-dix ans dépassés).
02:14 Publié dans Art Brut | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : art brut, andré robillard, création franche, tuer la misère | Imprimer
24/01/2009
Création Franche n°30
Les animateurs de Création Franche ont loupé le virage de 2008 à 2009 et font paraître leur deuxième numéro annuel sur l'année suivante, ce qui va encore fait crier certains à la confusion sur le rythme de parution de cette revue à laquelle je reste fidèle par delà le temps...
Mais baste! Peu importe le rythme de parution, l'essentiel est que la publication continue à se maintenir en dépit des inévitables difficultés financières qui guettent toujours ce genre d'initiatives. Nous arrivons désormais au n°30, en cette année de vingtième anniversaire du Site (c'est peut-être la passion des chiffres ronds qui a fait décaler la parution du n°30, du reste?).
Qui l'eut cru lorsque l'on vit paraître en 1990 le premier numéro de cet organe émanant du Site, devenu depuis le Musée, de la Création Franche...?
Je profite de cette note pour un faire un petit retour et une mise au point d'ordre historique.
Les deux premiers numéros de Création Franche étaient du point de vue de leurs maquettes tout simplement calamiteux, le contenu restant de son côté bien timide. La direction en avait été confiée à messieurs Lanoux et Maurice. On vit à cette occasion ce qu'ils étaient capables de mettre en chantier. Je fus fort marri d'avoir été mis à l'écart du projet alors que depuis plusieurs années, j'essayais de lancer l'idée d'une revue qui traiterait de l'ensemble du champ des arts populaires. On me trouvait trop remuant, "sans humour" (dixit Sendrey dans ses Histoires de Création Franche, éd. de l'Authenticiste, 1998), et peut-être aussi trop fidèle à l'esprit surréaliste ("Bruno Montpied se veut sans complaisance, sans concessions; voue une vénération absolue à André Breton...", Gérard Sendrey, même source).
"...l'idée d'une revue est venue se nicher au Site de la Création Franche. Des contacts que j'avais avec lui, Jean-Louis Lanoux m'apparaissait comme un homme censé [sic], raisonnable, bien posé dans la vie, avec une bonne connaissance du milieu sur lequel nous étions branchés. Je le voyais très bien remplir le rôle du rédacteur en chef ; et je le lui dis. Il ne pensa pas que j'avais tort et me le fit savoir. Mais il exprimait une crainte. L'éventuelle présence de Bruno Montpied dans le comité de rédaction lui semblait représenter un grave danger pour la cohérence et l'efficacité de l'entreprise (...) Jean-Louis considérait que Bruno ne pouvait s'inscrire raisonnablement dans un projet sans essayer d'en bousculer les données"... (Gérard Sendrey, même source, p.46). Bousculer les données, quel beau projet pourtant... C'est sans doute ce qui manqua dès le départ à cette revue comme on le voit à lire les propos de Sendrey. On me proposait d'écrire dans la revue mais il fallait accepter de passer sous les ordres d'un directeur qui craignait donc les "bousculeurs de données"... Je refusai (ce qu'a oublié de préciser Sendrey dans son livre, préférant me présenter comme un opportuniste qui aurait accepté sa mise à l'écart de peur de perdre l'occasion de placer sa prose).
Dès le troisième numéro, où Lanoux n'était plus directeur (c'était le rôle qui lui avait été finalement imparti, tandis que Jean-François Maurice était le rédacteur en chef) et où Gérard Sendrey, le véritable initiateur de toute l'affaire en réalité, qui avait voulu rester en retrait tel le Vieux de la Montagne (comme il se rêve souvent), reprit la direction des opérations, les choses commencèrent à s'améliorer, petit à petit. Les collaborateurs se retrouvèrent sous la direction de Gérard Sendrey (au reste assez débonnaire) sur un pied d'égalité, ce qui me poussa à proposer alors, et alors seulement, ma participation. Les collaborations diverses et variées que je fus amené à produire dans la suite des numéros montrèrent je crois que le soupçon que j'aurais représenté "un grave danger pour la cohérence et l'efficacité de l'entreprise" était parfaitement infondée.
Jean-Louis Lanoux introduisit une secrétaire de rédaction que Gérard Sendrey nomme "Aline" dans son livre qui se rendit coupable, aux dires de Sendrey, de ce qu'on pourrait qualifier comme des abus de pouvoirs... ("...elle corrigeait les textes, mettait un mot de son choix à la place d'un autre voulu par le rédacteur, tronquait des phrases, changeait des sous-titres, en modifiant le sens...", Gérard Sendrey, même source, p.51-52). Sendrey proposa dés lors à Lanoux d'abandonner le poste sacro-saint de directeur de la publication... Se fermait une période où finalement beaucoup de bruit avait été fait pour pas grand-chose.
La revue a, depuis ses débuts balbutiants, changé plusieurs fois de look, comme perpétuellement insatisfaite de ses atours (et de ses atouts?). J'avoue préférer sa dernière parure, mise en place depuis le n°26, avec son dos carré qui lui donne une allure plus professionnelle. Mais la période où son titre était composé avec des caractères contenant des fragments d'oeuvres "franches", du n°12 au n°17, me séduit aussi assez du point de vue de cet effet de maquette. Son contenu ne me plaît pas toujours, mais ce n'est pas mon entreprise, et je n'y suis qu'invité. Quand on regarde dans le rétroviseur, on s'aperçoit que s'il y a bien du déchet, il y a aussi un certain nombre de papiers fort instructifs sur toutes sortes de créateurs (la revue ne s'est jamais départie de son côté catalogue de notices, en dépit de tentatives trop rares d'insérer des "news" sur des actualités non liées directement au musée de la Création Franche -mes "Billets du sciapode" par exemple, dont le principe ne fut que peu repris par d'autres dans la revue). Avec le temps, on s'aperçoit que cette publication, jamais diffusée en librairie, mais seulement au Musée et sur abonnement, aura été utile pour l'information rare qu'on peut y trouver.
Dans le dernier numéro qui paraît donc ces jours-ci, on trouve en particulier un fort intéressant article de Paul Duchein sur des dessins retrouvés de Charles Paris, cet ancien chauffeur de maître qui à partir de 1958 (si l'on suit le catalogue de l'exposition de l'Art Brut au Musée des Arts Décoratifs en 1967) se mit à dessiner sur des pierres ou des coupes de bois d'olivier (voir également le livre de Michel Thévoz, L'Art Brut, de 1975, p.73). Comme le signale Duchein, la Collection de l'Art Brut et ses différents animateurs ne parlent pas du fait que cet auteur dessinait aussi. Les quelques dessins reproduits dans la revue sont de ce point de vue une première. On sent que leur auteur prisait particulièrement les images médiévales, ou de fantasy montrant le diable, ou une iconographie en rapport avec les lutins (un "personnage" de lui évoque les gremlins du cinéaste Joe Dante - qui, lui-même, soit dit entre parenthèses, serait allé les pêcher du côté de Roald Dahl...), tout en amplifiant cette imagerie d'une façon très personnelle beaucoup plus visionnaire.
A noter également un article enthousiaste de Michel Leroux sur André Robillard, qu'il a l'habitude d'aller visiter à son domicile près d'Orléans, et un entretien de Pascal Rigeade avec Charlotte Ranson et Alexis Forestier qui sont les maîtres d'oeuvre de la pièce "performance" Tuer la Misère à laquelle Robillard participe sur scène (voir ma note du 3 juin 2008). La pièce continue de tourner. En ce mois de janvier elle est présentée à Lyon au théâtre des Subsistances, puis ira ensuite les 7, 8 et 9 avril à Bordeaux au "TNT Manufacture de chaussures". Pour l'occasion, du 28 mars au 19 avril, une exposition consacrée à Robillard se tiendra au Musée de la Création Franche.
Pour tous contacts, voir www.musee-creationfranche.com. Adresse: 58, avenue du maréchal de Lattre de Tassigny, 33130 Bègles. Tél: 05 56 85 81 73 ou 05 56 49 34 72.
(Nota-bene :CETTE NOTE EST UNE VERSION REMANIEE, DIFFERENTE DE LA VERSION INITIALEMENT MISE EN LIGNE ; remaniement intervenu le 17 février 09; les deux commentaires qui l'avaient accompagnée avant cette date ne s'appliquant plus, étant donné le remaniement des termes, ont été supprimés)
15:37 Publié dans Art Brut, Art singulier | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : charles paris, jean branciard, andré robillard, tuer la misère, création franche, art brut | Imprimer