01/03/2016
La Villa Verveine, mise à jour
La Villa Verveine, c'est à Ault, en Picardie, près du Tréport, rappelez-vous, j'en ai déjà parlé. Et c'est une maison formidable, surtout à l'intérieur. Caroline Dahyot l'a peinte du sol au plafond, du moins dans les espaces qu'elle utilise quotidiennement. Elle peint, elle coud, elle brode, elle fait des assemblages, des poupées, quelquefois elle exporte son univers à l'extérieur comme bientôt dans le festival Art et Déchirure à Rouen, dans des sortes d'installations chargées de nous démontrer tout ce qu'elle est capable de faire, et qu'elle ne se contente pas de s'exprimer en deux dimensions dans des œuvres que l'on pourrait croire faites seulement pour le commerce. C'est un art total qu'elle vise, une conduite créative dans la vie. Bien sûr, son roman "familial "revient parfois avec insistance, mais l'on peut aussi préférer lorsqu'elle nous raconte des histoires de maison hantée. Il paraît en effet qu'un fantôme vient parfois s'asseoir sur sa terrasse qui est comme un promontoire en surplomb de la mer qui lèche la falaise où elle vit... On peut préférer aussi quand elle dessine des êtres imaginaires. Ou quand elle accepte de peindre à deux, du type "cadavre exquis".
Deux états de la façade sur rue de la Villa Verveine, en haut: photo Bruno Montpied, 2011, et en bas: ph. B.M., 2016
Caroline Dahyot, Paix, bonheur, vie..., broderie, ph. B.M., 2016
Caroline Dahyot et Bruno Montpied, La sorcière et l'oiseau guerrier, peinture sur drap, ph. B.M.,2011
La terrasse au fantôme, avec le banc à gauche où il vient s'asseoir, sans prévenir, ph. B.M., 2016
15:18 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art singulier | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : caroline dahyot, villa verveine, bruno montpied, façades peintes, art singulier, ault, art total, vie quotidienne et art, broderie, création textile, poupées, roman familial | Imprimer
Commentaires
Je viens de lire le lien que vous signalez concernant la protection de la villa Verveine...C'est consternant de voir ça et même assez étonnant. En effet, ces personnes revendiquent sans retenue leur absolue intolérance à la différence... Je les qualifierais, et il m'est assez rare de le dire, de bande d'arriérés.
Je ne vois vraiment pas en quoi la peinture murale de Caroline Dahyot peut choquer le passant.
Je ne connais pas le dessin de Syssoïev que Siger du haryag évoque mais j'ai en tête un dessin de Mordillo qui semble dire la même chose: On y voit un lotissement uniformément gris, des maisons identique à perte de vue. Devant la seule maison peinte en rose et mauve, deux policiers embarquent un type qu'on devine être l'auteur de ce forfait.
Et comme Cosmo le signale, ces mêmes personnes accueilleront les bras ouverts d'affreux panneaux publicitaires, de monstrueuses architectures et autres laideurs qui s'imposent à notre regard quotidiennement.
La villa Verveine, elle, fait du bien à nos yeux.
Écrit par : Darnish | 02/03/2016
Répondre à ce commentaireMerci cher Bruno!!!!! un ami vient de me partager cet article! j'aime ce que"vous défendez" sur ce blog mais aussi vos dessins alors vraiment merci et cher Darnish vos architectures donnent envie de se promener des heures dedans!
Écrit par : dahyot | 02/03/2016
Répondre à ce commentaireCe problème se retrouve partout, personne ne trouve rien à redire à la création d'une devanture de magasin grotesque ou tout simplement le massacre d'une façade de style par un établissement bancaire, mais si vous avez le malheur d'exprimer quelque chose de personnel, les pouvoirs publics et les riverains sont choqués. Cependant, il faut bien reconnaître que ces œuvres prennent souvent une dimension plus acceptable lorsqu'elles sont achevées. Au départ graffiti proches du tag dévastateur, il est clair que la façade recouverte peu à peu devient vraiment intéressante et pour finir sera un élément remarquable et tout à fait intégré dans la rue.
Un espace de liberté de ci-delà, est-ce déjà trop demander ?
Je ne sais pas si vous connaissez "le musée de l'artiste" à Vic-Fesensac dans le Gers ?
http://lemuseedelartiste.fr/
Au départ la démarche de l'artiste a rencontré également des "problèmes de façade". Ça reste l'œuvre d'une artiste plus ou moins autodidacte, Cathy Moreno, mais je vois aujourd'hui sur son site qu'elle a ouvert des chambres d'hôtes.
Pourquoi pas.
Il est intéressant de voir comment évolue le "genre" Art Brut, avec des artistes qui se revendiquent comme tels et non plus "bricoleurs" et créent des sites Internet, des chambres d'hôtes...
Rien de méprisant de ma part, je trouve que c'est une façon de faire exister leurs créations par une activité annexe tout à fait respectable, ( même s'il est vrai que cela perd un peu en "authenticité" ), mais je viens de voir, (enfin !), le film "Bricoleurs de paradis" et de lire votre livre et il me semble que ces "artistes sauvages" tout en restant marginaux, sont moins déconnectés du monde de l'art que ne l'étaient les "créateurs de jardins anarchiques" d'antan.
L'Art vraiment Brut existe-t-il encore ?
Écrit par : wens | 06/04/2016
Répondre à ce commentaireBien sûr, il est impossible de séparer de manière nette les inspirés autodidactes qui relèvent de l'art brut, de ceux qui relèvent de l'art singulier. Il y a des tas de nuances, de gradations, qui rapprochent ou non les créateurs de décor en plein air (les créateurs tout court d'ailleurs) de la catégorie des habitants-paysagistes populaires, autodidactes naïfs. La "déconnection", comme vous dites, vis-à-vis de la culture artistique, est souvent un critère qui permet d'évaluer cette question de taxinomie.
Je ne connaissais pas cette "maison de l'artiste" à Vic-Fesensac, merci de nous en avoir parlé. Si un de ses décors, avec des biches affrontées, paraît de style joliment naïf, son qualificatif de maison de "l'artiste" indique une certaine conscience de la part de son auteur de pouvoir appartenir à la caste des artistes professionnels. Et si on regarde l'ensemble de la maison sur les photos, point trop nombreuses, données sur ce site, avant tout soucieux de trouver des débouchés à son auteur pour ses chambres à louer ou pour son boulot de décoratrice, on note un beau savoir-faire de professionnelle. Du reste le CV de cette dame montre qu'elle possède un solide bagage au point de vue formation, "maître-ingénieur"... "capet de professeur de technologie"... etc.
Ce site ne paraît pas pouvoir du coup être associé aux sites d'art brut ou naïf en plein air, tels que ceux que nous avons montrés dans "Bricoleurs de paradis", avec Remy Ricordeau. Si leurs auteurs ne sont pas complètement "déconnectés" vis-à-vis de l'information médiatique, ils manifestent un soubassement culturel plutôt proche de la culture de masse, à base de télévision et de belote au café du coin... Si vous écoutez attentivement les interviews que je fais d'eux dans le film (aux questions soigneusement mises au point en amont par moi et le réalisateur), vous remarquerez que plusieurs rechignent à se faire appeler "artistes", mot qu'ils trouvent taillé trop grand pour eux. Il y a de la modestie dans leur attitude. Et peu de désir de discourir, de s'essayer aux explications.
Je ne pense pas donc que vous puissiez mélanger ces créateurs-là à ces artistes décorateurs tels qu'à Vic-Fésensac. Pour moi, même si les limites sont floues, à cause des nuances justement dont je parlais au début, il existe bien deux sortes de corpus parmi les créateurs d'environnements: les artistes et les autodidactes populaires, pratiquants d'un "art sans artistes". En ce qui concerne les premiers, les artistes, "l'évolution" vers la communication ne date pas d'aujourd'hui, mais depuis les années 1970, grosso modo, avec les sites de Robert Tatin, Chop, Chomo, Raymond Moralés, Dutel, Lucas, Jacqui, etc., qui furent toujours peu ou prou désireux qu'on parle d'eux. Aujourd'hui, avec les difficultés économiques des uns et des autres, s'y ajoute le besoin de faire de l'argent, sans cupidité toutefois.
Écrit par : Le sciapode | 06/04/2016
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