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18/11/2013

Fanzines... d'art brut? Rendez-vous samedi 23 novembre au Musée de la Création Franche

    C'est dans six jours. Une journée entièrement consacrée à la recherche autour des fanzines (petite presse en auto-édition) spécialisés dans l'art brut. L'initiative en revient à Déborah Couette du CrAB (Collectif de Recherche autour de l'Art Brut) et au Musée de la Création Franche à Bègles où se tiendra la journée d'études. Plusieurs intervenants, dont mézigue, sont attendus là-bas. Voici du reste le programme et les intentions des concepteurs de cette journée:

 

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    Des fanzines et des revues autour de l'art brut, il y en a eu, il y en a encore. Mais entièrement consacrés à l'art brut au sens strict du mot, à part les premières plaquettes éditées par la Galerie René Drouin en 1947-48, les publications en jargon de Dubuffet, puis les fascicules édités depuis le début des années 1960 sous l'égide de la Compagnie et de la Collection d'Art Brut, on ne peut pas dire qu'il y en ait eu véritablement. Toutes celles qui parurent, jusqu'à aujourd'hui, du Bulletin des Amis d'Ozenda, en passant par la Chambre Rouge, l'Art immédiat, Les Friches de l'Art, Gazogène, jusqu'à Zon'art et Création Franche, toutes ne parlèrent pas exclusivement d'art brut, mais aussi et surtout des alentours aussi bien, des formes d'art apparentées (art naïfs, habitants-paysagistes, graffiti, art modeste, inclassables etc.) en se référant également à des artistes singuliers rangés ailleurs dans la Neuve Invention (à Lausanne) ou dans la création franche (à Bègles). Comme si le concept d'art brut leur paraissait trop restrictif, trop ghettoïsant...

 

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Bulletin de l'Association Les Amis de François Ozenda

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La Chambre Rouge fut mon premier fanzine un peu sérieux, qui s'intéressait à la fois au surréalisme dans ses aspects les plus vivants, aux fous lttéraiires, aux divertissements littéraires, à la sculpture populaire, à l'art rustique moderne (Gaston Mouly et ses "dessins" ci-dessus évoqués sur la couverture du n°4/5 de 1985, bien avant que Gérard Sendrey ne rencontre, sur mon instigation, le même Mouly et ne s'attribue par la suite la responsabilité d'avoir poussé Mouly vers le dessin...)

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Le n°2 et le n°1 de L'Art Immédiat, ma deuxième revue, de 94 et 95, cette fois plux axée sur les arts populaires spontanés

Création-Franche-n°30.jpgCréation Franche

Gazogène, le numéro plus récent, n°35fanzines,art brut,art singulier,surréalisme spontané,la chambre rouge,l'art immédiat,collection de l'art brut,création franche,crab,déborah couette,zon'art,ozenda,recoins,gazogène

         De plus, les publications de la Collection de l'Art Brut, si elles sont bien de l'auto-édition du fait de la Collection elle-même (dans la majeure partie des fascicules, car les derniers en effet sont édités conjointement avec In Folio éditions), ne sont pas à proprement parler analogues aux "fanzines", éditions qui se caractérisent généralement par une certaine pauvreté de moyens, étant le fait de chercheurs et de passionnés le plus souvent désargentés, indépendants des cercles professionnels du journalisme et de l'édition. 

     Il était cependant tentant d'aller porter un peu l'éclairage de ce côté, pour voir pourquoi il fut important pour quelques passionnés en France –dont le signataire de ces lignes, et animateur de ce blog,  fait partie– de faire de l'information sur les phénomènes non seulement de l'art brut mais aussi de l'art naïf, de l'art populaire rural, de l'art forain, de l'art populaire contemporain aussi appelé art modeste, d'un certain surréalisme spontané, de la littérature ouvrière, des fous littéraires, des environnements spontanés, des cultures urbaines, de l'art de la rue, des graffiti, etc. Il est tentant d'essayer de comprendre aussi pourquoi il n'a pas été possible en France, et ce jusqu'à présent, de monter une grande publication périodique qui se consacrerait à l'étude et à l'information sur tous ces aspects de la créativité autodidacte spontanée, publication qui aurait fait appel à toutes sortes de plumes. Ne seront pas non plus évoquées, très probablement, et ce sera dommage, toutes les publications encore moins spécialisées sur les arts populaires, pas nécessairement des fanzines aux pauvres atours, mais qui ont cependant régulièrement publié des informations sur tel ou tel sujet qui appartenait au corpus, comme les revues Plein Chant, SURR, Jardins, voire les magazines L'ŒilArtension, L'Oeuf Sauvage (par exemple). Des fanzines d'aujourd'hui comme Recoins et Venus d'Ailleurs (très soigneusement édité ce dernier), sans se braquer sur l'art populaire ou brut, savent de temps à autre accueillir des articles sur le sujet. Il faudrait donc ouvrir plus largement le compas et s'interroger sur l'ensemble des articles ou études publiés ici et là sur le thème des arts d'autodidactes inventifs.

 

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Annonce de la publication de la revue Recoins n°5 (avec plusieurs articles concernant les arts populaires et les environnements spontanés), parution 2013

 

     Sans compter que d'ici très peu de temps, il faudra aussi que nos amis universitaires et archivistes se penchent avec suffisamment de documentation numérisée sur les blogs qui ont pris le relais avec vigueur des publications sur papier (comme l'auteur de ce blog qui put grâce à ce médium donner toute l'ampleur qu'il souhaitait à la masse d'informations dont il disposait, une fois passée l'époque "héroïque" des premiers fanzines des années 80 et 90).

Pour suivre cette journée, il semble prudent de réserver auprès du Musée de la Création Franche.

22/01/2013

Un nouvel écrivain nous est né

         Certains écrivains se révèlent sur le tard. C'est le cas de Joël Gayraud. Après avoir fait paraître aux éditions José Corti son premier livre d'une certaine ampleur, La Peau de l'Ombre (car on ne retiendra peut-être pas le modeste ouvrage, Si je t'attrape, tu meurs, qu'il signa en 1995 de son nom aux éditions Syros, collection Souris Noire, plus alimentaire qu'autre chose et destiné à la jeunesse), publié ici ou là quelques plaquettes de poésie en prose, signé plusieurs traductions prestigieuses (Leopardi, Giorgio Agamben, Straparola), et commis plusieurs préfaces ou postfaces à divers textes, le voici qui nous revient avec un excellent recueil de petites proses ou notations poétiques, Passage Public, édité au Québec par L'Oie de Cravan.

 

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    On y retrouve quelques textes qui avaient paru il faut bien le dire confidentiellement dans diverses revuettes. Deux d'entre eux, A Fleur d'os et Un Inspiré en sa demeure, furent même parmi ses tout premiers textes publiés: par mézigue, dans mes revues auto-éditées, respectivement La Chambre Rouge n°4/5 (1985, le titre étant alors L'inspiré de la rue de Gyrokastër ; à noter que le texte a été amplement complété par rapport à cette première édition ) et L'Art Immédiat n°2 (1995 ; là aussi la version insérée dans Passage public comporte des modifications).

 

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      Si l'homme avait une conversation brillante à ces époques, stimulante à bien des égards, et si ses aperçus reposaient sur une documentation des plus originales, par ailleurs il ne paraissait pas chercher à publier des écrits (on était alors à une époque où l'on cherchait, dans les milieux se voulant d'avant-garde, à créer et à vivre des situations plutôt que conquérir des places dans le cirque médiatique). Médiateur dans l'âme comme je suis, je n'hésitai pas à lui mettre le pied à l'étrier. Peu importait que ces premiers essais d'écriture soient à cette époque par trop redevables à des styles et des contenus admirés. Il fallait commencer. Le temps passant, Joël s'est affirmé comme un brillant styliste et un écrivain poétique de toute première force.

joël gayraud,passage public,l'oie de cravan,l'art immédiat,la chambre rouge     Une courte nouvelle parue dans la revue québécoise Le Bathyscaphe n°2 (juin 2008 ; la revue, qui a publié huit numéros, est disponible chez Anima à Paris, rue Ravignan dans le XVIIIe ardt ou en écrivant à le.bathyscaphe@gmail.com ; le n°2 est accessible en ligne ici même), une courte nouvelle intitulée Le Centaure de Santorin m'avait déjà alerté sur la métamorphose en cours, et notamment révélé à quel point il peut se montrer à l'aise dans des textes qui hésitent entre littérature et documentaire poétique sur les misères de notre monde. Les courts textes de Passage public sont de cette eau. Divers et variés, ils évoquent parfois Léon-Paul Fargue (la Couleur des rues), s'intéressent au fantastique social (Un Inspiré à sa demeure), retranscrivent des dérives flâneuses dans Paris (Matériaux pour une cartographie révolutionnaire de Paris, Sans feu ni lieu, ou Après le virage, ce dernier étant un texte que publia naguère ce blog,  devenant du coup un peu plus espace de pré-publication...), critiquent "la définitive imbécillité de la compétition sportive" (Vive le catch!) ou campent la hantise de l'énergie atomique (Le Nez du monstre), font l'éloge des chiens grecs et leur bienheureuse paresse.

 

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      Mes préférés sont dans l'ordre du sommaire Parade napolitaine, où Joël montre clairement et parfaitement comment l'anarchie, comme le disait Elisée Reclus qu'il cite en exergue, est bien "la plus haute expression de l'ordre", Averse et Cresson, délicieuse rêverie sur un souvenir de passage à Uzerche ("la luzerne à Luzarches, l'usure de l'été à Uzerche..."), et ces deux textes qui tissent avec un égal bonheur, et grande virtuosité, rêve et état de veille, réussissant à montrer à quel point les deux peuvent se mêler, sans que cela débouche, comme cherche à le démontrer Caillois dans L'incertitude qui vient des rêves, sur une crainte et une méfiance à l'égard de l'activité onirique, j'ai nommé Chaleur sur la ville et L'erre

     Défauts de mémoire, qui clôt le mince recueil, enfonce encore davantage le clou de l'intrication du rêve et de la réalité telle que la littérature peut nous la révéler et nous la montrer désirable. Bref, on l'aura compris, avec Passage public, le lecteur raffiné aura en main une lecture délectable.

Joël Garyaud, Passage public, L'Oie de Cravan, 2012 (5460 rue Waverly, Montréal H2T 2X9 ;  www.oiedecravan.com).