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17/05/2015

Des "Bricoleurs de paradis" à Montreuil

     Est-ce un signe de la fin provisoire des rebonds de projection dans différents lieux de France du film de Remy Ricordeau, que j'ai co-écrit avec lui, Bricoleurs de Paradis, voici qu'il sera projeté à la Médiathèque Robert Desnos de Montreuil (rue Rouget de l'Isle entre Croix de Chavaux et la mairie), dans cette même ville où siègent les bureaux de l'éditeur d'Eloge des Jardins Anarchiques, l'Insomniaque, mon livre, où est inséré primitivement le DVD de Bricoleurs de Paradis... On finirait la campagne de promotion du film et du livre par là où on a commencé?

     Le livre est épuisé, et ne sera pas réédité pour le moment, afin de laisser la place à deux autres projets en cours, menés avec le même éditeur pour l'un, et avec un second éditeur pour l'autre (les Editions du Sandre). Le film de Remy Ricordeau, qui sera donc projeté à la Médiathèque le jeudi 21 mai en ma présence à 19h30, dans le cadre d'une "garden party" (jeu de mots, puisque c'est pour parler des jardins spéciaux, en l'occurrence de l'art brut), est désormais quant à lui disponible en téléchargement payant ou en location sur le site de la coopérative audiovisuelle Les Mutins de Pangée.

    Alors, on se retrouve jeudi soir prochain à Treuilmont?

 

Taugourdeau-mami-wata-37-91.jpg

Emile Taugourdeau, une statue représentant vraisemblablement une Mami Wata, les bras chargés de serpent (autre façon de représenter en Afrique de l'Ouest les déesses des eaux), photo Bruno Montpied, 1991 (soit vingt ans avant la sortie du film Bricoleurs de Paradis où Remy et moi sommes allés tourner des images sur l'état actuel du jardin, désormais bien abîmé ; en 91, le jardin était à son apogée, son auteur n'étant décédé que depuis deux ans)

 

04/12/2010

Une sirène africaine à Pamiers

     Les Amoureux d'Angélique m'ont fait un magnifique cadeau avant l'heure, en se baladant aux Puces de Pamiers, où ils ne se sont pas pâmés devant des puciers, non, au contraire, ils sont tombés sur une petite merveille, une sirène à queue bifide, c'est-à-dire deux queues. Qui a tout l'air d'une Mami Wata, avec ce serpent qui lui passe sous les reins, en tout cas, eux comme moi avons plaisir à nous l'imaginer... Elle valait 1 €. Comme quoi nul besoin de s'en aller faire ses emplettes avec la Jet Set de l'art brut du côté des grandes foires d'art brut à la mode pour trouver de la poésie populaire à portée de tout un chacun.

 

 

Anonyme,-sirène-(mami-wata-.jpg

Anonyme, sirène, peut-être une Mami Wata africaine, des traces de trous sur le haut de la pièce peut laisser imaginer qu'elle servit peut-être de figure de proue sur quelque grosse barque, comme image propitiatoire chargée d'éloigner les  esprits malins des eaux  ; dénichée par Martine et Pierre-Louis Boudra à Pamiers, 2010, photo BM

12/10/2010

Une sirène des rues encore (Mami Wata la suite, à Paris)

     Les sirènes me poursuivent drôlement je trouve. J'errais samedi matin avec un ami brocanteur aux Puces de Vanves, et comme souvent je me disais que je n'allais encore rien trouver. Et c'est toujours au moment où l'on désespère (enfin c'est souvent  à ces moments-là, un peu comme lorsqu'on est las d'attendre un bus qui ne vient pas, et qu'on se décide à partir, et il survient juste au point de lassitude...), que la surprise se manifeste. Repassant devant un éventaire qui sans doute avait été tardivement déballé, me frappent comme une balle deux peintures représentant deux magnifiques sirènes que le biffin a accrochées à la grille longeant le trottoir. Présences immédiates! Qui m'élisent aussi sec! Une connexion se fait instantanément, je ne peux faire autrement que chercher à en acquérir une. Il y en a quatre au total, et aussi des animaux (une belle hyène dégustant une proie sanguinolente, deux lions qui ont une certaine ressemblance avec ceux que peignait le naïf italien Ligabue). Et le marchand me dit: c'est les "Mami Wata" qui vous intéressent? Encore des Mami Wata...! Je ne les avais pas d'emblée reconnues pour sirènes africaines. Elles sont signées "Mansuela 78". Un peintre zaïrois (le Zaïre est l'ancien Congo) actif dans les années 70 donc.

 

Mansuela,-Mami-Wata-(Zaïre).jpg

Mansuela, sans titre (Mami wata), 43 x 62 cm, 1978

 

      Je choisis d'acquérir, parmi les quatre sirènes, qui tiennent tantôt un téléphone, tantôt un micro surgi des eaux, une qui cueille des roses, poussant bizarrement parmi des touffes d'herbes dans le fleuve d'où elle émerge (les Mami Wata sont des esprits d'eau douce plus particulièrement, je crois). Et il ne me revient qu'à présent, en rédigeant cette note, l'anecdote relative au rosier de la variété de roses "Mermaid" que j'ai évoqué dans ma précédente note sur les Mami Wata (voir lien ci-dessus). L'inconscient a parlé, je ne pouvais choisir qu'une sirène à la rose. Les collections se constituent ainsi, pièce après pièce, recomposant un puzzle qui dessine le désir de ce que nous voudrions sauver de notre vie (voir aussi la note sur ce fantôme lumineux de sirène surgi un jour dans la même maison au rosier "Mermaid").   

 

26/06/2009

La Mami Wata de Cyprien Tokoudagba

     Ces histoires de sirènes africaines, les Mami Wata, m'ont fait oublier je ne sais pourquoi de parler d'un bel ouvrage édité par la Fondation Zinsou au Bénin (l'ancien Dahomey) au sujet de cet extraordinaire artiste nommé Cyprien Tokoudagba, que j'apprécie énormément, surtout depuis une exposition qui s'était tenue à l'Institut du Monde Arabe en 1994, Rencontres Africaines, où ses tableaux gigantesques montrant des figures isolées sur fond blanc, manifestement inspirées des cultes vodoun, figures d'une grande audace picturale, m'avaient littéralement sidéré. Certes, en France, le travail de Tokoudagba avait  déjà surtout été révélé par la remarquable exposition des Magiciens de la Terre (organisée en même temps à la Villette et au Centre Beaubourg en 1989). A l'époque dans la foule de créateurs venus des quatre coins du monde pour les besoins de cette exposition fondatrice, j'avais surtout remarqué d'autres créateurs africains, en particulier Bruly Bouabré ou Bodys Isek Kinghelez, mieux mis en scène sans doute.

Couverture du livre sur Cyprien Tokoudagba édité par la Fondation Zinsou, 2006.jpg

      Dahomey, Rois et dieux, Cyprien Tokoudagba, tel est le titre de cet ouvrage (bilingue anglais-français) que j'ai trouvé sur un stand dédié à la culture béninoise tel qu'on pouvait en voir un peu en marge de l'immense espace du Salon du Livre en mars dernier. Il parut à l'occasion d'une expo du même titre consacrée à l'artiste à Cotonou à la même Fondation Zinsou en 2006. Or, ce livre en plus du fait qu'il permet d'en apprendre davantage sur Tokoudagba (à lire l'éclairant texte de Joëlle Busca en particulier), nous met en contact avec une autre version de la Mami Wata, cette fois concocté par notre artiste béninois.

Cyprien Tokoudagba,Mami Wata, Extrait du catalogue de la Fondation Zinsou, 2006.jpg
Mamiwata, Acrylique sur toile, 154x98cm

      A côté de sa reproduction, une notice donne de précieux renseignements sur la "sirène" en question, en réalité une déesse, un "génie de la mer": "Elle habite les profondeurs de la mer et commande à des myriades d'ondines. Souvent elle se présente sous les traits d'une très belle femme lorsqu'on l'invoque surtout au bord de la mer. Elle est détentrice de beaucoup de richesses (argent, bijou, or...) convoitées par les humains à qui elle les dispense (...). Elle s'entoure de serpents qu'elle enroule autour d'elle. Son culte est assez répandu. En tant qu'esprit, elle peut prendre la forme qu'elle veut, tel ici un personnage visiblement masculin à trois têtes..." Elle peut "prendre la forme qu'elle veut"... On ne saurait mieux dire... Au vu de toutes les reproductions de Mami Wata en circulation (voir ma note du 9 novembre 2008 ), on s'en convainc aisément. Dans le même livre, on trouve aussi, entre autres images magnifiques, une toile représentant le dieu Gou, du fer et de la guerre (c'est le même qu'Ogun, une sorte "d'homologue du dieu Mars de la mythologie latine", dit le catalogue), c'est une image géniale, hallucinée...

Cyprien Tokoudagba, Dieu Gou, extrait du catalogue de la Fondation Zinsou, 2006.jpg
Gou, acrylique sur toile, 195x102cm

 

 

09/11/2008

De la sirène d'Europe à la Mami Wata, sirène africaine

    Cela fait longtemps qu'en rêvant à mon sciapode, emblème et logo que je me sens davantage que d'autres (les éditions Zoé en Suisse par exemple) fondé à brandir, étant donné mon patronyme, cela fait longtemps que je me dis que si je devais trouver une épouse à mon sciapode, son pendant féminin ne saurait être autre qu'une sirène.

Roger-Jeanton,-Sirène,-sans.jpg
Sirène de M.René Jenthon, autrefois installée dans son jardin de silhouettes en tôle peinte et découpée à côté de St-Pourçain-sur-Sioule (Allier), coll.privée, ph.Bruno Montpied

     Cela recoupe mon histoire sentimentale, j'ai connu il y a des lustres une femme, désormais disparue, qui était fascinée par ces mêmes sirènes, ayant été sans doute l'une d'entre elles dans une vie onirique parallèle. Elle avait commencé une esquisse de collection sur ce thème. Cela n'avait pas été loin. Cependant, pendant les mois de gestation intra-utérine de ce qui allait devenir par la suite sa charmante fille, elle la rêva comme une sirène, ce à quoi ressemblent les foetus d'ailleurs...

Cariatides avec siréneau et sirène, porte de la maison d'un viticulteur de l'Entre-Deux-Mers à Rauzan (merci à Anne Billon et à Gilles Manero pour l'indication ; ph B.Montpied, 2008.jpg
Maison de viticulteur à Rauzan (Gironde), ph.B.M., 2008

    Ce rapport aux sirènes connut un épisode posthume assez merveilleux. Cette amie avait fait planter un rosier devant sa maison en Brière. D'une variété nommée Mermaid... Quelques semaines après sa disparition, nous nous trouvions, sa fille (âgée alors de douze ans), son mari et moi ensemble dans cette maison. Un matin, en sortant sur le pas de la maison, sa fille eut la surprise de voir qu'une des roses de l'arbuste s'était tournée vers le seuil, avec cette étrange impression que la rose la regardait... J'apprends à cette occasion le nom de cette variété de rose. Mermaid veut dire Sirène comme on sait. Je me demande si la disparue savait le nom de la rose, sans doute que oui, connaissant son goût pour les coïncidences. Mais alors, dans un second temps, le mot sonne autrement, j'entends tout à coup: Mère m'aide... Signal post mortem d'une mère errant parmi les choses, du souvenir de la mère flottant dans le décor de sa vie pour une petite fille désormais orpheline?

     L'iconographie sur la sirène est vaste et variée, bien davantage que sur les sciapodes, bien moins connus. Elle contient parfois des images un peu effrayantes, comme ce bébé en bocal que garde paraît-il le musée de l'école vétérinaire de Maisons-Alfort (signalons au passage à nos lecteurs qu'il vient de réouvrir après deux ans de travaux de restauration, merci à Jean-Raphaël pour l'info), ou des images plus sensibles comme cette sirène peinte sur un bombardier pas spécialement conçu pourtant pour l'expression de la sensibilité...

Enfant-Sirène du musée Fragonard de Maisons-Alfort, les jambes soudées ressemblant à une queue de poisson.jpg

Enfant-"sirène", musée Fragonard de Maisons-Alfort ; les jambes soudées par malformation les font assimiler à une queue de poisson

Sirène peinte sur un bombardier américain, années 40 sans doute, vu sur anonymousworks.jpg
Photo insérée sur le site Anonymous Works, années 40 peut-être 
 
      Or, le hasard m'a mis récemment sur la piste des "Mami Wata", ces esprits de l'eau plus ou moins maléfiques, sirènes à la mode togolaise, béninoise, ghanéenne ou encore congolaise, dont le nom dériverait de l'anglais "Mummy Water" (Mère eau).Mami Wata, groupe de statues,Tsevie, Togo, sur le site web art-vs.de.jpg Il y a eu il y a déjà quelque temps un ouvrage, Mami Wata, la peinture urbaine au Congo, de Bogumil Jewsiewicki (éd. Gallimard, coll. Le temps des images, 2003), qui présente ces esprits complexes comme des symboles de la femme libre, peut-être inspirée des femmes européennes (l'Europe aussi a eu ses sorcières, femmes libres réprimées), dont l'imagerie emprunte ses différents styles à des sources semble-t-il multiples (à une imagerie populaire venue de l'Inde notamment), et utilisée par différents discours politiques (Mobutu se servait de son image).Mami Wata, par Cheri Benga sur le site web ananzie.net.jpg La Mami Wata aux "mille aspects" fait, entre autres, trembler le phallocrate africain, par la liberté sexuelle qu'elle manifeste (la femme libre, la maîtresse, est surnommée "la deuxième bureau"). "Son aspect principal paraît puiser dans le fonds folklorique européen passé par la littérature scolaire se référant en particulier à Mélusine"... écrit M.Jewsiewicki.Mami wata sur le site web ananzie.net.jpg Les affiches de cirque européens montrant des charmeuses de serpents ont pu influencer les représentations peintes au Congo (pays où l'on ne trouve apparemment que des peintures sur le thème de la sirène, tandis que dans les autres pays d'Afrique occidentale ce sont davantage des oeuvres en trois dimensions), ainsi que des figures de proue sur les bateaux... 
Mami Wata peinte sur une maison du Bénin, site de partage de photos d'une certaine Laurence.JPG
 
    Passant récemment par Lyon, le galeriste Alain Dettinger m'a mis sous les yeux une remarquable sculpture éwé qui proviendrait peut-être du Ghana. Ce serait une représentation de Mami Wata là aussi.
Mami Wata, objet sculpté Ewé, provenance Galerie Dettinger-Mayer, Lyon, ph.Bruno Montpied.jpg
Esprit de l'eau, Mami Wata, origine Ewé, peut-être Ghana, coll.privée, ph. B.Montpied, 2008
 
     Je trouve l'objet saisissant, combinant les formes du poisson et de l'être humain de façon inversée par rapport à la norme. C'est le torse et la tête qui sont poisson cette fois et le bas du corps qui appartient à l'homme (au verso est figuré le postérieur). Inversion qui me paraît rare et qui justifiait cette note un peu hétéroclite sur le thème des sirènes. De plus, on notera, les amateurs de sciapodes noteront, que ce poisson à jambe n'en possède qu'une. C'est un poisson monopode. Pourvu de deux fesses néanmoins (car un sciapode ne devrait avoir qu'une fesse, on n'y pense pas suffisamment). Une Mami Wata un peu sciapode en somme.