31/05/2021
Festival Hors-Champ des arts singuliers au cinéma (documentaire seulement, hélas...): le retour!
L'année dernière, ce sympathique festival organisé par l'Association Hors-Champ sur un jour et demi avait été annulé pour cause de virus.
A souligner dans ce programme qui sera diffusé les 4 et 5 juin dans la salle L'Artistique, 27 boulevard Dubouchage à Nice, les films consacrés à Lee Godie, à Italo Farinelli (nouvel environnement populaire spontané que je ne connaissais pas), ou les films de Lespinasse sur La Pommeraie et Pépé Vignes.. Pour le reste, je botte en touche, soit parce que je ne connais pas, soit parce que je trouve les films assez quelconques.
Il ne s'en est pas complètement remis, puisque cette année, il revient quand même, mais en petite forme, avec un programme allégé (au point de vue variété et originalité), et dans un nouveau lieu d'hébergement, la salle de l'Artistique – l'auditorium du MAMAC à Nice n'étant pas disponible, cause Covid, et l'Hôtel Impérial, le délicieux Hôtel Impérial ayant, trois fois hélas!, fermé ses portes, apparemment définitivement... condamné par le Covid et ses répercussions économiques.
On se souviendra avec une nostalgie désormais poignante des rencontres que les invités à ce festival (dont j'ai été) eurent à maintes occasions le bonheur de vivre, dans la salle de séjour très cinématographique de ce vieil Hôtel Impérial, avec ses vases, ses bouquets de fleurs, ses tableaux, ses murs couverts de tapisseries, ses tentures, ses meubles baroques, ses poutres peintes, ses fauteuils en cuir – où parfois étaient projetés certains films, comme ceux de Guy Brunet, un peu longs, mais diffusés comme en avant-premières, dans une sorte de projection familiale – ou dans la salle de réception du petit déjeuner, avec son lustre de cristal, sa fresque de putti au plafond, ses baies donnant sur un jardin abrité à l'ombre de quelques palmiers, où dormait, marginalisée, une table ronde en rocaille attendant ses chevaliers, devenus définitivement fantômes....
La façade de l'Hôtel Impérial (et la clé de la chambre 25, recto et verso ci-dessus, avec son message original en cas d'oubli), photos Bruno Montpied, juin 2018.
Les Vénus et les amours au plafond de la salle à manger, ph. B.M., 2018.
Dans ma mémoire, j'aime à faire défiler les personnages d'un certain matin au petit déjeuner, Caroline Bourbonnais, avec qui je n'avais jamais eu l'occasion de me retrouver en tête à tête, Francis David, ce photographe mystérieux et réservé, comme venu d'un autre espace-temps, eût-on dit, Claude Massé que l'on m'avait dépeint bourru, difficile, mais qui me parut au contraire aimable et charmant (était-ce l'atmosphère de ce lieu magique qui métamorphosait tous ceux qui y passaient?), Vincent Monod le rire jamais loin des lèvres, Philippe Lespinasse, à la fois semblable à un passager tombé l'instant d'avant de la Lune et l'œil bientôt narquois, et Pierre-Jean, l'ineffable Pierre-Jean Wurst, l'hôte généreux et incapable de ne pas blaguer, venant faire la revue de ses invités, Guy Brunet... Marc Décimo... Alain Bouillet... Charles Soubeyran, un peu pontife en dépit de ses sandales sans chichis... Anic Zanzi, de la Collection de l'Art Brut de Lausanne, comme sur la défensive...
Affiche de ce 24e festival... Avec son titre choc habituel, tel qu'aime à en choisir, à chaque festival, l'équipe de l'association Hors-Champ...
19:54 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Cinéma et arts (notamment populaires), Environnements populaires spontanés, Hommages | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : hôtel impérial à nice, association hors-champ, cinéma documentaire et arts singuliers, lee godie, italo farinelli, philippe lespinasse, caroline bourbonnais, francis david, claude massé, guy brunet, pierre-jean wurst, on n'est pas des gueux | Imprimer
21/05/2018
Le LaM et sa cartographie des "habitants-paysagistes", un début d'inventaire numérisé des inspirés
Fondée sur plusieurs fonds iconographiques et archives (pêle-mêle, les archives de l'Aracine, le fonds de photographies de Francis David, les fiches d'André Escard, le fonds Claude et Clovis Prévost – pour l'instant 10 documents en ligne, à l'heure où j'écris ces mots –, les archives audio-visuelles de l'INA, le fonds Louise Tournay – qui, s'il est intéressant, ne relève pas pour autant des habitants-paysagistes à proprement parler...), a été mise en ligne depuis mars dernier une esquisse de cartographie de ce que le LaM a choisi d'appeler "les habitants-paysagistes", reprenant ainsi un terme quelque peu "scientifique"– quoique pas très exact – inventé par l'architecte-paysagiste Bernard Lassus, qui avait publié un livre sur la question, Les Jardins imaginaires, en 1977 aux Presses de la Connaissance. Il avait forgé cette appellation par projection de son propre métier. Il cherchait à se documenter sur les habitats d'ouvriers, en particulier de la région Nord-Pas-de-Calais, leurs façons d'orner leurs jardins, et d'y parler un langage par le truchement de ces agencements. Ce n'était pas l'affaire de Bernard Lassus d'y repérer une poésie, de chercher l'insolite, un possible surréalisme inconscient. Il rabattait sur eux son métier d'architecte, tirant d'eux de la matière, des questionnements, de solutions venus d'en bas, du terrain des habitants, sans leur demander véritablement leur avis... Cela se voulait probablement démocratique comme démarche. Au service de projets paysagistes que Lassus serait amené dans les annnées suivantes à créer.
Personnellement, je me suis résolu à utiliser le terme d'"environnements spontanés" qui me paraît plus précis, si tant est qu'on puisse arriver à trouver des mots suffisamment satisfaisants pour qualifier ces travaux visant à embellir, recréer, divertir, bâtir une poésie discrète dans l'espace. "Environnements", parce que cela désigne la zone où l'action a lieu, à savoir, majoritairement, entre habitat et route. Et "spontanés" parce que cela indique un phénomène d'expression empirique, bricolé avec les moyens du bord, sans formation artistique, surgi très souvent inopinément, une chose entraînant l'autre, quelquefois inspiré par des rêves, chez des gens qui ne sont pas des professionnels de l'art. Car j'ai centré mes enquêtes surtout sur des gens du peuple, ouvriers, artisans, paysans (voir mon livre Le Gazouillis des éléphants, pour les internautes qui n'auraient pas encore repéré cet ouvrage)...
La carte que l'on trouve sur le site des habitants-paysagistes du LaM ; Elle indique trois sortes d'informations quant à la pérennité ou non de ces créations: "site existant" en bleu, "site disparu" en rouge, et "site indéterminé" en orange. Cette carte est appelée à se couvrir de pastilles dans l'avenir, et l'on espère y voir davantage de bleu... Il faut dire que ces environnements sont très souvent éphémères, souvent sur le point de disparaître après être apparus brièvement dans les media.
Mais revenons à cette cartographie du LaM. Elle n'est pour le moment qu'une esquisse, puisqu'on peut y trouver une quarantaine de sites indiqués sur la carte que l'on trouve dès l'accueil du site (voir ci-dessus). Alors qu'il en existe beaucoup plus. En ne se limitant qu'aux créateurs d'origine populaire, j'en ai inventorié dans mon Gazouillis jusqu'à 305 (du passé et du présent). Mais ce chiffre s'élève en réalité bien au delà... Atteignant vraisemblablement, au moins, les 400.
Déjà, en parcourant cette cartographie en ligne, je suis tombé sur deux sites dont je n'avais jamais entendu parler – deux que je retiens parmi les plus inventifs, les plus "artistes", les plus naïfs (primesautiers), en refoulant les faiseurs de maquettes, les accumulateurs de déchets, etc. Car ce qui m'intéresse avant tout, c'est de mettre en valeur la créativité chez les autodidactes non artistes professionnels. Ce sont des environnements qui ont été comme de juste découverts, dans les années 1980, par cet incroyable fureteur qu'est le photographe émérite Francis David. Il avait, dans ces années là, probablement déjà fait un premier tour de la France de ces modestes excentriques, adeptes du ciment armé, de la mosaïque, de la racine interprétée en plein air. Il aurait pu en dresser l'inventaire, daté de l'époque, si le public avait répondu présent après la publication d'un premier volume de son Guide de l'Art insolite, consacré aux régions (elles n'étaient pas encore réunies dans les "Hauts de France") Nord-Pas-de-Calais et Picardie (Herscher, 1984). Hélas, ce fut un échec, et l'éditeur ne poursuivit pas la publication d'autres volumes. L'auteur, que je croisai brièvement un jour de vernissage dans les locaux de Neuilly-sur-Marne à l'Aracine, paraissait quelque peu désabusé. Personne depuis cette date ne voulut s'atteler à nouveau à l'entreprise risquée d'inventorier les sites français d'art brut ou naïf en plein air. Je fus finalement le premier à y arriver... Grâce aux audacieuses éditions du Sandre et à son animateur, Guillaume Zorgbibe.
David, Francis, "Le jardin de Marcel Mazière. [Marcel Maziere dans son jardin],” HABITANTS PAYSAGISTES : cartographie des maisons et jardins singuliers, LaM, 1989.
Deux sites, disais-je, des années 1980, dont on peut se demander s'ils existent encore... : celui de Marcel Mazière à St-Astier en Dordogne (le site du LaM donne à chaque site son emplacement exact sur un plan) et celui de Raoul Justet à Allègre-les-Fumades dans le Gard.
Marcel Mazière, que la notice du LaM indique dans un état "indéterminé" (ce qui laisse un espoir à tous ceux qui voudraient aller voir sur place s'il en est resté quelque chose), fut rencontré par David en 1989. Peu de photos furent prises, quatre, nous dit la notice, peut-être parce que l'auteur n'avait que peu sculpté? Mais les statues animalières et humaine que l'on aperçoit sont d'une très belle facture naïve. Je n'avais personnellement jamais entendu parler de ce site.
David, Francis, “La maison de Raoul Justet. [Détail d'une fresque 2]”, HABITANTS PAYSAGISTES : cartographie des maisons et jardins singuliers, LaM, 1985.
Idem avec celui – encore plus extraordinairement séduisant, c'était un créateur naïvo-brut de première force! – de Raoul Justet dans le Gard. Là aussi, on aimerait savoir de toute urgence si ces travaux ont pu être sauvegardés depuis 1985, date des clichés pris par Francis David. Sa façon de tracer ses personnages me paraît du genre à s'être complètement perdue aujourd'hui, hélas...
David, Francis, “La maison de Raoul Justet. [Détail d'une fresque 1]”, HABITANTS PAYSAGISTES : cartographie des maisons et jardins singuliers, LaM, ph.1985.
Le LaM sur ce site consacré au habitants-paysagistes se veut interactif avec les internautes et tous ceux que la question des environnements d'autodidactes passionne. Il est fait appel aux bonnes volontés, par des formulaires de contact, voire des appels à contribuer même, si l'on a idée de faire découvrir des sites non répertoriés, ou de compléter telle ou telle information, par exemple sur l'état actualisé des sites indiqués sur la carte, ou le destin des œuvres postérieurement aux dates des clichés ou des informations données dans les notices (les sites "indéterminés" devraient à terme tous se trouver renseignés exactement sur leur durée réelle...). A chacun de voir donc...
Nota bene : "Les habitants-paysagistes, une cartographie du LaM" figure également (sous ce libellé) dans mes "doux liens", dans la colonne de droite de ce blog.
13:12 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art naïf, Environnements populaires spontanés | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : habitants-paysagistes, cartographie des maisons et jardins singuliers, aracine, francis david, lam, art brut, art naïf, environnements populaires spontanés, gazouillis des éléphants, marcel mazière, raoul justet, guide de l'art insolite, l'aracine | Imprimer
14/02/2016
Création Franche n°43 où les inspirés du bord des routes sont de retour
Le n°43 d'une revue fondée en 1989
Voici le nouveau numéro de Création Franche, revue bi-annuelle, un numéro au printemps, un numéro en hiver... Disponible sur abonnement, ou directement au Musée de la création franche à Bègles, et de temps à autre à la librairie de la Halle St-Pierre, Paris 18e ardt...
Au sommaire − en dehors de l'édito du directeur, Pascal Rigeade, qui, cette fois-ci, nous présente le nouveau rendez-vous du musée, appelé de façon très branché "le Lab" (qui, d'après ce que j'en ai compris, souhaite révéler le dialogue que noueraient telle ou telle œuvre de la collection avec le contexte social, économique, culturel, etc, de sa production... Ambitieux programme...), et de l'article de Gérard Sendrey, l'ancien directeur, et fondateur du musée − on trouve cinq chroniqueurs extérieurs : Paul Duchein, Dino Menozzi, Denis Lavaud, Bernard Chevassu et moi-même. Les deux créateurs évoqués par Duchein et Menozzi ne m'ont, je dois dire, pas beaucoup retenu. Non, je me suis plutôt attardé sur l'article de Bernard Chevassu qui propose une balade du côté des "racines et des rêves", autrement dit, de créateurs qui ont ce point commun de s'intéresser fortement aux formes suggestives de la nature, notamment arboricole. On y retrouve, au hasard des pages, quelques images des œuvres de Félix Gresset, personnage dont je n'avais plus entendu parler depuis une éternité, je crois bien que c'était dans une ancienne brochure de l'Aracine la dernière fois...
En cherchant un peu dans ma documentation, j'ai finalement retrouvé une notice sur lui, illustrée de deux reproductions, dans le catalogue Art Brut, collection de l'Aracine, édité par le LaM, musée d'art moderne de Villeneuve-d'Ascq en 1997. Il y est dit que Gresset, ouvrier forestier dans le Jura, avait installé des personnages constitués de branches, de racines, ou bien encore de souches interprétées, devant sa maison, dans un village joliment appelé Chantegrue (un nom de lieu prédestinant là encore, sûrement). Ce qui me permet de le ranger parmi les créateurs populaires d'environnements chers à mon cœur. L'article de Chevassu vagabonde avec raison de façon agréable chez les assembleurs et interprètes amateurs (ou non : plusieurs de ceux qu'il cite paraissent plus "artistes") de poésie naturelle. On sait que, rien que dans la catégorie des créateurs autodidactes populaires, ils sont légion. On aime à ramasser du bois mort, ou des galets aux formes tourmentées, qui représentent d'étranges formes interprétables. C'est la manière que les fées et les trolls ont trouvée pour se perpétuer jusqu'à notre époque trop raisonnante.
Le jardin de Félix Gresset, photo parue dans Art brut, collection de l'Aracine (1997)
Ce numéro de Création franche s'attarde plus que d'habitude chez les inspirés du bord de routes. C'est ainsi que l'on lit avec plaisir l'entretien que Francis David, l'émérite photographe du Guide de l'Art insolite dans le Nord-Pas-de-Calais-Picardie (Herscher, 1984), a donné avec bonne grâce à Denis Lavaud. Le dialogue revient sur le parcours de ce pionnier en matière de recherche d'inspirés, en nous révélant que c'est, entre autres, à la suite des expositions de Claude et Clovis Prévost que dès 1977 à Chartres, Francis David décida de s'intéresser de plus près aux habitants-paysagistes. Il y a en effet une chaîne de quêteurs d'inspirés du quotidien qui va, ininterrompue, depuis le début du XXe siècle (si l'on pense aux photographes anonymes qui nous ont gardé la trace par la carte postale de tant de sites du passé) jusqu'à aujourd'hui.
Francis David, en plus de son travail photographique des années 1980, aurait très bien pu développer l'écriture, de façon tout aussi originale que dans sa photographie. Il s'est en effet rapproché des écrivains-voyageurs, si l'on se réfère aux quelques rares notes de balade (des vers en réalité) qu'il fit paraître dans le catalogue de l'exposition Les Bricoleurs de l'Imaginaire (Musées de Laval et de La Roche-sur-Yon, 1984). Ces dernières se terminaient par ces mots:
"rouler jusqu'à la nuit / avec l'ivresse de ces courses et de ces rencontres / avec le vertige / d'avoir à délimiter / les fondations d'une tour de Babel / que des rêveurs s'acharnent / à bricoler pour nous / tous."
Un Gabriele Mina, en Italie, s'est souvenu de cette tour de Babel dans le titre de ses livre et site web (Costruttori di Babele...). De même qu'un certain Bruno Montpied ne rougit pas de reconnaître qu'il a dû se souvenir des "bricoleurs de l'imaginaire" (cf. le titre du catalogue et de l'exposition initiés par Francis David), pour le film qu'il a écrit avec le réalisateur Remy Ricordeau, Bricoleurs de paradis...
B.M., dans ce même numéro 43 de CF, a rapporté un petit reportage sur un environnement étourdissant, très atypique, qu'il est allé voir en Espagne, en compagnie de deux camarades, l'été dernier. Ce site incroyable, créé par un certain Julio Basanta, pour commémorer le meurtre de son frère, puis de son fils, par la police, à vingt ans d'intervalle, est imprégné d'un mysticisme légèrement délirant qu'il paraît fréquent de rencontrer chez nos voisins ibères. L'article aurait pu faire partie de la série de notes que j'ai commencée sur ce blog (intitulée − bien présomptueusement puisqu'il n'y a eu jusqu'ici, je m'en avise avec confusion, qu'un seul épisode s'y rapportant − "Journal de voyage en Espagne"), évoquant en pointillé cette dérive automobile en Espagne. Je ne me laisserai pas aller à évoquer cette création architecturale et sculpturale, car cela nous emmènerait trop loin. Publions juste une photo supplémentaire et renvoyons nos lecteurs qui voudraient en savoir plus vers la revue. Car la fin du papier par la lecture sur internet n'entre pas dans mes vues...
La "Casa de Dios" de Julio Basanta, ph. Bruno Montpied, 2015
01:02 Publié dans Art Brut, Art immédiat, Art singulier, Environnements populaires spontanés, Hommages, Photographie, Poésie naturelle ou de hasard, paréidolies | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : création franche n°43, inspirés du bord des routes, environnements spontanés, habitants-paysagistes, denis lavaud, francis david, bruno montpied, félix gresset, poésie naturelle, bernard chevassu, julio basanta, casa de dios, environnements populaires espagnols, art brut espagnol | Imprimer
03/12/2009
Le jardin d'Emile Taugourdeau danse encore dans les ronces
Qu'est-ce que ça devient chez Emile Taugourdeau, le maçon disparu en 1989, qui avait laissé derrière lui dans son jardin des dizaines et des dizaines de statues naïves, brutes, immédiates, ce qui constituait un des environnements de statues naïves ou brutes parmi les plus importants de France? Vingt ans qu'il est décédé, et pas de commémoration pour lui (il n'aura pas eu la chance d'un Chomo par exemple, plus artiste sans doute et reconnu comme tel par ses pairs).
Il était en concurrence, au point de vue strictement quantitatif bien entendu, avec le jardin de Gabriel Albert à Nantillé en Charente-Maritime (on y a dénombré environ 400 statues, chez Taugourdeau, cela devait être approchant), lui aussi désormais en grand péril. On a parlé de lui autrefois (et abondamment, ce qui me justifie de venir en reparler aujourd'hui: Francis David le tout premier dans Les Bricoleurs de l'imaginaire, Jean-Louis Lanoux dans Plein Chant n°45, Taugourdeau étant alors encore de ce monde, puis après sa mort, dans ce fatras qu'était le Guide de la France Insolite de Claude Arz, etc.).
Un article dans un journal spécialisé dans la brocante, longtemps aprés la mort de l'auteur, eut paraît-il une influence néfaste, car à la suite de cette publication qui aurait fait trop de bruit, on vola certaines statues qui étaient sans surveillance (les statues que M. Taugourdeau exposait de l'autre côté de la route, en face de sa maison, les laissant avec confiance pour la récréation de tout un chacun qui passait sur ces petites routes charmantes de la Sarthe).
Le silence retomba. Certains familiers du site, continuant de lui rendre visite secrètement (à noter un article du modeste Zon'Art, vers 2003, si je me rappelle bien), familiers qui récupéraient au passage certaines pièces qui étaient à vendre (et ils faisaient bien, faute de mieux)... Personnellement, j'y étais passé en 1991, en compagnie de la photographe et artiste Marie-José Drogou, afin de fixer sur pellicule le plus possible d'oeuvres. J'y suis revenu longtemps après, en 2003, puis récemment donc en juillet 2009.
Chez Taugourdeau, il y a (il y avait) beaucoup d'animaux, des cervidés, mais aussi des crocodiles, des dinosaures, des serpents, des chiens, des chevaux, et énormément de volatiles. Et aussi des footballeurs lilliputiens (les équipes, les buts, rien n'était oublié, ça grouillait, il fallait faire attention de ne pas buter sur eux). Un Bernard Hinault (il est tombé par terre, c'est pas la faute à Voltaire, mais plutôt la tempête dernière). Une voiture ancienne avec passager et chauffeur (plus de poussière soulevée par ses roues, mais du lierre à la place qui grimpe vaillamment à l'assaut).
Des carrioles conduites par des hommes paraissant porter sombreros (la forêt, les ronces les ont-elles mangés? Je ne les ai pas revues à mon dernier passage en juillet dernier).
Taugourdeau paraissait aimer les personnages, principalement couverts de chapeaux. Les sombreros revenaient souvent, semblant indiquer une fascination du créateur pour les Mexicains (il avait représenté deux Mariachis, les guitares absentes de leurs mains à mon passage en 1991). Il y avait aussi, récurrents, des petits couples gentils, des couples de danseurs certes immobiles mais paraissant tourner sur eux-mêmes simultanément, des grenouilles cachées comme des larves dans des jardinières carrées montées sur pieds.
Des arbres de ciment - toujours le ciment - aux branches couvertes d'oiseaux. Des pêcheurs à la ligne, oui aussi en ciment, qui cherchaient à prendre des poissons eux-mêmes en ciment (c'était les premiers sujets que commença Taugourdeau après s'être essayé à un canard). Des mariés qui dansaient galamment sous les arbres. Des cigognes aux longs cous. Un phacochère. Une déesse Kali (du moins l'ai-je identifiée ainsi, on l'a appelée aussi "la magicienne") plutôt du genre souriante, des serpents sur les bras (elle est toujours là, à mon passage en juillet dernier, je lui ai remis sur les bras les serpents qu'un antiquaire indélicat avait jetés par terre, à ce que me confia Mme Taugourdeau). Un moulin avec son petit meunier (il avait le bras fendu, on l'a acheté, puis emmené à l'abri ailleurs, loin de cette jungle). Il y avait (oui, toujours l'imparfait) deux cavaliers sur deux chevaux qui avaient l'air de fendre les airs pour aller où? On en a vu filer un récemment encore, du côté de L'Isle-sur-la-Sorgue sur une brocante, à l'évidence échappé du jardin de M. Taugourdeau (voir ci-dessous le cavalier encore en place en 2003). Il est resté le second, une variante, avec de subtiles différences, de l'ordre de quelques centimètres de plus ou de moins (j'ai vérifié, il a les jambes plus longues, des étriers plus dégagés de la masse de ciment...)
Il y avait, surtout, plus oubliés encore que les statues, d'étonnants tableaux de ciment teint dans la masse, d'une très belle facture naïve. Dans le jardin, exposés à la merci des intempéries, leurs couleurs ravivées à chaque pluie.
Qu'ils étaient beaux, ces tableaux... Et que le coeur me fend de les imaginer perdus, brisés, cassés? Ici ou là, tassés parfois à plusieurs contre un mur de parpaings, petit à petit couverts de terres, de mousses, enserrés par des racines accrocheuses, on en redécouvre, en les feuilletant d'un bras qui les retient de tomber pendant que l'autre prend la photo.
D'autres disparaissent sous la couleur uniformément verdâtre qui glace l'ensemble de l'oeuvre encore en place (les statues ne sont pas fendues, résistant encore bien malgré vingt ans sans entretien à l'air libre depuis la mort de leur créateur).
Peut-être que certains ont été tout simplement vendus? Car c'est ce qui arrive, la famille laisse partir par petits bouts les oeuvres du jardin, tantôt chez des amateurs désireux de sauvegarder ces chefs-d'oeuvre naïfs, tantôt à des brocanteurs peu scrupuleux qui acquièrent à bon compte des jardinières en mosaïque, en renversant au passage les statues qui ne les intéressent pas, et qu'ils ne songent pas une minute à relever, l'affaire étant faite. C'est ainsi, il ne semble pas qu'aucune autre possibilité de sauver ce qui resterait encore à sauver puisse se mettre en place désormais. Il reste des écrits, des photos, peut-être des films, et quelques statues échappées chez les uns et les autres pour garder la mémoire de cette magnifique création.
Le jardin, encore visible un peu il y a cinq ans, un jour que nous le visitions après un nettoyage saisonnier, se couvre à d'autres moments d'une végétation qui semble partie pour le dévorer complètement. Le redécouvrira-t-on un jour comme on a découvert les temples mayas dans la jungle du Yucatan?
04/05/2008
Bohdan Litnianski, le jardin en péril de Viry-Noureuil
Francis David nous a fait découvrir en 1984 Bohdan Litnianski dans son ouvrage Le Guide de l'Art Insolite Nord/Pas-de-Calais, Picardie (Editions Herscher, Paris), puis longtemps après, Agnès Varda, a fait figurer son étrange jardin dans son poétique documentaire Les glaneurs et la glaneuse, ce qui assurera sans doute à la mémoire de Litnianski de ne pas être trop oubliée lorsque son oeuvre aura disparu de la surface de la terre.
Car cette disparition est en bonne voie, hélas... Me rendant récemment à Amiens pour sa Réderie (brocante), j'ai fait un petit détour par le site de Bodhan à Viry-Noureuil dans l'Aisne. La végétation s'y est développée de façon galopante, si l'on se réfère aux photos du livre de Denys Riout et Benjamin Teissèdre, paru chez l'éditeur Vivement Dimanche (basé à Amiens) en 2004, un an avant la mort de Bohdan Litnianski (ce dernier est né en 1913, il avait donc aux environs de 91 ans), ouvrage qui comportait du reste une préface d'Agnès Varda.
Au point de donner l'impression qu'elle a avalé, telle une jungle vorace et vampire, de l'intérieur, les piliers faits d'objets de rebut agglomérés, les passerelles les reliant entre eux avec leurs nombreuses figurines de baby-foot en plastique, forêt de piliers qui suggérait un Alhambra fantasmagorique recomposé à partir des décharges où allait fouiner perpétuellement ce génial récupérateur de matériaux divers qu'était Litnianski ( son principal métier avait été maçon depuis qu'il était arrivé d'Ukraine en 1930; mais je crois me rappeler que lorsque je l'avais visité en 1989, en compagnie de José Guirao et de Serge Ancelet, il m'avait dit faire alors le chiffonnier). Deux forêts donc, en quelque sorte affrontées...
L'épouse de Bohdan vient à son tour de décéder, à ce que nous a confié un des voisins de la propriété, désormais bien abandonnée. Seuls les piliers du pourtour du jardin apparaissent aujourd'hui, à se demander si Bohdan, ou quelqu'un d'autre n'avait pas déjà fait table rase des piliers de l'intérieur. L'ensemble ressemblant assez aux pyramides maya du Yucatan enfouies sous la jungle d'Amérique Centrale...
J'ai consciencieusement fait le tour, photographiant en détail ce qui se laissait encore voir. Des piliers, nouveaux par rapport à ma visite de 1989, avaient été ajoutés derrière la maison d'habitation, comme réminiscents de fragments du Palais Idéal du facteur Cheval (mais ce n'est qu'un parallélisme de hasard, rendu possible par l'idée, commune aux deux autodidactes, d'ériger des colonnades fantomatiques). Bohdan Litnianski disait qu'il pouvait réaliser une colonne en une journée seulement, empilant ce qu'il trouvait sous la main parmi les matériaux ou objets (beaucoup de poupées) qu'il avait préalablement triés (c'était ce collectage et ce tri qui lui causaient le plus de travail). Mais les rencontres, les voisinages des objets et des formes agglomérés au hasard possèdent à les regarder de prés (et la photographie est un précieux auxiliaire révélateur de ce point de vue) une grande force poétique, comme s'ils avaient été réanimés d'avoir été ainsi incrustés, absorbés dans le grand magma de ce torrent figé charrié par le puissant égoût de la société de consommation-consumation...
Réanimés parce qu'abîmés aussi, regardons ces têtes aux boîtes crâniennes ouvertes, ces têtes échevelées penchées mélancoliquement, cet homme-lion gesticulant, ces poupées aux peaux brûlées couvertes de cloques et semblables à des poupées d'exorcisme...
Quelle étrange unité à travers le disparate et l'apparente incohérence des assemblages... Tout cela ne mériterait-il pas qu'on essaye de le sauver et de le préserver? Les couleurs déjà s'évaporent (les arborescences coralliennes sur les tuyaux par exemple), la grisaille s'installe, le grand mur pignon à droite de la propriété, entièrement fait d'objets et de matériaux hétéroclites maçonnés rigoureusement et solidement devient plus que jamais un Mur des Lamentations érigé au départ face à la société de consommation avec peut-être un peu de malice inconsciente mais prenant un autre sens maintenant que ce jardin est entré dans l'agonie...
23/03/2008
Séraphin Enrico perdu et retrouvé, par Olivier Thiébaut (1995)
Avec plus de dix ans de retard, je publie sur ce blog alors qu'au départ elle était prévue pour le papier de mon bulletin L'Art Immédiat n°3 la contribution d'Olivier Thiébaut (datée de 1995) au sujet de Séraphin Enrico qui avait créé un environnement à St-Calais dans la Sarthe, des statues diverses et variées dont une Vénus portant l'inscription "la luna rossa" sur son fessier dénudé ... Inscription qui finit par être reprise par Thiébaut pour intituler le jardin qu'il a ouvert à Caen où il conserve un certain nombre de fragments d'environnements qu'il a préservés ou exhumés, à l'exemple du site d'Enrico. Ce jardin de la Luna Rossa à Caen est le deuxième exemple en France après la Fabuloserie et son parc d'environnements à Dicy dans l'Yonne de tentative de conservatoire des environnements spontanés, par nature éphémères et terriblements "immédiats".
Notons que le site de Séraphin Enrico avait d'abord été repéré par Francis David dans le catalogue Les Bricoleurs de l'Imaginaire, Inventaire pour une région (Musées de Laval, 1984). Olivier Thiébaut a, en 1996, publié un ensemble de textes sur ses découvertes, Bonjour aux promeneurs! aux éditions Alternatives, où il parle entre autres de Séraphin Enrico (son texte étant une variante, en outre un peu écourtée, de celui qu'il m'avait donné et que j'insère ci-dessous).
"Né le 3 juillet 1898 à Mougrando (Italie), Séraphin Enrico est issu d'un milieu modeste. Cimentier à l'âge de 14 ans, il découvre la rude épreuve du travail. En 1915, il est mobilisé dans les chasseurs alpins italiens.
La Grande Guerre lui fait subir les souffrances du froid: il a les mains gelées par la neige, et perd un doigt. Après la guerre, il décide de partir pour la France qui a besoin de main d'oeuvre dans le bâtiment.
Séraphin Enrico travaille sur plusieurs chantiers, à Grenoble et Chambéry, puis s'installe à Grand-Lucé dans la Sarthe. Il se marie quelque temps plus tard avec Virginie Vineis. En 1925, il déménage à Saint-Calais, et achète un terrain à la sortie du bourg, sur la route de Vibraye. Situé dans une petite vallée, le lieu est idéal pour y construire sa maison et son merveilleux jardin.
A partir de 1959, il entreprend la réalisation d'une propriété qui devient son "grand-oeuvre", une sorte de jardin d'Eden. Sculptures, bassins, fontaines, tonnelles, alcôves et souterrains agrémentent sa maison sur un terrain en espaliers dominant le cours de l'Anille. Pendant une vingtaine d'années, armé d'une simple brouette et de truelles, Séraphin Enrico construit un univers de rêve. Les ciments et mortiers colorés lui servent de matériaux de base. Son goût pour la sculpture et la peinture se traduit dans son travail par la réalisation de personnages et d'animaux peints qu'il installe dans des décors appropriés. La peinture florentine, le sport, la mythologie et les femmes en tenue "sexy" sont ses principales sources d'inspiration. Le caractère placide de Séraphin Enrico semble en contradiction avec ses oeuvres et sa réputation. Considéré souvent comme un farfelu et n'étant pas vraiment reconnu par les habitants de Saint-Calais, il met son imaginaire au service d'un autre public en inventant des aires de jeux pour les enfants. Au milieu des années soixante, le jardin de Séraphin Enrico est un foisonnement de couleurs et de sculptures, c'est l'attraction locale où l'on peut lire "Entrée Libre": des centaines de familles viennent lui rendre visite. M. Mercier, son ancien voisin, se souvient: "L'oeuvre était de taille! Il y en avait partout, rangées en rangs d'oignon. On n'avait jamais vu ça, ce genre de chose. On se demandait d'où cela pouvait bien lui venir. C'était son pays, son petit coin de paradis où il s'exprimait, car il était plutôt discret, le père Enrico, et pas toujours très commode! Il avait du caractère. Son goût pour la décoration ne le quittait pas. Tous les soirs, il travaillait à faire ses bonnes femmes, quand il s'y mettait, on ne pouvait plus l'arrêter. Même à son travail, ses employeurs lui reprochaient de faire un peu trop de décorations ou de fioritures inutiles dans les chantiers. C'est surtout avec les enfants qu'il s'entendait, c'était spontané avec eux! Certains parents n'aimaient pas trop d'ailleurs laisser traîner leurs enfants, ils le prenaient pour un satyre, en voyant certaines de ses oeuvres. C'était un drôle de bonhomme, le père Enrico, et il avait ses idées à lui! Je me souviens qu'il avait fait une vache et plusieurs bonnes femmes qui avaient un système de rigole dans le dos, ça récupérait l'eau quand il pleuvait et elle sortait par le zizi. Il avait aussi creusé des souterrains dans son jardin qui partaient d'en bas et remontaient jusque sous sa maison, il voulait même traverser la route. Mais on a dû l'arrêter, parce qu'on a retrouvé un jour sa femme qui étendait le linge, enterrée jusqu'à la poitrine. Ca s'était effondré! Il avait fait aussi des choses en hauteur avec des personnages montés les uns sur les autres, mais ça c'était du solide! M.Enrico connaissait bien le ciment. Quand il a dû partir, il a tout abandonné, le pauvre, ça a été certainement très dur pour lui. C'est triste à dire, mais je me souviens qu'ils en ont mis du temps pour tout enlever, c'était du béton armé extrêmement dur!"
Jusqu'en 1972, Séraphin Enrico va travailler inlassablement à son jardin, dépensant toute son énergie et tous ses revenus dans sa réalisation. Sans argent, il va continuer ses travaux en fabriquant alors lui-même son ciment avec les pierres de la rivière qu'il réduit en poudre. A 74 ans, il quitte la région contre son gré, pour aller finir ses jours avec sa famille à Divonne-les-Bains dans l'Ain. C'est dans cette nouvelle maison qu'il a réalisé ses dernières sculptures, décidé à recommencer malgré son âge, encore et encore!
Séraphin Enrico meurt en 1989, laissant derrière lui une oeuvre méconnue.
La méconnaissance de cet ensemble unique et son isolement "culturel" ont certainement contribué à sa disparition. Aujourd'hui [en 1995] la municipalité de Saint-Calais semble n'en avoir gardé aucune trace, malgré le reportage télévisé diffusé en 1973 (un documentaire sur la destruction du jardin malheureusement perdu ou égaré). Depuis cette époque, les oeuvres de Séraphin Enrico dorment sous une épaisse couche de terre.
En mai 1995, grâce au témoignage de M.Justin Stern, et grâce à de vieilles photographies conservées par les voisins, nous retrouvons l'emplacement d'une ancienne mare où quelques sculptures ont été enfouies.
La tentation est trop forte! Une fouille est entreprise pour la découverte du travail de Séraphin Enrico et pour le plaisir des yeux. Pendant une dizaine de jours, nous creusons dans l'ancienne mare. Une multitude de fragments sont mis au jour, et à notre grande surprise, peinture et ciment n'ont pas été altérés: écritures et dessins apparaissent comme un livre ouvert dans le sol.
Certaines de ces sculptures devaient atteindre trois mètres de haut et sont recouvertes de petites phrases ou devises italiennes (Il giro del lago; Pane, pace, Amore, Libertà; Santa Maria; Vénus; La luna rossa; Spectaccolo del natura; la petto materne; Pittura Fiorentino; Sono libera!...). La facture et l'originalité des pièces révèlent la grande inventivité de leur auteur: ciments polis, cheveux en mortier colorés, incrustations d'objets, systèmes hydrauliques. Baigneurs, Vénus, madones et créatures aux profils asiatiques vont pouvoir à nouveau contempler le ciel, sous l'aile tendre des "séraphins".
OLIVIER THIEBAUT, 1995."
(Tous les documents ici mis en ligne et confiés à moi en 1995 appartiennent à Olivier Thiébaut)
15:44 Publié dans Art Brut, Art naïf, Environnements populaires spontanés | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : séraphin enrico, olivier thiébaut, francis david, environnements spontanés, bricoleurs de l'imaginaire | Imprimer