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25/07/2014

Chaîne de métamorphose

    Suite à l'expo "La Chasse à l'objet du désir" qui s'est tenue en juin à Montréal, j'ai reçu une proposition de participation à une chaîne de création interminable où il s'agit de transformer, au départ, une gravure ancienne représentant la coupe d'un cerveau, de participant en participant en une métamorphose continue. C'est David Nadeau qui a lancé ce projet et qui s'en fait l'écho sur un blog créé tout exprès, appelé La Vertèbre et le Rossignol, sous-titré "Expérimentations surréalistes". On clique ICI (je mets le lien en capitales pour les Clermontois myopes). On vous y dira tout ce que vous voulez savoir pour participer à votre tour au jeu des re-créations infinies.

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La coupe du cerveau, l'image initiale envoyée par David Nadeau

 

    Curieusement, David Nadeau a déjà décomposé les interventions en deux séries. Du coup on obtient plusieurs chaînes. Vous choisissez celle que vous voulez (peut-être même que vous pouvez participer à toutes). Moi de mon côté, après avoir renvoyé mon intervention (visible sur le blog en question), j'ai continué en solo à interpréter le cerveau découpé afin d'en tirer une œuvre finie, une modification. Avis aux amateurs de cadavres exquis donc...

24/07/2014

Une signalétique pour une pratique populaire peu connue, les rassègues...

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Insolite panneau de stop au coin d'une rue à Port-la-Nouvelle, 2014

    Etrange mot n'est-ce pas? Mais il n'est étrange qu'en dehors de Port-la-Nouvelle dans l'Aude, où ce terme dérivé de l'occitan désigne la scie... Dans la région le mot est familier, et sert à désigner les discussions à n'en plus finir où l'on scie le même sujet, en long, en large, et en travers, le malaxant dans tous les sens et finissant par le débiter en tranches bien souvent... Le bavardage en somme, à perte de vue, et pratiqué presque comme un sport régional.

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Port-la-Nouvelle, 2014

    Au coin de cette rue, tout près de l'Hôtel du Port, bien sympathique halte et estaminet, la scie clouée au panneau de stop désigne un lieu où plusieurs se rassemblent régulièrement pour ces "parties" de rassègue à n'en plus finir. D'où l'insolite panneau de circulation. Où, plus que les autos, ce sont les piétons qui stoppent longuement.

21/07/2014

Portrait brouillé à la Pointe Courte

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L'adolescence, photo Bruno Montpied, Sète, 2014

18/07/2014

L'OR AUX 13 ILES, pour un numéro 3 au cœur de l'été, on souscrit!

     C'est pas une date dira-t-on pour sortir une revue, surtout quand on l'attend depuis un bail... Jean-Christophe Belotti, son animateur, se moque de ce genre de problématique car il compte sur le bouche à oreille, sur le réseau des lecteurs qui avaient déjà repéré les deux numéros précédents. Et puis, il sera toujours temps de le faire connaître par les librairies à la rentrée. Et puis encore, la revue est tellement intéressante que peu importe le moment où on la sort...

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La couverture du nouveau numéro de L'Or aux 13 îles

      Pour ceux qui n'ont pas déconnecté de leurs petits écrans internet en ce mois de juillet, j'annonce donc la parution de ce troisième opus de cette revue toujours aussi soigneusement présentée (elle est à l'impression pour le moment). La couverture du numéro est peut-être la plus belle des trois parues. Pour souscrire, il faut cliquer sur ce lien au bout duquel vous trouverez un bon de commande avec quelques pages de la revue reproduites en vignettes. Pour ceux qui ne connaissent pas -ou ne voient pas j'en connais, du côté de Clermont-Ferrand...-  ce que j'appelle un lien, ils pourront toujours écrire à l'adresse de la revue: Jean-Christophe Belotti, 7, rue de la Houzelle, 77250 Veneux-les-Sablons en envoyant un chèque de 22€ + 4,50€ de frais de port (pour le numéro 3 ; mais on peut aussi acheter les deux numéros précédents: 30 €+ 4,50 de frais pour les deux). Et ils pourront aussi consulter le sommaire que la revue nous a gentiment communiqué:

 

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L'Or aux 13 îles n° 3, le sommaire ; l’œil dans l'oreille c'est peut-être pour souligner le rapport à la musique qui s'est invité dans ce numéro à travers deux contributions, dont un CD qui est joint au numéro

     On notera l'importance du dossier consacré à Alan Glass, surréaliste créateur entre autres de poèmes-objets qui vivait au Mexique, ami de Léonora Carrington, dont des dessins furent publiés en leur temps par André Breton et Benjamin Péret et qui a fait l'objet d'un film d'art dans la collection de documentaires sur des artistes surréalistes de la série Phares Seven Doc.

     Ce numéro contient aussi des contributions de Joël Gayraud et de Mauro Placi (des habitués des commentaires de ce blog), un scénario inédit, Les Insectes, de Jan Svankmajer, et divers compte-rendus consacrés à d'importantes publications parues ces derniers mois (sur l'univers de Svankmajer, sur Krizek, sur Laurent Albarracin, et sur Stanislas Rodanski).

 

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Deux pages de la revue consacrées au début du texte de Bruno Montpied sur "Les Bouteilles Malicieuses des époux Beynet"

 

       Enfin, je ne peux passer sous silence ma propre contribution visant à dévoiler quelque peu l’œuvre atypique et naïvo-brute de deux autodidactes auvergnats, les époux Beynet, qui dans les années 80 de l'autre siècle produisirent en secret, pour leur plaisir intime, près de deux cent bouteilles peintes sur leurs pourtours de saynètes drolatiques. Je suis très fier de cette découverte faite à un moment où les bouteilles en question étaient sur le point d'être dispersées. J'en ai ainsi récupéré près d'une centaine que l'on voit ci-dessous, en partie, accrochées à mes plafonds, dans un dispositif qui ressemble à celui qu'adoptaient chez eux dans leur musée secret à Auzat-sur-Allier les Beynet:

 

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Louis et Céline Beynet, 9 bouteilles peintes, coll. et ph. Bruno Montpied, 2014

 

   Une fois la période de souscription passée, je suppose qu'on pourra trouver la revue à Paris à la librairie de la Halle St-Pierre par exemple.

      

10/07/2014

"Il était une fois l'art brut"

     Le Collectif de Réflexion autour de l'art Brut (CRaB) monte actuellement une exposition qui vise à démystifier un certain nombre de clichés relatifs à l'interprétation chez de nombreux observateurs quant à ce que peut être l'art brut et ce qui s'y joue. Cela se passe dans  les locaux d'Art et Marges à Bruxelles du 13 juin au 10 octobre 2014.

 

art et marges,crab,il était une fois l'art brut

Affiche de l'expo reflétant la couverture du catalogue avec les mêmes petits carrés aquarellés fadasses réalisés pour l'expo par un artiste contemporain

 

     Le sous-titre donne un peu la clé du projet: "fictions des origines de l'art". A-t-on affaire avec l'art brut avec un corpus d’œuvres qui mettraient en pleine lumière un art originel (cela me rappelle que certains dans les années 80 (Jean Revol par exemple?) avec l'art des handicapés mentaux avaient parlé à leur propos "d'art originaire")? Les auteurs du CRaB ne le pensent pas. Ils récusent de contribution en contribution au fil du catalogue les différents amalgames que l'on voit périodiquement se construire et se reconstruire à propos de l'art brut, associé et confondu par exemple avec l'art des enfants ou l'art primitif, instinctuel. Le mot de primitif est par ailleurs jugé raciste par Baptiste Brun.

      L'exposition est paraît-il, si je suis les propos de Déborah Couette et Céline Delavaux qui signent l'avant-propos du catalogue, organisée de façon à camper visuellement, avec des couleurs (rose bonbon pour les œuvres qu'on pourrait associer à l'enfance, noir charbon pour les œuvres qu'on rapproche de l'art dit primitif, "vert sauvage" pour les œuvres avec des matériaux naturels...) les différents amalgames que les divers critiques pratiquent à l'égard d'un art brut qui doit selon les auteurs garder sa fonction d'affoleur et de questionneur (elles soulignent qu'elles ne veulent pas tomber dans le piège qui consisterait à le définir, elles reprennent ainsi la fameuse sortie de Dubuffet qui consistait à dire - je cite de mémoire : "L'art brut, c'est l'art brut et tout le monde a très bien compris").

     Bon, mais le lecteur reste tout de même un peu sur sa faim à suivre toutes ces remises en cause (qui me font penser par association d'idées aux exégèses multiples qui ont suivi le surréalisme surtout à partir des années 90 et qui pour la plupart, diverses et gloseuses dans des sens contradictoires, ont fini par brouiller entièrement le message initial). Sans compter que ce même lecteur ne se retrouve pas forcément dans la maquette du catalogue de l'expo assez laid et austère d'où le principe de plaisir semble avoir été banni (et que dire de cet artiste contemporain appelé "Messieurs Delmotte" avec ses photos campant une sorte de grand dadais jouant à dada réchauffé sans aucune force subversive, juste creux?). Et puis tous les contributeurs du CRaB ne semblent pas forcément vouloir laisser le lecteur devant un art brut seulement proposé comme indéfinissable (pourquoi pas indicible pendant qu'on y est?), éternelle savonnette échappant des mains.

   Vincent Capt, à la fin de son texte, ressemblant à un plaidoyer structuraliste, débouche sur un art brut qui serait selon lui surtout une "manière", un nouveau logos et non pas le reflet d'une intériorité psychologique exprimée d'une façon immédiate. Sur cette notion d'immédiateté, sans être moi-même capable de beaucoup théoriser sur le sujet, il me semble que la notion ne peut se réduire seulement au "reflet de l'intériorité la plus profonde" du créateur en train d'exprimer directement dans son art ce que Dubuffet appelait ses "mouvements d'humeur". Les humeurs d'un individu voulant les exprimer dans une forme qui les traduirait le plus directement possible peuvent très bien comprendre ses pensées conscientes, donc pas forcément enfouies (inconscientes) comme celles de son ressenti inconscient. Il y a là il me semble une volonté, et plus qu'une volonté, un désir, de chercher à traduire tout le ressenti d'un vécu dans une forme des plus immédiatement perceptibles par l'autre, tentative qui vise à fondre l'art avec la vie qui ne paraît pas du tout intéresser Vincent Capt.

    Roberta Trapani de son côté si elle aussi, dans un premier mouvement de son texte présente l'art brut comme une "bête" que les marchands, les commissaires d'exposition, les critiques, les collectionneurs et autres agents de la culture cherchent actuellement  à domestiquer en l'attachant à un piquet, dans un second temps se révèle comme indécise devant la constatation du développement intense du marché de l'art se livrant avec l'intégration de l'art brut dans le spectacle de l'art contemporain à une marchandisation de la sensibilité.

    A noter que le catalogue, tandis que les sites web du CRaB et d'Art et Marges de leur côté n'en montrent aucune, propose des reproductions d’œuvres montrées sans grand soin et sans volonté de surprendre le lecteur. Là aussi c'est une certaine austérité peu alléchante qui prévaut.   

07/07/2014

Une hypothèse inédite que je formule au sujet de certaines sculptures de l'ermite de Rothéneuf

     Voici donc l'été des vacances, l'époque de transhumance (enfin, pour les plus chanceux d'entre nous parce que l'étau du travail se resserre de plus en plus, même sur ceux qui n'en ont pas, en chercher, ou simplement survivre étant une autre forme d'aliénation). Et donc, pour ceux qui partent, si vous allez du côté de Rothéneuf, à côté de St-Malo, allez donc regarder de plus près ce qui subsiste des sculptures de l'abbé Fouré.

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Abbé Fouré en pose sculpteur, vers 1908? Coll. BM

     Le temps passant, on le sait, les roches sculptées il y a plus d'un siècle à présent (de 1894 à 1908) s'estompent toujours plus, certaines ayant disparu depuis longtemps (voir carte ci-dessous).

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Sur cette carte colorisée, on aperçoit de dos des statues de Bretonnes, épouses fouillant du regard l'horizon dans l'attente du retour de leurs maris marins ; les deux femmes représentées en pied et peintes en blanc (l'abbé on le sait peignait ses statues) ont aujourd'hui disparu, sans qu'on sache exactement à quelle époque ; on notera cependant leurs emplacements, en hauteur, disposées qu'elles sont sur des sortes de socles de roches faisant piédestal ; coll. BM

    C'est pourquoi les touristes qui passent ayant de plus en plus de mal à discerner les sculptures, chaque jour qui passe les ayant passablement érodées, et confondu avec le commun des autres roches de la falaise, les touristes se concentrent logiquement sur ce qu'ils peuvent plus facilement voir, certaines têtes restées nettement visibles et comme placées en évidence, trois en particulier, une de forme triangulaire avec son menton en pointe de botte, une avec un bonnet de marin à moins que ce ne soit d'un lutin (nain de mer au lieu de nain de jardin?), et une autre belle tête de vieux loup de mer, barbu.

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Abbé Fouré, tête de profil triangulaire, ph. Bruno Montpied, 2010

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Abbé Fouré, l'homme au bonnet (de marin ou de lutin), ph.BM, 2010

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Abbé Fouré, le barbu les yeux clos (?), ph. BM, 2010

 

    Ces trois-là sont de la belle sculpture savante, taillée avec maestria et inspiration. Justement... Tout à coup, depuis quelque temps, cela me rend perplexe. Si les autres sculptures, correctement déchiffrables sur les anciennes cartes des années 1900 et parfois encore aujourd'hui ici ou là, montrent que l'abbé parvenait dans son art à un certain réalisme puissant, appuyé toujours sur la forme naturelle donnée au départ par la roche brute, ces trois sculptures-là sont d'un style plus affirmé, infiniment moins rognoneux que les autres, plus rondes généralement (il paraît que Raymond Humbert, le fondateur du musée d'art populaire de Laduz, trouvait ces formes assez analogues à des étrons, que l'on me pardonne cette digression peu romantique). Et puis, autre argument qui accentue ma perplexité parce que plus frappant, on ne les voit apparaître sur aucune carte éditée du vivant de l'abbé (et même après, dans les années 20-30)...

     Alors? Qu'est-ce à dire? Ne serait-ce pas qu'elles sont "arrivées" sur le site à une époque bien ultérieure, dans la seconde moitié du XXe siècle, après la seconde guerre, de façon posthume donc, transportées là par l'exploitant des rochers de l'époque qui reprenait l'exploitation des Rochers après l'occupation de Rothéneuf par les Allemands, le fameux Henri Brébion, auteur d'une brochure appelée "la Légende des Rochers Sculptés" où il se livre à des interprétations fantaisistes purement subjectives (reprises ensuite à l'envi par tant de plumitifs peu rigoureux jusqu'à nos jours) sur une histoire de famille de corsaires qu'aurait voulu représenter l'abbé dans ces rochers? Il aurait pu, de même que dans ses "légendes", dans l'agencement des sculptures sur le site originel, se livrer à des modifications en voulant "l'améliorer"...? Si mon hypothèse se révélait fondée, il faudrait alors s'interroger sur celui qui a réellement sculpté ces trois pièces. Est-ce bien l'abbé lui-même qui les aurait stockées à part? Dans ce cas, où étaient cachées ces sculptures que l'on ne voit ni sur les cartes des rochers début 1900 ni sur les cartes montrant l'intérieur du musée de l'ermite dans le bourg? Est-il possible d'imaginer que l'abbé les a sculptées à part et planquées, remisées sans jamais les laisser se faire photographier? Connaissant son goût de la communication via les éditeurs de cartes postales (il en existerait environ 400 paraît-il), cela paraît curieux à tout le moins, d'autant que ces sculptures paraissent les plus belles parmi celles qu'il a faites (trop belles?). On notera enfin qu'elles occupent aujourd'hui une position en hauteur, ou à tout le moins des emplacements situés de façon à bien les voir, comme si elles avaient été destinées à remplacer les statues des femmes bretonnes en train de guetter disparues à un moment donné (vol? Déplacement? Destruction?).

     Peut-on imaginer que ces trois têtes sculptées soient le résultat d'une manipulation restée inaperçue, et qu'elles soient en bref dues au ciseau d'un autre sculpteur? Je lance l'hypothèse...