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27/04/2014

Art brut à Taïwan (6): l'œuvre sculpté du paysan Lin Yuan, par Remy Ricordeau

Le parc de l'oreille de buffle:

l'œuvre sculpté du paysan Lin Yuan

 

      Lin Yuan  (1913 – 1991) est aujourd’hui internationalement reconnu comme un des grands noms de la création brute taïwanaise.

 

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Quelques exemples de peintures de Lin Yuan, photo extraite d'un catalogue chinois sur Lin Yuan, DR

 

      Si son œuvre graphique a pu faire l’objet de plusieurs expositions à l’étranger comme à Paris où l’une de ses peintures illustrait l’affiche de l’exposition collective 17 naïfs de Taiwan¹ organisée en 1997/98 à la Halle Saint-Pierre,environnements spontanés taïwanais,art brut à taïwan,lin yuan,art brut chinois,le parc de l'oreille de buffle,pu li,huang pinsong,hung tung,jean dubuffet,rochers sculptés,van gulik,amour et sexualité en chine son œuvre sculpté, tout au moins pour sa partie monumentale qui est la plus importante, est par contre moins connue du seul fait qu’elle ne peut pas être déplacée. Il faut se rendre en effet dans le parc dit de l’Oreille de Buffle, où elle est exposée, pour pouvoir en mesurer l’importance. Ce parc se trouve à Pu li, qui est la ville la plus proche du village de montagne dans lequel Lin Yuan a passé l’essentiel de sa vie. Il se situe à peu près au centre de l’île.

 

 

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La maison initiale de Lin Yuan avec sa manière personnelle de présenter ses rochers sculptés, ph. extraite d'un catalogue chinois sur ce créateur, DR

 

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Vue d'une partie du parc de l'Oreille de Buffle avec quelques rochers sculptés de Lin Yuan, transférés de leur emplacement d'origine ; ph. extraite d'un catalogue chinois sur Lin Yuan, DR

 

      Ouvrier agricole analphabète originaire du canton de Wuzhi, Lin Yuan est devenu veuf très tôt. La cinquantaine passée, ses enfants (cinq garçons et trois filles) devenus adultes, lui suggérèrent d’abandonner le travail des champs et lui proposèrent pour soulager sa vie trop solitaire et laborieuse de s’occuper de la garde de leurs propres enfants. Tout en accomplissant cette tâche, il s’amusa à leur confectionner des jouets à l’aide de divers matériaux de récupération. Il se prit au jeu de la création. Croisant un jour des voisins remontant des galets de la rivière toute proche pour quelques travaux de maçonnerie, l’envie lui vint d’essayer d’en sculpter. Il s’attaqua ensuite à des roches et des rochers de plus grande taille. Le bouche à oreille aidant,  une réputation d’artiste-paysan se mit à circuler sur son compte, laquelle fit l’objet d’un article dans un magazine local.

 

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Lin Yuan sur un de ses rochers peints, ph. extraite de la monographie sur Lin Yuan, DR

 

       Un banquier fortuné de la ville de Pu li  dénommé Huang Pinsong,  lui rendit visite et, fasciné par cette œuvre singulière, lui acheta la totalité de sa production. Lin Yuan, encouragé alors par l’enthousiasme de Huang, décida de se consacrer désormais sans relâche à ses activités créatrices. A partir de ce moment, et suite à sa rencontre avec Hung Tung, autre créateur autodidacte aujourd’hui également reconnu, il convint de diversifier ses travaux en s’initiant à la peinture et même à la broderie sur toile.

 

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Broderies de Lin Yuan, ph. extraite de la monographie sur le créateur, DR

 

       Soutenu par quelques intellectuels et artistes, la réputation de  Lin Yuan s’élargit alors au-delà des limites du comté. Quelques expositions furent organisées dans différentes villes de Taiwan et son protecteur Huang Pingsong contacta même Jean Dubuffet pour attirer son attention sur Lin Yuan.

 

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Lettre de Jean Dubuffet à Ping-Song Huang, 9 novembre 1982, reproduite dans la monographie sur Lin Yuan, DR

 

      Au milieu des années 80, ce même Huang Pingsong décida d’acquérir à Pu li un terrain pour présenter les œuvres de son protégé et lui permettre d’en créer de nouvelles en lui offrant de meilleures conditions de vie et un minimum de confort. Lin Yuan s’installa ainsi  dans une petite maison qui y fut alors construite à son intention (actuellement encore habitée par l’un de ses fils). Aujourd’hui le jardin qui comprend un petit musée et est agrémenté de ses sculptures les plus volumineuses, est devenu un lieu de promenade et de villégiature : après la disparition de Lin Yuan en 1991, son mécène fit construire une cafétéria et un ensemble hôtelier en bungalows pour recevoir des groupes de touristes et rentabiliser le lieu.

 

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Moufflon de Lin Yuan, photo Remy Ricordeau, 2014

 

     Les nombreuses sculptures en extérieur, malgré le peu de soins apportés à leur présentation et à leur conservation, sont impressionnantes par leur grande force expressive qui ne s’embarrasse pas de fioritures. Jamais peut être la notion de « brut » ne s’est aussi bien appliquée à une œuvre qu’à celle de Lin Yuan. Les traits grossiers, comme les coups de marteaux ou de ciseaux vont à l’essentiel. L’artifice est absent de cette œuvre que l’on sent convulsive, comme si elle avait dû être réalisée dans une urgence pour rattraper un temps perdu. Pendant les sept ans que dura son séjour à l’Oreille de Buffle, il aurait créé plusieurs centaines d’œuvres de tous formats et sur tout support afin d’alimenter ce qui allait devenir son musée. Une photo le représente assis sur une des roches  qu’il a sculptée dans l’attitude de celui qui vient de terrasser un monstre.

 

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Lin Yuan, Le Baiser, ph. Remy Ricordeau, 2014

 

       La sculpture semblait pour lui un combat ou un défi qu’il relevait chaque jour comme si l’enjeu était de parvenir à maitriser une matière brute qui ne cessait de lui résister. La lutte dût être si intense qu’en 1988 il tomba malade et dût être hospitalisé. Après cette crise, devant ménager ses forces, il privilégia des créations moins physiques comme la broderie ou la peinture.

 

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Lin Yuan, la femme de mauvaise vie, ph. R.R., 2014

 

       Si l’inspiration de Lin Yuan est fortement influencée par son milieu d’origine, ce qui l’amènera à représenter nombre d’animaux domestiques, d’élevage ou sauvages, il était également très porté sur des sujets que traditionnellement les Chinois ont plutôt tendance à occulter : l’amour et la sexualité (selon l’historien sinologue Van Gulik, la représentation amoureuse ou sexuelle dans l’art chinois a le plus souvent une visée didactique). Ces deux thèmes sont pourtant très présents dans l’œuvre de Lin Yuan, quelques-unes de ses représentations, sans aucune visée didactique, confinant même à une certaine pornographie comme cette femme de mauvaise vie exhibant les parties les plus intimes de son anatomie. Les attributs sexuels masculins, souvent de taille fort honorable, sont également très souvent représentés dans ses peintures comme dans ses sculptures les plus monumentales. Dans un pays de culture encore très pudibonde, cette partie de son œuvre fut interprétée de son vivant comme la conséquence de son veuvage précoce. Lui ne s’en expliqua jamais, s’amusant sans doute des explications délivrées en son nom et n’en continuant pas moins allègrement à représenter des personnages librement inspirés.

Remy Ricordeau



¹ A Taïwan et désormais en Chine où l’emploi du terme se diffuse dans les milieux intéressés, on emploie maintenant le vocable de Su ren yi shu pour désigner l’art brut que l’on pourrait littéralement traduire par l’art des hommes purs, contrairement à Tien zhen yi shu qui signifie art naïf, Tien zhen signifiant en l’occurrence naïf.

 

24/04/2014

Des créateurs intimes-ingénus comme s'il en pleuvait: connaissez-vous Honoré Levasseur?

     De passage dans le Périgord j'ai rencontré Thierry Bucquoy, collectionneur passionné d'art populaire, d'art singulier, et d'art naïf que je connaissais déjà à travers son blog, ce qui fait de lui une sorte de cousin de ce que je tente de faire pour ma part (la somme de toutes les collections bousculerait passablement le système de valeurs en vigueur je crois). J'adore visiter les collections des autres si elles entretiennent un air de famille avec les miennes et surtout si elles proposent des objets ou des créateurs populaires inconnus au bataillon bien que fort originaux et séduisants. Comment ne m'étaient-ils pas tombés devant les yeux, me dis-je à chaque fois, c'est à croire que j'évolue dans un monde trop parallèle, trop étanche aux autres réseaux. Est-ce que ce serait peut-être même parfois presque dangereux psychologiquement de chercher à s'aventurer dans d'autres trames?

     Le principe de ce blog étant d'établir et de jeter autant que faire se peut des passerelles en tous genres entre des mondes analogues, appartenant tous peu ou prou à l'empire du merveilleux populaire ou surréaliste, je me dois d'aller pêcher dans ces mondes parallèles.

 

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Honoré Levasseur, Château Cendrillon 1886 Eurodisneyland, mars 1987, peinture sur carton, env. 70x50cm, coll. privée

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Honoré Levasseur, sans titre (chez le maréchal-ferrant), sans date relevée, coll. privée

 

     Quelqu'un aurait-il des renseignements sur Honoré Levasseur? Les deux peintures ci-dessus, conservées par le même collectionneur, ne sont accompagnées d'aucune information permettant de situer leur auteur. L'un des deux tableaux est daté de 1987. Il peut laisser supposer que le créateur est toujours de ce monde et qu'il officie encore. Cela semble être un Naïf contemporain, ce qui prouve que l'art du même nom existe toujours aujourd'hui. Il ne figure pas sur la Toile, étant resté collé au grand Réel sans doute.

21/04/2014

Art brut à Taïwan (5): Le jardin enchanté d'un garde-barrière retraité, Chen Kunpiao

Le jardin enchanté d'un garde-barrière retraité

 

     Avant mon départ pour Taiwan à la recherche d’environnements spontanés, je m’étais renseigné auprès de quelques amis sur place susceptibles de me suggérer quelques pistes. Une amie m’avait alors indiqué avoir entendu parler par une de ses connaissances d’une « installation » étrange entrevue par celle-ci quelques années auparavant devant une maison des faubourgs de la ville de Taidong le long de la route qui mène à Kuanshan.

        La brève description qui m’en avait été faite m’avait fort intrigué : un petit ensemble bariolé avec des animaux divers de facture très grossière. Muni de ces renseignements lapidaires, j’ai parcouru lentement la route dans la direction indiquée. Au bout d’une vingtaine de kilomètres, ma recherche s’était révélée vaine. Persuadé que le site avait été détruit, j’effectuai le trajet de retour vers Taidong très déçu de cette déconvenue. Mais comme souvent lors de ce genre de recherche, la magie se manifeste lorsqu’on ne l’attend plus. C’est dans la partie la plus dense du faubourg, là où précisément je ne pensais pas le trouver, que je le découvrai finalement. Installé à même le trottoir, sans doute masqué par une voiture lors de mon premier passage, l’ensemble bariolé pourtant de taille fort modeste m’apparut tout d’un coup dans son énormité, c’est à dire dans toute la mesure de son incongruité en un tel lieu.

 

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Le préambule, côté rue, ph. Remy Ricordeau, 2014

 

 

        Je m’arrêtai donc pour photographier cette curiosité et essayer de me renseigner sur son créateur. M’adressant à quelques ménagères qui conversaient bruyamment devant la boutique voisine, on me fit comprendre avec quelque malice que je ne voyais là qu’un préambule à la partie « la plus belle » qui se trouvait derrière la maison. J’utilise des guillemets car je crus déceler dans le ton de leurs propos une ironie moqueuse, ce que la suite me confirmera. Passablement excité par la vue de cette première partie dont la forme et les couleurs m’apparaissaient déjà aussi  originales qu’intrigantes, je fis donc le tour du pâté de maisons pour accéder à la cour arrière qu’on m’avait indiquée. Les voisines ne m’avaient pas menti. Et je leur en suis d’autant plus reconnaissant que sans leurs indications je me serais sans doute contenté du préambule, sans imaginer que l’essentiel se trouvait à l’arrière.

 

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Devant la porte arrière de la maison, une girafe et un footballeur faisant sécher 2 pantoufles, ph. RR, 2014

 

         L’essentiel, en l’occurrence, est constitué d’un incroyable jardin ou des éléments végétaux, arbustes et plantes tropicales, côtoient de très étranges sculptures en ciment de facture très grossière représentant divers spécimens du monde animal.

 

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Le jardin arrière vu de la ruelle, ph. RR, 2014

 

 

       Sans certitude, j’ai cru en effet reconnaître des bovins, des éléphants, des girafes, des oiseaux, ainsi que d’autres animaux plus difficilement identifiables disposés au milieu de pierres ou de galets peints des couleurs les plus éclatantes. Quelques représentations humaines aux allures de footballeurs, ce qui est fort étrange dans un pays où ce sport n’est pas particulièrement populaire, figurent également dans ce jardin extraordinaire.

 

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Le jardin arrière, vue générale, ph. RR, 2014

      La première chose qui m’a frappé, outre le choix de couleurs identiques au site de M. Huang à Taizhong, est le fait que le sol des allées de ce petit jardin y était également décoré dans une forme et dans une esthétique très proches. J’apprendrai par la suite que son créateur, M. Chen Kunpiao, ainsi que sa famille avec laquelle il vit, ignorent absolument l’existence de l’œuvre de leur compatriote de Taizhong.

 

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L'entrée du jardin, ph. RR, 2014

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Une partie du jardin sous tonnelle avec personnages, ph. RR, 2014

 

        Je commençais de la rue à prendre quelques photos lorsque je vis une femme sortir de la maison pour mettre du linge à sécher. Après m’être présenté, elle sembla étonnée que l’on puisse porter de l’intérêt à son jardin, d’autant plus peut-être que celui qui s’y intéressait était occidental. (Les occidentaux sont très peu nombreux dans cette partie de l’île). Elle m’expliqua qu’en vérité ce n’était pas son jardin mais celui de son père avec lequel elle vit et dont elle s’occupe avec sa famille. (Il n’est pas rare à Taiwan de voir trois générations vivre sous le même toit). Celui-ci, garde-barrière à la retraite et aujourd’hui âgé de 94 ans (une autre similitude avec Huang Yongfu) s’est mis à récolter des pierres et des galets depuis une vingtaine d’années et consacre son temps à les agencer de la sorte. Il s’est également mis à sculpter le ciment et tous les matins de l’année il passe son temps à peindre et repeindre inlassablement le jardin.

 

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Un détail, ph. RR, 2014

 

          Son activité créatrice est devenue si obsessionnelle, m’a expliqué sa fille, que celle-ci a dû lui interdire de s’attaquer aux murs de la maison qu’il semble un temps avoir convoités. J’ai senti aux explications de celle-ci un certain désarroi ou une certaine honte à l’égard de l’activité créatrice de son père qu’elle ne comprend et ne goûte visiblement pas. Par égard pour lui, elle le laisse faire et accepte sa création comme expression de sa sénilité au prix sans doute de quelques moqueries de la part du voisinage. Sur mon insistance, elle est allée chercher son père qui finissait son repas à l’intérieur de la maison. Celui-ci a écouté mes louanges d’un air amusé. Je lui ai montré des photos de sites français créés dans un esprit similaire. J’ignore s’il a vraiment compris ce que je lui disais car il semblait un peu ailleurs et répondait à mes questions d’une manière plutôt incohérente. Il manifestait en tous cas peu de soucis de complaire à quelque public que ce soit. Pour l’essentiel je suis resté sur ma faim quant aux motivations de sa démarche créatrice. J’aurais aimé avoir avec lui un échange un peu plus approfondi mais de toute évidence, au crépuscule de sa vie, le temps des explications était déjà passé.

 

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Chen Kunpiao, le créateur, ph. RR, 2014

 

19/04/2014

Gens ordinaires et univers imaginaires

     Le printemps est donc là avec son cortège de projections de docu sur l'art brut et consorts. Hors-Champ à Nice doit être en train de mettre la dernière main à son programme de fin mai début juin au MAMAC de Nice. Peut-être pour nous mettre l'eau à la bouche, voici que son animateur principal, Pierre-Jean Wurst, avec la complicité de Denis Lavaud son homologue parisien féru de cinéma autour des arts populaires, monte à Paris avec un programme de films certes déjà vus ici ou là, mais que les néophytes auront tout intérêt à aller découvrir si ils veulent s'initier de façon vivante et cinétique aux créateurs de l'art brut et apparentés. Demandez donc le dit programme...

    Une fois celui-ci placé sous les yeux de tout un chacun, je me permettrai de me fendre de conseils de visionnage pour ceux qui voudraient se faire une culture, ou une anti-culture vite faites en matière de cinéma documentaire sur les arts populaires modernes. Sans aller jusqu'à faire comme les surréalistes qui préconisaient "lisez ceci... et ne lisez pas cela...", ce qui serait d'actualité dans d'autres cas –car tout un chacun a bien le droit d'exprimer ses préférences et ses haines, en dépit de tous les crétins amateurs de nivellement– on peut en l'espèce indiquer quelques pistes qui d'après moi s'annoncent plus originales que d'autres. La programmation est prévue pour deux jours le samedi 26 et le dimanche 27 à la MAISON DES CULTURES DU MONDE (101, bd Raspail dans le VIe ardt, et NON à la Halle St-Pierre... auprès de qui par ailleurs il est prudent de réserver sa place), dans le cadre du toujours passionnant Festival de l'Imaginaire qui se tient depuis des années à Paris, proposant diverses manifestations autour des arts populaires du monde entier (ils ont une antenne, si je puis dire, à Vitré, au Centre Français du Patrimoine Immatériel, où sont montées à la belle saison généralement d'alléchantes expositions, comme par exemple cette année "ANIMAUX TOTÉMIQUES ET DRAGONS PROCESSIONNELS, Le bestiaire fantastique des fêtes méridionales" du 26 avril au 21 septembre).

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Animaux (loups?) de procession dans le Midi de la France, image extrait du site du CFPCI

 

     Je ne pense personnellement pas venir le samedi 26, où seuls quelques titres m'intriguent (le samedi matin: Le jardin fantastique de Fiorenzo Pilla de Giuseppe Trudu, en présence du réalisateur ; Driven by vision (Jim Bishop) de Michael McNamara ; et surtout le samedi après-midi Emile Ratier d’Alain Bourbonnais en présence de Caroline Bourbonnais), car malheureusement placés avec d'autres déjà vus dans de précédentes programmations.DiamantsbrutsduJaponLespinasseDVD.jpg

  

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Emile Ratier, un de ses assemblages de bois, une grande roue foraine, collection permanente du Musée de la Création Franche, Bègles

 

    En effet, certains autres films comme celui annoncé sur Yvonne Cazier "peintre-médium", s'annoncent, si je me base sur les images d’œuvres récemment reproduites dans le dernier numéro de Création Franche, comme de possibles fausses découvertes. Comme si on s'ingéniait à nous trouver des prolongements spirites à l'heure actuelle, ce qui jusqu'ici n'est pas prouvé, les créateurs (et en l'occurrence plutôt les créatrices) proposés  lors d'autres manifestations (Marie Jeanne Gil par exemple ou Henriette Zéphyr) étant assez peu originaux je trouve. Le lecteur cela dit, comme je l'ai déjà dit, se fera bien entendu, à propos d'Yvonne Cazier, son opinion seul à l'aide du programme dans le lien inséré plus haut.

     Non, personnellement, je passerai peut-être plutôt le dimanche après-midi, même si je vous conseille de vous débûcher le matin pour aller voir les trois films programmés, l'excellent film de Milka Assaf sur Gugging, et ses créateurs dont plusieurs désormais disparus comme August Walla ou Johan Hauser, et aussi le très poétique documentaire de Vincent Martorana sur Justin de Martigues. L'après-midi, les films sont intéressants aussi. Sont prévus des films de Decharme sur ses chouchous déjà insérés dans son film Rouge Ciel (avec entre autres un sujet sur l'abbé Fouré à propos duquel j'espère qu'il aura fait une mise à jour côté biographie? Parce que son inspiration n'a rien à voir avec une bande de flibustiers du nom de Rothéneuf...), un film de Del Curto et Genoux sur Pya Hug,PyaHug-DVD.jpg et un autre sur un créateur asiatique (japonais je crois me souvenir), Macoto Toya –déjà montré par exemple au Lieu Unique à Nantes il y a deux ans– plus le toujours génial film de Michel Ettter, Martial, l'homme-bus, sur une figure de la rue de Lausanne.

      Cet après-midi-là, il y a encore un autre film, à se fier à la consonance du patronyme sur un site coréen, Mok Sok Won (ce qui veut dire jardin de bois et de pierres) de Muriel Anssens et Jean-Louis Bartoli. De la poésie naturelle en bord de mer interprétée par un artiste qui hélas plaque un peu trop semble-t-il son idéologie New Age, ce qui plaira certainement à tous nos "artbrutistes" amateurs de contre-culture. Un peu de poudre mystico-dingo faisant toujours bien dans le décor.

 

13/04/2014

Pour les amateurs, un peu de romantisme dégénérant...

    Je ne résiste pas au désir de partager ce petit moment (3'05) de bonheur en mettant en ligne ci-dessous ce chef d'œuvre du regretté Henri Salvador qui m'a mis de bonne humeur ce dimanche matin.

    C'est dédié en premier lieu à un camarade cantalou qui prise fortement les airs et les chansons se rapportant à la dive bouteille. Connaissait-il cet opus du roi Henri?


podcast

Henri Salvador, "Je bois à ton souvenir" (paroles et musique de R. Conrad et Mitch Murray, paroles françaises de Bernard Michel), 1966 ; sur la compil Henri Salvador, "Loufoque" (1999, label EMI)

12/04/2014

Art brut à Taïwan (4): Le jardin en folie d’un aborigène Amei, par Remy Ricordeau

Le jardin en folie d’un aborigène Amei

 

aborigène amei,aborigènes de taïwan,art brut taiwanais,environnements spontanés,poésie naturelle      Après avoir traversé la montagne d’Ouest en Est, je suis arrivé sur la côte pacifique de Taiwan. La région qui s’étend de l’estuaire des gorges de Taroko, un peu au nord de Hualien, jusqu’à la ville de Taidong, plus au sud, est une zone de peuplement aborigène. Jusqu’à sa sinisation plus ou moins forcée à l’époque de la colonisation japonaise (de la fin du XIXe siècle à la fin de la seconde guerre mondiale), la région était essentiellement habitée par les aborigènes Amei. Si à l’époque moderne beaucoup d’entre eux ont dû s’exiler pour chercher du travail en ville (le plus souvent comme manœuvres sur des chantiers de construction), beaucoup ont gardé des attaches avec la terre de leurs ancêtres et reviennent s’y établir à l’âge de la retraite. C’est le cas de Wu Tianlai qui, issu d’une famille de paysans Amei, avait quitté sa région pour gagner sa vie comme jardinier sur les terrains de golf à Taiwan et ultérieurement au Japon avant de revenir s’établir sur sa terre d’origine.

 

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Portrait de Wiu Tianlai par son fils Wu Zhexiong, DR

 

    Empreint de la culture traditionnelle Amei très respectueuse de la terre, dans le sens symbolique communautaire autant qu’écologique du terme, il avait hérité d’un terrain en bordure de mer au lieu-dit de la montagne aux buffles (Niu shan).

 

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Wu Tianlai, Le buffle en matériaux naturels trouvés et assemblés, mis en situation au-dessus de la propriété, photo Remy Ricordeau, 2014

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Wu Tianlai, entrée du site, ph. RR, 2014

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Wu Tianlai, côté plage, l'arbre à tongs, ph. RR, 2014

 

      Il y a plus d’une vingtaine d’années, il entreprit de le mettre en valeur en l’agrémentant de quelques-uns des nombreux bois flottés trouvés sur les plages environnantes. Dans un premier temps, il se contenta de les choisir en fonction de leurs formes suggestives sans autres interventions de sa part. Mais dans un second temps il se prit au jeu de les transformer légèrement en ajoutant quelques traits de peinture ou en effectuant quelques entailles sur le bois pour accentuer les formes qu’il voulait faire apparaître.aborigène amei,aborigènes de taïwan,art brut taiwanais,environnements spontanés,poésie naturelle

     Doué d’un goût certain dans le choix de ses matériaux et d’un sens de l’humour non dénué de provocation, l’âge de la retraite venant,  il décida de diversifier ses activités créatrices. Renouant avec la tradition totémique de ses ancêtres, il réalisa quelques sculptures de grande taille. Mais ce retour à la tradition s’effectua en vérité pour mieux la transgresser car beaucoup de ces sculptures sur bois comportent en effet des connotations grivoises assez peu orthodoxes. Ainsi prenait forme petit à petit un jardin en liberté dont il avait rêvé au cours de sa vie de jardinier salarié. Pour parachever le bestiaire qu’il s’était déjà créé, il s’initia enfin au travail du ciment afin de réaliser des pièces trop volumineuses pour être exécutées en bois.

 

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Wu Tianlai, une partie du bestiaire, ph. RR, 2014

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Wu Tianlai, l'intellectuel..., ph. RR, 2014

 

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Wu Tianlai, I love you, ph. RR, 2014

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Wu Tianlai, le diable en érection, ph. RR, 2014

 

     Fidèle à sa philosophie il sensibilisa son fils, Wu Zhixiong, à la nécessité de respecter le lieu et lui transmit le terrain pour lui permettre d’y vivre en ouvrant un café et un gîte afin d’y recevoir des visiteurs de passage. Lorsque je m’y suis rendu, ceux-ci étaient peu nombreux. Wu Tianlai et son fils étaient en outre absents, partis pour la journée effectuer quelques travaux à l’extérieur. Seule sa belle fille présente pour servir les clients put répondre à quelques-unes de mes questions. Elle m’expliqua que depuis plusieurs années déjà père et fils travaillaient de conserve à l’entretien et à l’embellissement du jardin. Elle me raconta qu’un an auparavant une partie des sculptures en bois avaient été détruites par un incendie consécutif à un court circuit. Depuis, le père et le fils avaient mis les bouchées doubles pour créer de nouvelles sculptures ou, tirant partie des œuvres en partie calcinées, avaient réussi à les intégrer de nouveau au jardin afin de rendre le lieu à sa magie originelle. Aujourd’hui, le fils étant devenu aussi créatif que son père, le jardin pouvait donc être considéré comme une œuvre conjointe.

 

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Wu Tianlai, sculpture calcinée, ph. RR, 2014

 

 

       Dans ce décor grandiose entre mer et montagne, il émane de ce jardin de la montagne aux buffles un souffle magique étonnant empreint d’une grande sérénité. L’originalité du  lieu me semble tenir au fait qu’il relève autant de la poésie naturelle que de la création brute. Mais foin de catégorisation car du fait de l’origine ethnique de ses créateurs, il est également un exemple intéressant de ce que l’on pourrait appeler un art populaire transgressif ; c'est-à-dire d’un art populaire qui s’est émancipé des caractéristiques  traditionnelles dont ses créateurs se sentent par ailleurs héritiers. Ainsi l’avenir de l’art et de la culture Amei passe assurément par le jardin de la montagne aux buffles.

       Remy Ricordeau

09/04/2014

L'homme de Fontenette, Loir-et-Cher, 1992

     Je suivais le sentier de Grande Randonnée n°35 non loin de Gué-du-Loir (la scène se passe en 1992) lorsque je tombai en arrêt en découvrant, plantée sous un sapin, lui-même situé à la fourche de deux chemins, une sorte de statue grossièrement agencée. Je fus instantanément impressionné, d’une manière qui confinait au malaise.

 

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Entre Montoire-sur-Loir et Lunay, sur la D.53 ; photo Bruno Montpied, 1992

 

       Il s’agissait d’un bonhomme dont le corps se limitait à une tête et un tronc. Ce dernier, peut-être une ancienne pierre levée réemployée après avoir été retirée d’un champ, avait le pied couvert d’une roche aux formes sinueuses qui ressemblait à des vagues butant contre un rempart. Du ciment lui avait recouvert le haut, façonné de manière à esquisser des épaules. La tête, qui était peut-être elle aussi faite en ciment (mais d’une couleur différente, tirant sur le jaune) avait été travaillée, avec des yeux proéminents (leurs globes constitués de billes de verre), des oreilles, des arcades sourcilières à l’expression déterminée, un nez fermement dessiné, des lèvres entrouvertes sur des dents représentées par de petits cailloux blancs.

 

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Photo BM, 1992

 

     Elle était coiffée d’un béret, le cou noué de lambeaux d’étoffe lui composant comme une écharpe. Un détail important lui conférait une signification étrange, une grosse clé était fixée sur la poitrine côté gauche. Et des épis de céréales étaient passés dans cette clé (nous étions à la Pentecôte).

      J’ajouterai que des petites étoiles en fer blanc étaient suspendues dans les branches, juste au-dessus de « l’homme ».

 

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Photo BM, 1992

 

     Que faisait-elle là ? Etait-ce une statue de type votif ? Les épis de blé pouvaient signifier que l’on avait dressé là une figure propitiatoire chargée de porter bonheur aux récoltes à venir. Mais si c’était l’écho d’une pratique magique ancienne, cela paraissait très étonnant. Découvrir une pratique de cette sorte dans les campagnes de ces années 90 ne laissait pas de me surprendre. Mais la sorcellerie a, paraît-il, encore de beaux restes, alors pourquoi pas ce genre de rite aux allures païennes ?

Bibliographie: Bruno Montpied, Tour de France de quelques bricoles poétiques (inédites) en plein air, Gazogène-L’Art Immédiat, 1993.

 

03/04/2014

Art brut à Taïwan (3): La falaise sculptée du paysan Chen Ruiguang, par Remy Ricordeau

La falaise sculptée du paysan Chen Ruiguang

 

       A l’Est d’une plaine côtière large d’une cinquantaine de kilomètres, la partie centrale de l’île de Taiwan est constituée d’une zone montagneuse qui court du Nord au Sud. Sur les contreforts de la montagne Alishan,  la préfecture de Jiayi, au centre de l’île, est une région d’agriculture  tropicale (Taiwan est traversé par le tropique du Cancer) à la végétation luxuriante. Champs d’ananas, de bananiers ou de cocotiers côtoient des plantations de caféiers, lesquels ont justement besoin de l’ombre de ces derniers pour se développer. Si la nature se montre ici généreuse, les  paysans qui travaillent cette terre n’en ont pas pour autant fait fortune. Les parcelles sont petites qui obligent souvent les enfants à aller chercher du travail à la ville. Ceux qui restent, s’ils savent se contenter de revenus modestes, ont au moins la satisfaction de ne pas se tuer à la tâche : peu de travail en effet en dehors des périodes d’entretien ou de récolte, ici la nature accomplit seule la besogne.

 

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Portrait du créateur extrait d'un site web chinois, DR

 

 

      Peut-être est-ce cette relative disponibilité de temps qui a amené Chen Ruiguang, un paysan du district de Zhong Pu à vouloir commencer à s’exercer à la calligraphie. Cet art lui plaisait mais n’ayant pas poursuivi ses études au-delà du cycle primaire, il en était resté ignorant. Ses premiers travaux sur papier se révélèrent d’une facture maladroite. Sans doute, étant lui-même insatisfait  devant ces premiers résultats, l’envie lui vint alors de changer d’exercices et de se mettre à copier des hiéroglyphes égyptiens sur des écorces d’arbre récupérées. Encouragé par des résultats qui le comblaient davantage, il songea qu’il pouvait s’essayer à copier également des caractères chinois primitifs, du type de ceux qui ont été gravés il y a quelques milliers d’années sur des carapaces de tortue (Les Jiakuwen qui constituent les premières inscriptions connues de l’écriture chinoise). L’exercice lui plut et voulant passer de la copie à la création il se mit à en imaginer et à en dessiner d’autres de même facture, mais cette fois de son cru.

 

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Inscription sur rocher, photo Remy Ricordeau, 2014

 

 

      Au début des années 2000, arrivé à l’âge de la cinquantaine, M. Chen s’avisa de la fragilité des supports qu’il avait jusqu’alors utilisés. Il se dit que s’il se mettait à graver ses caractères sur quelque rocher, il laisserait ainsi des traces moins éphémères de son passage sur terre, à l’image de certains empereurs dont des calligraphies ont pu être reproduites sur les montagnes sacrées taoïstes.

 

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Echafaudage nécessité par les travaux d'inscription de Chen Ruiguang, cliché extrait d'un site web chinois, DR

 

      Non loin de chez lui se trouvait précisément  une petite falaise dont la roche, suffisamment plane pour être gravée, s’étendait sur une longueur d’une centaine de mètres. Aidé de quelques amis, il en débroussailla les abords et ouvrit un chemin pour y accéder (lequel fut goudronné quelques années plus tard).

 

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Inscriptions sur roche le long de la route goudronnée, ph. RR, 2014

 

 

   Au grand désespoir de sa femme qui le considérait comme mentalement un peu dérangé, il décida alors de ne se consacrer dorénavant qu’à la réalisation de son grand œuvre. A cette fin il installa un échafaudage en bambou pour accéder à la partie supérieure de la falaise haute de plus d’une dizaine de  mètres et se mit à graver.

 

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Ph. RR, 2014

 

      En un peu plus de cinq ans, au prix d’un travail journalier, M. Chen a ainsi à peu près couvert la totalité de la surface disponible. Du fait de l’humidité du climat les premières graphies commencent à être recouvertes de mousse. Je n’ai pas eu le loisir de rencontrer le créateur qui a la réputation d’avoir un caractère un peu bourru. Mais à ce qu’il m’a été confié, il songerait à les rendre de nouveau un peu plus visibles.

 

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Ph. RR, 2014

 

    Je n’ai malheureusement pas obtenu d’informations fiables sur les raisons d’un tel acharnement dans la création ni non plus sur le sens ou le message mystérieux dont cette étrange calligraphie se veut peut-être le vecteur. Les voisins prétendent qu’elle ne veut rien dire. C’est peut-être vrai à moins que pour quelque raison le créateur veuille garder pour lui son secret. Il est certain cependant que d’éventuels archéologues des siècles futurs se perdront en conjectures en essayant de déchiffrer le sens de ces inscriptions qui, pour un néophyte, ont toutes les apparences de véritables caractères chinois. En utilisant en effet des éléments constituant des caractères réels, M. Chen s’est amusé à créer une écriture imaginaire pour son propre plaisir. Seuls quelques dessins ou traits d’animaux ou de visages viennent cependant mettre la puce à l’oreille de l’observateur en le laissant soupçonner une supercherie. Mais c’est précisément l’intérêt de ce site que d’intriguer le passant par le mystère de ses inscriptions car il y a fort à parier que le badaud resterait indifférent s’il ne se trouvait en présence que de simples reproductions de sentences vertueuses.

     Remy Ricordeau

 

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 Sur cette paroi le long de la route on voit des dessins mêlés aux inscriptions, davantage des sortes de pictogrammes que des signes chinois ; ph. RR, 2014