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29/09/2007

Dictionnaire du Poignard Subtil

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ART: 

  "(...) l'art ne dépend pas de l'artiste professionnel, une telle profession n'existe pas en soi. Ainsi il arrive que l'art se trouve parfois du côté des incapables professionnels, là où personne ne le soupçonne, parmi la communauté des snobs, dans le jeu d'un enfant ou dans l'artisanat par exemple. L'art est précisément une fleur singulière qui ne tolère de lien d'aucune sorte."

   Kurt Schwitters, Art et temps, 1926, in Merz, écrits choisis et présentés par Marc Dachy, Editions Gérard Lebovici, 1990

   "Le vrai art il est toujours là où on ne l'attend pas. Là où personne ne pense à lui ni ne prononce son nom. L'art il déteste être reconnu et salué par son nom. Il se sauve aussitôt. L'art est un personnage passionnément épris d'incognito."

   Jean Dubuffet, L'art brut préféré aux arts culturels, 1949.

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  Je dois la découverte des intéressantes lignes de Schwitters, anticipant de vingt ans sur la fameuse déclaration de Dubuffet que j'ai reproduite en vis-à-vis (d'un côté 1926, de l'autre 1949), à la lecture du livre de Valérie Rousseau, Vestiges de l'indiscipline (voir ma note du 16 septembre à son sujet). Cette dernière rapproche avec raison le travail de Schwitters (par exemple incarné par son Merzbau, construction hétéroclite et très pensée à la fois qui traversait deux étages de l'immeuble qu'il possédait à Hanovre) et celui de Richard Greaves au Canada. Mais elle ne donne que partiellement la référence du texte de Schwitters. Marc Dachy dans une note signale que le texte existait en manuscrit et qu'apparemment il ne fut seulement publié qu'en tchèque, dans l'almanach Fronta à Brünn en 1927. On a du mal à imaginer dès lors que Dubuffet ait pu en prendre connaissance, même s'il a reconnu avoir été influencé par le mouvement Dada dans sa jeunesse. Simplement, nous pouvons constater que l'idée de l'art comme "fleur singulière qui ne tolère de lien d'aucune sorte" ne date pas de l'après deuxième guerre mondiale, mais était déjà bien dans l'air dés les lendemains du premier conflit mondial de 14-18. 

25/09/2007

Le "Coin au Soleil" de Jean-Pierre Schetz

    Le MAD musée (MAD= Musée d'Art Différencié) du Parc d'Avroy à Liège organise du 15 septembre au 17 novembre 2007, dans sa galerie, une exposition consacrée à un environnement singulier...
 
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Photo Fonds Desarcy-Robyns/Musée de la Vie Wallonne
 
 
      Cette exposition, "Un Coin au Soleil , le jardin singulier de Jean-Pierre Schetz",  met  en  lumière  l'environnement  anticonformiste  créé  à  Jupille sur les hauteurs de Liège par un homme modeste. Les organisateurs  présentent  des photographies, des articles de presse, ainsi que quelques sculptures (sauvées de la destruction par Brigitte Van Den Bossche, elle qualifie ce site de "Petit cabinet de curiosités à ciel ouvert"). Un  film documentaire, intitulé "Un Coin au Soleil. L'astre imaginaire de Jean-Pierre Schetz" produit par l'association C-paje (coordination B. Van Den Bossche), est également montré au cours de l'exposition.
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        Jean-Pierre Schetz, né en 1921 et disparu en 1986, avait emménagé avec sa femme dans une "cité sociale" pendant les années soixante. Ferrailleur et maçon au départ, il avait été embauché par la suite au service de la voirie de la ville de Liège. La cité toute neuve où ils avaient emménagé le rebutait, notamment par l'invasion du béton qui allait jusqu'à boucher l'espace situé entre son logement et la rue. Il décide de le faire régresser en l'éliminant et le remplace par de la terre dans laquelle il ne tarde pas à faire pousser des plantes, et toutes sortes de fleurs dans une sorte de luxuriance...
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                            Photo Alfred Jamin
             
       Dès lors, un processus s'enclenche, il ne s'arrête plus d'aménager et de vouloir embellir son jardin, afin de contrer l'aspect standardisé des lieux (normal au pays du Standard de Liège...). Il fait son Nek Chand au petit pied et en pleine Belgique. Qu'il pleuve ou qu'il vente, rien ne l'arrête, un mainate domestiqué souvent présent à ses côtés. Nous sommes dans les années 70.
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Photo Alfred Jamin
 
       Il assemble des pierres, récupère des objets, façonne un château qui devient un point de ralliement pour les enfants du voisinage. Il s'ingénie à marier ses compositions à l'élément naturel.
 
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     La mort vient le trouver alors qu'il continue de travailler à son jardin. Sa femme l'entretient encore vingt années, décède à son tour, la société gestionnaire de la cité sociale qui comme tout bon gestionnaire ne connaît aucun état d'âme se dépêche de faire place nette... Nous sommes en 2006...
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Le sens de la poésie chez les sociétés gestionnaires...
 
 
 
 
  (Ces notes sont basées sur un dossier pédagogique établi par Brigitte Van Den Bossche et transmis à Bibi, qu'elle en soit remerciée ici, ainsi que pour les photos ; je remercie aussi Gérard Sendrey pour son entremise)
 
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N-B: A souligner que le film "Un Coin au Soleil , l'astre imaginaire de Jean-Pierre Schetz" (voir ci-dessous sa mise en ligne sur YouTube, merci à Fredito - note de l'animateur du blog, 14 octobre 2019)  s'inscrit dans un ensemble projeté par l'association C-paje,  et qui consiste à vouloir réaliser d'autres documentaires sur les environnements spontanés. Il me paraît bon de publier les intentions de l'association à ce sujet:
"Ce projet, s'adressant à un large public, repose sur un triple objectif :
- Dévoiler de monumentaux ouvrages d'art qui renvoient à l'inventivité, l'imagination, la créativité et l'esprit visionnaire de leurs créateurs qui ne suivent aucune piste académique, mais créent pour eux-mêmes, dans le seul but d'embellir leur quotidien, leur vie.
- Reconnaître une forme d'art inclassable, si ce n'est dans la marge de l'art .
- Conserver les traces d'environnements qui ne sont pas destinés à la pérennité  -certains étant même en phase de disparition.

 De manière plus particulière aussi, ce projet s'adresse au secteur socioéducatif puisqu'à certains égards, les environnements pris en compte présentent d'évidentes similitudes avec des aménagements singuliers d'espaces conçus par des enfants dans un contexte associatif. Les intentions de ce projet sont, précisément dans ce cadre, les suivantes :

-  Inspirer des processus créatifs dans les domaines complémentaires de l'Education permanente, de la Culture et de la Jeunesse.
- Intéresser les professionnels de l'éducation et de l'animation à des projets d'aménagement d'espaces, enrichir leurs propositions créatives dans le rapport à l'espace et au patrimoine culturel. 
-  Aborder et mettre en valeur l'importance de l'action locale (intervention sur son environnement)."
 

 

23/09/2007

Du nouveau réalisme comme s'il en pleuvait

   Restons dans les ready-made, voulez-vous? Car c'est bien ainsi qu'il faut qualifier ces morceaux d'affiches déchirées, lacérées, ces dessous d'affiche qui réapparaissent tels des palimpsestes le temps d'un chantier de rénovation d'une station de métro parisienne, avec leurs lettres en miettes, leurs tons passés, leurs agencements de formes et de couleurs aux nuances si subtiles qu'un peintre mettrait des mois pour les trouver sur sa palette, avec leurs messages d'un autre temps aussi, comme ici où les Pieds Nickelés reviennent nous faire un clin d'oeil...

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   Ready made, poésie trouvée que ces tableaux à la Villeglé, à la Raymond Hains, à la François Dufrêne (mon préféré) qui surgissent sur les bas-côtés des métros qui se refont une beauté ( une autre forme de beauté, mais qui risque fort d'être une fois de plus occultée), ready-made comme les dessins du hasard sur les vieux murs chers à Léonard, les pierres aux formes étranges, les taches des agates, les troncs torturés, etc. Poésie naturelle des villes qui prend plutôt la forme d'un lettrisme de hasard, d'un nouveau réalisme pour pas cher. Un clic, et on emmène le tableau éphémère chez soi, au lieu de le coller au musée où d'autres sont déjà, qui nous ont appris à les retrouver dans le décor de nos vies quotidiennes. 

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(Photos B.Montpied, affiches anciennes déchirées trouvées à la station Notre-Dame-des-Champs, Paris, 2007)

20/09/2007

Face à face, le hasard et la transe, Galerie Flak

Me baladant samedi dernier sur la rive gauche du côté de la rue de Seine, j'emprunte la rue des Beaux-Arts avec la vague idée de retrouver par hasard une galerie où je croyais pouvoir découvrir des marionnettes du Mali que je cherchais sans vraiment les chercher (comprend qui peut...).
Il faut dire que j'étais avec un vieux camarade et que l'on bavardait avec entrain, au point de s'étourdir, on entrait au pif dans les galeries, sans bien regarder où l'on entrait. Ah, voici que j'avise la vitrine de chez Flak (j'ai toujours aimé cette galerie au patronyme onomatopéique où l'on voit de temps à autre des poupées Kachina).
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Tiens, il y a une curieuse expo en ce moment. On y confronte masques ethniques et masques ready-made. Qu'est-ce que c'est des masques ready-made ? C'est ainsi que spontanément je serais tenté de les qualifier. Ce sont des masques qui n'étaient pas de vrais masques au départ (du moins pas des masques pour se déguiser ou pour des rituels), mais des objets destinés à d'autres fonctions (masques à gaz de l'autre guerre, casque de Dark Vador, masques de protection pour le base-ball...) mais qui possèdent à leur insu des similitudes avec les masques de transe ou propitiatoires.
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 Similitudes dans les formes. Comme dans le cas de ce vieil étrier en cuir ridé qui ressemble à une trogne de sorcière et que l'on peut voir dans un coin dans le cabinet de curiosités modernes de chez Flak. En entrant dans la galerie, je me fais la réflexion que ce concept d'exposition ressemble furieusement à ce qu'a plusieurs fois tenté Paul Duchein du côté du Musée Ingres à Montauban. Et voilà-t-y pas que M.Duchein rôdait effectivement dans la galerie ce jour-là... Je me cogne quasiment sur lui.
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Je conseille à tout amateur de surprises, recherchant le décentrement du regard culturel d'aller faire un tour dans cette petite galerie inventive.
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(Les photos des masques, hormis celui de Dark Vador, proviennent du site de la galerie Flak -voir les liens insérés dans cette note- Ci-dessus, masque ancien de pompier,  du moins, je crois...)
Galerie Flak
            8 rue des Beaux-Arts, 75006 Paris, France.
Exposition du 12 Septembre au 3 Novembre
2007.

Un catalogue paraît à l'occasion de cette exposition :
Face à Face, Masques secrets, visages révélés
(Textes en français et en anglais de
Gilbert Lascault et Hubert Comte
120 pages couleurs)

16/09/2007

L'indiscipline n'a-t-elle laissé que des vestiges?

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    "Vestiges de l'indiscipline", tel est le titre d'un bel ouvrage qui va bientôt être disponible au Canada (lancement prévu pour le 21 septembre à la Cinémathèque québécoise), et ailleurs pourvu qu'on songe à le commander (voir renseignements au bas de cette note). L'indiscipline, me suis-je dit au vu du titre, n'aurait-elle donc laissé aujourd'hui que des vestiges? Le titre est musicalement beau, mais il peut aussi vouloir dire cela. Cependant, le sens est ailleurs. La photo de couverture le proclame sans ambages, ainsi que le sous-titre. On veut nous parler des environnements de "patenteux" québécois, d'"anarchitectures" parmi les plus singulières qui soient apparues ces dernières décennies au Canada. L'"indiscipline" dont il est question est celle de l'"art indiscipliné" défendu par la Société du même nom. L'auteur du livre est comme de juste Valérie Rousseau, directrice de cette même Société, "doctorante en histoire de l'art et chercheuse associée au Laboratoire d'anthropologie et d'histoire sur l'institution de la culture et du Musée canadien des civilisations"... (ça en jette, n'est-il pas?).

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Extrait du dépliant annonçant le lancement du livre

     Les patenteux, au Québec, depuis le livre et la recherche formidables des trois jeunes femmes Louise de Grosbois, Raymonde Lamothe et Lise Nantel ("Nous avons pris position pour une classe sociale dont les manifestations culturelles sont ignorées ou méprisées", écrivaient-elles) en 1972-1974, ce sont les bricoleurs-inventeurs naïfs ou populaires des bords de route (une patenteuse (mais tentante?), répondant au doux nom de Mathilde Laliberté définissait ainsi le mot: "Un patenteux, c'est quelqu'un qui fait des affaires que d'autres ont pas faites jamais et puis qui a de l'imagination dedans").

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4ème de couverture des Patenteux du Québec (1978)

    Valérie Rousseau a voulu restreindre son étude, divisée en trois parties, à un petit groupe de créateurs, choisis sans doute pour leur grande inventivité, proche de celle de l'art brut, et situables à la croisée des chemins et pour l'un d'entre eux, de l'art moderne: Léonce Durette, Richard Greaves, Roger Ouelette, Charles Lacombe, Emilie Samson et Adrienne Samson-Fortier (ces deux dernières étaient déjà recensées, ainsi que Roger Ouellette dans "Les Patenteux du Québec"), Palmerino Sorgente et l'autodidacte naïf/brut plus connu Arthur Villeneuve, sur lequel en France nous ne disposons d'aucune documentation (malgré une exposition montée il y a déjà longtemps à la Halle Saint-Pierre).

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Un détail de la maison décorée par Arthur Villeneuve, et actuellement conservée dans la Pulperie de Chicoutimi (Photo copyright Pulperie de Chicoutimi)

    Ces trois parties sont rédigées dans un style limpide et vivant, la première d'entre elles se chargeant d'évoquer les créateurs (tous bien choisis du point de vue de l'originalité de leurs oeuvres et sans doute aussi pour les parallèles que peut tracer Valérie Rousseau entre eux). Ces évocations  s'appuient sur des descriptions et des entretiens avec les auteurs, des extraits de leurs écrits (car c'est une des caractéristiques de ces patenteux étudiés par Mlle Rousseau d'être aussi des écrivains spontanés, leur philosophie les poussant d'ailleurs vers une sorte d'art total -bien différent de celui que prônait Richard Wagner...).

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Léonce Durette dans l'arrière-cour de son environnement, ph Richard-Max Tremblay

     La deuxième partie, la plus épaisse quantitativement (80 pages) dans un ouvrage qui en contient 193, est un dossier photographique (le photographe étant pour la majorité des clichés, datés de 2001, Richard-Max Tremblay ), la troisième partie (Espaces mitoyens et analogies) étant réservée à une approche plus analytique de l'ensemble du phénomène des environnements indisciplinés (synonyme: anticonformistes ? Voir cependant le chapitre "Indiscipline et tradition", p.149, où l'auteur précise la définition). L'auteur met à cette occasion en relief un certain nombre de caractéristiques communes repérées par elle chez les créateurs, la tendance au repli autarcique sur soi (le rapport des créateurs d'environnements avec les mollusques secrétant leur coquille a déjà été remarqué, dès André Breton notamment, voir son texte de préface aux Inspirés et leurs demeures de Gilles Ehrmann que Roger Cardinal -voir p.163 des "Vestiges..."- connaît très bien, Mlle Rousseau...), ou un désir d'échapper aux contingences temporelles par exemple (voir la phrase de Charles Lacombe ci-dessous...),6773bfd51cb181d1312553b526191697.jpg désir en même temps contradictoire avec l'aspect éphémère des installations érigées (exemple de Charles Lacombe qui sème des dessins dehors à la merci des intempéries, ou les constructions défiant l'équilibre de Richard Greaves (à l'esprit proche de celui du dadaïste Kurt Schwitters comme le remarque ave justesse Valérie Rousseau), édifiant entre autres une Maison des 3 Petits Cochons en bois, ce qui correspond à la deuxième maison dans la chronologie du conte célèbre, située à équidistance de la plus éphémère, la première, celle en paille et de la troisième, la plus durable, celle en brique).

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Détail de l'environnement de Charles Lacombe, ph Richard-Max Tremblay

    La place nous manque évidemment pour en parler plus en détail. Renvoyons le lecteur avec confiance à l'acquisition de l'ouvrage fort enrichissant.

    Et signalons pour finir une erreur un peu ennuyeuse, pas spécialement imputable à Valérie Rousseau (note 98, p.182) mais plutôt à Jean-Yves Jouannais (si la référence à ce dernier est exacte) dont l'auteur cite un des ouvrages, Artistes sans oeuvre, I would prefer not to (1997). Ce dernier impute, selon Mlle Rousseau donc, la phrase suivante: "J'aimerais assez que ceux d'entre nous dont le nom commence à marquer un peu l'effacent" à Jean Dubuffet. Je ne sais si ce dernier a recopié lui-même cette phrase dans un de ses écrits (ce dont je doute), ce que je sais en revanche c'est qu'elle figure mot pour mot dans le second Manifeste du surréalisme (1930) sous la plume d'André Breton qui cite ainsi son camarade surréaliste belge Paul Nougé. Il se sert de cette phrase pour introduire sa demande d'"occultation profonde, véritable du surréalisme" afin que le public moutonnier des gogos ne puisse plus imposer de confusion au message réel du surréalisme. Déshabiller André pour habiller Jean est symptomatique de l'attitude récupératrice de certains historiens ou critiques d'art qui pratiquent ainsi une étrange manière d'"occulter" le surréalisme, nettement plus répressive, au bénéfice de l'anti-culture dubuffétienne...

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Une oeuvre de Roger Ouelette, ph Richard-Max Tremblay 

Vestiges de l'Indiscipline, Environnements d'art et anarchitectures, (208 pages, 106 photos couleur), 34,95$, édité par la Société du Musée Canadien des Civilisations. Diffusion Prologue Inc., 1650,bvd Lionel-Bertrand, Boisbriand, (Québec), J7E 4H4. Service de commandes postales: Musée canadien des civilisations, 100, rue Laurier, C.P. 3100, succursale B, Gatineau (Québec) J8X 4H2. Site web: cyberboutique.civilsation.ca

13/09/2007

Petit calendrier d'expositions très potables

*    Bernard Pruvost expose à la Galerie Dettinger-Mayer, 4, place Gailleton, Lyon, du 26 octobre au 24 novembre, et Ô coïncidence, montre aussi des oeuvres, un peu plus tôt, au Musée de la Création Franche à Bègles (Gironde ; du 29 septembre au 25 novembre), dans ce dernier cas avec d'autres créateurs (Exposition "Visions et Créations Dissidentes", dont Pascale Vincke, qui est défendue avec raison par le MAD musée à Liège, ou le Batave Herman Bossert, présenté par la Galerie Hamer de Nico Van Der Endt à Amsterdam qui a apparemment des Mouly dans ses réserves -tiens, puisque vous êtes sages, on peut cliquer ici pour en voir un...). Bernard Pruvost, c'est un spécialiste des encres arachnéennes.

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Oeuvre de Bernard Pruvost (Photo Galerie Dettinger-Mayer)
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*   Plus prés dans le temps, commence le 17 septembre une expo consacrée à Yolande Fièvre, artiste au patronyme très évocateur, amie de Jean Paulhan, spécialiste des éléments naturels ovoïdes et glandulaires assemblés dans des coffrets, artiste très influencée au préalable  par le dessin et l'écriture automatiques. Elle a devancé de très loin tous les "singuliers" qui sont venus à partir des années 80. Ce sera l'occasion de le vérifier, à la Halle Saint-Pierre du 17 septembre 2007 au 9 mars 2008. En même temps que cette expo, qui comme d'hab dure un temps un peu trop immense (6 mois...), il y aura une expo pour évoquer la courageuse figure de Varian Fry, cet Américain qui vint sauver des griffes nazies nombre d'intellectuels et d'artistes européens qui se pressaient à Marseille au début des années 40, une des rares issues qui restait encore après la Débâcle. Il a d'ailleurs écrit le récit de son aventure dès 1942. Elle ne fut publiée aux USA qu'en 1945, et traduite en français seulement en 1999 chez Plon (l'édition est épuisée et l'éditeur serait bien inspiré d'en faire des retirages...).

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    C'est bien sûr l'occasion pour les organisateurs de l'expo de montrer des oeuvres de plusieurs surréalistes dont Fry put s'occuper, comme Breton, Max Ernst, Jacques Hérold, Jean Arp (qui resta en Europe), Wifredo Lam, Victor Brauner, André Masson, Jacqueline Lamba ou Matta (alors que Camille Bryen, Alberto Magnelli, Lipchitz, Wols, eux aussi exposés, malgré ce qu'avance avec confusion le laïus de présentation de l'expo sur le site de la Halle, si ce sont bien des artistes parfaitement honorables, ne furent  pas pour autant surréalistes...).

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    Des "dessins collectifs" (sans doute des cadavres exquis et des épreuves originales  du "Jeu de Marseille" que les surréalistes et leurs amis, réunis dans le petite communauté de la Villa Air-Bel confectionnèrent, histoire d'inventer un jeu nouveau porteur derrière ses nouveaux emblèmes de mythes nouveaux) sont également promis.

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("Dessins collectifs" surréalistes, photo récupérée sur le site de la Halle Saint-Pierre)

   "Varian Fry était comme un cheval de course attelé à un chariot rempli de pierres" (Jacques Lipchitz, selon Pierre Sauvage, texte dans le dossier de presse de l'exposition)

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*    Sinon, il me semble que peu d'amateurs auront remarqué qu'une rétrospective des oeuvres de Philippe Dereux (1918-2001) avait été organisée à la Galerie Chave durant cet été. Des dessins, des collages d'épluchures, des peintures et des livres illustrés de 1960 à 2000 sont montrés dans cette prestigieuse galerie jusqu'au 30 octobre 2007, soit une bonne partie de cet automne encore, donc. J'ai une tendresse toute particulière pour l'oeuvre et le personnage de Philippe Dereux qu'il m'est arrivé de rencontrer un soir dans la Presqu'île à Lyon avec son fils... Ce qui me fascine toujours chez Dereux, c'est justement le travail de sa vie, cette épluchure de l'expression, d'abord peut-être recherchée à travers l'écriture, puis ensuite dans les arts plastiques (il a mixé les deux approches dans différents livres, comme Le Petit Traité des Epluchures paru en 1966 chez Julliard). Pour se rapprocher au plus prés de la vérité, du parler juste, sans emphase, sans fioritures, sans tricherie, sans afféterie mensongère. Et qui passait peut-être par le recyclage de ces épluchures dans une combinatoire dédramatisant cette obsessionnelle quête d'épure.

   La galerie Chave annonce pour l'occasion une monographie en préparation qui s'intitulera "La Mémoire des épluchures".

   (Galerie Alphonse Chave, 13, rue Isnard, 06140 Vence, Tél: 04 93 58 03 45.)  

11/09/2007

Rabiots d'obscénités romanes...

Le hasard objectif, ces temps-ci, me ramène du côté des galipettes obscènes romanes (le terme n'a rien de péjoratif sur mon clavier), avec un texte qu'Emmanuel Boussuge vient de m'adresser tout droit depuis son Cantal chéri. Y a pas qu'à Mauriac qu'on peut découvrir des acrobaties et des exhibitions de parties dites honteuses. Voilà comment débute le texte d'Emmanuel : 
Rabiots d'obscénités romanes et précisions superflues
C'est ma tournée !
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 Encore un loup auto-fellateur. Mais ce n'est pas le même qui a déjà été présenté sur le blog Le Poignard Subtil (note du 2 août). Celui-ci est à Moussages, entre Trizac et Mauriac. La parenté saute aux yeux et ça n'a rien d'un hasard. Le modillon a été sculpté par le même atelier sévissant autour du grand chantier de Mauriac au cours du XIIe siècle. Les motifs favoris de celui-ci (c'est-à-dire du ou des sculpteurs spécialisés dans les modillons) se retrouvent dans un large rayon autour de la basilique alors en construction...

 

  Et voilà comment il se termine :
 ...Pour finir, un clin d'oeil. Entre deux modillons, comme entre deux doigts de pied, on a quelquefois des surprises. On trouve ainsi à Brioude entre deux trognes modillonnées anodines -seul l'appareil photo permet de la voir en agrandissant a posteriori- une figure étrange. Il s'agit d'un loup monopode, se suçant le pied, un parfait intermédiaire entre le sciapode et le loup autonome, donc. De quoi ravir les boucleurs de boucle (l'image est floue malheureusement).
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               Comme on le constate, on pourrait croire que le texte ne parle que d'auto-fellations. Mais ce n'est qu'une impression. Le texte se termine en boucle comme il commence voilà tout, dans une forme, finalement, qui colle assez bien à la position décrite! Si on veut en savoir plus, on lira avec profit l'ensemble du texte susdit en cliquant sur Rabiots d'obscénités romanes, texte d'E. Boussuge 2007.doc. Outre un texte rédigé dans un style rigoureux et peu académique (on y cause à certain moment aussi bien de rockn'roll), le lecteur y trouvera plusieurs photos de l'auteur qui viendront enrichir sa culture pornographique romane.
         Et si cela ne suffisait pas, je renvoie le lecteur qui en veut toujours plus à un film de Claus Josten, L'ennemi à nu,  (2004, 26 min), qui sera diffusé dimanche 16 septembre sur Arte (décidément, depuis quelques dimanches soirs, Arte cherche à relayer efficacement le Poignard Subtil). C'est l'histoire de Claudio Lange qui photographie les sculptures romanes des édifices religieux qui jalonnent le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle. Cet artiste, « Chilien installé à Berlin, qui étudie cette statuaire depuis 1989, interprète ces représentations incroyablement obscènes comme une forme de propagande anti-islamique développée par l'Église catholique pour justifier les croisades » (texte de présentation des programmes d'Arte). Voilà bien une autre interprétation des obscénités romanes à laquelle beaucoup, je gage, n'avaient pas encore pensé !... A voir et à supputer...

 

09/09/2007

Chez Prinzhorn, sur Arte

    Ce dimanche aura été illuminé par l'excellent documentaire de Christian Beetz au titre à double sens (au moins dans sa traduction française), un "art insensé", insensé de force et de beauté poétique.

    Bien sûr, on a sous la main le bouquin de Hans Prinzhorn, traduit depuis les années 80, on a le catalogue de "La Beauté insensée" de l'expo du Palais des Beaux-Arts de Charleroi (1995-1996), on a des catalogues en pagaille venus de la clinique d'Heidelberg où se trouve la collection Prinzhorn (par exemple un des plus récents, de 2006, très soigné comme tout ce qui provient de la Sammlung Prinzhorn, "Wahnsinn sammeln, Outsider Art aus der Sammlung Dahmmann-Collecting Madness, Outsider Art from the Dahmmann Collection), mais personnellement, je n'arrivais pas à me faire une idée exacte de la qualité des oeuvres de cette fameuse collection Prinzhorn (jamais montrée en France à ce qu'il me semble?), hormis quelques cas célèbres très souvent reproduits, comme August Natterer (connu d'abord sous le nom de Neter), Karl Brendel (ces deux créateurs ayant influencé Max Ernst dans quelques-unes de ses oeuvres, quelques-unes sur des milliers comme on oublie souvent de le souligner), Joseph Schneller (Sell), ou encore le célèbre Heinrich Anton Müller. "La Beauté insensée" du musée de Charleroi, avec son côté austère, ses fiches signalétiques médicales, la pâleur de ses reproductions, n'aidait pas, il faut dire...

    Le film de Christian Beetz avec ses choix esthétiques parfaits, la qualité des commentaires de ses intervenants (tous collaborateurs ou responsables de la collection Prinzhorn: Thomas Röske, Bettina Brand-Claussen, Ferenc Jadi, Inge Jadi -conservatrice de la collection-,Sabine Mechler, etc), leur générosité et leur compréhension vis-à-vis des créations mises en lumière par une caméra non voyeuse mais rendant à César ce qui appartient à César, ce film tout à coup en deux fois vingt-cinq minutes révélait la haute qualité des oeuvres conservées à Heidelberg, leur haute valeur humaine, la profonde nullité des Nazis qui ont massacré leurs auteurs dans les chambres à gaz après avoir tenté de stigmatiser leurs oeuvres dans une exposition de mise à l'index (l'"Art" soi-disant "dégénéré"), le film révélait tout cela de manière éclatante. Un rayon de soleil passait subitement à travers la télévision et son habituel océan de vulgarités. Montrant subrepticement ce que pourrait faire la télévision si elle se transformait plus souvent en loupe merveilleuse se promenant sur les oeuvres d'art et leurs rapports avec la vie, la souffrance, les joies des hommes, instrument idéal de médiation directe entre les hommes et la poésie.

    Une seule petite critique aurait pu s'adresser à Thomas Röske qui affirme un peu vite à un moment du film que le surréalisme n'aurait sans doute pas pu exister sans les oeuvres de Natterer, ce qui est aller un peu vite en besogne tout de même... 

Un doux penchant

     Je suis tombé en arrêt l'année dernière en compagnie de cicerones habitant le Poitou devant le panneau ci-dessous au contenu latent surréaliste (je crois employer ici le terme adéquatement,  autrement que dans son sens galvaudé par les journalistes).

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(Photo Bruno Montpied, 2006)

    Sans doute un parent de ces menuisiers mexicains adeptes du penché (et non pas seulement des planchers) dont parle Breton je ne sais plus où, ou bien de ce compagnon charron auteur de la roue ovale que l'on voit dans le film de Jacques Brunius, Violons d'Ingres, qui se trouve être la même -ce que les conservateurs du Musée d'Art Moderne au Centre Beaubourg à Paris, ainsi que les experts de Calmels-Cohen, n'ont toujours pas identifié- que celle que l'on découvre dans le morceau d'atelier d'André Breton exposé à Beaubourg, débité en tranches, une bonne part de sa magie envolée de se retrouver ainsi vitrifiée... Le film de Brunius permet en outre d'identifier de façon claire l'auteur de cette roue: Alphonse Benquet, aussi peintre naïf de grand talent, dont Breton, comme Eluard, possédait quelques tableaux (acquis sans doute à l'époque où ils séjournaient chez Lise Deharme, dans les années 30, dans les Landes).

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(La roue ovale d'Alphonse Benquet, extrait d'une photo de Gilles Ehrmann publiée dans 42, rue Fontaine, recueil de photos parues chez Adam Biro en 2003)

Pour saluer le passage du sciapode dans le village de Valuéjols au coeur de la Planèze

C’est un ange qui s’en charge, en étirant le rictus d’un crâne que l’humour le plus débridé n’aurait peut-être pas déridé.
A la hauteur de sa mission, c’est avec sérieux que le céleste emplumé s’acquitte de ce protocole étrange, sculpté sur une chaire de pierre (la seule connue du département) dans l’église.

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Une autre figure du bourg affiche la mélancolie de n’avoir qu’entrevu le passage du monopode parisien. Au-dessus d’un linteau vierge, elle est posée sur un cadran solaire (peut-être fin XVIIIe) et attend parmi les heures l’improbable retour de la subtile créature.
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[NB: Ce texte provient d'un rédacteur (et photographe) extérieur au blog qui signe]: Le pape

Art immédiat des croix de chemin en Cantal: MASSIF EXCENTRAL (9)

     Il y a déjà plusieurs années, j'avais inséré dans un "Tour de France de quelques bricoles poétiques en plein air" (édition conjointe Gazogène/L'Art Immédiat, "à quelques exemplaires", 1993) une magnifique croix de chemin photographiée à Albepierre (près de Murat dans le Cantal) en 1990. La voici telle que photographiée à l'époque:

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(On lit la date de 1842 sous les pieds du Christ aux allures de marmot crucifié)

      Et la voici à nouveau photographiée en 2007, quinze ans plus tard, bien moins mise en valeur, comme si le sentiment esthétique s'était relâché dans la région...

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(La date est devenue duraille à déchiffrer, les lichens s'en donnent à coeur joie, mais rien d'irrémédiable cependant...)

      Je dis cela parce qu'une autre oeuvre d'art populaire que j'avais également photographiée et publiée dans le même "Tour de France" de 1993, une petite Pieta de facture archaïque et fort belle que j'avais extirpée pour les besoins de tirage de portrait de l'oratoire de bord des chemins où elle végétait (dans la même région, au-dessus d'Albepierre), quinze ans plus tard elle aussi, se trouve passablement amochée par une couche de peinture argentée et dorée, placée qui plus est sur un fond à la couleur un peu trop appuyée (Ripolin, quand tu nous tiens)...

(A gauche, la photo faite en 1990 ; à droite la même Pieta en 2007)

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      Il ne faudrait jamais repasser deux fois par les mêmes fleuves. Et se contenter des premières découvertes. Comme cette autre croix d'Albepierre, pourvue d'une sorte de bulbe en son milieu qui a reçu des décors, des figures symboliques d'une grande beauté simple.

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      Ne dirait-on pas à contempler le visage ci-dessous, placé au revers de la croix ci-dessus, et qui pourrait bien représenter la Mort, ne dirait-on pas contempler une autre "face de carême", comme disait le sieur de Belvert  à propos des visages sculptés par Vaclav Levy (voir note du 12 juillet)? :

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(Photos B.Montpied)

      Les croix de chemin du Massif Central sont légion, quelques livres parus ces dernières années en dressent l'inventaire, ils sont utiles pour partir à leur découverte. Ces sculptures bien souvent ultra naïves, proches de l'art brut, anciennes (on en trouve au XVIIe siècle, au XVIIIe et surtout au XIXe siècle), réalisées par des sculpteurs provinciaux, bien souvent improvisés et autodidactes, réinterprétant des motifs codifiés de la statuaire religieuse de leur temps, sont aussi intéressantes à dénicher que les environnements spontanés type Palais Idéal et autres Picassiette. Elles en sont proches cousines, de même que les créations décoratives en rocaille que l'on voit encore ici ou là. Parmi les ouvrages, on distinguera celui de Pierre Moulier,"Croix de chemin de la Haute-Auvergne" aux éditions Créer, en 2003.

[Nous commençons un album de photos sur les croix de chemins à partir d'aujourd'hui (9 septembre 2007)]

08/09/2007

Arcimboldo et Maisonneuve

    Sur des blogs voisins on annonce l'expo Arcimboldo qui va bientôt ouvrir au musée du Luxembourg. Fort bien. C'est vrai que personne ne va en parler dans les grosses écuries du journalisme... Alors, pour faire plus original, ce blog cousin compare avec les masques de coquillage de Pascal-Désir Maisonneuve, en ajoutant que bien sûr, ce faisant, on enfonce des "portes ouvertes"... Oui, en effet, par d'autres... A une époque où, à ma connaissance, personne n'avait songé, dans le microcosme des amateurs d'art brut, à faire le parallèle Maisonneuve-Arcimboldo.

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(Extraits du Bulletin auto-édité par Bruno Montpied en 1995, L'Art Immédiat n°2, article Le coquillage, matériau-muse sur la parution du livre de Patrick Mauriés, Coquillages et rocailles)

 

 

Toile d'araignée balbutiante, MASSIF EXCENTRAL (8)

    Art involontaire à Valuéjols (Cantal) sur une remorque encore vide de chargement de foin...

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(Photo B.Montpied, 2007)

03/09/2007

Explorer en fauteuil la collection Prinzhorn

     Oyez, oyez, chers lecteurs attentifs du Poignard Subtil, dimanche 9 septembre prochain, il y aura une rediffusion sur Arte du documentaire de Christian Beetz (daté de 2006, et déjà diffusé hier paraît-il, pour sa première partie en tout cas -je tiens l'information de Laurence Maidenbaum de la Halle St-Pierre qui la tenait elle de l'animateur du bulletin Zon'art, Denis Lavaud, qui lui-même... (etc)...), L'art insensé, tel est son titre. C'est une exploration filmique de la célèbre collection du docteur Hans Prinzhorn, aujourd'hui transformée en musée dans une clinique à Heidelberg.f7c74a90f1cca3f3afb8f643986495b5.jpg

    Le documentaire est découpé en deux parties de trente minutes chacune environ. Dimanche, elles passent à deux moments de la journée, je ne sais la raison de ce découpage, a-t-on peur sur Arte d'ennuyer avec un tel sujet? Toujours est-il que la première partie, intitulée "Un génie inouï", c'est pour 13h30, tandis que la deuxième partie, "La texture de la douleur" (qui parle davantage des femmes internées comme Else Blankenhorn par exemple), est diffusée en soirée à 20h15. Tous à vos magnétos...96cbd0dfe591119ffd2272c451eba863.jpg

 

 

 

 

(photos Sammlung Prinzhorn)

02/09/2007

Henri Caillaud autre pape des escargots

    Cette note est inspirée des commentaires avisés de Michel Valière sur les cagouilles et les amateurs de cagouilles de ses régions de prédilection, Poitou et Charentes. Cela m'a donné l'envie d'aller repêcher un petit ouvrage au fond de ma bibliothèque...

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   Bon, en effet, il semble, je veux bien le croire, que ce coin de France a des affinités particulières avec les escargots (autres noms: cagouilles, lumâs, limas), une passion dévorante bien sûr. Goût qui paraît répandu particulièrement entre Loire et Garonne, à en croire Hélène Tierchant et Bernard Cherrier, les auteurs en 1990 (avec la complicité du photographe Alain Bourron), à la librairie Bruno Sepulchre -imprimerie Plein Chant...- d'un ouvrage intitulé "Le livre de l'escargot" que je possède depuis une randonnée de 1996 en Charente.

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(Photo Alain Bourron, extraite du Livre de l'escargot ; escargots de béton d'Henri Caillaud)

    Le livre est donc entièrement voué à cet animal intrigant dont certains, jadis, ont fait un symbole de couardise et d'impuissance (faut dire que ça se rétracte au moindre contact, ça rentre dans sa coquille, ça se recroqueville en moins de deux). J'aime les entreprises obsessionnelles et je l'avais acheté déjà pour cela. Mais il contient en outre l'évocation, malheureusement un peu trop succincte, d'un créateur nommé Henri Caillaud.

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(Photo extraite du Livre de l'escargot, Henri Caillaud avec sa nièce [non! sa petite fille... Voir commentaire ci-dessous], une de ses oeuvres au sol...)

    Ce dernier a vécu de 1889 à 1981, soit 92 années, en Charente, à Villejésus où en 1990 existait encore sa fontaine en forme d'escargot sur la grand'place du village (on suppose qu'elle y est toujours).

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(Photo Alain Bourron)

    Excentrique, l'homme a défrayé la chronique villageoise en construisant par exemple à l'abri des regards et des murs d'une vieille grange une autre maison, toute neuve, qu'il fit un jour apparaître en détruisant à coups de masse les murs de la coquille protectrice de la grange matricielle... Les auteurs nous signalent que cette maison était décorée de tableaux naïfs, "une naïveté vigoureuse", mais on n'en apprend pas plus, le livre ne contient pas d'illustrations sur le sujet, l'obsession majeure restant la cagouille, la cagouille, toujours la cagouille. Animal qui était aussi le thème central d'Henri Caillaud, qui en fit apparemment toute une série en ciment et en béton, nous dit le livre... Jusqu'à en réaliser un d'un mètre de long, pesant quarante kilos.

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(Photo Alain Bourron ; dernière oeuvre d'Henri Caillaud, un mètre, quarante kilos)

    "L'escargot possède, à travers nos départements, ses peintres, ses statuaires, ses orfèvres. Ils sont légion. Pour un Caillaud passé à la postérité, combien d'adulateurs anonymes qui ont façonné leur portail, forgé leur balcon en forme de cagouille? Combien d'ébénistes qui tournent des cagouilles de bois, combien de céramistes qui adaptent le même animal en porte-parapluie ou en récipient? Le petit-gris est une des sources d'inspiration populaire les plus fécondes." (Hélène Tierchant, Bernard Cherrier).

     Pour qu'on se pénètre encore plus de cette évidence, j'insère ci-dessous deux photos, l'une représentant l'environnement de 400 statues de Gabriel Albert à Nantillé en Charente-Maritime, et l'autre celui de son émule de Brizambourg, tout proche, Franck Vriet. Parmi tant d'autres merveilles, on y retrouve des escargots, en premier ou second plan.

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(Jardin de feu Gabriel Albert à Nantillé ; L'escargot est en haut près de la fenêtre...)
 
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(Photos B.Montpied, 2006 ; Ci-dessus jardin devant la maison de Franck Vriet à Brizambourg, otaries, crocodiles, flamants roses, escargot...)

01/09/2007

Un Poisson plus médecin que pilote, noms prédestinants (1)

     Pour continuer dans le bestiaire, après les escargots, les abeilles et les aliborons, voici un poisson. Trouvé en 2005 à La Souterraine dans la Creuse (déjà l'alliance de ces deux noms, n'est-ce pas, rend passablement perplexe...). Et donc loin de toute mer. Mais ce qui n'empêche pas l'altruisme de ce vétérinaire que l'on imagine frétillant...

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(Photo B.Montpied)

      Ceci pour inaugurer une série de notes à venir tout au long des mois sur les noms prédestinants, enquête que je mène depuis déjà quelques années (ce qui n'est pas original, je me suis aperçu que le thème en avait déjà intéressé d'autres, cf. Claude Gagnière, Pour tout l'or des mots, rubrique "Comme son nom l'indique", p.233, coll. Bouquins chez Robert Laffont, 1996, mais rien n'empêche de continuer le collectage de son côté).