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19/10/2007

Un anonyme amateur de nuages, de merveilleux nuages...

   Les brocantes, les "foires aux jambons", les puces sont peut-être les plus féconds et simultanément les plus décevants terrains de rencontre des objets ou des oeuvres bruts, naïfs, insolites, poétiques, surréalistes...

   Je les fréquente sporadiquement. Car j'ai, paradoxalement, une sainte horreur de l'amas, une lassitude incommensurable devant l'entassement sans limites du bazar hétéroclite des objets rejetés, promis à d'autres mains, objets qu'on se lance d'une collection à l'autre, en attente du doux bercail d'un musée qui les sédentariserait enfin...

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Feu d'artifice? Un visage lunaire, une écharpe tricolore... (Photo B.Montpied)

    Il y a de cela plusieurs années, ce devait être vers la fin des années 80 de l'autre siècle (quel délice de pouvoir écrire cela, avantage de vivre à la charnière de deux siècles, cela nous octroie l'illusion de vivre plus longtemps...), à la braderie de Houilles, que l'on présentait alors comme la deuxième plus grande braderie de France, après Lille (cette dernière devenue aujourd'hui bien décevante), en traînant la savate au long d'une allée, je perçus du coin de l'oeil, dépassant d'un carton à dessin, le tout petit bout d'un dessin à la craie sur papier noir montrant un arrangement de lignes intéressant. Les vendeurs étaient des adolescents qui visiblement n'accordaient que très peu d'intérêt aux dessins. Ils m'extirpèrent du carton un ensemble de dessins format raisin (50x65 cm). C'était tout à fait original quoique légèrement abîmé par la suite de nombreux frottements. La craie n'avait sans doute jamais été fixée et les multiples manipulations avaient étalé les couleurs autrement que ce qu'avait probablement voulu l'auteur primitivement. Mais cela restait prodigieusement attractif, intrigant. Un nom se laissait deviner sur chaque dessin que j'acquérais pour une bouchée de pain, Robert Roseff, crus-je lire...

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Un feu, un oiseau, des êtres fantastiques dans les nuées... Un ciel nocturne visionnaire (Ph.B.Montpied)

   Les ados me laissèrent entendre qu'il s'agissait d'un parent à eux, mais qu'ils ne savaient pas grand-chose, voire rien du tout à son propos... Je me retrouvais  avec trois dessins étranges (un compagnon que j'avais alerté en acquit d'autres aussi). L'un qui montrait visiblement un feu d'artifice "visionnarisé", un autre qui se concentrait sur des visions interprétées d'après des formes nuageuses et végétales, gentiment hallucinatoire, et un troisième qui paraissait plus abstrait et plus directement visionnaire (malgré un rapprochement possible là aussi avec les feux d'artifice), le tout représentant à chaque fois des scènes se déroulant dans le ciel nocturne représenté par le fond du papier Canson noir que l'auteur avait laissé en réserve.

   Le hasard a fait jusqu'à présent que je n'ai jamais rencontré d'autre écho au sujet de cet auteur ou d'une autre de ses oeuvres. Créateur à ranger donc du côté des grands secrets enfouis à l'intérieur des vies quotidiennes qui ne se dévoilent que bien longtemps après leur disparition (par suite d'une vente à un brocanteur), comme on en voit dans  l'art brut. Ce dernier se déniche de ce fait particulièrement au fond des brocantes, là où finissent la plupart du temps les secrets qu'on n'a pas voulu détruire avant de mourir.

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Gerbes et fusées de couleurs pâles, une tête qui tire la langue, une cocarde tricolore dans le bas à gauche... Feu d'artifice visionnaire et brut? (Ph.B.Montpied ; cliquez pour agrandir)

18/10/2007

Les Jardins de l'art Brut de Marc Décimo, présentation du livre

J'ai reçu l'annonce ci-dessous ces jours-ci, je répercute... : 
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"R e n c o n t r e   d é b a t
avec  
Marc Décimo
auteur du livre
Les Jardins de l'art brut
(Editions Les Presses du Réel)
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samedi 10 novembre à 15 heures

Auditorium de la Halle Saint-Pierre
Entrée libre
***
     Les Jardins de l'art brut, de Marc Décimo, parution octobre 2007
     Un essai sur la naissance et le devenir de l'art brut, un parcours en images hors des musées.
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    A partir des traditions médicale, littéraire et artistique qui, chacune selon leur point de vue, se préoccupaient de l'"art des fous", émerge la notion d'art "brut", telle que la définit Jean Dubuffet. A savoir, finalement, la possibilité de faire du résolument neuf dans les pratiques artistiques. Et de croiser, chemin faisant, Raymond Queneau, André Breton et... Marcel Duchamp. 
   Si l'art "brut" trouve enfin place dans divers musées du monde et devient populaire, où aujourd'hui fuit cet art ? C'est ce à quoi se propose de répondre ce livre de façons diverses, explorant jardins et visitant le monde.
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   Maître de conférences à l'Université d'Orléans, Marc Décimo est linguiste, sémioticien et historien d'art. Il a publié une vingtaine de livres et de nombreux articles sur la sémiologie du fantastique, l'art brut, les fous littéraires, sur Marcel Duchamp et sur l'histoire et l'épistémologie de la linguistique.
*
(Auditorium Halle Saint Pierre, 2 rue Ronsard, 75018 Paris)  "
*
(Les images proviennent toutes du site de l'éditeur Les Presses du Réel)

13/10/2007

Fleurs de flammes

   Flânant avec les enfants de mon centre de loisirs, nous cherchons matière à photographie. Les enfants nous entraînent vers "la maison qui a brûlé" non loin, ça les a bien entendu frappés. Et sur une vitre, mon attention se cristallise sur de curieuses "fleurs" collées sur des vitres qui paraissent s'être brisées sous l'ardeur d'un brasier. Peut-être du plastique qui s'est recroquevillé par l'intensité de la chaleur. Clic, un paysage surgit avec ses magiques fleurs de flammes sous lesquelles semble couler un fleuve...

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Photo B.Montpied, oct.2007 (en cliquant sur la photo vous pouvez l'agrandir, merci à Frédéric L. pour l'enseignement de l'astuce)
*
Et pour le pilote de Belvert, quelques bonus (ou boni?), pour le remercier de ses mots amicaux:
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La même photo, à gauche en entier et sans retouches (une vitre qui a éclaté sous le souffle de la chaleur), à droite, retouchée et recadrée de façon à souligner la possible apparition d'une tête plutôt grimaçante... (Photo Bruno Montpied ; là aussi, on peut les agrandir)
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(Photo B.M.)

12/10/2007

La couleur des mots

    Passant devant l'hôpital Sainte-Anne à Paris, j'avise l'affiche suivante:

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   Plus que quelques jours pour aller voir au Musée Singer-Polignac cette exposition conçue par le Centre d'Etude de l'Expression (et que je n'ai personnellement pas encore vue ; à noter qu'elle fait apparemment écho à une autre expo faite sur le même thème qui voyagea de la Collection d'Art Brut de Lausanne à la Halle Saint-Pierre). Mardi est le seul jour de fermeture, et c'est ouvert de 14 à 19h. Les oeuvres présentées proviennent de la collection de Ste-Anne, et des artistes contemporains sont présentés en parallèle qui, à ce que j'ai entraperçu sur le site du Centre d'Etude et de l'Expression, ne m'emballent pas des masses...

Le Dictionnaire des objets de dévotion

  

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   Paru en 2006 aux Editions de l'Amateur, cet ouvrage, écrit par Bernard Berthod et Elizabeth Hardouin-Fugier, renseignera parfaitement les amateurs d'objets populaires liés aux pratiques de dévotion. Crucifixions en bouteille, 41f52ddca6b05e6bfa72e1f00c0649c1.jpg303d010fd622201233f10717a4d5575d.jpgex-voto sculptés ou peints, reliquaires en papiers roulés ou réalisés avec d'autres techniques (parfois portatifs en forme de livres), crèches architecturées dans le goût polonais, poupées de couvent, statuettes naïves, suaires brodés et peints de Besançon, de Compiègne ou d'ailleurs,
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Suaire de Besançon, collection privée (Paris), objet non reproduit dans le dictionnaire, ph.B.Montpied

 boîtes à système avec vanités, boîtes avec saynètes religieuses en verre filé, canivets (papiers découpés au canif), billets spirituels aquarellés, bénitiers en faïence (du genre de ceux que collectionnait André Breton), bannières de procession, tableaux en coquillages (comme celui qui figure sur la couverture du livre), etc... C'est une énumération bien complète de cet invraisemblable capharnaüm d'accessoires de la religion populaire ou non, souvent broché sur d'anciennes pratiques païennes archaïques, qui est collectionné aujourd'hui en raison, entre autres motifs, de l'inventivité artistique qui s'y déploie (c'est en tout cas  ce qui me fascine personnellement dans ces objets). Une collection française liée à  ce thème se détache parmi d'autres, la collection de l'Association Trésors de Ferveur, basée à Châlons-sur-Saône (22, rue gloriette, 71100 Châlons-sur-Saône, site: www.chez.com/tresorsdeferveur), qui a fait l'objet d'une exposition à la Bibliothèque Forney à Paris en 2005 (avec un catalogue à la clé).

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Porte-serviettes, fin du XVIIIe, Tiroler Volkskunstmuseum, Innsbrück, Autriche

    En feuilletant le dictionnaire, on trouve des objets ou des références étonnants comme la mention du reliquaire conservant une larme du Christ à Chemillé dans le Maine-et-Loire (mais bien sûr il en existe d'autres, à Marseille, à Orléans, etc.) qui n'est en réalité qu'un petit morceau de quartz taillé ce qui n'empêche nullement de l'adorer... Les auteurs nous parlent aussi des pratiques lithophagiques, où les fidèles mangent de la pierre littéralement, ou de la poussière de pierre de sanctuaires parce qu'ils lui prêtent bien entendu des vertus bénéfiques. On l'accommode mêlée à du vin, ou diluée dans la bouillie que l'on administre aux enfants. "La poussière des martyrs est la plus prisée"... Les clous aussi sont très prisés des amateurs, parce qu'ils ont servi à clouer Jésus, mais aussi parce qu'ils rentraient dans la fabrication de la croix.... On trouve des clous ou des fragments de clous sacrés dans d'innombrables reliquaires.

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Boîte de colporteur avec reliquaire en papiers roulés dans le fond, XVIIIe, coll. Trésors de Ferveur, d'après cl.Marc Monnier

   Il paraît qu'à la Toussaint en Bretagne et en Normandie, nous disent toujours les auteurs, on embroche des pommes sur les pointes aiguës d'une branche d'arbre. C'est l'arbre des âmes, que l'on vend aux enchères en vue d'obtenir des grâces et des faveurs (des saints, ou des morts?) et qui reste une année dans une chapelle. On les place sur les tombes le 2 novembre. Le livre évoque aussi les jeux de parcours, les puzzles, les jeux de cartes à finalité édifiante ou didactique, servant à la propagande religieuse, comme ils peuvent servir ailleurs à la propagande politique, ou à la pédagogie laïque. Un long article se concentre sur les oeufs, leur symbolique, l'utilisation de leur forme pour les ciboires et les reliquaires. Bref, on fait incontestablement son miel en lisant cet ouvrage (d'autant que le miel -et la cire (autre long article)-02700307f06480298dff16f774efd68d.jpg vient des abeilles, et que les abeilles, je l'ai encore appris avec ce livre, sont venues des larmes du Christ, à se demander ce qui est venu de ses autres sécrétions...). 

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Gabare de la Loire pour les processions à Champtoceaux, Maine-et-Loire, cliché Bruno Rousseau, Service de l'Inventaire, Conseil Général du Maine-et-Loire

    L'ouvrage, comme tant d'autres sur les sujets voisins  de l'art naïf ou de l'art brut, se trouve à la librairie de la Halle Saint-Pierre, au pied de Montmartre à Paris (la plus grande librairie spécialisée en France sur le thème des arts populaires et spontanés, rappelons-le).

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La librairie de la Halle St-Pierre, Paris 18e, ph.B.M., oct. 2007

 

11/10/2007

Sorcière, sorcière, fais gaffe à ton derrière...: MASSIF EXCENTRAL (11)

   Sur le bord du chemin un jour de balade dans les monts du Cantal, je vois un bloc sombre qui me fait signe... Et vous? La voyez-vous, qui s'enveloppe dans son ample manteau de ténèbres?

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   Peut-être que non... La voici rapprochée, avec son chef sommé d'une touffe qui singe une couronne, fétus et brins d'herbe en guise d'émeraudes... Je vois le profil d'une sorcière au menton en galoche, son visage pustuleux tout en grotesques protubérances.

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Photo B.Montpied, juillet 2007
(Un lecteur  m'a envoyé, suite à l'insertion de cette note, un détail d'une peinture de l'artiste singulier Joël Lorand qui présente effectivememt quelque analogie avec ce profil ensorcelant) :
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Joël Lorand, J'ai parait-il une clientèle ciblé [sic], oct.2002

Noms prédestinants (3): L'élève Parfait

   Tout doux l'ami qui commentez à tout va ces derniers temps sur mon blog sensible à de si beaux morceaux de littérature, nous allons vous en fournir des noms prédestinants, comme ceux que par le passé vous nous signalâtes, car vous aussi, sans pourtant avoir l'excuse d'un patronyme podologique comme mézigue, vous savez à l'occasion jouer de la savate... Mais il vous faudra être patient, car tout vient à point à qui sait attendre, comme disait l'autre.

   Pour l'heure, voici Parfait, élève de Pouyanne.

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Photo B.Montpied, octobre 2007

  Ce teinturier du boulevard Haussmann, je l'imagine assis au premier rang dans la classe du professeur Pouyanne. Ce dernier en avait assez des cancres habituels, et lorsque l'élève Parfait arriva dans sa classe, il crut avoir enfin déniché l'oiseau rare. Las! L'élève en question se révéla tout aussi médiocre que les autres. Un Parfait médiocre. Pouyanne retomba dans la mélancolie. Lui qui voulait former des exégètes et des chercheurs, il ne réussissait qu'à refiler des vocations d'épicier ou de teinturier à ses gratteurs de pupîtres. Mais Parfait n'oublia pas son maître saturnien qui lui avait dissimulé avec habileté le dépit qu'il avait ressenti à constater une médiocrité si peu en rapport avec ce que laissait envisager un tel patronyme. Il lui resta à jamais redevable. Au point d'afficher à qui voulait l'entendre, à tous les vents, le nom de son bon maître, sur son enseigne, en lettres dorées. 

08/10/2007

Le tailleur, les escargots (suite)... et les boucs?, un texte de Marc Grodwohl

  

  « La note du 26 août 2007 consacrée aux ruches décorées de Slovénie (au passage je signale les ruches anthropomorphes de Moravie) reproduisait une scène satirique associant un tailleur à un escargot.
  J'ai trouvé, pour l'instant en deux exemplaires en Alsace, une scène représentant un personnage assis à califourchon sur un bouc brandissant une paire de ciseaux . L'une est sculptée sur un montant de porte en grès milieu XIXe siècle à Obermodern ( ?) dans le Bas-Rhin, l'autre figure sur un poêle du modèle  "Kunscht" , daté de 1844, que j'avais pu sauver à Folgensbourg (Haut-Rhin) et remonter à l'Ecomusée d'Alsace où j'espère qu'on en prend soin car c'est une pièce d'exception [Voir photos ci-dessous].
   Près de 200 kilomètres séparent ces deux objets, il n'y a donc aucune possibilité de diffusion par "contamination", ce décor est arrivé à ces endroits par des chemins différents.
   Le décor de la "Kunscht" qui est reproduite ici est d'une facture exceptionnelle pour ce genre d'objets.
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1er objet: kunscht de Folgensbourg, vue d'ensemble et détails, ph. Marc Grodwohl
 
   Chaque carreau est décoré d'un sujet différent, à l'engobe et au barolet, technique peu utilisée pour le décor des poêles. Mais plus encore que la technique, c'est la stylistique et l'inspiration des  décors qui ne se rattachent pas à des ensembles connus dans la région : leur mode anecdotique (arts forains, musiciens, animaux savants) relève d'un autre répertoire. Il est vraisemblable que ces décors aient été réalisés par un artiste de passage, venu de quelque part en Europe centrale, comme d'autres qui allaient de village en village réaliser ici une peinture de plafond de maison paysanne ou un décor de café de village.
  Je donne deux exemples de céramique de poêle des Guzuls, population de l'ouest carpatique de l'Ukraine, qui sont très près de l'inspiration de la  "Kunscht"  sud-alsacienne.
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2ème objet: poêles des Guzuls, photos Marc Grodwohl
  
   Aussi pourrait-on se demander si la scène du tailleur était signifiante pour le client alsacien, ou si elle appartenait à un ensemble exotique dont le sens lui échappait. Je suppose plutôt que cette scène a eu une large diffusion, à preuve je l'ai trouvée ailleurs en Alsace et certainement les lecteurs vont-ils en mentionner d'autres.
   Ce que je sais du tailleur dans ma région du sud alsacien est qu'il peut, sans que ce soit une règle générale, être identifié au juif. L'association bouc et juif, via la dévalorisation du juif par l'odeur qu'on lui prêtait pour le rabaisser au rang de bête, est une réalité. Le bouc est aussi on le sait bien, une forme du diable, et des contes européens existent, dans lesquels les sabots fourchus du tailleur sont dévoilés. Il y a enfin le bouc symbole de cette lubricité que le folklore prête aussi bien au juif qu'au diable. Par analogie cette énergie sexuelle excessive est associée à l'impuissance, via les ciseaux. Et l'impuissance (nouer les aiguillettes) est oeuvre de sorcellerie. Le tailleur de la scène est in fine ambivalent, forme humaine castrée du bouc, mais aussi celui qui vient contrer les désordres sexuels.
   Je crois que la proximité du tailleur et du bouc est attestée dans l'iconographie allemande à partir du XVIIe siècle. Venons-en au tailleur. Ce que j'en ai entendu auprès de mes "grands témoins", ce qui situe ces représentations comme vivantes dans la 1ère moitié du XXe siècle, est que les tailleurs de village n'ont pas, pour le moins qu'on puisse dire, une grande aura. C'est un métier pour des gens malingres, inaptes aux travaux agricoles ou artisanaux de force. Ils travaillent toujours à l'intérieur, dans les vêtements et dans le plus intime des autres. Par analogie, ils puent. Ils ne trouvent pas femme et sont zoophiles. Trop pauvres pour avoir une vache, ils se satisfont de leur chèvre. La boucle est bouclée. De plus ils ont toujours des histoires à raconter aux enfants, et la pédophilie avant la lettre n'est pas loin. Ce ne devait pas être drôle d'être tailleur. »
 
   Marc Grodwohl
 



 

 

05/10/2007

Noms prédestinants(2): Mr Beach

   La presse signale ces temps-ci une amibe qui s'introduirait dans le cerveau humain pour les dévorer, ce qui on s'en doute ne fait pas que du bien.

   La chose a été constatée à plusieurs reprises dans des états américains du sud (six personnes décédées). En fait la bestiole est connue depuis les années 60, repérée au départ en Australie. Elle paraît aimer les climats chauds donc. Vivant au fond des lacs,a587fdfc1ae35f7cfc60f1b31ed39c89.jpg dans les délicates couches vaseuses, elle s'empresse de s'introduire dans les narines des baigneurs qui font des galipettes dans ces vases (communicants? On frémit...).

  Bon, d'accord, mais où veut-il en venir, se demande le lecteur sagace qui a lu le titre de cette note? Eh bien, voici: avec cette information, la presse nous cite un expert en maladies liées aux loisirs nautiques qui s'appelle... Michaël BEACH. Comme quoi, la thèse sur les noms qui prédestinent, ça peut marcher aussi du côté anglo-saxon...84a4a21eddca2c229c47ce45de91c5f2.jpg

  Et que dit cet expert? Rapportons-le au passage pour continuer de frémir: "C'est une amibe qui adore la chaleur. Elle se porte d'autant mieux que la température de l'eau s'élève. Dans les décennies futures, avec la montée des températures, nous devons nous attendre à voir davantage de cas".

02/10/2007

Dictionnaire du Poignard Subtil

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OUTSIDER: 

  Je m'étonne toujours que l'on utilise ce terme dans la langue française. Bien  souvent, on le fait sans chercher à savoir s'il aurait un équivalent dans notre langue. On pense d'abord qu'il tend à définir, lorsqu'il est accolé au mot art, l'art des marginaux, de ceux qui sont rejetés, qui sont à l'extérieur (à l'extérieur, out, du côté, side). Certes, il contient   dans un premier temps cette signification (dans le monde anglo-saxon, appliqué à l'art brut, il désigne les autodidactes). Mais, simultanément, ne contient-il pas aussi en creux cette suggestion que ces "marginaux" sont tout à fait capables de faire retour dans l'art dominant (le mainstream, autre terme de plus en plus employé dans le jargon franglais envahissant des nouveaux snobs) et de s'imposer demain comme les nouvelles valeurs de l'art, ce qui est bien le calcul de plusieurs des artistes dits "singuliers" ici en France du reste, ainsi que des marchands ou des collectionneurs qui s'y intéressent. Ce sens-là, inutile de le dire, n'avait pas été prévu par ceux qui avaient lancé le terme de l'autre côté de la Manche.

   Ce double sens d'outsider fait qu'en français, le mot était jusqu'à présent passé essentiellement dans le jargon des turfistes. Le canasson qui n'est pas favori mais qui pourrait bien l'emporter malgré les prévisions... En fait, c'est le canasson alternatif! L'alternative aux paris. Le bon plan un peu risqué mais qui peut rapporter gros au jeu du tiercé, le rêve de tout bon flambeur qui se respecte...

   C'est pourquoi je veux mettre en avant qu'on pourrait traduire en français outsider par ALTERNATIF. D'autant que le terme a commencé d'être très à la mode en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis apparemment à partir des années 70 (1972 et 1978) avec les expositions organisées avec la complicité de Roger Cardinal, à une époque où de ce côté de la mer le mot "alternatif" servait à désigner toute une culture "underground" (encore un terme anglo-saxon), vocable qui englobait l'architecture "autre", les modes vestimentaires (l'Inde...), l'alimentation et l'agriculture biologiques, des modes de socialisation utopistes comme les communautés, l'art psychédélique, les environnements créatifs excentriques, etc. L'art brut était vu d'un bon oeil par tous les zélateurs de ces cultures alternatives. Par la suite, en France, le mot est un peu passé de mode. Il continue cependant de représenter une bonne alternative (précisément) à l'emploi franglais d'outsider pour qualifier pêle-mêle un rassemblement d'art brut, d'art contemporain influencé par l'art brut, des environnements sauvages, etc., dans une joyeuse confusion qui a été dénoncée à diverses reprises ici ou là (dans les publications de l'association ABCD notamment).

Pierrot Cassan, un imagier de l'immédiat: MASSIF EXCENTRAL (10)

   Il tenait un dépôt de pain sur la place Pompidou à Mauriac dans le Cantal. C'était une figure du bourg, modeste, discrète, qui ne fit que passer, et n'ayant que peu quitté sa région natale.

   Pourtant il a laissé de nombreuses traces dans la mémoire et les légendes locales. On se souvient de lui de manière tenace. Né en 1913, il est disparu en 1982. Pierre Cassan, dit plus communément Pierrot Cassan, fut charcutier avec ses parents de nombreuses années avant de tenir le dépôt de pain.

  Chétif de constitution, il se fit un point d'honneur à devenir moniteur de gymnastique, initiateur bénévole des gosses de son pays à la natation dans un bassin naturel, et sauveteur d'une quarantaine de personnes sur le point de se noyer. Cela à lui seul lui aurait assuré une place durant quelque temps dans la mémoire locale.

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Photo B.Montpied

  Il eut envie de faire plus. Il se mit sur le tard à peindre la vie de son village. Sur des pauvres cartons qu'il distribuait à l'occasion (car les témoins le répètent, il ne vendait pas). Par exemple à son ami peintre Pierre Mazar (peintre plus académique apparemment), qui les garda pour les sauvegarder. Ou à d'autres amis. Il les exposait sous la vitrine de sa boutique modeste, sans que les passants n'y prêtent beaucoup d'attention.

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Photo publiée sur l'affiche de l'exposition de la médiathèque de Mauriac

  Le temps aidant, les éloges ayant été réitérés par quelques supporters de la région (Pierre Mazar, ou l'écrivain Pierre Chaumeil, un ami de Robert Giraud ce dernier, le blog du "Copain de Doisneau" nous en a déjà parlé à l'occasion...), parfois venus de plus loin (Bernard Buffet...), plusieurs expositions lui ont été régulièrement consacrées, la dernière en date étant celle de la Médiathèque de Mauriac en février 2007. Cette même médiathèque se propose de conserver du reste l'oeuvre afin de la montrer de temps à autre.

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Photo B.M.

   La chasse et ses exploits rarement exempts d'innocentes fanfaronnades, que ce soit après des lièvres, un ours (cantalien?) ou des sangliers, étaient souvent sujets prisés par Pierre Cassan.

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Photo B.M.

   A d'autres moments, ce sont comme des grâces rendues aux compagnons animaux, l'âne, le boeuf, aux nécessaires travaux de tous les jours, à la bonne cuisine (où l'on retrouve le malheureux lièvre qui passe à la casserole "aurillacoise")...

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Photo B.M.

   De même que les saynètes galantes, parfois traitées avec un certain sens du grotesque, comme dans le cas de ces "poutous" échangés entre un certain "Jean-Claude Lassale" et une brune répondant au doux prénom de "Pétuninia"... 

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"Pour l'amour d'une poule, combat de coq à Mauriac"... Le peintre se fait à l'occasion moraliste (Photos B.M.)

   Il n'oublia pas non plus de rendre hommage à celui qu'il appelle, peut-être de manière un peu trop grandiloquente - avec quelque malice bon enfant?- le "maître", Pierre Mazar, plus simplement et avant tout "son ami".

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Photo B.M.

   Ce sont ainsi autant d'instantanés qu'il fixa avec simplicité, ou comme je préfère dire, avec immédiateté, réussissant avec une grâce sans apprêts à traduire directement  son appréhension sensible et truculente des spectacles qui l'environnaient dans son village, approche où il reste cependant difficile de faire la part entre malice et naïveté.

Remerciements à Jean Estaque qui me parla de Cassan aux environs de 1991, ce que je n'avais pas oublié, à Emmanuel Boussuge qui m'en reparla ces derniers temps, à Agnès Barbier qui m'a signalé l'expo de Mauriac, à Régis Gayraud qui nous y a conduits, et à Monique Lafarge de la Médiathèque de Mauriac qui m'a confié gentiment la trop rare documentation qui existe sur ce peintre, que je souhaite ardemment plus connu, spécialement de tous ceux qui s'intéressent aux limites de l'art brut et de l'art naïf. 

29/09/2007

Dictionnaire du Poignard Subtil

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ART: 

  "(...) l'art ne dépend pas de l'artiste professionnel, une telle profession n'existe pas en soi. Ainsi il arrive que l'art se trouve parfois du côté des incapables professionnels, là où personne ne le soupçonne, parmi la communauté des snobs, dans le jeu d'un enfant ou dans l'artisanat par exemple. L'art est précisément une fleur singulière qui ne tolère de lien d'aucune sorte."

   Kurt Schwitters, Art et temps, 1926, in Merz, écrits choisis et présentés par Marc Dachy, Editions Gérard Lebovici, 1990

   "Le vrai art il est toujours là où on ne l'attend pas. Là où personne ne pense à lui ni ne prononce son nom. L'art il déteste être reconnu et salué par son nom. Il se sauve aussitôt. L'art est un personnage passionnément épris d'incognito."

   Jean Dubuffet, L'art brut préféré aux arts culturels, 1949.

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  Je dois la découverte des intéressantes lignes de Schwitters, anticipant de vingt ans sur la fameuse déclaration de Dubuffet que j'ai reproduite en vis-à-vis (d'un côté 1926, de l'autre 1949), à la lecture du livre de Valérie Rousseau, Vestiges de l'indiscipline (voir ma note du 16 septembre à son sujet). Cette dernière rapproche avec raison le travail de Schwitters (par exemple incarné par son Merzbau, construction hétéroclite et très pensée à la fois qui traversait deux étages de l'immeuble qu'il possédait à Hanovre) et celui de Richard Greaves au Canada. Mais elle ne donne que partiellement la référence du texte de Schwitters. Marc Dachy dans une note signale que le texte existait en manuscrit et qu'apparemment il ne fut seulement publié qu'en tchèque, dans l'almanach Fronta à Brünn en 1927. On a du mal à imaginer dès lors que Dubuffet ait pu en prendre connaissance, même s'il a reconnu avoir été influencé par le mouvement Dada dans sa jeunesse. Simplement, nous pouvons constater que l'idée de l'art comme "fleur singulière qui ne tolère de lien d'aucune sorte" ne date pas de l'après deuxième guerre mondiale, mais était déjà bien dans l'air dés les lendemains du premier conflit mondial de 14-18. 

25/09/2007

Le "Coin au Soleil" de Jean-Pierre Schetz

    Le MAD musée (MAD= Musée d'Art Différencié) du Parc d'Avroy à Liège organise du 15 septembre au 17 novembre 2007, dans sa galerie, une exposition consacrée à un environnement singulier...
 
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Photo Fonds Desarcy-Robyns/Musée de la Vie Wallonne
 
 
      Cette exposition, "Un Coin au Soleil , le jardin singulier de Jean-Pierre Schetz",  met  en  lumière  l'environnement  anticonformiste  créé  à  Jupille sur les hauteurs de Liège par un homme modeste. Les organisateurs  présentent  des photographies, des articles de presse, ainsi que quelques sculptures (sauvées de la destruction par Brigitte Van Den Bossche, elle qualifie ce site de "Petit cabinet de curiosités à ciel ouvert"). Un  film documentaire, intitulé "Un Coin au Soleil. L'astre imaginaire de Jean-Pierre Schetz" produit par l'association C-paje (coordination B. Van Den Bossche), est également montré au cours de l'exposition.
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        Jean-Pierre Schetz, né en 1921 et disparu en 1986, avait emménagé avec sa femme dans une "cité sociale" pendant les années soixante. Ferrailleur et maçon au départ, il avait été embauché par la suite au service de la voirie de la ville de Liège. La cité toute neuve où ils avaient emménagé le rebutait, notamment par l'invasion du béton qui allait jusqu'à boucher l'espace situé entre son logement et la rue. Il décide de le faire régresser en l'éliminant et le remplace par de la terre dans laquelle il ne tarde pas à faire pousser des plantes, et toutes sortes de fleurs dans une sorte de luxuriance...
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                            Photo Alfred Jamin
             
       Dès lors, un processus s'enclenche, il ne s'arrête plus d'aménager et de vouloir embellir son jardin, afin de contrer l'aspect standardisé des lieux (normal au pays du Standard de Liège...). Il fait son Nek Chand au petit pied et en pleine Belgique. Qu'il pleuve ou qu'il vente, rien ne l'arrête, un mainate domestiqué souvent présent à ses côtés. Nous sommes dans les années 70.
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Photo Alfred Jamin
 
       Il assemble des pierres, récupère des objets, façonne un château qui devient un point de ralliement pour les enfants du voisinage. Il s'ingénie à marier ses compositions à l'élément naturel.
 
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     La mort vient le trouver alors qu'il continue de travailler à son jardin. Sa femme l'entretient encore vingt années, décède à son tour, la société gestionnaire de la cité sociale qui comme tout bon gestionnaire ne connaît aucun état d'âme se dépêche de faire place nette... Nous sommes en 2006...
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Le sens de la poésie chez les sociétés gestionnaires...
 
 
 
 
  (Ces notes sont basées sur un dossier pédagogique établi par Brigitte Van Den Bossche et transmis à Bibi, qu'elle en soit remerciée ici, ainsi que pour les photos ; je remercie aussi Gérard Sendrey pour son entremise)
 
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N-B: A souligner que le film "Un Coin au Soleil , l'astre imaginaire de Jean-Pierre Schetz" (voir ci-dessous sa mise en ligne sur YouTube, merci à Fredito - note de l'animateur du blog, 14 octobre 2019)  s'inscrit dans un ensemble projeté par l'association C-paje,  et qui consiste à vouloir réaliser d'autres documentaires sur les environnements spontanés. Il me paraît bon de publier les intentions de l'association à ce sujet:
"Ce projet, s'adressant à un large public, repose sur un triple objectif :
- Dévoiler de monumentaux ouvrages d'art qui renvoient à l'inventivité, l'imagination, la créativité et l'esprit visionnaire de leurs créateurs qui ne suivent aucune piste académique, mais créent pour eux-mêmes, dans le seul but d'embellir leur quotidien, leur vie.
- Reconnaître une forme d'art inclassable, si ce n'est dans la marge de l'art .
- Conserver les traces d'environnements qui ne sont pas destinés à la pérennité  -certains étant même en phase de disparition.

 De manière plus particulière aussi, ce projet s'adresse au secteur socioéducatif puisqu'à certains égards, les environnements pris en compte présentent d'évidentes similitudes avec des aménagements singuliers d'espaces conçus par des enfants dans un contexte associatif. Les intentions de ce projet sont, précisément dans ce cadre, les suivantes :

-  Inspirer des processus créatifs dans les domaines complémentaires de l'Education permanente, de la Culture et de la Jeunesse.
- Intéresser les professionnels de l'éducation et de l'animation à des projets d'aménagement d'espaces, enrichir leurs propositions créatives dans le rapport à l'espace et au patrimoine culturel. 
-  Aborder et mettre en valeur l'importance de l'action locale (intervention sur son environnement)."
 

 

23/09/2007

Du nouveau réalisme comme s'il en pleuvait

   Restons dans les ready-made, voulez-vous? Car c'est bien ainsi qu'il faut qualifier ces morceaux d'affiches déchirées, lacérées, ces dessous d'affiche qui réapparaissent tels des palimpsestes le temps d'un chantier de rénovation d'une station de métro parisienne, avec leurs lettres en miettes, leurs tons passés, leurs agencements de formes et de couleurs aux nuances si subtiles qu'un peintre mettrait des mois pour les trouver sur sa palette, avec leurs messages d'un autre temps aussi, comme ici où les Pieds Nickelés reviennent nous faire un clin d'oeil...

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   Ready made, poésie trouvée que ces tableaux à la Villeglé, à la Raymond Hains, à la François Dufrêne (mon préféré) qui surgissent sur les bas-côtés des métros qui se refont une beauté ( une autre forme de beauté, mais qui risque fort d'être une fois de plus occultée), ready-made comme les dessins du hasard sur les vieux murs chers à Léonard, les pierres aux formes étranges, les taches des agates, les troncs torturés, etc. Poésie naturelle des villes qui prend plutôt la forme d'un lettrisme de hasard, d'un nouveau réalisme pour pas cher. Un clic, et on emmène le tableau éphémère chez soi, au lieu de le coller au musée où d'autres sont déjà, qui nous ont appris à les retrouver dans le décor de nos vies quotidiennes. 

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(Photos B.Montpied, affiches anciennes déchirées trouvées à la station Notre-Dame-des-Champs, Paris, 2007)

20/09/2007

Face à face, le hasard et la transe, Galerie Flak

Me baladant samedi dernier sur la rive gauche du côté de la rue de Seine, j'emprunte la rue des Beaux-Arts avec la vague idée de retrouver par hasard une galerie où je croyais pouvoir découvrir des marionnettes du Mali que je cherchais sans vraiment les chercher (comprend qui peut...).
Il faut dire que j'étais avec un vieux camarade et que l'on bavardait avec entrain, au point de s'étourdir, on entrait au pif dans les galeries, sans bien regarder où l'on entrait. Ah, voici que j'avise la vitrine de chez Flak (j'ai toujours aimé cette galerie au patronyme onomatopéique où l'on voit de temps à autre des poupées Kachina).
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Tiens, il y a une curieuse expo en ce moment. On y confronte masques ethniques et masques ready-made. Qu'est-ce que c'est des masques ready-made ? C'est ainsi que spontanément je serais tenté de les qualifier. Ce sont des masques qui n'étaient pas de vrais masques au départ (du moins pas des masques pour se déguiser ou pour des rituels), mais des objets destinés à d'autres fonctions (masques à gaz de l'autre guerre, casque de Dark Vador, masques de protection pour le base-ball...) mais qui possèdent à leur insu des similitudes avec les masques de transe ou propitiatoires.
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 Similitudes dans les formes. Comme dans le cas de ce vieil étrier en cuir ridé qui ressemble à une trogne de sorcière et que l'on peut voir dans un coin dans le cabinet de curiosités modernes de chez Flak. En entrant dans la galerie, je me fais la réflexion que ce concept d'exposition ressemble furieusement à ce qu'a plusieurs fois tenté Paul Duchein du côté du Musée Ingres à Montauban. Et voilà-t-y pas que M.Duchein rôdait effectivement dans la galerie ce jour-là... Je me cogne quasiment sur lui.
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Je conseille à tout amateur de surprises, recherchant le décentrement du regard culturel d'aller faire un tour dans cette petite galerie inventive.
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(Les photos des masques, hormis celui de Dark Vador, proviennent du site de la galerie Flak -voir les liens insérés dans cette note- Ci-dessus, masque ancien de pompier,  du moins, je crois...)
Galerie Flak
            8 rue des Beaux-Arts, 75006 Paris, France.
Exposition du 12 Septembre au 3 Novembre
2007.

Un catalogue paraît à l'occasion de cette exposition :
Face à Face, Masques secrets, visages révélés
(Textes en français et en anglais de
Gilbert Lascault et Hubert Comte
120 pages couleurs)

16/09/2007

L'indiscipline n'a-t-elle laissé que des vestiges?

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    "Vestiges de l'indiscipline", tel est le titre d'un bel ouvrage qui va bientôt être disponible au Canada (lancement prévu pour le 21 septembre à la Cinémathèque québécoise), et ailleurs pourvu qu'on songe à le commander (voir renseignements au bas de cette note). L'indiscipline, me suis-je dit au vu du titre, n'aurait-elle donc laissé aujourd'hui que des vestiges? Le titre est musicalement beau, mais il peut aussi vouloir dire cela. Cependant, le sens est ailleurs. La photo de couverture le proclame sans ambages, ainsi que le sous-titre. On veut nous parler des environnements de "patenteux" québécois, d'"anarchitectures" parmi les plus singulières qui soient apparues ces dernières décennies au Canada. L'"indiscipline" dont il est question est celle de l'"art indiscipliné" défendu par la Société du même nom. L'auteur du livre est comme de juste Valérie Rousseau, directrice de cette même Société, "doctorante en histoire de l'art et chercheuse associée au Laboratoire d'anthropologie et d'histoire sur l'institution de la culture et du Musée canadien des civilisations"... (ça en jette, n'est-il pas?).

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Extrait du dépliant annonçant le lancement du livre

     Les patenteux, au Québec, depuis le livre et la recherche formidables des trois jeunes femmes Louise de Grosbois, Raymonde Lamothe et Lise Nantel ("Nous avons pris position pour une classe sociale dont les manifestations culturelles sont ignorées ou méprisées", écrivaient-elles) en 1972-1974, ce sont les bricoleurs-inventeurs naïfs ou populaires des bords de route (une patenteuse (mais tentante?), répondant au doux nom de Mathilde Laliberté définissait ainsi le mot: "Un patenteux, c'est quelqu'un qui fait des affaires que d'autres ont pas faites jamais et puis qui a de l'imagination dedans").

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4ème de couverture des Patenteux du Québec (1978)

    Valérie Rousseau a voulu restreindre son étude, divisée en trois parties, à un petit groupe de créateurs, choisis sans doute pour leur grande inventivité, proche de celle de l'art brut, et situables à la croisée des chemins et pour l'un d'entre eux, de l'art moderne: Léonce Durette, Richard Greaves, Roger Ouelette, Charles Lacombe, Emilie Samson et Adrienne Samson-Fortier (ces deux dernières étaient déjà recensées, ainsi que Roger Ouellette dans "Les Patenteux du Québec"), Palmerino Sorgente et l'autodidacte naïf/brut plus connu Arthur Villeneuve, sur lequel en France nous ne disposons d'aucune documentation (malgré une exposition montée il y a déjà longtemps à la Halle Saint-Pierre).

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Un détail de la maison décorée par Arthur Villeneuve, et actuellement conservée dans la Pulperie de Chicoutimi (Photo copyright Pulperie de Chicoutimi)

    Ces trois parties sont rédigées dans un style limpide et vivant, la première d'entre elles se chargeant d'évoquer les créateurs (tous bien choisis du point de vue de l'originalité de leurs oeuvres et sans doute aussi pour les parallèles que peut tracer Valérie Rousseau entre eux). Ces évocations  s'appuient sur des descriptions et des entretiens avec les auteurs, des extraits de leurs écrits (car c'est une des caractéristiques de ces patenteux étudiés par Mlle Rousseau d'être aussi des écrivains spontanés, leur philosophie les poussant d'ailleurs vers une sorte d'art total -bien différent de celui que prônait Richard Wagner...).

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Léonce Durette dans l'arrière-cour de son environnement, ph Richard-Max Tremblay

     La deuxième partie, la plus épaisse quantitativement (80 pages) dans un ouvrage qui en contient 193, est un dossier photographique (le photographe étant pour la majorité des clichés, datés de 2001, Richard-Max Tremblay ), la troisième partie (Espaces mitoyens et analogies) étant réservée à une approche plus analytique de l'ensemble du phénomène des environnements indisciplinés (synonyme: anticonformistes ? Voir cependant le chapitre "Indiscipline et tradition", p.149, où l'auteur précise la définition). L'auteur met à cette occasion en relief un certain nombre de caractéristiques communes repérées par elle chez les créateurs, la tendance au repli autarcique sur soi (le rapport des créateurs d'environnements avec les mollusques secrétant leur coquille a déjà été remarqué, dès André Breton notamment, voir son texte de préface aux Inspirés et leurs demeures de Gilles Ehrmann que Roger Cardinal -voir p.163 des "Vestiges..."- connaît très bien, Mlle Rousseau...), ou un désir d'échapper aux contingences temporelles par exemple (voir la phrase de Charles Lacombe ci-dessous...),6773bfd51cb181d1312553b526191697.jpg désir en même temps contradictoire avec l'aspect éphémère des installations érigées (exemple de Charles Lacombe qui sème des dessins dehors à la merci des intempéries, ou les constructions défiant l'équilibre de Richard Greaves (à l'esprit proche de celui du dadaïste Kurt Schwitters comme le remarque ave justesse Valérie Rousseau), édifiant entre autres une Maison des 3 Petits Cochons en bois, ce qui correspond à la deuxième maison dans la chronologie du conte célèbre, située à équidistance de la plus éphémère, la première, celle en paille et de la troisième, la plus durable, celle en brique).

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Détail de l'environnement de Charles Lacombe, ph Richard-Max Tremblay

    La place nous manque évidemment pour en parler plus en détail. Renvoyons le lecteur avec confiance à l'acquisition de l'ouvrage fort enrichissant.

    Et signalons pour finir une erreur un peu ennuyeuse, pas spécialement imputable à Valérie Rousseau (note 98, p.182) mais plutôt à Jean-Yves Jouannais (si la référence à ce dernier est exacte) dont l'auteur cite un des ouvrages, Artistes sans oeuvre, I would prefer not to (1997). Ce dernier impute, selon Mlle Rousseau donc, la phrase suivante: "J'aimerais assez que ceux d'entre nous dont le nom commence à marquer un peu l'effacent" à Jean Dubuffet. Je ne sais si ce dernier a recopié lui-même cette phrase dans un de ses écrits (ce dont je doute), ce que je sais en revanche c'est qu'elle figure mot pour mot dans le second Manifeste du surréalisme (1930) sous la plume d'André Breton qui cite ainsi son camarade surréaliste belge Paul Nougé. Il se sert de cette phrase pour introduire sa demande d'"occultation profonde, véritable du surréalisme" afin que le public moutonnier des gogos ne puisse plus imposer de confusion au message réel du surréalisme. Déshabiller André pour habiller Jean est symptomatique de l'attitude récupératrice de certains historiens ou critiques d'art qui pratiquent ainsi une étrange manière d'"occulter" le surréalisme, nettement plus répressive, au bénéfice de l'anti-culture dubuffétienne...

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Une oeuvre de Roger Ouelette, ph Richard-Max Tremblay 

Vestiges de l'Indiscipline, Environnements d'art et anarchitectures, (208 pages, 106 photos couleur), 34,95$, édité par la Société du Musée Canadien des Civilisations. Diffusion Prologue Inc., 1650,bvd Lionel-Bertrand, Boisbriand, (Québec), J7E 4H4. Service de commandes postales: Musée canadien des civilisations, 100, rue Laurier, C.P. 3100, succursale B, Gatineau (Québec) J8X 4H2. Site web: cyberboutique.civilsation.ca

13/09/2007

Petit calendrier d'expositions très potables

*    Bernard Pruvost expose à la Galerie Dettinger-Mayer, 4, place Gailleton, Lyon, du 26 octobre au 24 novembre, et Ô coïncidence, montre aussi des oeuvres, un peu plus tôt, au Musée de la Création Franche à Bègles (Gironde ; du 29 septembre au 25 novembre), dans ce dernier cas avec d'autres créateurs (Exposition "Visions et Créations Dissidentes", dont Pascale Vincke, qui est défendue avec raison par le MAD musée à Liège, ou le Batave Herman Bossert, présenté par la Galerie Hamer de Nico Van Der Endt à Amsterdam qui a apparemment des Mouly dans ses réserves -tiens, puisque vous êtes sages, on peut cliquer ici pour en voir un...). Bernard Pruvost, c'est un spécialiste des encres arachnéennes.

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Oeuvre de Bernard Pruvost (Photo Galerie Dettinger-Mayer)
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*   Plus prés dans le temps, commence le 17 septembre une expo consacrée à Yolande Fièvre, artiste au patronyme très évocateur, amie de Jean Paulhan, spécialiste des éléments naturels ovoïdes et glandulaires assemblés dans des coffrets, artiste très influencée au préalable  par le dessin et l'écriture automatiques. Elle a devancé de très loin tous les "singuliers" qui sont venus à partir des années 80. Ce sera l'occasion de le vérifier, à la Halle Saint-Pierre du 17 septembre 2007 au 9 mars 2008. En même temps que cette expo, qui comme d'hab dure un temps un peu trop immense (6 mois...), il y aura une expo pour évoquer la courageuse figure de Varian Fry, cet Américain qui vint sauver des griffes nazies nombre d'intellectuels et d'artistes européens qui se pressaient à Marseille au début des années 40, une des rares issues qui restait encore après la Débâcle. Il a d'ailleurs écrit le récit de son aventure dès 1942. Elle ne fut publiée aux USA qu'en 1945, et traduite en français seulement en 1999 chez Plon (l'édition est épuisée et l'éditeur serait bien inspiré d'en faire des retirages...).

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    C'est bien sûr l'occasion pour les organisateurs de l'expo de montrer des oeuvres de plusieurs surréalistes dont Fry put s'occuper, comme Breton, Max Ernst, Jacques Hérold, Jean Arp (qui resta en Europe), Wifredo Lam, Victor Brauner, André Masson, Jacqueline Lamba ou Matta (alors que Camille Bryen, Alberto Magnelli, Lipchitz, Wols, eux aussi exposés, malgré ce qu'avance avec confusion le laïus de présentation de l'expo sur le site de la Halle, si ce sont bien des artistes parfaitement honorables, ne furent  pas pour autant surréalistes...).

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    Des "dessins collectifs" (sans doute des cadavres exquis et des épreuves originales  du "Jeu de Marseille" que les surréalistes et leurs amis, réunis dans le petite communauté de la Villa Air-Bel confectionnèrent, histoire d'inventer un jeu nouveau porteur derrière ses nouveaux emblèmes de mythes nouveaux) sont également promis.

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("Dessins collectifs" surréalistes, photo récupérée sur le site de la Halle Saint-Pierre)

   "Varian Fry était comme un cheval de course attelé à un chariot rempli de pierres" (Jacques Lipchitz, selon Pierre Sauvage, texte dans le dossier de presse de l'exposition)

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*    Sinon, il me semble que peu d'amateurs auront remarqué qu'une rétrospective des oeuvres de Philippe Dereux (1918-2001) avait été organisée à la Galerie Chave durant cet été. Des dessins, des collages d'épluchures, des peintures et des livres illustrés de 1960 à 2000 sont montrés dans cette prestigieuse galerie jusqu'au 30 octobre 2007, soit une bonne partie de cet automne encore, donc. J'ai une tendresse toute particulière pour l'oeuvre et le personnage de Philippe Dereux qu'il m'est arrivé de rencontrer un soir dans la Presqu'île à Lyon avec son fils... Ce qui me fascine toujours chez Dereux, c'est justement le travail de sa vie, cette épluchure de l'expression, d'abord peut-être recherchée à travers l'écriture, puis ensuite dans les arts plastiques (il a mixé les deux approches dans différents livres, comme Le Petit Traité des Epluchures paru en 1966 chez Julliard). Pour se rapprocher au plus prés de la vérité, du parler juste, sans emphase, sans fioritures, sans tricherie, sans afféterie mensongère. Et qui passait peut-être par le recyclage de ces épluchures dans une combinatoire dédramatisant cette obsessionnelle quête d'épure.

   La galerie Chave annonce pour l'occasion une monographie en préparation qui s'intitulera "La Mémoire des épluchures".

   (Galerie Alphonse Chave, 13, rue Isnard, 06140 Vence, Tél: 04 93 58 03 45.)  

11/09/2007

Rabiots d'obscénités romanes...

Le hasard objectif, ces temps-ci, me ramène du côté des galipettes obscènes romanes (le terme n'a rien de péjoratif sur mon clavier), avec un texte qu'Emmanuel Boussuge vient de m'adresser tout droit depuis son Cantal chéri. Y a pas qu'à Mauriac qu'on peut découvrir des acrobaties et des exhibitions de parties dites honteuses. Voilà comment débute le texte d'Emmanuel : 
Rabiots d'obscénités romanes et précisions superflues
C'est ma tournée !
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 Encore un loup auto-fellateur. Mais ce n'est pas le même qui a déjà été présenté sur le blog Le Poignard Subtil (note du 2 août). Celui-ci est à Moussages, entre Trizac et Mauriac. La parenté saute aux yeux et ça n'a rien d'un hasard. Le modillon a été sculpté par le même atelier sévissant autour du grand chantier de Mauriac au cours du XIIe siècle. Les motifs favoris de celui-ci (c'est-à-dire du ou des sculpteurs spécialisés dans les modillons) se retrouvent dans un large rayon autour de la basilique alors en construction...

 

  Et voilà comment il se termine :
 ...Pour finir, un clin d'oeil. Entre deux modillons, comme entre deux doigts de pied, on a quelquefois des surprises. On trouve ainsi à Brioude entre deux trognes modillonnées anodines -seul l'appareil photo permet de la voir en agrandissant a posteriori- une figure étrange. Il s'agit d'un loup monopode, se suçant le pied, un parfait intermédiaire entre le sciapode et le loup autonome, donc. De quoi ravir les boucleurs de boucle (l'image est floue malheureusement).
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               Comme on le constate, on pourrait croire que le texte ne parle que d'auto-fellations. Mais ce n'est qu'une impression. Le texte se termine en boucle comme il commence voilà tout, dans une forme, finalement, qui colle assez bien à la position décrite! Si on veut en savoir plus, on lira avec profit l'ensemble du texte susdit en cliquant sur Rabiots d'obscénités romanes, texte d'E. Boussuge 2007.doc. Outre un texte rédigé dans un style rigoureux et peu académique (on y cause à certain moment aussi bien de rockn'roll), le lecteur y trouvera plusieurs photos de l'auteur qui viendront enrichir sa culture pornographique romane.
         Et si cela ne suffisait pas, je renvoie le lecteur qui en veut toujours plus à un film de Claus Josten, L'ennemi à nu,  (2004, 26 min), qui sera diffusé dimanche 16 septembre sur Arte (décidément, depuis quelques dimanches soirs, Arte cherche à relayer efficacement le Poignard Subtil). C'est l'histoire de Claudio Lange qui photographie les sculptures romanes des édifices religieux qui jalonnent le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle. Cet artiste, « Chilien installé à Berlin, qui étudie cette statuaire depuis 1989, interprète ces représentations incroyablement obscènes comme une forme de propagande anti-islamique développée par l'Église catholique pour justifier les croisades » (texte de présentation des programmes d'Arte). Voilà bien une autre interprétation des obscénités romanes à laquelle beaucoup, je gage, n'avaient pas encore pensé !... A voir et à supputer...

 

09/09/2007

Chez Prinzhorn, sur Arte

    Ce dimanche aura été illuminé par l'excellent documentaire de Christian Beetz au titre à double sens (au moins dans sa traduction française), un "art insensé", insensé de force et de beauté poétique.

    Bien sûr, on a sous la main le bouquin de Hans Prinzhorn, traduit depuis les années 80, on a le catalogue de "La Beauté insensée" de l'expo du Palais des Beaux-Arts de Charleroi (1995-1996), on a des catalogues en pagaille venus de la clinique d'Heidelberg où se trouve la collection Prinzhorn (par exemple un des plus récents, de 2006, très soigné comme tout ce qui provient de la Sammlung Prinzhorn, "Wahnsinn sammeln, Outsider Art aus der Sammlung Dahmmann-Collecting Madness, Outsider Art from the Dahmmann Collection), mais personnellement, je n'arrivais pas à me faire une idée exacte de la qualité des oeuvres de cette fameuse collection Prinzhorn (jamais montrée en France à ce qu'il me semble?), hormis quelques cas célèbres très souvent reproduits, comme August Natterer (connu d'abord sous le nom de Neter), Karl Brendel (ces deux créateurs ayant influencé Max Ernst dans quelques-unes de ses oeuvres, quelques-unes sur des milliers comme on oublie souvent de le souligner), Joseph Schneller (Sell), ou encore le célèbre Heinrich Anton Müller. "La Beauté insensée" du musée de Charleroi, avec son côté austère, ses fiches signalétiques médicales, la pâleur de ses reproductions, n'aidait pas, il faut dire...

    Le film de Christian Beetz avec ses choix esthétiques parfaits, la qualité des commentaires de ses intervenants (tous collaborateurs ou responsables de la collection Prinzhorn: Thomas Röske, Bettina Brand-Claussen, Ferenc Jadi, Inge Jadi -conservatrice de la collection-,Sabine Mechler, etc), leur générosité et leur compréhension vis-à-vis des créations mises en lumière par une caméra non voyeuse mais rendant à César ce qui appartient à César, ce film tout à coup en deux fois vingt-cinq minutes révélait la haute qualité des oeuvres conservées à Heidelberg, leur haute valeur humaine, la profonde nullité des Nazis qui ont massacré leurs auteurs dans les chambres à gaz après avoir tenté de stigmatiser leurs oeuvres dans une exposition de mise à l'index (l'"Art" soi-disant "dégénéré"), le film révélait tout cela de manière éclatante. Un rayon de soleil passait subitement à travers la télévision et son habituel océan de vulgarités. Montrant subrepticement ce que pourrait faire la télévision si elle se transformait plus souvent en loupe merveilleuse se promenant sur les oeuvres d'art et leurs rapports avec la vie, la souffrance, les joies des hommes, instrument idéal de médiation directe entre les hommes et la poésie.

    Une seule petite critique aurait pu s'adresser à Thomas Röske qui affirme un peu vite à un moment du film que le surréalisme n'aurait sans doute pas pu exister sans les oeuvres de Natterer, ce qui est aller un peu vite en besogne tout de même... 

Un doux penchant

     Je suis tombé en arrêt l'année dernière en compagnie de cicerones habitant le Poitou devant le panneau ci-dessous au contenu latent surréaliste (je crois employer ici le terme adéquatement,  autrement que dans son sens galvaudé par les journalistes).

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(Photo Bruno Montpied, 2006)

    Sans doute un parent de ces menuisiers mexicains adeptes du penché (et non pas seulement des planchers) dont parle Breton je ne sais plus où, ou bien de ce compagnon charron auteur de la roue ovale que l'on voit dans le film de Jacques Brunius, Violons d'Ingres, qui se trouve être la même -ce que les conservateurs du Musée d'Art Moderne au Centre Beaubourg à Paris, ainsi que les experts de Calmels-Cohen, n'ont toujours pas identifié- que celle que l'on découvre dans le morceau d'atelier d'André Breton exposé à Beaubourg, débité en tranches, une bonne part de sa magie envolée de se retrouver ainsi vitrifiée... Le film de Brunius permet en outre d'identifier de façon claire l'auteur de cette roue: Alphonse Benquet, aussi peintre naïf de grand talent, dont Breton, comme Eluard, possédait quelques tableaux (acquis sans doute à l'époque où ils séjournaient chez Lise Deharme, dans les années 30, dans les Landes).

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(La roue ovale d'Alphonse Benquet, extrait d'une photo de Gilles Ehrmann publiée dans 42, rue Fontaine, recueil de photos parues chez Adam Biro en 2003)

Pour saluer le passage du sciapode dans le village de Valuéjols au coeur de la Planèze

C’est un ange qui s’en charge, en étirant le rictus d’un crâne que l’humour le plus débridé n’aurait peut-être pas déridé.
A la hauteur de sa mission, c’est avec sérieux que le céleste emplumé s’acquitte de ce protocole étrange, sculpté sur une chaire de pierre (la seule connue du département) dans l’église.

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Une autre figure du bourg affiche la mélancolie de n’avoir qu’entrevu le passage du monopode parisien. Au-dessus d’un linteau vierge, elle est posée sur un cadran solaire (peut-être fin XVIIIe) et attend parmi les heures l’improbable retour de la subtile créature.
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[NB: Ce texte provient d'un rédacteur (et photographe) extérieur au blog qui signe]: Le pape

Art immédiat des croix de chemin en Cantal: MASSIF EXCENTRAL (9)

     Il y a déjà plusieurs années, j'avais inséré dans un "Tour de France de quelques bricoles poétiques en plein air" (édition conjointe Gazogène/L'Art Immédiat, "à quelques exemplaires", 1993) une magnifique croix de chemin photographiée à Albepierre (près de Murat dans le Cantal) en 1990. La voici telle que photographiée à l'époque:

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(On lit la date de 1842 sous les pieds du Christ aux allures de marmot crucifié)

      Et la voici à nouveau photographiée en 2007, quinze ans plus tard, bien moins mise en valeur, comme si le sentiment esthétique s'était relâché dans la région...

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(La date est devenue duraille à déchiffrer, les lichens s'en donnent à coeur joie, mais rien d'irrémédiable cependant...)

      Je dis cela parce qu'une autre oeuvre d'art populaire que j'avais également photographiée et publiée dans le même "Tour de France" de 1993, une petite Pieta de facture archaïque et fort belle que j'avais extirpée pour les besoins de tirage de portrait de l'oratoire de bord des chemins où elle végétait (dans la même région, au-dessus d'Albepierre), quinze ans plus tard elle aussi, se trouve passablement amochée par une couche de peinture argentée et dorée, placée qui plus est sur un fond à la couleur un peu trop appuyée (Ripolin, quand tu nous tiens)...

(A gauche, la photo faite en 1990 ; à droite la même Pieta en 2007)

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      Il ne faudrait jamais repasser deux fois par les mêmes fleuves. Et se contenter des premières découvertes. Comme cette autre croix d'Albepierre, pourvue d'une sorte de bulbe en son milieu qui a reçu des décors, des figures symboliques d'une grande beauté simple.

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      Ne dirait-on pas à contempler le visage ci-dessous, placé au revers de la croix ci-dessus, et qui pourrait bien représenter la Mort, ne dirait-on pas contempler une autre "face de carême", comme disait le sieur de Belvert  à propos des visages sculptés par Vaclav Levy (voir note du 12 juillet)? :

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(Photos B.Montpied)

      Les croix de chemin du Massif Central sont légion, quelques livres parus ces dernières années en dressent l'inventaire, ils sont utiles pour partir à leur découverte. Ces sculptures bien souvent ultra naïves, proches de l'art brut, anciennes (on en trouve au XVIIe siècle, au XVIIIe et surtout au XIXe siècle), réalisées par des sculpteurs provinciaux, bien souvent improvisés et autodidactes, réinterprétant des motifs codifiés de la statuaire religieuse de leur temps, sont aussi intéressantes à dénicher que les environnements spontanés type Palais Idéal et autres Picassiette. Elles en sont proches cousines, de même que les créations décoratives en rocaille que l'on voit encore ici ou là. Parmi les ouvrages, on distinguera celui de Pierre Moulier,"Croix de chemin de la Haute-Auvergne" aux éditions Créer, en 2003.

[Nous commençons un album de photos sur les croix de chemins à partir d'aujourd'hui (9 septembre 2007)]

08/09/2007

Arcimboldo et Maisonneuve

    Sur des blogs voisins on annonce l'expo Arcimboldo qui va bientôt ouvrir au musée du Luxembourg. Fort bien. C'est vrai que personne ne va en parler dans les grosses écuries du journalisme... Alors, pour faire plus original, ce blog cousin compare avec les masques de coquillage de Pascal-Désir Maisonneuve, en ajoutant que bien sûr, ce faisant, on enfonce des "portes ouvertes"... Oui, en effet, par d'autres... A une époque où, à ma connaissance, personne n'avait songé, dans le microcosme des amateurs d'art brut, à faire le parallèle Maisonneuve-Arcimboldo.

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(Extraits du Bulletin auto-édité par Bruno Montpied en 1995, L'Art Immédiat n°2, article Le coquillage, matériau-muse sur la parution du livre de Patrick Mauriés, Coquillages et rocailles)

 

 

Toile d'araignée balbutiante, MASSIF EXCENTRAL (8)

    Art involontaire à Valuéjols (Cantal) sur une remorque encore vide de chargement de foin...

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(Photo B.Montpied, 2007)

03/09/2007

Explorer en fauteuil la collection Prinzhorn

     Oyez, oyez, chers lecteurs attentifs du Poignard Subtil, dimanche 9 septembre prochain, il y aura une rediffusion sur Arte du documentaire de Christian Beetz (daté de 2006, et déjà diffusé hier paraît-il, pour sa première partie en tout cas -je tiens l'information de Laurence Maidenbaum de la Halle St-Pierre qui la tenait elle de l'animateur du bulletin Zon'art, Denis Lavaud, qui lui-même... (etc)...), L'art insensé, tel est son titre. C'est une exploration filmique de la célèbre collection du docteur Hans Prinzhorn, aujourd'hui transformée en musée dans une clinique à Heidelberg.f7c74a90f1cca3f3afb8f643986495b5.jpg

    Le documentaire est découpé en deux parties de trente minutes chacune environ. Dimanche, elles passent à deux moments de la journée, je ne sais la raison de ce découpage, a-t-on peur sur Arte d'ennuyer avec un tel sujet? Toujours est-il que la première partie, intitulée "Un génie inouï", c'est pour 13h30, tandis que la deuxième partie, "La texture de la douleur" (qui parle davantage des femmes internées comme Else Blankenhorn par exemple), est diffusée en soirée à 20h15. Tous à vos magnétos...96cbd0dfe591119ffd2272c451eba863.jpg

 

 

 

 

(photos Sammlung Prinzhorn)

02/09/2007

Henri Caillaud autre pape des escargots

    Cette note est inspirée des commentaires avisés de Michel Valière sur les cagouilles et les amateurs de cagouilles de ses régions de prédilection, Poitou et Charentes. Cela m'a donné l'envie d'aller repêcher un petit ouvrage au fond de ma bibliothèque...

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   Bon, en effet, il semble, je veux bien le croire, que ce coin de France a des affinités particulières avec les escargots (autres noms: cagouilles, lumâs, limas), une passion dévorante bien sûr. Goût qui paraît répandu particulièrement entre Loire et Garonne, à en croire Hélène Tierchant et Bernard Cherrier, les auteurs en 1990 (avec la complicité du photographe Alain Bourron), à la librairie Bruno Sepulchre -imprimerie Plein Chant...- d'un ouvrage intitulé "Le livre de l'escargot" que je possède depuis une randonnée de 1996 en Charente.

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(Photo Alain Bourron, extraite du Livre de l'escargot ; escargots de béton d'Henri Caillaud)

    Le livre est donc entièrement voué à cet animal intrigant dont certains, jadis, ont fait un symbole de couardise et d'impuissance (faut dire que ça se rétracte au moindre contact, ça rentre dans sa coquille, ça se recroqueville en moins de deux). J'aime les entreprises obsessionnelles et je l'avais acheté déjà pour cela. Mais il contient en outre l'évocation, malheureusement un peu trop succincte, d'un créateur nommé Henri Caillaud.

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(Photo extraite du Livre de l'escargot, Henri Caillaud avec sa nièce [non! sa petite fille... Voir commentaire ci-dessous], une de ses oeuvres au sol...)

    Ce dernier a vécu de 1889 à 1981, soit 92 années, en Charente, à Villejésus où en 1990 existait encore sa fontaine en forme d'escargot sur la grand'place du village (on suppose qu'elle y est toujours).

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(Photo Alain Bourron)

    Excentrique, l'homme a défrayé la chronique villageoise en construisant par exemple à l'abri des regards et des murs d'une vieille grange une autre maison, toute neuve, qu'il fit un jour apparaître en détruisant à coups de masse les murs de la coquille protectrice de la grange matricielle... Les auteurs nous signalent que cette maison était décorée de tableaux naïfs, "une naïveté vigoureuse", mais on n'en apprend pas plus, le livre ne contient pas d'illustrations sur le sujet, l'obsession majeure restant la cagouille, la cagouille, toujours la cagouille. Animal qui était aussi le thème central d'Henri Caillaud, qui en fit apparemment toute une série en ciment et en béton, nous dit le livre... Jusqu'à en réaliser un d'un mètre de long, pesant quarante kilos.

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(Photo Alain Bourron ; dernière oeuvre d'Henri Caillaud, un mètre, quarante kilos)

    "L'escargot possède, à travers nos départements, ses peintres, ses statuaires, ses orfèvres. Ils sont légion. Pour un Caillaud passé à la postérité, combien d'adulateurs anonymes qui ont façonné leur portail, forgé leur balcon en forme de cagouille? Combien d'ébénistes qui tournent des cagouilles de bois, combien de céramistes qui adaptent le même animal en porte-parapluie ou en récipient? Le petit-gris est une des sources d'inspiration populaire les plus fécondes." (Hélène Tierchant, Bernard Cherrier).

     Pour qu'on se pénètre encore plus de cette évidence, j'insère ci-dessous deux photos, l'une représentant l'environnement de 400 statues de Gabriel Albert à Nantillé en Charente-Maritime, et l'autre celui de son émule de Brizambourg, tout proche, Franck Vriet. Parmi tant d'autres merveilles, on y retrouve des escargots, en premier ou second plan.

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(Jardin de feu Gabriel Albert à Nantillé ; L'escargot est en haut près de la fenêtre...)
 
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(Photos B.Montpied, 2006 ; Ci-dessus jardin devant la maison de Franck Vriet à Brizambourg, otaries, crocodiles, flamants roses, escargot...)

01/09/2007

Un Poisson plus médecin que pilote, noms prédestinants (1)

     Pour continuer dans le bestiaire, après les escargots, les abeilles et les aliborons, voici un poisson. Trouvé en 2005 à La Souterraine dans la Creuse (déjà l'alliance de ces deux noms, n'est-ce pas, rend passablement perplexe...). Et donc loin de toute mer. Mais ce qui n'empêche pas l'altruisme de ce vétérinaire que l'on imagine frétillant...

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(Photo B.Montpied)

      Ceci pour inaugurer une série de notes à venir tout au long des mois sur les noms prédestinants, enquête que je mène depuis déjà quelques années (ce qui n'est pas original, je me suis aperçu que le thème en avait déjà intéressé d'autres, cf. Claude Gagnière, Pour tout l'or des mots, rubrique "Comme son nom l'indique", p.233, coll. Bouquins chez Robert Laffont, 1996, mais rien n'empêche de continuer le collectage de son côté).

30/08/2007

Mystère, énigmes et non-sens à Montreuil

    Du 15 septembre prochain (date du vernissage de 12 à 19h) au 29 juin 2008, la galerie ABCD de Montreuil invite chacune et chacun à faire une "visite-surprise" à leur nouvelle exposition intitulée "Brut alors!". "A la découverte des oeuvres d'art brut, à la recherche de leurs secrets", ajoute-t-on.

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     Avec seulement le carton d'invitation en main, sans plus d'explication, on se sent invité à une sorte de jeu (si on trouve pas, on "donne sa langue au chat"), à déchiffrer des "codes secrets" ou à "découvrir des formes cachées". Les images cachées, justement on aime ça au Poignard Subtil.

    Mais cela ressemble aussi à une enquête policière, car le carton parle de "piste de l'art brut". On cherche à dévoiler un secret. Et un calligramme élégant strié des slogans ci-dessus cités simule une empreinte digitale...

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    Du coup, on se dit aussi qu'on nous invite à enquêter sur la piste d'un secret... ou d'un crime (Car c'est le propre des enquêtes policières)? Or la police, en général, cherche à embastiller des coupables. Quel serait alors le rapport avec cette visite-surprise?

    Il faudra aller à Treuilmont pour en savoir davantage... 

26/08/2007

Ruches décorées de Slovénie, pour la première fois à Paris

       C'est paraît-il une première, ce que je crois bien volontiers. Bien cachée cependant au fin fond du jardin du Luxembourg à Paris, à quelques mètres du rucher de ce dernier avec ses ruches aux toits qui ressemblent à des pagodes (c'est leur seule caractéristique du reste, bien pauvre à côté des ruches slovènes), l'exposition des frontons de ruches slovènes à l'intérieur du pavillon nommé Davioud.

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Le rucher et le pavillon Davioud au jardin du Luxembourg

       Le musée d'apiculture de Radovljica prête, pour un temps trop bref (il va falloir vous précipiter si vous êtes amateurs, l'expo ne dure que du 15 au 30 août, il reste donc 4 jours à partir de cette note... Prêts?... Partez!), plusieurs dizaines de frontons de ruches décorés naïvement (ce n'est pas péjoratif sur ce blog) venus de ses riches collections. Moi qui n'en avais jamais vu autrement qu'en reproduction (principalement dans le livre de Claude Rivals, L'Art et l'Abeille, ruches décorées de Slovénie, essai d'iconologie populaire, édition Les Provinciades, Cahors, 1980), j'ai été surpris en les découvrant. C'est tout petit, la plupart du temps une douzaine de centimètres de large sur une trentaine de long.

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La vieille femme veut redevenir jeune, elle vend son âme au Diable qui la jette dans une meule-fourneau et la rend à un jeune homme, fronton de ruche conservé au musée d'art populaire de Vienne en Autriche (Ill. du livre de Claude Rivals).
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Rucher traditionnel slovène
     J'ai déjà parlé cet été de l'art pour les vaches tel qu'on le pratique en Gruyère ou dans l'Appenzell et le Toggenburg. Il existe aussi un art pour les pigeons du côté de la Limagne en Auvergne (sur les pigeonniers, je finirai bien par en parler...). Si le motif principal de ces décors peints sur les ruches paraît le besoin de les identifier et de les embellir, ainsi qu'une revendication de type identitaire ethno-culturel, j'ai lu avec plaisir dans le livre de Claude Rivals que ce dernier n'excluait pas l'hypothèse que les peintres faisaient ces décors aussi pour les abeilles, qui paraît-il, sont sensibles à la couleur et reconnaissaient ainsi leurs ruches, évitant de fâcheuses "dérives" (les abeilles seraient-elles situationnistes ?)... 
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La zone où l'on trouve des ruches aux frontons décorés est entourée d'un trait noir continu (carte datant de 1980, époque de l'ancienne Yougoslavie ; extraite de l'ouvrage de Claude Rivals)

     Les chercheurs spécialisés sur la question, comme l'auteur du catalogue qui est paru à l'occasion de cette exposition, Mme Ida Gnilsak, ont repéré que le premier fronton peint, une Vierge liée à un pélerinage dans la montagne, datait de 1758 (et donc que le phénomène a commencé au XVIIIe siècle, apparemment à la suite d'un spécialiste de l'apiculture, Anton Jansa) . Voici le fronton à la Vierge :

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     Mais la plupart des frontons décorés datent de 1820 à 1880. Leur production disparaît avec l'avènement d'un nouveau type de ruche. A les contempler, on retrouve des thèmes religieux et profanes (fifty-fifty) que l'on a déjà vus ailleurs (les thèmes chrétiens sont internationaux).

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Lapidation de St-Etienne

    Quoique... Cette iconographie possède ses thématiques historiques, ses interprétations de certains motifs folkloriques qui lui sont propres (le rapport à l'occupation napoléonienne, la vision des Turcs -qui n'ont fait que de brèves incursions en Slovénie à l'époque de l'expansion de l'Empire Ottoman- les luttes des héros nationaux, les rapports hommes-femmes, etc. Un thème m'a particulièrement intrigué. Plusieurs panneaux mettent en scène des personnages que les chercheurs identifient comme des tailleurs et qui sont aux prises avec un escargot géant qui le plus souvent les met en déroute.  Un panneau montre aussi un homme conduisant un gastéropode par une laisse.

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     Or, vue dans une collection privée, je connais déjà cette image. Un homme portant chapeau à plumet, en bois, de facture très fruste, tient en laisse un escargot (fait d'un méchant bout de bois et d'une vraie coquille d'escargot). Au pied de cette statuette, le mot "Strassburg" est inscrit. Cela veut-il dire que la statuette vient d'Alsace? Peut-être. Et qu'elle illustre elle aussi, comme le fronton de ruche slovène, un thème présent dans le folklore germanique (la Slovénie fut longtemps dominée par les Allemands et les Austro-hongrois)? On aimerait que des lecteurs nous renseignent sur la question...

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     Les tailleurs faisaient partie, selon Claude Rivals, des corporations d'artisans qui étaient souvent brocardés par les paysans, accusant leurs membres d'être des chétifs et des paresseux, d'où ces satires sur des individus  considérés comme si faibles et si peureux qu'un simple escargot suffisait à les disperser. On pense à Chaissac, éphèmère cordonnier sans clients, éternel maladif...

     Dans les thèmes populaires fréquents d'un bout à l'autre de l'Europe, on retrouve le thème du Monde à l'envers, avec ces animaux qui conduisent des carrioles tirées par des chiens alors que l'homme se prélasse à l'arrière, ou ces scènes de chasse où ce sont les gibiers qui ont tué le chasseur et le ramènent en procession triomphale.

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      On retrouve aussi le thème de la "guerre" des sexes, l'image archi courue des "âges de la vie" sous forme pyramidale, des faits divers (les livrets de colportage ont certainement leur importance sur l'inspiration de ces peintres locaux), des motifs xénophobes (méfiance et attitudes timorées du paysan à l'égard des nomades et des vagabonds...).

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Ruches de type "kranjic", exposition "Les frontons de ruches peintes" au Pavillon Davioud

       Ces panneaux avant tout narratifs seront à mettre en rapport avec les coutumes funéraires roumaines (je pense aux stèles sculptées par Stan Ion Patras au cimetière de Sapinta dans le Maramures) et aussi, par leur style, leur dessin, avec les panneaux décoratifs des charettes siciliennes (l'Italie est frontalière).

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(Fragment, vraisemblablement en provenance d'une charette sicilienne ; cet objet, ainsi que l'homme tenant en laisse un escargot, proviennent de deux collections privées distinctes)

    A signaler qu'à l'occasion de cette exposition, on trouve sur place un catalogue joliment imprimé avec de nombreuses illustrations (Voir ci-dessous).

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25/08/2007

Des arbres, crus-tu au cuir?

      Pas grand-chose à se mettre sous la dent à Paris en ce mois d'août où pourtant, vu l'exode des Parisiens partis sous d'autres cieux chercher le soleil sacro-saint (moi, j'aime la pluie, et on peut dire que j'ai été gâté cet été), l'occasion est idéale pour flâner à la recherche de trouvailles, de surprises (les touristes ne gênent pas, ils sont tous agglutinés sur les mêmes pots de miels spectaculaires, Place du Tertre, Tour Eiffel, Louvre)...

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       Jusqu'à ces dernières semaines, je n'ai guère trouvé comme exposition intéressante que "Le cuir des arbres" à la Maison européenne de la Photographie, rue de Fourcy, près du métro St-Paul. Des photos de Marc Fumaroli, plus connu jusqu'ici comme historien et essayiste, académicien également,5df2b96ebc7e7eab43244966eb280781.jpg qui présente des photographies qui sont exposées jusqu'au 2 septembre relevant peut-être de son "jardin secret" (c'est le cas de le dire), partie souvent la plus vivante chez un individu...

        L'exposition est minuscule, reléguée derrière une petite cafétaria, et ne comptant qu'une dizaine de photos qui toutes montrent avec un réalisme exacerbé avant tout la matière de l'écorce des arbres. Davantage la matière que l'image fantastique que d'autres mettent davantage en avant (c'est ma préférence). Du coup, les photos laissent le visiteur un peu sur sa faim. Malgré le propos de leur auteur auquel pourtant je souscris pleinement (et qui fait que je rattache ce travail au dossier fertile de la Poésie Naturelle): "Silencieuse, sans défense, leur beauté [celle des arbres] donne sans rien demander en échange...".

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(Photos des photos de l'expo: B.Montpied)