16/02/2009
Expertise d'Olivier Hervy, morceaux choisis
Je m'étais promis de remettre des aphorismes d'Olivier Hervy dès que j'aurais mis la main sur la plaquette qui avait été éditée aux éditions Pierre Mainard en décembre 2007. Et puis le temps s'est écoulé, et bien sûr j'ai oublié. Le livret était planqué sous un tas de papiers, à l'occasion de ce petit marathon effectué d'une foulée ramollo, le voilà qu'il a resurgi, comme bois flotté ramené par la marée. Je me fais un petit plaisir, en extraire les aphorismes choisis selon mon goût.
Nos masques africains cachent des têtes de clou.
Les amis d'enfance sont comme les jouets. Vient un moment où il faut s'en séparer.
Ils sont bien nombreux à constater que Paris est désert au mois d'août.
Encore un vieil acteur qui vit avec une très jeune femme. Scénario sans surprise.
Le chat fait sa toilette. Le chien celle des autres.
Cette voiture dans le fossé donne enfin l'impression d'être arrivée.
La voix d'outre-tombe d'Yves Bonnefoy est un peu ridicule tant qu'il est vivant.
Visite du Village d'Artistes où je ne vois que des commerçants.
La tarte. Pour en finir une fois pour toutes avec les pommes.
Ils évoquent avec nostalgie l'époque où Paris était un village, mais ne pensent pas à déménager dans le nôtre.
On construit partout pour que les résistants de demain ne trouvent pas de maquis.
La mer écrit en italique.
Les applaudissements au concert de jazz, lents et tristes aussi.
La scie est la seule qui atteint son but en revenant sans cesse sur ses pas.
Les hommes qui cuisinent en font tout un plat.
"Le voyage! La découverte! L'inconnu!", s'exalte M. de retour du Mexique. Puis il m'offre un sombrero.
Encore une bande dessinée où des rescapés évoluent dans un monde en ruines. L'imaginaire n'a pas survécu.
Os de seiche, feuille d'endive.
La tapisserie a son brouillon au dos.
(Aphorismes extraits d'Olivier Hervy, Expertise, Editions Pierre Mainard, 14, place Saint-Nicolas, 47600 Nérac, (7€).) A signaler de nouveaux aphorismes du même auteur parus dans la dernière livraison des Cahiers de l'Umbo n°11, revue concoctée par Jean-Pierre Paraggio du côté d'Annemasse.
15:17 | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : olivier hervy, aphorismes, editions pierre mainard | Imprimer
Banalités de base
"Se raser la tête permet d’économiser sur le shampooing
Trente-cinq « aphorismes de la platitude » naguère commis par mézigue se laissent brouter du regard dans le cinquième numéro de la revue Trémalo.
Lapalissades, évidences consternantes et truismes dopés aux hormones s'obtiennent contre 12 € envoyés par chèque à l'ordre de Kraken à l'adresse suivante : Kraken, revue Trémalo,Le Haut-Bois 29930 Pont-Aven.
Joël Gayraud"
13:15 Publié dans Curiosités, modifications et divertissements langa | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : joël gayraud, trémalo | Imprimer
Macario de Roberto Gavaldon et Bruno Traven
Cette note touche à plusieurs thèmes. Un que je n'ai pas encore beaucoup abordé ici, le conte de tradition orale traité au cinéma. Depuis quelques années, je collecte des titres de films en rapport avec cette question, et j'essaye aussi de me les procurer sous forme d'enregistrements. La filmographie du conte au cinéma est assez vaste comme on s'en doute. Méliés, comme par d'autres aspects, a été le premier en la matière en adaptant Cendrillon par deux fois, ainsi que la Barbe-Bleue ou les Aventures du Baron de Munchausen (que j'associe au conte populaire parce qu'elles relèvent du thème des menteries, cet équivalent des nursery rhymes anglaises). Sur le sujet, on ne trouve à ma connaissance que très peu d'ouvrages qui aient essayé d'établir une filmographie bien complète. Celle qui a été esquissée dans le catalogue de l'exposition Il était une fois les contes de fées (2001, Le Seuil/BNF ; magnifiques exposition et catalogue tout à la fois) par Alain Carou et Tifenn de La Godelinais Martinot-Lagarde (plus le nom est long, plus ça fait riche) visait "à l'exhaustivité pour le côté français" et à la sélection sur le plan international. Elle reste d'après mon petit doigt assez loin du compte (sans jeu de mots), me semble-t-il...
J'avais découvert à l'occasion d'une rétrospective du cinéma mexicain, cinéma d'une exceptionnelle richesse (il suffit de songer aux films d'Arturo Ripstein, L'Empire de la Fortune par exemple), souvent proche d'une certaine forme de "brut" au cinéma (je pense par exemple aux films d'Emilio Fernandez, surnommé "El Indio", acteur et réalisateur hors du commun), un film en noir et blanc de Roberto Gavaldon, intitulé Macario et tourné en 1960. Remarquable film... Adapté d'un conte de Grimm, assez connu des amateurs, La Mort Marraine. Il se trouve que le nom de "Bruno Traven" est associé à ce film qui le crédite au générique avec ce prénom de Bruno plutôt rare concernant le mystérieux Traven, auteur aux multiples identités, connu pour ses livres Le Vaisseau des Morts, ou encore Le Trésor de la Sierra Madre (adapté par John Huston au cinéma, en présence de Traven qui se faisait passer sur le tournage pour l'agent de Traven sous le pseudonyme d'Hal Croves).
Traven, c'est un thème à lui tout seul, écrivain puissant dont les lignes de force sont toujours en rapport avec une remise en question des rapports sociaux. Pas par hasard puisque Traven fut à n'en pas douter, si l'on suit les différents livres ou recherches filmiques qui lui ont été consacrés ces dernières années, le même homme que Ret Marut, délégué à la propagande pendant l'éphémère République des Conseils de Bavière (1918-1919) qui s'acheva par la répression terrible dirigée par les Prussiens et les corps francs, répression qui poussa certains de ses membres à se cacher, comme Traven-Marut par exemple (arrêté, il put s'enfuir juste avant d'être exécuté). Probablement allemand, sans qu'on sache exactement ses origines (sa présence est mentionnée pour la première fois en Allemagne, alors qu'il est comédien, et qu'il paraît âgé d'une vingtaine d'années, sa date de naissance étant estimée en 1882, voir la récente traduction française de sa biographie par Rolf Recknagel aux éditions de l'Insomniaque, décembre 2008) -il a essayé de se faire passer pour un homme né aux Etats-Unis- Traven publie ses romans en Allemagne d'abord, dans les années 20. Il meurt au Mexique en 1969. Macario est tiré d'une de ses nouvelles (qui ne paraissent pas traduites en français ; l'histoire des éditions et des traductions des livres de Traven, disons-le au passage, est un roman à lui tout seul...). Le rapport au conte de Grimm est un indice de plus de la culture allemande de l'auteur.
Ce conte est un des mieux construits de l'oeuvre des frères Grimm. Il met en scène la Mort, personnage au teint cireux et aux manières presque bienveillantes dans le film, aux prises avec Macario, pauvre paysan devenu riche grâce aux pouvoirs de soigner les malades qui lui ont été conférés par la Dame à la faux justement. Conte métaphysique dont il ne faut pas dévoiler l'intrigue bien sûr, qui s'achève sur une scène magnifique dans une immense caverne emplie des chandelles représentant les vies de tous les êtres sur la Terre. Le film vient de sortir en DVD, chez le label Albarès, dans sa Collection Latine (en même temps que d'autres films rares mexicains, d'Emilio Fernandez ou de Luis Bunuel). C'est une chance de rattrapage pour tous ceux qui seraient intéressés par le sujet...
Adresse e-mail des éditions Albarès: albares.productions@club-internet.fr
12:44 Publié dans Le conte en rapport avec d'autres expressions | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : macario, b.traven, roberto gavaldon, contes de grimm | Imprimer
Le "Salon de Bruno", proposition d'Emmanuel Boussuge
Apparemment, en cette journée de grisaille absolue, quelques amis veillent dans les coursives et suivent la tentative marathonienne. Voici un exemple de ce que l'on m'a envoyé il y a très peu de temps...
"On aimerait suivre au plus près l'effort du marathonien, l'encourager et lui passer une gourde au bon moment. Puisque l'on ne connaît ni l'horaire des interventions ni l'itinéraire, commençons par agiter les fanions au hasard et d'abord dans "le salon de Bruno"."
11:48 Publié dans Correspondance | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : glen baxter, emmanuel boussuge | Imprimer
L'aube
Voici ma première "oeuvre" répertoriée, ou plus exactement, conservée. Un travail en gommettes collées d'un doigt appliqué qui remonte à la maternelle de la rue du Pierrier à Saint-Cloud dans les années 50. Les êtres humains et les insectes, c'était tout comme, selon mes mains et mes yeux d'enfant, puisque que ce bonhomme a six membres. Il avait comme une boule dans la gorge... Et deux yeux différents (ce qui était, est toujours, la vérité). Son chapeau ressemblait à un sombrero, goût inconscient pour un Mexique imaginaire?
08:40 Publié dans Art de l'enfance, Art singulier | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : bruno montpied, art enfantin, art singulier | Imprimer
Au quatrième top, il est 7 heures...
7 heures, le blog s'éveille... On se secoue, on enfile les gants de tapoteur de clavier, la pile des sandwichs est prête, le thermos de café, les tonneaux de vin aussi, l'infirmerie est prévenue, de même que l'ophtalmo, les brancardiers sont sur le pied de guerre, les sels sont à portée de main, etc... (sans oublier l'inévitable psychologue commis d'office)... Vroum, vroum, vroum!... Ca démarre, c'est parti... Pour les 24 heures du blog!
07:00 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : 24 heures du blog, puérilité, bourin, etc. | Imprimer
12/02/2009
Les Cahiers de l'Institut, deuxième livraison
Le n°2 des Cahiers de l'Institut est paru en décembre 2008. L'Institut en question on le sait peut-être (voir ma note du 20 juin 2008 lors de la sortie du n°1) se consacre à la recherche et à l'exploration des "fous littéraires, hétéroclites, excentriques, irréguliers, outsiders, tapés, assimilés, sans oublier les autres..."
Dans cette brassée d'articles (plus équilibrée il m'a semblé que dans le premier numéro), bien sûr chacun ira chercher son miel en fonction de ses perspectives de curiosité. Marc Décimo nous parle d'un linguiste passablement illuminé qui prétendant révéler l'étymologie des mots comme étant basée avant tout sur le gaulois s'est livré en 1846 à un "dépliage" des mots qui annonce de très loin les expériences de Michel Leiris dans Glossaire j'y serre mes gloses, ou encore Souple mantique et simples tics de glotte paru dans Langage tangage en 1985). Le résultat est loin d'être aussi poétique et brillant que dans le cas de Leiris. Seul surnage le côté vaguement oulipien de cette tentative de définition des mots par décorticage des lettres et des syllabes.
Un long (trop long à mon goût) dossier est consacré à Paulin Gagne, vedette dans le monde des fous littéraires, littérateur, homme politique et prophète déjanté qui tout bébé déjà, comme nous le rappelait en 1873 dans son Trombinoscope le nommé Touchatout, "magnétisait sa nourrice et, pendant qu'elle dormait, lui tatouait sur les seins des signes cabalistiques". Marc Angenot, mis à contribution ("Fous littéraires: extension et compréhension"), se fend d'une remise en question des principes critériologiques qui présidèrent à la recherche d'André Blavier sur les fous littéraires, recherche qui reste grandement respectée bien entendu à l'IIREFL. Angenot relativise la nécessité pour celui que l'on voudrait ranger chez les fous littéraires d'être, d'après Blavier, sans influence et sans imitateurs. "...il est un autre critère possible de la folie littéraire (...) Est fou littéraire et doit être accueilli comme tel, quiconque a été expressément déclaré tel par l'unanimité de ses contemporains". Il poursuit plus loin: "Quand, pourquoi, dans quelle mesure, tel écrit est-il repêché et tel autre reste-t-il stigmatisé, ce sont ici de bonnnes questions auxquelles il n'est pas de réponse aisée". Ceci fait écho à la première phrase de Didier Barrière (dans Epaves du trésor graphique de Nicolas Cirier dans le fonds Guillaume-Moussy à Joinville), ailleurs dans ce n°2: "On sait que le propos d'un fou littéraire, au XIXe siècle surtout, est d'avoir publié des ouvrages si incohérents que nul ne pouvait les lire ou les prendre au sérieux". Entre parenthèses, c'est un peu le problème des revues qui choisissent de traiter de ces fous, comment espérer qu'elles aient à leur tour des lecteurs? Sans doute parce qu'on espère, et à juste titre je pense, que les lecteurs s'intéresseront aux commentaires sur ces fous davantage qu'au premier degré des divagations de ces derniers...
L'IIREFL respecte son défi de vouloir pousser plus loin les recherches sur son champ de prédilection. Utile est de ce point de vue la publication dans ce numéro du recensement opéré par Paul Gayot, membre du Collège de Pataphysique, des divers écrits consacrés aux fous littéraires au long des numéros des publications passées et actuelles du Collège. Cependant, il me sera aussi loisible de regretter qu'une place plus grande ne puisse être donnée aux diverses créations de l'art brut et consorts. C'est ainsi que dans ce numéro, à part deux articles, dont un de l'animateur de ce blog (sur le naïf monument au maire de Désiré Guillemare à St-Ouen-sur-Iton) et un d'André Stas, tout à fait alléchant sur un "hétéroclite" belge, Maurice de Boeck, accessoirement peintre naïf de "peintures brûlots", selon les propres mots de l'auteur de l'article, peintures qui sont de mon point de vue la révélation du numéro, à part ces deux articles, il est somme toute peu question d'art brut (si l'on excepte quelques compte-rendus d'ouvrages dont un de Marc Décimo, pas très tendre, sur le livre récemment publié de Marielle Magliozzi Art Brut, Architectures marginales).
Une émission sur France-Inter, Crumble, animée par Kriss, va être consacrée aux fous littéraires avec Marc Décimo en guest star...
Vous pourrez l’écouter sur votre ordinateur pendant une semaine. L'émission sera diffusée dimanche 15 février prochain, de 12H a 13H, et sera en ligne sur le site de France Inter: http://www.franceinter.com/ (en écoute à la carte, podcast et visuel).
09/02/2009
Marilena Pelosi à l'Objet Trouvé
Nouvelle exposition de Marilena Pelosi annoncée pour très bientôt (jeudi 12 c'est le vernissage à partir de 18h30) à la galerie Objet Trouvé, rue de Charenton, à l'ombre de cet Opéra de la Bastile bâti sur le modèle d'une gigantesque molaire, ô merveille de conception des architectes contemporains... Ce sera l'occasion de voir si cette dame, une des plus singulières artistes surgies ces dernières années dans le milieu de l'art contemporain imaginiste qu'inspire l'exemple à la fois moral et esthétique de l'art brut, poursuit l'exploration de nouvelles voies dans son langage parfois tout en paraboles et en allégories plus ou moins ésotériques. De ce point de vue, elle est du reste assez proche de l'univers d'une autre créatrice marginale, Claire Guyot, dont l'oeuvre fut révélée essentiellement de façon posthume et de manière peu répétée.
Le carton d'invitation de la galerie Objet Trouvé veut nous la présenter, mine de rien (joli tour de passe-passe de l'auteur du texte), comme une créatrice qu'on pourrait qualifier de "brute". Parce que l'art brut ne serait pas exempt de culture, la belle découverte!
Avec ce genre de remarque on pratique un raisonnement amalgamant et confusionniste qui permet de mélanger toutes les formes de création contemporaine pourvu qu'elles soient portées par un minimum de souffle un peu authentique. On passe ainsi allégrement sur les conditions de production des oeuvres, sur le contexte social où vit leur auteur, qui a toutes les chances d'avoir un peu d'influence sur le contenu de l'oeuvre. On passe sur la plus ou moins grande conscience de l'auteur de faire de l'art au sens usuel, l'Histoire de l'Art, le professionnalisme de la chose, son regard face à ce qui surgit de lui, plus ou moins contrôlé, plutôt moins que plus dans le cas des créateurs de l'art brut, qui sont généralement dépassés par des pulsions expressives.
Marilena Pelosi est à l'évidence le siège d'une intense production imaginative, liée à ses souvenirs d'enfance au Brésil certes, mais aussi à la perception du monde qui l'entoure, vis-à-vis duquel elle se sent en décalage et en désaccord... Mais elle maîtrise la situation, elle s'expose d'elle-même, elle sort dans le monde, va aux expositions, connaît l'histoire de l'art, bref ne possède pas le profil psychologique et sociologique des créateurs que l'on range dans l'art brut. Le mot d'art singulier, certes galvaudé par les temps qui courent mais toujours pertinent, peut servir à qualifier son oeuvre. Les singuliers sont des créateurs qui ont les fesses coincées entre l'art brut et l'art contemporain des professionnels. Ce ne sont pas des peintres du dimanche non plus, faisant gentiment mu-muse avec leurs pinceaux entre deux pot-au-feu. Ils ne sont pas exclus comme les créateurs bruts, mais ils sont tout de même comme des orphelins de l'art et comme des insulaires, isolés sur leurs territoires saturés d'imaginaire, n'osant même plus agiter leurs mouchoirs vers ceux qui pourraient être leurs voisins, sur d'autres îles. Ce sont des individualistes, des veufs et des veuves de l'art sincère, dérivant sur une banquise morcelée, en train de fondre elle aussi, comme la vraie.
Marilena PELOSI
Manœuvre de désenvoûtement
13 février au 14 mars 2008
Vernissage le jeudi 12 février de 18h à 21 h
Galerie Objet Trouvé, 24, rue de Charenton
75012 Paris (mer au sam de 14h à 19h)
00:24 Publié dans Art singulier | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : marilena pelosi, art singulier, galerie objet trouvé | Imprimer
08/02/2009
Les 24 heures du blog
A venir, un défi que l'animateur de ce blog se lance à lui-même, les 24 heures du blog... Programmées de 7 heures du matin lundi 16 février à 7 heures du matin mardi 17 février. Il s'agira d'une sorte de marathon de la note, recherches d'informations, images, rédaction et insertion faisant partie intégrante du marathon en question. On ne mettra que des notes nécessaires, pas question de faire du remplissage... Rendez-vous à tous ceux que cela amusera de suivre la chose.
18:14 Publié dans Sur la Toile | Lien permanent | Commentaires (10) | Imprimer
02/02/2009
La Terre vide
Prophétie facile? Toujours est-il que ce paysage assez rare sous mes crayons ou pinceaux ou rapidographes me parut terriblement vide, n'appelant décidément, malgré mon désir de le repeupler par de la faune, de la flore fantastiques, aucun habillage, aucun remplissage. Cette perspective de dunes stériles, brunes, sépia, blanches, grises, rare elle aussi dans ma production (je ne dessine pas en 3 D, je n'en ai pas le don), se devait de rester vide, ondulant doucement sous une lumière pauvre. Et les quelques homuncules, débris divers et tour solitaire qui malgré tout se parsemèrent selon un ordre nécessaire à l'équilibre des formes ne font rien pour animer la scène. Ils sont plantés, mornes au milieu du désastre qu'ils ne peuvent que constater avec fatalisme.
00:48 Publié dans Art singulier | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : bruno montpied, écologie, art singulier | Imprimer
01/02/2009
Roy Rogers?
12:53 Publié dans Cinéma et arts (notamment populaires) | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : roy rogers | Imprimer
31/01/2009
Amours de roches
Je n'en finis jamais de nouer des fils avec mon ancien fanzine L'Art Immédiat, en l'occurrence le numéro 2 consacré à la mer et l'art populaire, voire à la poésie naturelle qui entretient tant de relations avec les arts populaires. Dans ce numéro, j'avais reproduit une photo publiée en 1987 par Libération montrant un rocher aux formes suggestives appelé dans une région du Nord-Finistère, sur la plage de Porsmeur exactement "le zizi de Pépé".
Le maire de l'endroit, appelé dignement M.Dincuff, avait choisi de faire exploser le dit zizi de granit (trois mètres de haut, souvent peint en rose par les enfants du pays...), tant il en avait marre de la réputation que cela faisait à sa localité...
Eh bien, la même année (1995) où je republiai la photo et l'article qui l'accompagnait dans mon fanzine, je suis tombé sur une autre roche, située cette fois sur l'Ile Callot, non loin de Morlaix (au nom par lui-même déjà si évocateur...!). La voici reproduite ci-dessous dans toute sa splendeur...
Ne dirait-on pas que certaines roches, préférant plutôt prévenir que guérir, font parfois du zèle en serrant leurs fesses de granit comme si elles redoutaient quelque zizi de Pépé rôdeur...?
Inutile de dire que cette note est spécialement dédiée à José, l'amoureux des "mondes imprévisibles et étranges"...
18:41 Publié dans Poésie naturelle ou de hasard, paréidolies | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : rochers bizarres, poésie naturelle, île callot, art immédiat | Imprimer
29/01/2009
Un visionnaire et un introverti à la langue de bois
Ce personnage ne se dresse plus dans le lit du Fango, rivière délicieuse qui descend d'un mont appelé Extrême, où je me souviens de baignades, ponctuées de land art songeur, dans une eau si claire et si douce qu'on croyait se baigner dans une ambroisie. C'était en l'an 2000, il n'y avait aucun astronef dans les cieux, aucun futurisme en action, juste du soleil, des ânes qui tournicotaient et brayaient (c'est ça l'imparfait de braire?) devant deux pauvres rares pompes à essence au hameau du Fango, une rivière asséchée après une inondation, ce qui avait laissé une grande étendue aride de galets, de plantes épineuses, d'os blanchis sur lesquels je dessinais à l'encre noire et de l'espace pour rêvasser, imaginer des mini interventions sur les supports naturels, des cailloux peints que je scellais dans les dalles polies du lit du torrent, sachant pertinemment que le flot viendrait leur faire justice plus tard...
22:17 Publié dans Poésie naturelle ou de hasard, paréidolies | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : fango, poésie naturelle, bois flottés | Imprimer
Asger Jorn le tellurique (avec un addendum)
On me pardonnera peut-être d'aborder la question Asger Jorn de façon très personnelle, si l'on n'oublie pas que le narcissisme est un trait qui fait le propre des blogs...
J'aime profondément la peinture d'Asger Jorn depuis que je l'ai découverte vers 1977 grâce à mon vieil ami Joël Gayraud. Je dois à la rencontre avec cette peinture (et celle du groupe Cobra aussi, bien entendu) le coup de fouet décisif qui stimula mon désir, alors balbutiant et se cherchant des motifs d'encouragement, de peindre et d'expérimenter dans l'art. Notamment, je me souviens d'une peinture que conserve de lui le Musée National d'Art Moderne au Centre Beaubourg (quand est-ce que ce MNAM sortira de ce bâtiment insupportable, où ses réserves cachent tant de trésors occultés par manque de place (entre autres motifs)?), tableau qui était exposé dans une salle à part au début des années 80, d'un dynamisme abstrait et d'une vitalité colorée extraordinaire, titrée du genre "Kyotorama", ou quelque chose d'approchant... Avec les Gayraud, nous avions envie de venir avec table et chaises pliantes manger et boire dans cette salle, devant le tableau et d'autres du groupe Cobra, où nous aurions porté toasts sur toasts en son honneur. C'était pour nous alors la huitième merveille du monde.
Une exposition est prévue pour février au centre Beaubourg. Des dessins semble-t-il avant toute chose. Une rétrospective de l'ensemble de son oeuvre protéiforme -la sculpture, la céramique, les décollages d'affiches, les peintures modifiées par exemple- n'aurait pourtant pas détoné à Beaubourg.
Le grand public connaît mal la peinture de Jorn dont le prénom et le nom ne sont guère familiers aux francophones. Quand on nous présente ici ou là certains de ses tableaux, le choix est rarement de qualité. Récemment, j'ai eu l'occasion de tomber sur un d'entre eux au musée des Beaux-Arts de Lyon dans le cadre de l'expo "Repartir à zéro" (la peinture après la Seconde Guerre Mondiale, vue comme une période de rupture généralisée avec l'art qui avait précédé, postulat séduisant mais truqué en même temps). Les commissaires avaient choisi comme par hasard une oeuvre secondaire (il suffit de tomber sur une oeuvre lorsque l'artiste se cherchait ou bien travaillait vite), on passait sans s'arrêter. Les organisateurs de l'exposition n'avaient pas misé sur cette avant-garde-là, venue d'un Nord qu'ils sous-estiment fréquemment (bien à tort selon moi, c'est le résultat d'une certaine suffisance française). Or, les nombreux ouvrages à lui consacrés le prouvent assez, la peinture de cet artiste est d'une richesse insoupçonnée (toujours du point de vue du grand public) que je mets bien au-dessus de celle d'un Dubuffet par exemple -avec qui Jorn dans les dix dernières années de sa vie fut cependant en relations cordiales.
Il est aussi vrai que même lorsqu'on a connu de près les oeuvres de Jorn dans les années 80 (je fis en 1979 le voyage du Danemark à Copenhague -où ma compagne Christine et moi rencontrâmes Henry Heerup, le plus autodidacte des peintres du groupe Cobra- puis à Aarhus pour voir la grande fresque murale de Jorn installée dans le hall du lycée de la ville -une des plus belles fresques murales que j'ai jamais vues, ensuite à Silkeborg, à Louisiana, au musée de Carl-Henning Pedersen aussi, au musée d'art moderne de Alborg aussi ; le but étant de voir le plus possible d'oeuvres que nous ne pouvions voir en France - à part une petite rétrospective Jorn au musée d'art moderne de la Ville de Paris en 1978, c'était plutôt difficile de voir de nombreuses oeuvres de Cobra en France dans les musées à cette époque), il est vrai que, passées les années, quand je revois des peintures de Jorn, je ne suis plus dans le même éblouissement initial, la surprise -et le surinvestissement intellectuel- s'étant un peu décolorés, inévitablement...
J'égrène entre ces lignes quelques images piquées ça et là dans les catalogues que je possède, pour donner des exemples de ce que je préfère dans cette oeuvre. Mais il reste après tant de regards jetés sur cette peinture de matière profondément labourée, saturée d'imagination de la matière (Jorn a fait un portrait de Gaston Bachelard justement), mon affection profonde, intacte. Un peintre qui ne lasse pas après tant d'années d'admiration, il n'y en a pas tant (personnellement, je garde Max Ernst, Slavko Kopac...).
Je reste toujours étonné devant cette peinture où jaillit un torrent tourmenté de couleurs et d'où émergent des figures ultra archaïques, simplifiées à l'extrême comme repêchées de retour d'une plongée régressive dans le puits obscur de l'enfance. Jorn attache en outre une grande importance au fait de les titrer. C'est comme un parachèvement de l'oeuvre qui n'a plus rien à voir dès lors avec une manifestation d'art pour l'art seulement préoccupée de rythmes plastiques et de pure esthétique désincarnée, comme indicible et voulant déjouer toute narrativité. Il déléguait parfois à d'autres, visiteurs de passage au moment de la fin du tableau, le soin de trouver ces titres. Cela rejoignait chez lui son désir de création collective. On sait qu'il a du reste participé à toutes sortes d'expérience de création en commun, comme durant les journées de Bregneröd au Danemark en 1949 où avec d'autres membres de Cobra (Pedersen par exemple) il recouvrit entièrement les murs intérieurs d'une maison. Ou lorsqu'en 1968, à La Havane, il peignit les murs d'une banque nationalisée. Dans la maison et le jardin qu'il possédait sur les hauteurs d'Albisola sur la Riviera italienne, il créa également des décors en collaboration avec le gardien de la villa Umberto Gambetta, à qui il laissa l'usufruit de la maison après sa mort survenue en 1973. Il fit des livres mémorables avec Guy Debord (Fin de Copenhague, Mémoires), etc, etc.
Il collabora également avec Dubuffet lorsque ce dernier reconstitua la compagnie de l'Art Brut au début des années 60 rue de Sèvres. Il paraît, à suivre l'ouvrage de Lucienne Peiry, qu'il signala à Dubuffet des cas de créateurs pouvant l'intéresser pour sa collection. Parallèlement, il menait des recherches érudites sur l'art populaire scandinave, les graffiti, l'art roman, le héros Didrek (qui fut sa dernière étude avant de mourir). Ses écrits ne sont pas toujours faciles à lire, soit du fait de mauvaises traductions soit du fait de leur cérébralité. Mais l'homme a tout d'un puissant visionnaire survolté désirant plus que tout l'émancipation des hommes dans une libre création de situations imaginatives. Il était, par delà l'esthétisme (l'art naissant avant tout selon lui d'un besoin moral avant d'être esthétique), à la recherche d'un alphabet et d'un vocabulaire de signes qui permettrait de créer un langage universellement compréhensible de l'ensemble de l'humanité par delà les religions, les cultures et les nations (comme l'explique de façon fort éclairante Laurent Gervereau dans le catalogue de l'exposition La Planète Jorn à Strasbourg en 2002). C'était pour ces raisons qu'il partait en quête des arts du peuple, notamment nordiques, ou des graffiti, parallèlement à un Dubuffet qui cherchait davantage pour sa part du côté des individualistes populaires, car chacun agit en fonction de ses inclinations...
Cette exposition (du 11 février au 11 mai 2009, Centre Georges Pompidou, Paris) paraît plutôt une sélection d'une centaine de dessins prêtés par le musée Asger Jorn de Silkeborg au Danemark (qui conserve des oeuvres de Jorn, mais aussi un choix d'oeuvres, notamment graphiques, des artistes qu'il admirait ; c'est ainsi qu'on peut y trouver l'ensemble de l'oeuvre gravée et lithographiée d'un Dubuffet par exemple). A signaler que la Maison du Danemark a monté une rétrospective Asger Jorn l'année dernière à Paris. Le CNACGP a beau jeu de présenter cette exposition 2009 comme la "première faite dans un musée parisien depuis 1978". Oui... dans un "musée", c'est peut-être vrai, mais ce genre d'homologation joue sur les mots. Musée ou centre culturel, quelle différence cela peut faire... ? Et "Parisien" ou "régional", qu'est-ce que ça change (il y a eu en 2002 au Musée d'Art Moderne et Contemporain de Strasbourg une expo intitulée La Planète Jorn qui nous a laissé un excellent catalogue que je conseille d'acquérir à tous ceux qui s'intéressent à Jorn)? On a envie de dire, qu'importe le flacon pourvu qu'on ait l'ivresse. Ce terme de "première" ne veut en l'occurrence absolument rien dire.
ADDENDUM:
"Puisqu'on en est aux commentaires qui nous renvoient au bon vieux temps à jamais défunt, laissez-moi y aller du mien, même s'il faut pour cela ramasser profond dans la gravière des souvenirs. Albisola, ma plus belle excursion d'adolescent, quand nous gravissions la côte de Località brucciati pour y chercher la maison de Jorn. Les hasards poétiques se succédèrent dès lors. Comme nous expliquions que nous cherchions "la maison d'un artiste", on nous demandait duquel il s'agissait :"il bianco o il nero?", question qui nous jetait dans des abîmes de perplexité. Puis nous fûmes pris sur le bord de la route dans la Fiat 128 d'un Italien qui se révéla l'habitant-gardien-conservateur-scrupuleux du lieu (Umberto Gambetta). Il nous montra par le menu la belle maison de Jorn, mélange d'oeuvre d'art et de poésie quotidienne, puis comme nous lui demandions la raison de cette question "Il bianco o il nero?", il nous expliqua que non loin était la maison de Wifredo Lam. Un coup de téléphone pour prévenir Lam de notre visite, et nous nous retrouvâmes peu de temps après dans une tout autre ambiance, celle des totems, du vaudou, des plumes et des lances, quittant le minéral et la couleur pour toutes les nuances du marron et du brun et le bois, légèrement austère dans une architecture sobre (dois-je confesser que par son côté inattendu, j'ai plus de souvenir de ce moment-là que de la maison de Jorn, au fond) en présence de Lam amusé et heureux de notre jeunesse et de la sienne, à nous désaltérer dans sa salle de cinéma personnelle flanquée de deux gigantesques totems. Oui, ce fut la plus belle bourlingue de mon adolescence, et l'après-midi, elle s'acheva en bas, près du port, dans la cantine où l'on nous avait signalé Ansgar Elde buvant grappa sur grappa, autre artiste cobraïforme, que nous rencontrâmes et avec qui nous bûmes. Et j'y serais bien resté, n'eussé-je été si bicaténeux, comme disait l'amie Catherine Caron, qui, elle, y resta. "
(Ecrit par Régis Gayraud, initialement en commentaire et ajouté ici le 29 janvier 2009 ; une première version de cette note a paru le 17 janvier et s'est retrouvée du coup déplacée au 29 janvier)
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28/01/2009
Dictionnaire du Poignard Subtil
OMELETTE:
A la demande générale, je ne résiste pas au plaisir de donner une fois encore une de ses courtes histoires campant les sagesses et folies de Nasreddine Hodja, telle qu'elles me tombent dessus au détour de la bibliothèque que j'anime auprès des enfants. J'adore celle-ci (qui fait pousser, après un suspens magnifique de la réflexion qui fait tout le prix de cete historiette, des "oooh" délicieusement choqués aux enfants...):
"L'OMELETTE
Nasreddine invita un jour son voisin à dîner. Il avait préparé des langues d'agneau avec du persil et du citron. Le voisin s'offusqua en voyant le plat.
- Ah non! dit-il. Je ne mange jamais ce qui sort de la bouche des animaux, je trouve ça vraiment dégoûtant.
- Qu'à cela ne tienne, répondit Nasreddine, je vais te préparer une omelette."
(Jihad Darwiche, Sagesses et malices de Nasreddine, le fou qui était sage, Tome I, Albin Michel, 2000)
00:08 Publié dans DICTIONNAIRE DE CITATIONS DU POIGNARD SUBTIL | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : nasreddine hodja, jihad darwiche | Imprimer
24/01/2009
Création Franche n°30
Les animateurs de Création Franche ont loupé le virage de 2008 à 2009 et font paraître leur deuxième numéro annuel sur l'année suivante, ce qui va encore fait crier certains à la confusion sur le rythme de parution de cette revue à laquelle je reste fidèle par delà le temps...
Mais baste! Peu importe le rythme de parution, l'essentiel est que la publication continue à se maintenir en dépit des inévitables difficultés financières qui guettent toujours ce genre d'initiatives. Nous arrivons désormais au n°30, en cette année de vingtième anniversaire du Site (c'est peut-être la passion des chiffres ronds qui a fait décaler la parution du n°30, du reste?).
Qui l'eut cru lorsque l'on vit paraître en 1990 le premier numéro de cet organe émanant du Site, devenu depuis le Musée, de la Création Franche...?
Je profite de cette note pour un faire un petit retour et une mise au point d'ordre historique.
Les deux premiers numéros de Création Franche étaient du point de vue de leurs maquettes tout simplement calamiteux, le contenu restant de son côté bien timide. La direction en avait été confiée à messieurs Lanoux et Maurice. On vit à cette occasion ce qu'ils étaient capables de mettre en chantier. Je fus fort marri d'avoir été mis à l'écart du projet alors que depuis plusieurs années, j'essayais de lancer l'idée d'une revue qui traiterait de l'ensemble du champ des arts populaires. On me trouvait trop remuant, "sans humour" (dixit Sendrey dans ses Histoires de Création Franche, éd. de l'Authenticiste, 1998), et peut-être aussi trop fidèle à l'esprit surréaliste ("Bruno Montpied se veut sans complaisance, sans concessions; voue une vénération absolue à André Breton...", Gérard Sendrey, même source).
"...l'idée d'une revue est venue se nicher au Site de la Création Franche. Des contacts que j'avais avec lui, Jean-Louis Lanoux m'apparaissait comme un homme censé [sic], raisonnable, bien posé dans la vie, avec une bonne connaissance du milieu sur lequel nous étions branchés. Je le voyais très bien remplir le rôle du rédacteur en chef ; et je le lui dis. Il ne pensa pas que j'avais tort et me le fit savoir. Mais il exprimait une crainte. L'éventuelle présence de Bruno Montpied dans le comité de rédaction lui semblait représenter un grave danger pour la cohérence et l'efficacité de l'entreprise (...) Jean-Louis considérait que Bruno ne pouvait s'inscrire raisonnablement dans un projet sans essayer d'en bousculer les données"... (Gérard Sendrey, même source, p.46). Bousculer les données, quel beau projet pourtant... C'est sans doute ce qui manqua dès le départ à cette revue comme on le voit à lire les propos de Sendrey. On me proposait d'écrire dans la revue mais il fallait accepter de passer sous les ordres d'un directeur qui craignait donc les "bousculeurs de données"... Je refusai (ce qu'a oublié de préciser Sendrey dans son livre, préférant me présenter comme un opportuniste qui aurait accepté sa mise à l'écart de peur de perdre l'occasion de placer sa prose).
Dès le troisième numéro, où Lanoux n'était plus directeur (c'était le rôle qui lui avait été finalement imparti, tandis que Jean-François Maurice était le rédacteur en chef) et où Gérard Sendrey, le véritable initiateur de toute l'affaire en réalité, qui avait voulu rester en retrait tel le Vieux de la Montagne (comme il se rêve souvent), reprit la direction des opérations, les choses commencèrent à s'améliorer, petit à petit. Les collaborateurs se retrouvèrent sous la direction de Gérard Sendrey (au reste assez débonnaire) sur un pied d'égalité, ce qui me poussa à proposer alors, et alors seulement, ma participation. Les collaborations diverses et variées que je fus amené à produire dans la suite des numéros montrèrent je crois que le soupçon que j'aurais représenté "un grave danger pour la cohérence et l'efficacité de l'entreprise" était parfaitement infondée.
Jean-Louis Lanoux introduisit une secrétaire de rédaction que Gérard Sendrey nomme "Aline" dans son livre qui se rendit coupable, aux dires de Sendrey, de ce qu'on pourrait qualifier comme des abus de pouvoirs... ("...elle corrigeait les textes, mettait un mot de son choix à la place d'un autre voulu par le rédacteur, tronquait des phrases, changeait des sous-titres, en modifiant le sens...", Gérard Sendrey, même source, p.51-52). Sendrey proposa dés lors à Lanoux d'abandonner le poste sacro-saint de directeur de la publication... Se fermait une période où finalement beaucoup de bruit avait été fait pour pas grand-chose.
La revue a, depuis ses débuts balbutiants, changé plusieurs fois de look, comme perpétuellement insatisfaite de ses atours (et de ses atouts?). J'avoue préférer sa dernière parure, mise en place depuis le n°26, avec son dos carré qui lui donne une allure plus professionnelle. Mais la période où son titre était composé avec des caractères contenant des fragments d'oeuvres "franches", du n°12 au n°17, me séduit aussi assez du point de vue de cet effet de maquette. Son contenu ne me plaît pas toujours, mais ce n'est pas mon entreprise, et je n'y suis qu'invité. Quand on regarde dans le rétroviseur, on s'aperçoit que s'il y a bien du déchet, il y a aussi un certain nombre de papiers fort instructifs sur toutes sortes de créateurs (la revue ne s'est jamais départie de son côté catalogue de notices, en dépit de tentatives trop rares d'insérer des "news" sur des actualités non liées directement au musée de la Création Franche -mes "Billets du sciapode" par exemple, dont le principe ne fut que peu repris par d'autres dans la revue). Avec le temps, on s'aperçoit que cette publication, jamais diffusée en librairie, mais seulement au Musée et sur abonnement, aura été utile pour l'information rare qu'on peut y trouver.
Dans le dernier numéro qui paraît donc ces jours-ci, on trouve en particulier un fort intéressant article de Paul Duchein sur des dessins retrouvés de Charles Paris, cet ancien chauffeur de maître qui à partir de 1958 (si l'on suit le catalogue de l'exposition de l'Art Brut au Musée des Arts Décoratifs en 1967) se mit à dessiner sur des pierres ou des coupes de bois d'olivier (voir également le livre de Michel Thévoz, L'Art Brut, de 1975, p.73). Comme le signale Duchein, la Collection de l'Art Brut et ses différents animateurs ne parlent pas du fait que cet auteur dessinait aussi. Les quelques dessins reproduits dans la revue sont de ce point de vue une première. On sent que leur auteur prisait particulièrement les images médiévales, ou de fantasy montrant le diable, ou une iconographie en rapport avec les lutins (un "personnage" de lui évoque les gremlins du cinéaste Joe Dante - qui, lui-même, soit dit entre parenthèses, serait allé les pêcher du côté de Roald Dahl...), tout en amplifiant cette imagerie d'une façon très personnelle beaucoup plus visionnaire.
A noter également un article enthousiaste de Michel Leroux sur André Robillard, qu'il a l'habitude d'aller visiter à son domicile près d'Orléans, et un entretien de Pascal Rigeade avec Charlotte Ranson et Alexis Forestier qui sont les maîtres d'oeuvre de la pièce "performance" Tuer la Misère à laquelle Robillard participe sur scène (voir ma note du 3 juin 2008). La pièce continue de tourner. En ce mois de janvier elle est présentée à Lyon au théâtre des Subsistances, puis ira ensuite les 7, 8 et 9 avril à Bordeaux au "TNT Manufacture de chaussures". Pour l'occasion, du 28 mars au 19 avril, une exposition consacrée à Robillard se tiendra au Musée de la Création Franche.
Pour tous contacts, voir www.musee-creationfranche.com. Adresse: 58, avenue du maréchal de Lattre de Tassigny, 33130 Bègles. Tél: 05 56 85 81 73 ou 05 56 49 34 72.
(Nota-bene :CETTE NOTE EST UNE VERSION REMANIEE, DIFFERENTE DE LA VERSION INITIALEMENT MISE EN LIGNE ; remaniement intervenu le 17 février 09; les deux commentaires qui l'avaient accompagnée avant cette date ne s'appliquant plus, étant donné le remaniement des termes, ont été supprimés)
15:37 Publié dans Art Brut, Art singulier | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : charles paris, jean branciard, andré robillard, tuer la misère, création franche, art brut | Imprimer
Ces quatre premières heures...
Ces quatre premières heures de 2009, je ne les dors pas. On vient de passer la petite frontière impalpable, juste perceptible au bruit (étouffé, car je me calfeutrais) des klaxons en bas dans la rue, des clameurs lointaines. Une bougie a brûlé, une flaque de suif s’étale, la mèche carbonisée fume encore, pour peu de temps. Le passage de l’année morte à l’année nouvelle (très neuve cette année, si l’on doit se fier au neuf qu’elle contient) me fait toujours penser à l’escalade d’une pente, d’une éminence, pas grise, plutôt sombre, dans la neige, des sapins alentour, discrets en arrière-plan. On arrive au sommet, on bascule et on redescend aussi sec, comme dans le passage d’un col du Tour de France. Les années sont comme des vallées, ressemblant à des cuvettes où sont rangés les 365 ou 366 jours, bien sagement alignés, comme autant de cases qui se rempliront d’on ne sait trop quels événements toujours un peu vains au regard du temps.
Et l’on se prend à resonger à l’année 2008 qui jamais ne reviendra. Vallée au loin s’enfuyant, cuvette posée à côté d’autres cuvettes… Vu du ciel, cela ressemble à une ruche et ses alvéoles, où les abeilles de notre imagination s’agitent en tous sens afin d’en tirer leur miel.
(1er janvier 2009)
00:06 Publié dans Papillons de l'immédiat | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : 2009, ruche, imagination, 1er janvier | Imprimer
23/01/2009
Y, le pays du choix impossible
Y, le village où l'on reste hypnotisé devant un choix à jamais impossible. On est au carrefour pour toujours, incapable de déterminer la voie qu'il faudrait emprunter...
Ou bien... Y, le village dont le nom-lettre ressemble à un décolleté, le village d'obsédés figés devant des naissances galbées au balcon des gorges, au musée secret des seins à peine dévoilés...
Ou bien encore... Y, le village aux deux i fondus en un seul, dit grec, le village où l'on entend en passant des cris aigus au fond des chambres, des iiiiiiiiiii suraigus d'enfants hystériques hurlant pour des caprices sans fin....
01:32 Publié dans Inscriptions mémorables ou drôlatiques | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : y, inscriptions insolites, noms de villages insolites | Imprimer
22/01/2009
Les galéjades d'un voyageur vouzinois, plus un boucher quelque peu loup-garou...
Relevé récemment sur le blog du Petit Champignacien Illustré ce lien vers un collectionneur d'aptonymes qui publie au sein d'articles (par exemple Les galéjades d'un voyageur vouzinois) dans L'Union (Champagne-Picardie-Ardennes) ses moissons de noms prédestinants découverts entre autres dans les Ardennes.
Et puis pour continuer sur ce thème, je me dois d'insérer avec l'accord de mon correspondant (Joël Gayraud) cette indication érudite sur le patronyme prédestinant d'un boucher qui officie dans le 9-3:
" Cher Bruno,
Voici un nom prédestiné comme tu les aimes : Luc Fauveaux, boucher.
C’est le patronyme d’un excellent boucher de Parmain (Val d’Oise) qui officie tous les dimanches au marché couvert de Saint-Ouen. Loin d’être faux, son veau est des plus authentiques, mais surtout, dans Fauveaux, il y a fauve, et le prénom Luc n’est autre que le nom du loup (lukos) en ancien grec. Ce qui explique sans doute que son étal soit toujours bien pourvu en gigots, épaules et côtes d’agneau…
Amitiés,
Joël"
Oui, mon honorable correspondant écrit "nom prédestiné". Je lui pardonne cependant, tout en soulignant l'aspect inadéquat du terme, car pour moi, c'est le nom qui prédestine celui qui le porte vers des tâches, des métiers, des actions, des comportements qui sont en rapport avec, ou tout au rebours, qui l'en éloigne par esprit de résistance, de révolte, de réaction face à cette prédestination (comme dans l'exemple de ce Boucherie qui tient une imprimerie à Bordeaux que j'ai déjà insérée plus avant sur ce blog...).
00:07 Publié dans Noms ou lieux prédestinants | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : petit ardennais, aptonymes, noms prédestinants | Imprimer
17/01/2009
Autoportrait cauchemardesque
00:15 Publié dans Art singulier, Photographie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art singulier, bruno montpied, baron samedi, modifications | Imprimer
13/01/2009
De Rien à l'Usine
Un nouveau vernissage à la galerie associative l'Usine, 102 boulevard de la Villette, 19e arrondissement. Une exposition, des films, des lectures, tout cela pour fêter la réédition des 50 numéros de De Rien. Je parie qu'un grand point d'interrogation se dresse immédiatement autour de vos crânes, voltigeant de ci de là dans votre intérieur bien douillet. Sachez qu'il en est de même pour moi. Je n'ai jamais entendu parler de ce De rien. Et dire qu'ils ont déjà 50 numéros à leur actif... Oserai-je me pointer à cet anniversaire de peur de devoir y trahir mon ignorance bien entendu coupable?
Quelques noms ou mots cités sur le carton d'invitation, Guénolé Azerthiope (créateur d'objets humoristiques dont on entendait parler à un moment dans Les papous dans la tête sur France Culture)... le musée Dupuytren (ses monstres dans le formol, son mystère...)... Stéphane Mahieu (auteur d'ouvrages fort plaisants chez l'éditeur Gingko comme Le phalanstère des langages excentriques -2005-, ou Le Petit Manuel de littérature d'Outre-tombe -Anthologie des tables tournantes- (2008)... André Stas, membre influent des Cahiers de l'Institut (dont nous reparlerons bientôt)... Autant d'indices que peut-être il faut oser se pointer là-bas samedi 17 ou dimanche 18, ignorance ou pas...
01:11 Publié dans Art inclassable | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : de rien, galerie l'usine, guénolé azerthiope | Imprimer
10/01/2009
Surréalisme actuel, une expo au Portugal
Je viens de recevoir en même temps que ses voeux pour 2009, de la part de Miguel de Carvalho, l'annonce d'une exposition internationale à Lagoa (Portugal) consacrée au "surréalisme actuel". Cela s'intitule Iluminaçoes descontinuas (Illuminations discontinues sans doute). Voir ci-dessous l'invitation, pour ceux qui seraient tentés de faire le voyage, ou pour ceux qui ne sont pas loin. Ajoutons qu'en France, on peut se demander pourquoi aucun lieu ne se présente pour entreprendre le même genre de manifestation avec les groupes de poètes et créateurs qui se revendiquent en France et à l'étranger d'un surréalisme continué (la Halle St-Pierre par exemple pourrait être toute désignée pour ce genre de projet à Paris):
Alcota, Aldo (Grupo Derrame) (Chile), Arrabal, Fernando (Espanha), Ávila, Sara (Brasil), Beneyto, António (Espanha), Berger, Cristian Arregui (Grupo Derrame) (Chile), Bervoets, Jan (Holanda), Bordese, Marcelo (Argentina), Bubenik, Josef (Grupo Styr Up) (Rep. Checa), Budik, Arnost (Grupo Styr Up) (Rep. Checa), Carvalho, Miguel de (Portugal), Corsiglia, Laura (Canada), Desrozier, Gilles (França), Dubois, Lou (França), Ducornet, Guy (França), Duvall, Jan Schlechter (Indonesia), Filipová, Linda (Grupo Styr Up) (Rep. Checa), Fox, Kathleen (Africa do Sul), Gamboa, Manuel (Portugal), Gazel , Amirah (Costa Rica), Girard, Guy (França), Gonçalves, Eurico (Portugal), Graubard, Allan (EUA), Guedes, Estela (Portugal), Hausner, Beatriz (Chile), Henao, Raul (Colombia), Hernandez, Rodrigo (Grupo Derrame) (Chile), Huerta, Miguel Angel (Derrame) (Chile), Kerndl, Lubomir (Grupo Styr Up) (Rep. Checa), Kremlacek, Josef (Grupo Styr Up) (Rep. Checa), Kubicek, Vladimir (Grupo Styr Up) (Rep. Checa), Labrin, Jorge Leal (Chile), Leite, Paulo (Grupo Surr. São Paulo) (Brasil), Lemos, Fernando (Portugal), Lima, Sergio (Grupo Surr. São Paulo) (Brasil), Lina, Rik (Holanda), Lohlé, Miguel (Argentina), Luz, Alfredo (Portugal), Marques, Maria Regina (Grupo Surr. São Paulo) (Brasil), Martins, Carlos (Portugal), Moraes, Deusdedit de (Grupo Surr. São Paulo) (Brasil), Mota, Rodrigo (Grupo Surr. São Paulo) (Brasil), Moya, Pastor de (Republica Dominicana), Nogueira, Luisa (Portugal), Pajurek, Vaclav (Grupo Styr Up) (Rep. Checa), Peixoto, Seixas (Portugal), Perez, Raul (Portugal), Pessoa, Heloisa (Grupo Surr. São Paulo) (Brasil), Piza, Zdenek (Grupo Styr Up) (Rep. Checa), Puga, Alejandro (Argentina), Rasteiro, João (Portugal), Roque, Fátima (Grupo Surr. São Paulo) (Brasil), Santiago, Enrique de (Grupo Derrame) (Chile), Sardan, Zuca (Grupo Surr. São Paulo) (Brasil), Searom, Anasor ed (Brasil), Simpson, Gregg (Canada), Tentindo, Virginia (Argentina), Vancrevel, Laurens (Holanda), Verdugo, Rodrigo (Grupo Derrame) (Chile), Vlad, Sasha (Romenia), Vorel, Ondrej (Grupo Styr Up) (Rep. Checa), Vries, Her de (Holanda), Wald, Susana (Hungria), Welson, John (Inglaterra), Wolf, Jan (Grupo Styr Up) (Rep. Checa), Zeller, Konrad (Grupo Surr. São Paulo) (Brasil),Zeller,Ludwig(Chile)
Je reconnais certains comme Guy Girard, dont j'ai déjà eu l'occasion de parler, ou encore Guy Ducornet, et le collagiste Lou Dubois, ces deux derniers participant par ailleurs à la revue Supérieur Inconnu de Sarane Alexandrian (qui a sorti récemment un très bon numéro spécial à signaler sur le thème du rêve, au printemps-été 2008), ou encore Sasha Vlad, créateur amateur d'expérimentations surréalistes collectives par delà les océans, Jorge Leal Labrin, peintre chilien dont je n'ai plus de nouvelles depuis longtemps...
12:04 Publié dans Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : miguel de carvalho, surréalisme actuel | Imprimer
Les "peintures idiotes" d'Anne Marbrun
Je ne sais que peu de choses d'Anne Marbrun. Des textes d'elle ont été publiés de ci de là en plaquettes et recueils chez divers petits éditeurs secrets (comme L'Oie de Cravan à Montréal, Wigwam Editions à Rennes, L'Escampette à Chauvigny -où, on l'espère, on n'est pas chauvigniste). Autrefois, aux éditions A la Fée Verte, éphémère maison d'édition de Joël Gayraud, je me souviens qu'il y eut aussi un texte d'Anne Marbrun, La Petite (édité en 1983). Qui est désormais disponible à L'Oie de Cravan. Est-ce la même Anne Marbrun qui a également publié un roman sur la Commune, Le sang des cerises? Il semble que oui.
01:31 Publié dans Art singulier | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : anne marbrun, l'oie de cravan, art singulier | Imprimer
09/01/2009
Le Griffonneur de Rouen, petit addendum
David a eu la gentillesse de nous adresser une mise à jour de l'adresse URL du blog consacré au "Griffonneur de Rouen", blog toujours intitulé "Playboy Communiste". Nous l'avions évoqué dans notre note du 21 juin 2008. Grand merci à lui et avis à tous ceux que ce personnage hors du commun, ainsi que ses inscriptions, intéressent.
Graffiti d'Alain R., Rouen, photo B.Montpied, octobre 2005
00:34 Publié dans Art Brut, Cinéma et arts (notamment populaires), Fantastique social | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : alain r., david thouroulde, pascal héranval, playboy communiste, graffiti, art brut | Imprimer
07/01/2009
Dictionnaire du Poignard Subtil
CIBLE:
Le sultan invita un jour Nasreddine à assister à un concours de tir à l'arc.
L'émir Imadeddine, chef de la garde royale, se présenta, banda son arc et lança sa flèche, qui alla se ficher au milieu de la cible.
- C'est ainsi que tire l'émir Imadeddine! dit-il fièrement, avant d'aller s'asseoir.
L'émir Salaheddine, commandant de l'infanterie, tira à son tour en plein milieu de la cible.
- C'est ainsi que tire l'émir Salaheddine! proclama-t-il.
Les grands guerriers défilèrent et touchèrent tous la cible, chacun annonçant son propre nom avec orgueil.
Le sultan regarda Nasreddine, qui se leva doucement, prit une flèche et la tira au hasard. La flèche se planta dans un arbre.
Nasreddine se dirigea dignement vers l'arbre, et dessina un cercle parfait autour de sa flèche ; puis il bomba le torse et proclama:
- C'est ainsi que tire Nasreddine! "
(Sagesses et malices de Nasreddine, le fou qui était sage, tome II, contes choisis par Jihad Darwiche, Albin Michel, 2003)
07:00 Publié dans DICTIONNAIRE DE CITATIONS DU POIGNARD SUBTIL | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : dictionnaire du poignard subtil, nasreddine hodja, jihad darwiche | Imprimer
05/01/2009
Maison folle, suite
Comme se sont empressés de me le signaler à la fois Sasha Vlad depuis la Californie et R.R. depuis le XIe arrondissement (merci à eux), j'aurais pu passer par Google plutôt que de lancer à la cantonade mes questions sur la maison folle vietnamienne. Tout est sur Google, et c'est triste quelque part, il ne reste vraiment plus qu'à trier. Ce qui nous laisse certes un bon gros travail. Mais on dirait que plus rien n'échappe à la Toile dans cette foutue réalité. On ne trouvera plus aucune surprise rien qu'en se servant de ses pieds (peut-être que je dis ça en pensant au commentaire de "Valérie A."; et bien sûr que j'exagère) au détour d'un chemin. Plus de terres vierges. A moins d'aller sur la planète Mars, ce qui ne saurait tarder (il faudra bien après le Japon, la Chine et le canton de Fribourg y aller chercher de l'art brut là-bas aussi, une fois tous les filons épuisés sur notre bonne vieille Terre).
Alors voici: cette "Maison Folle", qui a l'air d'un décor de film expressionniste allemand, est connue sur Google sous le nom de Crazy House. C'est un hôtel, bâti semble-t-il à partir d'un arbre. Plus un hôtel-arbre, ai-je lu, qu'un hôtel bâti dans un arbre. L'auteur est une architecte diplômée, donc a priori plutôt savante. elle se nomme Hang Nga, et serait la fille d'un président du Vietnam des années 80... Tout ce qu'il y a de plus respectable, comme on voit... Cette filiation lui aurait permis de garantir l'édification de ce bâtiment fort insolite poétique et naïf, tout en assurant sa pérennité, bâtiment qui n'est pourtant pas sans rappeler les architectures molles et psychédéliques des babas californiens, et loin des critères esthétiques du réalisme socialiste...
Toutes les agences de voyages qui se respectent ont le Crazy House Hotel dans leur programme d'excursions. C'est situé à Dalat, dans le sud du Vietnam, près d'Ho Chi Minh Ville (anciennement Saïgon). Son aspect est véritablement enthousiasmant, et je ne sais pas si on ne pourrait pas rapprocher cette demeure ultra romantique de l'immense terrain de récréation de Nek Chand en Inde à Chandigarh. Il y a quelque chose du belvédère chaotique d'un parc décoré de rocailles et de fausses grottes dans cette Crazy House vietnamienne. On visite l'endroit, on peut y loger (comme en France on trouve des hôtels dans des demeures troglodytiques). Chaque chambre est sous le signe d'un animal, ours, fourmi, kangourou ou tigre, représenté par une statue plutôt volumineuse à chaque fois. Les fenêtres sont toutes biscornues, aucune n'est droite. La courbe, le sinueux, l'échancré règnent là en maîtres absolus. Taper Crazy House si vous ne me croyez pas.
00:09 Publié dans Environnements populaires spontanés | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : dalat, hang nga, crazy house hotel, environnements insolites | Imprimer
03/01/2009
Info-Miettes (2)
La galerie Nuitdencre64 au 64 de la rue Jean-Pierre Timbaud dans le XIe ardt à Paris expose Claude Tarnaud né en 1922 et disparu en 1991. Il s'agit d'un poète surréaliste peu connu, c'est donc l'occasion d'en apprendre un peu plus sur lui. Sa rencontre avec les surréalistes réunis autour de Breton paraît avoir été éclair (1947-1948). Il fut lié à Brauner, Sarane Alexandrian, Stanislas Rodanski. Il semble avoir exécuté une bonne partie de son oeuvre plastique à partir de 1969 après une installation dans le Vaucluse. Là naîtront plâtres "greffés", divers objets, des collages, des oeuvres à la cire ou au brou de noix, des encres... Plusieurs livres de lui ont été réédités à L'Ecart Absolu. Expo de sculptures, peintures et manuscrits prévue pour durer du 19 décembre 2008 au 10 février 2009.
La "modeste collection" de Danielle Jacqui, "résultat d'une aventure qui dure depuis 40 ans" va être exposée dans la salle Fabre à Roquevaire-en-Provence "face à l'église" du samedi 1O janvier prochain à la fin de semaine suivante. Le vernissage a lieu à partir de 11h30 le samedi, ce qui est une information des plus essentielles. Beaucoup de noms au sommaire de cet accrochage, qui réunit sans doute tous ceux qui firent des échanges avec Danielle Jacqui tout au long de sa vie. Au hasard: Raymond Reynaud, Monique Goutte, Claudine Goux, Chichorro, Karamanoukian, Gérard Sendrey, Yvon Taillandier, John Maizels, Martha Grünenwaldt, Claudette Espallergues, Jaber, Jean-Jacques Predali, Bernadette Nel, Roger Ferrara, Marie Morel, Alain Pauzié, etc., "+ des nuls à HIE, que j'adore!", comme l'écrit Danielle Jacqui sans trop expliquer à qui elle songe en disant ces trois lettres un peu violentes... En dehors de cette exposition, Danielle Jacqui continue d'oeuvrer sur son "Colossal d'art brut", projet de décoration à base de céramique pour la gare d'Aubagne. (A noter que sur le site en question, elle reviendra sur ce qu'elle désigne par "nuls à (ch)IE(r)". Il s'agit des peintres de croûtes qu'on trouve sur les vide-greniers, avec leurs disproportions, leurs maladresses. Je sais que Danielle Jacqui fait des distingos même au sein de cette production. Elle m'a montré un jour une petite toile naïve qui était très poétique -Note du 17 février 2009).
De son côté le musée de la Création Franche à Bègles (Gironde) ne chôme pas et a décidé d'exposer les boîtes faites d'assemblages oniriques de Paul Duchein. Il est difficile de passer après Joseph Cornell et tant d'autres amateurs de la mise en boîte. Paul Duchein, esthète raffiné, y arrive en se servant de sa culture qui est grande et en tirant parti de ses goûts pour les belles choses. Un petit catalogue paraît à l'occasion de cette expo qui se tient du 12 décembre 2008 au 25 janvier 2009.
Ignacio Carlés-Tolra, vieux routier des arts singuliers, comme il est un créateur suisse, peut être accepté par le musée d'art brut suisse Im Lagerhaus de Saint-Gall (en Suisse orientale) qui ne s'occupe que des créateurs suisses à 100%... (Ca me rappelle l'Espace Hérault à Paris dans le quartier de la Huchette autrefois qui n'exposait que des artistes nés au sud de la Loire, ça faisait du monde, ils pouvaient exposer jusqu'à la Turquie par exemple mais pas les gens du Nord -qui ont pourtant dans le coeur la chaleur qu'il n'y a pas dehors, comme disait Enrico). Pour l'anniversaire de ses vingt ans d'existence (à ce que je crois avoir compris, car les informations qu'ils m'envoient sont en allemand, langue que je ne comprends absolument pas), le musée a invité Carlés-Tolra à monter quelque chose comme une rétrospective semble-t-il. Du 1er décembre 2008 au 16 mars 2009.
Les 20 ans du musée "Im Lagerhaus" (au fait sur ce musée, au tout début de ce blog, j'avais fait une note, voir ici) permettent aussi à ceux qui pourront faire le voyage jusqu'à St-Gall de découvrir la peinture naïve de l'Appenzell-Toggenburg, cette région qui s'étend au pied de la montagne magique du Säntis. Parmi les tableaux produits par les artistes autodidactes de ces contrées, on retrouve souvent des transpositions des paysages d'alpages aux verts soutenus communs dans ces régions, où sont semés, piquetant le paysage comme des masses et des formes plus ou moins abstraites peuvent piqueter l'espace d'une composition en apparence abstraite, les prés clôturés, les fermes, les vaches, les chemins blancs... Ces pentes douces sont proches du promeneur, j'ai pu le constater au cours du voyage que je fis en Suisse en 2007, comme des tableaux déjà tout faits dressés sous le ciel, immenses ready-made étendus aux dimensions d'un paysage entier.
Après les Japonais (et peut-être bientôt les Chinois?), la Collection de l'Art Brut de Lausanne va se retourner un petit peu vers son versant plus intime, à savoir l'art brut présent dans le canton de Fribourg. Et ce, du 6 février au 27 septembre 2009, autant dire qu'on aura le temps d'aller y faire un tour. Ce sera aussi l'occasion d'établir (pour la première fois il me semble, Dubuffet va peut-être même se retourner dans sa tombe!) une confrontation "expérimentale" (dixit le site web de la collection) des oeuvres de dix créateurs fribourgeois (de découverte récente) avec des oeuvres d'art religieux, populaire et ethnographique de cette même région de la Suisse (à mon sens, excellente initiative qui aurait pu être tentée depuis belle lurette). A signaler que la Collection a collaboré récemment (de septembre à novembre 2008) avec le musée Im Lagerhaus pour une expo en prêtant des oeuvres entre autres du Prisonnier de Bâle, de Hans Krüsi, etc. Un catalogue sur l'art brut dans le canton de Fribourg devrait paraître à l'occasion de l'expo, de même qu'un film de Philippe Lespinasse, devenu cinéaste officiel de la Collection, on dirait... Les créateurs présentés sont au nombre de dix dont Marc Moret, Lydie Thorimbert, Maurice Dumoulin, Gaston Savoy (on dirait un clone de Hans Krüsi, avec ses défilés de vaches poyesques), Piere Garbani, Eugénie Nogarède.
La galerie Dettinger-Mayer de son côté a décidé de montrer au tournant des deux années 08 et 09 un patchwork des artistes qu'elle défend depuis plusieurs années, photographie africaine, art tribal, peintures et dessins en confrontation: il y aura jusqu'au 31 janvier des oeuvres de David Braillon, Evaristo, Evelyne Postic, Ruzena, Pascal Zoss, Fred Deux, Bernard Pruvost, Louise-Anne Koeb, Zahra Toughraï, Marilena Pelosi, Ariel, Aurélie Gaillard, Estela Torres et des photographes africains comme Sanlé Sory ou Tidiani Shitou, etc.
Louise-Anne Koeb, Sans titre, Galerie Dettinger-Mayer
20:42 Publié dans Art Brut, Art naïf, Art singulier, Surréalisme | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : claude tarnaud, art brut fribourgeois, paul duchein, danielle jacqui, carles-tolra | Imprimer
Maison folle au Vietnam
Qu'est-ce que j'aperçois l'autre jour chez Tschann (entre nous la meilleure librairie de Paris)? Un numéro récent de la Quinzaine littéraire qui s'étalait dans un coin, attendant sagement que je tourne mes yeux vers la photo que la rédaction avait mise en couverture exprès pour les lecteurs du Poignard Subtil:
17:42 Publié dans Environnements populaires spontanés | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : louis monier, quinzaine littéraire, environnements spontanés | Imprimer
01/01/2009
Voeux
01:00 Publié dans Environnements populaires spontanés, Voeux de bonne année | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : farbus, guy hejnal, don quichotte, muralisme régional | Imprimer
30/12/2008
Un album d'images en étrennes virtuelles
00:19 Publié dans Art singulier | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : bruno montpied, art singulier | Imprimer