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14/07/2010

La sorcière qui attend

     Il y a un certain nombre de sorcières qui hantent les pages de ce blog depuis trois ans qu'il existe. En voici une que j'avais repérée avec un choc, il y a plus de 20 ans, un jour de flânerie sur les hauteurs de Cannes, zone fleurant bon l'ennui des dimanches que l'on a étendus à toute la semaine, Cannes ce mouroir pour riches.

Sieste de la sorcière, ph. Bruno Montpied, 1988.jpg
Sieste de la sorcière, ph. Bruno Montpied, 1988

08/07/2010

Michel Godin des Mers

Monsieuye X,photo MarcDécimo,1998.jpg
Photo Marc Décimo, datant sans doute de 1998 (vu l'inscription sur l'ardoise placée devant le conducteur), in Les Jardins de l'art brut (Les Presses du Réel, 2007)

     Je cherchais à le photographier depuis longtemps ce "Monsieuye X", ainsi nommé dans le livre "Les Jardins de l'art brut" par Marc Décimo, avec son attelage incroyable, fait de vélos accouplés réagencés de façon à pouvoir porter entre autres une voile rectangulaire où l'on peut lire toutes sortes de proclamations dans des lettrages de taille différente.

Michel Godin des Mers,l'attelage, photo Bruno Montpied, 2010.jpg

Place de la Nation, juin 2010, ph. Bruno Montpied des Routes

      Je me plaignais à tout un chacun de mon manque de chance, je le rencontrai (deux fois), une fois sans mon appareil photo, rue de Rivoli, et la seconde, sans le reconnaître, son attelage s'étant semble-t-il métamorphosé (replié?), le temps d'une aubade jouée à la flûte (une de ses occupations quand il ne donne pas le spectacle vociférant de sa révolte). Enfin Myriam Peignist vint et me donna le renseignement parfait. L'homme se tenait tous les 14 du mois place de la Nation (sur le terre-plein central) à Paris, ainsi que tous les vendredi soir de 20h à 24h sur le pont reliant l'île de la Cité à l'île St-Louis (pour des concerts de flûte).

Michel Godin des Mers,sa fontaine,son véhicule étonnant, ph. Bruno Montpied, 2010.jpg
Révolution civile..., place de la Nation, juin 2010, ph.BM

     Il était bien place de la Nation au rendez-vous fixé, bien en vue devant la statue de la Marianne républicaine, et ce jour-là sans le moindre chaland venu l'écouter ou seulement examiner son étonnant attelage. Ce dernier se compose d'un premier véhicule à quatre roues de vélo, remorquant à sa suite une sorte de berceau lui aussi sur roues, contenant je ne sais quel objet arborescent aux allures cancéreuses, et faisant peut-être office de parabole de l'enfance aux yeux de l'auteur. Celui-ci, qui a pour nom en réalité Michel Godin des Mers (le complément de nom maritime est de son cru, joliment trouvé non?) - ce qui balaie l'insuffisant "Monsieuye X" - se fait en effet une idée plutôt peu ragoûtante de l'enfance, témoin cette pancarte accrochée en tête de son attelage vélocipédique:

Michel Godin des Mers,détail Non aux parents, ph.Bruno Montpied, 2010.jpg 

Et bizarrement, ses parents, pourtant "traîtres à l'enfant", ce jour-là l'assistaient en silence, se tenant à l'écart comme deux vestales muettes, comme venus veiller sur lui malgré tout... L'allusion au "vol des jardins d'enfant" pouvait être en rapport avec le berceau contenant une espèce de flore pétrifiée proliférante à l'aspect inquiétant en un tel endroit.

Michel Godin des Mers,La remorque en forme de berceau, ph.Bruno Montpied, 2010.jpg
Michel Godin des Mers, la remorque en forme de berceau, un sapin desséché installé au moment de la photo à l'arrière, un souvenir de Noël? Ph. BM, 2010

      Michel Godin des Mers, qui se proclame "acteur, novateur, artisan" et intermittent du spectacle (à prendre aussi dans son sens littéral), en veut à cette société "esclavagiste" qui ne permet pas à tout un chacun de bénéficier d'un logement gratuit. N'a-t-il pas raison? Ce serait évidemment bien mieux si l'on pouvait se loger où bon nous semble sans bourse délier, dans la masure d'un pauvre un matin, dans le palais d'un prince le soir. Il porte ainsi deux casquettes semble-t-il, à la fois bateleur et revendicatif, appelant à une "révolution civile", interpellant les puissants du jour pour leur crier que la démocratie n'existe pas.

Michel Godin des Mers,la voile de son attelage, ph; Bruno Montpied, 2010.jpg
Michel Godin des Mers (qu'à part moi, j'appelle du sigle MGM...), la "voile", ph.BM, 2010

      Sa "voile", qui est en fait plutôt une série de panneaux montés les uns à côté des autres par-dessus un système de supports comprenant entre autres des lattes, sa voile contient ses principaux thèmes de réclamation, mais il distribue aussi des tracts en agitateur conséquent comme celui ci-dessous où l'on trouve une autre Marseillaise datée de 2006, nous montrant bien chez lui à travers ce détournement une certaine culture de la subversion. Cela peut aussi le ranger parmi les "fous" littéraires contemporains.

Michel Godin des Mers, tract.jpg

      Michel Godin des Mers n'est pas loin de se constituer en république autonome par défi peut-être à la république officielle qu'il accuse d'esclavagisme, elle qui a permis qu'il soit "expulsé une dizaine de fois avec destruction d'ouvrages...Grrr" (le "Grrr" est très bien je trouve). Il s'est ainsi créé un logo qui flotte au centre du drapeau qui couronne son attelage, une pomme au centre d'une étoile ceinte de rayons, à traduire nécessairement par "Ma pomme"...

Michel Godin des Mers,Ma Pomme,logo, ph Bruno Montpied, 2010.jpg

      Cet environnement ambulant est un petit pays créatif et revendicatif follement original que j'admire particulièrement. Il faut souhaiter que la maréchaussée et les bien pensants lui flanquent la paix, car ce genre de véhicule totalement  à rebours de la vogue m'as-tu-vu de notre époque est bien fait pour soulever l'irritation. 

Michel Godin des Mers, Drapeau de Ma Pomme, ph. Bruno Montpied, 2010.jpg
Michel Godin des Mers, "Ma pomme" placé au centre du drapeau, ph. BM, 2010

04/07/2010

Le pluriel des pluriels des Singuliers

     Une exposition au musée international d'art naïf Anatole Jakovsky de Nice du 2 juillet au 1er novembre qui s'intitule "Le Pluriel des Singuliers", ça ne vous rappelle rien? A moi si. Le titre servit il y a quelques années pour une série de quatre (pas plus?) manifestations qui se tinrent à Aix-en-Provence (la dernière peut-être en 2004). Je n'ai pu aller les voir, à peine ai-je pu m'en faire une idée d'après leurs catalogues plutôt bien faits (les meilleurs qu'on ait eu du reste dans la mouvance "singulière"), édités d'ailleurs par Actes Sud. Les sélections paraissaient réalisées avec soin, à la différence de tant d'autres festivals du genre amateuriste et dilettante.

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Raymond Reynaud devant deux de ses sculptures, dont "King-Kong", chez lui à Sénas, 1989, ph. Bruno Montpied

      J'ai reçu un carton d'invitation pour le 2 juillet, date du vernissage. Mais sans qu'on daigne m'en dire beaucoup plus sur le contenu de l'expo. Pas de dossier de presse sur le site www.musee-jakovsky.org en particulier, à peine quelques rares noms cités et jetés en pâture, comme ceux de Sanfourche, de Danielle Jacqui ou de Raymond Reynaud. On apprend aussi que le musée d'art naïf aurait acquis récemment une "maison" d'Auguste Forestier et une "très grande pièce de Robert Tatin". Les limites de la collection niçoise seraient-elles en train de se dilater aux confins de l'art singulier et de l'art brut (Forestier)? Le musée de Laval lui-même semble aussi aller dans ces directions, comme on me l'a récemment signalé, en créant une salle consacrée aux Singuliers. L'art naïf paraît avoir besoin d'un peu de sang frais, plus à la mode, pour redorer son blason.

      En particulier, on ne sait pas si les organisateurs de l'expo ont quelque chose à voir avec ceux qui montaient les expos à Aix (Michel Bépoix). A ceux qui auront les moyens et les disponibilités d'aller à Nice durant les quatre mois qui viennent de nous dire quels sont les créateurs représentés, et si le titre renvoie aux anciennes manifestations aixoises...    

02/07/2010

Fin de partie à la Galerie Impaire

     Même si les animateurs de cette galerie qui est une émanation du Creative Growth Center de Oakland annoncent une suite pour l'automne de leurs "projets européens", il n'en reste pas moins annoncé que la Galerie Impaire va fermer ses portes. Il n'est pas dit pourquoi. Mais chacun peut peut-être le deviner, la phynance?

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29/06/2010

Maria Angeles Fernandez, une fresquiste spontanée au beau pays d'Espagne

     Hervé Couton est un photographe de talent qui s'intéresse particulièrement aux créations populaires sur les murs de nos tanières. Il y a plusieurs années, j'étais entré en relation avec lui parce qu'il avait photographié, à peu prés au même moment que moi, les fresques naïvo-brutes que Mme Amélia Mondin avait réalisées sur les murs extérieurs et intérieurs de son logis en rez-de-chaussée d'immeuble, impasse d'Angleterre à Montauban, fresques qui en ces débuts des années 90 étaient sur le point d'être effacées (elles furent effectivement badigeonnées peu de temps après, à l'exception selon Hervé Couton de peintures du côté cour ; il reste aussi quelques peintures sur bois qui sont entre les mains de Paul Duchein qui fit beaucoup pour faire connaître Amélia Mondin ; d'autres se trouvent dans les collections de l'Aracine, à présent au LAM de Villeneuve-d'Ascq).

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Amélia Mondin, fragments de la fresque de l'impasse d'Angleterre, à Montauban, vers 1990, ph. Hervé Couton 

     Hervé Couton, par la suite, fit une exposition remarquable de photos de graffiti relevés sur les murs de l'Abbaye de Belleperche non loin de Montauban (c'est dans cette abbaye qu'eut lieu son expo du reste).

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Un des graffiti photographiés par H.C., exposition Abbaye de Belleperche, 2003

          Et voici qu'il m'envoie, sur les conseils de Laurent Danchin me dit-il (que ce dernier soit  donc poliment remercié ici) d'autres photos tout à fait intéressantes, une fois encore sur une peintre de murs. Cela se passe en Espagne, à Arguedas, petit village de Navarre, et c'est une dame peintresse sexagénaire qui fait l'objet de ce reportage en images:  Maria Angeles Fernandez, dite "La Pinturitas" (surnom qu'elle se donne et qui est, paraît-il, intraduisible ; un ami poète d'origine espagnole m'écrit que cela veut tout simplement dire "Les petites peintures", Maria "Les petites peintures" en somme). Voici quelques éléments d'information à son sujet, extraits d'un texte d'Hervé Couton qui s'intitule "La Pinturitas d'Arguedas" (version intégrale ici).

"Elle ne peint  que sur un seul et unique support, les murs d'un restaurant désaffecté situé au bord de la route qui traverse le village. Elle utilise des pots de peinture à l'eau (...) et se limite le plus souvent aux couleurs primaires. (...)

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Vivant de petits boulots pour la mairie et d'une modeste pension sociale, la « Pinturitas » se refuse de peindre sur tout autre support et pour quiconque, considérant que sa peinture doit rester à Arguedas. Théâtrale et volubile, avec un fort désir de reconnaissance, la « Pinturitas » décrit avec beaucoup de passion sa production à tout passant qui accepte de lui donner du temps. Chaque partie de cette œuvre unique raconte une petite histoire populaire locale, nationale, ou personnelle. Les thèmes évoqués peuvent aller du football où tel nom de joueur est mis en valeur, à la représentation des couleurs de tel ou tel pays en passant par des noms de villes, de personnages divers, ou par des représentations religieuses. Les barreaux des fenêtres condamnées du bâtiment ont été utilisés par elle, pour coincer et exposer des objets récupérés, mélange hétéroclite de publicités, d'articles de journaux, de bouteilles de sodas, etc. Aujourd'hui, les barreaux ont disparu, car récupérés et vendus par quelques ferrailleurs, détruisant ainsi les compositions de la « Pinturitas ». En proie au mépris et aux moqueries d'une partie de la population locale, dûs à son comportement marginal, Maria Angeles dit avoir commencé à peindre en 2000 sur les murs de ce bâtiment pour représenter ceux qui se moquaient et la raillaient. Elle raconte qu'elle a dormi un temps dans le cimetière local et qu'elle a moins peur des morts que des vivants.  Marquée dans sa vie personnelle par des épreuves lourdes – les services sociaux lui ont retiré ses enfants quand ils étaient encore jeunes à cause d'une instabilité et d'une précarité familiale -  la « Pinturitas » se serait alors réfugiée dans la peinture peut être pour ne pas sombrer.

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Aujourd'hui, rien n'arrête cette créatrice infatigable, qui s'applique, hiver comme été à transformer, enrichir, embellir et restaurer avec attention et passion ses peintures que la pluie délave régulièrement."

(Hervé Couton - avril 2010)

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      Comme on le voit l'Espagne se révèle peu à peu comme le nouveau continent de l'art immédiat (voir en particulier sur mon blog la note sur "le museo del mar" ).

 

20/06/2010

Habiter poétiquement, l'expo de rentrée du nouveau LaM à Villeneuve-d'Ascq

    LaM, c'est un sigle un peu complexe, un peu confus, mais qui sonne bien, eu égard à mon poignard subtil, outil dont l'apparent tranchant fait fantasmer certains mais qui, comme l'ont remarqué ceux qui lisent, en réalité vise plutôt à ouvrir des brèches entre des mondes que l'on s'ingénie à tenir cloisonnés. 

LaM,la partie du musée consacrée à l'art brut.jpg
L'extension du musée d'art moderne de Lille-Métropole, extension consacrée à la collection d'art brut du LaM

     Bon, on commence à le savoir que ce musée d'art moderne, d'art contemporain et d'art brut va enfin ouvrir ses portes, après un chantier de rénovation et d'extension qui a pris des années, le 25 septembre prochain. Les conservateurs du musée s'acharnent actuellement à terminer les accrochages, ce qui ne doit pas être une mince affaire. Ce musée est riche, les oeuvres conservées, du côté de l'art moderne, de l'art naïf (oui, on oublie généralement de rappeler que la collection est riche d'un bel ensemble de maîtres de cette catégorie, ce qui n'est pas anodin, étant donné les rencontres que cela pourra permettre avec l'art brut) et de l'art brut (grâce à la donation de l'association l'Aracine) sont de la plus grande qualité. 

Marguerite Sirvins,oeuvre exposée aux chemins de l'Art Brut VI, St-Alban-sur-Limagnole, ph.Bruno Montpied, 2007.jpg
Marguerite Sirvins, Les Chemins de l'Art Brut VI, à St-Alban-sur-Limagnole, (donation de l'Aracine) ph. BM, 2007

         L'exposition de rentrée, qui se tiendra du 25 septembre 2010 au 30 janvier 2011, s'appellera "Habiter poétiquement". Son titre fait écho à celui de la journée d'études qui s'était déroulée dans l'ancienne version du musée le 10 décembre 2005, "Habiter poétiquement - architectures singulières", organisée conjointement par le musée et le LAHIC. Cette fois, si un moment - et un espace? (à l'heure où j'écris ces lignes, ce n'est pas précisé sur le site du LaM - sera consacré aux "Bâtisseurs de l'Imaginaire"Monsieurr G. dans sa piscine, ph.Clovis Prévost, années 70.jpg dans un "théma" "transversal" entre art contemporain et art brut (une autre expo, intitulée de façon un peu absconse "Mémoires de performance" sur un thème d'architecture poétique contemporaine doit être montée en parallèle), la manifestation cependant devrait être consacrée à la façon dont "des artistes, mais aussi des écrivains et des cinéastes peuvent « habiter poétiquement le monde, la maison du monde » selon la phrase du poète Friedrich Hölderlin".

     A un récent colloque dans les locaux de l'INHA (sur Michel Ragon et les arts, l'architecture), un excité, manifestement venu du groupe Fluxus semble-t-il, particulièrement infatué, avait annoncé cette exposition en précisant qu'il s'agirait enfin d'une reconnaissance des artistes bâtisseurs dans un monde de l'art où il n'y en aurait que pour les habitats bruts... C'était là une façon très habile de renverser les problèmes. Car la reconnaissance des habitats populaires est loin d'avoir été effectuée par le monde de l'intelligentsia tout de même, même si la situation est peut-être en train de changer (notamment grâce au LaM). La réapparition du musée d'art moderne et d'art brut de Lille-Métropole semble coïncider avec la volonté de ses conservateurs de montrer les rapports qui existent entre les bâtisseurs populaires d'environnements poétiques et les sites créés par des artistes, de même qu'il semble que de nombreuses expo "transversales" entre art brut, art contemporain et art moderne soient également à venir (c'est déjà commencé si l'on se rappelle les expos organisées précédemment hors les murs par le LaM). La tentation est grande dans cette perspective chez certains - notamment des artistes - de se mettre à tout mélanger, en ne retenant que la dimension artistique des travaux exécutés par les créateurs de l'art brut et des environnements spontanés.

       Je n'ai personnellement pas envie de tout mélanger, et en particulier de traiter les environnements, de même que les créations de l'art brut, comme s'il ne s'agissait que de travaux d'art d'un genre nouveau (alimentant un nouveau marché de l'art, il ne faut pas l'oublier, car cela se profile derrière, voir par exemple la dernière vente aux enchères d'oeuvres de Chomo). Avec ces créations, a été peu à peu révélé le phénomène de la créativité tel qu'elle se présente de façon stupéfiante chez les prolétaires, ce qui remet en cause la division du travail telle qu'elle était jusque là instituée dans le monde des Beaux-Arts. On s'est convaincu dés lors que le génie pouvait souffler où il voulait (le fameux incognito souligné par Dubuffet), sans aucune hiérarchie, loin de toute théorie du don, sans que soient nécessaires un enseignement ou une initiation. Cette révélation, je crains que l'institution, le système corporatiste des Beaux-Arts, ne tentent de la noyer sous l'apparence d'une reconnaissance sélective de certains créateurs.

Virgili, fragment de totem, donation l'Aracine,ph. Bruno Montpied, 2007.jpg
Virgili, ancien morceau d'un des "totems" qu'il mettait dans son jardin au Kremlin-Bicêtre et qui servit longtemps de logo à l'association l'Aracine

       Dans l'exposition à venir, il est bon de songer à mettre en parallèle cependant le corpus des créations architecturales ou environnementales des artistes professionnels avec le corpus des "bâtisseurs de l'imaginaire" d'origine populaire. J'espère que cela sera instructif. A noter que le département d'art brut du LaM devrait comporter un espace dévolu aux habitats des inspirés populaires, ce qui sera une première dans un musée d'art brut, tout au moins en Europe. Quelques fragments de créations environnementales sont en effet d'ores et déjà conservés à Villeneuve-d'Ascq, comme ceux de Jean Smilowski, Théo Wiesen, Virgili, ou, plus récemment entré dans les collections (grâce à l'entremise d'un de ses héritiers et de Patricia Allio, qui l'avait fait connaître en l'exposant à Dol-de-Bretagne, puis à Rennes, avant et après son suicide) Jean Grard, dont d'importants éléments du jardin d'origine ont pu être ainsi préservés.

Jean Grard, un fragment de son environnement de maquettes et autres statues à Baguer-Pican, ph.Bruno Montpied, 2001.jpg
Jean Grard, une partie de son décor de manèges, maquettes, statues divers, tel qu'il était à l'origine à Baguer-Pican (Ille-et-Vilaine), ph. Bruno Montpied, juillet 2001

 

19/06/2010

Destructions

     L'été m'apporte des nouvelles de destructions d'environnements sur le continent américain. J'ai appris voici quelques jours, jetée bénignement au détour d'un papotage d'arrière-colloque, la nouvelle de la disparition des "cabanes" de Richard Greaves au Canada. C'était déjà en soi assez catastrophique comme information (mon informateur, curieusement, en outre, ne paraissait pas souhaiter que ce soit divulgué, au point que j'en suis à me demander si ce ne serait pas une fausse nouvelle - je n'ai pour l'heure trouvé aucune confirmation du fait ).

greaves_2.jpg
Richard Greaves, photo Mario del Curto

       Puis voici que mon camarade Sasha Vlad, depuis la Californie m'informe du péril de rasage imminent d'un site que je ne connaissais pas, la "Cathedral of Junk" (la Cathédrale des Déchets) qui est située à Austin, Texas.

        Cela ressemble à une sorte de tipi gigantesque fait d'une accumulation de matériaux de rebuts qui pourrait faire croire que cette architecture labyrinthique et babélienne était l'oeuvre d'un cousin américain de notre Bohdan Litnianski (dont la propriété, en Picardie, n'est toujours pas vendue, au fait). Tristes nouvelles en vérité. Nous avons beau être de l'autre côté des mers, chers amis américains, nous n'en regrettons pas moins que vous ne songiez pas davantage à protéger vos monuments d'inventivité spontanée. C'est vrai qu'en France, on ne fait généralement guère mieux que vous, cela dit.

08/06/2010

Un autre regard, la collection permanente de la création franche s'expose

       Du 11 juin, date du vernissage (pour les Bordelais, car cela a lieu un vendredi soir, les gens qui habitent plus loin ne sont pas invités à venir ce soir là, à moins de casser un bout de leurs RTT?), au 5 septembre, "à l'occasion de la parution d'un nouveau catalogue", voici que le fonds permanent du musée de la Création Franche est exposé avec prés de 300 oeuvres sur les 13000 inscrites à l'inventaire, le tout réparti sur les onze salles du musée. C'est le retour en force de la collection qui n'était que trés, trés partiellement montrée depuis des lustres, la plupart du temps confinée dans les trois quatre salles du fond du premier étage, où il ne fallait pas hésiter à faire un tour aprés chaque expo temporaire, dans l'espoir d'y voir surgir, ou resurgir, telle ou telle oeuvre inconnue, ou oubliée.

Jean-Louis Cerisier, Fragment organique,1974, mus. de la Création Franche.jpg

Jean-Louis Cerisier, Fragment organique, 1974

       Comment présenter cette masse d'oeuvres assez diverses il faut l'avouer (cela me plaît à moi cette variété)?

Claude Massé,des patots, musée de la Création Franche.jpg
Claude Massé, des patots comme s'il en pleuvait..., Collection du musée, ph Bruno Montpied, 2008

      Les organisateurs ont opté pour une classification par ensembles et thèmes semble-t-il. Les "pionniers" de la collection sont au rez-de-chaussée, à côté d'une salle plus spécifiquement consacrée aux créateurs classés dans les collections de l'art brut (comme Madge Gill, Louise Tournay, Benjamin Bonjour, Martha Grünenwaldt, etc - seul Michel Nedjar, il est vrai classé généralement dans l'art brut, y fait figure d'erreur, sa place étant plutôt selon moi parmi les singuliers, créateurs francs et autres "neufs inventeurs"...), dans lequel la création franche, nous dit le prospectus (non signé) de la présentation (consultable sur le site web du musée, voir plus haut), "prend sa source". Une autre salle du rez-de-chaussée est vouée à Claude Massé et à ses découvertes d'art "autre",Joseph Sagués, donation Claude Massé au musée de la Création Franche, ph.Bruno Montpied 2009,-avril-.jpg à la succession du peintre Jacques Karamanoukian, et à Gérard Sendrey, dont beaucoup d'oeuvres, à ce que j'ai découvert, aprés sa récente méga-exposition au Musée, ont rejoint la collection permanente, ce qui met un terme à son refus maintes fois réitéré de mêler sa propre oeuvre à celles de la collection qu'il avait grandement contribué à rassembler. Gérard Sendrey devient in fine un créateur franc tout à coup...

Emile Ratier,musée de la Création Franche.jpg
Emile Ratier, grande roue de fête foraine, ph. BM, sept 2009

      L'étage paraît plus labyrinthique, du moins dans l'exposé de la présentation de l'expo. On y a ménagé des espaces avec des thèmes hétéroclites, le coin des "visionnaires" ou des "rêveurs de mondes", un cabinet de curiosités (avec paraît-il des oeuvres "inclassables et insolites" - miam-miam, c'est là que j'aimerais être! - un coin "maternité et enfance", qui sent presque sa crèche... En salle 10 (cela vous prend un petit air de jeu de l'oie tout à coup cette expo), ont été parqués les "tourmentés", merci pour eux...Stani Nitkowski, (sans titre mentionné), musée de la Création Franche.jpg Les "tronches", c'est en salle 9... "L"homme du commun" (le bouseux en somme?) est en salle 5, avec ses travaux des champs, ses animaux... Et le visiteur n'aura encore vu qu'une petite partie de l'ensemble de la collection, que seule une plus grande surface, souvent annoncée sous cape, jamais effective, pourrait révélér dans toute sa munificence éclatée.

Jean Dominique, Musée de la Création Franche.jpg
Jean Dominique, un "homme du commun" comme dit la présentation de l'exposition,en des termes qui deviennent presque moqueurs, et pourquoi? Ce genre d'oeuvre est plus prés de la plus grande poésie que tous les chefs d'oeuvre ciselés du monde..., ph. BM 2009

      Je n'ai pu voir l'accrochage, je ne fais ici qu'un compte rendu basé sur le dossier de presse envoyé en signe avant-coureur. Mais pourquoi ne pas faire moi aussi mon mini-accrochage à partir de quelques photos prises au cours des années? Chaque visiteur devrait ainsi avoir le droit à son accrochage perso, ses préférences, ses passerelles à lui, ses analogies, ses confrontations d'une oeuvre face aux autres, etc. Pourquoi pas?

BM,Les-masques-de-la-mort-roug-colMCFl.jpg
Bruno Montpied, Les masques de la mort rouge, 35x27cm, collage et technique mixte sur papier, Musée de la Création Franche
Guy G.-Peinture-au-musée-de-la-CF,.jpg
Guy Girard, peinture à l'huile, anagraphomorphose sur la signature de René Char, ph BM, 2009, musée de la Création Franche
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Alain Garret, La diligence de Gustave, Musée de la Création Franche, ph BM, juillet 2008
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Cathy Massé, Rêve, déc.1985, Musée de la Création Franche, ph. BM, avr. 2009
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Pépé Vignes, 1979, Musée de la Création Franche, ph. BM, mars 2009
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Marilena Pelosi, dessin sans titre, 2001, Musée de la Création Franche, ph. BM, avr. 2009
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Jean Tourlonias, "Spéçiale Gérard Sendrey", 1996, Musée de la Création Franche, ph. BM, juil. 2008 
 

     

06/06/2010

Info-Miettes (8)

Un peu de poésie dans un monde de bruts

     Pierre Gallissaires publie un recueil de ses poèmes écrits entre 1979 et 2009 sous le titre Le dit du poème parmi d'autres aux éditions Aviva (la vie va?), basées à Bègles (tiens?). Plus connu jusqu'à présent comme traducteur d'allemand (on lui doit entre autres une traduction d'après L'Unique et sa propriété de Max Stirner), Pierre Gallissaires écrit aussi des poèmes et depuis fort longtemps (il publia des recueils autrefois chez Pierre-Jean Oswald, Guy Chambelland, ou Nautilus Hambourg). Leur couleur tire plutôt du côté d'un certain goût pour les jeux de mots, les instants de rien, les constructions mentales qui déroulent leurs magnifiques paysages abstraits dans l'âme des lecteurs. Voici deux d'entre eux, le premier tel un haïku:

le calme plane une route

se perd

dans le lointain surnage un cil

 

tel un beau ténébreux

Couverture Le Dit du Poème parmi d'autres de Pierre Gallissaires, 2009.jpg

le pas le pain

perdus

 

cailloux froissés

 supplient

 

et déjà le fagot sent la braise des bois

 

Livre relié 88 p, 14x21,5, couverture vergé. Bon de commande: éditions Aviva, 84, rue Amédée-Berque, 33130 Bègles, tél/fax: 05 56 85 58 63. Prix 13€, envoi franco de port dès réception de la commande accompagnée du réglement aux éditions Aviva.

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Vous avez dit Biz'art?

     Encore un calembour sur l'art, têtes de l'art, bab'art, tôt ou t'art, caf'art, etc, y a encore de la m'artge et de la pl'artce pour d'autres. Mais trêve de tartquineries (sinon, je vais encore me faire traiter de poignartdeur pas subtil, cette raillerie venant facilement sur le clavier chez les petites âmes pas finaudes du web), ce lieu (cette association), basée au Vaudioux, entre Dôle, Pontarlier et Lons-le-Saunier, dans le Jura, à ce que l'on m'a assuré de diverses directions, montre de temps à autre des expositions d'art singulier choisies avec le minimum d'exigence requis pour que l'art dit singulier ne se retrouve pas une fois de plus décrédibilisé par des nuées de têtes à Toto toutes interchangeables. 

 
Jean Branciard,Catamaran noir.jpg
Jean Branciard, Catamaran noir, photo Bruno Montpied, 2008

     Cette fois, on retrouvera au Vaudioux les constructions en assemblage de matériaux naturels, "tracteurs de mer" et autres esquifs branlicotant de partout de Jean Branciard, dont j'ai déjà parlé ici, ainsi que l'incontournable Joël Lorand, Alain Lacoste, Serge Vollin, les Staelens (c'est un couple aux travaux rougeâtres particuliers), plus d'autres créateurs encore que je ne connais pas bien. On ira se renseigner davantage en se connectant sur le site de Biz'art-Biz'art.

L'expo est du 1er juin au 30 septembre, tous les jours de 14h à 19h (vernissage dimanche 13 juin de 14 à 19h aussi). Biz'art-Biz'art, 2 chemin Prayat, 39300 Le Vaudioux, tél: 03 84 51 63 36.

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Quand l'art naïf se cache dans les algues?

      De passage récemment dans la région de Cherbourg, je suis passé en coup de vent, ce qui dans la région est plutôt banal, à quelques centaines de mètres de l'île de Tatihou en compagnie de Romuald Reutimann, l'émérite animateur du foyer d'arts plastiques de La Passerelle. Les heures de cabotage de la navette qui mène à l'île ne collant pas avec notre emploi du temps de ce jour-là, je me suis rabattu en désespoir de cause, au guichet d'embarquement, sur des cartes postales éditées apparemment par le musée maritime de Tatihou qui organise de temps à autre de stimulantes expositions en rapport avec l'univers maritime. Une a particulièrement attiré mon attention, c'est une reproduction de planche d'alguier (herbier, c'est pour les "herbes") où l'on voit un serpent plutôt naïf s'enrouler autour d'une algue. Comme le début d'une oeuvre faite à partir d'un collage de matière naturelle, ce qui n'est pas usuel, il me semble.

Alguier de M.Doublet,coll. Musée maritime de Tatihou, ph Jacques Blondel.jpg
Alguier de M. Doublet, coll. musée maritime de Tatihou ("algues marines récoltées dans le Nord-Cotentin au début du XXe siècle", dit la légende de la carte ; photo Jacques Blondel)
 
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Fernand Michel le retour, avec ses imaginaires zincifères
 
 
 
      Fernand Michel, on ne sait pas grand-chose sur lui. Il fut exposé à la galerie des Mages d'Alphonse Chave à Vence dans les années 60 et 70. Il faisait partie du Petit Musée du Bizarre à Lavilledieu en Ardèche (que devient la collection de ce musée, depuis la disparition de son maître d'oeuvre Candide, alias Serge Tekielski, on aimerait le savoir ?). Il fut montré aussi aux expos Les Indomptables de l'art à Besançon en 1986, et Art Brut et Cie à la Halle Saint-Pierre en 1995-1996. Une notice du catalogue de cette expo donna du reste quelques éléments biographiques à son sujet. Né en 1913 dans les Vosges, en marge de son métier de relieur (qui lui fit croiser la route du typographe-poète Jean Vodaine), il se mit à sculpter et à assembler le zinc vers 1962. Retraité, il s'était installé à Montpellier. Son oeuvre, au début consacrée à la représentation de paysages, évolua bien vite vers des personnages féminins à connotation érotique le plus souvent (c'est d'ailleurs toujours ces statues-là qu'on trouve en reproduction).
 
Fernand Michel, couverture du livre de Frédéric Allamel, bulletin de souscription.jpg
Maquette du livre (susceptible d'être modifiée)
 
 
      On devrait très vite en apprendre davantage à son sujet grâce au livre que Frédéric Allamel lui a consacré, Imaginaires zincifères, Variations autour de Fernand Michel, artiste-zingueur, sorte de "catalogue irraisonné", qui devrait incessamment paraître à l'égide d'une Association pour le Développement de l'Art Brut et Singulier basée à Montpellier. Le bulletin de souscription que j'ai reçu indique notamment : "de ses poupées plantureuses et vertigineusement fétichistes jusqu'aux gravures illustrant des poèmes de Raymond Queneau, en passant par l'architecture et ses "peintures d'une nuit", ce livre est conçu à la manière d'un catalogue irraisonné, au diapason du personnage, flamboyant et qui fit de l'esprit surréaliste un art de vivre de tous les instants."
La parution semble annoncée pour l'automne. 180 pages, 21x29,7 cm. Un exemplaire: 28€ + 5€ de frais de port. Chèque à l'ordre de ADABS, 68 rue de Lunaret, 34000 Montpellier, tél: 04 67 66 32 40 et fax: 04 67 60 60 27.
 
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Tout finit sur le carreau
 
 
       Je me balade dans un déballage de brocanteurs et autres antiquaires au Mans il y a peu. Je m'arrête un instant devant des maquettes de bâtiments de village, ou de véhicules, un tank, un camion de pompiers...
Vestiges d'un musée de maquettes, Le Mans, ph.Bruno Montpied, 2009.jpg
Le Mans, ph BM, déc 2009
 
       Interrogé, le marchand indique une vague provenance (comme toujours, l'origine est imprécise, se perdant dans les limbes des acquisitions pas toujours retraçables), cela viendrait d'Ille-et-Vilaine, l'auteur aurait confectionné chez lui ce petit musée de miniaturisations, il y a une église (de "Ladeu"?), les pompiers seraient d'un lieu orthographié de façon peu claire, "Thourie" (?), on voit des avions, des batteries de canon, une diligence, un relais. Les maquettes étaient éclairées... L'ensemble n'est pas très inventif, juste un peu curieux d'un point de vue sociologique, digne de ces infos-miettes... J'en parle ici à tout hasard...
 
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Exposition de Raymond Humbert, "Paysages et autres objets", dessins 1980-1990
 
      Du 12 juin au 19 septembre 2010, la Galerie du Musée des Arts Populaires à Laduz (nouveau nom de ce qui est toujours la collection Humbert) organise une nouvelle exposition consacrée au peintre fondateur du musée rural de Laduz, pour les vingt ans de sa disparition. Vernissage le samedi 12 juin 2010. Voir le site du musée.
 
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Exposition Loïc Lucas à la Galerie Christian Berst
 
Loïc Lucas, Galerie Christian Berst.jpg
 
      Nouvelle trouvaille, Loïc Lucas, dont la galerie Christian Berst dit qu'il a déjà intégré de grandes collections d'art brut, les choses vont donc vite. Dans ce domaine, les personnes averties de ces formes d'art autodidacte sont bien souvent en effet les premiers sur la terra incognita, découvrant et mettant l'expression découverte à l'abri d'une collection. Le public n'arrive qu'après...
Loïc Lucas, Galerie Christian Berst.jpg
 
      Ce sont des dessins fort colorés dans des bleus, des roses, des pistaches, des caramels comme comestibles, trés ornementaux a priori, mais dont les sujets ne sont pas purement décoratifs en réalité, plutôt en rapport qu'ils sont avec des références corporelles, comme une fantomatique coupe à l'intérieur d'organes, de tissus cellulaires, coupe qui prendrait des allures de voyage fantastique rose bonbon.
 
L'expo se tient du 11 juin au 17 juillet prochain. Voir le site de la galerie.
 
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Vincent Prieur, et Paul d'Haese
 
       Le second est photographe, mais c'est plutôt le premier qui nous intéresse (même si le bloc de pierre posé sur l'eau dans l'affiche de l'expo est bien belle...), ainsi que le lieu où ils sont exposés tous les deux, un "Petit Casino d'Ailleurs" situé à Ault, entre Le Tréport et Amiens, ce même Ault où vit Caroline Dahyot dont je vous ai trés récemment parlé (voir quelques notes plus bas). Le petit casino en question paraît animé par Mme Hélène Busnel, danseuse, chanteuse, sculpteur, et amie de Frank Horvat, grand photographe vivant. Il semble s'y montrer de jolies choses à Ault, village perdu de Picardie, grâce à elle, entre autres.
EXPO Casino 2010.jpg
 
       Vincent Prieur m'avait frappé par quelques figures bizarroïdes faites de bois trouvés sur les plages qui avaient été exposées dans la biennale "Brut de Pinsé" à la Galerie du Quartz de Brest en 2000, voici exactement dix ans (j'en avais parlé dans une note brève de mes "Billets du Sciapode" dans Création Franche).
 
Vincent-Prieur-Brut-de-Pins.jpg
Les oeuvres en bois flotté, reproduites d'après le catalogue de l'expo Brut de Pinsé, 2000
 
      Il se présente toujours comme "un penseyeur", c'est-à-dire comme un créateur qui travaille à partir de matériaux trouvés sur l'estran à marée basse. Ses oeuvres ont évolué vers plus de joliesse naïve et enfantine, moins âpres que celles aperçues à Brest (où, à l'époque, il était présenté comme faisant partie aussi de la collection de la Fabuloserie).
 
Vincent Prieur petitcasinodailleurs127347774146_art.jpg
Vincent Prieur, 2010
 
L'expo dure tout le mois de juillet et tout le mois d'août. Voir le blog du Petit Casino
 
 
       

29/05/2010

P.Canis, sculpteur naïf et inconnu

     J'ai chiné ce samedi matin dans les coursives du Parc des Princes, où il n'y avait pas foule, chez un sympathique antiquaire spécialisé en art populaire et peinture, M. Bertrand Doumayrou (merci à Philippe Lalane pour m'avoir mis sur sa route), un joli petit portrait traité en profil émergeant du bois, représentant un poète auvergnat, A. Vermenouze, comme il est dit sur le texte gravé en haut du médaillon. Au bas du portrait taillé dans un cadre ovale, on lit une signature, "P. Canis". Etant donné la signification de ce mot en latin,  il s'agit donc d'un créateur qui a du chien. Ouaf, ouaf, ajouterai-je.

P.Canis,portrit d'Arsène Vermenouze, sans date, ph. Bruno Montpied en 2010.jpg
P. Canis, A. Vermenouze, poète auvergnat, sans date, coll. BM

      C'est un beau travail à la fois naïf et plein d'assurance, fouillé, prouvant que la naïveté peut rimer avec une certaine maîtrise des moyens. Le profil à la barbiche bifide comme flottant au vent fait penser à une espèce de Don Quichotte. Notre expert es-culture cantalienne, Emmanuel Boussuge, dûment interrogé, nous renseigna in petto (non, petits ignorants, ça ne veut pas dire qu'il était ce jour-là victime de maux de ventre): "A.", cela vaut pour "Arsène". Arsène Vermenouze, poète catholique, patriotique, et occitaniste (ah, ah, je sens que le sieur de Belvert dresse à présent les oreilles), ancien majoral du Félibrige, correspondant de Frédéric Mistral, qui trouvait le dialecte de ce poète tout de même trop compliqué pour ses amis provençaux. Sur internet, on trouve de ci de là  des notices sur ce grand homme oublié, qualifié généralement de "plus grand poète auvergnat" (toujours cette manie des palmarès à l'emporte-pièce). Je ne suis pas pressé de vérifier l'affirmation en cherchant à lire quelques pièces de l'écrivain né à Aurillac. Seul compte pour l'immédiat ce charmant portrait. Et que les Vermenouziens, croisant du côté de ce blog, apprennent en même temps qu'il existe un portrait non conformiste de leur poète cantalien, taillé de la main d'un homme simple et inspiré, dont la sincérité s'est exprimée à travers une oeuvre grâcieuse.

      Qui aurait des renseignements à communiquer sur d'autres oeuvres éventuelles de ce "P. Canis"? Sculpteur naïf auvergnat, ou d'ailleurs?

26/05/2010

Art populaire et archéologie

 
      Cette note est la refonte complète d'une précédente version, mise en ligne originellement en mars 2010 ; les commentaires qui la suivaient ont du coup été supprimés, puisqu'ils ne se rapportaient plus à la même note.

 

Glozel,tablette d'argile, publiée dans le dictionnaire des Trucs, éd. Pauvert, 1964.jpg 

A Glozel, ce genre de tablettes avec un alphabet inconnu laisserait supposer que les traces les plus anciennes d'écriture sont en Auvergne... ; reproduction extraite du  Dictionnaire des Trucs de Jean-Louis Chardans (Pauvert, 1964)

      Les trouvailles archéologiques du musée de Glozel, en Limagne (voir sur le web les informations nombreuses sur la question avec le débat qui dure depuis 70 ans entre pro-glozéliens et glozélo-sceptiques) - dont je ne suis pas en mesure de juger si elles sont à prendre au sérieux ou non - me sont toujours apparues intuitivement cousines de celles d'un Robert Garcet, ce visionnaire naïf qui en Belgique (voir le film de Clovis Prévost sur lui) était persuadé qu'il y avait sous sa maison des traces d'une civilisation ancienne sculptées dans des silex qu'il amassa muséologiquement sous une tour maçonnée de grosses pierres, que couronnaient des bêtes fantastiques venues tout droit de bestiaires alchimiques. Ou de cet autodidacte savant qui dans le bourg de Croix-de-Vie en Vendée pensait que l'Atlantide se trouvait au large des côtes vendéennes. Pour le prouver il présentait d'innombrables tablettes, fossiles, moulages, empreintes, croquis divers, serrés comme des harengs sur le mur de sa propriété appelée "le Castel Maraîchin".

 
Castel Maraîchin,Croix-de-Vie, années 1920, carte postale ancienne, coll. BM.jpg
L'entrée du "Musée de plein air" du Castel Maraîchin à Croix-de-Vie dans les premières décennies du XXe siècle... Coll. BM
Vénus-de-Quinipily,-2001.jpg
Vénus de Quinipily, ph. Bruno Montpied, 2001

            L'énigmatique Vénus de Quinipily elle-même, près de Baud dans le Morbihan, massive et de style incontestablement naïf, dont on ne connaît pas l'auteur et que l'on interprète comme une représentation d'Isis (voir le Guide de la Bretagne Mystérieuse chez Tchou), pourrait bien être, au lieu d'une trouvaille archéologique, une extrapolation en trois dimensions, inspirée de quelque iconographie ancienne, dont l'auteur serait un autodidacte resté anonyme. Les collections conservées au musée de Glozel, avec ses tablettes d'argile aux signes passablement sommaires, comme enfantins, ses idoles bisexuées rigolotes, d'un niveau artistique assez proche d'un certain art brut louchant du côté d'une stylisation archaïque pourraient sans difficulté entrer dans la catégorie de l'archéologie populaire visionnaire si ne s'y attachaient pas par ailleurs les convictions de divers auteurs qu'il s'agit là d'une découverte scientifique (le débat là-dessus paraît curieusement loin d'être clos).

Glozel,idole bisexuée, publiée dans le dictionnaire des Trucs, éd. Pauvert, 1964.jpg

Idole bisexuée, cf Le Dictionnaire des Trucs de Jean-Louis Chardans (Pauvert, 1964)

11/05/2010

Le discernement selon Joe Ryczko

       Voici ce qu'écrivait Jean Dubuffet dans Honneur aux valeurs sauvages (conférence de 1951, publiée en 1967 dans Prospectus et tous écrits suivants, tome I):

"(...) l'art n'est passionnant - à mes yeux du moins - que pour autant qu'il livre d'une manière très véridique et immédiate - tout chauds, pourrait-on dire, et tout crus - les mouvements d'humeur de l'auteur. Il faut qu'il soit une projection immédiate de ces humeurs de l'artiste, une projection que rien ne vient fausser."

       Jean Paulhan, décrivant son voyage de 1945 en Suisse en compagnie de Le Corbusier et de Jean Dubuffet (qu'il appelle Limérique dans le livre), a écrit de son côté:

"Le peintre Limérique porte les cicatrices et le crâne écabossé d'un enfant. Il vit content. Ses colères sont violentes et ses haines durables, mais à tel point privées de motif qu'on perdrait son temps à tâcher de les prévenir. Il est poursuivi de l'idée d'un art immédiat et sans exercice - un art brut, dit-il - dont il pense trouver le rudiment chez les fous et les prisonniers. S'il apprenait qu'en quelque canton, un ours s'est mis à peindre, il y bondirait." (J.P., Guide d'un petit voyage en Suisse, Gallimard, 1947)

     Comme on le voit le terme "d'art immédiat" a des cautions que l'on peut s'accorder à juger respectables... Lisons à présent ce qu'un grand penseur libournais a néanmoins jugé opportun de déposer au bas de son blog intitulé si adéquatement Les friches de l'art (en tentant de me remonter les bretelles avec une certaine méchanceté, alliée à la plus mauvaise foi, se moquant de mon patronyme avec une finesse et une légèreté inégalées, me montrant bien par là à quel point j'en manque ; et tout cela à la suite de la note taquine que j'ai récemment consacrée à l'ouverture de son blog):

     "Depuis un quart de siècle, l'animateur du blog à l'enseigne de l'unijambiste, un vieux de la vieille des chemins creux et bas côtés, fait des tentatives pathétiques pour imposer l'art immédiat, concept fumeux dont il a fait son mètre-étalon, pour mesurer on se demande bien quoi. " (Joe Ryczko, dans son Billet d'humeur du 2 mars dernier)

      Mais mon bon Joseph, ça fait pas un quart de siècle, mais bien plutôt 65 ans, que ce vieux spectre, que tu trouves "fumeux" avec le discernement qui te caractérise, hante les consciences des poètes modernes. Va falloir vraiment remonter tes pendules... (1)

Horloge Miro,site Paul et Lea.com.jpg

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     (1). A noter que l'animateur des friches n'a pas cru bon de laisser passer le commentaire que j'avais tenté d'accoler à la suite de son "billet d'humeur", dans une demande pourtant naturelle de droit de réponse. Il montre bien là son sens profond de la démocratie.

 

08/05/2010

Un bateau dans la ville, le "Museo del Mar"

     Comme me l'écrit Philippe Lespinasse en me signalant le site dont je veux vous parler, autrefois les bateaux partaient vers les terres inconnues, maintenant, c'est l'inconnu qui part vers les bateaux. Merci également à Pierre Vidal qui a "passé" l'information auparavant à Philippe.

José Maria Garrido, blog et photo Hector Garrido, 2004.jpg
Museo Del Mar à Sanlucar de Barrameda, photo blog ©Hector Garrido, 2004
José Maria Garrido, blog et photo Hector Garrido, 2004.jpg
Vue du sommet du Museo del Mar, © blog Hector Garrido, 2004

      A Sanlucar de Barrameda (entre Cadix et Séville en Espagne,  au bord de la mer) habite un monsieur, ancien pêcheur semble-t-il, José-Maria Garrido, sur lequel existent quelques informations en espagnol sur le blog d'Hector Garrido (son fils? En tout cas, un excellent photographe et naturaliste, voir son autre site ici), avec des photos extrêmement évocatrices. On y voit en pleine ville un bâtiment transformé en navire. Qui m'évoque immédiatement, quoique en plus âpre cependant, la maison au sommet transformé en pont de bateau que l'on voit un moment dans Mary Poppins (si l'on se souvient, y habite un ancien capitaine qui tire le canon pour marquer les heures).

José Maria Garrido, photo blog Hector Garrido, 2004.jpg
José-Maria Garrido, seul maître après Dieu, photo © Hector Garrido, 2004

       La maison de Garrido (âgé de 80 ans, si l'on en croit une information venue du "Petit Fûté"), qui s'est élaborée sur une durée de 35 ans, a été baptisée par lui "Musée de la Mer". Elle contient sur ses murs 80000 escargots de mer (l'escargot, de mer ou plus terrestre, est un symbole emblématique des créateurs centrés sur eux-mêmes, créateurs d'environnements qui sont leurs coquilles, avec lesquelles ils fusionnent et dont il paraît impensable de vouloir les séparer), coquilles mosaïquées sur les parois du musée, émaillées également de sentences nées de "la conscience populaire" (comme dit Hector Garrido) ou de phrases d'auteurs connus, de maquettes de bateaux et autres vues marines. On voit le créateur à un moment couché dans une niche semblable à celles que l'on trouve sur les bateaux. Pierre Vidal signale que José Maria Garrido aime aussi écrire des poèmes sur des caisses à poissons.

José Maria Garrido,blog et photo Hector Garrido, 2004.jpg
José-Maria dans son lit, photo © Hector Garrido, 2004

       Je trouve cette entreprise géniale. Et dire que la mairie, aux fins d'opération immobilière dans le quartier envisagerait de faire disparaître ce monument... On pense à l'immeuble des Monty Python, dans leur film Le Sens de la Vie, qui arrache ses amarres fichées dans les trottoirs de Londres, emporté par les bâches des peintres en bâtiment qui le recouvrent, se métamorphosant en voiles. On se prend à songer aussi à ce que pourraient devenir les villes si chacun de ses habitants se mettait à construire une maison dans la forme de l'objet qui le hante, chaussure, fleur, locomotive, ballon, chope de bière, etc. Le projet de José-Maria Garrido est tout à fait voisin - sauf que cela se passe cette fois dans la vie - des projets ghanéens funéraires qui consistent à enterrer les défunts dans des cercueils dont les formes symbolisent leur existence. Que  la présence du Museo Del Mar m'ait été signalée par Philippe Lespinasse, par ailleurs auteur de film et de texte sur les cercueils à images du Ghana (voir note du 3 mars 2010), me paraît tout à fait en harmonie.   

 

 

04/05/2010

Tirer les vers de la bouche, tirer les vers des yeux

    Pas besoin d'une glose ici, la photographie parlera seule. Juste pourra-t-on ajouter que l'image est à verser dans la catégorie des visages en trois points, plus touchants d'êtres ainsi dûs au hasard que la moindre des "têtes à Toto" des artistes dits singuliers.

Tirer les Vers de la bouche,ph.Bruno Montpied,St-Malo, 2010.jpg
Photo BM, Saint-Malo, 2010
     Et comme certain commentateur -voir ci-dessous- ne paraît pas voir ce que je veux dire en matière d'artistes singuliers, je republie sur ce blog l'article que j'ai publié en avril 2008 dans Création Franche n°29:

"L'Attaque des Clones       

le-bon-grain-010.jpg
Dessous de tabouret à traire, ph. Philippe Lalane, 2007

         Je demandais il y a tout juste vingt ans (Actualités de l'art brut dans Artension, deuxième série, début 1988) que l'on fasse davantage de place aux singuliers de l'art en tous genres,  pas seulement à l'art brut.

      Ce dernier triomphe aujourd'hui internationalement.

   C'est loin d'être le cas pour ceux qu'on a rangés tantôt dans « l'art singulier » (renversement des termes popularisé dans le Sud-Est par les festivals organisés par Danielle Jacqui et feu Raymond Reynaud à Roquevaire puis à Aubagne), tantôt dans la Neuve  Invention (terme usité à Lausanne, forgé par Dubuffet et Thévoz, et qui n'a pas rencontré beaucoup de succès, on doit l'avouer) ou encore dans la Création Franche chère à Gérard Sendrey dans son site-musée éponyme à Bègles. Outre-Atlantique, cependant, sous le terme d'Outsiders, parviennent à se faire reconnaître nombre de créateurs que l'on rangerait ici plutôt du côté des Singuliers. C'est en France que la sauce ne prend pas...

       Les Singuliers de l'Art, c'était une façon au Musée d'Art Moderne de la Ville de Paris en 1978 de créer un rassemblement qui englobait à la fois l'art brut, les créateurs d'environnements et tous les marginaux coincés entre professionnels de l'art contemporain et création autodidacte sauvage. L'exemple des expositions surréalistes bien sûr était passé par là et inspirait ce genre d'initiatives (qui fut relancé à Paris une autre fois pour Art Brut et Compagnie à la Halle Saint-Pierre en 1995-1996). Ce type de grande exposition dans des lieux aux moyens limités n'est bien entendu pas facile à monter et cela explique qu'on n'ait pas beaucoup  renouvelé l'expérience. Mais d'autres raisons sont à invoquer dans ce qu'il faut bien appeler aujourd'hui un certain déclin, voire une certaine déliquescence du corpus qu'on cherche à nous faire avaler comme étant de l'art singulier.

        Les festivals, après Roquevaire, toujours plus chargés de poncifs en matière d'art de la récupération (ça porte bien son nom...), se sont multipliés dans des petites villes à l'écart ou non des grandes routes, Banne en Ardèche, plus récemment à Lyon qui a sa "Biennale de l'art singulier", à Grenoble aussi dans le temps, à Praz-sur-Arly, ou du côté de Montpellier (je ne pense pas aux expositions de la collection d'Alain Bouillet qui est un amateur exigeant ; je mets également à part les expositions du Pluriel des Singuliers qui se tinrent, semble-t-il avec un certain soin, à Aix-en-Provence), présentant toujours plus de seconds couteaux de l'art vite fait sur le gaz... Paris eut son Printemps des Singuliers quelque temps, avec des accrochages fourre-tout où une chatte n'aurait pas retrouvé ses petits. Depuis quelques années, on voit aussi un salon appelé La Métamorphose des matériaux se tenir dans la capitale, se faisant une spécialité de recycler ad nauseam les récupérateurs de la récupération dans un vaste fourbi dégénérant en salon de l'art décoratif puisé dans les poubelles (très chic et très rentable).

       Parmi les raisons de ce galvaudage généralisé de l'art singulier, il y a eu aussi l'influence délétère d'un magazine comme Artension qui n'opère plus aucun tri vis-à-vis des œuvres bâclées qu'on lui propose, les motivations profondes de ce magazine semblant être devenues avant tout d'ordre commercial et donc le menant à toujours plus de complaisance à l'égard du premier faiseur venu (je me souviens encore comment m'a été présentée l'offre de figurer dans leur "Bible de l'Art singulier", il fallait d'abord s'engager à acheter dix exemplaires du livre, sinon il était fort probable que je n'aurais aucune chance d'y figurer ; inutile de dire que je ne donnai aucune suite à cette proposition et que je ne fis en conséquence nullement partie de cette bible, anti-référence parfaite aujourd'hui en matière d'art singulier).

      Sévit également en France un manque d'exigence et d'esprit critique érigé à la dimension d'une mode, popularisé et massivement diffusé par le grand outil de décervelage national qu'est la télévision.

      Tout cela combiné a progressivement été cause d'une mise sur le circuit d'un nombre toujours plus croissant de sous-produits, d'ersatz d'art singulier. Le moindre petit artisteux un tant soit peu narcissique, s'il a croisé un jour la route d'un épigone de Chaissac vulgarisé par quelque télé ou plumitif locaux, peut se mettre à fabriquer des têtes à Toto de façon quasi industrielle, finissant par remettre totalement en question les mots art brut (que l'on emploie à tire-larigot), tandis qu'art singulier, n'en parlons même plus!

        Je revois encore Simone Le Carré-Galimard ronchonner en descendant l'escalier de la Halle Saint-Pierre, peu de temps avant sa disparition, regimbant contre tous ces artistes nés de la dernière pluie de grêlons gros justement comme des têtes à Toto. Quoi de plus facile que de faire de "l'art brut" avec le moindre débris récupéré dans la rue ? Donnez-moi trois doigts, un peu de pâte molle, et je vous colle un de ces visages primitifs, moi[1]... On s'amuse, on se fait plaisir, on joue à l'art.

       C'est bien une décadence complète et absolue. Il faut désormais que les créateurs authentiques, s'il en reste, se rassemblent et résistent contre cette attaque des clones ! Il faut surtout créer de nouveaux espaces alternatifs et les confier à des incorruptibles de l'art ! Et republier des listes comme le faisaient les surréalistes. Lisez... Ne lisez pas... Regardez... Ne regardez pas... ! Tant pis si des esprits grincheux viennent nous traiter de donneurs de leçons et de maîtres d'école. Ce sont justement les mêmes qui sont les responsables de cette invasion de primitivisme avarié qui finit par tuer tous les espoirs que l'on mettait dans ces alternatifs de l'art, apparus dans les années 70, inspirés par l'exemple moral, social et esthétique des créateurs de l'art brut que ne tourmentait aucune vénalité.

      Qu'attend-on donc de l'art ? N'est-il qu'un supplément d'âme ? Une force décoratrice ? Ou bien le miroir d'une révélation-révolution ? Un état d'esprit chargé de réenchanter notre vie quotidienne non seulement par son langage mais aussi par un comportement qu'il implique, bien loin du désolant "travailler plus pour étouffer davantage" que voudraient nous fourguer les nouveaux riches au pouvoir actuellement ?

Bruno Montpied, janvier 2008.


(1) La photo d'un dessous de tabouret à traire que j'insère au début de cette tribune aura davantage de chances de figurer un visage, par hasard, que le moindre visage traité en poncif de l'art "brut" par ces artistes si peu singuliers nés de la dernière pluie."

02/05/2010

Encore la Sirène

      Je viens de recevoir communication de l'apparition d'une projection lumineuse en forme de sirène sur le mur intérieur d'une maison dont j'ai déjà parlé en novembre 2008 sur ce blog. Si l'on veut se souvenir, devant cette maison, pousse un rosier de la variété de roses Mermaid (sirène en anglais). La mère de la jeune personne qui a photographié la dite projection lumineuse de ces derniers jours est décédée lorsque cette jeune fille avait douze ans. Elle prisait particulièrement la thématique de la sirène. C'est comme si elle envoyait depuis le pays d'où personne ne revient des signes d'affection, des clins d'oeil de l'au delà. Comme si une maison, saturée de son souvenir, était désormais hantée de fantômes aux doux aspects d'ondines.

Sirène-de-Marlais3-,avr10-J.jpg
Projection lumineuse suite à un reflet sur de la vaisselle, photo Juliette C., avril 2010
Sirène-de-Marlais-2,-avr10J.jpg
La voyez-vous bien, l'ondoyante sirène?
 

30/04/2010

A la recherche de la Mare au Poivre

     L'ami Ricordeau me signale un curieux parc de sculptures situé à Locqueltas, au nord de Vannes (tout près de cette dernière agglomération), que s'est employé à dresser sous le ciel, pendant vingt-trois ans (en secret semble-t-il, au moins dans un premier temps) un personnage plein d'humour et haut en couleurs appelé Alexis Le Breton. Des informations complémentaires peuvent se trouver sur la Toile, sur le site de Ouest-France et sur celui du Télégramme. Le créateur de ce parc où sont dispersées sur cinq hectares environ 200 sculptures sur bois et pierre parmi des arbres et autres essences rares (le parc est aussi un arboretum) est malheureusement disparu à l'automne dernier (à l'âge de 80 ans). C'est sa fille, Mme Marie-Thérèse Pasco, animatrice d'une association vouée au lieu et à la mémoire de son auteur, qui a repris le flambeau des visites du parc. Ces dernières peuvent se pratiquer le week-end selon ce qui en est dit sur le site indiqué ci-dessous et dans les articles déjà cités.

Marie-Thérèse Pasco, fille d'Alexis Le Breton, photo Ouest-France, 2010.jpg

      Alexis Le Breton paraît d'expression naïve et populaire, son inspiration est variée, empruntant à la fois aux références bibliques (Jacob sur un buffle) et à l'actualité récente (la jungle des FARC en Colombie). Original, il aimait à recevoir en tenue traditionnelle bretonne ses visiteurs.Portrait d'Alexis Le Breton en sabots et pantalon bouffant traditionnel breton, photo Association de la Mare au Poivre.jpg Il paraissait avoir un faible pour les jeux de mots aussi, son village de La Mare au Sel lui a sans doute donné l'idée d'appeler l'étang qui est au coeur de son parc originellement marécageux la Mare au Poivre (voici aussi ce qu'écrit Nathalie Jay, auteur de l'article du 30-04-10 sur Ouest-France que m'a signalé Remy Ricordeau: "Titres, rébus, épitaphes apposés aux sculptures peints sur des bouts de bois récupérés ou gravés dans de la pierre sont souvent humoristiques, parfois sulfureux, avec ici ou là quelques connotations sexuelles"). Peu d'images se trouvent sur internet pour montrer à quoi ressemble cet endroit. Celles que je mets ici sont empruntées aux sites ci-dessus nommés. Et en voici une dernière, trouvée à la fin de ma rédaction de cette note, jolie photo signée d'un monsieur Erwan, sur le site Bretagne.com.

Sculpture d'Alexis Le Breton, photo copyright Erwan, 2009, site Bretagne.com.jpg
Sculpture d'Alexis Le Breton, photo Erwan 2009 ; pas mal non? Toujours l'accordéon à l'honneur chez nos amis les créateurs populaires, c'est décidément leur instrument de prédilection, mais en l'occurrence, on en joue seins nus

       Donc, pour en apprendre davantage, chers lecteurs du Poi.Sub., comme disait l'autre, lâchez tout, et partez sur les routes....

Alexis Le Breton, sa sculpture de Jacob sur son buffle, avec Mme Pasco au premier plan, photo Le Télégramme, 2009 .jpg

La Mare au poivre, à Locqueltas, route de Bignan. Ouvert tous les samedis et dimanches de 14h à 18h. Tarif: 1 EUR (en août 2009). Renseignements au 02.97.45.94.10 ou sur http://www.landes-de-lanvaux.com/associations_locqueltas....

 

22/04/2010

Les cochons dans la boue

     Je suis allé à Cherbourg où paraît-il il n'y a que deux saisons, l'hiver et le 15 août, et figurez-vous que pour moi le soleil fut de sortie. J'ai ramené plein de photos prises dans l'atelier du centre d'arts plastiques de La Passerelle qu'anime Romuald Reutimann (voir anciennes notes). Il y a là à n'en pas douter une certaine effervescence créatrice qui paraît rare en France. Je médite quelque texte plus long à  ce sujet. Dans les limites de ce blog, et pour rester dans le sillage des impressions ressenties à chaud, je vous invite à prendre connaissance d'un petit texte d'interprétation automatique d'une des oeuvres vues à Cherbourg.

Cyrille-Augeard-Cochons-dan.jpg
Cyrille A., Les cochons dans la boue, acrylique et marqueurs à peinture, centre d'arts plastiques de La Passerelle, déc. 2008
Cortège

           Ils processionnent, bien silencieux, bien cois. Moutons de Panurge prêts à se jeter dans les flots, mais de mort lente, comme dit la chanson. La queue dressée, en forme de goupillon ou de matraque, ou d'autre chose. Est-ce l'heure de la transhumance ? Horizontale alors, car il n'y a nulle trace d'alpage, de pente à gravir à l'horizon. Il n'y a pas d'horizon pour ce cortège figé, enfermé dans ses pensées, ou son absence de pensée. Le monde est une orange qui les entoure de toutes parts, ils flottent dans le vide, ronds jolis, colorés... Des choses sans nom traînent à terre, à côté d'eux, parmi eux.

         Ils se ressemblent terriblement. Pourquoi « terriblement » ? Parce que certains pourraient les trouver monotones. Identiques, clonés. En réalité, s'ils paraissent bien bâtis sur un même modèle, ils ont leurs différences, de points, couleurs, taille. Il y a ceux qui sont clairs, et puis les plus sombres. Et encore ceux qui ne sont ni l'un ni l'autre.

         Ils font bloc cependant. Groupe soudé, car l'union fait peut-être la force, mur de rondouillards mutiques érigé pour on ne sait quel ennemi invisible sur cette feuille. Ce qu'ils ne savent pas, c'est qu'en dépit de leur apparence décorative, ils intriguent. Leur dessin va du côté d'un possible dessein, d'un mystère destiné à rester insoluble sans doute.

         Ils sont simples, mais aussi ésotériques. Du grand art, en somme.

         J'ai découvert le titre de ce dessin après l'avoir décrit : « Les cochons dans la boue ». Cochons jouets, mais où est la boue ? Dans leur âme sans doute, qu'il faudra alors laver. Il paraît que les cochons ne préfèrent pas la boue. Ce sont les hommes qui les y précipitent.

17/04/2010

Qui va là?

Anonyme,sculptures,glycéro,.jpg

      Laurent Jacquy, que j'ai déjà eu l'occasion de citer ici, par rapport au jardin de Bohdan Litnianski dans l'Aisne, ou pour une carte postale détournée de sa composition (le monsieur paraît priser les images modifiées) me fait part d'une exposition qui s'annonce fort intéressante dans sa bonne ville d'Amiens, manifestation apparemment organisée par lui et quelques autres amis et intitulée Qui va là?Laurent Jacquy, L'apparition de Tintin à Bernadette Soubirous, exposition Qui va là?, Le Safran, Amiens, 2010.jpg

     Il me donne l'information brute, les dates (du 30 avril au 17 juin), le lieu (Galerie Carré Noir, Le Safran, ce dernier étant un centre culturel), et me signale un lien vers un blog qui parait avoir été créé tout exprès pour l'exposition, au nom éponyme de cette dernière, Qui va là? Ce blog paraît servir de catalogue (faute de mieux?). On y trouve une "bonne partie" des 200 oeuvres exposées à la galerie Carré Noir. Ah, si, son info contient aussi une courte phrase de présentation: "Cette exposition regroupe autour des travaux de Laurent Jacquy et de Yann Paris des oeuvres d'anonymes ou d'artistes plus connus". Parmi les "artistes plus connus", sans doute veut-on parler d'un Jaber (aux oeuvres pour une fois bien choisies) ou d'une Ody Saban (un dessin inhabituel dans sa production), voire d'un Maurice Rapin (j'y reviens plus bas).

Yann Paris, André Breton.jpg
Yann Paris, André Breton, poète, écrivain, essayiste, sculpture sur bois

       C'est à chacun de se faire une opinion à partir des images que l'on découvre sur ce blog (j'en reproduis quelques-unes ici même). D'emblée, l'ensemble me séduit et m'apporte une impression de nouveauté et de fraîcheur, un goût de la création autodidacte populaire se manifestant là, imprégnée d'humour et d'esprit aimablement critique. Il y a là des peintures de Laurent Jacquy, en position de référence au monde des ex-voto contemporains ou plus anciens (certains exemplaires de ceux-ci sont présentés du reste, dont des mexicains), à un goût de l'imagerie modeste décalée et en écho à une imagerie politique caricaturale ou humoristique aussi (voir sa série de peintures sur l'histoire de la résistance dans le massif du Vercors qui n'est pas sans rappeler les tableaux à histoire de Gérard Lattier, qui fut influencé par Clovis Trouille lui de son côté).Laurent Jacquy,Vercors, peinture sur bois.jpg Un dessin de Maurice Rapin, visible dans le blog qui fait le "pré-inventaire" de cette exposition, prend peut-être de ce point de vue valeur de référence et de filiation. Ce dernier (disparu en 2000), qui appartint un temps au mouvement surréaliste avec Mirabelle Dors (1913-1991), avant de s'en détacher pour des raisons d'ordre esthétique avant tout, semble-t-il, prisait une figuration critique pour laquelle avec sa compagne il anima un salon du même nom. Ce même Maurice Rapin fut aussi en relation avec Clovis Trouille, qui avec Alfred Courmes fait figure de grand ancêtre de toute cette nouvelle figuration décalée inspirée de l'art populaire.

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Yann Paris, super-héros
Georges Paris, Tintintin.jpg
Georges Paris, Tintintin

       Les sculptures sur bois de Yann Paris, ou de Georges Paris également, sont aussi des oeuvres affichant une certaine naïveté de style, avec une posture déférente à l'égard de l'imagerie populaire contemporaine (le catch, les super-héros des séries de Marvel) qui ne déplairait pas aux animateurs du Musée international des Arts Modestes. J'apprécie également les peintures d'un certain Javier Mayoral, elles aussi dans l'esprit du démarquage d'une iconographie préexistante.Javier Mayoral, peinture sur bois.jpg On trouve également nombre de portraits de vedettes de la culture de masse (Nana Mouskouri, Bourvil, James Dean...) peints par des anonymes qui ne sont pas sans fasciner les organisateurs de cette expo par le mélange d'admiration et d'une problématique prise de distance vis-à-vis de leurs modèles qu'ils supposent aussi peut-être en creux.Anonyme, James Dean, expo Qui va là? Le Safran, Amiens, 2010.jpg Ce goût de portraiturer ces "saints de rechange" dans la culture populaire contemporaine (on en trouve un grand nombre dans les jardins naïfs de bord de route) paraît ambivalent (mais peut-être n'est-ce qu'une vue de l'esprit?). Certaines déformations, des yeux un peu trop exorbités par exemple, ou des boîtes crâniennes bizarrement conformées, semblent trahir un inconscient désir de caricature, qu'un artiste plus délibérement frondeur choisira de pousser plus loin.

Anonyme, Nana Mouskouri, expo Qui va là ? Le Safran, Amiens, 2010.jpg
Anonyme, Nana Mouskouri
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A. Lamy, Bourvil
       Ce concept d'exposition n'est pas sans rappeler aussi le goût d'un Olivier Thiébaut qui à Caen a fondé le jardin de la Luna Rossa à partir de fragments de jardins et d'environnements populaires, après avoir monté des expositions où il mêlait ces oeuvres naïves populaires à ses propres créations au style proche de l'art populaire. De même, on pensera aux expos montées par Pascal Saumade ici ou là, comme récemment Sur le Fil à la Maison-Folie de Wazemmes à Lille. Voire à l'intérêt qu'on porte ailleurs au bad art ou à l'art des vide-greniers et autres dépôts-ventes. Il y a là comme un éloge du regard naïf vu avant tout comme un regard dépourvu du désir d'épater à tout prix, et comme un refus de l'effet. Pour certains amateurs d'art plus intellectuels, en tout cas, cette imagerie populaire que l'on chine en brocante et dans les vide-greniers apporte en ce moment indéniablement un souffle d'air frais, en même temps qu'un moyen de remettre en question certaines valeurs admises dans le monde de l'art dominant.
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Anonyme, Princesse malgache
 

Qui va là? Exposition du 30 avril au 17 juin 2010, Le Safran, rue Georges Guynemer, 80000 Amiens. Tél 03 22 69 66 00.

14/04/2010

Fouré niouses

Cette note comporte une mise à jour

       Petit rendez-vous sur les ondes à ne pas manquer si cela vous attire, vendredi soir à 22h30 dans l'émission Muzar de Radio-Libertaire, présentée par Nathalie Mc Grath, Jean-Christophe Belotti accompagné d'un sciapode sautillant, ainsi que de Roger Renaud et Alexandre Pierrepont, viendra faire une causerie autour du numéro 1 de sa revue L'Or aux 13 îles. Cela sera aussi l'occasion de parler de l'abbé Fouré et du dossier sur les bois sculptés inséré dans ce n°1 en compagnie de quelques rares documents sur l'ermitage et ses sculptures évanouies. Hélas, nous ne diffuserons aucun enregistrement de l'abbé, borborygmant à souhait parmi les embruns (sourd, il avait en outre, semble-t-il, quelques difficultés à s'exprimer oralement). Peut-être simplement sera-ce l'occasion de glisser quelques enregistrements de musique traditionnelle bretonne ou quelque ancienne complainte de marin (comme le guide du musée l'évoque à un détour de la visite, une oeuvre campant "un chanteur de complainte")? Contentons-nous pour le moment de cette grimace de l'abbé, qui semble bien une pitrerie destinée à amuser les bourgeois endimanchés qui l'entourent, à côté du "dernier des Rothéneuf" qui "protégeait sa femme" du monstre marin situé en contrebas, tout cela dans les rochers sculptés de la côte de Rothéneuf. On notera sur ce cliché l'état de fraîcheur des peintures qui recouvraient la statue de cette effigie confortablement barbue.

L'abbé grimace, carte postale, coll BM.jpg
Carte postale dénichée suite à la suggestion d'un spectateur de ma causerie de février à la Halle St-Pierre

L'abbé grimacedétail, carte postale ancienne, vers 1907.jpg

      Pour revenir à la revue belottienne, il faut ajouter quelques nouvelles librairies parisiennes à la liste déjà signalée, toutes situées dans le Ve ardt. Elle est désormais également disponible à l'Arbre à lettres, 2 rue Edouard Quenu. Aux Autodidactes, 53 rue du Cardinal Lemoine, à la Galerie La Sorbonne, 52 rue des Ecoles. Et chez Compagnie, 58 rue des Ecoles. On espère pouvoir incessamment la voir déposée en Bretagne, où, me dit-on, quelques amateurs particulièrement bien documentés auraient autre chose à révéler sur le fameux abbé. Lyon, Marseille et Bordeaux l'auraient également en vente dans quelques bonnes adresses. Enfin on la trouve depuis peu à Clermont-Ferrand et à Murat, grâce à l'homme de Recoins, revue amie concoctée par Emmanuel Boussuge, adresses: Bouqui'Disk, rue des petits gras à Clermont, et Aux Belles Pages à Murat (mon rêve enfin réalisé: être distribué dans le Cantal!).

Rochers sculptés de l'abbé Fouré, figures dans l'escalier d'accés aux rochers, photo Bruno Montpied, 2009.jpg

Photo Bruno Montpied, 2009

       Il faut signaler qu'un documentaire existe sur l'abbé Fouré, de Frédéric Daudier et Olivier Gouix, intitulé "L'Homme de granit, le sculpteur des rochers de Rothéneuf" (co-production Arcanae-TV Breizh-DRC Films). Il dure 52 min et date de 2002.

        Enfin, signalons un article de Mme Virginie David paru dans Le Pays Malouin du 8 avril dernier qui permet aux lecteurs de la région de St-Malo d'apprendre l'existence de notre revue et de son dossier sur Fouré. Grâces lui soient rendues...

Le Pays Malouin, 8 avril 2010, sur L'Or aux 13 îles.jpg
Ajoutons pour l'information de nos lecteurs que la revue Gazogène dans son n° 31 consacré aux abbés créatifs vus à travers les cartes postales anciennes présente dix cartes postales dont six colorisées, toutes en provenance de la collection de Jean-Michel Chesné ; les commentaires (dûs à Jean-François Maurice) qui accompagnent ces photos, confus et peut-être même réactionnaires (l'art religieux populaire serait une des sources oculltes de l'art brut, ce qui lui accorde une importance hors de proportion), sont par contre plutôt discutables

 

06/04/2010

Mad Métallos

      On nous annonce une exposition d'une petite partie de la collection du Madmusée de Liège qui aura lieu à Paris dans les tout prochains jours, du 16 au 30 avril (vernissage le jeudi 15 à 18h), à la Maison des Métallos dans le 11e ardt face à la mosquée de la rue des Couronnes. Seront présentées des oeuvres de Serge Delaunay (Bel), Umberto Bergamaschi (It), Pascale Vincke (Bel),Pascale Vincke.gif Wouter Coumou (Pays-Bas), Martha Branten (idem),Martha Branten.jpg Dwight Mackintosh (à signaler l'exposition parallèle située non loin de la Maison des Métallos, à la Galerie Impaire, rue de Lancry dans le 10e ardt, entièrement consacrée pour le coup à Mackintosh, qui fréquenta longtemps le Creative Growth Art Center d'Oakland en Californie - dont la Galerie Impaire est comme on le sait l'émanation parisienne)Dwight Mackintosh.gif, Paloma Gonzalez (Esp), Hans-Jörg Georgi (All), Antonio Dalla Valle (It), Marco Raugei (venu du centre italien de La Tinaia, si je ne me trompe?), Wataru Saitou (J), Cathy Staughton (Aust.), Bernard Grandgirard (Sui) et Giovanni Galli (It).

Umberto Bergamaschi, Bibliothèque Panizzi, Donation Menozzi.jpg
Umberto Bergamaschi dans le catalogue Ai Marginali, pastel sur carton 

       Voici ce qu'écrivent les animateurs du Madmusée pour définir quelque peu le sens de leur action: "Inauguré en octobre 1998, ce musée valorise les démarches artistiques de personnes déficientes mentales. (...) Dévoilé pour la première fois à Paris, ce singulier patrimoine trouve sa source dans d'audacieux ateliers de pratiques artistiques, développant à la fois l'apprentissage de  techniques rigoureuses et une éthique respectueuse de la personnalité et de l'inventivité de tout artiste. Aucune intention thérapeutique ou occupationnelle n'y a droit de cité."

       Je connais assez mal les oeuvres présentées, et comme j'ai toujours eu la flemme de me rendre à Liège, je pense donc que c'est une bonne occasion d'en savoir plus.

Madmusee, invitation.jpg

Maison des Métallos, 94, rue Jean-Pierre Timbaud, 11e, Paris. Expo en entrée libre, ouverte TLJ de 14h à 19h, nocturne le jeudi jusqu'à 22h. 

01/04/2010

Armand Goupil et les paravents

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Armand Goupil, sans titre, 18-VI-57

     Ombres chinoises, vous inspirâtes peut-être Armand Goupil pour ce fragile dessin sur papier fin un peu abîmé que je conserve et prise particulièrement pour son goût du voyeurisme naïf, direct et plein d'un désir qui paraît indéfiniment fait pour être retenu désir, tournoyant devant le paravent où l'adorable silhouette joue sa pièce charnelle, inconsciente de ses charmes. 

28/03/2010

Les paradis de Cherbourg, la Passerelle expose

    Je reçois de l'animateur de l'atelier d'arts plastiques La Passerelle à Cherbourg l'annonce d'une exposition organisée à la Maison des Jeunes et de la Culture de la ville. Bel événement étant donné l'apparente qualité de ce qui se produit dans cet atelier, qui j'espère fera plus amplement connaître ce foyer remarquable de créativité. Elle a débuté le 29 mars et se terminera le 7 mai.

Affiche expo La Passerelle, mars-mai 2010.JPG

     Voici comment Romuald Reutimann, l'encadrant de cet atelier, présente leur travail sur son blog (où comme je l'ai déjà dit on peut découvrir un grand nombre des travaux réalisés par les participants à l'atelier):

     « La Passerelle est un atelier d'art plastique inauguré il y a 20 ans, dans le cadre d'un service d'insertion sociale, s'adressant à des adultes vivant avec une déficience intellectuelle.

       La plupart travaillent au Centre d'Aide par le Travail (C.A.T.) de LA GLACERIE. Nous accueillons également une personne du C.A.T. des Pieux et un retraité.

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André, sans titre, sans date, 65x50 cm ; extrait du blog de La Passerelle

       Depuis l'origine prés d'une centaine de personne sont passées par l'atelier. Actuellement, il compte 16 participants répartis en deux groupes. Chaque groupe se retrouvant deux heures par semaine.

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Annick, Abécédaire, 70x50 cm, 2004 ; extrait du blog de La Passerelle

 

       Il s'agit avant tout d'un lieu de détente et d'expression autour des arts plastiques. Nous accueillons tous ceux qui en manifestent le désir pour peu qu'ils soient régulièrement présents et qu'ils s'investissent dans une production.

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Pascal, sans titre, 45x43,5 cm, 2003 ; extrait du blog de La Passerelle

       Les propositions de travaux sont le plus souvent amenées au cas par cas. Nous cherchons à leur faire plaisir mais aussi à les provoquer au travers de voies graphiques qu'ils ont souvent découvertes, initiées et développées eux-mêmes. »

26/03/2010

Exposition des Prévost, les Bâtisseurs de l'Imaginaire à Melun

 

     Les frères Prévost, Claude et Clovis... Quoi, le sciapode, que dites-vous là? Ce ne sont pas des frères, enfin, que ces Claude Lenfant (nom prédestinant?)-Prévost et Clovis Prévost, mari et femme, chercheurs associés depuis quelques décennies pour nous parler de, ou pour laisser parler plutôt, les dix même créateurs singuliers aux pas desquels ils se sont attachés depuis les années 70, les années des cultures alternatives (outsider en somme) dont ils sont imprégnés passablement  (surtout Claude?). Ils les ont exposés depuis cette époque dans de nombreux lieux, notamment à la mythique exposition des Singuliers de l'Art en 1978 au musée d'art moderne de la ville de Paris.

 

Mme Isidore devant la maison Picassiette, ph. Clovis Prévost, 1977.jpg
Mme Isidore, épouse de Raymond Isidore, surnommé "Picassiette" par les journaux, ph. Clovis Prévost (extrait du livre de Claude et Clovis Prévost sur Picassiette aux éditions du Chêne, 1977)

     Les dix: soit le facteur Cheval, l'abbé Fouré (qu'ils s'entêtent à orthographier Fouéré, respectant plus l'état-civil que le choix propre de l'abbé qui signait Fouré sur ses autographes), Picassiette (lotissement décoré d'une immense mosaïque de bouts d'assiettes à Chartres), Camille Vidal (statues en ciment à Agde), Marcel Landreau ("le caillouteux" de Mantes-la-Jolie), Irial Vets (l'homme qui se bricola une Chapelle Sixtine dans une chapelle qu'il avait rachetée pour son usage privé, à Broglie dans l'Eure), Robert Garcet et sa Tour de l'Apocalypse (Eben-Ezer en Belgique), Fernand Chatelain (avant ripolinage maquillé en restauration),Fernand Châtelain, ph. clovis Prévost, années 70.jpg le mirobolant Monsieur G. (Nesles-la-Gilberde, Seine-et-Marne). A ces neuf créateurs s'ajoute Chomo, présenté judicieusement par les Prévost, qui connaissent leurs gammes, comme un "artiste plasticien", ce qui le distingue des neuf précédents, moins "artistes", même s'ils sont tout autant des créateurs (et même infiniment plus originaux à mon humble avis que le Chomo). Ils vont présenter à Melun, à l'Espace Saint-Jean, à partir du 10 avril, une exposition multi-média (photographies et films) intitulée "Les Bâtisseurs de l'Imaginaire et hommage à Chomo", dont le tire entérine la différence qu'ils établissent entre les deux groupes (oui, on va dire que Chomo est un groupe à lui tout seul, même s'il vaudrait mieux parler d'un groupe de groupies...). L'expo se terminera le 10 juillet.

Monsieur G., photogramme du film de Clovis Prévost, 1977.jpg
Monsieur G. ou le sanctuaire des lasers, photogramme du film de Clovis Prévost, 1977 (merci à Frédérique Michaudet pour la capture)

     Le propos des deux chercheurs est de laisser parler les créateurs sans chercher à raconter leur histoire. Il n'y a en apparence aucune intervention des cinéastes durant le film, un effet de réel étant poursuivi tout du long, les créateurs parlant ou se taisant et apparemment laissés à eux-mêmes, comme on se figure qu'ils sont la plupart du temps en l'absence de tout spectateur, dans l'intimité de leur vie quotidienne de créateur oeuvrant avant tout pour soi-même.

Brochure-catalogue exposition des Bâtisseurs de l'Imaginaire par les Prévost, Chartres-Rennes-Lausanne, 1977-1979.jpg
Couverture de la brochure catalogue d'une des premières expos des Prévost en 1977 à Chartres, puis à Rennes, et ensuite à Lausanne en 1978-1979 (cette expo montrait aussi d'autres créateurs que les préférés des Prévost, comme Victor Grazzi ou Joseph Meyer)

       Voici en supplément quelques éléments biographiques et conceptuels prélevés dans le petit catalogue de la rétrospective qui fut consacré à Clovis Prévost par le musée national d'art moderne en 1993 au Centre Georges Pompidou:

        "Clovis Prévost est né le 5 novembre 1940 à Paris. Après des études d'architecture à l'Ecole des Beaux-Arts de Paris et de sémiologie des médias à l'Université de Paris VII, il dirigera à partir de 1969 le département Cinéma créé par Aimé Maeght. (...) Montrer "comment l'imaginaire se symbolise à travers certaines figures formelles, spatiales, comportementales" est le sens du regard porté par Claude et Clovis Prévost tout le long de leur recherche cinématographique sur l'art." 

 

Espace Saint-Jean, 26, place St-Jean, 77 Melun. Vernissage le samedi 10 avril à 18h. Cinq films au programme, Monsieur G. et le sanctuaire des lasers, Chomo: le fou est au bout de la flèche, Chomo le débarquement spirituel, La légende du silex: Robert Garcet, Le facteur Cheval: où le songe devient réalité. En outre, le samedi 29 mai, à 15h, Claude et Clovis Prévost assureront une visite guidée de l'exposition. 

22/03/2010

Le plein pays de Jean-Marie M., nouvelle projection parisienne

     A signaler en complément de l'annonce ci-dessous, l'intervention d'Antoine Boutet le réalisateur du Plein Pays, film consacré au créateur d'un environnement souterrain du côté de Marminiac dans le Lot, lundi 22 mars, ce soir donc, dans l'émission Songs of praise sur Aligre FM. Les animateurs de cette émission m'ont également transmis un lien vers Daily Motion qui permet de voir un extrait du film et un entretien avec Antoine Boutet.
invitation à une projection à la SCAM, Le Plein Pays d'Antoine Boutet,26 mars10.jpg

21/03/2010

Etoiles noires de Robert Giraud

      Robert Giraud, on commence à le connaître davantage, grâce au blog d'Olivier Bailly, Le copain de Doisneau, qui a ranimé sa mémoire sur internet avant de publier une courte biographie sur lui chez Stock, intitulée Monsieur Bob. Plusieurs livres de lui sont aujourd'hui disponibles, notamment chez l'éditeur Le Dilettante. Son livre le plus connu, Le vin des rues a été réédité chez Stock, en même temps que sortait la biographie d'Olivier Bailly.Monsieur Bob d'Olivier Bailly.jpg

      C'était un connaisseur et un écrivain du Paris populaire des années 50 aux années 90 (il est disparu en 1997) que l'histoire littéraire a tendance à passablement occulter. Lisons ces lignes d'Olivier Bailly qui cerne en quelques mots les centres d'intérêt du personnage: "Il ne traitera que de sujets en marge: clochards, tatoués, gitans, petits métiers de la rue, prostitution, bistrots, sans oublier la cohorte des excentriques de tout poil. Son premier coup d'éclat, il le réalise avec Doisneau, dans Paris-Presse, avec la publication d'un reportage au long cours, "Les étoiles noires de Paris", onze articles consacrés à des personnages insolites qui peuplent le Paris de cette époque et que Bob croise pour certains dans ses périples journaliers et là où il boit son vin quotidien." (Monsieur Bob, p.84). Le vin était une autre de ses passions, sang de la vigne qui irriguait le corps de ses passions pour la vie immédiate. Olivier Bailly note qu'il fréquentait les bistrots qui avaient une certaine exigence en matière de crus, ceux tenus par des bistrotiers qui allaient sur place dans les régions chercher leurs récoltants, en évitant les "bersycottiers", c'est-à-dire les négociants de Bercy qui s'étaient enrichis pendant la guerre grâce au marché noir avec des mauvais vins (surnommés "côteaux de Bercy", synonymes de piquettes). Giraud, qui fut aussi un temps secrétaire de Michel Tapié au début de l'histoire de la collection de l'art brut, en 1948, alors que Dubuffet était parti voyager en Algérie, et qui garda mauvais souvenir de ce dernier qui le traitait en factotum (bien longtemps après, il parlait de lui en disant que Dubuffet n'était qu'un cave...), Giraud eut-il le temps de lire la "biographie au pas de course" (publiée dans Prospectus et tous écrits suivants, tome IV, 1995) où Dubuffet se vante lorsqu'il était marchand de vins justement à Bercy d'avoir renfloué son entreprise grâce au marché noir (il précise avoir alors vendu des "vins d'une qualité un peu supérieure" au vin de consommation courante, ce qui lui procura des bénéfices qui lui permirent d'éponger les dettes de son commerce d'avant-guerre, car il n'y avait sans doute plus de taxes sur ce négoce réalisé sans factures, sur parole)...? Nul doute que cela lui aurait confirmé ses impressions de la fin des années 40.Robert Giraud au comptoir chez Albert Fraysse, par Maximilien Vox, blog Le Copain de Doisneau.jpg

      Giraud vécut de divers petits métiers (il vola même un temps des chats, il fut avec sa femme Paulette bouquiniste à la hauteur de la Samaritaine). Ses sujets de prédilection étaient les clochards, les tatoués, les bistrots, et l'argot sur lequel il publia de nombreux livres. Il s'intéressa aussi aux créateurs insolites, plusieurs de ses articles publiés dans différentes revues et journaux (outre Paris-Presse, il y eut aussi Franc-Tireur et la revue Bizarre) s'y rapportent: par exemple Frédéric Séron dans Les étoiles noires de Paris (1950 ; avec Robert Doisneau, son complice photographe qui fit de nombreux reportages avec lui, il paraît l'un des tout premiers à avoir rendu visite à Séron, avant Gilles Ehrmann en particulier), Picassiette (dans Bizarre n°V en juillet 1956), ou encore Gaston Chaissac dans Franc-Tireur en août 1956 (Chaissac de qui il reçut une correspondance dont certains éléments ont été publiés par Dubuffet et Paulhan dans Hippobosque au bocage en 1951). Charles Soubeyran (auteur des Révoltés du Merveilleux, livre consacré à Doisneau et Ehrmann où l'on voit plusieurs des créateurs évoqués dans les "étoiles noires de Paris" comme Jean Savary, Maurice Duval, Frédéric Séron, Pierre Dessau) a un jour signalé que certain "dandy de muraille" peint par Chaissac renvoyait au frère de Robert Giraud, Pierre Giraud qui était un dessinateur et un peintre spontané, associé un temps à l'aventure de la débutante collection de l'art brut.Pierre Giraud enchanteur limousin, plaquette art brut éditée par la Galerie René Drouin en 1948.jpg

      Les chroniques de Robert Giraud sur les figures de la rue parisienne, vivant sous d'autres coordonnées mentales que le commun des mortels, au fond, on pourrait les voir comme issues d'une tradition de chroniqueurs du Paris populaire excentrique, qui rassemblent par exemple ces auteurs du XIXe siècle connus sous le nom de Lorédan Larchey (Gens singuliers), Champfleury (Les Excentriques), Charles Yriarte, Charles Monselet, etc, tous auteurs que l'on retrouve aujourd'hui au catalogue des précieuses éditions Plein Chant.

      En attendant que quelque éditeur veuille enfin réunir les différentes contributions de Robert Giraud à la cause de l'art brut, on se contentera d'initiatives isolées comme cette réédition à Noël 2009  des onze articles parus dans Paris-Presse, "Les étoiles noires de Paris", sous l'aspect d'un livre-objet conçu par Bernard Dattas qui s'est amusé pour le compte des "Editions des Halles" à publier cet ensemble sous la forme d'un livre massicoté en étoile, qui une fois ouvert révèle des dizaines d'autres étoiles de toutes couleurs (c'est joli mais ne va pas sans faire des difficultés pour la lecture...).

RGiraud-RDoisneau-Etoilesno.jpg
Réédition des Etoiles noires de Paris de Robert Giraud par Bernard Dattas, 2009

      Bonne idée qu'a eu là Bernard Dattas (qui ne paraît pas à son coup d'essai, d'autres ouvrages ont semble-t-il été réalisés auparavant sur lesquels je n'ai que des ouï-dire, le monsieur cultivant, semble-t-il, un certain secret). On découvre ainsi l'ensemble des personnages qu'avait évoqués Giraud en 1950, ceux que j'ai déjà cités, plus Armand Févre, André Gellynck, Salkazanov, M. Dassonville et sa cane Grisette, Gustave Rochard, M. Nollan dit l'Amiral, le peintre Héraut, Pierre Dessau qui se baladait en costume Directoire et juché sur un grand Bi à travers Paris... Malheureusement je ne puis renvoyer mes lecteurs à une quelconque adresse qui leur permettrait d'avoir accès à leur tour à cette charmante publication. A moins que M. Dattas, s'il nous lit, veuille bien éclairer nos lanternes.

 Les étoiles noires de Paris par Robert Giraud et Robert Doisneau, édité par Bernard Dattas.jpg
L'ouvrage étoilé une fois ouvert... Une photo de Frédéric Séron par Robert Doisneau apparaît à droite 

 

 

14/03/2010

Une vie dans les plis, le cas Clelia Marchi

     Récupérée je ne sais plus où (les balades sur Internet brouillent la mémoire, tous les carrefours sont faits de références, mots, images qui se recouvrent et s'effacent dans leur sources), l'information du drap de Clelia Marchi m'est parvenue un jour. Il y a bien sûr un article en italien sur Wikipédia que je me suis traduit. Mais comment ai-je découvert son existence? Je ne sais plus. Je possède un entrefilet sur elle, découpé dans un magazine spécialisé pour les retraités, Notre Temps, qui a dû être publié vers 1995...

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Clelia Marchi devant son autobiographie sur drap, ph. inconnu, DR

     Il était une fois une paysanne italienne qui vécut toute sa vie de misère à Poggio Rusco en Toscane, non loin de Bologne, Venise (née en 1912, elle mourut à 94 ans en 2006)... Elle eut un mari, Anteo, et sept fils dont quatre moururent en bas-âge. Son époux lui aussi disparut prématurément, à la suite d'un accident. C'est après ce drame, en 1982, que Clelia décida de raconter sa vie de rude travail, de souffrance mais aussi d'amour sur un drap de 2 mètres sur 3, car il lui en restait de trop après la mort de son mari, disait-elle. Ce fut le support insolite de ce qui devint petit à petit, couverte de lignes serrées et minuscules, écrites en certains endroits à l'encre rouge, l'autobiographie d'une prolétaire moderne. Ces lignes font deux mètres de long, et une frise de poèmes orne le bas de ce drap devenu célèbre en Italie. Surtout depuis que la Fondation Mondadori décida de publier l'écrit en 1992 sous le titre "Gnanca na busia" (ce qui pourrait semble-t-il se traduire par Sans mentir). L'ouvrage obtint un franc succès, connaissant plusieurs réimpressions. Suite à l'intervention du maire de Poggio Rusco, que Clelia avait sollicité en 1985, le drap fut déposé aux archives nationales du journal intime de Pieve San Stefano qui sont situées à Arezzo (en France aussi il existe un centre de documentation qui se consacre à archiver ce même genre d'écrit, des autobiographies ; Philippe Lejeune en est il me semble l'un des fondateurs - sinon l'unique fondateur...). Ces archives, véritable "banque de la mémoire" selon Saverio Tutino, leur fondateur, conservent près de 2000 manuscrits autobiographiques, certains vieux d'une centaine d'années.

Clelia March lenzuolo.jpg
Le drap exposé aux archives nationales du journal intime à Pieve San Stefano

    Au fond, écrire sur un drap quoi de plus naturel, et de plus inspirant aussi? Ils nous enveloppent contre le froid, nous servent parfois de linceul après avoir accueilli notre repos, nos songes, nos cauchemars et nos amours. Combien d'heures passons-nous entre eux? Il n'est que trop juste qu'ils recueillent aussi un jour nos confessions...

Portrait présumé de Hung Tung?

Objet sculpté dans une variété de noix, auteur inconnu, date inconnue, coll. et ph. Bruno Montpied.jpg

    Cela fait quelque temps que je possède cette tête insolite, rigolarde, bienveillante, sculptée dans une variété de noix (très légère) que je ne parviens pas à identifier, son sourire découvrant des gencives noircies qui paraissent plutôt mal en point. Je l'appelle à part moi "Le Chinois". C'est une sorte de coolie détendu, alors que normalement il n'y a vraiment pas de quoi chez les portefaix. Un portrait présumé de Hung Tung? 

03/03/2010

Ataa Oko et Frédéric Bruly-Bouabré, deux créateurs africains à la collection de l'art brut à Lausanne

       La Collection de l'Art Brut de Lausanne, qui était fermée depuis quatre mois suite à des dégâts des eaux, réouvre ses portes le 5 mars prochain avec une exposition qui fera date dans l'histoire de la collection. Elle accueille deux créateurs africains, Frédéric Bruly-Bouabré tout d'abord, déjà bien connu (cet ancien collaborateur de Théodore Monod fut montré notamment à la grande exposition du Centre Georges Pompidou et de la Grande Halle de la Villette en 1989 Les Magiciens de la Terre ; vous savez, cette expo où Jean-Hubert Martin s'illustra en affirmant qu'il ne voyait aucun singulier primitiviste en occident, à part Chomo, pour être mis en parallèle avec les créateurs du tiers-monde qu'il voulait présenter à Paris, c'était dire l'étendue de son savoir...), ce qui fera que je ne m'étendrai pas à son sujet (même si ses oeuvres sont absolument séduisantes) et un autre créateur qui, lui, est beaucoup moins notoire, Ataa Oko Addo.

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Ataa Oko (au milieu) avec Kudjo Affutu (à gauche) et son fils Kofi (à droite), devant un cercueil-coq commandé à Oko par Regula Tschumi pour une exposition, 2009, ph. R.Tschumi

      Ataa, ça veut dire "grand-père" au Ghana, dans l'ethnie Ga dont fait partie cet étonnant nonagénaire toujours actif aujourd'hui (Oko signifie "jumeau", il eut une soeur jumelle qui mourut peu après la naissance). Cette fameuse ethnie s'est rendue célèbre auprès des amateurs d'art populaire africain contemporain par la confection de ces cercueils imagés (fèves de cacao, effigies de policiers, mercédès-benz, lion, oignons, etc) dédiés aux grands personnages que l'on veut enterrer pour se concilier leurs faveurs (voir ma note précédente sur le sujet). Certains de ces cercueils, qui intéressent maintenant les collectionneurs, ont été montrés dans des grandes manifestations (ceux de Kane Kwei furent présentés aux Magiciens de la Terre).

      Son histoire et son destin sont hors du commun sur le plan de l'histoire des arts populaires en Afrique (et ailleurs). D'après l'ethnologue suisse Regula Tschumi (qui fut hôtesse de l'air avant de choisir cet autre métier), qui étudie les coutumes religieuses des Ga, c'est Ataa Oko qui aurait créé le premier cercueil sculpté en 1945, à l'effigie d'un crocodile. Mais elle ne fournit pas de preuve photographique du fait (puisque les cercueils que les menuisiers ont sculptés avec soin, telles de véritables oeuvres d'art, sont enterrés avec les défunts à l'intérieur, disparaissant donc sous la terre, où, nous dit Philippe Lespinasse dans son documentaire Ghana, sépultures sur mesures (1), ils sont rapidement dévorés par les termites).

 

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       Dans le catalogue qu'édite la Collection de l'Art Brut en collaboration avec l'éditeur suisse Infolio, elle ne montre qu'une photo datant de 1960 (où l'on voit Oko ave sa femme posant devant un cercueil en forme de cargo). L'ethnologue se base sur le témoignage du dit Ataa Oko et le recoupe avec les témoignages d'autres personnes qui confirment que Oko construisait bien des cercueils sculptés, et qu'il encouragea Kane Kwei à en faire à son tour, ce même Kane Kwei qui a été présenté internationalement comme le fondateur de cette tradition (il ne fit rien pour démentir la rumeur). L'idée vient alors à Regula Tschumi de demander à Ataa Oko de lui dessiner ses cercueils de 1945-1948, histoire de voir à quoi ils pouvaient bien ressembler...

Ataa Oko,dessin sans titre (deux esprits), collection de l'art brut, Lausanne.jpg
Ataa Oko, sans titre, dessin à la mine de plomb et crayons de couleur, 26 octobre 2008, 29,7x42 cm, Collection de l'Art Brut, Lausanne

     Elle apporte des blocs de papier à dessin, des crayons de couleur et Ataa Oko se prête de bonne grâce au jeu. Il commence à dessiner prudemment, sans appuyer, les formes des cercueils qu'il a confectionnés après 1945. Puis petit à petit, il se pique au jeu, il s'enhardit, prend confiance, et de dessin en dessin se lance à corps perdu dans son imaginaire délaissant les représentations imitatives du début (qui durèrent de 2004 à 2005, les années de début de cette production graphique). Ce sont ces dessins aux crayons de couleur, où se donne libre cours l'imagination de l'auteur, quoiqu'avec des références à l'animisme Ga, qui ont intéressé la Collection de l'Art Brut qui en possède désormais une bonne sélection semble-t-il, si l'on se rapporte aux oeuvres illustrant le charmant catalogue d'exposition. Le reste est dans les mains de Regula Tschumi qui a acheté régulièrement, au fur et à mesure qu'elle était produite, toute la production d'Ataa Oko. Ce qui est unique dans l'histoire des oeuvres d'art brut sur lesquelles on ne possède généralement pas de renseignements par exemple d'ordre chronologique. Lucienne Peiry précise au début du catalogue: "C'est ainsi que 2500 dessins ont vu le jour en six ans (2003-2009)". On voit là une oeuvre rangée dans le corpus de l'art brut en train de se faire quasiment sous nos yeux, ce qui est un fait nouveau.

 

Ataa Oko, sans titre, ph Amélie Blanc, Collection de l'art brut,Lausanne.jpg
Ataa Oko, sans titre, 2008, crayon de couleur et mine de plomb sur papier, 21x29,7cm, photo Amélie Blanc, Collection de l'Art Brut, Lausanne

      Autre fait étonnant et rare, on se confronte avec cet Ataa Oko à un autre phénomène qui m'apparaît unique. C'est un créateur qui est à l'origine à la fois d'une tradition de sculpture funéraire populaire et, par la suite - soixante ans après, excusez du peu! - aussi, d'une nouvelle expression individualiste populaire, dite "brute". C'est Dieu, ce type-là.   

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(1) Ce film a été édité en DVD chez Grand Angle Productions. Grand Angle Distribution, 14 rue des Périchaux, 75015 Paris. +33 1 45 359 258. n.labid@grandangle.com et www.grandangledistribution.com. Philippe Lespinasse livre aussi un texte de témoignage sur Ataa Oko dans le catalogue de l'exposition. Cette dernière se tient à Lausanne du 5 mars au 22 août 2010 (en parallèle avec Bruly-Bouabré): www.artbrut.ch

Cercueil sculpté en forme de policier au Ghana,film de Philippe Lespinasse, Grand Angle Productions, 2009.jpg
Une image tirée du film de Philippe Lespinasse, un cercueil en forme de pandore, avec vrai policier mort à l'intérieur...

22/02/2010

Infos-Miettes (7)

Jean Linard is dead

    Ce titre résume à lui seul tout ce que j'ai à dire sur ce blog au sujet du céramiste Jean Linard,Jean Linard, ph Michel Zoladz.jpg auteur d'un environnement appelé communément "la Cathédrale" à La Borne, village comme on sait de potiers depuis des générations. L'info nous a été transmise par le site ArtInsolite.com. Il était l'auteur d'un environnement très "artiste" (et un peu trop mystique pour mon goût) très différent des environnements du genre qui me retient sur ce blog. Pour information, je répercute l'annonce de cette disparition vers ceux que cela pourrait concerner, avec mes condoléances à ses proches.

Linard, ph Catin sur le site web Panoramio.jpg
La "Cathédrale" en question... ph. Catin sur Panoramio, vers 2009?

Expos François Burland et Alp-Traüme au Museum Im Lagerhaus, St-Gall, en Suisse orientale...

     Tiens, ça faisait longtemps que je n'avais pas fait d'info sur le Musée d'art naïf et d'art brut suisses de St-Gall. C'est que leurs informations me parviennent toujours en allemand que je déchiffre fort mal... Mais bon, il est toujours loisible de jouer à la devinette. S'achève en ce moment (ça se termine le 7 mars prochain) une exposition de photographies d'Hildegard Spielhofer (dont je ne perçois pas trop le rapport à l'art brut ou à l'art naïf) et de "jouets" créés par François Burland qui n'en finit plus de produire des maquettes de bateaux, et autres véhicules variés, bricolés en matériaux de récupération, qui ne sont pas sans faire songer à d'autres maquettes telles qu'on en rencontre dans l'art brut conservé en Suisse, à Lausanne notamment (pensons aux bateaux de Forestier par exemple, mais plus généralement, l'art brut n'est pas avare de grands enfants jouant encore graphiquement avec des trains - David Braillon, Willem Van Genk... - des voitures, des engins spatiaux - André Robillard... - etc.).

Francois_Burland, portrait 2008 © Murielle Michetti.jpg
Portrait de François Burland avec un des ses jouets (un sous-marin?), © Murielle Michetti, http://www.mumic.ch

      Et cette expo sera suivie d'une autre, Alp-Traüme, plus inspirante à mon goût sur des créateurs du massif montagneux du Säntis (région d'Appenzell et Toggenburg), riche en traditions populaires (voir les Sylvester klaüse d'Urnasch et leurs costumes prodigieusement inventifs) et en peintres originaux, Alp-Traüme que l'on doit pouvoir traduire simplement par Rêve d'alpe, nein? Il s'agit cette fois de nouveaux noms, comme Erich Staub, ou Imma Bonifas, Willy Künzler, présentés à côté de plus connus comme Hans Krüsi.Erich Staub (dans cette peinture on retrouve les costumes traditionnels des bergers d'alpage de l'Appenzell, expo Alp-Traüme à l'Im Lagerhaus museum en 2010.jpg Nouveaux noms et nouvelles créations, plus dégagées de l'imitation du réel que dans le cas des peintres d'alpage déjà présentés précédemment dans ce musée (les peintres de poyas décorant les chalets et les étables de la région). L'exposition se tiendra du 24 mars au 4 juillet 2010.

Colloque sur "l'art outsider" en Sicile, "la création différente"

    Mlle Roberta Trapani m'a signalé récemment trois jours (26-27-28 mars prochains) où l'on va colloquer vaillamment à Palerme sur l'art brut et consorts, voir ici le programme en français et le programme (plus détaillé) en italien, à l'initiative de "l'Association culturelle" Start Factory (pas très sicilien le titre). Ce sera "coordonné scientifiquement" par la professore Eva Di Stefano qui dirige à Palerme un "Observatoire Outsider Art" dans le cadre de l'université locale.

colloque l4art Outsider: la Création différente, affiche.jpg
Affiche du colloque avec l'image, très gidouillesque, d'une sculpture qui ressemble au style de Filippo Bentivegna, si?

Joël Lorand et Claude Massé à Carquefou

    Ah, ce Joël Lorand, il en aura fait des voyages à travers la France, c'est un des plaisirs qui accompagnent tous ceux que la poursuite d'une quête imaginative titille. Outre des oeuvres représentatives de ses différentes périodes précédentes, proches du graffito au début, puis les "personnages floricoles", et les "boucliers", il montrera dans une nouvelle exposition au Manoir des Renaudières (direction de l'action culturelle de Carquefou) une nouvelle série d'oeuvres. Est-ce que la peinture reproduite sur le carton d'invitation en fait partie? Faut aller voir l'expo pour répondre.

Carton d'invitation pour expo Joël Lorand au Manoir des Renaudières, Carquefou 2010.jpg
Joël Lorand, carton d'invitation pour le Manoir des Renaudières

    Avec lui, au même moment, on pourra également voir les "patots" de Claude Massé, sculptures-assemblages sur liège. Pour le vernissage du 6 mars, à 16h30, Massé fera d'ailleurs une conférence-débat sur "l'Art Autre".

Claude Massé,des patots au Musée de la Création Franche.jpg
Claude Massé, quelques oeuvres au Musée de la Création Franche, ph. BM

 Exposition du 6 mars au 4 avril 2010, ouverte les ven., sam. et dimanche de 14h à 18h et sur RDV (02 28 22 24 40). Entrée libre.

Histoire d'une Collection (2)

Guillaume Pujolle, Histoire d'une Collection (2), Centre d'Etude de l'Expression, expo au Musée Singer Polignac en 2010.jpg
Guillaume Pujolle, Le départ du Lutétia, 1938

    Là c'est à Paris, c'est le deuxième volet d'une exposition qui paraît vouloir retracer l'histoire de la collection du centre d'étude de l'expression, collection qui est abritée dans le centre hospitalier Ste-Anne, dans le 14e ardt. Anne-Marie Dubois est l'organisatrice de l'expo qui est accompagnée aussi par la publication d'un troisième tome de son ouvrage De l'art des fous à l'oeuvre d'art. Cette collection vaut surtout à mes yeux pour sa partie ancienne, rassemblant des oeuvres produites par des patients que l'on n'avait pas encore encadrés soit artistiquement (artistes-thérapeuthes) soit chimiquement. L'expo La Clé des champs qui s'était tenue à la Galerie Nationale du Jeu de Paume en 2003 avait permis de s'en rendre compte de façon nette. L'expo actuelle, commencée le 28 janvier, s'achévera le 28 mars 2010, elle se tient dans le musée Singer-Polignac, à l'intérieur du centre hospitalier (ne craignez rien, on vous laissera ressortir...).

Histoire d'une Collection (2),Centre d'Etude de l'Expression,Carton d'invitation.jpg
Musée Singer-Polignac, fresque dans l'escalier d'accès, ph. B.Montpied, 2009.jpg
Musée Singer-Polignac, une fresque plaisante dans l'escalier d'accès, ph BM, 2009
....
Et Jano Pesset chez Soulié
     N'oublions pas de signaler l'exposition de Jano Pesset, un "vieux" Singulier des années 70, découvert surtout grâce à Alain et Caroline Bourbonnais, puis à la grande expo des Singuliers de l'Art en 1978 au musée d'art moderne de Paris (à quand sa mise à jour du reste? Histoire de séparer le bon grain (l'authentique) de l'ivraie (les ersatz) poussant à tous les coins des chemins buissonniers désormais...). C'est chez Béatrice Soulié, la galerie sise au 21, rue Guénégaud dans le 6e ardt parisien, du 22 au 27 février (ce qui est bien court, et commence aujourd'hui ; le vernissage étant demain mardi 23). L'artiste dédicacera son livre L'avaleur de nuages au cours de cette exposition.
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Jano Pesset, carte d'invitation à son exposition à la Galerie Béatrice Soulié

21/02/2010

Playboy communiste, le DVD

Alain R., graffiti centre-ville de Rouen, ph. Bruno Montpied, 2005.jpg
Alain Rault, graffiti centre-ville de Rouen sur une armoire électrique, ph.Bruno Montpied, 2005

  Annoncée par commentaire interposé grâce à David Thouroude, il est peut-être bon d'insister quelque peu en lui faisant accéder à la dignité d'une note, voici donc la sortie , prévue pour mars, d'un DVD tiré du documentaire consacré par DT et Pascal Héranval à celui que j'appelle "Le griffonneur de Rouen", c'est-à-dire Alain R., vagabond des rues rouennaises, qui couvre en lettriste sauvage conséquent les murs de la ville de ses mots graffités dans des palimpsestes parfois aux limites de la lisibilité (voir l'armoire électrique près de la Poste en centre-ville). On se reportera pour en savoir plus sur ce sujet à la note que je lui ai déjà consacrée ainsi qu'au site "Playboy communiste" signalé sur ce blog dans mes "liens", où l'on peut voir des extraits du film, entre autres.

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Portrait que j'ai fait d'Alain R., en octobre 2005, BM

    Pour se le procurer, on écrit à MIL SABORDS, 9, rue Georges Braque, IMM. ALPHA, 76000 Rouen. Le DVD vaut 12  € + 3€ de frais de port. Paiement par chèque à l'ordre de MIL SABORDS.