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27/08/2011

Kadhafi squelettisé et bandit manchot emplumé

    Dans la transmission récente de photos estivales d'un genre particulier, mais bien plus réjouissantes que les usuelles, le hasard (qui n'existe pas comme on sait) a voulu que me parviennent deux effigies au garde-à-vous qui ont pour point commun, outre une rigidité longiligne, celui de venger, au moins symboliquement de vieilles haines à l'égard de figures répressives. L'une vient de Tripoli, et l'autre du XIVe ardt de Paris.

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Ph. Tahar Hani, source France 24 (signalée par Régis Gayraud); vision prophétique de Kadhafi par un bricoleur spontané des rues prénommé Mohamed

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Apparition nocturne, rue Gazan (XIVe ardt), punition à base de goudron et plumes sur la personne d'un horrordateur par un usager en colère contre l'augmentation actuelle des amendes ; ph. Mathilde Maraninchi

21/08/2011

Le musée d'Antoine Paucard, limousinant, ancien communiste, poète et sculpteur autodidacte, patriotard et spiritualiste

 

Cette note est dédiée à la personne signant "les freluquets farfelus" qui m'a mis sur la piste d'Antoine Paucard, qu'elle en soit donc remerciée ici.

 

     Que d'étiquettes à coller sur le dos de cet étonnant personnage qui vécut une grande partie de sa vie à Saint-Salvadour, en Corrèze... Antoine Paucard,antoineP.jpg né en 1886, disparu en 1980, à l'âge respectable de 94 ans, fut en effet, nous dit-on sur internet (sources blogs Algerazur, Jean Maury et Wikipédia, dont les informations sont à réactualiser, je m'y emploie ici même), "tour à tour cultivateur, maçon, révolutionnaire, voyageur, auteur de chansons limousinantes, poète", et surtout pour ce qui me concerne un sculpteur naïf de première qualité...

 

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Antoine Paucard, autoportrait avec un ami, Roger Cronnier, avec commentaires inscrits sur les côtés, et au revers un bas-relief montrant "Minerve, déesse de la sagesse et des arts", (cette statue, difficile à déplacer, était à cet emplacement, devant l'ancienne maison de l'auteur, d'une manière toute transitoire), ph. Bruno Montpied, juillet 2011  

     En effet, venu sur le tard semble-t-il à cette dernière forme d'expression, il créa un ensemble de statues taillées pour leur majorité dans le granit qu'il décida d'exposer dans un petit musée bricolé par ses soins dans une petite dépendance de sa maison principale (voir image ci-contre, ph.BM).005 Ancienne-maison-d'A-Paucard.jpg L'entrée était libre, une pierre indiquait un "musée Paucard",047-bis-Musée-Antoine-Pauca.jpg ouvert tous les jours, et un panneau proclamait, paraît-il: "Entrez comme chez vous, mais refermez le clidou" (à mon passage, en juillet dernier, je ne l'ai plus vu, et pour cause, le musée avait été vidé de son contenu, par suite de la vente de la propriété par le fils d'Antoine Paucard et le transfert des collections dans un local également derrière la mairie du bourg où elles sont actuellement en cours de réinstallation).

 

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Cherchez le nouvel emplacement du musée Paucard... Ph. BM

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Le voici de nouveau à l'abri (chantier en cours... a priori non visitable pour l'heure), ph. BM

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Les statues transférées, une trentaine à peu près, pas toutes encore installées au moment de ma visite... Ph. BM, juillet 2011

      Depuis 2008, la commune, consciente de l'importance de ce patrimoine, a racheté le musée, ainsi que les archives d'Antoine Paucard, qui comptent notamment 120 carnets, contenant des notes et des réflexions personnelles, des aphorismes, des souvenirs, des poèmes, des chansons, le tout écrit entre 1930 et 1975... Peut-être la commune possède-t-elle un exemplaire, voire le manuscrit même, du livre qu'écrivit Paucard de retour d'URSS en 1933 (il n'y a pas que des Gide à en être "revenu"), intitulé "Un mois en Russie, par un paysan de la Corrèze". Je donnerais cher pour pouvoir lire ça...

 

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Coffre d'Antoine Paucard couvert de poèmes ayant trait à ses carnets de notes, que ce coffre était vraisemblablement chargé de conserver, ph.BM  

 

     Cependant, on peut se faire un début d'idée sur la personnalité et les opinions d'Antoine Paucard tant ce dernier a laissé ailleurs que dans ces carnets des traces de ses pensées. Il a inventé en particulier une très originale façon de les exprimer: des statues-poèmes (c'est moi qui les appelle ainsi). De nombreuses effigies sont striées d'inscriptions gravées et soulignées en noir, qui sont autant d'étapes dans l'histoire paucardienne de ses admirations, de son panthéon personnel, de sa philosophie, de ses convictions.

 

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Musée Antoine Paucard, de Napoléon à Sédulix... Ph.BM

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Les généraux Margueritte et Nivelle, Sédulix et autres... Ph BM

 

     Parmi  ces effigies, on retrouve Napoléon, Charlemagne, Richelieu, deux généraux de la guerre de 14, Margueritte et Nivelle, un chef gaulois particulièrement vénéré par Paucard, nommé Sédulix (sorte de Vercingétorix du Limousin), Saint Salvadour, le père et la grand-mère de l'auteur, des chasseurs d'Afrique (vraisemblablement, étant donné que c'est le corps dans lequel servit Paucard de 1906 à 1909, et où il perdit un œil au Maroc), Confucius, etc.054-bis-Chasseur-d'Afrique-poly.jpg

 

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Antoine Paucard, "Positivisme...et spiritualité", ph.BM

 

      Mais aussi, il n'est pas rare de rencontrer des pierres entièrement vouées aux inscriptions, l'auteur gravant ses écrits dans la matière, affichant ainsi sa volonté de représenter plus solidement l'éternité de l'esprit qu'il n'a de cesse de proclamer dans sa littérature (dont la postérité lui paraissait sans doute peu assurée), et particulièrement aussi au cimetière du village où il a pu sculpter son tombeau et celui de sa famille,028-Tombeau-de-la-famille-Pauca.jpg et de surcroît la stèle commémorant la mort d'un de ses compagnons résistants du "combat de La Servantie" (où cela se passait-il? Dans quelle région ou maquis? On aimerait davantage de renseignements là-dessus...),036-Datiko-Verouachvili,-la-pho.jpg un Géorgien au calot étoilé, Datiko Verouachvili, à qui il a consacré dans son musée un buste également.086 Résistant-géorgien.jpg    

Bibliographie:

Françoise Etay, Les chansons du temps de mon grand-père, in L'ethnomusicologie de la France, Editions L'Harmattan, 2008, pp. 225–226.

 

Robert Joudoux, Évocation d'Antoine Paucard, écrivain, sculpteur et chansonnier limousin de Saint Salvadour, Lemouzi, n°147, juillet 1998, p. 21.

Jean-Loup Lemaître, Michelle et Stéphane Vallière, Corrèze, 100 lieux pour les curieux, Guide Bonneton insolite, juin 2010, chapitre "Souvenirs d'un anticonformiste", pp. 167-169.

Illustrations du bas de cette note: Datiko Verouachvili en photo sur sa tombe au cimetière dont l'épitaphe a été rédigée et  gravée par Paucard, et aussi en buste, taillé dans le granit par Paucard dans son musée.

 

 

15/08/2011

Qui est aveugle?

     That is the question, en effet. Posée par le Centre d'Etude de l'Expression dans  les caves voûtées du musée Singer-Polignac, situé dans l'enceinte de l'Hôpital Sainte-Anne (on peut y entrer et en sortir, pas d'inquiétude...). Et ce du 17 septembre prochain jusqu'au 20 novembre (début de l'expo pour la journée du patrimoine le jeudi 15). C'est visiblement une expo de confrontations entre diverses appellations plus ou moins contrôlées.

 

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Fresque de Le Gouïc, escalier d'accès au musée Singer-Polignac, ph.Bruno Montpied, 2009

      Voici la liste des créateurs ou artistes (on répartira ces deux termes en fonction du degré de professionalisation de chacun) exposés à cette occasion:

Albino Braz, Noëlle Defages, Madeleine Dujardin, Even, Anna Hackel, André Le Hien, Alexandre Nelidoff, Neveu, Fernando Pau, Nicholas Sarley, Charles Schley, Joseph Barbiero, Aristide Cailliaud, Patrick Chapelière, Jill Gallieni, Vincent Germani, Charles Lanert, Frédéric Léglise, Michel Nedjar, Jean-Christophe Philippi, Abdelkader Rifi ; ainsi que les artistes du Créative Growth (USA) : Dwight Mackintosh, Donald Mitchell, William Tyler, Aurie Ramirez.

      Albino Braz, brésilien, j'admire ses femmes nues aux chevelures hirsutes, aux corps striés comme si c'était des femmes velues et sauvages.Albino-Braz,-Centre-d'etude.jpg Beaucoup d'autres noms de cette liste ne m'évoquent rien par contre. Charles Schley figure dans les créateurs mentionnés par Anne-Marie Dubois dans ses livres sur la collection du Centre d'Etude de l'Expression (Braz aussi). Joseph Barbiero, j'en ai causé il n'y a pas longtemps ici. Aristide Caillaud est connu depuis des lustres comme un artiste original parfois rangé dans les Naïfs (épithète non infâmante pour moi), ou parmi les singuliers naïfs...Couv catal Ar.Caillaud.gif Patrick Chapelière, je viens de le mentionner comme vu récemment au musée des Arts Buissonniers en Aveyron, son oeuvre hésite entre naïvisme et poésie brute, quoique je pencherai plutôt pour la première catégorie (ci-dessous une repro d'un œuvre alliant évocations d'éléphant et de poignard, coll. privée).Patrick-Chapelière,-ss-titr.jpg Charles Lanert (1902-1995) est un cas curieux d'artiste qui n'a jamais réussi à se faire connaître. Ancien radiologue au service de l'armée de terre (ça me rappelle Gabritschewsky qui avait été biologiste), il produisit beaucoup de peintures qui ressemblent à des réminiscences de vues microscopiques genre cellulaires.
     Son oeuvre qu'on peut découvrir sur le net surtout grâce  une vidéo sur Youtube paraît imprégnée de références à divers courants de l'art moderne, et a priori ne ressemblerait pas à quelque chose qu'on peut ranger dans l'art brut, pas plus qu'une œuvre de Michaux, de Wols ou de Gorki en tout cas. Mais elle peut par contre contribuer à propager la confusion des genres, comme c'est la mode actuellement...

 

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© Michel Nedjar, 2001

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Jean-Christophe Philippi, coll.privée, ph.BM 2008 (ces deux peintures ne renvoient pas à ce qui est montré à l'expo, elles sont nettement antérieures)

 

   Michel Nedjar se retrouve embarqué dans cette réunion, ainsi que Jean-Christophe Philippi, tous deux excellents artistes singuliers entretenant des rapports esthétiques certains. Abdelkader Rifi est plus rare ici. Car avant tout créateur d'un environnement en mosaïque à Gagny, il a aussi laissé (il est mort en 2005) des oeuvres transportables qu'on ne voit jamais, c'est peut-être ce qui m'intrigue personnellement le plus dans cette expo. Les créateurs du Creative Growth Center sont eux beaucoup moins inconnus, si l'on se souvient, par exemple, des expos montées à Paris dans l'ex-Galerie Impaire de la rue Lancry dans le Xe ardt.

 

Abdelkader Rifi, composition florale, 59x80, vente Tajan 2008.jpg

Abdelkader Rifi, composition florale, 59x80cm, œuvre présente à une vente chez Tajan en 2008

 

   

13/08/2011

Créature du Mont-Blanc

     Rousse bien sûr, à l'aise, outrageusement fardée, si échauffée qu'elle ne craint pas de s'exposer à l'air vif des montagnes. Les neiges éternelles à l'arrière-plan se mettent devant un tel spectacle à prendre des rotondités suggestives. On imagine monsieur Nicoli, lui qui l'a peinte et nommée si crûment, dans un certain état de surexcitation. L'ivresse de l'altitude? Concentrée en un seul mot à l'ambivalence intense...

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Nicoli, La salope du Mt-Blanc, sans date (merci à PL et Dominique H. pour la transmission de l'image) 

11/08/2011

René Rigal, ou la sculpture-phasme

    Qu'il est doux de vagabonder dans le labyrinthe des minuscules départementales, bien loin des autoroutes où comme de juste, on ne trouve aucun inspiré du bord des autoroutes, cela tombe sous le sens. On voyage au cœur du néant sur ces rails de ciment, hors géographie, si loin de toute réalité que les régions et édifices que l'on aurait pu rencontrer n'existent que sur le papier, je veux dire, sur ces panneaux couleur de fèces qui nous donnent l'impression de flotter dans un monde virtuel. Sur les autoroutes, on ne sort pas de son ordinateur.

 

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Ph. Bruno Montpied

 

      Je vois tout à coup une flèche, "Musée éclaté". Je murmure dans ma barbe, on ne va pas aller voir bien sûr ce musée éclaté, pourtant, c'est un drôle de  nom... Et surprise, mon camarade au volant braque aussitôt, enfilant une route encore plus minuscule qui serpente en grimpant sur des collines en direction d'un village nommé Cardaillac. On est au nord de Figeac, et non loin de Capdenac. Le "Musée éclaté" se fait désirer, et l'on finit par y pénétrer, alors que ce n'est pas l'heure d'ouverture. Il y a un sculpteur à l'intérieur qui pourrait m'intéresser, me dit une dame qui anime ce musée, qui est en réalité "éclaté" parce qu'en plusieurs parties, genre écomusée rural sur les métiers et les écoles de jadis. Marie Mage, c'est son nom magnifique, nous conduit à la partie brocante, musée de tout (des museums of everything, y en a aussi dans nos belles provinces, y a pas qu'à Londres), où elle me montre le sculpteur en question, ou du moins ses oeuvres. Et je reconnais subitement les figures filiformesmusée éclaté,rené rigal,association hors-champ,marie mage,macary et pennet,galerie la menuiserie,jean-michel deslettres aussi dégingandées que des phasmes humains saisis dans le bois, c'est de René Rigal!

 

 

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René Rigal, Si tous les gars du monde voulaient se donner la main... Expositon le Musée éclaté, Cardaillac, été 2011, ph. BM 

   Ô, la belle coïncidence... Je n'en avais jamais vu autrement que sous la forme d'un charmant petit documentaire projeté dans un festival Hors-Champ à Nice (René ne tape pas la belote de Philippe Macary et Jean-Marc Pennet, 13 min, 2000 ; à noter que René Rigal apparaît aussi plus briévement dans un film de Paolo Mucciarelli, Truc d'esprit, art singulier en France, 30 min, 2006).

 

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Ph.BM

 

      Des sculpteurs autodidactes exploitant les formes naturelles du bois, les racines, les branches ou les souches, il en existe souvent. Dans le cas de René Rigal, disparu hélas tout récemment (il sculpta de 1978, date de sa mise à la retraite de conducteur de train, jusqu'à sa mort, survenue apparemment en novembre 2008voir commentaire ci-après), on a affaire à un exceptionnel créateur du fait de son choix de bois aux formes étirées, tendant au filiforme, à la liane serpentine, ce qui ne l'empêchait pas pour autant de voir en eux divers personnages ou animaux.musée éclaté,rené rigal,association hors-champ,marie mage,macary et pennet,galerie la menuiserie,jean-michel deslettres Dans le musée éclaté, c'était surtout des personnages humains qui avaient colonisé l'espace pour une période sans doute transitoire (je ne me rappelle plus très bien ce que Mme Mage nous a dit, c'était comme un tourbillon de rencontrer ces statues si étonnantes, si dansantes).

     Dans le livre édité par l'association Hors-Champ, le Petit Dictionnaire Hors-Champ de l'Art Brut au Cinéma, Gilbert Fenouille fait une remarque fort plausible: "René Rigal en a eu assez de suivre les rails du conformisme social et les horaires rigides. C'est peut-être pour ça qu'au moment de la retraite, il s'est mis à sculpter les bois tordus." La sinuosité de ses chevaliers à longues figures renvoie probablement à la capricieuse ligne de vie qu'il avait dû suivre dès le travail abandonné.

 

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Ph.BM

 

     Le film de Pennet et Macary ne durait qu'une douzaine de minutes et les renseignements sur M.Rigal manquent aujourd'hui passablement. Il faudrait probablement s'adresser à la galerie La Menuiserie à Rodez pour en apprendre un peu plus. Ce sculpteur a eu ses œuvres fort bien servies par un excellent photographe, Jean-Michel Deslettres. Des clichés de ce dernier ont été notamment publiésdans un petit catalogue non daté que réalisa la galerie La Menuiserie après la mort du créateur (donc cette année). Il est souhaitable cependant qu'on consacre un jour un peu plus de papier à l'évocation de l'ensemble des pièces sculptées de cet excellent créateur. 

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Photo Jean-Michel Deslettres sur la couverture du catalogue de La Menuiserie

 

Comment accéder au Musée Eclaté? On va jusqu'à la place de la Tour, 46100, Cardaillac. Tél 05 65 40 10 63 ou 05 65 40 15 65. www.musee-eclate-cardaillac.fr (7 lieux "chargés d'histoire" à visiter avec des guides, maison du semalier, saboterie, moulin à huile de noix, l'étuve à pruneaux...). Le village de Cardaillac est très charmant, et il y a un bistrot si je me souviens bien... 

06/08/2011

Les amis de l'oeuvre de l'abbé Fouré au Sémaphore de la Pointe du Grouin

     Joëlle Jouneau et son Association des Amis de l'Œuvre de l'abbé Fouré remettent le couvert pour une expo du 10 au 24 août à Rothéneuf (dans la salle de quartier) sur le cher Ermite (pas si ermite que ça puisqu'il avait une bonne, a-t-on appris grâce au livre de Jean Jéhan...). C'est le prolongement de l'expo de décembre 2010 dont j'avais parlé et que peu de monde avait pu aller voir. Elle est en outre complétée d'une présentation de la Côte d'Emeraude à la Belle Epoque. Espérons que comme en décembre dernier, à cette occasion on puisse voir surgir d'on ne sait quel placard quelque petite oeuvre d'Adofe-Julien Fouré revenue faire un tour devant nos yeux ébahis.

 

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    De plus Mme Jouneau m'apprend que l'association occupera le Sémaphore de la Pointe du Grouin, situé entre Rothéneuf et Cancale, non loin de St-Coulomb, de septembre à novembre. Qu'on se le dise, si l'on passe par là cet automne. Ce sera l'occasion pour ceux que la visite des rochers sculptés aurait laissés sur leur faim d'en apprendre un peu plus sur le sens de ces rochers qui n'ont que très peu à voir avec l'histoire de corsaires que les gérants du lieu véhiculent à leur propos depuis cent ans.

 

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Rochers sculptés de l'abbé Fouré, une vache, des généraux de la Guerre des Boers, ph Bruno Montpied, 2009

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Jeanne du Minihic (un type sculpté par l'abbé ici, la femme du marin qui attend le retour de son mari, les yeux anxieux fixés sur l'horizon) ; sculpture disparue aujourd'hui, carte postale Guérin, St-Malo, peut-être années 1910?

Et un rappel...:

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Dossier paru en janvier 2010 dans la revue L'Or aux 13 îles n°1 (Jean-Christophe Belotti, 7, rue de la Houzelle, 77250, Veneux-les-Sablons)

 

05/08/2011

Le Musée des Arts Buissonniers

     Joli nom que celui de ce musée situé dans le village sympathique de Saint-Sever-du-Moustier dans l'Aveyron, près des monts de Lacaune, au nord du Languedoc, dans une zone qui a fait parler d'elle pour la découverte depuis plusieurs années de statues-menhirs Statue-menhir blog Anna Galore.jpgaux dessins en relief passionnants (voir ci-contre photo Anna Galore).

musée des arts buissonniers,art singulier,art brut,jerzy ruszczynski,statues-menhirs     Le musée qui organise des expositions temporaires chaque été possède une collection permanente, apparemment réduite certes, mais de très grande promesse (ci-dessus une moto "Spéciale Sophia Loren" de Jean Tourlonias par exemple, ph. B.M.).

 

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Annie Tolliver, Musée des Arts buissonniers, ph. B.Montpied, 2011

   Ses responsables, qui ne cherchent pas particulièrement à se mettre en avant, sont soucieux de qualité et d'originalité, sans non plus tomber dans des débats sans fin sur la terminologie qu'il conviendrait d'adopter quant à leurs choix et leurs goûts, leurs rencontres avec telle ou telle création. "Art buissonnier" est le seul terme qu'ils mettent au premier plan, et c'est fort bien choisi, très poétique, je leur envie ce mot... Le public saura ainsi s'y retrouver de loin, il aura affaire ici à des créateurs qui fréquentent les chemins de traverse, et les collections inspirées.

 

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Patrick Chapelière, 2007, Musée des Arts Buissonniers, ph.BM, 2011

 

     Le musée est animé par une association, Les Nouveaux Troubadours, qui ne se contente pas de bâtir une collection d'œuvres mais organise aussi des stages accueillant divers groupes qui sont conviés à participer au chantier érigeant petit à petit une "construction insolite" (terme utilisé provisoirement?). musée des arts buissonniers,art singulier,art brut,jerzy ruszczynski,statues-menhirsC'est un work in progress collectif en somme, dont j'ai déjà parlé il y a peu, qui tient à la fois du musée de Robert Tatin, de la maison de Jacques Lucas (lui-même émule de Tatin, je crois), du jardin des Tarots de Nikki de Saint-Phalle (c'est le toboggan dans un coin qui m'y fait penser), du Palais Idéal aussi, par moments on peut même lui trouver un vague côté Nek Chand, ou simplement hindou (toujours le toboggan avec son visage au-dessus), etc...

 

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Un mur sur la terrasse supérieure avec des galets peints et assemblés, réalisation récente semble-t-il..., ph. BM, 2011

     Ça part en feux d'artifice, dans tous les sens, en fonction des multiples et variés intervenants, plasticiens qui s'y collent de façon intermittente ou continue.

 

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L'église en contrebas de la Construction Insolite à St-Sever-du-Moustier, ph.BM, 2011

 

     La construction en question est située sur une colline qui domine le village, de là-haut on voit fort bien l'église et le bourg qui se nichent en contrebas, une comparaison s'esquisse de l'architecture de l'église à celle de la Construction Insolite.

 

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Et très probablement deux nouveaux troubadours..., ph. BM, 2011

   

30/07/2011

Esprits de la mine à Lewarde

     "Esprit Mine" au Centre Historique Minier de Lewarde (Nord), tel est le titre de l'expo qui a débuté le 1er juillet et se finira le 31 décembre de cette même année. Y sont réunis 16 artistes et créateurs, autodidactes et professionnels mêlés, "ayant entretenu dans leur démarche créatrice un rapport conscient ou inconscient à la culture minière, au charbon ou à la mémoire de la mine", comme le rapporte le site web d'ABCD qui a collaboré à cette expo en prêtant des oeuvres d'Anselme Boix-Vives. Ce sont surtout les autodidactes présents dans cette expo qui nous intéressent, comme de juste: Boix-Vives certes mais aussi Augustin Lesage, Félicien Delvigne, Gaston Duf, Jacques Trovic, Jean-Michel Wuilbeaux (venu du centre La Pommeraie) et Stefan Nowak (voir illustration ci-contre, "L'amour dans l'amour", oeuvre conservée au LaM de Villeneuve-d'Ascq.L_amour_dans_l_amour_Stefan_NOWAK LaM_Villeneuve_d_Ascq.jpg

 

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Jacques Trovic derrière une mosaïque, et non pas derrière une de ses tapisseries pour lesquelles il est davantage connu ; il s'agit d'un mineur devant un chevalet, ph. Bruno Montpied, novembre 2009 (est-ce que cette oeuvre a été sélectionnée à Lewarde, je ne sais pas, mais elle aurait pu...)

 

     Les liens et les créateurs populaires ayant des rapports avec la mine sont effectivement fort nombreux. Citons au passage le Félix Picques que j'ai mentionné dans ma note sur le n° récent d'Area sur l'Art et la Folie. Mais on pense aussi aux spirites de la région de Béthune, Arras, etc, les Lesage, ou les Victor Simon.

 

Victor-Simon (1903-1976), la toile jaune (hui sur t), 21 fév 71.jpg

Victor Simon, la Toile jaune, 21 février 1971, coll d'art brut du LaM, Villeneuve-d'Ascq

 

     On pense aussi à ces créateurs d'environnements spontanés, ou anarchiques (mot synonyme), que l'on rencontre depuis déjà un siècle dans le Nord et le Pas-de-Calais, à commencer par un Charles Pecqueur ancien mineur qui fit une fresque dans son jardin sur Blanche-Neige et ses 7 nains revenus de la mine (Neige blanche, rêve d'antithèse absolue pour un qui a le corps immergé dans le charbon et la nuit des galeries?), révélé autrefois par Bernard Lassus et Francis David (voir ci-contre photo de ce dernier).Charles-Péqueur,-Blanche-Ne.jpg D'autres ont travaillé aux Houillères, comme Léon Evangélaire à Pont-à-Vendin, auteur de statues en ciment ou Remy Callot à Carvin qui a vu ses mosaïques préservées par la commune.

 

 

 

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Remy Callot, Carvin (Pas-de-Calais, détail d'une fresque en mosaïque (scène égyptienne antique?), ph. BM, octobre 2008

 Centre Historique Minier de Lewarde, Fosse Delloye BP 30039, rue d’Erchin, 59 287 Lewarde. 03 27 95 82 82. http://www.chm-lewarde.com/

 

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Plaque émaillée d'avertissement dans les mines, signalée par Laurent Jacquy, voir son blog Les Beaux Dimanches

 

 

26/07/2011

Le Palais Idéal, Mont-Saint-Michel de l'Art Brut

     "La marchandise culturelle est la marchandise idéale, celle qui fait avaler toutes les autres", disait, je crois à peu prés, Raoul Vaneigem. Et l'art brut, même et surtout peut-être lorsqu'il s'agit d'un monument aussi conséquent que le Palais Idéal du facteur Ferdinand Cheval, ne fait pas exception à la règle. Bien qu'il ait été au départ aussi une machine de guerre, inconsciente bien entendu, contre l'univers réifié distillé par l'empire de la marchandise. Produits dérivés dans la boutique du Palais, tee-shirts marqués "le rêve, obstinément" (ou quelque chose dans ce genre...), cartes postales, petit commerce seulement en gestation actuellement à Hauterives, mais qui n'en doutons pas ne demande qu'à se développer, avec l'essor parallèle des festivals de jazz ou de variétés qui sont montés devant le Palais, devenu simple faire-valoir des cabotins en tous genres du music-hall, cette évolution ne pouvait manquer d'advenir, diront les Cassandre en tous genres.

     Si le Palais Idéal continue,  à côté de ce cirque, et plus encore depuis que les campagnes de restauration l'ont admirablement remis en lumière, à irradier sa merveilleuse et bouleversante poésie, les commerces environnants s'en donnent à coeur joie. En voici un florilège photographique...

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Commençons par une enseigne où le sciapode pourrait avoir ses habitudes... Ph. BM, 2011

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Au-Régal-du-palais.jpg

L'Idéal-Resto-du-Palais.jpg

Le palais de l'immobilier.jpg

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Ce boulanger fait-il une association avec le postérieur du facteur Cheval? C'est pas sûr, mais un lacanien de passage ne le raterait pas...

 

25/07/2011

Vache-pirate auvergnate

     On fait d'étonnantes rencontres au pays de la chaîne des puys... Il était fatal que le hasard dessinant les robes bovines finisse par nous fournir un tel spectacle, qui fera à n'en pas douter le clou d'un prochain Salon de l'Agriculture, si on parvient à retrouver l'individu du genre pirate qui broutait innocemment du côté de Rochefort-Montagne...

Vache-pirate-auvergnate,-ju.jpg

Ph. Bruno Montpied, Auvergne, juillet 2011

21/07/2011

Naïfs théâtres de verdure, ceux qui refont le monde autour d'eux

   Tel est le titre d'un nouvel article que j'ai consacré, dans la récente deuxième livraison de la revue littéraire Jardins, publié aux éditions du Sandre, aux environnements spontanés créés par des retraités de la classe ouvrière. Ce n°2 de la revue est placé sous le signe du "réenchantement". Pas d'images, que du texte, j'aime ce parti-pris radical qui concernera tous ceux qui ne désespèrent pas encore complètement de la pensée et de la lecture. Il est possible de déambuler parmi les jardins en pensée seulement, c'est même plus libertaire, car chaque lecteur se fait les images qu'il veut en lisant (c'est pourquoi un lecteur est invariablement déçu lorsqu'il découvre une adaptation filmée d'après une de ses lectures).

 

 

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     Lisons quelques lignes au hasard, prises dans une des nombreuses contributions de ce numéro, celle de Claude Dourguin, Propos de jardins:

      "Au hasard des déambulations à travers les villes, des promenades matinales - à moins que ce ne soit, saison favorable, dans les soirées -, parfois on surprend des jardins. Une rue devient provinciale, tranquille où traversent des chats, quelque chose ici se desserre, le temps, dirait-on, est comme suspendu, au-dessus d'un mur des branches font signe. On ne voit presque rien, des feuillages, parfois un rosier qui a grimpé hardi tend deux, trois roses au ciel, pourtant le pas s'éteint de lui-même, et l'on reste là, pensif, reconnaissant - quelle présence inconnue fait ce don? Car de l'autre côté, on le sait bien, dérobé aux furieux constructeurs, tenant tête, un petit enclos de résistance verte, une délectation, une rêverie."

     Dans ma propre contribution, Naïfs théâtres de verdure, je reviens bien entendu sur un certain nombre de créateurs d'environnements hétéroclites naïfs ou bruts, certains évoqués dans mon livre Eloge des Jardins anarchiques. J'en profite ici pour pointer davantage les sources et les techniques employées pour faire naître ces statues et autres édifices étonnants, eux aussi exemples inconscients de "résistance aux furieux constructeurs". Travaillant sans aucune honte de la copie, mais adeptes d'un détournement qui ne dit pas son nom, concernant à la fois les matériaux, mais aussi les thèmes, les sujets, les modèles. On n'a pas de culture? Qu'à cela ne tienne, on récupère celle qu'on trouve autour de soi, notamment dans la petite boîte à images qui bougent, et vogue la galère, on bricole et on invente, on s'incorpore tout ce qui passe sous l'oeil et la main, comme Ferdinand Cheval dans son Palais, où des fragments de maquettes d'autres architectures se retrouvent absorbés, digérés, recrachés ente deux cascades de rocaille...

 

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Palais Idéal du Facteur Cheval, maquette incorporée dans la façade est, ph. Bruno Montpied, 2011

 

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Le couple Pauline et Charles Billy à Civrieux-d'Azergues, ph BM, 1990 ; autour d'eux les maquettes de monuments du monde entier que Charles avait "lâchés" et organisés dans le jardin entretenu par Pauline, inspiré qu'il avait été par les maquettes d'architecture installées dans les niches de la façade ouest du Palais de Ferdinand Cheval.

 

     Ces créateurs se hissent, par delà la constatation de leur vie dissipée dans des tâches aliénées à la nécessité de survivre matériellement, à la position de nouveaux héros de la classe ouvrière ou paysanne, par le dépassement qu'opérent leurs constructions automatiques, tels des poèmes de ciment nés comme du chiendent.

 

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Bruno Montpied, première page de Naïfs théâtres de verdure, ceux qui refont le monde autour d'eux, Jardins n°2

Le n°2 de Jardins est disponible dans toutes les bonnes librairies un peu curieuses, par exemple à l'Ecume des Pages, à St-Germain-des-Prés, à Paris (6e ardt). Sinon, on peut aussi s'adresser aux Editions du Sandre, 57, rue du Docteur Blanche, 75016, Paris. Il existe aussi un site web lié à la revue: http://revuejardins.blogspot.com/, où l'on trouvera une adresse électronique où demander la revue. Ce site propose quelques images (il faut bien penser à  ceux qui trouvent les textes trop longs...).

 

16/07/2011

Tournée musicalternative dans les lieux du singulier ou du brut

     Là encore, le lapin blanc de l'info singulière ne cesse de retarder (c'est pourquoi il regarde compulsivement sa montre). Il me faut vous signaler de toute urgence, avant la fin du jour, le programme chargé d'un groupe au nom particulièrement compliqué L'Autopsie A Révélé Que La Mort Etait Due A L'Autopsie, composé de quatre musiciens expérimentaux, par ailleurs férus, paraît-il, d'art singulier et d'art brut (Franck de Quengo, Sébastien Borgo -qui prépare, dit le programme de leur tournée, un livre sur les "aménagements artistiques des maisons et jardins d'Alsace", on attend de voir ça...-, Nicolas Marmin/Aka Bondage (je sais pas ce que ça veut dire ce double nom) et Anla Courtis, qui ne sera présent que par des enregistrements semble-t-il).

 

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Au Musée du Pays Foyen, quelques têtes de Franck Barret, la femme de l'explorateur et Jeanne d'Arc, Ste-Foy-la-Grande, ph. Bruno Montpied, 2008

 

     Je ne sais pas trop ce que vaut la musique de ces messieurs, mais l'originalité de leur projet consiste à mes yeux dans le tour de France qu'ils annoncent pour la semaine qui commence demain du 17 au 25 juillet, qui va les faire tenter d'instaurer un dialogue musical avec les lieux insolites où ils ont prévu de confronter leur propre inspiration. Sept lieux sont au programme, la Halle St-Pierre dimanche 17, à 15h (le concert donne accès aussi à l'expo sur la collection de Charlotte Zander), lundi 18 à "la Forge" de Florence Marie, à Honfleur (concert à 20h), mardi 19, à la Grotte-Chapelle de Jean-Michel Chesné à Malakoff (pas d'horaire indiqué, se reporter au programme général de cette tournée) le mercredi 20 au Musée du Pays Foyen, où est conservé un ensemble de vestiges de statues en terre sauvées de la ferme de Franck Barret (concert à 18h30 au musée et à 21h au bar "Le Chai"), le vendredi 22 juillet sur le site de "la Construction Insolite" du Musée des Arts Buissonniers à St-Sever-du Moustier (concert à 21h), le samedi 23 à la Villa aux Cent Regards de Victor Grazzi à Montpellier (pas d'horaire indiqué, renseignements au 06 68 38 65 45) et le lundi 25 au Festival "Laisser le passage libre" à Barnave dans le Vercors, http://www.laisserlepassagelibre.org.

 

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La "Construction Insolite" à St-Sever-du-Moustier (Aveyron), chantier en cours..., ph.BM, 2011

    

15/07/2011

Monchâtre dans l'Aveyron, une expo en fanfares

     Vite, vite, dit le lapin blanc de l'information singulière et buissonnière, il me faut vite annoncer pour demain samedi 16 juillet les 15e rencontres de fanfares, et autres "joutes aveyronnaises de musiques acoustiques et ambulatoires" (ouf, je l'ai dit d'une traite sans respirer!) qui vont se tenir dans l'inspiré village de Saint-Sever-du-Moustier à partir de 16h. Demandez le programme ci-dessous:

Fête des fanfares à St-Sever, 2011.jpg

     St-Sever qui n'a rien de sévère ni d'austère abrite on le sait déjà peut-être un excellent petit musée, judicieusement nommé "Musée des arts buissonniers", animé par l'association Les Nouveaux Troubadours qui a deux cordes (au moins) à son arc, le chantier constamment in progress de la "Construction Insolite" (j'y reviendrai) et la Maison Coubez au coeur du village, face à l'église aux belles gargouilles, qui cache une excellente collection d'art brut et d'art singulier.

 

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François Monchâtre, exposition au Musée des Arts Buissonniers à St-Sever-du-Moustier du 16 juillet au 17 septembre 2011

   

     Ce dernier corpus fait l'objet d'un tri assez efficace (rien à voir avec les festivals du même nom se tenant un peu partout en France qui mettent en avant des centaines de faiseurs de têtes à Toto nés de la dernière pluie, sous-sous-arrière-petits-enfants édulcorés de Gaston Chaissac). J'y reviendrai là aussi. Demain 16 juillet, c'est aussi dans ce musée le vernissage d'une expo consacrée à François Monchâtre, un ancêtre (si je peux me permettre, pardon M. Monchâtre si vous me lisez) du bon art vraiment singulier. Monchâtre est connu pour ses machines et ses personnages de crétins "du néant retournant au néant", comme il est dit sur une plaquette d'invitation à une autre exposition qui elle se tient déjà depuis le 30 juin jusqu'au 18 septembre à Rodez, dans la galerie Sainte-Catherine (Maison départementale de la culture, 5, place Sainte-Catherine, 12000 Rodez; site: www.aveyron-culture.com/saintecatherine et blog: www.mdc12.fr). A noter que le commissariat de cette expo a été confié à l'équipe, qui aime à rester anonyme, du Musée des Arts Buissonniers. 

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Monchâtre à Rodez aussi, ph. Jean-Claude Launey

14/07/2011

Gabriel Albert, première monographie sur un inspiré par les services de l'Inventaire

     Est paru en mars, (le même mois que mon bouquin Eloge des Jardins Anarchiques), un magnifique ouvrage de taille imposante, bourré de photos, plans et documents divers, qui inventorie l'intégralité des 420 statues (dont une trentaine de volées) que laissa le menuisier Gabriel Albert à sa mort en 2000 (il était né en 1904, il faillit couvrir tout le siècle) dans son jardin à Nantillé (Charente-Maritime). C'est le résultat du travail hors-pair de divers auteurs, au premier plan desquels Michel Valière, Fabrice Bonnifait, Thierry Allard et Yann Oury, travail illustré de nombreuses photos, principalement de Gilles Beauvarlet, Raphaël Jean, et Christian Rome (accessoirement, on retrouve aussi des photos anciennes de Jacques Verroust et de votre serviteur, notamment lorsqu'il s'agit de montrer des statues disparues, ou des positionnements de ces mêmes statues différents de ceux d'aujourd'hui).

 

Gabriel Albert, environnements spontanés, inspirés du bord des routes, habitants-paysagistes, inventaire du patrimoine, sculpture naïve

 

      Ce livre, "Le Jardin de Gabriel, l'univers poétique d'un créateur saintongeais", est édité dans la collection Images du Patrimoine, n°266, par le service de l'Inventaire de la Région Poitou-Charentes (depuis 2004, ce sont les régions qui sous le contrôle de l'état se chargent des enquêtes d'inventaire du patrimoine), en collaboration avec les éditions Geste.

 

Gabriel Albert, environnements spontanés, inspirés du bord des routes, habitants-paysagistes, inventaire du patrimoine, sculpture naïve

Gabriel Albert, jeune fille à l'oiseau, ph.Bruno Montpied, 2006

 

     Le livre est une somme qui permet véritablement de faire presque le tour de la question du jardin de Gabriel.Gabriel Albert, environnements spontanés, inspirés du bord des routes, habitants-paysagistes, inventaire du patrimoine, sculpture naïve Des photos aériennes, des plans du jardin avec les emplacements des statues volées, des descriptions minutieuses des oeuvres sur place, le tout rédigé avec simplicité et précision (comme savent le faire les auteurs de ces cahiers d'Inventaire généralement, ce qui rend leurs ouvrages particulièrement agréables à parcourir), sans oublier le lien que l'on peut faire avec le site de l'Inventaire Poitou-Charentes, où l'on retrouvera une carte interactive du site, ainsi qu'un diaporama, et 411 statues étudiées sur un total de 420 créées par Gabriel Albert, tout cela donne le sentiment que l'on a fait véritablement le tour du sujet, de la manière la plus objective, sans se payer de mots inutiles.

 

Gabriel Albert, environnements spontanés, inspirés du bord des routes, habitants-paysagistes, inventaire du patrimoine, sculpture naïve

Jardin de Gabriel Albert photographié en 1988, trois ans avant que ne s'arrête l'auteur, ph.BM ; à droite scène de l'Angélus de Millet

 

     L'amateur a désormais en main un outil adéquat pour partir à la découverte de cet homme singulier improvisé sculpteur à sa retraite, après des années de labeur, qui ne lui avaient pas fait oublier ses rêves de jeunesse, où il avait caressé un court moment l'espoir de devenir un jour artiste. Ce qui est un cas resté exceptionnel dans le corpus des "inspirés du bord des routes". Je ne vois qu'un Gaston Mouly, sculpteur et dessinateur lotois, qui puisse lui être comparé pour ce désir refoulé d'être artiste. Parmi les descriptions des statues, on trouve également nombre de renseignements documentant la façon de travailler d'Albert, ainsi que les sources des images qu'il a cherchées dans certains cas à transposer ou à imiter.

 

Gabriel Albert, environnements spontanés, inspirés du bord des routes, habitants-paysagistes, inventaire du patrimoine, sculpture naïve

 

     Ce site est cependant - en dépit de cette publication, qui ne manquera pas d'interpeller tous les acteurs responsables de la pérennité de cet ensemble rare de sculpture autodidacte naïve en plein air - ce site est toujours en danger de ruine. La préfecture de la région Poitou-Charentes vient de promulguer un arrêté « portant inscription aux Monuments Historiques » de «  ce jardin [qui] présente au point de vue de l’histoire et de l’art un intérêt suffisant pour en rendre désirable la préservation en raison du caractère unique de cette œuvre souvent assimilée aux meilleures productions de l’art brut ». En attendant, les statues perdent la face, et les corps se couvrent d'une lèpre grise bien disgrâcieuse. Contrairement à  certains avis formulés dans le livre de l'Inventaire, je trouve l'état actuel du jardin très dégradé par rapport à ce qu'il était en 1988, date à laquelle je l'ai visité. Il était alors dans toute sa splendeur. Les statues étaient à l'apogée de leur éclat, leur modelé, leur finesse faisaient alors toute l'originalité du site. La restauration du site devrait viser à retrouver cet âge d'or devenu bien lointain.

 

Gabriel Albert, environnements spontanés, inspirés du bord des routes, habitants-paysagistes, inventaire du patrimoine, sculpture naïve

Photogramme extrait de mon ensemble de films en Super 8 "Les Jardins de l'art immédiat", 1988 (le personnage au gibus à droite a disparu aujourd'hui du jardin, probablement volé ; les statues alors étaient en leur âge d'or)

Gabriel Albert, environnements spontanés, inspirés du bord des routes, habitants-paysagistes, inventaire du patrimoine, sculpture naïve

Article de Sud-Ouest, juin 2011 ; communiqué par Patrick Métais, que je remercie ici

Le livre est trouvable à la librairie de la Halle St-Pierre à Paris. Sinon, dans toutes les bonnes librairies, comme on dit. On se reportera au site de l'Inventaire Poitou-Charentes pour d'éventuelles commandes.

   

02/07/2011

Info-Miettes (12)

Expo Ody Saban tout l'été au musée de la Création Franche

     Cela se tiendra du 1er juillet au 4 septembre au musée de Bègles.

 

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Du côté de chez Chave maintenant...

    Galerie Alphonse Chave, à Vence, on monte une exposition intitulée de façon un peu tarabiscotée je trouve, "L'harmonie des antonymes", avec en épigraphe sur le carton d'invitation quelques mots d'Héraclite d'où il ressort que "tout [surtout l'harmonie] devient par discorde" (le Poignard Subtil se voit ainsi confirmé dans ses choix)... Du 18 juin à fin août 2011. Avec Georges Bru, Gaston Chaissac, Gérard Eppelé, Jean Dubuffet, Slavko Kopac, Max Ernst, G.Lauro, Jean-François Ozenda, Jacques Prévert, Georges Ribemont-Dessaignes et alii... Tél: 04 93 58 03 45.

Le Musée des arts populaires de Laduz n'est plus subventionné...

     Jacqueline Humbert se bat toujours pour maintenir la merveilleuse collection construite par elle et son mari décédé en 1990, Raymond Humbert. La région lui refuse la subvention qu'elle recevait pourtant depuis plusieurs années. A-t-on décidé d'étrangler par l'indifférence et l'insensibilité (pour ne pas dire l'ignorance) des élus toutes les collections d'art populaire, qu'elles soient comme en l'espèce privée, mais ouverte aux publics de tous âges, ou qu'elles soient étatiques comme celle de l'ex-musée des ATP autrefois installé près du Jardin d'Acclimatation dans le Bois de Boulogne à Paris, et qui végète à présent dans on ne sait quel entrepôt en attendant que se bâtisse le mirifique bâtiment promis depuis des lustres près du fort Saint-Jean à Marseille?

 

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    En attendant, le musée de Laduz tient cependant à organiser une exposition d'été, et cette fois on reviendra à la peinture de Raymond Humbert qui fut un admirable paysagiste abstrait, parallèlement à sa passion pour l'art populaire qu'il interprétait en visionnaire. Sans doute, Jacqueline Humbert puisera dans la force intacte des oeuvres de ce grand vivant l'énergie de faire face aux défis qui attendent le musée. Je ne saurai trop inviter tous ceux qui subodorent la poésie présente au sein des arts populaires à venir visiter ce musée champêtre qui n'a rien à voir avec les collections habituelles de vieux outils poussiéreux. Sa muséographie est sans cesse attractive, attachée à mettre en valeur tous les côtés inspirants de la vie créatrice des campagnes anciennes, en s'appuyant sur la valeur esthétique des objets présentés. Son département de sculpture populaire insolite de plus flirte avec l'art brut, de même que ceux de la marine populaire ou de la mémoire des campagnes font parfois allusion à l'art naïf.

 

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Akram Sartakhti

    J'ai laissé passé l'occasion de parler de cette femme iranienne (née en 1950) qui chipa les pastels de son petit-fils pour lui montrer ce dont elle était aussi capable, non mais... (on pensa à d'autres qui firent de même, comme M'an Jeanne par exemple, ou Joseph Barbiero encouragé par un fils artiste, ou encore Boix-Vives lui-même... non?). La cafétéria de la Halle Saint-Pierre abritait une petite expo de ses oeuvres colorées et stylisées du 10 janvier au 13 février dernier.Akram 6.jpg La galerie Hamer à Amsterdam l'a aussi exposée entre mars et mai, avec une brochure à la clé préfacée par Laurent Danchin qui précise dedans qu'elle a commencé il y a seulement dix ans et que malgré le fait qu'elle ait caché d'abord ses oeuvres à son petit-fils, ce dernier, ayant quand même découvert ses dessins, les porta à l'attention de quelques experts, ce qui amena une ou deux oeuvres de sa grand-mère au musée d'art contemporain de Téhéran. C'est pour le peu qu'on a pu en voir à la Halle, une oeuvre fraîche et spontanée, joyeusement colorée et dégageant une grande vitalité grâce à la conjugaison de formes simples, suggestives avec de sensuels contrastes de teintes. Seuls les fonds peuvent paraître un peu vite faits comme si la peintre n'y attachait que peu d'importance. On ressent alors une impression de travail fait dans l'urgence, avec la bizarre sensation d'une précipitation.Akram 5.jpg

     Une autre peintre autodidacte iranienne existait aussi naguère, décédée à présent, qui était peut-être plus inspirée et brute qu'Akram Sartakhti, à savoir Mokarrameh Ghanbari, que ce blog-ci a évoqué voici déjà quelque temps, que l'on se reporte à... ces notes...

 

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Une oeuvre de Mokarrameh Ghanbari

Au Madmusée de Liège on révise son histoire...

     "Harvest", c'est le titre de l'exposition estivale du Musée d'Art Différencié (qui donne ce bel acronyme de MAD), titre très Neil Young, un peu trop anglais pour mon goût (est-ce que "moisson", ça fait péquenot chez nos amis belges...?). Elle se tiendra en deux lieux, en accès libre, au MADmusée du 2 juillet au 10 septembre, et au Grand Curtius, toujours à Liège, du 2 juillet au 13 novembre. Le propos du commissaire d'exposition (Brigitte Van Den Bossche?) est de montrer comment le "futur de la collection se dessine, grâce aux acquis des dernières années".ody saban,raymond humbert,akram sartakhti,mokarrameh,galerie hamer,art singulier,laduz,jacuqeline humbert,arts populaires ruraux,art contemporain iranien Depuis que j'ai vu des parties de ces acquis à l'expo parisienne de la Maison des Métallos, j'acquiesce à toutes ces propositions. Donc, que ceux qui le peuvent aillent faire un tour à Liège, une fois.

24/06/2011

Marie Espalieu dans Gazogène n°32

     Voici un numéro de la revue Gazogène qui voudrait nous faire plus amplement découvrir les bois naturels peints et assemblés d'une dame Marie Espalieu (1923-2007) qui vécut à Crayssac dans le Ségala (je sais pas où c'est, je vais voir sur Google, ah, c'est prés de Cahors, au nord-ouest, pas loin de Catus,  la région où vivait Gaston Mouly). Cette dame a été photographiée par Robert Doisneau, et l'on dirait que c'est son seul titre de gloire tant les contributeurs de cette revue ne cessent de nous le répéter.

 

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    La revue est en effet constituée de plusieurs textes de différents auteurs qui se marchent sur les pieds les uns des autres, répétant les mêmes choses, la candeur, la voyance, les bois qui parlent, etc. N'eut-il pas été plus utile et plus efficace de se contenter de dresser un catalogue en images des oeuvres de cette dame, restée encore passablement inconnue jusqu'à présent -du moins au large du Ségala- avec quelque bon texte décrivant sa façon de travailler, une petite bio, plus une analyse plus fouillée (il suffisait pour ce faire de laisser parler Benoît Decron, l'ancien conservateur du musée de l'Abbaye Sainte-Croix aux Sables-d'Olonne qui dans ce numéro livre une saine analyse remettant en question divers clichés)? La revue part un peu dans cette direction avec de nombreuses illustrations. Hélas, elles restent pour la plupart en noir et blanc, ce qui pour une œuvre où la couleur joue un grand rôle, on l'avouera, est un choix bizarre (mais Gazogène on le sait, il nous le serine assez, fait le choix de "l'humilité"... à moins que ce ne soit celui du misérabilisme?).

    Car les oeuvres de Marie Espalieu en bois peint, assemblées avec des clous, frustes, parfois enfantines, proches de certains travaux populaires de patience du temps jadis des campagnes, méritaient bien un hommage. Un hommage qui aurait évité d'être un prétexte pour certains d'étaler leurs ego (qu'ai-je à faire du "Tonton René" de monsieur Maurice?...) ou leurs états de service (toujours monsieur Maurice qui se montre par deux fois en photo, publie trois textes -je ne compte pas les textes non signés- dont un ancien qui ne fait que rajouter à la redondance  générale du numéro). Tout cela sans doute de peur d'être oublié vraisemblablement, mais t'inquiète pas Jean-François, ça finira tout de même par arriver, hélas).

La Revue Gazogène est diffusée, à Paris, à la librairie de la Halle Saint-Pierre. Sinon, on peut se la procurer en écrivant à Jean-François Maurice (comme de juste!), Le Bourg, 46140 Belaye.jfmaurice@laposte.net. Il vous en coûtera 17 € le numéro. 

20/06/2011

Toujours plus d'Acézat!

    Me voici de retour de Bordeaux, le cabas bien chargé de photos de peintures d'Acézat, l'artiste inconnue (ou méconnue?) dont j'ai déjà parlé sur ce blog à trois reprises. Remarquable peintre que j'ai rencontrée là! Grâce en tout premier lieu à Alain Garret, à Astrid aussi qui en avait parlé à Alain, et puis aussi désormais grâce au mari aimant d'Andrée Acézat, Lino Sartori, ancien chef de chantier dans le bâtiment devenu lui aussi artiste à la retraite, encouragé sans doute par le compagnonnage avec cette femme qui pratiqua l'art toute sa vie. Il faut aussi rendre grâce à un collectionneur de la région qui souhaite garder l'anonymat. Ce dernier a mis à l'abri une bonne partie de la production d'Acézat, production qui aurait très bien pu partir au feu, son auteur ayant failli faire le vide à un moment donné (faute d'attention à son travail?)... Comme je l'ai dit dans une précédente note, une chaîne de solidarité admirative se met en place, empêchant de laisser couler vers l'oubli la mémoire de cette créatrice authentique et tout à fait à l'écart.

 

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Andrée Acézat entre Alain Garret (à gauche) et son mari Lino Sartori (à droite), vers 2001, archives Sartori

 

     L'œuvre de cette dame au regard incisif vis-à-vis de ses contemporains, ou "caustique" comme me le souffle Garret, vous pourriez facilement la manquer, si vous  vous contentiez de survoler la pointe immergée de l'iceberg (les quelques images qui font sa signature apparente, celles que j'ai utilisées justement en premier sur ce blog). Acézat ne cherchait pas à plaire, mais elle dessinait parfois avec un laissez-aller plus puéril qu'enfantin, qui la mettait au bord du dessin humoristique et du croquis de bande dessinée (il m'arrive de penser à des dessins de Reiser devant certains de ses croquis).andrée acézat,acézat,lino sartori,alain garret,art singulier,création franche Certains travaux -rares- se répètent sur papier au format 32x25 cm, parfois avec un peu de relâchement aux limites d'un dessin un peu potache. Un style se met en place à partir d'une époque donnée, avec des personnages à grosse tête - si grosse qu'elle englobe le cou qui disparaît dans la masse- des torses d'un seul bloc, avec des membres grêles, filiformes, des pieds réduits à leur plus simple expression, mais presque jamais de jambes, ou alors comme les bras, de simples fils de fer... Cette écriture qui constitue une marque de fabrique peut aux yeux d'un spectateur inattentif ou blasé passer pour uniforme et faire riper l'oeil vers un jugement à l'emporte-pièce. Oh, c'est encore un de ces bonshommes enflés et gribouillés, pourra se dire ce spectateur distrait (débordé d'informations culturelles venant de tous côtés)...

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Acézat, titre non communiqué, 1998, env. 29,7 x 21 cm, coll. A.Garret ; ph.BM

 

      Mais non, si ces bonshommes-là ont une allure certes ultra-simplette, ils véhiculent simultanément une forte et singulière émotion, un sens de la tragédie quotidienne, pointée avec distance par l'artiste  malgré son économie de moyens, tragédie masquée ou traduite par moments en humour noir et goût de la caricature. Cette dernière ne  l'emporte pas au final pourtant. Car Acézat fait défiler l'humanité devant nous dans un cortège de désastre, voire de dépit, dirait-on. C'est une galerie de portraits d'adultes, et non pas d'enfants comme je l'avais cru primitivement. Ces adultes reviennent sous l'oeil d'Acézat tels des vieux enfants. Des moutards mal vieillis. Une de ses plus belles toiles (ce sont souvent ces dernières qui sont les œuvres les plus abouties) s'intitule précisément "le dépit" (la grande majorité de ses peintures ont des titres, la plupart du temps au verso).

 

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Andrée Acézat, Le dépit, 2000, huile sur toile, env.80x60cm, coll. particulière, Bordeaux ; ph.BM

 

      Tout indique qu'Acézat, c'était une pure. Née en 1922, disparue en 2009 à 87 ans, elle fit les Beaux-Arts de Bordeaux, cinq ans d'étude pendant la seconde guerre. De ces années de Beaux-Arts il reste quelques souvenirs conservés pieusement par son mari, prouvant un talent de peintre traditionnel tout à fait établi.

 

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Acézat, bol et coloquinte, 1993, coll Sartori

 

      Puis un choc physique se produit, un cancer aux alentours de 1983-1984. Semble s'en être ensuivi un choc intellectuel, et esthétique aussi. De plus, Acézat découvre, avec Lino Sartori, le site de la Création Franche dont il semble qu'ils aient suivi régulièrement les expositions (je me dis que j'ai dû souvent les y croiser sans le savoir), à partir du milieu de ces mêmes années 1990. Une évolution s'opère dans les peintures et les dessins d'Acézat de ces années-là, progressivement, par paliers, mais radicale quand on compare ses anciens travaux plus académiquement picturaux avec les nouveaux, plus spontanés, plus colorés, au dessin hyper simplifié, et chargés d'humour et peut-être d'une conscience du désastre humain. Les dates qu'elle appose méticuleusement, à côté de sa signature, habitudes gardées sans doute de l'époque des Beaux-Arts, sont là pour nous prouver cette évolution. Elle jette ses anciennes leçons par dessus les moulins, si on peut dire, on sent aussi qu'elle a pu dans ces années-là, outre la création franche avec ses peintres primitivistes et singuliers, découvrir la spontanéité tonique et sensuelle d'un groupe tel que Cobra, sans négliger pour autant des références plus anciennes à l'expressionnisme. Une de ses toiles des derniers temps est peinte explicitement dans la lumière de Cobra (et d'Asger Jorn même peut-être?).

 

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Acézat, titre non encore identifié, 2005, coll. Sartori

 

     Le tournant esquissé en 1991, 92, 93, 94, est définitvement pris en 1995. Il lui reste onze ans à vivre. Elle va se mettre à dessiner avec furie plusieurs heures par jour sans dételer, enchaînant dans la même journée plusieurs dessins. Cette rage est probablement à la source du désir de peindre qui va prendre à son tour son mari, qui, lui, décide de peindre surtout sur des souches de bois avec une grande dextérité brute. La technique d'Acézat sur papier, au moyen de feutres et de crayons de couleur, semble être de commencer par des fragments d'oeuvres répudiées, puis déchirées, recollées sur une nouvelle feuille, et à partir desquelles son imagination graphique se mettait à improviser. Lino Sartori a gardé de ces commencements qui aident à comprendre à partir de quoi elle pouvait commencer ses dessins.

 

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Travail préparatoire laissé de côté par Acézat, et conservé par son mari, fragments pouvant servir à des rehauts, des surlignages, des retouches...

 

     Acézat a très peu exposé, semble-t-il, et le peu qui lui a été consacré l'a été fait sur la région bordelaise. Le Musée de la Création Franche aurait été à même de la recevoir, mais cela ne s'est pas fait, j'ignore actuellement pourquoi, s'il y eut un véritable contact entre elle et ses animateurs. Elle donnait ses dessins. Tout aurait pu se disperser sans les brocantes, refuges des artistes négligés. Une seconde vie s'ouvrira-t-elle pour Andrée Acézat? Je le souhaite ardemment.

 

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Andrée Acézat, titre non encore identifié, huile sur toile, 2002

  

10/06/2011

Victoire et Défaite, à chacun son lot

J.-Galeani-Victoire-et-.jpg

J.Galeani, Victoire, Défaite, 1919, coll.particulière, ph.Bruno Montpied

J.-Galeani-nscrip.jpg

Inscription au verso du tableau précédent: "se tableau qui avez 3 m X 2m50 fut Censure aux Salin de la Nationnale Paris 1919 J.Galeani", coll. particulière, ph. BM

     Je dois à deux collectionneurs qui souhaitent garder l'anonymat la découverte de ce tableau naïf réalisé vraisemblablement à la fin de la Grande Guerre. C'est visiblement une charge contre les possédants accusés d'être des profiteurs de guerre. La "Victoire" de 1918 est celle du magnat à gauche tripotant ses sacs d'or pendant qu'en arrière-plan les cheminées de ses usines fonctionnent à plein régime, couronnées de drapeaux tricolores. La "Défaite" en revanche est réservée au Poilu qui revient estropié auprès de sa famille, qui n'a pas l'air bien riche elle, leur drapeau en berne cette fois-ci, et la croix derrière la scène semblant dire que le martyr a été réservé aux petits pendant que les gros s'en mettaient plein les poches. L'inscription placée au dos du tableau semble indiquer que cette peinture fut accompagnée d'une autre beaucoup plus grande (car 3m x 2,50m n'est absolument pas la dimension de cette œuvre retrouvée), qui fut refusée dans un salon. En tout état de cause, il semble que nous soyons en présence d'une peinture anarchiste. J. Galeani en est l'auteur, un nom à retenir, en espérant retrouver d'autres œuvres de ce trublion...

07/06/2011

Yves-Jules Fleuri portraiture les grands Suisses

     Jean-David Mermod qui préside aux destinées de la Galerie du Marché à Lausanne a proposé récemment à Yves-Jules Fleuri, qui se faisait appeler récemment seulement Yves Jules de tirer le portrait d'un certain nombre de célébrités suisses. Fleuri est connu pour aimer brosser des portraits hauts en couleur de toutes sortes de personnages, a priori non pour les caricaturer, mais y aboutissant quand même, à son corps défendant semble-t-il. J'en ai déjà parlé sur ce blog. Mermod a envoyé à Yves Poelman, le cicerone et le chaperon d'Yves-Jules, une centaine de photos de Vaudois connus. L'artiste a fait son choix là-dedans. Cela donne 45 portraits.

 

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Yves Jules, Félix Vallotton

 

    La Galerie du Marché présente le résultat de ces travaux du 10 juin au 23 juillet (vernissage jeudi 9 dès 17h30). Au vu des quelques portraits en ligne sur le site de la galerie (j'en reproduis deux ici même), l'expo promet d'être réjouissante. Elle s'intitule au fait "Y'en a point comme nous".

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Galerie du Marché, 1, escaliers du Marché, 1003 Lausanne. 021 311 41 80. 079 212 14 17. Contact : info@galeriedumarche.ch

 

 

Yves Jules, Roger Fédérer 

05/06/2011

Où trouver "Eloge des Jardins anarchiques"? Liste des points de vente

     Voici la liste des points de vente telle qu'elle pouvait être établie en mai (plutôt vers le début de ce mois). J'ai essayé de situer les librairies quand j'avais le temps... La liste n'est probablement pas exhaustive, le diffuseur (Court-Circuit diffusion) ayant probablement trouvé d'autres librairies entre temps, mais en l'état, elle peut tout de même être utile, je pense. Il se peut également que certains points de vente mentionnés ci-après n'aient déjà plus de livres. Il ne faut pas hésiter dans ce cas à passer commande à votre libraire (ceci étant valable aussi dans n'importe quel lieu ne figurant pas dans cette liste ; le diffuseur s'engage à honorer toutes les commandes que lui feront les librairies où que ce soit).

Paris: 

Librairie de la Halle Saint-Pierre, rue Ronsard (18e ardt), L’Arbre à lettres dans les 3e, 5e, 12e, 13e ardts, L’Alinéa, L’Appel du livre, L’Attrape-Cœurs (18e), L’Atelier 9, L’Atelier (20e), Atout-Livre (12e), Librairie des Batignolles (17e), Les Buveurs d’encre, Le Cabanon, Le Merle Moqueur (20e), Chapitre.com, Le Comptoir des Mots, Compagnie (5e), Dédale (5e), Le Divan (15e), L’Ecume des pages (6e), La Friche (11e), Librairie des Gâtines, Le Genre Urbain, Gibert Joseph (Bd St-Michel, 6e), Les Guetteurs de vent (11e), L’Harmattan (5e), La Hune (6e), L’Humeur vagabonde (18e), L’Iris noir (11e), Les Jardins d’Olivier (rue Gay-Lussac, 5e), Libralire (11e), Le Livre Ecarlate, Libre Ere, Matière à lire, La Maison Rustique (6e), Le Merle Moqueur (20e), MK DVD Loire (19e), Le 104 (19e), Le Monte-en-l’Air (20e), Libraire du Musée du Louvre/RMN (1er), Les Oiseaux Rares (13e), Page 189, Parallèles (1er), Librairie du Parc/Actes Sud (La Villette, 19e), Flammarion Centre Pompidou (1er), Publico (11e), Quilombo (11e), Un Regard Moderne (5e), SFL Danton (6e), Librairie Jean Touzot, Tropiques, Tschann (6e), Vendredi (9e), La 25e Heure (5e), Equipages (20e), Le Flâneur des deux rives (6e), La lucarne des écrivains (19e), Comme un roman, Le 104 (19e), La FNAC

Couronne de Paris

78 (Yvelines) : Le Livre Bleu, Versailles, 92 (Hauts-de-Seine): Au Grillon, Nanterre, 93 (Seine St-Denis): Folies d’Encre, Montreuil ; Folies d’Encre-Liberté sur parole, St-Ouen ; La Malle aux histoires, Pantin ; Les Mots Passants, Aubervilliers ; SFL Alizé, St-Denis ; La Traverse, La Courneuve (centre-ville),  94 (Val de Marne): L’envie de lire, rue Gabriel Péri, IvryGénérale Libr’Est, Charenton-Le Pont ; Gibert Joseph, Vitry ; Millepages, Vincennes.

Régions

06 (Alpes-Maritimes): Librairie Jean Jaurés, Nice ; Librairie Masséna, Nice.

10 (Aube): Les Passeurs de textes, Troyes.

11 (Aude): Mots et Cie, Carcassonne.

12 (Aveyron): Musée des Arts Buissonniers, Saint-Sever-du-Moustier.

13 (Bouches-du-Rhône):  Bouquinerie des 5 avenues, bd de la Libération, Marseille ; Gibert Joseph, Marseille ; Le Greffier de St-Yves, rue Venture, Marseille (1er ardt) ;  Le Lièvre de Mars, rue des 3 Mages, Marseille ; Maupetit (éd. Actes Sud), Bd de la Canebière, Marseille ; L’Odeur du Temps, Marseille ; Librairie Vents du sud, Aix-en-Provence ; Libraire de l’Université, Aix-en-Provence ; Librairie La Provence, Aix-en-Provence ; Goulard, Aix-en-Provence.

14 (Calvados): Brouillon de culture/L’Université, Caen ; Euréka street, place de la république, Caen.

16 (Charente):  Librairie MCL, Angoulême.

17 (Charente-Maritime): Les Saisons, La Rochelle.

22 (Côtes d’Armor):  Gwalarn, Lannion ; Mots et Images, Guingamp ; Centre Leclerc, Plérin.

23 (Creuse): Maison de la Pierre, à Masgot (commune de Fransèches), hameau du sculpteur François Michaud.

24 (Dordogne): Marbot, Périgueux.

25 (Doubs): Camponovo, Besançon ; Les Sandales d’Empédocle, Besançon.

26 (Drôme): Le Bazar des Mots, Hauterives.

29 (Finistère): Caplan and Co, près de Morlaix, à Poul Rodou par Guimaëc ; La Petite Librairie, rue Danton, Brest ; Daniel Roignant, bouquiniste, Brest.

30 (Gard): Sauramps en Cévennes, place St-Jean, Alès.

31 (Haute-Garonne): Castela, Toulouse ; Gibert Joseph, Toulouse ; Ombres blanches, Toulouse ; Privat, Toulouse ; Terra Nova, Toulouse.

33 (Gironde): La Machine à lire,  Bordeaux ;  La Mauvaise Réputation, Bordeaux ; Mollat, Bordeaux) ;  Librairie du Muguet, Bordeaux.

34 (Hérault): Gibert Joseph, Montpellier ; Le Grain des Mots, bd du Jeu de Paume, Montpellier ; Sauramps, Montpellier.

35 (Ille-et-Vilaine): Le chercheur d’art, 1, rue Hoche, Rennes ; La Cour des Miracles, rue Penhoët, Rennes ; Forum du Livre, Rennes ; Librairie Le Failler, Rennes.

38 (Isère): Lucioles, Vienne ; Le Square Librairie de l’Université, Grenoble ; Association Antigone, Grenoble.

39 (Jura): Jacques, Dôle.

42 (Loire):  Lune et l’Autre librairie, St-Etienne ; Librairie de Paris, St-Etienne).

44 (Loire-Atlantique): Coiffard, Nantes ; Durance, Nantes ; Vent d’Ouest Lieu unique, Nantes ; Boutique Bientôt, Nantes ; La voix au chapitre, St-Nazaire.

45 (Loiret): Les Temps Modernes, Orléans.

46 (Lot): Régis Benatré, Biars-sur-Céré.

49 (Maine-et-Loire): Contact, Angers ; Les Nuits bleues, rue Maillé, Angers. 

53 (Mayenne): Livres compagnie/chapitre, Laval ; Libraire du musée d'art naïf du Vieux-Château, Laval. 

54 (Meurthe-et-Moselle): L’Autre rive,Nancy ; Hall du Livre/Privat, Nancy.

57 (Moselle): Hisler even, Metz.

59 (Nord): Le Bateau-Livre, rue Gambetta, Lille ; Le Furet du Nord, Lille ; La Boutique du Lieu (musée du LaM, musée d'art moderne, d'art contemporain et d'art brut de Villeneuve-d’Ascq) ; L’Harmattan/Les Alizés, Lille ; Librairie Meura, Lille.

64 (Pyrénées-Atlantique):  L’Alinéa, Bayonne ; Mattin Megadenda/Librairie Elkar, Bayonne. 

66 (Pyrénées-Orientales): Torcatis, Perpignan.

67 (Bas-Rhin): Broglie, Strasbourg ; Kléber, Strasbourg ; Quai des Brumes, Strasbourg ; Libr’Air, Obernai.

68 (Haut-Rhin): Bisey, Mulhouse.

69 (Rhône): Le Bal des ardents, Lyon ; La boutique des Marais, Lyon ; Au bonheur des Ogres, Lyon ; Decitre 101, 102, 103, 104, 105, 106, 107, 108, 109, Lyon et banlieues ; Michel Descours, Lyon ; Passages, Lyon ; Librairie la Presse, Lyon ; Terre des Livres, rue de Marseille, Lyon 7e.

72 (Sarthe):  Librairie Doucet, Le Mans.

73 (Savoie): Garin théâtre, Chambéry ; Librairie Rousseau, Chambéry.

76 (Seine-Maritime):  Le chat-pitre, Fécamp (?).

80 (Somme):  Martelle, Amiens.

82 (Tarn-et-Garonne): Ça sent le book (libraire itinérant ?).

84 (Vaucluse):  La Mémoire du Monde, Avignon.

88 (Vosges): La Licorne, Epinal ;  Panorama 88/ Quai des mots, Epinal.

89 (Yonne): Comptoir de vente de la Fabuloserie, Dicy ; comptoir de vente de livres et autres catalogues, revues du musée rural des arts populaires, collection Humbert, à Laduz.

Belgique

Bozarshop ; Filigranes ; La Licorne ; A livre ouvert/Le Rat conteur ; Livre aux trésors SPRL ; Papyrus ; Pax ; Point Virgule ; Tropismes ; Bookshop d'Art et Marges museum, à Bruxelles ?

Suisse

Collection de l’Art Brut, Lausanne.

 

Librairie Basta! Chauderon, Petit-Rocher 4, Lausanne.

 

Librairie Basta! Dorigny, L'Anthropole, Université de Lausanne.

Eloge chez Lalane à la Bastille, mai 11.jpg

L'Eloge se glisse partout... Stand à la Foire de la Bastille, mai 2011, ph. BM

A signaler: une nouvelle présentation du livre, accompagnée d'une projection du film Bricoleurs de paradis, aura lieu le vendredi 17 juin à la librairie Atout-Livre dans le XIIe ardt à 19h30. BM et Remy Ricordeau seront présents. Atout-livre 12e.jpg

 

02/06/2011

Les rêves du soldat Goupil

     La dispersion du fonds du peintre secret Armand Goupil (voir ma flopée de notes précédentes sur le cas) continue son petit bonhomme de chemin si je puis dire. Mais il continue de m'arriver parallèlement quelques renseignements. Je dois à Mme Martineau, heureuse passionnée du cas Goupil, la communication de nouvelles peintures inconnues du sieur Armand. Une d'entre elles en particulier m'a tapé dans l'oeil, sa propriétaire dit qu'on pourrait l'appeler le "Rêve du prisonnier". Voici l'image:

 

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Armand Goupil, 1917, 23-II-60, coll et ph. N.Martineau

 

      L'homme redressé sous la couverture grise probablement militaire, à cause de sa barbe semble bien être une évocation du peintre lui-même qui, comme je l'ai rappelé dans une de mes dernières notes, grâce aux souvenirs de son fils Armand Goupil (junior), par ailleurs auteur d'un ouvrage traitant de Jules Verne, a été fait prisonnier pendant la bataille de Verdun en 1916. La peinture porte le titre de 1917, date à laquelle Goupil était encore prisonnier (il ne fut libéré qu'en 1918). Il rêve peut-être, ou il a une vision, c'est du pareil au même. Une jolie succube vient le visiter dans les airs au dessus de sa couche, le buste suggestivement penché en avant. Si on le compare à d'autres peintures, on s'aperçoit qu'Armand Goupil paraît priser les corps féminins en train de se balader en apesanteur dans les airs. Voir ci-dessous cette image très cosmique.

 

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Armand Goupil, 20-XII-59, rassemblement Philippe Lalane ; photo BM

 

     On m'a également communiqué depuis peu une autre peinture de Goupil, représentant un soldat de la guerre de 14 en train de crapahuter, le matricule 146 frappé au coin de sa vareuse et de son képi. Le soldat est-il un autoportrait là encore? On peut le supposer. La date dans le coin gauche inférieur de la peinture indique mai 1915. La date de l'oeuvre nous signale également qu'elle a été réalisée 13 jours avant celle du "rêve du prisonnier"...

 

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Armand Goupil, mai 1915, 10-II-60, ph. BM

    Si on retourne ce carton, on a la surprise de découvrir au verso, plus secrète, une esquisse représentant... Evidemment une femme, en train de danser semble-t-il le charleston... Un paraphe, ce qui paraît rare, accompagne l'esquisse, avec l'indication "Le Mans".

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28/05/2011

Déchiffrer les messages d'outre-tombe de l'abbé Fouré... (A propos du site de l'ancienne Croix de l'Ermite)

     Non, tout n'est pas dit sur l'abbé Fouré, ses rochers et ses bois sculptés, sa bonne (oui, il avait une bonne du curé, comme nous l'a appris le livre paru récemment de Jean Jéhan, elle s'appelait Marie Lefranc et maintenant à Rothéneuf, les fins limiers de l'Association de Joëlle Jouneau sont à la recherche de ses descendants, avis à la population, s'il y en a un qui surfe sur internet, il est le bienvenu ici)... Tout n'est pas dit, et loin de là!

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L'abbé Fouré lisant, vers 1906, son journal réactionnaire favori (Le Salut, devenu collaborateur pendant la guerre ultérieure de 39-45, si je me souviens bien...) ; à sa gauche, à terre on distingue le gisant d'un homme d'épée avec hermine à sa tête (symbole de la Bretagne), et inscription en latin "Olim fuit" ("Il fut, jadis")

 

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Photo Bruno Montpied, 2010

 

    En particulier, les amateurs se rappellent le gisant sculpté par l'abbé situé à quelque encablures du site principal des rochers, sur le chemin des douaniers (ou des contrebandiers, selon l'idéologie que l'on défend...), soit dans une zone pour laquelle personne n'eut jamais l'idée saugrenue de faire payer un droit de péage. A ce propos, on peut toujours s'étonner de la rupture qui est faite au niveau du site des Rochers sculptés de ce chemin qui aurait dû normalement suivre le littoral, or il a été détourné, et ce depuis des lustres, à la suite d'on ne sait quel passe-droit apparemment. Mais revenons à nos moutons et en l'occurrence au site actuellement appelé "de la Croix du Christ" (et anciennement appelé "de la Croix de l'Ermite", croix qui du reste était plantée à un endroit plus éloigné de quelques mètres de l'emplacement actuel).

Vue-de-la-Croix-depuis-les-.jpg

Emplacement de la Croix du Christ, vue zoomée depuis les rochers, ph. BM, 2010

      Il a été dit par Frédéric Altmann dans son livre de 1985, La vérité sur l'abbé Fouéré (éditions AM, Nice), que le gisant situé à côté de la croix était à n'en pas douter un certain "Saint-Judicaël, roi de Dommonée"... Il ajoute que ce n'est pas "Jean, duc de Bretagne", qu'il qualifie (légèrement, comme on va le voir) "d'inscription fantaisiste". De cette affirmation, il n'apporte aucune preuve (d'où sort-il cet invraisemblable Judicaël, je me le demande depuis des lustres?). Du coup, Jean Jéhan, dans son propre récent livre, lui emboîte allégrement le pas sur ce détail. Altmann apporte cette affirmation aux pages 113 et 114 de son livre. Il reproduit une carte qui ne porte pas le cachet de l'abbé (celui-ci authentifiait ses cartes avec un cachet surtout -je pense- pour contrer le commerce de cartes non autorisé par lui), carte où l'on peut lire, en guise de légende du gisant: "Rothéneuf, rochers sculptés. Jean, duc de Bretagne". Voir ci-dessous:

 

Jean-Duc-de-Bretagne-carte-.jpg

 

     Certes, il n'y a pas le cachet de l'abbé. Altmann veut y voir une preuve que la carte est légendée de façon suspecte ; or, même si le commerçant qui l'édita ne paya pas de droits à l'abbé, cela n'implique pas qu'il ait mal travaillé automatiquement dans les légendes qu'il imprimait. Il fallait trouver un indice plus stable pour confirmer ou infirmer cette légende. La preuve que la légende est correcte m'a été enfin fournie par une autre carte que j'ai découverte tout récemment  et que je ne me souviens pas avoir vue éditée ailleurs. Je la reproduis ci-dessous:

Jean-IIII-Duc-de....jpg

 

    Ah, bien sûr, ce n'est pas évident à déchiffrer, surtout sur un écran d'ordinateur peut-être. La photo sur la carte n'est pas de très bonne qualité qui plus est. Alors, la maison ne refusant rien à ses lecteurs, je m'en vais vous l'agrandir en entourant d'un trait photoshoppeur l'inscription tracée à la main sur le rocher situé à gauche prés du gisant, ce même rocher contre lequel l'abbé s'appuie sur la carte où il lit "le Salut". Car, oui, il y a bel et bien une inscription!

 

Jean IIII Duc de, inscrip soulignée.jpg

 

    Sur ce rocher, l'inscription, tracée de la main de l'abbé (la graphie est assez proche d'autres inscriptions qui étaient visibles autrefois sur le site des rochers, voir ci-dessous), peut se reconstituer ainsi: "Jean IIII (ou IV), duc de Bretagne"... L'abbé maîtrisait-il mal les chiffres latins? On croit lire en effet quatre I, mais peut-être est-ce seulement la faute à l'imprécison de la photo. Il me semble que nous avons là une preuve à peu prés certaine du sens que prêtait l'abbé à son gisant. On sait en effet (grâce à l'historien régionaliste Noguette, alias Eugène Herpin, qui se fit le mémorialiste partiel de l'abbé), que l'abbé était entiché de patriotisme breton. L'histoire de ce "Jean IV" ne pouvait que le retenir. Chef de la Bretagne, il en avait été chassé par le  roi de France Charles V en 1378, qui voulait réunir la Bretagne à sa couronne. Jean IV avait dû s'exiler en Angleterre. Rappelé par les nobles bretons, il débarqua à Dinard (comme on sait ville toute proche de St-Malo), fit la guerre à Charles V et reconquit la Bretagne. Ces faits d'armes (encore chantés aujourd'hui en Bretagne paraît-il, voir Gilles Servat) ont dû grandement impressionner l'abbé!

 

Graphie Fouré.jpg

Inscriptions qui se lisaient dans les rochers du vivant de l'abbé, apposées par lui ou en tout cas avec son accord, décrivant des personnages qui semblent avoir été inventés par l'abbé qui rêvait sur les anciens habitants de Rothéneuf ; leurs noms étaient apposés au-dessus des personnages sculptés qu'ils étaient chargés de légender, au nombre desquels se trouve un Jacques Cartier ; à noter aussi que le chiffre latin IV est correctement orthographié ici ("Jean IV fainéant"...) ; la graphie paraît très proche de celle du rocher du gisant

Sceau_de_Jean_IV_-_Duc_de_Bretagne.png

Sceau de Jean IV, Duc de Bretagne ; on notera les hermines sur son écu et son pourpoint, ainsi que l'épée, deux détails que l'on retrouve sur le gisant sculpté par l'abbé

     A noter que l'association des amis de l'œuvre de l'abbé Fouré, animée par Joëlle Jouneau, se propose de faire nettoyer dans les mois qui viennent cette fameuse sculpture de gisant qui actuellement devient difficile à "lire", étant donné les nombreux lichens qui la couvrent. 

 

 

Du côté des créatifs: Coco Fronsac et ses images cuisinées

       Grâce à l'ami Philippe Lalanovitch, j'ai été mis sur le rail qui mène au blog aux multiples et variés albums d'images créées par Coco Fronsac, artiste qui manipule les objets et les images, la plupart chinés dans les brocantes qu'elle paraît hanter. Voici la liste de ces albums dans lesquels il est fort instructif d'aller zig-zaguer: Vision négative, les ex-voto de Coco Fronsac, les photos spirites de Coco Fronsac, the Zelda's sexy-girls, La mort n'en saura rien, les reliquaires de Coco Fronsac, Vive la mariée, les Momies de C.F., les poupées de C.F., les chamanes de C.F., l'érotisme sous globes de C.F.,  une image dans une autre par C.F., le cabinet de curiosités de C.F., les collages de C.F.,  les petites filles modèles de C.F...

 

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Coco Fronsac, Quand est-ce qu'on mange?, collage, "une image dans l'autre"

 

     Une des techniques préférées de l'auteur est le collage, par exemple du positif sur des négatifs, ou bien un fragment d'image posé sur une autre dans laquelle elle introduit un vacillement du sens, soutenu par un goût sans faille des accords de couleurs. Le "collage" peut s'exécuter aussi par le détour d'un gouachage plaqué sur des têtes de personnages qui posent sur des anciennes photos en noir et blanc dont l'artiste paraît avoir une collection illimitée.communion.jpg On est là à nouveau dans un goût de la modification moqueuse, et de la démystification, genre prisé de beaucoup d'artistes modernes (il y aurait d'ailleurs un beau projet d'exposition à monter sur ce thème, le "détournement et la modification dans l'art").

 

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Coco Fronsac, "St-André Breton", ex-voto

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Coco Fronsac, le facteur, ex-voto

 

     Mais le collage s'étend aussi à la troisième dimension par des "reliquaires de voyage", des hommages à diverses figures tutélaires (dont l'André Breton que je lui emprunte ici, ou un Facteur Cheval) qu'elle appelle "ex-voto" ; des globes érotiques, des fausses pièces d'art premier, etc. La peinture est aussi mise à contribution dans son "cabinet de curiosités" où des portraits voulus bizarres évoquent parfois un art forain super-déviant.

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Coco Fronsac, Curiosités

     On sent que toute l'imagerie ancienne pourrait par contamination progressive passer ainsi à la moulinette de Coco Fronsac...

Coco Fronsac expose à Paris prochainement, expo "Chahut" à la galerie UN LIVRE UNE IMAGE (consacrée à la photographie), 17, rue Alexandre Dumas, Paris XIe. Du 10 juin au 2 juillet, vernissage le 9 juin de 16h30 à 21h. TLJ sauf dimanche de 14h à 19h.

 

Coco Fronsac carton invitation chahut.jpg

  

22/05/2011

A la poursuite d'Emile Taugourdeau

    Les fragments d'un jardin d'art brut dispersés à travers les brocantes et les collections privées ou publiques me font parfois penser au mythe du dieu Osiris dont le corps coupé en morceaux est peu à peu reconstitué par sa femme la déesse Isis condamnée à le restituer morceau par morceau selon les différents lieux d'Egypte où elle les retrouve (on me corrigera si je me trompe dans le souvenir sûrement ultra-simplifié et condensé que je garde de ce mythe).

 

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Emile Taugourdeau à gauche, son petit-fils Erick, et le maire de la commune au milieu du jardin, photo 1970-1971, archives famille Taugourdeau ; le jardin est alors surtout rempli par des animaux (on sait que M.Taugourdeau commença par l'effigie d'un canard dont la mort avait affligé ses petits-enfants) 

   

      J'ai déjà eu l'occasion de parler du jardin d'Emile Taugourdeau (voir mon bouquin Eloge des Jardins anarchiques, où un chapitre entier lui est consacré, et le film Bricoleurs de Paradis (le Gazouillis des éléphants) ; voir aussi cette note du blog). Il fut créé entre la fin des années 50 de l'autre siècle et 1989, année de la disparition de son auteur (il avait 72 ans). Le créateur (né en 1917) avait été blessé au pied à la guerre de 39-45, et en gardait des séquelles plus ou moins handicapantes. Dans les dernières années, suite à une série d'infarctus, il s'était surtout mis à peindre des tableaux en ciment, fort naïfs, fort beaux, qu'il "rafraîchissait" périodiquement à coups de jets d'eau.

 

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Photo Francis David, vers 1985 (le jardin est alors à son apogée)

       La végétation a recouvert et mangé peu à peu le parc de sculptures, effaçant depuis longtemps le souvenir d'un "parc", tel qu'on peut le restituer en regardant par exemple la photo ci-dessus de Francis David, parue dans le n°190 du magazine Gault/Millau en février 1985. C'est plutôt une jungle à présent où s'enfouissent les statues étouffées par le lierre et autres lianes. Plusieurs de ses statues ont disparu, parfois à cause de vols, mais aussi parce que la famille les vend à des brocanteurs ou des antiquaires de passage.

     Du coup, il en réapparaît de temps à autre. Très récemment on a vu à Paris, exposés sur des tréteaux dans la rue, des footballeurs, des lapins et des grenouilles d'Emile Taugourdeau (ça voyage). Ces derniers batraciens, comme je l'ai déjà dit, me font craquer. En dépit de leur forme ultra simple, elles sont très expressives et touchantes. Voici ci-dessous celle que j'ai acquise très récemment, rescapée de la brocante.

 

emile taugourdeau,environnements spontanés,habitants-paysagistes,sculpture naïve,eloge des jardins anarchiques,bricoleurs de paradis (le gazouillis des éléphants)

Photo Bruno Montpied, 2011

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La grenouiile de droite est une parente de la grenouille retrouvée, ou bien sa jumelle, photo BM, 1991

 

     J'en profite pour montrer d'autres sculptures que je possède d'Emile Taugourdeau, acquises directement auprès de son épouse il y a quelques années. Au départ, mon but en les acquérant était de les mettre à l'abri, en cas d'accentuation alors prévisible du déclin du jardin. Au fil du temps, je me suis attaché à ces personnages. J'ai cependant dans l'idée de pouvoir un jour les léguer à un musée spécialisé dans l'art brut et les environnements spontanés.

 

emile taugourdeau,environnements spontanés,habitants-paysagistes,sculpture naïve,eloge des jardins anarchiques,bricoleurs de paradis (le gazouillis des éléphants)Emile Taugourdeau, un Auvergnat...

Deux masques...emile taugourdeau,environnements spontanés,habitants-paysagistes,sculpture naïve,eloge des jardins anarchiques,bricoleurs de paradis (le gazouillis des éléphants)

emile taugourdeau,environnements spontanés,habitants-paysagistes,sculpture naïve,eloge des jardins anarchiques,bricoleurs de paradis (le gazouillis des éléphants)

Un petit meunier

 

19/05/2011

Les tronches au balcon

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E.Posteaux, Vieux Bouchons, liège sculpté dans des bouchons de Champagne, sans date, ancien "rassemblement" Philippe Lalane, ph. Bruno Montpied

    Voici ce que j'ai déniché sur la Foire à la Brocante de la Bastille qui commence officiellement aujourd'hui jeudi 19 mai. J'y ai bien été aidé, faut dire, par l'ami Philippe Lalane, dont on visitera le stand toujours avec fruit, d'autant que les stands environnants sont aussi bien inspirés. A quoi reconnaît-on ce stand me direz-vous? C'est le seul sur la Foire à vendre Eloge des Jardins Anarchiques...

18/05/2011

14e festival du film d'art singulier

      Voici le programme du prochain festival organisé par l'association Hors-Champ à Nice, consacré aux documentaires autour des arts populaires spontanés. Cela se répartit sur deux jours, durant une partie du week-end de l'Ascension.

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       Je regrette de ne pas pouvoir aller à Nice cette année encore, j'aurais bien vu surtout les films de Ferdi Roth, cinéaste allemand je crois (ou batave?), probablement des années 70, sur l'ancien mineur Charles Pecqueur (il n'y a pas beaucoup de documents "mouvants" sur ce dernier qui avait fait une fresque magnifique d'âpreté naïve et brute sur le mur de clôture de son jardin dans le Pas-de-Calais, voir le livre de Bernard Lassus, Jardins imaginaires), sur le jardin de faïence de l'ouvrier Da Costa Ferreira, sur le manège de Petit-Pierre le vacher (que je devine tourné sur le lieu d'origine comme l'avait fait Emmanuel Clot) ou encore sur les statues naïves du marin Frédéric Paranthoën, bien oublié celui-ci.

 

Frédéric Paranthoën, royan, 1988, photogramme extr des Jardins de l'Art Immédiat, films super 8 de B.Montpied.jpg

Frédéric Paranthoën, 1988, photogramme extrait des Jardins de l'art immédiat, films Super8 muets, Bruno Montpied

 

08/05/2011

Une enquête sur le Merveilleux

    Une nouvelle revue, intitulée Mirabilia, est en gestation et se propose pour son premier numéro d'explorer ce que tout un chacun peut entendre aujourd'hui sous le terme de merveilleux. Voici l'enquête que les animateurs de cette future revue publient sur le site web créé tout exprès:

Le Merveilleux, enquête

 

1/ Sous quelle(s) forme(s) selon vous, le « merveilleux » se révèle-t-il aujourd’hui ?

 

2/ S’il en est un, dans quel domaine le merveilleux vous paraît-il le plus à même de se manifester ? 

 

3/ Vous est-il arrivé d’éprouver une sensation que vous qualifieriez, au sens propre du terme, « d’émerveillement » – surprise, stupeur, émoi… Pouvez-vous en préciser les circonstances ?

 

4/ Si vous deviez « émerveiller » l’être aimé, un(e) ami(e), un enfant, que feriez-vous ?

Les réponses à cette enquête seront publiées dans le premier numéro de la revue.

 

Merci d’adresser vos réponses, –pas plus de 500 signes par question, si possible– en précisant vos nom et profession à : Revue Mirabilia, 393, rue des Pyrénées, 75020, Paris, ou par mail à contact@revue-mirabilia.fr

 

*

 

The Marvellous, inquiry

 

1/ In what form(s) the marvellous appears there today?

 

2/ If there is one, in which field the marvellous, according to you, seems the most likely to occur ?

 

3/ Have you happened to experience a sensation you would describe as a "wonder" in the true sense of the word -surprise, astonishment, emotion... Can you specify the circumstances?

 

4/ If you had to "wonder" the loved one, a friend, a child, what would you do?

 

The answers will be published in the first issue of Mirabilia.

Please send us your reply –no more than 30 words for each question, if possible– specifying your name and profession, to Revue Mirabilia, 393, rue des Pyrénées, 75020, Paris, France.
Or by mail to: contact@revue-mirabilia.fr

 

Bruno Montpied, La nuit des merveilles,1997.jpg

Bruno Montpied, La nuit des merveilles, 50x 65 cm, 1997

  

23/04/2011

La Casa Leitao, quelques mètres cube de création pour soi, et de temps en temps pour les autres

    Grâces soient rendues à Laurent Jacquy qui a eu la gentillesse de m'emmener dans sa petite auto dériver sur les routes de la Somme. Il m'avait parlé l'air de rien d'un monsieur qui faisait "des choses" dans une sorte d'appentis ou de garage qu'il avait vu ouvert en filant sur une route non loin d'Abbeville sans pouvoir s'arrêter. Or, chaque fois qu'il repassait, comme de juste, le lieu était fermé. Le dieu des sites d'art brut me secondant généralement avec constance depuis pas mal de temps, il fallait me charger dans la petite auto!

 

José Leitao devant la casa Leitao, ph. Bruno Montpied, 2011.jpg

José Leitao, citoyen d'origine portugaise, sur le seuil de son atelier avec un Toutankhamon sur le feu, la "Casa Leitao", ph. Bruno Montpied

 

     Cela n'a pas loupé, le monsieur avait ouvert sa boutique (mot pas du tout idoine comme on le verra), comme exprès pour nous ce jour-là. On aurait dit qu'il nous attendait, sculptant un Toutankhamon sans trop d'application.

 

José Leitao,angle de l'atelier, ph. Bruno Montpied, 2011.jpg

José Leitao, les premières statues, ph Bruno Montpied, 2011.jpg

José Leitao, première photo ci-dessus, un angle de l'atelier-garage avec ses dizaines d'effigies sculptées entassées et couvertes de poussière ; deuxième photo ci-dessus, prés du cadre doré, les premières sculptures des femmes imaginaires, dont une joueuse de boules nue, sorte de Fanny?, ph BM

 

     Sacrée caverne d'Ali Baba que nous découvrîmes là! Dans un cube sombre, où une chatte ne retrouverait pas ses petits, José Leitao entasse au garde à vous ou en rangs d'oignon des dizaines et des dizaines de statues venues d'on ne sait trop quelle inspiration, mixant probablement plusieurs références - madones chrétiennes polonaises (un souvenir du sanctuaire de Jasna Gora à Czestochowa)?Madone du sanctuaire de Jasna Gora.jpg José Leitao, statuettes de madones chrétiennes dans un angle de l'atelier comme dans une grotte, ph. Bruno Montpied, 2011.jpgRéminiscences d'idoles hindoues? Statues africaines? Pièces de jeu d'échec géantes? Hermaphrodytes? Symboles islamiques (et pré-islamiques)? Têtes pharaoniques? - au sein d'un syncrétisme abandonné à la poussière et aux toiles d'araignée, il était difficile de se faire une religion.José Leitao, deux pièces comme des pions géants de jeu d'échec, ph. Bruno Montpied, 2011.jpg Ayant découvert le talent de ciseler à peu près tout ce qui lui passe par la tête (souvent des femmes, et des mains de Fatima, parfois saignantes, et des symboles) au moment de sa retraite, après une vie passée comme travailleur dans une usine textile de la région - à présent abandonnée - José Leitao a eu l'air de nous dire que cette révélation lui avait paru trop tardive pour pouvoir l'autoriser à s'en faire un nouveau métier.José Leitao,plusieurs exemplaires variés de mains de Fatima, ph. Bruno Montpied, 2011.jpg Si bien qu'il sculpte sans cesse pour lui-même avant tout, refusant opiniâtrement de vendre ces effigies qui lui donnent tant de plaisir à l'entourer ainsi, enserrant et cernant chaque jour un peu plus son modeste établi.

 

José Leitao au milieu de ses nombreuses khomsa (mains de Fatima), ph. Bruno Montpied.jpg

José Leitao vous salue bien, ph. BM

 

     On n'est pas dans une boutique donc. L'atelier bâille sur la route, l'ancien ouvrier sculpte au vu et au su de tous, populaire dans la région, où de nombreux articles de la presse régionale lui ont déjà été consacrés, parfois plus centrés sur les trois oies qui le suivent comme des toutous (alors que pour tout autre que lui elles n'ont que pincements cruels à distribuer) que sur ses étonnantes œuvres hésitant entre art naïf et art brut. Ce dernier pourrait en effet s'appliquer ici en raison du syncrétisme et des croisements de réminiscences culturelles mixées de façon originale. Certaines compositions, où Leitao a assemblé des objets sans rapports évidents (un cheval cabré et une main de Fatima par exemple ; une main de Fatima soudée à un front ; des empilements de têtes, des figures sans signification précise), relèvent d'une inventivité que l'on peut associer à l'art brut. Et puis il y a cette création très égocentrée, ce paradoxal désir de se montrer et de refuser dans le même mouvement de se séparer de ses œuvres (quoique ce refus ne soit pas si hermétique, son épouse nous confiera que le créateur fait parfois des dons). La poussière saupoudre d'ailleurs nombre des statues de son talc blanc, patine propre aux œuvres que l'on garde pour soi...

 

José Leitao,nombreuses  statues abandonnées à la poussière, ph. Bruno Montpied, 2011.jpg

Surpopulation au pays des effigies... Et puis, tiens?, que fait ce dinosaure ici...? Ph. BM

 

    Et puis, comme un clin d'oeil à mes propres inclinations, j'ai retrouvé ici des sirènes multiples.

 

José Leitao,sirène au buste voilé rose, ph.Bruno Montpied, 2011.jpg

José Leitao,sirène, ph.Bruno Montpied, 2011.jpg

José Leitao, sirènes, ph.BM

 

      

10/04/2011

Les beaux dimanches, un nouveau blog, par Laurent Jacquy

     Ah, que je suis content ce matin d'avoir enfin trouvé le temps d'aller me promener sur le blog récemment créé (en février 2011) de Laurent Jacquy dont j'ai déjà parlé ici et . "Les beaux dimanches", que cela s'appelle. "Une chose en amenant une autre" est le sous-titre et le programme du blog fonctionnant par association d'idées, très bon concept adapté à la forme des blogs qui incite à être primesautier, à sauter du coq à l'âne perpétuellement, entraînant leurs lecteurs dans un vagabondage infusant progressivement dans une atmosphère d'onirisme éveillé.

 

laurent jacquy,les beaux dimanches,travailler tue

Carte postale réalisée par Laurent Jacquy d'après photos de Gilles Ehrmann (pour Picassiette à sa fenêtre) et ancienne carte postale du facteur Cheval, titre de la carte: "En gîte à Chartres", 2011

 

      Laurent Jacquy paraît être un chineur invétéré (d'où peut-être les beaux dimanches de découverte?), et le créateur de cartes postales par photomontage concentrées sur les aventures imaginaires du facteur Cheval, voir la dernière ci-dessus. Il est collectionneur aussi de divers objets, sculptures et peintures naïves, ou naïvistes décalées (je pense notamment aux sculptures représentant des personnages célèbres de son copain Yann Paris, dont un portrait pris au musée de la Création Franche figure sur le blog), photographe de sites d'art brut (j'ai découvert ainsi un nouvel environnement situé dans le village poétiquement nommé "l'Etoile" dans la Somme, sommet de poésie naïve) dont celui de Bohdan Litnianski qu'il contribua à faire connaître avec le livre Le jardin des merveilles de Bodan Litnianski aux éditions Vivement dimanche en 2004.

 

laurent jacquy,les beaux dimanches,travailler tue

Photo Laurent Jacquy

 

     Sur son blog, riche de trouvailles en tous genres (musicales, publicitaires, petites publications curieuses retrouvées comme une collection du Cahier de Marottes et Violons d'Ingres dont j'avais entendu autrefois parler par le docteur Ferdière qui y avait collaboré par un article sur des objets de la poésie naturelle, bois flottés, etc.), je me suis longuement arrêté en particulier sur son album de photos consacrées à de vieilles affiches publicitaires naïvement dessinées cherchant à prévenir les travailleurs de l'industrie des divers types d'accidents du travail possibles. L'ensemble, mis bout à bout, compose un panorama qui ne donne pas très envie d'aller travailler. Laurent Jacquy a du reste intitulé avec sagacité la note qui introduit ce dossier: "Travailler tue"...

 

laurent jacquy,les beaux dimanches,travailler tue

Affiche publiée sur le blog Les beaux dimanches

 

    Dès maintenant, j'ai la joie d'ajouter ce blog cousin du Poignard à la liste déjà longue des blogs dont je ne saurai trop encourager mes fidèles (ou moins fidèles) lecteurs à faire la visite.  

20/03/2011

Art, folie et alentours, le n°24 de la revue Area

(Cette note contient une petite mise à jour à la fin, datant du 24 mars...)

     Area est une revue fort bien maquettée, dirigée par le critique d'art et collectionneur, curieux de diverses formes d'expressions picturales Alin Avila, qui travailla aussi sur France-Culture. Dans la série déjà longue de ses numéros, on rencontre à l'occasion divers évocations de figures autodidactes de l'art, comme Henry Darger ou Jacques Trovic,Jacques Trovic, Le Bijoutier,2007,coll de l'artiste en 2009, ph. Bruno Montpied.jpg qui se retrouvent ainsi mêlés sans distinction particulière au tout-venant de la création contemporaine. Alin Avila a une sensibilité pour la création hors des chemins battus, en témoigne un des articles parus dans le n°16 de novembre 1978 de la revue Autrement, dossier "Flagrants délits d'imaginaire". Consacré à un ancien mineur du Nord devenu concierge à Paris, Félix Picques,  peignant naïvement ses souvenirs de la mine, la découverte provenait d'une "rencontre" d'Alin Avila, nous y dit-on.

 

Félix Picques,Autrement n°16, 1978.jpglix Picques

 Area 24, art, folie et alentours, mars 2011.jpg

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

      Voici que le n°24 de la revue se trouve consacré aux rapports de l'art et de la folie, et leurs alentours. Je n'ai pas le détail du sommaire (en scrutant avec une loupe la couverture reproduite sur le carton d'invitation, on devine des entretiens avec beaucoup d'acteurs connus et moins connus du champ de l'art brut ; même mézigue y a participé sur une proposition de Roberta Trapani, par un mini-entretien autour de mon livre Eloge des jardins anarchiques ; on trouve aussi au hasard de la revue une évocation du griffonneur de Rouen Alain Rault, "lettriste" spontané, déjà mentionné sur ce blog ). Le carton d'invitation annonce un vernissage pour le jeudi 31 mars prochain, avec une exposition d'oeuvres provenant de la collection de l'hôpital Sainte-Anne (le Centre d'Etude de l'expression, animé par Anne-Marie Dubois qui a déjà consacré pas moins de quatre tomes de livre à cette collection, belle et intriguante surtout grâce à ses oeuvres anciennes, c'est-à-dire entrées dans la collection avant 1950). Les oeuvres qui seront montrées chez Area proviennent de Gilbert Legube, Aloïse Corbaz, Francisca Baron, Fikaïte, Guillaume Pujolle, etc.

  Guillaume Pujolle, Area 60 ans après.jpg 

Aquarelle de Guillaume Pujolle ci-dessus, rare et belle...

 

  

     L'exposition s'intitule "60 ans après? Reconstitution de l'Exposition internationale d'art psychopathologique de 1950". Le sous-titre m'a plongé immédiatement dans des abîmes de perplexité. Veut-on nous dire qu'il va s'agir de reconstituer cette exposition historique fort vaste dans le loft de la galerie Area? Cela serait digne du livre Guiness des records. Ou bien est-ce l'annonce d'un projet à venir au musée Singer-Polignac à Ste-Anne, wait and see...  Si l'on veut se renseigner sur ce Centre d'Etude de l'Expression (et l'exposition "d'art psychopathologique" de 1950), voici un lien vers un document en PDF, rédigé par Anne-Marie Dubois pour un numéro de la Revue du Praticien daté de 2004 (il est à télécharger sur le site de cette revue). Il a le mérite d'être court et condensé.

L'exposition à la galerie Area (50, rue d'Hauteville, 10e Paris, fond de cour 2ème étage) se tient entre le 31 mars (jour de vernissage) et le 14 mai 2011. Elle est ouverte du mercredi au samedi de 15h à 19h. Le n° 24 de la revue sort au même moment. A signaler également, le jeudi 24 mars à 20h, la présentation de ce même numéro spécial à la librairie L'atelier (2 bis, rue Jourdain, Paris 20e), avec une "conversation autour de l'art brut : de la folie à la reconnaissance ?" entre les intervenants Alain Avila, Anne-Marie Dubois et Céline Delavaux.