Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

13/10/2012

Entrée des médiums, spiritisme et art de Victor Hugo à André Breton

    Débutera le 18 octobre prochain l'exposition susdite à la Maison de Victor Hugo, place des Vosges à Paris, prévue pour durer jusqu'au 20 janvier 2013. On y découvrira du nouveau sur l'art médiumnique, notamment des dessins, gravures et documents jamais vus de Victorien Sardou.

Victorien Sardou, La maison du prophète Elie, vers 1857, encre sur papier, 47 x 60 cm, collection M. et Mme Claude de Flers, Paris, ©Studio Sébert 

Ce dernier, comme le comte Le Goarant de Tromelin, Léon Petitjean, Augustin Lesage, fait partie des créateurs médiuniques évoqués par André Breton dans Le Message Automatique, texte de 1933 publié dans la revue Minotaure. Ils furent ensuite avidement recherchés par les thuriféraires de l'Art Brut.


Le Comte de Tromelin, sans titre (femmes et monstres), entre 1902 et 1907 (si l'on se base sur le catalogue d'une précédente exposition à la Halle Saint-Pierre à Paris en 1999, Art spirite, médiumnique, visionnaire, messages d'outre-monde), crayon sur papier, 38 x 51 cm, Collection de l'Art Brut, Lausanne, ©Claude Bornand


Léon Petitjean, sans titre, 1922, mine de plomb, encre et aquarelle sur papier, 32 x 17,4 cm, collection ABCD, Montreuil, © collection ABCD/ photo Patrick Goatelen

    En fait, on va assister semble-t-il à une revue des principaux créateurs se revendiquant d'esprits désincarnés leur ayant intimé d'écrire ou de dessiner, voire parfois comme dans le cas de la médium Marthe Béraud de se servir d'eux comme truchement pour ectoplasmes (on l'avait déjà vu dans l'expo Le Troisième oeil. La photographie et l'occulte montée à la Maison Européenne de la Photographie à Paris en 2004-2005).


Hélène Smith, plante d'ornement martienne, [fin 1896-été 1899], aquarelle sur papier, 18,5 x 11 cm, Bibliothèque de Genève © Bibliothèque de Genève

    Hélène Smith, la célèbre patiente du Dr Flournoy qui parlait le Martien et représentait à l'occasion des paysages de Mars, viendra refaire un tour également, ainsi que Madge Gill, bien connue dans l'art brut, et Fernand Desmoulin dont on a déjà vu au moins deux expositions à la galerie de Messine autrefois, puis à la galerie Christian Berst, sans compter les oeuvres plus post-impressionnistes visionnaires toujours visibles je pense au musée de Brantôme dans le Périgord où je les photographiai vers 1992 (voir ci-contre).Fernand-Desmoulins-musée-de.jpg Là, dans cette expo, plus axée sur le médiumnique, ce seront des dessins de Desmoulin plus "automatiques", venus de l'Institut de Métapsychique International ou de la collection ABCD, bien représentée une fois de plus dès que l'on parle de médiums. 

     Peut-être que la surprise sera à chercher plutôt du côté d'Hugo d'Alesi (semble-t-il une découverte de la collection ABCD) et d'un(e?) certain(e?) "SV" dont l'un des dessins faits de motifs floraux, qui ne sont pas sans faire songer à l'art spirite tchèque (tel qu'à Paris on avait pu également le découvrir à la Halle Saint-Pierre grâce à l'entremise d'Alena Nadvornikova), sert pour le carton d'invitation à l'expo.

 

     On nous présente aussi un médium contemporain, Philippe Deloison, dont je ne trouve pas, si je ne me base que sur une reproduction insérée dans le dossier de presse de l'expo, que son esprit soit aussi bien inspiré que ceux de ses collègues médiums plus anciens...


     Enfin, on a mêlé à ces productions d'autodidactes en matière de dessin des expériences automatiques de divers surréalistes, comme Man Ray, André Masson ou encore Robert Desnos (on sait qu'aujourd'hui encore des créateurs se revendiquant surréalistes, tel Jan Svankmajer en République tchèque, pratiquent des expériences dites médiumniques de création automatique).


Robert Desnos, Mort d'André Breton (peinture médiumnique), vers 1922-1923, huile sur toile, 46 x 55 cm, collection particulière © Gérard Leyris/Ville de Paris

11/10/2012

Emilie Henry nous quitte

     Je n'ai jamais su grand chose de la personne Emilie Henry. J'aimais simplement regarder certains de ses dessins bien ténébreux, où l'encre jouait de ses coulures et de ses brumes avec une délicatesse et une beauté hors du temps. J'en avais acheté deux un jour à Bègles, puisque c'est au musée de la Création Franche qu'elle se révéla. Je leur trouvais un côté hugolien et visionnaire, j'en attendais beaucoup de promesses.


Emilie-Henry,-sans-titre(fe.jpg

Emilie-Henry,sans-titre-(pe.jpg

Deux lavis d'Emilie Henry, vers 2009, coll. BM

      Et puis voici qu'Emilie Henry, Strange Emily, a décidé de mettre la clé sous la porte dans la nuit du 3 au 4 octobre dernier. L'automne est propice aux départs en compagnie des feuilles mortes.Emily the strange.jpg Elle en a fini avec cette (sa?) vallée de larmes sans doute. Et ses dessins restent désormais derrière elle, prenant avec le recul d'autres interprétations. Le passeur sur la barque, ne le reconnaît-on pas ? C'est Charon faisant passer les âmes aux enfers, et le fleuve, ne serait-ce pas du coup le Styx? L'oiseau qui passe arrache-t-il cette âme pour l'emporter au pays des ombres? L'œuvre toute entière prend à présent l'aspect d'une vaste tentative de préfiguration du monde obscur où vont migrer les morts après le parcours terrestre.

henry_emilie-sans_titre, catal vente aux ecnhères Néret-Minet mai 11.jpg

Emilie Henry, extrait d'un catalogue de vente aux enchères Néret-Minet en mai 2011

08/10/2012

Collectionneurs de merveilleux nuages

    En anglais, ils intitulent l'exposition "Collectors of skies". C'est la Galerie Andrew Edlin à New-York qui monte cela avec la complicité de Barbara Safarova et de Valérie Rousseau qui ont été pour l'occasion intronisées commissaires. C'est commencé depuis le 13 septembre et ça se termine le 3 novembre. Je sais, c'est pas la porte à côté, New-York, et j'imagine que mes lecteurs ne faisant pas partie de la Jet Set de l'art brut qui quadrille le blog, euh, non, le globe... en quête d'art brut dans tous les pays, resteront légèrement dubitatifs devant une telle adresse. Mais s'ils s'intéressent un tant soit peu à la poésie, aux nuages, à l'histoire et à la préhistoire de l'art brut, ils devront tout de même tendre une oreille attentive.

 

skies_invite_1.jpg

Le dessin de ce carton est d'Achilles G. Rizzoli (1936)

 

     L'affiche du carton d'invitation électronique égrène des noms connus et beaucoup d'autres moins connus. Ne sommes-nous qu'en pays de bruts? Ce n'est pas sûr. Il semble que la galerie Andrew Edlin ait pris pour habitude d'engendrer des confrontations entre artistes contemporains inspirés (par exemple ici une "harpe de nuages" de Nicolas Reeves qui nous dit le carton d'invitation convertit "en temps réel la structure des nuages en séquences musicales", wow!) et créateurs de l'art brut.GUO Fengyi encre sur papier de riz(C BERST).JPG Guo Fengyi (voir ci-contre une reproduction venue d'une œuvre exposée à la galerie Christian Berst en son temps), Charles Dellschau, Henry Darger, Janko Domsic, Zdenek Kosek et Victor Hugo ne sont pas complètement inconnus des amateurs d'art brut. C'est qu'ils ont eu affaire avec les esprits et le hasard objectif des nuages et autres intersignes climatologiques (je pense à Kosek notamment, dont les théories liées aux réseaux de coïncidences si elles sont captivantes ne me font pas oublier que les documents et les diagrammes qu'ils nous livrent à l'appui ne sont pas bien folichons). Palmerino Sorgente est une trouvaille de la Société des Arts Indisciplinés (inactive désormais?) de la Québécoise Valérie Rousseau, devenue une familière de la grosse pomme entre-temps. Les autres noms ne me disent personnellement rien. A part, à part... Clémentine Ripoche bien sûr.

    Sur cette dernière, on ne dispose vraiment que de très peu d'informations. Et pourtant... Dans l'histoire de l'art brut, elle représente le premier cas de création plastique venue d'ailleurs que rencontra Dubuffet bien avant l'art brut (des nuages en l'occurrence que l'intéressée interprétait, apparemment de façon visionnaire, dans un cahier de dessins, d'après ce que l'on en sait par les historiens de Dubuffet, et par l'autobiographie de ce dernier, rédigée "au pas de course", peu de temps avant qu'il décide d'abréger ses jours). La grande information nouvelle est qu'une correspondance entre Clémentine Ripoche et Dubuffet restée inédite à la Collection de l'Art Brut à Lausanne a été confiée pour l'occasion aux commissaires de l'exposition new-yorkaise. C'est un élément à verser au dossier Ripoche, en attendant que réapparaisse un jour (fort hypothétique hélas!) le fameux cahier dont Michel Thévoz a signalé (dans le catalogue de l'exposition à Lausanne du Nouveau Monde) qu'il n'avait pas été conservé par Dubuffet (sans doute parce qu'il le rendit à son auteur comme les lettres en témoignent – j'ai en effet pu par une faveur spéciale d'une des deux commissaires les consulter ; Clémentine tenait à ses dessins avec un acharnement compréhensible, mais cela fut peut-être cause simultanément de leur disparition ultérieure). Cela se passait en 1923, et montre bien que l'intérêt de Dubuffet pour ce qu'il allait appeler l'art brut à partir de 1945 avait commencé de germer dans ces années d'apprentissage de l'entre deux guerres.

      Voici le passage où Dubuffet évoque la découverte de la visionnaire: "Je dus faire à vingt-deux ans (de fort mauvais gré) mon service militaire. Dans une forme privilégiée car après quelques mois d'exercice dans un fort je me vis affecté à Paris même, à l'Office météorologique (...). Ma prestation de soldat – fort peu militaire – comporta un moment de faire des relevés d'appareils enregistreurs fixés à tous les niveaux de la tour Eiffel et pour cela monter quotidiennement et par mauvais temps l'hiver des escaliers à claire-voie extrêmement hauts. J'eus aussi à répertorier des photographies de nuages parmi lesquelles je trouvai une pièce qui excita très vivement mon intérêt. C'était un cahier émanant d'une personne habitant un faubourg de Paris et relatant, illustrée de dessins, des observations du ciel. Celles-ci ne présentaient pas des nuages mais des défilés de chars et toutes sortes de cortèges et scènes dramatiques. Je fis plusieurs visites à cette visionnaire dont l'égarement tourna vite en totale démence." (Biographie au pas de course, pp 468-469, 1985 dans Prospectus et tous écrits suivants, T.IV).

 

charles méryon le ministère de la marine001.jpg

Charles Méryon, Le Ministère de la Marine, eau-forte, 1865, 168 x 148 mm

 

    Ces dessins de "défilés de chars et de toutes sortes de cortèges" m'évoquent irrésistiblement les cieux chargés eux aussi de chars fantastiques qu'on peut voir dans les gravures de Charles Méryon, qui fut l'illustrateur de Baudelaire.

     On regrette vraiment intensément que ces visions de Mme Ripoche n'aient pas réapparu, et l'on se prend à rêver à ce que disait un jour Maugri, à savoir que les dessins s'ils sont forts peuvent se défendre seuls au delà de la mort de leur auteur, et se conserver par charme et ensorcèlement. Reviendront-ils donc un jour ces chars et ces cortèges pris dans les nuées de 1920, c'est la grâce que nous attendons...?

30/09/2012

Info-Miettes (19)

    Cela faisait longtemps que je n'avais pas rassemblé quelques infos-miettes, mais la rentrée bat son plein dirait-on, et les expos et autres manifestations se pressent au portillon. Alors je m'y résouds, ce qui est aussi une manière d'expédier les informations en question sans trop m'appesantir.

Carol Bailly à Lausanne, Galerie du Marché

(Avec une mise à jour concernant la note ci-après, que je date du 23 novembre)

      "Carol BAILLY, Œuvres récentes, du 4 octobre au 3 novembre, vernissage en présence de Mme Bailly le samedi 6 octobre de 10h à 15h" (il doit y avoir un repas à des horaires pareils). Tel est le message qui a claqué devant mes yeux ébaubis ce soir, en provenance de la galerie lausannoise du Marché tenue par Jean-David Mermod.Caroll Bailly Audrey Hepburn, 24x32 cm.jpg J'avais récemment bien apprécié les dessins d'après des vedettes pop (dont la mirobolante Amy Winehouse pour qui je dois avouer un faible, ou Audrey Hepburn – voir ci-contre) qui avaient été montrés au Musée de la Création Franche. On retrouve la même qualité dans les visuels que m'a adressés la galerie, avec cependant une question qui me tarabuste un peu devant deux d'entre eux, peints sur carton.

 

Carol Bailly, Vanessa Paradis, 50x75 cm.jpg

Carol Bailly, Vanessa Paradis, 50 x 75 cm, Galerie du Marché

Caroll Bailly Resting 50x70cm.jpg

CB, Resting, 50 x 70 cm, Galerie du Marché


     N'y aurait-il pas eu une petite influence, justement en rapport avec ce qui se montre de temps à autre à Bègles à la Création Franche, du travail d'un autre "singulier", Pierre Albasser? On sait que celui-ci s'est donné pour cahier des charges la contrainte librement consentie de n'employer comme support de ses vertiges graphiques que des cartons d'emballage alimentaire. Dans les cartons peints de Carol Bailly ci-dessus, les contours tout en découpures et en évidements paraissent indiquer des supports en relation assez similaire avec ceux du sieur Albasser. Halluciné-je?

Eh bien oui, j'hallucinais... La créatrice a protesté, à juste raison, il n'y a pas eu influence, seulement concomittance. Carol Bailly utilise ce genre de support alimentaire, mon cher Watson, depuis des lustres, et sans connaître Albasser (là, c'est dommage). Et c'est vrai qu'après tout, dessiner ou peindre sur cartons d'emballage, ça n'est pas si nouveau que ça, comme je feignais de le croire dans mon paragraphe précédent. Moi aussi, je dessine là-dessus de temps à autre (en ce moment, ç'est les dessous de crêpes). Pas de quoi se crêper le chignon en somme. Et tout ça, c'était surtout histoire de faire parler de l'ami Albasser...

*

Claudine Goux, Raak, Gérard Sendrey dans une nouvelle galerie lyonnaise dédiée (semble-t-il ) à la création franche et autres singuliers), Le Coeur au Ventre

    Gérard Sendrey, dans sa correspondance circulaire, se montre ravi qu'une nouvelle galerie se propose en la bonne ville de Lyon de faire connaître la création franche qui se trouve représentée en l'occurrence par lui, Goux et Raak.

    On leur souhaite bonne chance bien évidemment, en espérant que le public lyonnais leur réservera bon accueil, en dépit des goûts affichés régulièrement par ce dernier de façon un peu trop chauvine pour les artistes du cru. A Lyon, on se croit souvent seul à créer (mais n'est-ce pas un phénomène que l'on retrouve dans de nombreuses régions? Je ne l'ai cependant jamais ressenti en région bordelaise par exemple, et encore moins à Paris).

Galerie Le Coeur au Ventre animée par Marion Hanna (ex-animatrice de la galerie Lucrèce à Paris), 27, rue Tramassac, 69005 Lyon, tél: 06 86 10 36 70, du jeu au sam de 14h à 19h.

*

A Lyon, il y a aussi et toujours, pour notre plus grand bonheur, la Galerie Dettinger-Mayer

carol bailly,gérard sendrey,galerie du marché,création franche,art singulier,sophie gaucher,galerie dettinger-mayer,lynette ricker,dimitri d       Alain Dettinger, fin connaisseur de la nature lyonnaise quant à lui, loin des modes, loin de tout conformisme, continue de creuser son sillon personnel qui fait de lui un galeriste unique, ce qui est bien trop rare, hélas. Il vient de m'envoyer sans plus d'explication, comme à son habitude, un carton de ses deux prochaines expositions simultanées qui intriguent elles aussi: Dimitri et Lynette Ricker. Qui sont-ils? A vérifier sur place sans doute. Quelque chose me dit, et j'espère ne faire aucune gaffe, qu'Alain Dettinger s'est tourné en l'espèce vers des créateurs un peu plus bruts qu'à l'accoutumée...

Dernière minute: un honorable correspondant bordelais me signale que ces deux créateurs proviennent des recherches de Jean-Louis Faravel qui les exposent dans ses biennales de Rives (en Isère). Ce dernier a en effet un certain flair, voire un flair certain pour dégoter ce genre de créateurs venus des foyers d'art pour handicapés.

carol bailly,gérard sendrey,galerie du marché,création franche,art singulier,sophie gaucher,galerie dettinger-mayer,lynette ricker,dimitri d

Dimitri

carol bailly,gérard sendrey,galerie du marché,création franche,art singulier,sophie gaucher,galerie dettinger-mayer,lynette ricker,dimitri d

Lynette Ricker

 

Expositions du 28 septembre au 27 octobre, à la galerie, 4, place Gailleton, 69002, Lyon. Pour plus de renseignements, voir le site de la galerie.

*

Sophie Gaucher fait parler d'elle

    Grosse actualité en cet automne et cette fin d'année pour la dessinatrice Sophie Gaucher que je m'étais amusé à vous faire découvrir récemment en candidat mystère. Il faut se rendre sur son site web fort complet et intriguant je trouve:  http://monfournissoir.free.fr/monfournissoir/index.html

 

carol bailly,gérard sendrey,galerie du marché,création franche,art singulier

Sophie Gaucher, sculpture...


     Elle m'a signalé certains de ses travaux fort intéressants, qui ne se limitent pas au dessin et de loin.

 

carol bailly,gérard sendrey,galerie du marché,création franche,art singulier

Collage et dessin

carol bailly,gérard sendrey,galerie du marché,création franche,art singulier

Et le dessin seul qui continue... Toujours aussi captivant

 *

Une journée à Nantes consacrée à François Tosquelles, précurseur de la psychothérapie institutionnelle

carol bailly,gérard sendrey,galerie du marché,création franche,art singulier,sophie gaucher,galerie dettinger-mayer,lynette ricker,dimitri d    C'est pour le 20 octobre cette journée, pour tous ceux qui voudraient en apprendre un peu plus long sur ce psychiatre venu de Catalogne espagnole en fuyant les franquistes en 36, connaissance du Dr Ferdière, qui s'installa à l'hôpital de St-Alban-sur-Limagnole en Margeride. Il fut à l'origine du mouvement psychiatrique émancipateur appelé par Georges Daumézon, par la suite (comme me l'a signalé Jacques Canselier à qui je dois l'information), "psychothérapie institutionnelle" qui visait à rendre leur dignité aux malades enfouis dans le carcan hospitalier (à ce que j'ai cru comprendre), en leur confiant des moyens de reprendre pied dans la société, en les laissant notamment libres de s'adonner aux occupations qui leur plaisaient comme la création artistique. St-Alban eut comme pensionnaires comme on sait le sculpteur-assembleur et dessinateur Auguste Forestier, ainsi que Clément, celui qui sculpta les parois de bois de sa cellule avec un bout de cuillère en métal, deux personnages assez célèbres dans le corpus de l'art brut.

     Cette journée de rencontre intitulée "François Tosquelles ou la décence ordinaire" comporte un programme où l'on pourra écouter parmi d'autres, Jean Oury, Elsie Le Coguic, et Jacques Vallet (ancien directeur de la revue "Le fou parle"). Pour en savoir plus, on clique ici.

*

Des bâtisseurs de Babel à Rome

 

carol bailly,gérard sendrey,galerie du marché,création franche,art singulier,sophie gaucher,galerie dettinger-mayer,lynette ricker,dimitri,françois tosquelles,psychothérapie institutionnelle,costruttori di babele,roberta trapani


      Roberta Trapani nous informe qu'elle sera commissaire d'exposition pour un parcours photographique présentant trois "costruttori di babele", Bonaria Manca, Luigi Lineri et Giovanni Cammarata, et ce au musée Billoti à Rome. Les photographes étant Alberto Ferrero, Rodolfo Hernandez et Salvatore Bongiorno.

 

carol bailly,gérard sendrey,galerie du marché,création franche,art singulier,sophie gaucher,galerie dettinger-mayer,lynette ricker,dimitri,françois tosquelles,psychothérapie institutionnelle,costruttori di babele,gabriele mina, eva di stefano, camaratta, Bonaria manca, luigi lineri,roberta trapani

Bonaria Manca et ses costumes excentriques, ph Mario Del Curto (à l'expo "Des Rives", déc. 2011/janvier 2012 à Gènes, organisée par Gustavo Giacosa)


     Comme je l'ai déjà signalé ici, on doit ce terme de  "Bâtisseurs de Babel" à Gabriele Mina, anthropologue auteur d'un livre éponyme qui souhaite en matière d'environnements italiens mettre avant tout l'accent sur leur dimension d'utopie. Lineri amasse et assemble des galets qu'il glane dans le lit de la rivière Adige, les classant en fonction de leurs formes ("des angles droits, des bétails, des poissons, des agneaux, des phallus, des femmes enceintes, des oeufs cosmiques"). Cammarata (1914-2002) avait créé quant à lui un environnement sculptural et architectural à la périphérie de Messine en Sicile qui était tout à fait étonnant. Il fut presque entièrement détruit pour qu'on puisse bâtir à la place... un centre commercial. Bonaria Manca, paysanne sarde, décore depuis 1997 l'intérieur de sa maison de grandes fresques évoquant ses souvenirs de sa vie rurale en Sardaigne et aussi des figures imaginaires représentant des esprits liés à sa mythologie personnelle.

 

carol bailly,gérard sendrey,galerie du marché,création franche,art singulier,sophie gaucher,galerie dettinger-mayer,lynette ricker,dimitri,françois tosquelles,psychothérapie institutionnelle,costruttori di babele,roberta trapani

Giovanni Cammarata, un de ses pachydermes, photo Florent Naulin/Teresa Maranzano, extr du livre d'Eva Di Stefano, Irregolari, art brut e outsider art in Sicilia, Kalós, Palerme, 2008 ; (encore un éléphant qui gazouille...)

 

       Le vernissage, samedi  29 septembre, qui se déroulera en présence des créateurs Luigi Lineri et Bonaria Manca, verra à 16h30 la présentation de l'ouvrage et du projet « Costruttori di Babele » par Gabriele Mina. A 17h seront présentés les univers de Cammarata, Lineri et Manca par Daniela Rosi "(commissaire d’expositions et directeur culturel du Centre de réadaptation neurologique "Franca Martini" à Trento, elle coordonne l'Observatoire National de l'Art Outsider à l'Académie des Beaux-Arts Cignaroli de Vérone)". Roberta Trapani "(doctorante en histoire de l’art et membre du CrAB, elle étudie les espaces visionnaires contemporains, notamment en France)" et Pier Paolo Zampieri "(chercheur en sociologie urbaine à l'Université de Messine)" lui prêteront main forte. Si des lecteurs francophones sont dans les environs de Rome ce jour-là, qu'ils n'hésitent donc pas (du reste, ne dit-on pas que tous les chemins y mènent?)...

Musée Carlo Bilotti - Orangerie Villa Borghese, Viale Fiorello La Guardia, Rome. Du 30 septembre au 14 octobre 2012. 


23/09/2012

L'idiome du village, une exposition proposée par le musicien Jean-François Vrod

"Inauguration en musique de l'exposition 'L'Idiome du village", art brut, populaire,
avec le Trio la Soustraction des Fleurs 

Jean-François Vrod, violon, voix - Frédéric Aurier, violon, voix -  Sylvain Lemêtre, zarb, voix - Sam Mary, lumières
11 octobre 2012 à 18h30
Maison des arts plastiques Rosa Bonheur - 94550 Chevilly-Larue

renseignements : 01 56 34 08 37"

     Tel est le message quelque peu laconique que l'on trouve sur le site web du violoniste à la fois traditionnel et contemporain Jean-François Vrod (en cliquant sur le lien vous trouverez une bio particulièrement synthétique sur son parcours). J'avais déjà entendu parler d'une exposition organisée à partir de sa collection personnelle de créateurs bruts et populaires, expo qui s'était tenue en banlieue parisienne au sud, je ne me souviens plus de la commune (Les Ulis?), il y a quelques années (2004?). Je l'avais loupée, à mon grand dam. D'autant que j'appréciais le musicien jusque là pour certains de ses enregistrements particulièrement poétiques (notamment un disque de 1996, "Voyage" édité chez le label Auvidis, absolument enchanteur, puis un disque solo édité chez Cinq Planètes). Je suis assez amateur de musiques traditionnelles à mes heures. Apprendre donc que ce musicien a tressé des passerelles entre musiques traditionnelles, improvisation et arts populaires est plutôt captivant.


podcast Extrait (les Miroirs) du Cd "Voyage" (1996) de Jean-François Vrod, C. Declercq, et C. Joris

    En fait, il a conçu dès 1999 cette exposition comme une sorte de manifestation en perpétuel chantier, au gré de ses découvertes, sous le titre générique de "L'idiome du village". Voici sur son site ce qu'il en dit: "... le musicien de tradition orale y est envisagé comme membre de la grande famille d'artistes en marge de l'histoire de l'art (Bruts, aliénés, enfants, primitifs contemporains...)."

 

jean-françois vrod,vélos insolites et populaires,musiques traditionnelles,musiques d'outre-normes,yvonne robert,roland vincent,chapluzaïres,art populaire,art naïf,art singulie,l'idiome du village,maison d'arts plastiques rosa bonheurr

Jean-François Vrod tenant une statuette en bois de style naïf (auteur anonyme), trouvée sur une brocante en Vendée


     Je n'ai pas encore eu l'occasion de voir comment s'articule exactement la musique de Jean-François Vrod avec les objets ou les œuvres exposées par lui. L'exposition d'une centaine de pièces qui se monte à partir du 11 octobre, et qui durera jusqu'au 10 décembre, à la Maison des arts plastiques Rosa Bonheur à Chevilly-Larue tombera donc à point nommé pour vérifier ce détail. A priori seront présentés "pêle-mêle" (ce sont les mots de l'artiste) des bruts (Yvonne Robert par exemple), des populaires et des contemporains du genre marginalisé. Voici les noms que j'ai pu obtenir auprès de Jean-François Vrod: "pas de noms vraiment connus: Slimane Houalli, (sculpture animaliére à base de coquilles d'huitres), André Poirson, sculpteur sur bois ; Yvonne Robert, paysanne-peintre de Vendée; Robert Battefort, dessinateur naïf ; Pierre Diet et Philippe Durand, sculpteurs lozériens, Jeanine Suchet-Roux, peintre; Roland Vincent, sculpteur sur pierre creusois; Joseph Bouton sculpteur du Bourbonnais, Denis Simmonet sculpteur sur bois flottés de L'île de Noirmoutier ; Frédéric Le Junter plasticien et musicien... Hormis Roland Vincent, sculpteur sur pierre et poudre de granit, que j'ai déjà évoqué dans ce blog (et que j'ai exposé moi-même dans un Festival d'Art Singulier à Aubagne en 2006), je ne connais pas grand-monde dans cette liste. Le nom de Jeanine Suchet-Roux me dit quelque chose, elle fut exposée au Printemps des Singuliers voici quelques années à Paris, il s'agit d'une artiste dite singulière et non pas populaire ou naïve. Les amateurs d'art populaire devront se rendre sur place pour y retrouver les leurs...jean-françois vrod,musiques traditionnelles,musiques d'outre-normes,yvonne robert,roland vincent,chapluzaïres,art populaire,art naïf,art singulie,l'idiome du village,maison d'arts plastiques rosa bonheurr

     J'ai l'impression que Jean-François Vrod au gré de ses balades et concerts, et autres "conférences musicales" (sur les "êtres fantastiques en Dauphiné" par exemple), glane toutes sortes d'expressions marginales qui l'intriguent, et comme il s'intéresse aussi passablement aux musiques du Massif Central, où il a fait du collectage, peut-être même est-il tombé sur quelques "chapluzaïres" tels que ceux que j'ai évoqués dans cette ancienne note.

 Ci-contre, Roland Vincent, sans titre (un tambourinaire?), vers 2005, coll Bruno Montpied

jean-françois vrod,musiques traditionnelles,musiques d'outre-normes,yvonne robert,roland vincent,chapluzaïres,art populaire,art naïf,art singulie,l'idiome du village,maison d'arts plastiques rosa bonheurr

Jean-François Vrod et un petit vélo en bois (à rajouter aux autres vélos populaires mentionnés sur ce blog), lui aussi trouvé sur une brocante en Vendée


 

20/09/2012

Télescopages délicieux

    Il y a des cadavres exquis mais aussi des télescopages délectables. J'ai déjà eu l'occasion d'en présenter deux, l'un où il était question d'un Passage Dieu avec port du casque obligatoire, et l'autre d'une "bonne nouvelle" du genre plutôt cruel. En voici quatre autres exemples glanés ces dernières années (cela n'est pas si fréquent, hélas, cela ferait plus de motifs de rigolade, mais l'on s'en contentera faute de mieux).

 

Inscription armoire électrique EDF Evreux, fév 08.JPG

Sur une armoire électrique dans la rue à Evreux en 2008, ph. Bruno Montpied ; le théâtre se trouve là investi d'une mission nettement plus intense

Hauterives,-magie-des-assoc.jpg

Magie des associations... Le palais idéal du facteur Ferdinand Cheval, beau repaire de toutes les marges appelées à devenir des centres? Ph BM, 2011

Gde-boucherie-des-patriarch.jpg

Rue Mouffetard, Paris Ve ardt, vers 2009, ph. BM ; Ce qui arrive aux vieux sages qui fatiguent leurs auditoires

Elysée et guignol.jpg

Panneau près du rond-point des Champs-Elysées, magie des rencontres significatives, date indéterminée (récente bien entendu) ; communiquée par Robert Douard et Michel Valière


11/09/2012

L'étrange fontaine de Soleymieux, passons une deuxième couche...

    La réaction de Régis Gayraud, surtout son deuxième commentaire à ma note précédente, me conduit à proposer une nouvelle hypothèse.

    Le fait est, qu'à ma grande honte (je n'avais pas vérifié), Soleymieux et Saint-Jean-Soleymieux, comme nous le signale Régis, sont bien deux communes distinctes. Cela a une conséquence importante pour mes raisonnements précédents. D'autre part, je reconnais que moi aussi j'étais quelque peu chiffonné devant la carte Cim de St-Jean, montrant la statue avec un casque, statue que je proposais de voir déplacée ensuite plus bas sur la place de Soleymieux, quand je la comparais à la photo de cette dernière place où l'on voit mal la fontaine et surtout le personnage qui la surmonte. Je pensais que cette photo pouvait peut-être dater des mêmes années que la carte Cim parce que j'étais persuadé que la statue du triton provenait de St-Jean, trompé que j'étais par les affirmations de l'instituteur mentionnées dans ma note précédente... Les détails que nous indique Régis sur son ancienneté probable font déduire que la statue qui se trouve dans ces années de début XXe siècle devant le bureau de tabac ne peut être la même que celle qu'on voit, bleutée, sur la carte montrant la fontaine de St-Jean-Soleymieux. Il est possible qu'une confusion se soit opérée dans la mémoire des habitants puisque les légendes des deux fontaines donnent le même château de Chénereilles comme lieu d'origine des statues des deux fontaines.

      Je parlais ci-dessus d'une conséquence importante qu'apporte l'information que les deux communes sont distinctes. Le rapport sur la délibération du conseil municipal que j'ai cité dans ma précédente note indique formellement qu'une fontaine surmontée d'un triton a été érigée en 1808 sur la place de Soleymieux (et non de St-Jean). Il est dès lors possible d'imaginer que le triton est resté en place pendant les deux siècles sur la place, et que c'est lui qui, victime d'un dégât à une date indéterminée (probablement après-guerre, et peut-être même dans les années 70, voir les images ci-dessous?), a été "métamorphosé" dans l'état où je l'ai photographié, état étrange, Ô combien... L'autre statue de St-Jean, qui ressemble elle davantage au fameux "soldat romain" (et moins à un triton à dire vrai) proposé par un témoin le jour de notre rencontre de cet été, et qui fait passablement rêver notre ami Régis, cette autre statue est probablement complètement distincte de celle de Soleymieux. L'hypothèse d'un déplacement de statue n'était étayée que par les souvenirs trompeurs de notre ami instituteur, qui n'en était pas tout à fait certain du reste (comme dit Régis, et c'est bien sûr cela qui nous séduit infiniment dans cette petite recherche qui ne se voudrait rationnelle en apparence que pour laisser en sous-main l'imagination se déployer, "ainsi naissent les légendes"...).

    J'ai cherché sur la toile d'autres cartes montrant la fontaine de Soleymieux. L'objectif étant d'en trouver une qui montrerait enfin plus exactement l'état antérieur de la fontaine de Soleymieux. Voici quatre images qui font progresser le schmilblic, je trouve.

 

Place-publique-de-soleymeiu.jpg

Une carte aux alentours des années 20 peut-être... On voit la fontaine et son personnage sur la droite...

Place publique de soleymeiux, la fontaine seule.jpg

qui en dépit de son aspect d'amas blanchâtre accentué par la pixélisation ne paraît vraiment pas ressembler à un soldat, mais bien plutôt à une sorte d'animal...

Autre vue de la place Soleymieux.jpg

Autre vue de la même place, toujours à Soleymieux, la statue est à droite, même difficulté à la discerner précisément, mais ce ne paraît décidément pas être un soldat...

Carte cim couleur.jpg

Carte moderne dentelée (1971), la "bestiole" de la fontaine paraît pourvue d'yeux proéminents, à la différence de l'aspect lissé d'aujourd'hui, sa cuisse gauche est bien dessinée, et à la réflexion ne correspond en rien à la statue de la fontaine de St-Jean... Cependant, il est à noter que l'on n'a toujours pas vu sur ces images quelque chose qui pût ressembler à une queue de poisson...

la fontaine sur le site de la mairie.jpg

Une photo (date indéterminée) telle qu'on peut la trouver sur le site de la mairie de Soleymieux ; à noter un aspect lissé de la statue comme si elle était en argile... (Un peu comme mes hypothèses, remodelables à volonté?)


       Pour moi, la vérité commence peut-être enfin à se dessiner. La fontaine de Soleymieux était surmontée d'un triton, ce qui est assez banal au fond pour une fontaine, mobilier urbain de transition entre milieu aquatique et milieu terrestre, dont le symbole peut facilement être un homme- poisson. Il y a eu une "restauration" à un moment donné. Qui en fut l'auteur? On peut chercher à le savoir sans pouvoir attirer les foudres sur lui, car contrairement au christ de Mme Gimenez à Borja, la profanation est ici bien moindre. Qui se soucie d'un triton? Du coup, l'insolite de la statue actuelle a plus de chance d'apparaître aux yeux de tous. Quant au soldat romain, cher Régis, on ne sait où il s'en fut, car il est désormais bien absent du socle entrevu à St-Jean.

 

Triton, église de Qasr Lybia, VIe siècle.jpg

Triton de Qasr Lybia, époque byzantine (il me semble...)


08/09/2012

L'étrange fontaine de Soleymieux

Cette note contient des mises à jour (signalées en rouge) suite aux commentaires de Régis Gayraud

    Nous descendions en direction de Montbrison dans le département de la Loire, cet été, quand l'un d'entre nous (Régis Gayraud pour ne pas le nommer qui en bon conducteur avait l'oeil à tout, ce qui explique qu'il ait perçu en premier l'étrange objet) s'avisa d'une fontaine qui nous faisait face, sur une petite place, dans la commune de Soleymieux, qui jouxte celle de St-Jean-Soleymieux placée légèrement plus haut qu'elle sur les contreforts du Forez.

 

Fontaine-de-face.jpg

Fontaine de Soleymieux, Photo Bruno Montpied, 2012


    Ô, la bizarre fontaine... Nous récriâmes-nous en choeur. Comme vous pourrez vous-même en juger d'après l'image ci-dessus (une de ses faces)... Quel était cet animal à la tête glabre, à la cuisse musculeuse, le dos comme couvert d'écailles, les yeux faits de deux billes incrustées..., vaguement écroulé, plié en avant ? Spontanément, je pensai pour ma part à une sorte de tortue.

 

Fontaine-côté-droit,-tortue.jpg

Un autre aspect de la statue ; c'est ce côté qui me fit penser d'abord à une tortue, ph.BM, 2012


   Nous fîmes bientôt cercle autour de la dite fontaine, et voyant notre curiosité, un homme vint à nous, le maire du village qui paraissait sortir d'une réunion, à qui je demandai bien vite la signification de cette statue fort hybride et difficile à interpréter. Il ne s'était, nous confia-t-il, jamais vraiment posé la question, occupé qu'il était par bien d'autres problèmes plus urgents (mais notre curiosité l'intéressait). Une seconde personne arriva, puis une troisième, qui se révéla être l'instituteur du lieu. Chacun faisait assaut d'imagination devant le personnage énigmatique. On se mit à déambuler dans le village, allant frapper à la porte des uns et des autres, réveillant des siestes, interrogeant les érudits disponibles. Une légende se mit à prendre corps au gré de notre balade. De la tortue, on était passé à l'évocation d'une grenouille, enfin à celle d'un "soldat romain" (ce qui me parut sur le moment une interprétation à 180° d'écart par rapport aux deux précédentes ; mais on verra qu'une hypothèse pour le moment considérée comme finale tient dans un mixte des deux, ce qui correspond finalement assez bien à une statue de type nettement hybride...). Puis l'instituteur parut se rappeler que la fontaine avait un rapport avec celle placée sur une place dans le bourg situé plus haut, celui de St-Jean-Soleymieux. Qu'une légende la disait en provenance d'un château des environs (enfin... Tout de même assez distant), à Chénereilles (plusieurs cartes postales des deux bourgs indiquent cette provenance).

 

saint-jean-soleymieux,fontaine de soleymieux,modifications d'oeuvres d'art,art spontané,fontaines insolites

Soleymieux, carte postale des années 50? 60? La statue est à droite, sur la même place où nous la trouvâmes en juillet 2012


     Au bar-tabac du coin, une ancienne carte postale encadrée montrait la place avec sa fontaine surmontée d'une statue disparaissant malheureusement dans l'ombre d'une frondaison (voir ci-dessus). Remontés jusqu'au bourg de St-Jean, nous constatâmes que la fontaine indiquée par l'instituteur ne diposait que d'un simple socle ou fronton orné de motifs floraux sans grande originalité.

 

saint-jean-soleymieux,fontaine de soleymieux,modifications d'oeuvres d'art,art spontané,fontaines insolites

Côté gauche de la statue "tortue-grenouille-soldat romain", ph.BM, 2012


   Il fallait enquêter. Des cartes postales anciennes montrent que l'instituteur avait peut-être raison... La statue située à Soleymieux sur l'actuelle fontaine paraît provenir de la fontaine de St-Jean-Soleymieux (celle qui a une base décorée de motifs floraux). Est-ce cette dernière qui a été créée en 1808, selon un rapport de délibération du conseil municipal de Soleymieux comme me l'a aimablement signalé le maire de Soleymieux, M. J-L.Jayol? La statue représentait à l'origine, aux dires de ce rapport, "un triton à tête humaine, comme un dieu marin mi-homme (pour le buste) mi-poisson"... Et cette statue ainsi que sa base ornée proviennent bien du château de Chénereilles, toujours selon le même rapport, ce qui rejoint les légendes des cartes postales. Comme quoi j'étais retombé avec mes camarades sur le mythe de la sirène, cette fois dans une version masculine...

 

saint-jean-soleymieux,fontaine de soleymieux,modifications d'oeuvres d'art,art spontané,fontaines insolites

Carte montrant la fontaine dans le bourg de St-Jean-Soleymieux, non encore déplacée à Soleymieux ; années 1920, 1930?

saint-jean-soleymieux,fontaine de soleymieux,modifications d'oeuvres d'art,art spontané,fontaines insolites

Le triton...? Avec à sa base, peut-être sa queue de poisson?


     Plusieurs cartes postales difficiles à dater – peut-être des années 1920 ? – montrent peut-être le fameux triton, homme-poisson de la mythologie gréco-latine, fruit des amours de Poséidon et d'Amphytrite, en place sur la fontaine du bourg supérieur de St-Jean. Une autre – nettement postérieure avec son enseigne des PTT qui paraît remonter aux années 1950? – la montre toujours à la même place, alors que celle vue dans le bar-tabac de Soleymieux montre la statue déplacée sur la fontaine du bourg inférieur.

 

saint-jean-soleymieux,fontaine de soleymieux,modifications d'oeuvres d'art,art spontané,fontaines insolites

Carte avec enseigne PTT, prise à St-Jean-Soleymieux, avant le déplacement de la statue donc...


      Et c'est ce qui fait le noyau du principal mystère qui me retient dans la découverte de l'actuelle statue. A quelle époque s'est effectuée le transfert du triton de St-Jean-Soleymieux à son emplacement contemporain dans le bourg inférieur de Soleymieux (s'il y a eu transfert)? Et surtout, qu'est-ce qui s'est passé pour que cette statue se soit ainsi métamorphosée,  à coup de greffes et emplâtres de ciment, en l'actuel bizarroïde bestiole hybride qui ressemble de loin à une verge au repos? Est-ce le fruit d'une "restauration" de type Cecilia Gimenez? Car cela y ressemble fortement, je trouve, depuis qu'à peu de temps de notre passage dans la Loire, je suis tombé sur l'affaire de la restauration du Christ de l'église de Borja...

      L'actuelle statue paraît être le résultat d'une modification "brute" due à un quelconque autodidacte populaire qui peut-être à la suite d'un pari farceur a réalisé là une création tout à fait humoreuse, mutation artistique basée sur une dérivation et un détournement de statue académique à la base. C'est le mystère qu'il reste à éclaircir et j'attends donc avec curiosité les réactions des chercheurs sur la question...

 

saint-jean-soleymieux,fontaine de soleymieux,modifications d'oeuvres d'art,art spontané,fontaines insolites

Triton ou verge molle, Soleymieux, ph.BM, 2012


07/09/2012

Emancipations à Ste-Anne

    On ne trouve pas de l'art brut inédit tous les jours. Le Centre d'Etude de l'Expression, situé dans le Centre Hospitalier Ste-Anne et dirigé par Anne-Marie Dubois, avec la collaboration de Jean-Christophe Philippi et Antoine Gentil (c'est la deuxième fois que ces deux-là travaillent avec le Musée Singer-Polignac, le lieu où sont traditionnellement montées les expos du Centre d'Etude)¹, propose pour les semaines qui viennent la manifestation intitulée "Emancipations". Aux dires de Jean-Christophe Philippi, on devrait y trouver du nouveau, notamment des oeuvres de la Collection Ste-Anne peu vues voire jamais exhibées.

 

Invit-Emancipatons-2012.jpg


     Voici ce qu'en dit Anne-Marie Dubois dans le communiqué de presse: 

     « S’émanciper, c’est sortir des sentiers battus, des carcans et avoir accès à de nouvelles libertés de regards et d’expressions. Cette nouvelle exposition constituée de rencontres entre des artistes provenant d’horizons différents, permet à la Collection Ste-Anne d’affirmer sa particularité hors des catégories et des références pré-établies.

      Il s’agit de se laisser guider par son plaisir et son émotion en s’émancipant de ses références artistiques et culturelles. »

     Selon elle, les travaux des créateurs de la Collection, anciens pensionnaires d'hôpitaux où ils s'approprièrent l'art dans une démarche ultra-personnelle par besoin d'expression, histoire probablement de distendre un peu les barreaux de leurs cellules, ces travaux ne se nourriraient que d'eux-mêmes, à la différence des oeuvres d'artistes contemporains singuliers avec lesquelles l'expo organise une confrontation. C'est là revenir à une vision orthodoxe de l'art brut qui date des débuts de l'histoire de cette notion (époque de Dubuffet et Thévoz). Un art brut qui ne se nourrirait que de lui-même peut apparaître aujourd'hui comme une vue de l'esprit, lorsque l'on sait à quel point les créations dites brutes ou spontanées des milieux asilaires sont imprégnées et voisines des expressions populaires traditionnelles, participant d'une culture commune. Et lorsqu'il s'agit de créateurs enfermés d'origine culturelle plus savante, on ne peut faire abstraction si aisément de leurs connaissances artistiques préexistantes. Ce qui caractérise davantage l'art brut, plutôt que d'être hors-culture, c'est la rupture, l'urgence d'expression, la transgression. Ce sont ces notions que mettent en avant aujourd'hui ceux qui continuent de chercher sur l'art brut.

 

musée singer-polignac,centre d'étude de l'expression,jean-christophe philippi,anne-marie dubois,émancipations,art brut,art singulier

Alfred Passaqui, Collection Centre d'Etude de l'Expression


      Et c'est ce point qui nous mobilise plutôt – et c'est une préocupation qui intéresse sans doute tous les artistes d'aujourd'hui – cette question de l'émancipation, ou de la rupture, comme disait Thévoz, opérée par les créateurs vis-à-vis des modèles d'expression disponibles. Quel est le levier qui déclenche ces déploiements graphiques surprenants, jamais vus, qui finissent par hanter nos mémoires par leur langage inédit et captivant? L'expo Emancipations paraît poser la question.

 

musée singer-polignac,centre d'étude de l'expression,jean-christophe philippi,anne-marie dubois,émancipations,art brut,art singulier

Hassan

("C'est un artiste d'origine sénégalaise qui travaille dans la rue à Barcelone, il dessine et grave des plans de maisons sur des planchettes de bois", J-C. Philippi)


        Je n'ai pas la liste globale des créateurs et artistes proposés, mais on promet Gustave Cahoreau, Raymundo Camilo, Marie-Noëlle Fontan, Giordano Gelli, Régis Guyaux, Hassan, Paul Hugues, André Labelle, Michel Nedjar, Marilena Pelosi,  Yvonne Robert (voir ci-contre La Chatte à Hortense s'appelle Vanille, de 2007, coll. BM, non exposé à Emancipations),musée singer-polignac,centre d'étude de l'expression,jean-christophe philippi,anne-marie dubois,émancipations,art brut,art singulier  et des créateurs de la collection Sainte- Anne dont Alfred Passaqui, Maurice Blin, Jean Janès (que personnellement je ne trouve pas terrible). Ces deux derniers sont actuellement exposés au Musée d'Allard à Montbrison dans l'expo "De l'art brut et d'autres choses...", dont le commissaire d'exposition est Alin Avila, par ailleurs directeur de la revue Area². Voici à la suite quelques images de certains créateurs parmi les moins connus, présentés au musée Singer Polignac, que je dois à l'obligeance de Jean-Christophe Philippi pour plusieurs d'entre elles. On remarquera qu'un autre des fils rouges de l'expo renvoie aux réitérations de formes qui paraissent le mode privilégié de structuration des œuvres. Attention cependant que ce choix de montrer des images basées sur des répétitions de formes ne contribue pas ancrer dans l'esprit des amateurs que l'art brut peut être, lui aussi, le siège d'un certain nombre de poncifs (une expo à venir de Marco Raugei à la Galerie Rizomi de Turin allant aussi dans ce sens), tant il existe d'œuvres ressemblant parfois à des planches iconographiques de catalogues (véhicules divers en rang d'oignons à la David Braillon, parapluies de Gugging, vaches à la Krüsi, volatiles ou armes à la Blackstock, etc...).

 

musée singer-polignac,centre d'étude de l'expression,jean-christophe philippi,anne-marie dubois,émancipations,art brut,art singulier,hassan,régis guyaux,paul hugues,yvonne robert,giordano gelli,la tinaia,alfred passaqui

Maurice Blin, tel qu'il est exposé au musée d'Allard à Montbrison ; "Loulou ayant chaud/Mit son nez au Paul Nord/Attrappa une engelure/Et repartit au Paule Sud,/Avec une couverture"...


musée singer-polignac,centre d'étude de l'expression,jean-christophe philippi,anne-marie dubois,émancipations,art brut,art singulier

Paul Hugues

("Paul Hugues est un artiste qui figure dans le premier catalogue de l'Aracine, il a dessiné à l'atelier de l'hôpital de Brévanne (gérontologie). C'est une oeuvre du grand âge", J-C. Philippi)

musée singer-polignac,centre d'étude de l'expression,jean-christophe philippi,anne-marie dubois,émancipations,art brut,art singulier

Giordano Gelli (provient de l'atelier de La Tinaia à Florence)

musée singer-polignac,centre d'étude de l'expression,jean-christophe philippi,anne-marie dubois,émancipations,art brut,art singulier

Régis Guyaux (centre d'art "'La Hesse" à Vielsam en Belgique)


____

¹ Jean-Christophe Philippi a par ailleurs fait l'objet d'une exposition personnelle au Musée Singer-Polignac, comme je l'avais également signalé en son temps.

² Cette exposition, à Montbrison (Loire), qui court jusqu'au 4 novembre prochain, a fait l'objet d'un catalogue où l'on retrouve les images des oeuvres montrées dans l'expo et quelques textes intéressants comme l'excellente contribution de Mme Michèle Gendrat, "ancienne élève de l'Ecole du Louvre", qui présente très honnêtement et très précisément ce qu'est l'Art Brut. A noter aussi que cette exposition présentait des panneaux gravés d'Alain R., détachés donc des murs de Rouen dont ils font partie usuellement. Exposés de façon ainsi déplacée, dans un contexte muséal, ils accédaient au rang d'œuvre de type lettriste. Un lettrisme brut... Le film Playboy communiste de David Thouroude et Pascal Héranval était diffusé parallèlement pour restituer heureusement le contexte d'origine de ces graffiti.

04/09/2012

Katuchevski dans le Marais

     A signaler pour ceux qui suivent le feuilleton de la création katuchevskienne...

invitation-septembre-B-012-.jpg

Expo du jeudi 6 au 29 septembre, Marcel Katuchevski et 3 autres artistes, Galerie Linz, 40 rue Quincampoix, Paris IVe, voir le site www.galerie-linz.com


02/09/2012

Histoires de voir, à voir...

     L'exposition ainsi intitulée à la Fondation Cartier à Paris veut nous entraîner du côté de "l'art naïf", à ce que dit le catalogue ("conçu comme un prolongement de l'exposition"). Après visite de l'expo, j'eus la forte impression que le terme n'avait pas le même sens pour moi que pour les organisateurs de la manifestation – ou, plus exactement, pour les auteurs du catalogue (je pense notamment à son texte liminaire dû à Laymert Garcia Dos Santos). C'est comme si on avait affaire à une conception venue d'ailleurs, d'une région du monde où les mots ont cheminé avec d'autres réseaux de sens (les commissaires de l'expo que je ne connaissais pas comme s'intéressant depuis longtemps aux arts naïfs – mais je suis bien loin d'être informé de tout – sont Hervé Chandès, Leanne Sacramone, assistés de conseillers comme André Magnin – plus connu lui par rapport aux arts populaires africains – ou encore Hervé Perdriolle (l'Inde) et Patrick Vilaire (Haïti)).

 

Histoires de voir catalogue.jpg

Le catalogue avec un dessin d'Isaka sur la couverture (dessinateur Huni Kuï (ou Kaxinawá) d'Amazonie brésilienne)

 

    C'est pourtant bien à un décentrement de perspective que l'on nous invite, sans que cela s'étende a priori à la notion même d'art naïf. On invite avant tout dans le discours de l'exposition tel qu'on le trouve par exemple sur le site de la Fondation à remettre en cause les idées arrêtées professées par les amateurs d'arts savants vis-à-vis des arts pratiqués par des autodidactes naïfs ou "primitifs". Ce qui n'est pas un message absolument nouveau, on en conviendra (même s'il mérite toujours d'être réitéré). 

    "Art naïf" jusqu'à présent, en France, c'était plutôt réservé à un ensemble de peintures, et de sculptures, exécutées par des autodidactes d'origine populaire (souvent des déracinés) tentant de s'égaler aux plus grands des peintres et qui produisent un art autre cependant, où les éléments représentés sont proportionnés en fonction de la réalité affective, psychologique, sentimentale, etc., que leur accorde l'inconscient de chaque artiste (ce qui conduisit G-H.Luquet au début du XXe siècle à parler pour sa part de "réalisme intellectuel"). Certaines incapacités devant les volumes et la perspective les conduisent bien souvent vers des solutions plastiques inédites qui ravirent par exemple Picasso lorsqu'il découvrit certain tableau de Rousseau, dont les visages peints avec des repentirs lui parurent préfigurer ce qu'il créait lui-même dans sa période dite cubiste. L'art naïf, cela reste figuratif et se référant à la réalité perçue de façon rétinienne. C'est Bauchant, Rousseau, Vivin, Peyronnet, Lagru, Trouillard, Jean-Jean, Préfète Duffaut, Orneore Metelli, Ligabue, Dietrich, Trillhaase, Alfred Wallis, et toutes sortes d'anonymes, les ex-voto aussi...

Vidéo disponible sur le site de la fondation Cartier

     Les créateurs, venus d'un peu partout (l'Amérique du Sud, l'Amérique Centrale, l'Afrique, l'Inde, l'Asie), à la fondation Cartier, dans une expo qui au fond semble faire un lointain écho à cette autre manifestation plus ancienne de 1989, Les Magiciens de la Terre,¹ ne me paraissent pas relever de cette définition traditionnelle de l'art naïf (à part peut-être le mièvre Hans Scherfig, ou l'intriguante céramiste brésilienne Isabel Mendes Da Cunha). On nous propose là plutôt des formes d'expression cherchant, sous des dehors archaïsants, ou s'efforçant de l'être, une forme d'immédiateté hésitant entre stylisation, décoratif et art pauvre. Le tout me laissant l'impression d'une recherche à la fois cultivée et de style enfantin, préférant parfois les formes sommaires aux limites du dégrossi (José Bezerra), recherche et parcours présentés dans une atmosphère douce et colorée comme du papier à bonbons (la muséographie d'Alessandro Mendini n'y étant pas pour rien, ses œuvres personnelles – que font-elles là? – étant par ailleurs particulièrement fades).

 

H de voir Alcide pereira dos santos.jpg

Exposition Histoires de Voir, image extraite du site de la Fondation Cartier


     On a du mal à identifier ce qui appartient aux créateurs présentés et ce qui relève de la muséographie. Sont également mêlées les unes aux autres des expressions simples et des expressions fouillées (parmi ces dernières, citons les filets de pêche de l'Indien Jivy Soma Mashe qui parvient à des compositions complexes, tombant là aussi dans le décoratif, à l'aide d'éléments géométriques basiques comme le triangle, le rond et le carré ; les céramiques de la famille Ortiz au Mexique ; les drapeaux vaudou d'artistes haïtiens choisis en fonction de leur dimension à la fois stylisée, en apparence archaïque et encore décorative, alors qu'il en existe d'autres en Haïti bien plus figuratifs et narratifs dans ces mêmes supports). Ces expressions fouillées, voire complexes, sont là pour démontrer, semble-t-il, que l'art naïf et populaire n'est pas synonyme de simplet, ce que tout bon connaisseur du champ sait depuis longtemps. Mais la complexité proposée dévie trop souvent du côté d'un décoratif stylisé propre à séduire les designers contemporains. Tout cela est un peu trop raffiné, trop propret, il manque une certaine âpreté, une certaine rugosité.

   

histoires de voir,fondation cartier,art naïf,art populaire,art brut,art immédiat,ciça,nino,abcd,art populaire brésilien,magiciens de la terre,nina krstic,yanomanis,huni kuï

Jean-Baptiste Jean Joseph, Pieuvre, 2001, drapeau en paillettes brodées sur tissu, 108x105,4 cm


     Il y a du déchet aussi dans cette sélection: pourquoi avoir sélectionné par exemple le Scherfig déjà cité, et Mamadou Cissé, avec ses villes imaginaires ennuyeuses parce que sérielles et répétitives comme des circuits imprimés, pâle copie de Bodys Isek Kingelez (révélé en Europe voici prés de 25 ans dans les Magiciens de la Terre là encore), voire proche du Français récemment exposé au Pavillon Carré de Baudouin à Paris, Marcel Storr? Pourquoi avoir choisi aussi cet artiste japonais, Tadanori Yokoo (ci-dessous un portrait de Loti truffé de cigarettes), qui ouvre le bal au rez-de-chaussée de la Fondation avec des pochades d'étudiant, des Douanier Rousseau parodiés, qui intéressent surtout les enfants amateurs du jeu des 7 erreurs)?Tadanori Yokoo.png

     On se sert aussi de la caution de Mme Nina Krstic, "directrice du musée des arts naïfs et marginaux" de Jagodina en Serbie, pour nous faire avaler la pilule de l'art naïf qu'on veut ici nous vendre, alors que les connaisseurs ont depuis longtemps la conviction que ce dernier musée rassemble des autodidactes en tous genres, la plupart très artistes bien plus que véritablement "naïfs" (comme c'est souvent le cas dans les pays slaves, où la confusion art populaire/art brut/art naïf/art singulier/art contemporain règne en maître). L'artiste qu'elle nous présente, Dragiša Stanisavljevic, "qui fait partie d'une famille d'artistes renommés du XXe siècle", comme elle dit, attire l'attention dans le catalogue et moins de visu dans l'expo, pratiquant une sculpture fort stylisée tendant au signe pur tant il cherche à réduire le nombre de ses lignes structurantes, mais on est là dans une recherche de simplicité qui laisse indifférent par manque d'émotion peut-être.

 

H de voir, Ciça, masque 2003.JPG

Ciça, exposée dans Histoires de Voir, encore une nouvelle façon de faire les visages...


   Par ailleurs certaines oeuvres également présentes dans cette expo fourre-tout sont en réalité des récits ou des représentations mythiques (exemple des dessins yanomanis fort passionnants comme ceux de Taniki par exemple), comme on les connaît chez les Aborigènes australiens, ou chez certains Amérindiens, ou Inuits (cela aussi est à rapprocher des Magiciens de la Terre où je me souviens que l'on pouvait voir, à la Grande Halle de la Villette, l'expo étant distribuée sur deux espaces, Beaubourg et La Villette, des dessins mnémotechniques supports de récits chamaniques). Cela fait un certain temps que les spécialistes ont repéré de ces images qui servent de support à des visions chamaniques, cosmologiques, étiologiques (les peintures indiennes en rouleaux verticaux comme supports de contes), voire médicinales (je pense aux rouleaux-remèdes éthiopiens qui avaient été montrés à l'expo Le roi Salomon et les maîtres du regard, Art et Médecine en Ethiopie, au regretté musée des Art Africains et Océaniens de la Porte Dorée).

     Signalons aussi la présence d'un sculpteur d'origine incontestablement populaire, brésilien, Nino, surnom de Joao Cosmo Félix Dos Santos, dont les animaux ultra stylisés, à peine dégagés du bois informe dont ils furent tirés, retiennent l'attention du visiteur au sous-sol de l'expo, je pense à un éléphant notamment, tellement réduit à sa plus simple expression qu'il finit par ressembler à une espèce de molaire. On est  là avec lui aux confins de l'art brut et de l'art populaire. A noter que des bustes de lui font également partie de la collection d'art brut ABCD à Montreuil.

 

Nino, joao cosmo félix dos santos, ds ABCD.jpg

Bustes de Nino (Dos Santos) sur le site d'ABCD ; non exposés à la Fondation Cartier

___

1. Une autre exposition qui se tint au Grand Palais à Paris, Brésil, Arts populaires, en 1987, paraît être aussi une source de cette expo à la Fondation Cartier. Y étaient notamment présents Nino et Ciça (dont un masque servait d'illustration au catalogue édité dans la revue L'Internationale de l'Imaginaire, n°8-9, printemps 1987).

L'exposition dure jusqu'au 21 octobre

25/08/2012

Hommage à Cecilia Gimenez, rénovatrice et profanatrice, massacrée par les journalistes

    Cecilia Gimenez, dame d'un âge avancé, à Borja en Espagne, repeignait depuis quelque temps, "restaurait", disent les média, un portrait du Christ datant du XIXe siècle, au reste assez banal, un Ecce Homo signé d'un certain Elias Garcia Martinez. Et voila-t-y pas que des bonnes âmes érudites de la région, probablement plutôt du genre bigot, s'émeuvent de ses exploits de peintre amateur devant ce que les media appellent un "massacre" de l'œuvre originale, pourtant vulgaire saint-sulpicerie ne pouvant causer le moindre début d'émotion chez un sincère amateur d'art. Mme Gimenez a en effet, tel Mr.Bean dans le premier long-métrage qui fut consacré à ses tribulations au cinéma (il modifiait en éternuant dessus puis en tentant de réparer son dégât, une toile célèbre de Whistler, je crois...), passablement modifié un portrait du Christ, réalisant involontairement un portrait assez singulier auquel l'œil s'attache en dépit des commentaires goguenards et crétins des journalistes (il ne faut pas se fier à la qualité médiocre – voulue? – de la reproduction ci-dessous, à la télévision on voit mieux l'image de Cécilia Gimenez).

 

massacre d'Elias Garcia Martinez, ecce homo.jpg

A droite la nouvelle oeuvre brute, plus frappante que l'original je trouve, due à Cecilia Gimenez

"Grossier dessin d'enfant", dit le commentaire journalistique dans la vidéo ci-dessus (plutôt moins agressive que d'autres de ses confrères)... Et pan sur les dessins d'enfant!

    Méconnaissable est le crapaud de Nazareth désormais... Mais pour combien de temps encore? Tous les journaux, le web, la télévision ont fait des choux gras de l'information, tombant à matraques raccourcies sur la pauvre octogénaire dont on apprend depuis quelques heures qu'elle est alitée, "victime de crises d'angoisse". Un beau résultat pour ces "grands professionnels de l'information"! Et bien sûr, on cherche à ricaner, à se gausser, à faire rire de cette dame, comme si on voulait, ce faisant, se décharger de la colère devant le constat de ce qui ressemble en fait ici à une profanation de l'icône christique, qui doit rester tabou, inviolable, immuable surtout. On veut que soit effacé le plus vite possible cet odieux saccage (avec l'octogénaire en prime?).

     Cependant une pétition circule déjà pour tenter de sauver l'oeuvre – car c'en est une – que je trouve pour ma part plus brute ou populaire qu'expressionniste, comme elle est qualifiée dans cette pétition. Courage Cecilia, relevez-vous, vous n'êtes pas seule, il n'y a pas que des détracteurs, ailleurs on vous admire!

 

Massacre, l'octogénaire créatrice.jpg

Cecila Gimenez


19/08/2012

Une sirène d'Armand Goupil

     Tenez, voici dans la chaleur de l'été une vue poissonneuse, une sirène en proue de barque, telle que l'a vue en 1955 Armand Goupil. Cela fait partie d'un carnet de croquis, format 31 sur 20 cm, comprenant 43 pages (et donc 43 croquis, tous datés de la même année, qui ont permis à Goupil d'essayer diverses techniques, autres que l'huile, comme les craies, le brou de noix, le fusain, les crayons de couleur, l'encre, la plume...). A rajouter à toutes les sirènes déjà vues sur cette colonne, et en espérant que mes commentateurs férus de Mami Wata ne s'échauffent pas plus que ça dessus...

 

armand goupil, sirènes, figures de proue, art naïf, art singulier

Armand Goupil, Sirène du 23-IX-55, coll Bruno Montpied

Je renvoie les amateurs, qui voudraient en voir et en savoir plus sur Goupil, à mes articles, « L’œuvre intime d’Armand Goupil, l’inconnu de la Sarthe », paru dans 303, Arts recherches, créations n°119, Nantes, janvier 2012 (illustré de 6 photos), et « Armand Goupil, peintre inconnu, peintre domestique », paru dans Création franche n°29, avril 2008, Bègles. Sur ce blog, on peut également en découvrir passablement en allant vers ce lien.


18/08/2012

Dans la clameur des invectives...

Dans-la-clameur-des-invecti.jpg

Bruno Montpied, Dans la clameur des invectives, il répond par la douce musique de sa petite flûte, est-ce possible?, 22 x 31 cm, technique mixte sur papier pur chiffon, 2010

15/08/2012

Cadavre exquis intercontinental Yohan-Armand Gil-Bruno Montpied-Dan Stanciu-Sasha Vlad

    Cela fait déjà quelque temps que je voudrais mettre en ligne le dessin ci-dessous réalisé à huit mains par les 4 auteurs susdits, venus d'horizons et de contrées divers, l'un d'entre eux (Sasha Vlad) vivant par delà l'Océan Atlantique, en Californie, ce qui permet de justifier l'adjectif d'intercontinental pour ce cadavre exquis. Le qualificatif de "cadavre exquis" n'étant pas au demeurant le terme exact, puisque ce dessin a été envoyé à compléter ou à prolonger sans que les parties déjà réalisées soient cachées. Il s'agit plutôt d'un dessin collectif réalisé par le biais de mails avec fichiers numériques (dessins scannés pour être communiqués sans passer par la Poste) et par des techniques plus matérielles aussi bien. C'est ainsi que l'état 1 est une photo numérique de Bruno Montpied  imprimée sur papier à Paris, envoyée à Sasha Vlad aux USA. Ce dernier l'a modifiée directement sur le tirage, puis scannée et transmise à Yohan-Armand Gil à Nîmes qui l'a à son tour modifiée après l'avoir imprimée. Il l'a transmise alors à nouveau à BM, et ainsi de suite, ce dernier l'a envoyée à nouveau à Sasha qui l'a enfin envoyée à Dan Stanciu en Roumanie, puis retour au départ. BM a ajouté un troisième grain de sel et continué à faire tourner le projet. Au bout de cette chaîne, il n'y a plus eu cependant qu'un fichier numérique qui peut se décliner potentiellement en d'innombrables tirages, et donc pas d'œuvre unique, en théorie.

 

1-mur-à-trois-visages.jpg

Mur à Villefranche-sur-Saône, Photo Bruno Montpied, 2009, état 1 du Cadavre Intercontinental

4-.Image-Sasha-modifiée-par.jpg

Etat 4 du Cadavre Intercontinental, modifié d'abord par Sasha, puis par Yohan-Armand Gil (qui l'a notamment retourné pour le continuer), 2009

5-Cadavre-Inter-par-BM.jpg

Etat 5 du Cadavre Intercontinental, modifié par BM, 2009

6,-Cadavre-modif2-parSasha.jpg

Etat 6, modification par Sasha Vlad

7,-cadavre-modif2-pa-rYA-Gi.jpg

Etat 7, modification Yohan-Armand Gil, 2009

8,-cadavre-modif-2par-DS.jpg

Etat 8, modification par Dan Stanciu, 2009

10,-cadavre-intercontinenta.jpg

J'annonce la fin des couffins et des boîtes à douleur, (titre collectif), état 10 final du Cadavre Intercontinental, Yohan-Armand Gil, Bruno Montpied, Dan Stanciu, Sasha Vlad, 2009


12/08/2012

Anne Van Der Linden à la Galerie Les Singuliers

    L'artiste me demande si je peux annoncer sa prochaine exposition "Amour vache" à la Galerie Les Singuliers à Paris. Oui, je peux. Et même, je peux vous communiquer le dossier de presse.

 

Sourires mexicains.jpg

On imagine que l'artiste s'est représentée dans le coin inférieur à droite, rigolant à ses propres mises en scène ; au passage, c'est ce genre de peinture qui a pu faire rapprocher Van Der Linden d'un Clovis Trouille, à cause des chauve-souris et du climat érotico-macabre goguenard


     Ce sera à partir du 21 septembre 2012, au 138, bd Haussmann dans le 8e ardt. L'occasion de découvrir un univers pictural situable entre Crumb et Topor, univers qui se présente comme une anthologie de situations érotico-cruelles déclinées dans une combinatoire visant à l'encyclopédisme où l'artiste s'amuse comme lorsqu'elle était enfant avec ses poupées (sur un mode qu'on imagine plus rose...). Le but du jeu étant de se surprendre à imaginer une situation choquante à chaque fois inédite.


05/08/2012

Pierre Sourisseau sculpteur de souvenirs en chemin creux

     J'ai découvert un nouveau site de création en plein air dû à un autodidacte encore en Vendée, dans le même département que celui d'André Pailloux, ce bon Pailloux qui est en passe de devenir célèbre désormais depuis que ses coordonnées ont été jetées  en pâture au public (inconsidérément, je ne le répéterai jamais assez).

 

pierre sourisseau,environnements spontanés,archéologie naïve,guerres de vendée,guerre d'algérie

Autoportrait du créateur Pierre Sourisseau en chef de chantier, ph. Bruno Montpied, 2012

         Le monsieur qui l'a créé depuis déjà quelque temps, depuis qu'il a pris sa retraite de maçon (encore un), s'appelle Pierre Sourisseau. Ses terrains où il a semé diverses sculptures et peintures, ainsi que des textes,  se situent dans la région des Herbiers, dans les terres donc. On peut donner son nom, car son travail, son œuvre, qui tiennent à la fois du mémorialiste et de l'artiste, tantôt naïf, tantôt réaliste (au point d'en être ici et là presque kitsch), sont assez particuliers pour qu'on tente de leur faire un peu de publicité. De plus, il a déjà fait l'objet d'une courte évocation dans un magazine diffusé à l'intention des retraités "entre Sèvre et Loire", le magazine Racines (article n°221 de juillet 2011 dû à Yvelise Richard).

 

pierre sourisseau,environnements spontanés,archéologie naïve,guerres de vendée,guerre d'algérie

Vue d'une partie du petit musée de Pierre Sourisseau, 2012, ph. BM

 

         Grosso modo, il y a trois zones d'intervention. La première est en intérieur, il s'agit d'un petit musée où dans deux pièces, situées dans un petit bâtiment en annexe de son habitation principale, on trouve des peintures, des sculptures, et des objets divers, des textes visant à fixer les souvenirs de l'auteur, notamment de sa participation à la guerre d'Algérie durant un an, dans l'Oranais. L'autre grand sujet qui fascine M. Sourisseau étant les guerres de Vendée, ainsi que les filiations qu'il entretient via la lignée de sa femme avec les acteurs vendéens de ces conflits de l'époque révolutionnaire, notamment avec un certain Charles Deslandes. Il a établi l'arbre généalogique de sa famille en lien avec cette histoire (arbre illustré d'un tableau naïf).

 

pierre sourisseau,environnements spontanés,archéologie naïve,guerres de vendée,guerre d'algérie

Pierre Sourisseau, peinture dans son petit musée, scène de la guerre de Vendée, ph.BM, 2012

pierre sourisseau,environnements spontanés,archéologie naïve,guerres de vendée,guerre d'algérie

Pierre Sourisseau, souvenir de la guerre d'Algérie

 

      Un parallèle curieux entre ces deux séries d'événements s'est esquissé par la suite en moi lorsque je revisitai les photos que j'ai faites de ces œuvres. C'est étrange comme les soldats républicains venant menacer les paysans vendéens dans certaine peinture de Sourisseau paraissent ressembler aux soldats français face aux Arabes d'Algérie. Il s'agit de semblables affrontements de soldats de l'état républicain face à des populations indigènes qu'il s'agit de mettre au pas. Pourtant, dans l'esprit de M. Sourisseau, ce parallèle est loin d'être patent, m'a-t-il semblé, Quoiqu'il ne m'ait pas donné son opinion à l'égard de la guerre à laquelle il avait participé ("sans tuer personne", ajouta-t-il tout de même, et fréquemment, pendant nos entretiens).

 

pierre sourisseau,environnements spontanés,archéologie naïve,guerres de vendée,guerre d'algérie

Le jardin de M. Sourisseau, au premier plan Charles Deslandes, l'ancêtre de la famille, le cavalier à l'arrière-plan, le Chevalier du Landreau, autre personnage historique régional et au loin, les bustes de Sarkozy et de sa femme Carla Bruni... Ph BM, 2012

pierre sourisseau,habitants-paysagistes,environnements spontanés,archéologie naïve,guerres de vendée,guerre d'algérie,poésie naturelle,féérie des bois,nature interprétée,art populaire contemporain

Pierre Sourisseau, Sarkozy et sa Carla, qui paraît représentée telle un pesant fardeau, ph. BM, 2012

 

     La deuxième zone concerne le jardin qui entoure sa maison et longe la route, d'où l'on peut apercevoir, si l'on ne passe pas trop vite, de la voiture, les quelques statues, point trop nombreuses, qui l'agrémentent avec sobriété.pierre sourisseau,environnements spontanés,archéologie naïve,guerres de vendée,guerre d'algérie

De haut en bas sur l'image ci-contre, Mitterrand, De Gaulle, Chirac, Sarkozy, Giscard, Pompidou, ph. BM, 2012

     La troisième zone s'étire sur près de 500 mètres, tout au long d'un chemin creux d'âge respectable, dont l'histoire fait rêver grandement l'auteur, qui passe devant sa maison et s'enfonce dans le bocage en direction d'une ancienne gare où allaient s'embarquer les appelés militaires, où passèrent aussi, à une époque encore plus ancienne, les Vendéens insurgés. Pierre Sourisseau, qui nous en fit faire la visite, tel un guide de monument historique, paraît toujours peu ou prou entendre les cliquetis des faux, ou des baïonnettes, ou les cris des hommes se pressant sur l'étroit et profond chemin chargé d'une histoire invisible à tout autre oeil que le sien.

 

pierre sourisseau,environnements spontanés,archéologie naïve,guerres de vendée,guerre d'algérie

Pierre Sourisseau devant sa "hutte gauloise" sur le chemin creux, ph. BM, 2012

 

      Le chemin égrène sur une très grande longueur (originalité unique à ma connaissance) des statues, taillées directement dans le bois des arbres (naïves et visionnaires) ou modelées dans l'argile (très, trop, réalistes), des installations du genre écomusée, bricolées en plein air par cet historien autodidacte, des panneaux explicatifs, des installations plus ludiques aussi à l'intention de ses petis enfants (une fusée qui décolle à la manivelle un peu plus bas dans le chemin). On y évoque pêle-mêle les Gaulois, des saints chrétiens (St-Roch), les guerres vendéennes encore et toujours, des figures politiques (Sarkozy, Ségolène Royal, séquelles de la campagne présidentielle de 2007), certaines plus régionales (des maires locaux). De temps à autre, comme émergeant du fond d'une mémoire ancestrale plus païenne, des figures féériques ou fantastiques, hélas trop rares, poussent vers le spectateur leurs trognes ou leurs corps de racines, ce qui je dois bien l'avouer m'enchante davantage que tout le reste.

 

pierre sourisseau,environnements spontanés,archéologie naïve,guerres de vendée,guerre d'algérie

Pierre Sourisseau, figure fantastique dans un arbre creux, ph.BM, 2012

 

      Pierre Sourisseau paraît ainsi hésiter, comme bon nombre d'autres autodidactes point trop sûrs de leur langage et déférents envers l'art savant, entre un réalisme de santons et un art naïf qui paraît d'emblée, en ce qui le concerne, correspondre pourtant à son langage naturel. Dans l'épaisse brochure de souvenirs qu'il a laissée derrière lui en 2008, il se recommande, comme pour asseoir une légitimité d'artiste qu'on pourrait lui contester puisqu'il n'a pas fait d'école, de l'enseignement et de l'appui d'un sculpteur local de monument aux morts, Yves Guiberteau. Parler de lui sur ce blog, qui est comme on sait acquis aux langages plus ingénus qui nous touchent davantage que les langages pompiers, pourra peut-être aider ce créateur original à choisir une voie plus en accord avec la langue féérique de la nature qui visiblement l'interpelle et nous enchante comme lui.

 

pierre sourisseau,environnements spontanés,archéologie naïve,guerres de vendée,guerre d'algérie

Pierre Sourisseau, au bout du chemin creux, avec son "Tractosaure", voiture-arbre... qui fleurit encore, ph.BM, 2012

 

03/08/2012

Age d'Or et Age de Fer

    Dans une note d'août 2008, parue au moment des précédents Jeux Olympiques qui se déroulaient alors à Pékin, j'évoquais le manque de réussite de la kayakiste Emilie Fer qui avait échoué à monter sur le podium. Et voici que quatre ans plus tard, cette dame ferrugineuse, en bonne alchimiste qui sait se révéler au moment décisif, a pu transformer en or le métal qui n'avait pas rouillé entre temps. Bravo à elle. Je n'ose pas écrire qu'elle a su repasser.

     A noter aussi que son nom qui pouvait être considéré comme un aptonyme, un nom prédestinant, qui pouvait influer sur la qualité de ses performances aux Jeux en 2008, est devenu désormais un contre-aptonyme puisqu'il l'a peut-être conduite à un dépassement, une transmutation.

 

Emilie Fer.jpg

Photo AFP


01/08/2012

Revue d'Olivier Hervy, avec un frontispice de Jean-Pierre Paraggio, une brassée d'aphorismes

    Edité en hors-série dans  la "collection de l'Umbo", en marge de la revuette L'Impromptu dont le n° 5 vient de sortir parallèlement (les deux publications disponibles chez Jean-Pierre Paraggio, 23, rue des Princes – y en a qui savent se dénicher des adresses pour chevilles enflées... – 31500 Toulouse, ou jeanpierreparaggio@yahoo.fr), voici une nouvelle brassée d'aphorismes d'Olivier Hervy dont j'ai déjà eu l'occasion par le passé de dire tout le bien que j'en pense, publiée sous le titre de Revue. Quelques exemples ci-dessous...

L'établi est un bureau qui n'a pas fait d'études.

L'entreprise Kodak qui est menacée de faillite risque de disparaître, comme pour parfaire son travail sur le souvenir.

Le saut de l'ange est la lettrine de la nage.

«Des ongles longs et vernis comme les siens elle doit passer des heures à les entretenir», me dit-elle admirative. Et les miens! Ils se rongent tout seuls?

Le marteau-piqueur est l'un des rares outils qui semble furieux. D'où son efficacité.

Etc...


28/07/2012

Création Franche n°36

    Sortie des presses au début de la grande période de transhumance des juillétistes et des aoûtiens, on peut dire que la dernière livraison de la revue Création Franche, émanant du musée éponyme, se soucie comme d'une guigne des périodes traditionnelles de publication. C'est une revue sur l'art contemporain marginal qui paraît à des périodes marginales, et c'est donc cohérent.

 

Sommaire CF n°36, juin 2012.jpg


     Au sommaire de ce numéro, j'ai avant tout retenu les interventions de la nouvelle directrice de la Collection d'Art Brut de Lausanne, Sarah Lombardi, sur Frédéric Bruly-Bouabré, ainsi que l'article de Déborah Couette sur le thème du voyage dans l'art brut à travers les errances et les fugues d'un aliéné nommé Albert Dadas, personnage qui m'avais moi-même frappé dans le livre de Ian Hacking, Les Fous voyageurs (édité en français voici dix ans chez Les Empêcheurs de Penser en Rond en 2002), et que Savine Faupin avait déjà cité en 2007 dans le texte "Le Voyageur immobile" du catalogue de l'exposition "Trait d'Union, Les Chemins de l'Art Brut (6) à St-Alban-du-Limagnole" (pp.66-67).

 

rené rigal,création franche n°36,albert dadas,déborah couette,savine faupin,art brut,chemins de l'art brut 6,sarah lombardi,bruly-bouabré,fous voyageurs,ian hacking

René Rigal, L'Africain détail de Si tous les gars du monde... (autre titre, selon Jeanne Ferrieu de la galerie La Menuiserie à Rodez: Les cinq races), bouquet de cannes sculptées représentant chacune un type humain différent (Asiatique, Africain, Européen...) et guettées à leurs pieds par une effigie de diable cornu, Musée Eclaté de Cardaillac, ph. Bruno Montpied, 2011 ; par la suite, cet ensemble de sculptures a été transporté à la galerie La Menuiserie, où on peut la voir durant cet été

 

     Pour ma part, je livre dans ce numéro un court texte, "René Rigal, hors des rails", à propos de ce sculpteur de branches hors du commun que j'ai déjà eu l'occasion d'évoquer dans la colonne de ce blog.

   J'aurai l'occasion dans les mois qui viennent de revenir avec plus d'informations et de photos au sujet de ce grand créateur originaire de l'Aveyron, malheureusement disparu en 2008.

25/07/2012

Pédophilie funéraire

Pédophilie-funéraire,.jpg

Ange à quatre pattes et cul nu sur un livre ouvert, décor de tombe d'enfant, Normandie, ph. Bruno Montpied, 2012

21/07/2012

Moi j'aime le Tour de France

    Il y en a certains que le sport défrise. Pas moi, je dois l'avouer. Pour ces spectacles, que ce soit le rugby, le cyclisme, éventuellement le foot, et bientôt les Jeux Olympiques avec l'athlétisme et tout le fourbi, je suis le plus souvent preneur. Comme les handicapés mentaux du MADmusée, je suis. On leur a proposé les champions du Tour de cette année qui partait de Liège et cela a donné des résultats qui paraissent de loin, à en juger seulement par la mosaïque d'images envoyées en pièce jointe, plutôt variés et rigolos. Ils sont sensibles avant tout au spectacle que donne le Tour avec ses champions, leurs harnachements (ce sont des hommes-sandwich au service de toutes sortes de marchandises, et cela donne des arlequins aux tenues des plus bariolées), leurs machines, leurs acrobaties sur la route, leur aisance à franchir (presque) tous les obstacles (même si c'est parfois à l'aide de quelques substances pas très catholiques). J'aime comme d'habitude ce que fait Yves Jules, son Thomas Voeckler d'Europcar est assez réussi. Tour de France qui passait cette année non loin de la Drôme et de son Palais Idéal, ce qui a permis à Jean-Paul Olivier, l'esthète de service de France-Télévisons, de sortir le nez de ses sacro-saintes chapelles et autres abbayes (l'alibi culturel du Tour) pour proposer à nos yeux médusés un petit sujet sur le chef-d'œuvre du Facteur Cheval. Les millions de téléspectateurs qui regardaient ce jour-là n'en sont pas encore revenus. D'ici à ce que dans un avenir plus ou moins proche on voit passer des concours de Pailloux équipés de vélos tous plus ébouriffants les uns que les autres, je n'en serais guère étonné.

 

Tour de France 2012.jpg

Exposition Tour de France / Portraits 2012 du 15 juin au 8 septembre 2012 au MADmusée

Madmusée, tour de france, cyclisme, rugby, yves jules, facteur cheval, palais idéal du facteur cheval

Le vélo hors catégorie d'André Pailloux en Vendée, 2010, photo Bruno Montpied


17/07/2012

Un boucher libéré

Boucherie D.Chainay, parisXe, avr 12.jpg

Près de la mairie du Xe ardt à Paris, 2012, ph. B.Montpied

     On tremble de faire ses emplettes en une telle échoppe, non? Vous ne voyez pas pourquoi? L'enseigne ne vous dit rien? Un boucher qui a brisé ses chaînes, pourtant, qu'est-ce que cela donne... Dès que l'on franchit le seuil de sa boutique peut-être couverte de sang du sol au plafond...

15/07/2012

Louis Soutter moins souterrain

"Il a appris à regarder en dedans. Par lui, nous pouvons regarder dedans un homme. Un homme racé, cultivé, ayant passé par tous les luxes de l'argent et une vie intelligente. Et qui aujourd'hui, remontant du réfectoire triste, couvre chaque jour, à soixante-cinq ans, un papier blanc de ces âpres, fortes et admirables compositions."

Le Corbusier, "Louis Sutter, L'inconnu de la soixantaine", dans Minotaure n°9, 1936 (Le nom de Soutter est orthographié par Le Corbusier sans le "o" à la manière du nom de l'aïeul de l'artiste, "celui qui fonda la Californie")

 

louis soutter,la maison rouge,musée denys puech,art moderne,art singulier,le corbusierLouis Soutter à Ballaigues dont il fuguait à l'occasion, semant ses dessins auprès de ses amis

     C'est un été Soutter à Paris et à Rodez. L'occasion d'en découvrir plus sur cet artiste qui dessina, peignit, expérimenta, après avoir été casé contre son gré dans un asile de vieillards dans le Jura suisse, à 52 ans tout de même, sous prétexte qu'il dépensait trop, et que sa famille, dont il dépendit matériellement (il ne faut jamais dépendre des familles matériellement), ne pouvait plus le souffrir (il fut une vingtaine d'années à leurs crochets cela dit, après avoir divorcé et être revenu des Etats-Unis où il avait quitté une carrière qui paraissait prometteuse). Le Corbusier qui était son cousin, "issu de germain", précise Benoît Decron le conservateur du Patrimoine au musée Soulages de Rodez, prit fait et cause pour lui, en écrivant en 1936, six ans avant sa mort, dans Minotaure un article qui eut un certain retentissement.louis soutter,la maison rouge,musée denys puech,art moderne,art singulier,le corbusier Il ne fit pas que cela puisqu'il essaya aussi de placer ses dessins chez des collectionneurs et dans des galeries, lui permettant d'exposer aux USA à Hartford en 1935 (j'emprunte mes renseignements biographiques à la chronologie de Marion Bonnet parue dans le catalogue de l'exposition "Les primitifs sont petits - Cahiers de 1923-1930 de Louis Soutter" au Musée Fenaille de Rodez). Cela dit, l'intérêt de Le Corbusier paraît s'être singulièrement rafraîchi lorsqu'il découvrit les peintures au doigt que Soutter se mit à produire à partir de 1937 (peut-être faute à l'arthrose), production qui il faut bien le dire a beaucoup fait pour sa gloire aujourd'hui en raison de sa force et son modernisme précurseur.

 

louis soutter,la maison rouge,musée denys puech,art moderne,art singulier,le corbusier

Louis Soutter, Le héros, (recto d'une feuille dessinée aussi au verso), exposé à La Maison Rouge, provient de la galerie Karsten Greve


      S'il eut une période de dessin plutôt académique dans sa jeunesse, pratiquant un réalisme imitant la perception rétinienne – il exerça en outre le métier de professeur de dessin ; il jouait parallèlement du violon dans des orchestres après avoir été l'émule et l'ami du compositeur Ysaye – c'est à partir de 1923, date à laquelle sa famille le relégua à l'hospice, qu'il commença véritablement à dessiner d'une façon qui retient aujourd'hui l'attention des esthètes, et notamment de ceux qui s'intéressent aux marginaux de l'histoire de l'art moderne.

 

louis soutter,la maison rouge,musée denys puech,art moderne,art singulier,le corbusier

Je crois que le titre de ce dessin est "Les premières primevères à Ballaigues"


      Après sa période académique, on distingue trois périodes dans sa production plus originale, les dessins de 1923 à 1930 exécutés sur des cahiers à papier quadrillé, seuls supports qu'il pouvait se procurer,  les dessins dits "maniéristes "de 1930 à 1937, et enfin les peintures aux doigts des années 1937-1942. Il disparut cette dernière année, et sans doute pressentait-il sa fin, et depuis longtemps, tant son œuvre paraît en être obsédée. Plusieurs photos de lui le montrent tel un squelette vivant, le visage incroyablement émacié, portant beau, toujours élégant, masquant peut-être sous un dandysme provoquant sa hantise du néant (voir photo en ouverture de cette note).

 

louis soutter,la maison rouge,musée denys puech,art moderne,art singulier,le corbusier

Louis Soutter, Voie latine et corps de fer, Prêtresses druides, expo La Maison Rouge, provient de la Galerie Karsten Greve


       Voir l'exposition de La Maison Rouge est une épreuve à dire vrai. On n'en sort pas rasséréné, si le besoin s'en faisait sentir. Le parcours aux œuvres fort bien choisies laisse un étrange souvenir de cabrioles et d'agitation contractée exécutées en contrejour sur un fond taché d'empreintes digitales, comme une danse macabre ombreuse. L'homme y est dépouillé jusqu'à l'os, on ne peut s'empêcher de faire le parallèle avec l'époque (je suppose que cela a été déjà remarqué), où la "solution finale" de sinistre mémoire commençait d'être mise en action par les Nazis dans leurs camps de la mort. Il y a peu de chances que Soutter entre 37 et 42 en ait été averti. Mais le parallélisme est troublant, comme s'il s'agissait d'une anticipation visionnaire.

 

louis soutter,la maison rouge,musée denys puech,art moderne,art singulier,le corbusier

Louis Soutter, Quatre femmes nues, période maniériste (entre 1930 et 1937), Musée Cantonal des Beaux-Arts, Lausanne

------

"Les primitifs sont petits – Les Cahiers de 1923-1930 Louis Soutter", exposition au Musée Fenaille du 16 juin au 14 octobre 2012. Un catalogue est paru à cette occasion avec des textes de Michel Thévoz, Louis Pons et Benoît Decron.

"Louis Soutter, Le tremblement de la modernité", exposition à La Maison Rouge dans le XIIe ardt de Paris, commissariat Julie Borgeaud, du 21 juin au 23 septembre.

Egalement : Fondation Le Corbusier, Paris, "Louis Soutter, dessins", du 15 juin au 15 septembre ; Fondation suisse (14e ardt de Paris) "Le Corbusier, Louis Soutter–croisements", Exposition + conférence, du 28 juin au 30 septembre 2012 ; Centre culturel suisse (Paris 4e ardt), "Météorologies mentales, œuvres et livres de la collection Andreas Züst", Exposition + conférence, jusqu'au 15 juillet 2012 (là, c'est trop tard...).


11/07/2012

Des peintures du sciapode au musée d'art naïf et d'art singulier de Laval

     J'entre par le biais d'une donation de 26 œuvres dans la collection permanente du Musée d'Art Naïf et d'Art Singulier de Laval, prestigieuse collection d'art naïf de très grande qualité qui ouvrit ses portes au public en 1967, après avoir été créée à partir des collections du peintre lui-même naïf Jules Lefranc. C'est dire que je n'en suis pas peu fier. En même temps que moi, plusieurs œuvres de Jean-Louis Cerisier, régional de l'étape (pour employer une métaphore en rapport avec l'actualité cycliste), entrent également au musée du Vieux-Château.

 

bruno montpied,art singulier,art naïf,musée d'art naïf et d'art singulier de laval,jean-louis cerisier,jules lefranc,alain lacoste,reumeau,miguel hernandez,germain van der steen,antoinette le fahler

Bruno Montpied, Une nuit en couleur, 31x24 cm, 1998, Musée d'art naïf et d'art singulier de Laval

bruno montpied,art singulier,art naïf,musée d'art naïf et d'art singulier de laval,jean-louis cerisier,jules lefranc,alain lacoste,reumeau,miguel hernandez,germain van der steen,antoinette le fahler

B.M., Le Malin, 24x32 cm, 2006, MANAS de Laval


       Ce n'est pas la première fois que des œuvres relevant de ce que l'on appelle "l'art singulier" (= "neuve invention" ou "création franche") entrent dans ce musée. Une importante donation d'Alain Lacoste a été ainsi réalisée il y a peu, avec une salle qui lui avait été temporairement entièrement consacrée. On trouve également, entre autres, des oeuvres de Sanfourche, Reumeau, Hernandez (cela dit rangé usuellement plutôt dans l'art brut), Van Der Steen, Jacques Trovic, Boix-Vives, Eva Lallement (dont il y a eu une donation complémentaire récemment), Martinez Albarez Rutila et Antonia Martinez, ou encore Antoine Rigal. L'action de l'attachée de conservation, liée à la municipalité de Laval, Antoinette Le Fahler, n'est pas étrangère à cet intéressant prolongement de la collection.

 

bruno montpied,art singulier,art naïf,musée d'art naïf et d'art singulier de laval,jean-louis cerisier,jules lefranc,alain lacoste,reumeau,miguel hernandez,germain van der steen,antoinette le fahler

Alain Lacoste, A fond le champignon, 2003, MANAS de Laval

bruno montpied,art singulier,création franche,neuve invention,art naïf,musée d'art naïf et d'art singulier de laval,jean-louis cerisier,jules lefranc,alain lacoste,reumeau,miguel hernandez,germain van der steen,antoinette le fahler

Antonia Martinez, Bombardement de tous les trônes d'Europe, terre cuite, 1989, MANAS de Laval

*

        J'insère ci-après la lettre que j'ai adressée à la ville de Laval lors de ma proposition de donation, qui précise en quoi à mes yeux elle se justifiait.

"Lettre d’intention en vue d’une donation

           Je souhaite faire donation de 26 de mes œuvres au musée d’art naïf et d’art singulier du Vieux-Château à Laval pour deux raisons principales.

          Je suis impliqué par mes dessins et autres peintures dans le corpus de l’art dit singulier (appelé aussi « création franche » au musée du même nom, situé à Bègles, Gironde) depuis de nombreuses années (depuis 1989 par exemple au Musée de la Création Franche, époque où j’avais participé à la première exposition collective de ce musée, intitulée « Les Jardiniers de la Mémoire », en compagnie de Pépé Vignes, Sanfourche, Alain Pauzié, Claudine Goux, Alain Lacoste, Chichorro, Noël Fillaudeau, Monchâtre, Claude Massé et Marcelo Modrego entre autres). D’autre part, je suis un fervent défenseur des arts spontanés et autodidactes, ce que j’exprime à côté de ma peinture dans de nombreuses publications disséminées dans des organes de presse et d’édition variés, depuis d’aussi nombreuses années.

         Dans ce cadre, j’ai été amené à citer plusieurs fois la collection du musée d’art naïf de Laval que j’estime particulièrement remarquable, de même que j’ai pu écrire des articles sur certains créateurs lavallois (Jean-Louis Cerisier, Serge Paillard). A mes yeux, l’art naïf de qualité d’une part, l’art brut d’autre part, dans leur filiation avec les arts populaires ruraux d’autrefois, sont les cousins, ou les ancêtres des artistes contemporains marginaux que l’on range dans l’art singulier. C’est pourquoi j’ai été amené à citer dans mes articles les créateurs naïfs, et par la suite singuliers, de la collection de Laval (par exemple dans « La poésie oubliée des peintres naïfs », Création Franche n°3, mai 1991, ou dans l’article « Laval » inséré dans le n°XLIX de la revue 303, 2e trim 1996, où, suite à une exposition à l’Orangerie de la Perrine de Jean-Louis Cerisier, je forge le terme « d’école lavalloise de figuration poétique » à propos des peintres Rousseau, Lefranc, Trouillard, Reumeau, Tatin, Lacoste, Blanchard, Cerisier, Paillard, etc.).

         L’évolution de la collection du Vieux-Château, ces dernières années, en direction de l’art singulier, me concerne par conséquent tout particulièrement, car elle confirme mes intuitions avancées dans le cadre de mes activités de critique et de peintre. C’est pourquoi je souhaite ardemment qu’y figurent à côté de diverses figures que j’admire mes propres œuvres.

Bruno Montpied"

08/07/2012

Gabriel Albert et Roger Lanzac

     Parmi les centaines de statues qu'a créées Gabriel Albert à Nantillé en Charente-Maritime, une d'entre elles, selon les auteurs de Gabriel Albert, l'univers poétique d'un créateur saintongeais¹, représenterait Roger Lanzac, ancien animateur de télévision, qui servit aussi de Monsieur Loyal dans la Piste aux Etoiles, émission consacrée au cirque. Je trouvais enfant que ce rôle du reste ne lui allait pas. Je ne voyais pas un Monsieur Loyal avec des valises sous les yeux aussi voyantes que les siennes. Tombant récemment sur un portrait dédicacé de Roger Lanzac, publié sur le savoureux blog de Laurent Jacquy, Les Beaux Dimanches, je me suis dit qu'il pourrait être fructueux de les confronter en images ici même.

Roger-Lanzac,-sa-tête-en-gr.jpg

Photo Bruno Montpied (détail), 2006

Photo dédicacée de R.Lanzac, blog Jacquy.jpg

Photo empruntée au blog Les Beaux Dimanches

   Il semblerait plausible de rapprocher le modèle et la statue, si l'on admet qu'Albert a accentué les traits caractéristiques du visage de Lanzac. Les sourcils de la photo sont nettement dessinés, Albert les a faits fournis. Les poches sous les yeux, qui étaient une véritable signature physique du présentateur sont bien visibles sur le visage de ciment. Les pommettes également sont rendues. Les proportions allongées de cette face lanzaquienne ont été aussi accentuées, par un souci d'expressivité ou simplement parce que Gabriel Albert voyait Lanzac ainsi, un homme à longue figure. Le dessin des lèvres assez sinueux a été de même bien relevé par le sculpteur-modeleur. Seul peut-être le menton, fort pointu chez Albert, a pu être exagéré par rapport au portrait original. Mais là aussi peut-être, on peut retrouver un désir albertien de caricature...


 

_____

1. Michel Valière, Fabrice Bonnifait, Thierry Allard, Yann Oury, Collection Inventaire du patrimoine n°266, éditions Région Poitou-Charentes et Geste Editions, 2011

03/07/2012

Des jardins de fantaisie populaire à Dives-sur-Mer (presque) tout l'été

affiche.jpg

      Je continue à présenter Bricoleurs de paradis (cette fois avec son réalisateur Remy Ricordeau), ainsi que mon livre Eloge des Jardins Anarchiques, le 10 juillet prochain à 20h à la Médiathèque Jacques Prévert de Dives-sur-Mer, dans le Calvados, ville où comme on sait se trouve la Maison Bleue d'Euclides da Costa Ferreira.

 

environnement spontanés,habitants-paysagistes,da costa ferreira,andré pailloux,emile taugourdeau,pierre darcel,roger jeanton,jean grard,céneré hubert,pierre clément,paul waguet,médiathèque jacques prévert,les jardins de fantaisie populaire,bruno montpied

Euclides da Costa Ferreira, détail au caméléon, dans les décors en mosaïque de "la Maison Bleue" à dives-sur-Mer, ph. Bruno Montpied, 2011 (pas dans l'expo)

       Cependant, il y a un bonus en supplément pour l'occasion, je prête également une petite exposition que j'ai conçue pour cette médiathèque, "Les jardins de fantaisie populaire", exposition prévue pour durer du 11 juillet jusqu'au 1er septembre.Emile-Taugourdeau,-masque-d.jpg Il y aura vingt photos de votre serviteur consacrées à divers sites d'inspirés du bord des routes (vingt sites différents: Châtelain, Litnianski, Jean Grard, Darcel, Taugourdeau, Calleja, Guitet, Gourlet, Escaffre, Pastouret, Clément, Licois, Le Breton, Bernard Aubert, Pailloux, Vanabelle, Jenthon, da Costa Ferreira, l'abbé Fouré, Bernard Roux),Clément,-un-schtroumpf,-boi.jpg plus quelques objets rescapés ou en provenance de divers sites (Taugourdeau, Pailloux, Clément, Céneré Hubert,Cénéré-Hubert,-Sans-titre-(.jpg Paul Waguet, René Jenthon, Donadello) et des affiches (des photos agrandies d'après le livre EJA). On pourra également se procurer  des exemplaires de mon livre en vente sur place (sous l'égide d'une librairie de Caen).Paul-Waguet,-sans-titre,-(r.jpg

 

Verso cart expo Dives.jpg


      Voici le texte qui est prévu pour accompagner l'expo (ici légèrement remanié):

       Le propos de cette petite exposition, montée en prolongement de la présentation le 10 juillet en cette même médiathèque de Dives du film de Remy Ricordeau, Bricoleurs de paradis (Le Gazouillis des éléphants), film inséré dans le livre Eloge des Jardins anarchiques de Bruno Montpied, est d’inviter à une balade et à une prise de conscience face aux créations de plein vent qui sont disséminées discrètement à travers le territoire de la France. Œuvres de gens du commun, le plus souvent commencées à la retraite, comme par un désir de clamer au monde que non, tout n’est pas fini, ces espaces « corrigés » sont variés. On rencontre ainsi des mosaïstes de bouts d’assiette, comme da Costa Ferreira, bien connu à Dives-sur-Mer, des jardins de statues naïves, des accumulations d’objets et de matériaux hétéroclites, des installations en maquettes de tanks, canons, ou monuments du monde entier réassemblés dans un nouvel ordre, des rochers sculptés, des branches interprétées, des arboretums semés de plaisanteries taillées dans le granit, un jardin comme un conte d’Andersen, une forêt de moulinets multicolores, le vélo extraordinaire, sculpture ambulante, de M. Pailloux en Vendée, un habitat troglodytique couvert de bas-reliefs, un autre à thématique mythologique, des jardins « zoologiques », etc.

A.Le-Breton-Accordéon,-bini.jpg

Aubade pour taureau (cornemuse, guitare, accordéon) par Alexis Le Breton, ph. BM, 2010 (pas dans l'expo)

         Les ouvriers, les artisans, les paysans s’abandonnent à leur fantaisie, dans un espace intermédiaire entre habitat et route, entre chez eux et chez tous, dans une sollicitation de leur imaginaire qui se déploie à la fois intimement, comme dans les œuvres de l’art brut, et pour être montrée au vu et au su de tous ceux qui passent (sans qu’il soit nécessaire d’entrer). Ils font de l’art, puisqu’ils sculptent, peignent, bâtissent, assemblent, collent, sans être pour autant des artistes (au sens convenu du terme, et notamment marchand). Ils le disent, ils sont avant tout des créateurs modestes, ne voulant pas se distinguer du commun des mortels, ils créent sur place pour se donner des fêtes à eux-mêmes et aux passants, dans une geste gratuite, toute de dépense sans autre contrepartie que la reconnaissance de ceux qui les visitent. Ils ne vendent généralement pas leurs travaux qui font partie de leur vie, ils se sont peut-être assez vendus comme ça durant leur vie de labeur. Ils se donnent le luxe de ne pas se lancer dans un petit commerce sur le tard. Ils ont une galerie en plein vent où il n’y a pas de marchandise (ou alors, très marginalement).

         Ils le savent, c’est le temps de la création qui est le meilleur de la vie.

        Da Costa Ferreira le savait, lui qui n’eut jamais d’autre richesse. Venez voir ses frères et sœurs qui sont plus nombreux que l’on aurait cru.

      Mais il ne faut pas oublier que la majorité de ces sites sont sur des terrains privés pas nécessairement ouverts aux visites. Dans ce domaine, il faudra faire preuve de tact et de respect à l’égard de créateurs atypiques montrant leur art sans inviter nécessairement à l'envahir…

L'inspiré menacé par les gros sabots

         C'est en raison de l'attention flottante, du côté "en l'air" de beaucoup de créateurs amateurs, qui sont des néophytes absolus en matière de communication, gens en général peu avertis des effets nocifs que peut avoir une information lancée sur internet (genre Facebook et ses 15 000 invités à des apéros tout à coup surdimensionnés) que je trouve totalement irresponsable l’idée de mettre leurs coordonnées sur la place publique (et internet est une place publique qui peut se révéler monstrueuse).

         Les inspirés qui créent pour leur plaisir sur le bord des routes, dans l’espace entre la route et leur habitat ne sont pas comme les artistes, toujours un peu cabotins qui ne demandent qu'à briller sous les sunlights...

      Avec l'amplification incroyable qui est désormais le lot de toute information passant par les médias modernes, on ne sait pas les conséquences fastes ou néfastes que cela pourrait avoir sur les créateurs amateurs, qui ne demandent au fond, comme public, que les passants de leur environnement immédiat (dans une sorte de parfait parallèle avec leur processus de création, œuvrant avec des matériaux de leur environnement immédiat là aussi). Ils ne songent pas forcément, dans leur modestie (oui, on peut les qualifier ainsi ; même leur mégalomanie possible reste modeste) à la terre entière, aux touristes en tous genres plus ou moins intéressés, passifs, consommateurs, moutonniers (dans consommateurs, il y a aussi « mateurs »).

         Dans le tas, il y aura peut-être bien des gens que cela passionnera et enchantera, mais l’information étalée devant tout le monde, que savons-nous si cela n'attirera pas aussi des vandales, des nuisibles qui aimeraient se payer par bêtise ces moulins? Internet n'a pas que des côtés positifs.

    Je me demande ce que cherche au fond celui (ou celle en l’occurrence…) qui publie à grands coups de trompe l’adresse d’un créateur modeste? Est-ce bien philanthropique, altruiste ? Ou bien tout au contraire n’entre-t-il pas dans ce geste un besoin plus secret, d’ordre pervers, d’aller jeter un innocent en pâture aux fauves de la médiatisation à outrance ? On voit bien à quelles conséquences dévastatrices mènent les réseaux sociaux type fesse-bouc.

       L’inspiré du bord des routes exhibe son travail en lisière de nos chemins, il est vrai. Mais c'est une exhibition pour passants immédiats, pour les voisins et les inconnus de passage à qui est tendue une main amicale. Je ne pense pas que ces créateurs s’adressent véritablement à la foule. Ils n’y songent absolument pas.

      Et c’est pourquoi il faut penser à leur place en cherchant à les garantir de l’assaut toujours possible de la multitude porteuse de « la bêtise à front de taureau » (comme disait je ne sais plus quel poète).

         Il est important de parler de leurs initiatives, ils nous en apprennent beaucoup sur ce que peut être une certaine créativité qui se déploie hors marché et hors système des Beaux-Arts. Il faut cependant filtrer, ne pas donner les adresses. Même donner les patronymes, cela peut être une lourde responsabilité (cela explique peut-être que pendant longtemps l'on n'ait pas connu autrement le nom de monsieur G., à Nesles-la-Gilberde). Personnellement, j’explique cela aux créateurs que je visite, en leur peignant les conséquences que pourrait leur apporter une trop grande médiatisation.

Le-couple-Billy,90,-(2).jpg         Un créateur que j'ai révélé au grand public dans les années 1990, via les journalistes qui reprirent son adresse à partir de mes articles, Charles Billy, dans le Rhône, à plus de 80 ans, vit défiler chez lui des milliers de personnes par été. Ce qui entraîna une crise cardiaque et sa disparition brutale. Il faisait la visite guidée à chaque groupe qui venait le voir... Il n'avait pas prévu le succès relayé par la voix amplifiée des média et qu'il ne pourrait plus suivre.

         A partir de là, j’ai commencé à réfléchir sur ce qu’il convient de divulguer en matière de coordonnées. Tous ces créateurs, au moment où leur œuvre atteint un certain volume, sont âgés, et parfois commencent à sérieusement fatiguer. Il me paraît évident qu’il faut faire attention à ne pas leur nuire.

         Les passionnés, avec les patronymes en leur possession, peuvent chercher par eux-mêmes les créateurs. Les "consommateurs", qui sont souvent paresseux, ne font pas l'effort de trouver l'adresse, et cela permet de freiner le trop grand flux de visiteurs qui pourrait être préjudiciable à nos amis du bord des routes.

         J’espère en conséquence que mon appel sera entendu par tous ceux qui ont des velléités d’étaler les coordonnées des inspirés sur la place publique, comme l’a fait récemment, par exemple, Mme Lepetit sur son blog Les grigris de Sophie au sujet d’André Pailloux. Il est facile d’obtenir de ce dernier, qui est un homme plutôt gentil et cordial, des consentements, y compris sur le fait d’étaler ses coordonnées (bien qu’à moi, comme je l’interrogeai récemment là-dessus, il m’ait assuré n’avoir donné aucune autorisation de ce type). Cela ne nous dédouane pas de nos responsabilités pour autant.

Ill: Pauline et Charles Billy, ph. Bruno Montpied, 1990

29/06/2012

Les latrines de Chaissac monuments historiques

     Il me semble que ce sont les premiers urinoirs classés monuments historiques. Il y avait bien eu le précédent de la "fontaine" de Richard Mutt, alias Marcel Duchamp en 1917 à New York, urinoir décrété objet d'art parce que signé, et refusé à la Société des Artistes Indépendants. Mais depuis... Sans doute quelques excentricités de l'art contemporain singeant ce geste dadaïste duchampien?  Duchamp, 3e réplique Fontaine MNAM.jpg

Fontaine, R.Mutt (Marcel Duchamp), 1917 ; ici c'est la troisème réplique datant de 1964, figure au MNAM du Centre Georges Pompidou

         En tout cas, y avait-il eu classement par les Monuments Historiques de latrines champêtres comme celles que Gaston Chaissac graffita à l'époque où, habitant avec sa femme dans l'école publique de Ste-Florence de l'Oie en Vendée dans les années 50, il s'exerçait à toutes sortes d'expérimentations, avec des enfants du patelin, avec des jets de serpillière mouillée dont il observait et reportait ensuite les empreintes, des interprétations de planches aux contours irréguliers qui devinrent des totems, des collages de morceaux de papier peint, etc.? Je ne crois pas. Mais c'est chose faite désormais. Le losange des Monuments Historiques trône imparablement sur le ciment grisâtre des chiottes sacrées. Je ne sais trop pourquoi j'ai trouvé que les bonshommes dessinés par Chaissac (j'aime surtout le personnage ventripotent ci-dessous) avaient l'air, à mon passage, de vouloir s'excuser devant une telle labélisation.

 

Chaissac,-les-graffiti-des-.jpg

Les fameux gogues divinisés... Ph. Bruno Montpied, mai 2012

Gaston-Chaissac,-graffito-l.jpg

Ce personnage ventripotent m'a tout l'air d'une représentation caricaturale de prêtre (voyez le chapeau), si bien qu'on peut facilement en déduire que placé ainsi sur le mur des latrines, il était destiné par Chaissac à ce que les enfants le souillent sans cesse en effigie... Manière de se venger des avanies infligées par les grenouilles de bénitier du patelin? Ph.BM

       Sans compter que l'école de l'autre côté de la petite cour a été métamorphosée dans le même souffle, on y a créé un espace Gaston Chaissac où l'on a scénographié la vie et l'œuvre du grand homme que la mairie, sous l'influence d'une nouvelle génération d'hommes et de femmes plus respectueuse de Chaissac que celle des années 50-60, a reconnu in fine opportunément, oubliant les persécutions et les moqueries des bigots et des péquenauds de Ste-Florence du vivant de Chaissac et de sa femme Camille, institutrice de l'école laïque dans une région où l'on envoyait les gosses en majorité dans les écoles dites "libres". On ne pourra s'empêcher de se dire qu'il est toujours, hélas, plus facile de reconnaître les artistes quand ils sont morts que lorsqu'ils vivent parmi nous.

 

Espace-Gaston-Chaissac,-anc.jpg

"L'Espace Gaston Chaissac"... Ph. BM

          Si l'on veut retrouver les autres créations de Chaissac, sortant de là, on aura tout intérêt à pousser jusqu'aux Sables d'Olonne où le Musée de l'Abbaye Sainte-Croix a eu la bonne idée de nous sortir pour l'été des pastels de Gaston, technique peu repérée il me semble dans l'œuvre du "Morvandiau en blouse bocquine". Ce musée conserve par ailleurs une documentation (des correspondances) et des oeuvres de l'artiste qui sont de première importance.

Musée de l'Abbaye Sainte-Croix, exposition Gaston Chaissac - Pastels, du 29 avril au 10 novembre 2012.


22/06/2012

Bricoleurs et jardiniers anarchiques au CDLA de St-Yrieix le 1er juillet...

 

eloge des jardins anarchiques,bricoleurs de paradis,environnements spontanés,st-yrieix-la-perche,cdla,astrid verspieren,paul-armand gette

     Je continue mes pérégrinations pour aller porter la bonne parole autour de mon livre Eloge des Jardins Anarchiques en présentant en projection le film de Remy Ricordeau que j'ai écrit avec lui Bricoleurs de Paradis.

eloge des jardins anarchiques,bricoleurs de paradis,environnements spontanés,st-yrieix-la-perche,cdla,astrid verspieren,paul-armand gette     Cette fois-ci, ce sera à St-Yrieix-la-Perche, dans le Limousin (Corrèze...? Non... en Haute-Vienne, voir le pan sur le bec reçu en commentaire ci-après...), le dimanche 1er juillet à 11h au Centre culturel Jean-Pierre Fabrègues (6, ave du Maréchal De Lattre de Tassigny), dans le cadre des  rencontres "Des jardins, de la botanique" organisées par Didier Mathieu et Astrid Verspieren et le Centre du Livre d'Artiste dont on consultera le programme complet ici. Il y aura une projection du film suivie d'un débat. Les créateurs populaires de décors dans les jardins vont entrer ainsi dans un haut lieu de l'art contemporain. Quelles réactions vont-ils rencontrer? Wait and see... A noter que ces rencontres donneront lieu à la publication d'Actes par la suite.